Carnet n°17 Traversée commune Livre 1 - Mondes obscurs
Récit / 2007 / La quête de sens
Traversée de l’Homme commun. L’Homme ordinaire et sa conscience obscure du monde. Existence inconsciente. Existence insatisfaite et résignée marquée par l’ignorance, la peur, l’aveuglement, l’illusion, le désir, l’égoïsme, la lutte, la rivalité, l’instrumentalisation du monde, l’immobilité, l’étroitesse, l’horizontalité, l’inconséquence, l’orgueil, l’insatisfaction et la solitude (plus ou moins avouées) et l’espoir…
Rivages
Tu es condamné à passer d’une rive à l’autre. Eternellement.
(1.1)
Risible
Tu entends le monde parler de l’Homme comme d’une fin en soi. Comme d’une perfection en marche. Et tu éclates de rire.
(1.2)
MONDES OBSCURS propose deux séries de fragments entrecroisées, SOMBRE IGNORANCE et QUÊTE DESESPEREE.
SOMBRE IGNORANCE
Traversée commune.
Traversée de l’Homme commun. L’Homme ordinaire et sa conscience obscure du monde. Existence inconsciente. Existence résignée marquée par l’ignorance, la peur, l’aveuglement, l’illusion, le désir, l’égoïsme, la lutte, la rivalité, l’instrumentalisation du monde, l’immobilité, l’étroitesse, l’horizontalité, l’inconséquence, l’orgueil, l’insatisfaction et la solitude (plus ou moins avouées) et l’espoir…
QUÊTE DESESPEREE
Traversée singulière.
Traversée de l’homme singulier. L’Homme aux marges du monde. Son rejet et sa haine du monde obscur. Et sa quête aveuglée du sens. Existence désespérée marquée par le dégoût du monde, la colère, l’incessant questionnement, la solitude, la tristesse, le mal-être et l’espoir d’un horizon plus lumineux…
En dépit de l’apparent cloisonnement entre l’Homme commun et l’Homme singulier (jugés à leur itinéraire, aux caractéristiques fondamentales de leur existence, à leurs essentialités*), cohabitent en chaque Homme le commun et le singulier qui se mêlent, se chevauchent et se combattent parfois. Au fil du chemin, l’un et l’autre prennent les rênes pour diriger les pas de la Traversée…
Deux types de lectures sont possibles. Une lecture alternée (lire les fragments sans se soucier de leur positionnement sur la page) ; une lecture spécifique (pour SOMBRE IGNORANCE, lire les fragments situés à gauche et pour QUËTE DESESPEREE, les fragments situés à droite).
SOMBRE IGNORANCE
Traversée commune
(à gauche)
QUÊTE DESESPEREE
Traversée singulière
(à droite)
L’une et l’autre se répondent,
s’opposent et se complètent parfois…
Préambule
Au fil du chemin, tu découvres le monde obscur.
Préambule
Au fil du chemin, tu découvres l’obscurité de l’être qui cherche aveuglément la lumière.
Singularité universelle
Ta vie est une histoire comme les autres. Une histoire commune. Aussi singulière.
(1.3)
Différence
Tu te sens différent. Tu prends quelques distances avec ce sentiment. Mais il reste vivace. Tenace. Tu te demandes si tu es la victime d’une perception déformée.
(1.4)
Encombrement
Tu traînes tes malles sur le chemin des jours.
(1.5)
Inassouvissement
Tu es un cœur avide. Rongé par le feu intérieur. Et dévoré par le brasier du monde. Où que tu ailles, tes pas s’enflamment. Tu ne chemines pas, le chemin te consume.
(1.6)
Funestes bagages
Ta vie est un voyage. Et tu te trompes de bagages.
(1.7)
Arpenteur affamé
Tu te promènes sur les chemins du monde. Tu découvres la boue qui embourbe les pas et les paysages qui ravissent l’œil. Ces rencontres aiguisent ta curiosité, ton appétit de savoir, ta faim de connaître.
(1.8)
Vagabondage
Tu te promènes. Tu cueilles. Tu flânes. Tu baguenaudes au gré des vents contraires.
(1.9)
Peine perdue
Tu avances l'échine courbée sous la désespérance et les coups du destin que tu as crû te forger. Tu es un pauvre diable. Tu fais pitié à voir.
(1.10)
Soumission
Tu te soumets à l'odieuse nécessité agissante.
(1.11)
Compulsion
Tu agis frénétiquement. L’excès d’énergie envahit ton corps, le tend et le presse d’agripper un objet pour y trouver un épuisement.
(1.12)
Aveuglement
Tu marches, insouciant et satisfait, vers l’abîme.
(1.13)
Asservissement
Tu cherches. Tu cherches. Inlassablement. Et tes misérables trouvailles aiguisent ta soif et ton désespoir.
(1.14)
Omission
Tu vis insoucieux du sens.
(1.15)
Oubli
Tu cherches le sens, insoucieux de vivre.
(1.16)
Crainte
Tu es voué à la peur. Tu œuvres sans relâche à ta protection. Tu échafaudes plans et stratégies pour assurer ta survie.
(1.17)
Fausse identité
Tu t’imagines fragile et vulnérable. Tu te méprends sur ton identité.
(1.18)
Temps fictionnel
Tu ignores la vérité du temps. Tu déroules le temps par crainte de l’incertain. A chaque instant, tu es absent à la présence.
(1.19)
Séquence temporelle
Tu déroules les instants juxtaposés du temps en les reliant entre eux. Et la juxtaposition de ces instants crée le film du temps. Le temps se déroule et devient fiction.
(1.20)
Enseignement
Tu apprends par nécessité. Et la nécessité abrite ta peur la plus fondamentale. Tu crains de disparaître.
