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LES CARNETS METAPHYSIQUES & SPIRITUELS

A propos

La quête de sens
Le passage vers l’impersonnel
L’exploration de l’être

L’intégration à la présence


Carnet n°1
L’innocence bafouée
Récit / 1997 / La quête de sens


Carnet n°2
Le naïf
Fiction / 1998 / La quête de sens

Carnet n°3
Une traversée du monde
Journal / 1999 / La quête de sens

Carnet n°4
Le marionnettiste
Fiction / 2000 / La quête de sens

Carnet n°5
Un Robinson moderne
Récit / 2001 / La quête de sens

Carnet n°6
Une chienne de vie
Fiction jeunesse / 2002/ Hors catégorie

Carnet n°7
Pensées vagabondes
Recueil / 2003 / La quête de sens

Carnet n°8
Le voyage clandestin
Récit jeunesse / 2004 / Hors catégorie

Carnet n°9
Le petit chercheur Livre 1
Conte / 2004 / La quête de sens

Carnet n°10

Le petit chercheur Livre 2
Conte / 2004 / La quête de sens

Carnet n°11 
Le petit chercheur Livre 3
Conte / 2004 / La quête de sens

Carnet n°12
Autoportrait aux visages
Récit / 2005 / La quête de sens

Carnet n°13
Quêteur de sens
Recueil / 2005 / La quête de sens

Carnet n°14
Enchaînements
Récit / 2006 / Hors catégorie

Carnet n°15
Regards croisés

Pensées et photographies / 2006 / Hors catégorie

Carnet n°16
Traversée commune Intro
Livre expérimental / 2007 / La quête de sens

C
arnet n°17
Traversée commune Livre 1
Récit / 2007 / La quête de sens

Carnet n°18
Traversée commune Livre 2
Fiction / 2007/ La quête de sens

Carnet n°19
Traversée commune Livre 3
Récit & fiction / 2007 / La quête de sens

Carnet n°20
Traversée commune Livre 4
Récit & pensées / 2007 / La quête de sens

Carnet n°21
Traversée commune Livre 5
Récit & pensées / 2007 / La quête de sens

Carnet n°22
Traversée commune Livre 6
Journal / 2007 / La quête de sens

Carnet n°23
Traversée commune Livre 7
Poésie / 2007 / La quête de sens

Carnet n°24
Traversée commune Livre 8
Pensées / 2007 / La quête de sens

Carnet n°25
Traversée commune Livre 9
Journal / 2007 / La quête de sens

Carnet n°26
Traversée commune Livre 10
Guides & synthèse / 2007 / La quête de sens

Carnet n°27
Au seuil de la mi-saison
Journal / 2008 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°28
L'Homme-pagaille
Récit / 2008 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°29
Saisons souterraines
Journal poétique / 2008 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°30
Au terme de l'exil provisoire
Journal / 2009 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°31
Fouille hagarde
Journal poétique / 2009 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°32
A la croisée des nuits
Journal poétique / 2009 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°33
Les ailes du monde si lourdes
Poésie / 2009 / Hors catégorie

Carnet n°34
Pilori
Poésie / 2009 / Hors catégorie

Carnet n°35
Ecorce blanche
Poésie / 2009 / Hors catégorie

Carnet n°36
Ascèse du vide
Poésie / 2009 / Hors catégorie

Carnet n°37
Journal de rupture
Journal / 2009 / Hors catégorie

Carnet n°38
Elle et moi – poésies pour elle
Poésie / 2009 / Hors catégorie

Carnet n°39
Préliminaires et prémices
Journal / 2010 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°40
Sous la cognée du vent
Journal poétique / 2010 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°41
Empreintes – corps écrits
Poésie et peintures / 2010 / Hors catégorie

Carnet n°42
Entre la lumière
Journal poétique / 2011 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°43
Au seuil de l'azur
Journal poétique / 2011 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°44
Une parole brute
Journal poétique / 2012 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°45
Chemin(s)
Recueil / 2013 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°46
L'être et le rien
Journal / 2013 / L’exploration de l’être

Carnet n°47
Simplement
Journal poétique / 2014 / L’exploration de l’être

Carnet n°48
Notes du haut et du bas
Journal poétique / 2014 / L’exploration de l’être

Carnet n°49
Un homme simple et sage
Récit / 2014 / L’exploration de l’être

Carnet n°50
Quelques mots
Journal poétique / 2014 / L’exploration de l’être

Carnet n°51
Journal fragmenté
Journal poétique / 2014 / L’exploration de l’être

Carnet n°52
Réflexions et confidences
Journal / 2014 / L’exploration de l’être

Carnet n°53
Le grand saladier
Journal poétique / 2014 / L’exploration de l’être

Carnet n°54
Ô mon âme
Journal poétique / 2014 / L’exploration de l’être

Carnet n°55
Le ciel nu
Recueil / 2014 / L’exploration de l’être

Carnet n°56
L'infini en soi 
Recueil / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°57
L'office naturel
Journal / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°58
Le nuage, l’arbre et le silence
Journal / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°59
Entre nous
Journal / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°60
La conscience et l'Existant
Essai / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°61
La conscience et l'Existant Intro
Essai / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°62
La conscience et l'Existant 1 à 5
Essai / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°63
La conscience et l'Existant 6
Essai / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°64
La conscience et l'Existant 6 (suite)
Essai / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°65
La conscience et l'Existant 6 (fin)
Essai / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°66
La conscience et l'Existant 7
Essai / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°67
La conscience et l'Existant 7 (suite)
Essai / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°68
La conscience et l'Existant 8 et 9
Essai / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°69
La conscience et l'Existant (fin)
Essai / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°70
Notes sensibles
Journal / 2016 / L’exploration de l'être