(1.21)
Catégorique
Tu cherches, tu étudies, tu apprends, tu mémorises. Mais tu oublies de ressentir. Tu ignores que les vérités ne s’apprennent mais se ressentent.
(1.22)
Défi angoissant
Tu ignores la destination. Tu cherches en tâtonnant. Tu éprouves une immense angoisse. Tu hausses les épaules, tu lèves les yeux au ciel et tu relèves le défi.
(1.23)
Courage
Tu te sens dérisoire devant l’immensité du monde. Fragile devant les dangers qu’il recèle. Tu imagines ton importance. Et tu cherches la force d’aller sur les chemins.
(1.24)
Vertige
Tu te laisses dérouter par le tourbillon du monde. Tu luttes. Mais tu ne peux y échapper.
(1.25)
Premier mouvement
Tu te penses dans le monde. Ta première démarche. Tes premiers pas sur le chemin.
(1.26)
Engloutissement
Tu es absorbé par le monde. Déjà acquis à sa cause. Tu es un piètre guerrier qui rejoint l’armée des ombres. Tu signes l’armistice avant la guerre.
(1.27)
Dynamique
La nécessité intérieure te pousse à emprunter un chemin singulier. Elle te contraint à choisir une direction. Elle t’oblige à satisfaire tes aspirations et tes exigences les plus fondamentales.
(1.28)
Eclats trompeurs
Ebloui par les lumières du monde, tu arpentes l’obscurité.
(1.29)
Obscure lumière
Ta conscience opaque et ton cœur noir aspirent à la lumière. Mais les forces obscures* te gouvernent.
(1.30)
Inconscience
Tu ignores la conscience.
(1.31)
Conscience multiple
Tu as conscience de vivre, tu as conscience d’exister, tu as conscience d’être. Et après ?
(1.32)
Mariage
Tu marches à la traîne de ton inconscience. Tu en es le fidèle garçon d’honneur.
(1.33)
Noces fluviales
Ton inconscient impulse la majorité de tes actes (et de tes actions). Il constitue le moteur principal de ta traversée. Et ta conscience en est le pitoyable gouvernail qui s’évertue (maladroitement) d’en accentuer ou d’en atténuer la trajectoire et le mouvement.
(1.34)
Œillères
Tu te soumets (à ton insu) aux conditionnements qui asservissent ta perception.
(1.35)
Mauvais cavalier
Tu enfourches ton cheval d’ignorance. Et tu galopes vers les contrées communes. Tu traverses les paysages en barbare belliqueux.
(1.36)
Forces mystérieuses
Tu évolues dans un monde et des univers. Tu rencontres des êtres et expérimentes des situations. Tu es traversé par des pensées, des émotions et des sentiments. Ces évènements intérieurs et extérieurs se manifestent à ton insu. Tu n’as pas la force de leur résister.
(1.37)
Conflits
Tu ne cesses de te heurter à l’étrange, difficile et incontournable rapport au monde.
(1.38)
Indissociabilité
Tu ignores que tes gestes portent en eux le Bien et le Mal. Tu agis sans parvenir à trouver l’attitude juste.
(1.39)
Paradoxe universel
Il t'arrive d'être diaboliquement vertueux. Et d’être sacrément diabolique. Tu es un Homme. Comme les autres.
(1.40)
Réactivité
Tu n’agis pas. Tu réagis au monde.
(1.41)
Abri
Tu te déverses. Tu évacues sur le monde tes miasmes puants. Tu ressens un maigre soulagement. Le monde te les renvoie avec véhémence. Tu l’inondes de colère. Tu te sens misérable. Tu gagnes le premier abri de fortune pour y faire sécher ta tristesse et ta rancune.
(1.42)
Spectacle monétaire
Tu gagnes. Tu perds. Tu te laisses berner par les deux faces de la même pièce. La mauvaise pièce à laquelle tu t’adonnes sur la scène du monde.
(1.43)
Espérance
Tu crois que la joie, le bonheur et la paix te sont destinés. Et qu’ils s’attrapent avec effort et labeur.
(1.44)
Humilité
Tu t’enorgueillis de tes succès. Mais jamais tu ne te poses la question de ta place dans l’univers. Jamais tu ne te juges à ta vraie mesure.
(1.45)
Adultes infantiles
Tu regardes les adultes. Et tu ne vois que des enfants ignares et immatures qui jouent à faire semblant de savoir.
(1.46)
Prison
Ton regard t’enferme.
(1.47)
Ponts
Accoudé à la balustrade, tu regardes le grand fleuve s’étirer. Et tu t’interroges sur les ponts. Tu te demandes s’ils permettent de rapprocher les hommes.
(1.48)
Intelligence
Tu n’es pas idiot. Tu ignores.
(1.49)
Inintelligibilité
Tu ne peux accéder à la vérité. Et tu comprends que seule l’intelligence peut t’amener à comprendre cette vérité.
(1.50)
Errance
Tu cherches partout le chemin qui t’échappe. Tu t’égares.
(1.51)
Absurdité
Tu regardes autour de toi. Et tu vois l’absurdité du monde et l’agitation maladive des Hommes. Tu regardes en toi. Et tu y découvres la même absurdité et la même agitation. Tu t’en désoles. Et tu ne sais qu’en faire.
(1.52)
Crédulité
Tu crois avancer. Tu piétines. Tu t’enlises.
(1.53)
Enlisement
Tu enfouis la tête à mille pieds sous terre.
(1.54)
Insignifiance
Ta vie est une équipée bruyante et dérisoire dans le désert du monde.
(1.55)
Apprentissage
Tu apprends à arpenter la terre en silence. A fouler le territoire silencieux.
(1.56)
Eparpillement
Tu t’éparpilles à la surface du monde.
(1.57)
Questionnement
Tu es au monde. Bien sûr. Mais tu te demandes comment l’être.
(1.58)
Soumission
Tu rêves de soumettre la vie à tes désirs.
(1.59)
Déceptions
Tes rêves te déçoivent. Ils n'aspirent qu'à satisfaire ta volonté.
(1.60)
Progrès
Tu aimes le progrès. Tu apprécies le confort, la vitesse et la satisfaction immédiate de tes désirs. Tu aimerais que le progrès abolisse la distance, réduise la matérialité, repousse et transcende les limites qui te confinent à la lenteur et à l’effort. Mais tu ignores que le progrès ne peut t’aider à franchir tes limites intérieures.
(1.61)
Eloge de la lenteur
Tu détestes la vitesse. Elle porte une violence qui te terrifie. Tu abhorres ce monde qui la porte au pinacle. Tu rêves de lenteur. Tu y vois un antidote, un remède, une réponse à l’incessante fuite en avant des hommes.
(1.62)
Irrésistible attrait
Tu es affublé d’un goût immodéré pour les honneurs et les plaisirs.
(1.63)
Quête
Tu constates que chaque Homme est en quête de son propre bonheur. Quête communément répandue depuis la nuit des temps. Tu remarques que beaucoup plus rares sont les chercheurs de Vérité.
(1.64)
Chimères
Tu brigues le pouvoir, la richesse, le plaisir, la reconnaissance, le bonheur. Tu poursuis tes chimères.
(1.65)
Exclusion victorieuse
Tu es étranger au monde. Tu es paria de l’univers. Et tu t’enivres de ton impuissance.
(1.66)
Existence soldée
Tu es un Homo Consommatorus (satisfait et non remboursé). Fervent adepte de la consommation de masse, tu vis en solde. Tu payes le prix de cette vie au rabais.
(1.67)
Divin commerce
Tu entres dans un supermarché. Tu déambules au cœur de l’édifiante cathédrale (cathédrale de la consommation). Entouré par la foule des fidèles, tu vois les bigots (par centaines) s’agenouiller devant l’autel.
(1.68)
Cécité visible
Tu es aveugle. Tu ne sais réellement voir avec les yeux du cœur.
(1.69)
Affliction
Tu es vaniteux, craintif, égocentrique, inauthentique, frénétique. Ces caractéristiques t’affligent et te désespèrent.
(1.70)
Âme possessive
Tu t’appropries les êtres, les choses et l'espace. Tu œuvres à tes ambitions expansionnistes.
(1.71)
Voies progressives
Tu aimerais améliorer le monde. Mais tu ne sais comment t’y prendre. Tu vois certains s’engager sur la voie collective. D’autres sur la voie individuelle. Toi, tu hésites. Tu as l’intuition que les secondes finissent toujours par se mêler aux premières.
(1.72)
Facture
Tu revendiques ton statut et ton rôle. Tu te payes l'illusion d'exister.
(1.73)
Exil
Partout, tu te sens étranger. Etranger au monde. Etranger à toi-même. La vie-même te laisse un goût d’étrangeté.
(1.74)
Désespérance
Tu rêves de ciel étoilé. Et tu t’endors sur un tas de fumier.
(1.75)
Tour merdique
Du haut de ta tour, tu regardes le monde se complaire dans sa fange.
(1.76)
Imprudence
Tu négliges ton malheur.
(1.77)
Appétit
Tu t’interroges. Tu lis beaucoup. Tu cherches des réponses. La médiocrité des livres t’afflige. Tu désespères de ne rien trouver. Ce jeûne t’est insupportable.
(1.78)
Stagnation
Tu immobilises ton humanité.
(1.79)
Mystérieux périple
Tu t’étonnes de l’étrangeté de la vie. Elle demeure pour toi un merveilleux et déroutant voyage.
(1.80)
Mauvaise appréciation
Tu adules les faux héros – ceux des films, des romans et de la vraie vie. Tu aimes tous ceux qui traitent avec succès leurs petites affaires. Et tu méprises les vrais héros qui n’ont plus d’affaires à traiter.
(1.81)
Bâton de voyage
Les livres ne te sont d’aucun secours. Tu trouves, de temps à autre, une phrase que tu transformes en bâton pour traverser les paysages. A l’orée d’un carrefour ou à la croisée des chemins, le bâton te glisse des doigts. Et tu avances de nouveau seul (et sans appui).
(1.82)
Deux voies
Tu admires l’activité des scientifiques qui améliorent le sort du monde et de ses habitants. Mais tu ignores l’œuvre des artistes, des poètes et des mystiques qui aident l’humanité à trouver un sens et une dimension salvatrice.
(1.83)
Minuscule fragment
Tu visites les musées. Tu fréquentes les bibliothèques. Et tu ne vois dans chaque œuvre qu’une infime parcelle du réel. Tu sais qu’aucune ne peut représenter la réalité dans sa complexité et son incessant mouvement. L’art, à tes yeux, est un échec cuisant. Une représentation partiale, fragmentaire et mensongère du réel.
(1.84)
Potentialité
Tu ignores que tu portes le même potentiel que celui que tu prêtes à l'être extraordinaire, celui que tu attribues à l'élite et à la figure archétypale du héros.
(1.85)
Blâme
Tu es condamné à être un être vil. Tu es arrogant et médiocre. Tu en as conscience. Et tu t’apitoies sur ton sort. Tu portes ton égotisme comme un fardeau. Comme un paysan trimbale un sac de mauvais légumes dont il sait qu’il ne pourra tirer qu’une mauvaise soupe.
(1.86)
Etre
Tu n’as qu’un seul rêve : ne jamais cesser d’être.
(1.87)
Glace réfléchissante
Le monde est un étrange miroir où tes travers sont mille fois grossis.