Carnet n°71
Notes du ciel et de la terre
Journal / 2016 / L’exploration de l'être

Carnet n°72
Fulminations et anecdotes...
Journal / 2016 / L’exploration de l'être

Carnet n°73
L'azur et l'horizon
Journal / 2016 / L’exploration de l'être

Carnet n°74
Paroles pour soi
Journal / 2016 / L’exploration de l'être

Carnet n°75
Pensées sur soi, le regard...
Journal / 2016 / L’exploration de l'être

Carnet n°76
Hommes, anges et démons
Journal / 2016 / L’exploration de l'être

Carnet n°77
L
a sente étroite...
Journal / 2016 / L’exploration de l'être

Carnet n°78
Le fou des collines...
Journal / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°79
Intimités et réflexions...
Journal / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°80
Le gris de l'âme derrière la joie
Récit / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°81
Pensées et réflexions pour soi
Journal / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°82
La peur du silence
Journal poétique / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°83
Des bruits aux oreilles sages
Journal / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°84
Un timide retour au monde
Journal / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°85
Passagers du monde...
Journal / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°86
Au plus proche du silence
Journal / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°87
Être en ce monde
Journal / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°88
L'homme-regard
Récit / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°89
Passant éphémère
Journal poétique / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°90
Sur le chemin des jours
Recueil / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°91
Dans le sillon des feuilles mortes
Recueil / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°92
L
a joie et la lumière
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°93
Inclinaisons et épanchements...
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°94
Bribes de portrait(s)...
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

C
arnet n°95
Petites choses
Journal poétique / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°96
La lumière, l’infini, le silence...
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°97
Penchants et résidus naturels...
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°98
La poésie, la joie, la tristesse...
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°99
Le soleil se moque bien...
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°100
Si proche du paradis
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°101
Il n’y a de hasardeux chemin
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°102
La fragilité des fleurs
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°103
Visage(s)
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°104
Le monde, le poète et l’animal
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°105
Petit état des lieux de l’être
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°106
Lumière, visages et tressaillements
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°107
La lumière encore...
Journal poétique / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°108
Sur la terre, le soleil déjà
Journal poétique / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°109
Et la parole, aussi, est douce...
Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°110
Une parole, un silence...
Journal poétique / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°111
Le silence, la parole...
Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°112
Une vérité, un songe peut-être
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°113
Silence et causeries
Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°114
Un peu de vie, un peu de monde...
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°115
Encore un peu de désespérance
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°116
La tâche du monde, du sage...
Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°117
Dire ce que nous sommes...
Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°118
Ce que nous sommes – encore...
Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°119
Entre les étoiles et la lumière
Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°120
Joies et tristesses verticales
Journal poétique / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°121
Du bruit, des âmes et du silence
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°122
Encore un peu de tout...
Journal poétique / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°123
L’amour et les ténèbres
Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°124
Le feu, la cendre et l’infortune
Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°125
Le tragique des jours et le silence
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°126
Mille fois déjà peut-être...
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°127
L’âme, les pierres, la chair...
Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°128
De l’or dans la boue
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°129
Quelques jours et l’éternité
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°130
Vivant comme si...
Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°131
La tristesse et la mort
Récit / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°132
Ce feu au fond de l’âme
Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°133
Visage(s) commun(s)
Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°134
Au bord de l'impersonnel
Journal / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°135
Aux portes de la nuit et du silence
Recueil / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°136
Entre le rêve et l'absence
Recueil / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°137
Nous autres, hier et aujourd'hui
Récit / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°138
Parenthèse, le temps d'un retour...
Journal poétique / 2018 / L'intégration à la présence


Carnet n°139 
Au loin, je vois les hommes...
Journal / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°140
L'étrange labeur de l'âme

Recueil / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°141
Aux fenêtres de l'âme

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°142
L'âme du monde

Recueil / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°143
Le temps, le monde, le silence...

Journal / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°144
Obstination(s)

Journal poétique / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°145
L'âme, la prière et le silence

Journal poétique / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°146
Envolées

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°147
Au fond

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°148
Le réel et l'éphémère

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°149
Destin et illusion

Recueil / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°150
L'époque, les siècles et l'atemporel

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°151
En somme...

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°152
Passage(s)

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°153
Ici, ailleurs, partout

Recueil / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°154
A quoi bon...

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°155
Ce qui demeure dans le pas

Journal poétique / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°156
L'autre vie, en nous, si fragile

Journal poétique / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°157
La beauté, le silence, le plus simple...

Recueil / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°158
Et, aujourd'hui, tout revient encore...

Journal / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°159
Tout - de l'autre côté

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°160
Au milieu du monde...

Recueil / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°161
Sourire en silence

Recueil / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°162
Nous et les autres - encore

Journal / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°163
L'illusion, l'invisible et l'infranchissable

Journal / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°164
Le monde et le poète - peut-être...

Journal / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°165
Rejoindre

Recueil / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°166
A regarder le monde

Paroles confluentes / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°167
Alternance et continuité

Journal / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°168
Fragments ordinaires

Paroles confluentes / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°169
Reliquats et éclaboussures

Paroles confluentes / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°170
Sur le plus lointain versant...