(1.88)
Continuation
Tu procrées. Tu aimerais continuer à être un peu à travers ta descendance.
(1.89)
Gâchis
Tu es un être limité. Et tu ignores ton potentiel.
(1.90)
Prolongement identitaire
Ta descendance représente, à tes yeux, une (rassurante) excroissance de toi-même. Une preuve de ton passage (ici-bas) et une assurance contre ta finitude. Une tentative de réponse désespérée à ton désir (inconscient) d’immortalité.
(1.91)
Rêve lointain
Tu éprouves tant de haine à ton égard. Tu rêverais de pouvoir t'aimer pour, un jour, apprendre à aimer le monde.
(1.92)
Asile à venir
Tu espères trouver un refuge lointain. Et à chaque instant, tu procrastines.
(1.93)
Fractionnement
Tu fractionnes le temps avec maladresse. Tu le découpes en segments activitoriaux. Tu dors, tu travailles, tu te reposes, tu lis, tu manges. Tu le fragmentes en segments événementiels. Tu divises l’avant et l’après. Tu pars en week-end, tu pars en vacances, tu fêtes un anniversaire. Tu le fractionnes en segments émotionnels. Tu t’ennuies, tu es en colère, tu es déprimé. Et tu as l’illusion de la durée. Tu solidifies ta représentation du temps. Tu l’appréhendes comme un flux linéaire, une succession de périodes que tu enchaînes les unes après les autres.
(1.94)
Boulet
Tu cherches la liberté. Et tu t’enchaînes au monde.
(1.95)
Affrontement
Tu crois te confronter au monde. Mais tu ne te frottes qu’à toi-même.
(1.96)
Limites
Tu bornes ta vie à un horizon étroit.
(1.97)
Réactions ordinaires
Toute rencontre avec l’homme ordinaire provoque chez toi maints sentiments. Tu éprouves une infâme pitié et un farouche mépris pour la médiocrité. Tu éprouves une colère démesurée pour celui qui désapprouve ton chemin et une étonnante bienveillance quand le monde s’évertue à reconnaître tes qualités.
(1.98)
Délimitations
Tu enclos tes frontières.
(1.99)
Arasement
Tu souffres d’un complexe de supériorité que la vie ne cesse d’araser. Depuis tes plus jeunes années, elle te soumet inlassablement à des activités extérieures et à des rôles dévalorisants et dégradants et confine tes initiatives et entreprises à une longue série d’échecs et d’insuccès.
(1.100)
Moisson
Tu marches dans le vent. Tu sèmes. Et tu attends la récole. En vain.
(1.101)
Prisons
Tu es timoré par la crainte du monde et effrayé par l’effort à déployer pour échapper à ses tristes règles.
(1.102)
Egarement
La vie te déroute. Tu ne cesses de tourner en rond.
(1.103)
Malheurs
Tu poursuis ta route avec quelques indestructibles parts de toi-même : le mécontentement, l’insatisfaction, la haine (de tout et de tous), l’égoïsme. Tu cherches obstinément. Obsédé par ta seule quête. Ton impossible quête. Et tu es malheureux. Tristement malheureux. Tu sais que seules quelques gouttes de malheur tombent sur toi. Tu sais que d'autres souffrent infiniment plus. Tu les vois trempés d'une pluie froide qui inonde chaque parcelle de leur corps, de leur tête et de leur cœur. Et tu les vois demeurer stoïques, ou fatalistes, ou emplis d'espérance et de foi dans cet océan de détresse.
(1.104)
Voyage
Tu franchis l’horizon de territoires illusoires.
(1.105)
Contrées fantomatiques
L'ennui teinte tes frétillements horizontaux. Tu découvres l'absurdité et l'incompréhension. Tu sens l’imminence de la chute, l’approche du désert. La longue route de solitude et de silence qui s’annonce. Les contrées fantômes, la déréliction. L'incompréhension. L'horreur. Le désespoir. L'amertume. L'oubli. La mort peut-être comme vain et ultime remède à tes souffrances.
(1.106)
Anesthésie
Tu ensommeilles ta conscience dans les vapeurs distractives et divertissantes.
(1.107)
Bêtises
Tu t’abreuves (parfois) jusqu'à la lie d'innommables niaiseries devant la misérable boîte à images.
(1.108)
Certitude
Un jour, tu quitteras ce monde. Mais tu n’en as pas vraiment conscience.
(1.109)
Faits divers
Tu regardes la mort avec désinvolture. Tu oublies ton propre spectre.
(1.110)
Bulldozer
Tu émiettes les monticules. Tu démantèles les bosses. Tu combles les interstices. Tu remblaies les ornières. Tu égalises le chemin. Tu aplanis la surface. Tu arases ton existence.
(1.111)
Chute
Ta souffrance se transforme en détresse. Tu sombres dans la détresse. Tu es sans activité. Aucun faire* auquel te raccrocher. Tu t'agrippes, tu résistes, tu luttes pour ne pas glisser. Et tes ongles ne trouvent que le vide auquel s'agripper. Tu glisses. Tu sombres dans un abîme sans fond.
(1.112)
Carapace
Tu te protèges du monde. Tu œuvres à ton insensibilité.
(1.113)
Mort salvatrice
Tu esquives la souffrance, tu fuis les soucis et les difficultés. Tes plans sont pitoyables. Et ta vie absurde. Tu ignores la mort qui te délivrerait de l’absurdité et des vaines préoccupations.
(1.114)
Maladresse bornée
Tu juges avec maladresse l’insignifiance des jours.
(1.115)
Savoir apparent
Tu crois connaître le monde. Tu n’en perçois que l’apparence.
(1.116)
Conflit
Tu aimerais changer. Et tu crées la violence. Ton psychisme est le territoire d’un conflit acharné entre l’existant et le fantasmé.
(1.117)
Colère
La colère te submerge. Elle est puissante, implacable, dévastatrice. Elle brise tout sur son passage. Ta bonté vacille et tombe. Emportée au loin, elle s'écrase, anéantie. Tu n'es plus un homme. Tu es devenu un monstre.
(1.118)
Désert
Personne n'entend ton cri désespéré. Personne. Ni au dehors, ni au-dedans.
(1.119)
Plaintes
Tu te plains. Tu ne cesses de te plaindre. Comme tous ceux qui souffrent. Et comme tous ceux qui souffrent, tu es incapable d'accueillir ta souffrance. Tu te plains pour alléger le fardeau qui te courbe l'échine, pour l’expulser, pour que l'on t'aide à le porter. Tu te plains toujours pour des tas de raisons. Et tu n’invoques que de mauvaises raisons.
(1.120)
Rencontre
Tu rencontres l’Autre. Et tu ne cesses de te heurter à ton ombre.
(1.121)
Suspicion
Ta solitude te rend suspect. Le monde te perçoit comme un être indigne de toute compagnie. Tu te demandes pour quoi les hommes ne s'interrogent jamais sur l'indignité de leur compagnie.
(1.122)
Malédiction
Tu as le malheur de te croire important.
(1.123)
Incapacité
Tu n’es affublé d'aucun don particulier, mais tu es en vie et humain. Et tu ne parviens à t’en émerveiller.
(1.124)
Ignorance
Tu es aveugle. Tu ignores l’essentiel.
(1.125)
Rage
Tu enrages de l'infamie et de la bêtise du monde.
(1.126)
Gibier
Tu es un prédateur avide de débusquer quelques proies faciles (une carrière, une conquête amoureuse, un succès…). Tu es piégé par tes propres appâts.
(1.127)
Animosité
Les hommes t’agacent. Tu les trouves stupides et indignes de vivre. Ils te font penser à des animaux ignobles et méprisables (et Dieu sait que tu aimes les animaux).
(1.128)
Centrifuge
Tu es le centre du monde. Petit monde étroit et déformé où tu apparais démesuré.
(1.129)
Œillères
Tu réagis à partir de ton centre. Cette déformation et ce décalage sont tes œillères et tes entraves. Ils t’empêchent d’emprunter un autre chemin du regard.
(1.130)
Curiosité
Tu contemples, à travers le monde, ton propre reflet. Tu es étranger à toute curiosité gratuite.
(1.131)
Porosité
Ta perméabilité aux êtres te stupéfait. Tu es si poreux. A l’Autre. A ce qui te semble extérieur. Idées, mimiques, tics langagiers, façons d’être, comportements te percutent et te traversent. Et subsistent en toi quelques traces, infimes ou substantielles qui alimentent toutes les couches de ta personnalité.
(1.132)
Elément séparé
Tu solidifies ta séparation et ton identité. Tu vis en entité autonome attachée au monde. En être de solitude en proie aux difficultés liées à son appartenance au collectif.
(1.133)
Identification
Tu te mets à la place des autres. Tu te projettes égocentriquement.
(1.134)
Solitudes reliées
Tu es un être de liens et de solitude. Un grégaire solitaire. Et un égoïste solidaire. Selon les circonstances.
(1.135)
Ambivalence
Tu es seul. Et avec eux. Tu ne comprends cette énigme. Tu aimerais percer le mystère fondamental de ta condition.
(1.136)
Oubli fondamental
Tu oublies que tu es relié au monde. De mille manières.
(1.137)
Montée abyssale
Tu remontes vers les origines. Et tu t’égares dans l’abysse.
(1.138)
Grande affaire
Absorbé par tes affaires dérisoires, tu ignores l’affaire universelle.
(1.139)
Histoire d’egos
Tu observes le monde depuis la nuit des temps. Et tu remarques que l’histoire de l’humanité est (en grande partie) le résultat des soubresauts successifs des histoires personnelles, composées essentiellement de manigances, de ripostes, de vengeance et de manœuvres d’egos craintifs et frustrés.
(1.140)
Encerclement
Tu es cerné par la nuit obscure. Et tu désespères de voir se lever le soleil.
(1.141)
Silence désertique
Autour de toi s’étend le désert des Hommes où la seule réponse à tes cris est l’écho des dunes. Nul à la ronde pour entendre ton appel désespéré.
(1.142)
Tâtonnement
Tu vis sans bruit parmi les ombres dans le silence de l’ignorance.
(1.143)
Fugues dérisoires
La beauté symphonique du monde t’étonne. Tu entends les petites mélodies des hommes qui bruissent dans le vent. Tu entends leurs notes légères qui s’égarent sur la surface du monde et se perdent dans le silence de la nuit.
(1.144)
Abscisse
Tu vis à l'horizontal. Point zéro de la verticalité.
(1.145)
Course folle
Tu ne cesses de courir à la surface du monde. Tu ne sais te hâter avec lenteur vers les abysses du cœur.
(1.146)
Certitude
Tu connais la destination. Mais tu ignores le but du chemin.
(1.147)
Erg
Tu cherches la joie, l’exaltation, la plénitude et la paix. Et tu t’égares dans l’espace désertique.
(1.148)
Fantasme universel
Tu es victime du fantasme universel. Tu aimerais continuer à être à perpétuité.
(1.149)
Drame
Tu es comme tu aimerais ne pas être. Et tu n’es pas comme tu aimerais être. Voilà ton dilemme. Ton pitoyable dilemme. Tu t’apitoies. Tu ris de te voir si faible et si désemparé. Ta situation est désespérément risible. Et tu t’y complais. Tu t'y vautres avec délectation. Cet état t’exaspère et te rend plus désespéré encore.