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°171
Au-dehors comme au-dedans

Paroles confluentes / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°172
Matière d'éveil - matière du monde

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°173
Lignes de démarcation

Regard / 2018 / L'intégration à la présence
-
Carnet n°174
Jeux d'incomplétude

Journal poétique / 2018 / L'intégration à la présence
-

Carnet n°175
Exprimer l'impossible

Regard / 2018 / L'intégration à la présence
-
Carnet n°176
De larmes, d'enfance et de fleurs

Récit / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°177
Coeur blessé, coeur ouvert, coeur vivant

Journal / 2018 / L'intégration à la présence
-
Carnet n°178
Cercles superposés

Journal poétique / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°179
Tournants

Journal / 2019 / L'intégration à la présence

Carnet n°180
Le jeu des Dieux et des vivants

Journal / 2019 / L'intégration à la présence

Carnet n°181
Routes, élans et pénétrations

Journal / 2019 / L'intégration à la présence
-
Carnet n°182
Elans et miracle

Journal poétique / 2019 / L'intégration à la présence

Carnet n°183
D'un temps à l'autre

Recueil / 2019 / L'intégration à la présence

Carnet n°184
Quelque part au-dessus du néant...

Recueil / 2019 / L'intégration à la présence

Carnet n°185
Toujours - quelque chose du monde

Regard / 2019 / L'intégration à la présence

Carnet n°186
Aube et horizon

Journal / 2019 / L'intégration à la présence

Carnet n°187
L'épaisseur de la trame

Regard / 2019 / L'intégration à la présence

Carnet n°188
Dans le même creuset

Regard / 2019 / L'intégration à la présence

Carnet n°189
Notes journalières

Carnet n°190
Notes de la vacuité

Carnet n°191
Notes journalières

Carnet n°192
Notes de la vacuité

Carnet n°193
Notes journalières

Carnet n°194
Notes de la vacuité

Carnet n°195
Notes journalières

Carnet n°196
Notes de la vacuité

Carnet n°197
Notes journalières

Carnet n°198
Notes de la vacuité

Carnet n°199
Notes journalières

Carnet n°200
Notes de la vacuité

Carnet n°201
Notes journalières

Carnet n°202
Notes de la route

Carnet n°203
Notes journalières

Carnet n°204
Notes de voyage

Carnet n°205
Notes journalières

Carnet n°206
Notes du monde

Carnet n°207
Notes journalières

Carnet n°208
Notes sans titre

Carnet n°209
Notes journalières

Carnet n°210
Notes sans titre

Carnet n°211
Notes journalières

Carnet n°212
Notes sans titre

Carnet n°213
Notes journalières

Carnet n°214
Notes sans titre

Carnet n°215
Notes journalières

Carnet n°216
Notes sans titre

Carnet n°217
Notes journalières

Carnet n°218
Notes sans titre

Carnet n°219
Notes journalières

Carnet n°220
Notes sans titre

Carnet n°221
Notes journalières

Carnet n°222
Notes sans titre

Carnet n°223
Notes journalières

Carnet n°224
Notes sans titre

Carnet n°225

Carnet n°226

Carnet n°227

Carnet n°228

Carnet n°229

Carnet n°230

Carnet n°231

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Carnet n°263
Au jour le jour

Octobre 2020


Carnet n°264
Au jour le jour

Novembre 2020

Carnet n°265
Au jour le jour

Décembre 2020

Carnet n°266
Au jour le jour

Janvier 2021

Carnet n°267
Au jour le jour

Février 2021

Carnet n°268
Au jour le jour

Mars 2021


Carnet n°269
Au jour le jour
Avril 2021

Carnet n°270
Au jour le jour
Mai 2021

Carnet n°271
Au jour le jour

Juin 2021

Carnet n°272
Au jour le jour

Juillet 2021

Carnet n°273
Au jour le jour
Août 2021

Carnet n°274
Au jour le jour

Septembre 2021


Carnet n°275
Au jour le jour
Octobre 2021

Carnet n°276
Au jour le jour
Novembre 2021

Carnet n°277
Au jour le jour

Décembre 2021

Carnet n°278
Au jour le jour
Janvier 2022

Carnet n°279
Au jour le jour
Février 2022

Carnet n°280
Au jour le jour
Mars 2022

Carnet n°281
Au jour le jour
Avril 2022

Carnet n°282
Au jour le jour
Mai 2022

Carnet n°283
Au jour le jour
Juin 2022

Carnet n°284
Au jour le jour
Juillet 2022

Carnet n°285
Au jour le jour
Août 2022

Carnet n°286
Au jour le jour
Septembre 2022

Carnet n°287
Au jour le jour
Octobre 2022

Carnet n°288
Au jour le jour
Novembre 2022

Carnet n°289
Au jour le jour
Décembre 2022

Carnet n°290
Au jour le jour
Février 2023

Carnet n°291
Au jour le jour
Mars 2023

Carnet n°292
Au jour le jour
Avril 2023

Carnet n°293
Au jour le jour
Mai 2023

Carnet n°294
Au jour le jour
Juin 2023

Carnet n°295
Nomade des bois (part 1)
Juillet 2023

Carnet n°296
Nomade des bois (part 2)
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© Les carnets métaphysiques & spirituels

25 mai 2018

Carnet n°148 Le réel et l’éphémère

Regard* / 2018 / L'intégration à la présence

* Ni journal, ni recueil, ni poésie. Un curieux mélange. Comme une vision – une perception – impersonnelle, posée en amont de l’individualité subjective, qui relate quelques bribes de cette vie – de ce monde – de ces idées – de ce continuum qui nous traverse avant de s’effacer dans le silence…

Nous ne comprenons ni le jour, ni la nuit. Ni le temps, ni la mort. Suspendus à trop de rêves pour n’appartenir qu’au réel – et insuffisamment lucides et clairs pour laisser s’approcher la vérité…

Ce que nous atteignons n’est, sans doute, qu’une secousse dans notre sommeil. Le rêve d’un autre rêve moins épais que les précédents…

Il y a des mendiants et des étoiles – et des sages venus rehausser l’éphémère et offrir à la nuit un jour – une lumière – un ciel moins étoilé…

 

 

Œuvre permanente – multiple – obscure – souterraine – offerte à tous – mais jamais soumise au regard de quiconque. Jamais confirmée. Jamais contestée. Jamais confortée ni désapprouvée. Ignorée des âmes. Alimentée seulement par le monde et son propre élan. Tâche anonyme entre toutes. Labeur secret et merveilleux de l’impersonnel, des sages et des poètes méconnus…

 

*

 

Un ciel bleu couronné de vertus. Et ces lèvres chaudes qui lancent leurs baisers comme une neige délicate sur tous les visages recroquevillés dans leur peine. Ni tristesse, ni dégoût. Une saveur. De longues heures – une vie entière peut-être – passée(s) sans astreinte à exister pour presque rien – et irremplaçable(s) pourtant…

 

 

A l’étroit – au loin – entre deux oiseaux blancs qui lancent leur chant comme un message vers ceux qui attendent – tristes et naïfs – parmi les pierres, le silence – comme une fleur plantée au milieu des dérives – au milieu des jardins – soucieuse de l’eau et de la sueur versées dans toutes les flaques du monde…

 

 

Herbes partout qui dansent au milieu des forêts – au milieu de l’enfance. Compagnes de toutes les mains et de toutes les sagesses – offertes au dédain des âmes éprises de puissance…

 

 

Regard plus sensible qu’humain sur un monde voué au désordre et aux secrets – aux petits mensonges édifiés pour paraître moins idiot que les questions que l’on tait…

 

 

Un son, un songe. Quelque chose de moins affûté que le réel. Et l’attention – le silence – lisse – lisse – autant que la parole compte d’aspérités…

 

 

Rivières, routes, montagnes, sources, visages. La même aubaine – le même secret. Merveilleux au fond de l’âme portée aux détails et au fond des choses. Et dangereux, parfois, pour les yeux si avides d’apparence qui se brûlent à leurs mirages…

 

 

Les battements du cœur moins vifs que l’Amour qui frappe à toutes les portes…

 

 

Lueurs toujours secrètes de la contemplation – cette incarnation, sans cesse recommencée, du regard au milieu de la chair si fragile – si éphémère…

 

 

Le plus humble du jour – comme un matin sans sommeil qui aurait redonné sa place au réel – et éloigné tous les rêves et les mensonges…

 

 

Voyageur au milieu de ses bagages – tête humble et droite – et souliers trompeurs – crottés d’une boue nécessaire à l’immobilité…

 

 

Temples construits sur le néant – la vacance d’une attention nécessaire – indispensable – vitale. Dieux et ancêtres honorés pour rompre (vainement) la peur et conjurer un destin voué au labeur, au rêve et à l’espoir. Et cette soif qui gronde – et se répand comme une fièvre sur les visages démunis – insatisfaits – à la recherche d’un autre jour…

 

 

Un feu mordant nous hante et dévaste l’oubli et l’arrogance pour surmonter les obstacles érigés à son passage. Une saine promenade, en somme, pour nous délivrer des rêves et des mensonges qui s’accumulent sous la glace – et les faire fondre à coup de vérité – cette volupté indécise et farouche qui, une fois libérée, ruisselle sur le monde et les visages…

 

 

Un sourire, un jour et mille saisons pour l’homme dont le front s’élève au-dessus des rêves – au-dessus des tours construites, peut-être, pour toucher le ciel et donner à la terre un air de conquête, des allures de fête et la certitude de l’apocalypse prochaine…

 

 

Caves, quais, escaliers. Des rêves, de l’ombre et de la pluie. Et autant de prétextes pour aller et venir entre le réel et l’illusion – entre le mensonge et la désespérance…

 

 

La foule, l’enfance, l’alcool. Le festin des entrailles. L’interrogation suspendue. Le foisonnement de tous les délires et de tous les caprices…

 

 

Une voix – autre part – nous appelle. Crie – encourage – admoneste – les pas apeurés sur les pierres et les pages, les yeux plongés dans l’encre et l’horizon et les bouches muettes à force de coups et de refus. Si proche des grilles contre lesquelles s’appuient tous les fronts rêveurs…

 

 

Combats, sang, civières – des lits d’infortune au milieu de la mort…

 

 

Chaleur défaite. Ambition perdue. Souliers mouillés par les larmes et la rosée du matin qui a vu mourir la nuit (la nôtre sûrement). Assis sagement, à présent, au pied d’une veille interminable au milieu des rires et des tombes – devant tout ce qui ressuscite après la mort…

Assis parmi tous ces songes qui agonisent…

 

 

Grisé par tous les élans, tous les parfums et tous les rêves qui chantent le printemps…

 

 

Visage à l’envergure d’exil. Oiseaux sommeillant dans l’étroitesse des branchages. Chemin s’élargissant au-dessus des cimes. Dans l’attente d’un envol – d’un passage à travers la mort…

 

 

Closes les saisons – recluse la mémoire – au fond de ce qui a peur. Prisonnière de ses tours, l’âme assise au milieu de ses peines. Aussi malheureuse qu’est libre la parole du poète…

 

 

L’étreinte – la moquerie – ce qui donnait autrefois à notre visage cet air insatisfait – défaits à présent. Ne restent plus qu’une caresse sur le dos de la nuit, un parfum de fête sur les doigts tachés d’encre et le secours d’une parole offerte au silence…

 

 