(1.150)
Course folle
Tu t’égares à la surface du monde.
(1.151)
Mirage
Tu fais halte à tous les oasis. Tu te désaltères aux puits de la reconnaissance, de l’amour, de la gloire, de la richesse, du sexe, du pouvoir, de la drogue, du jeu. Tu t’abreuves de mirages. Et tu négliges le regard qui ouvre l’horizon des jours ordinaires où la joie, l’exaltation, la plénitude et la paix sont présents à chaque pas.
(1.152)
Rétrécissement
Tu rétrécies le monde à une infime partie des êtres qui le composent. Tu t’en contentes. Et nul ne s’en étonne.
(1.153)
Progression
Tu songes au bonheur de ton existence douce et tranquille. Tu apprécies la paix entre les peuples. Tu bénis cette époque d’apaisement et d’harmonie. Tu es un farouche partisan de la liberté et des droits de l’homme. Tu défends avec opiniâtreté les serviteurs de la paix et tu combats avec conviction les armées de militaristes sanguinaires qui peuplent ce monde. Tu crois appartenir à l’armée des justes. Mais tu ignores l’injustice de ta position.
(1.154)
Edifice
Tu œuvres à la construction d’un destin plat et sans profondeur.
(1.155)
Basse besogne
Tu sais que l’insecte a sur l’homme un avantage. Il travaille à son œuvre sans rechigner.
(1.156)
Veulerie
Tu n’oses réfléchir à l’étroitesse bornée de ta vue auxquels te confinent tes œillères.
(1.157)
Confusion
Tu aimes analyser, distinguer, catégoriser, séparer, cloisonner. Tu crois clarifier le réel. Tu le fragmentes. Tu crois t’approcher de la vérité. Tu t’en éloignes. Tu crois démêler le complexe. Tu t’embrouilles.
(1.158)
Monde unique
Nul autre que toi ne t’intéresse.
(1.159)
Etroitesse individuelle
Le sort du monde t’indiffère. Seul ton destin te préoccupe.
(1.160)
Interrogation céleste
Tu te gonfles d’orgueil et d’importance. Mais jamais tu ne te demandes qui tu es sous le ciel.
(1.161)
Exil
Tu es un ange déchu. Un pauvre diable exilé sur la terre des hommes.
(1.162)
Chimères
Tu crois être indispensable au monde. Tu as le sens dérisoire de ton insignifiante responsabilité.
(1.163)
Vastes cieux
Sous le ciel, tu baisses les yeux. Et tu reconnais ton insignifiance.
(1.164)
Indifférence
Tu es indifférent à l’infinité des êtres qui meurent à chaque instant. Les morts et ton insensibilité t’indiffèrent.
(1.165)
Possibilité
La souffrance du monde t’insupporte. Tu ne sais comment agir. Tu fais ton possible. Tu penses que chacun fait son possible.
(1.166)
Boulets
L’humanité et l’inhumanité appartiennent à ta condition. Tu ne peux échapper à ton destin.
(1.167)
Evolution
Tu es le fils de l’histoire. Le fruit des horreurs historiques. Tu poursuis l’œuvre de tes ancêtres. Ta descendance aura sans doute un avenir très sombre. Tu participes néanmoins (et à ton insu) à améliorer progressivement le sort du monde.
(1.168)
Criminel
Tu exploites, instrumentalises et extermines le monde sans sourciller. Tu appartiens à la grande armée des meurtriers ordinaires.
(1.169)
Avertissement
Tu blâmes l’humanité. Tu te demandes si elle saura un jour prendre visage humain. Mais tu ignores ton propre visage.
(1.170)
Marché
Tu défends ta place (et ton territoire) dans le bazar du monde.
(1.171)
Si c’était un homme
Tu regardes l’inhumanité du monde (l’inhumaine société des hommes). Et tu t’interroges : et si c’était l’homme derrière cette barbarie monstrueuse. Et tu penses avec tristesse à Primo Lévi.
(1.172)
Marchandage
Tu monnayes la force de tes bras, la puissance de ton corps, l’intelligence de ton cerveau. Tu négocies ton savoir-faire, tes compétences, tes idées. Tu te marchandes.
(1.173)
Poids
Tu croules sous le poids du monde. Tu aimerais que seul le regard de ta conscience pèse sur ta vie.
(1.174)
Souk
Tu achètes, tu vends, tu négocies. Tu participes à la foire d’empoigne.
(1.175)
Tour d’ivoire
Du haut de ta tour, tu observes le monde. Le malheureux monde qui sous tes yeux s’agite. Le triste monde qui s’affaire sans relâche à ses mornes tâches.
(1.176)
Dénaturation
Tu habilles la terre de tes oripeaux. Tu défigures la beauté (naturelle) du monde
(1.177)
Impudeur
Tes vêtements sont un déguisement qui dissimule mal ta nudité.
(1.178)
Combats
Tu livres un combat âpre contre le monde. Mais tu ignores tes luttes intestines.
(1.179)
Vain combat
Tu es un combattant sans ennemi. Tu t’acharnes contre ton propre sort.
(1.180)
Mauvaise orientation
Tu penses que ton avenir est derrière toi. Tu ignores que les souvenirs te détournent de l’avenir qui t’attend.
(1.181)
Sueur froide
Tu sens la sueur froide dégouliner le long de ta fragile échine que la vie, d’une pichenette, peut briser.
(1.182)
Impasses
Tu arpentes inlassablement les mêmes impasses.
(1.183)
Impossibilité
Vivre est pour toi impossible. Tu survis comme un amputé, un paralytique.
(1.184)
Etiquetage
Tu juges, tu évalues, tu compares, tu catégorises, tu étiquettes. Tu dissèques le monde. Le vivant, l’inerte et le reste. Tu fragmentes le réel. Tu t’éloignes de la vérité.
(1.185)
Certitude
Tu t’interroges. Tu te demandes qui a la présomption de croire qu’il sait. Tu l’ignores.
(1.186)
Rappel
Tu oublies que demain tu vas mourir.
(1.187)
Négligence
Tu résistes à la mort. Tu es incapable de lui faire face.
(1.188)
Espérance
Tu espères découvrir la porte au bout du voyage.
(1.189)
Eaux sombres
Tu laisses ta souffrance dégouliner sur le monde.
(1.190)
Proximité
Tu cherches la clé. Et tu la portes au cou comme un fardeau ennuyeux.
(1.191)
Etre mal
Tu ressens un mal-être. Et tu ignores que ce mal-être est le signe que tu es mal. Que tu ne sais pas être*.
(1.192)
Immobilité
Tu sédentarises ton avenir.
(1.193)
Etrange sentier
Tu ressens l’odieuse routine des jours. Tu ne connais pourtant de voyage plus énigmatique, plus déroutant et merveilleux.
(1.194)
Point fixe
Tu chemines à l’orée du sentier. Tu arpentes les préliminaires du voyage.
(1.195)
Halte
Tu décides d’arrêter tes pitreries et tes bouffonneries. Tu enlèves ton costume de clown triste pour retrouver la gravité du chemin.
(1.196)
Insatisfaction
Tu vis. Paresseusement. Tu te maintiens en vie. Avec quelques efforts. Tu cherches à exister*. En vain. Tu es insatisfait.
(1.197)
Illusions
Ton chemin est éreintant, tes efforts tangibles, ta souffrance palpable, tes avancées ridicules et ta marche illusoire. Tu n’es pas au bout de tes peines.
(1.198)
Marche silencieuse
Tu arpentes la terre en traînant tes boulets et tes petits grelots tristes et joyeux. A ton passage, tu te désoles de l’insensibilité du monde qui écoute, indifférent, ta rengaine.
(1.199)
Peines
Tu tentes d’exister*. Tu y consacres tes jours. Tes nuits. Ton existence. Et tu ne récoltes qu’anxiétés et désillusions. Et tu poursuis tes efforts. Jusqu’à la mort.
(1.200)
Double indifférence
Tu préfères ignorer le monde qui t’ignore.
(1.201)
Je de massacre
Tu es souvent d’humeur massacrante. Au sens vrai du terme, tu anéantis tout sur ton passage.
(1.202)
Berceau d’illusion
Tu espères te consoler dans les bras du monde.
(1.203)
Exil intérieur
Tu vis dans le monde. Mais tu restes hors de portée des hommes.
(1.204)
Egarement
Tu t’égares en cherchant vainement la proximité d'une âme.
(1.205)
Fermeture
Tu n’attends rien du monde. Son regard t’indiffère. Tu t’enfermes dans l’égotisme. Tu sombres dans l’indifférence. Tu te replies.
(1.206)
Gaspillage
Tes détours te gaspillent.
(1.207)
Vomitif
Tu es un voyageur affamé. Un bouffeur de monde. Tu t’empiffres jusqu’à l’écœurement. Et tu dégueules sur les hommes l’abjection que tu ne peux digérer.
(1.208)
Vaines préoccupations
Tu vis. Mais tu oublies l’essentiel.
(1.209)
Quête
Tu cherches la vérité. Tu la cherches avec méthode et obstination. Tu la cherches partout. Dans le monde. Dans les livres. Dans la vie. Dans ton cœur. Et tu poursuis ta quête. En vain. Tu tournes en rond. Tu t’épuises.
(1.210)
Graines
Tu ensemences tes impossibilités.
(1.211)
Luttes intestines
A tes heures perdues, tu te perds. A tes heures lasses, ton âme se déchire d'ennui et de désespérance. Les pensées les plus viles s'invitent et s'insinuent. Elles t'inondent. Leurs miasmes fétides et nauséabonds te submergent. Et tu regardes impuissant l’infime champ de bataille qui t’habite.
(1.212)
Engrais
Tu fertilises ta désolation.
(1.213)
Rengaine
Tu es en colère. Tu vitupères pour une sombre histoire d'attente et d'espérance à l'égard du monde, trop soucieux de lui-même, pour jeter un regard à tes déboires.
(1.214)
Indigence
Tu prosaïses la quête. Tu te bornes à améliorer tes conditions d’existence.
(1.215)
Bêtise
L’époque est à la bêtise. Tu y vois le signe de ton malaise avec tes contemporains. Et tu t’empresses aussitôt de blâmer ton pédantisme idiot.
(1.216)
Handicap
Tu bégayes ton existence aveuglante.
(1.217)
Mur
Tu te heurtes à l’éternelle douleur d’exister et à l’impossible bonheur de vivre.
(1.218)
Oubli
Tu oublies l’espace des horizons inexplorés.
(1.219)
Repli
Seul dans l’espace désert (libre du monde), tu dialogues en ta compagnie. Tu approfondis ton exploration.
(1.220)
Arrivée imminente
Tu ignores la mort qui s’approche et frappera bientôt à ta porte.
(1.221)
Sous les étoiles
Tu te couches sur le sol. Et tu regardes le ciel en blâmant la désespérance de ta condition.
(1.222)
Course folle (bis)
Tu poursuis ta course à la surface du monde.
(1.223)
Refuge insensé
Tu glisses en toi jusqu'à en perdre la raison.
(1.224)
Frilosité
Tu es un étrange aventurier. Tu pars à la découverte de contrées lointaines. Et tu négliges l’espace qui t’habite.
(1.225)
Désorientation
Ta quête t’aveugle. Tu oublies de regarder le monde. Tu enlises ta marche.