Paroles emphatiques et besogneuses – nées du premier envol – s’essayant désormais au silence. Célébrant la simplicité des jours, le quotidien sans orgueil et le visage effacé, peut-être, pour toujours…

 

 

Un rythme s’impose à la parole – à la voix qui se démène sur la page – qu’il ne faut confondre avec l’élan du désir et l’ambition du poète. Comme un soleil – ou une pluie parfois – se mêlant au chant tantôt triste, tantôt joyeux de celui qui écrit…

 

 

Tout s’élance – se jette – et se rattrape d’une main hésitante dans un temps que nul ne connaît – et que nul ne peut percer sans se voir aussitôt englouti – happé dans une sorte d’apesanteur et d’immobilité – où ce qui passe a l’allure du rêve ; un peu de matière – un peu de souffle – des ombres provisoires – incroyablement éphémères – au cœur du silence…

 

 

Avenir et souvenirs médiocres – inutiles à la ferveur du plus présent

 

 

Boucles, flots, torrents. Pagaille des mots déversés sur la page – cherchant la simplicité de l’eau et la transparence de la plus infime goutte – comme un nectar précieux – éternel – plongé au cœur de l’Unique – au cœur de chaque chose – au cœur de chaque parole – pris séparément…

Et derrière l’abondance, le foisonnement et la truculence du langage gît toujours, à l’état brut, un joyau – introuvable par celui qui survole les livres et les poèmes…

Il faut pour se donner la chance de goûter, comme lecteur, la saveur de la langue – et sa vérité – délaisser l’appétit et la profusion du poète – et se concentrer sur quelques lignes. Les isoler de tout contexte et les parcourir avec attention et lenteur pour y déceler, comme dans un miroir, son propre visage – et le silence et la simplicité de ce qui est éternel dans ce monde humain si sophistiqué, si bruyant, si provisoire…

 

 

Temps, morts, abandons. Le long chemin de l’épreuve. Le sentiment tenace de la peine. Et le cœur sombre prêt à tous les recommencements qui apprend, peu à peu, à se dégager des visages et des contextes – des saisons et des circonstances – pour découvrir – et vivre – le plus précieux ; le présent, la solitude et la vérité que dessine l’instant sur l’éphémère…

 

 

Rien devant les yeux – ni au-dedans du regard – sinon ce qui passe et s’attarde un peu…

 

 

Mate – brune – cette couleur du langage au centre du visage qui a défait l’horizon pour le silence – la lumière sortie triomphalement de son combat contre les lois brutales du sang et les instincts si obscurs des hommes…

 

 

Un doute, un temps, un chemin. Et le regard de la mort – presque goguenard sur tous les recommencements…

Une peine, un désir, une nostalgie. Quelques arpents – quelques instants – quelques visages – célébrés et (presque) aussitôt balayés par le temps et la mort…

La sang, la nuit, la solitude. Le revers de toute médaille. Les symptômes d’une vie passée sur la terre. Le destin des vivants agglutinés autour du feu et des étoiles…

 

 

Mille peut-être et mille pourquoi livrés non sans raison au silence. Et une seule réponse toujours au goût de tristesse avant d’en saisir (pleinement) la joie…

 

 

Rien ne nous enchante davantage que ce qui se tisse à l’envers de la vie – ce mystère né de ce que les hommes associent aux étoiles – vagues poussières célestes peut-être – et qui n’est compréhensible qu’en nous approchant des frontières qui nous séparent du plus sensible – de ce silence au parfum oublié…

 

 

Enclos au-dedans d’une vérité sans ciel – sans visage – sans Dieu – autant que sur la barque qui longe les rives de cette terre dépeuplée…

 

 

La parole endormie des psaumes ne profane jamais ni les rites, ni les croyances. Elle porte dans ses mains l’espérance d’une joie impossible – trop mensongère pour donner du poids à un ciel si lointain – et légitimer la force des malheurs. Et le cœur, un tant soit peu lucide, sait percer cette illusion pour emprunter la seule route possible – la seule route digne de la vérité – et entonner le chant du silence sans crainte, ni demi-mesure. Confiant dans l’espace qui le porte et le pose, si haut, dans la joie…

 

 

Seul – neuf – toujours dans les plus vives bourrasques. Envolé le poids de l’échelle d’autrefois que nous portions, comme un espoir – comme une croix – sur nos épaules fourbues…

Disparu l’homme épais aux pas pesants et à la parole vaine qui s’agitait dans son ombre autour de la lumière…

 

 

Une force en nous reste invaincue. Elle dort avec nous dans notre sommeil, lève les mains avec nous pour porter plus haut le message de l’innocence et s’agenouille, le visage livré à tous les périls, devant la magie à l’œuvre derrière les siècles – certaine de son équilibre et de son endurance pour affronter les tempêtes…

 

 

Seul face à ce qui arrive – et à ce qui emporte. Et si démuni lorsque tout s’effiloche…

 

 

Une épine dans le sommeil pique tous les séants non pour qu’ils se lèvent et poursuivent les rêves inventés par les têtes mais pour qu’ils se posent au-dessus des songes – et attendent la fin du monde – la fin des siècles – l’œil alerte et attentif à tout ce qui émerge au milieu des visages endormis…

 

 

Pluie, manteaux, éclairs. Et la hâte des têtes assoiffées de source qui pourchassent quelques folies passées par là – on ne sait pas bien quoi – un peu de poussière, sans doute, sous les bottes du vent…

 

 

Un miroir. Des visages et des corps qui ne sont que le reflet de ce qui s’élance vers tous les mirages – incertains de leur propre existence – nourris d’un peu de chair et d’espoir – et qui glissent, peu à peu, au bord du monde – aux marges du jour – pour découvrir – et contempler – ce qui demeure après tous les passages – lorsque arrive (enfin) la fin de l’illusion…

 

 

Tout se mêle au souffle et à la matière – soulevés par les courants. Tout se combine – et se recombine encore et encore – avec les vents, la boue et les étoiles – cherchant un destin parmi les fleurs, les visages et la glaise – cherchant un lieu – un ciel – plus sûrs et plus féconds que leur chute et leur (lent) délitement…

 

 

Un visage, une poursuite, quelques saisons. Et la même figure – le même éclat – partout de ce qui demeure une fois les frontières franchies – une fois tous les chemins parcourus…

 

 

Gisent à nos pieds des lambeaux de ce bleu infini – lacéré par les vents – déchiqueté par les hommes – tombé sans grâce sur les pierres que les pas piétinent sans un regard. Et ce sont nos yeux qui leur donnent le courage de persister malgré la pluie et l’indifférence. Et ce sont nos yeux qui leur restituent la couronne que les mains du monde, trop hâtives, ont jetée dans l’herbe et le sang. Et ce sont nos yeux qui sur eux s’éternisent pour ravauder leurs empreintes – et leur valeur – et reconstituer leur unité – leur beauté – leur silence…

 

 

Des milliers de pages pour célébrer ce qu’aucun mot jamais ne pourra offrir…

 

 

Seul au milieu du monde – seul au milieu du désert. Seul au milieu des visages – seul au milieu de personne. Quelle différence sinon l’apparence du décor…

 

 

La nécessité de l’essentiel sans laquelle la vie de l’homme toujours oscille entre le rêve et l’ennui…

 

 

C’est toujours au loin, pensent les hommes, que se vit l’aventure. Jamais dans le jour le plus quotidien arraché aux automatismes. Et, pourtant, seul ce périple – ce voyage – long, patient, solitaire mène au fond de soi et à la découverte de ce que nous portons tous comme un secret : l’infini, l’éternité et le silence – cette joie et cette folle liberté affranchies du monde et des circonstances…

 

 

Quel grand jour se cache au fond du silence…

Ni ciel, ni visage, ni secret. Quelque chose qui, en nous, veille depuis toujours sur nos pas, notre tristesse et notre espérance…

 

 

Un monde où tout s’absente – jusqu’à la lumière dans nos prunelles indécises – incertaines…

 

 

La vie passe comme la mort et les plus fous désirs – nés et engloutis dans la même trame…

 

 

Un œil, une main, un ciel. Tout apparaît, s’efface et recommence. Les murs et les vents qui bousculent l’éphémère des parades et des passages. Les maisons, les champs et les chambres où se terrent – et se penchent – les visages en attente d’un autre jour…

Tout est tissé ensemble sous un regard que rien ne meurtrit…

 

 

Un sens pour un autre. Un jour pour une nuit. Une attente convertie en violence. Et le repos en pagaille. Et persiste au fond de ces désordres – et de ces dérives – une chose inchangée – et, sans doute, inchangeable – qui monte et se révèle dans le plus infime répit – comme un suspens provisoire du temps qui, trop souvent, s’éternise dans les rêves – entre les tempes…

 

 

Nous respirons ce jour – et dans ce jour, l’éternité. Et dans l’éternité, le silence. Et dans le silence, tous les visages, tous les déserts, Dieu, les hommes, les bêtes et les fleurs – le monde entier…

 

 

Nous dormons du même sommeil que les morts – un peu plus léger peut-être – et plus sensible aux sourires et aux rouages du temps…

 

 

Une lumière, un chemin et le recommencement insensé de toutes les peines…

 

 

Une halte au milieu de la nuit. Un détour – une dérive – au-delà des yeux et des rêves. A l’extrémité d’une rive qui s’étire bien après la fin de l’horizon. L’âme lasse – exténuée – par tant de foulées et de tentatives. Et l’œil fragile – blessé mille fois par ces envies d’ailleurs et ces départs avortés – emmuré par ses désirs et ses peurs qui le condamnent à quelques tours sur lui-même…

 

 

Endormis – seuls – au milieu de tous – sans même une main – un espoir – pour délivrer du rêve…

 

 

La raison chavirée par ses propres frontières – et les obstacles posés au-dedans et aux alentours – finit, un jour, par laisser la corde abandonnée là depuis le début du voyage la porter plus haut – plus bas – la tirer à hue et à dia – vers ce qu’elle abritait au milieu de ses (minuscules) savoirs et de ses (insignifiantes) découvertes dans la douloureuse croyance d’être condamnée à ne jamais pouvoir sortir d’elle-même…

 

 

Désenchanté entre l’invisible et le passage – entre l’exil et le monde. Comme une main serrant sa joie au cœur d’une illusion perdue…

 

 

Lignes d’un fou peut-être délivré(es) par la vérité sous-jacente au monde et au temps – livré(es) au regard sans attache – sans destin. Comme un chant sous le sens des mots – une joie dans l’espace retrouvé – un regard guéri des flammes et des horizons calcinés…

 

 

Hiver, pluie, silence. Le dos au mur en quelque sorte – et le front tendu vers sa propre ivresse – hors du monde – hors du sommeil – cherchant la première marche d’un escalier ou le fil fragile – invisible – qui conduirait son pas loin des siècles et des hommes…

 

 

Un habit enfilé à la hâte pour se protéger de l’éclat – trop puissant – des yeux et de la lumière – et glisser avec les hommes dans une nuit où ne sombrent que les ombres et la mort…

Le retrait chancelant des silhouettes trop coutumières des malheurs pour croire en la possibilité du jour…