(1.226)
Geôle
Le regard du monde est ta cellule. Et ton regard sur le monde ta prison.
(1.227)
Autruche existentielle
Tu refuses de voir la mort. Sans elle, tu as l’illusion de mieux vivre. Tu oublies que chaque seconde t’en rapproche.
(1.228)
Place centrale
Tu ambitionnes la respectabilité. Tu as des rêves de notable tranquille.
(1.229)
Amputation
Tu es existentiellement handicapé. Sans joie et sans contentement. Amputé des prédispositions qui donnent à la vie sa valeur et sa beauté. Comme si l’existence ne t’avait laissé que la désespérance.
(1.230)
Hiérarchisation
Tu es indifférent à la souffrance du monde. Tu hiérarchises les malheurs. Toi, tes proches, tes congénères. Et les autres. Tu es le centre des cercles concentriques. Premier sur l’échelle de la différenciation.
(1.231)
Options
Tu aimerais modifier le cours du monde. Tu t’interroges. Tu hésites. Tu aimerais t’engager en politique pour imposer tes idéaux, t’engager dans la science pour rendre plus compréhensible et confortable la vie humaine, ou t’engager dans le militantisme associatif pour faire advenir plus de justice entre les êtres. Tu tergiverses. Et tes atermoiements te paralysent. Tu demeures immobile. Tu fais mûrir (malgré toi) la voie que tu emprunteras.
(1.232)
Maladie spécifique
Tu es anthropocentrique. Tu souffres de l’égocentrisme de ton espèce.
(1.233)
Equivalence
Tu vois un insecte qui lutte contre la mort. Couché sur le dos, tu vois ses pattes s’agiter. Et cette agonie te semble aussi insupportable que la vision d’un homme en train de mourir.
(1.234)
Supplice
Ton ignorance est ton enfer. Et tu l’ignores.
(1.235)
Livres lumineux
Tu parcoures les librairies et les bibliothèques à la recherche de la vérité. En déambulant dans les rayons, tu ne trouves que de faux livres. Tu sais que le monde les honore pour la beauté de leurs phrases et l’attrait de leurs histoires. Mais tu en sors le cœur toujours aussi noir. Tu sais que les vrais livres sont rares. Tu les reconnais par la lumière qu’ils font naître en toi.
(1.236)
Inclinations
La vie t'incite à élever ton regard. Et tu avances en regardant le bout de tes souliers.
(1.237)
Avancement
Il arrive à ton âme désespérée de garder espoir. Ton cœur vacillant continue d’avancer. Il traverse le désespoir.
(1.238)
Arrangement
Tu aménages ta demeure. Et tu ignores ton désordre intérieur.
(1.239)
Traversées souterraines
Tu explores la pesanteur du vide. Les eaux profondes de l’obscur. Tu découvres les mondes souterrains à la faune inquiétante. La profondeur tellurique et les abysses océanes. Tu entreprends la douloureuse traversée. Et la noirceur des profondeurs te terrifie.
(1.240)
Parure
Tu aimes paraître. Mais tu ignores que le paraître n’habille pas l’être qui t’habite.
(1.241)
Compulsion
Tu n’as pas conscience d’être. Tu accomplis, tu t’agites, tu te jettes dans l’action. Tu désires avec ardeur exister.
(1.242)
Prétention
Tu tires vanité de dons et qualités dont tu n’es pas responsable. Tu t’enorgueillis des bienfaits du destin. Tu te méprends sur tes mérites.
(1.243)
Misère
Tu refuses le médiocre sort et les prédispositions misérables que la vie t’a offerte pour apprendre à vivre.
(1.244)
Insignifiances
Tu es fier de tes entreprises et de tes idées. Tu les estimes singulières et originales. Et tu imagines que le monde s’en soucie.
(1.245)
Sans issue
Ton malheur tient à ta conscience de n'exister que par le seul faire. Mais tu ne peux t'empêcher d'y sombrer.
(1.246)
Dévaluation
Tu quêtes l’approbation du monde. Tu déprécies ton rôle.
(1.247)
Compagnie exclusive
Ta solitude ouvre des portes dont la compagnie - la proximité et parfois la seule présence - du monde gênent l’accès.
(1.248)
Retournement (bis)
Tu ressasses (encore) tes souvenirs en attendant la mort. Tu négliges ton avenir.
(1.249)
Anticipation de langueur
Le temps s’allonge. Et tu le devances dans l’ennui. Tes journées ressemblent à une étendue de sable immobile où les heures s’écoulent interminables.
(1.250)
Aveuglement
Tu avances dans le noir sous un ciel radieux.
(1.251)
Trésors cachés
L’ennui s'immisce dans la routine de tes jours. Et tu te plains. Tu geins. Tu ignores les richesses et les beautés. L’intelligence et la bonté. Tu marches comme un aveugle vers des contrées hostiles. Tu t’éloignes des trésors cachés.
(1.252)
Superficialité
Tu ignores le trésor des profondeurs.
(1.253)
Espoir
Tu te parcours. Tu explores l’introspection. Tu cherches la place de l'Homme. Tu effectues les premiers pas métaphysiques vers la quête du sens de la vie humaine. Tu es sur l’avant chemin.
(1.254)
Limite
Tu es seul. Et avec eux. Mais jamais tu ne t’interroges sur la frontière qui vous sépare.
(1.255)
Solitude
Tu te sens seul. Si seul dans la foule qui marche sur les chemins du monde.
(1.256)
Bagages
Tu avances avec l’espoir et la désespérance de ta condition.
(1.257)
Errance
Tu erres seul et désespéré en quête d’un abri.
(1.258)
Poursuite
Et tu poursuis ton voyage…
Poursuite (bis)
Et tu poursuis ton voyage…