 

 

Félicité, porte, ferveur. Et cette fatigue – et cette amnésie – qui dessinent parfois un rire au fond de notre gorge…

 

 

Tout se mêle au vent – aux feuilles de l’hiver. Et ces manteaux – toutes ces étoffes – qui recouvrent nos plaies – nos blessures – et ces souvenirs d’autrefois où nous portions notre ardeur comme un halo de jeunesse – mangeant les yeux et les miroirs pour paraître moins seuls – et dissimuler notre visage plongé dans la solitude et les sanglots…

 

 

Vents, lacs, ombres, hiver. Et ce regard sans hâte qui se penche sur la soif – et les graines en attente du renouveau – ouvrant des portes insoupçonnées aux têtes fatiguées de tourner avec les saisons…

 

 

Le mutisme (mystérieux) des sages dont les gestes caressent les choses et les visages du monde – et dont le regard pénètre autant qu’il s’attendrit sur ce qui s’agite – et bouillonne – dans la fraîcheur de l’âge et l’immaturité de la vieillesse. Des yeux et des mains tournés vers la terre tremblante, fière et apeurée – ignorante de l’Amour perdu au milieu des cris et des flammes…

 

 

Sobres et sublimes, ces lignes sur la crête blanche qui décrivent les voyageurs et la voix étrange des chimères. Le vent noué à nos épaules. La moue des visages et ce bleu accoudé aux branches qui défie les pierres et les mains trop peu sages qui se balancent entre le souvenir et le silence…

 

 

Il y a des mendiants et des étoiles – et des sages venus rehausser l’éphémère et offrir à la nuit un jour – une lumière – un ciel moins étoilé…

 

 

Une flamme au fond des rêves moins cruelle que l’espoir – et moins fragile et mensongère que le temps – où fleurit ce que la mémoire – une chose au fond de la mémoire – ne peut célébrer. Un rien – presque rien – chaviré par nos pas et l’illusion. Un espace qui porte tous les noms. Un seuil où l’étonnement devient, peu à peu, la règle – et où l’incertitude tient lieu de regard. Comme une fleur – une innocence – qui pousse au fond de toutes les têtes…

 

 

Un cœur perverti par le temps qui consent enfin à la grâce…

 

 

Quelques graviers dans le sillon du silence creusé au fond de l’aube, à même nos pas, sur ces crêtes – et ces rivages – trop peuplés…

 

 

Une ombre, un ciel, un chant. Comme des adieux à ceux dont le visage s’est arrêté quelques instants pour regarder la lumière qui brillait au fond de nos yeux – et qui nous ont aimés avec maladresse en comptant leurs messages et leurs caresses – enfouis dans une nuit si dense qu’elle a su protéger leur sommeil de la magie du silence…

 

 

Nous ne comprenons ni le jour, ni la nuit. Ni le temps, ni la mort. Suspendus à trop de rêves pour n’appartenir qu’au réel – et insuffisamment lucides et clairs pour laisser s’approcher la vérité…

 

 

Ce que nous atteignons n’est, sans doute, qu’une secousse dans notre sommeil. Le rêve d’un autre rêve moins épais que les précédents…

 

 

Aux fenêtres, le jour. Et le silence un peu plus loin – derrière nos désirs – et cette volonté de tout saisir pour que dure le rêve…

 

 

Oubliée l’incertitude – les yeux au repos – fermés au silence. Aveugles à la lueur du jour nouveau…

 

 

Assise bleutée au-dessus des troupes – au-dessus des foules – au-dessus des tempes ignorantes et des mains sales qui lancent leurs rires et leurs peurs – comme un maigre espoir de vivre loin des insultes et des outrages – loin des horreurs et des liquéfactions successives endurées par les âmes…

 

 

Un silence – un ciel – partout déployés au-dedans de ce qui passe – et jusqu’au-dedans du temps et des chimères. Au milieu de chaque visage – au milieu de chaque histoire – dont l’apparence ne semble rivée qu’à son destin…

 

 

Partout, l’attention – démultipliée – comme les feuilles d’un arbre – le sang qui coule dans toutes les veines – et les mille paroles des poètes – qui traverse les existences et les âmes écartelées pour réchauffer à la source toutes les figures de passage…

 

 

Noués à quelques bouts d’étoiles lointaines, ces petits pas dans le grand vent – arrimés à leur voilure incertaine – et qui dansent – et qui dansent – emportés par les courants…

 

 

La chair de l’homme mordue par la nuit et les chiens – mi-âmes mi-loups – de la périphérie. Tête et buste portés au supplice – et bouche suppliante pour dire le peu amassé sous les habits – dans les taudis – maintenir ouvert le passage vers le jour suivant – prier Dieu, sans trop y croire, comme le seul espoir de se libérer des griffes et des emprises – et acquiescer au plus humble visage croisé parmi les rires, les menaces et les outrages rencontrés sur les chemins. L’enfer du monde, en quelque sorte, au centre duquel surnage la prière des hommes vaguement implorante – et rageusement lancée au milieu du chaos vers la moindre espérance

 

 

Mimant la blessure – et le murmure – d’un monde tragique aux plaies suintantes et aux plaintes démesurées. Annonçant le terme avant même la naissance. Joignant les mains pour mendier et prier en réclamant un sursis, un repos, une obole au premier visage rencontré. Accrochée au langage comme à une bouée de secours. Ballottée sans grâce par les océans de la terre – aux îles rares (trop rares) et aux vagues si furieuses. La voix de l’homme inquiète – absurde – hardie – livrant son destin et ses combats aux oreilles de passage trouvées au hasard des chemins…

 

 

Quelque chose se balance entre le silence et notre voix. Quelques éclats d’un ciel (presque) sans importance au milieu d’une parole trop sage – et trop lointaine peut-être – pour être entendue…

 

 

La solitude si visible au milieu du visage – dessinée par une main trop sensible pour nous exposer à la foule…

 

 

Hurlements et effroi de la bouche soulevée de la terre – et qui s’éloigne des vivants pour un espace – un coin de ciel – glissé entre les falaises et l’océan – là où les lèvres peuvent crier jusqu’à la folie du poème sans paraître idiotes – ni devancées par le rire un peu niais et désabusé des hommes dont le dédain n’a d’égal que l’indolence.

Effroi et hurlements, puis soudain, l’extase d’être né si différent. Et la joie de rejoindre le silence d’avant le monde – d’avant le cri – d’avant le poème. Et la certitude d’exister au-delà de notre visage…

 

 

Des heures – des siècles – d’ardeur et de folle passion qui se faufilent presque amoureusement entre les âmes vides – creusées par la faim – pour se poser sur la paume des poètes dont l’innocence triomphante hante jusqu’aux plus modestes pages…

 

 

Seul(s), on se tient par la main pour trouver le courage de vivre – et celui, plus âpre et plus exigeant, de traverser les épreuves et les rives qui confinent l’âme à l’emprisonnement…

 

 

Sable, berges, frontons. Et le vent et l’écume qui fouettent les visages. Et un peu d’encre arrachée à la folie – à la mémoire – pour fouler les terres d’un autre monde…

 

 

Fou – magistral – sans compromis comme l’attestent ses pages, le poète au pays du réel – traversé de mille imaginaires – offre une vision plus nette et plus forte que les mythes et les rêves. Toujours prêt à sacrifier les visages – son séjour – à parcourir mille terres et à traverser mille frontières – pour dire l’impossible – pour dire l’impensable – avec la modestie de ceux qui se savent mortels et remplaçables ; ce silence venu d’ailleurs – de ce lieu sans descendance où la peur n’existe pas, où les périls sont des passages et où la lumière brille jusque dans le noir pour éclairer ceux qui souffrent – ceux qui pleurent – ceux qui se plaignent et consentent – plongés (avec une vile résignation) dans un destin – une détention faite d’écorchures, de contraintes et d’espérance…

 

 

Un rite, un soleil et tous les orifices du monde ouverts. Et la chair habillée – et recouverte – de cette bave mêlée de sang et de semence sur laquelle s’acharnent les hommes dans leur souci (si tenace) de perpétuation…

 

 

Quelque chose guette avec nous sous le ciel – un peu d’être – un peu de chair – un peu de sang – pour donner à l’âme un semblant de droiture – et le droit – que dis-je ? le privilège – de nous horrifier des mains occupées à leurs sacrifices…

 

 

Voix étranges – multiples. Comme la découverte – la faillance – du mystère – ébréché volontairement – se découpant par lambeaux – et se livrant en autant de parts que nécessaire – pour résorber la déchirure – la fêlure première de toutes les figures nées du suintement originel…

 

 

Hagard, on se tient au milieu du monde. Pas certain d’avoir la force de s’y mouvoir. Et pas certain même de vouloir ravauder cette douleur primitive

Blessé, en quelque sorte, jusque dans notre présence et notre attente involontaires…

 

 

Cartes, visages. Solitude de tous les pays que l’imaginaire repeint de la couleur du rêve pour aller moins triste sur les chemins…

Géographie de la peur que les gestes et le langage dissimulent pour donner aux mains et à la parole une confiance sans appui – sans étai – sans envergure – recouverte simplement d’un vernis trompeur et inutile…

 

 

Devoirs, rage, beauté. Estuaire du plus sauvage qui repousse les eaux où s’ébat le plus quotidien. Comme une âme trop jeune – trop verte sans doute – pour fouler le chant qui monte sous nos ailes vers l’instant – vers la chute – cet envol qui patiente sous les masques de la plainte et de l’horreur…

 

 

Une présence sur la berge où le silence a rejoint tous les départs – tous les élans – pour que vivre devienne moins douloureux que la mort et cette, si hasardeuse, naissance au monde…

 

 

Un chemin, un chagrin. Et des foulées qui parcourent le monde à la recherche du premier souffle – du premier amour – de ce mariage, si ancien, entre l’innocence et la sagesse – en rêvant paresseusement d’éternité et de silence…

 

 

Ce qui demeure au-delà du passé – au-delà du souvenir – au-delà du temps et des pas si pressés. Au-delà de la mémoire et de l’avenir – et au-delà même de la mort. Un instant. Une présence plus tenace que les désirs et la souffrance – et que tous ces jours voués à la quête du silence…

La chance entre nos mains, en vérité, en cette heure qui s’éternise…

 

 

Un Autre, un pas, une grimace. Le miroir où se reflètent le désir et la souffrance – et cet air si triste à l’intérieur…

 

 

Faiblesse encore de l’esprit et de la chair face aux morsures – face au destin (si piquant parfois). Et notre désir, si ancien, de vivre sans blessure – sans peur ni angoisse – pour aller, libres et joyeux, au gré des marées barbares – rejoindre les courants qui font tourner – et chavirer – les âmes dans les tourmentes – et là-bas – plus loin – plus tard – retrouver cette grande étendue de sable – blanc – immaculé – que la mer caresse et embrasse en lissant les souvenirs, les pas et les empreintes du voyage – le passage, si furtif, des visages…

 

 

Dans le sillage du destin – dans l’obscur de cette nuit interminable – dans le rêve et la main – cette chose effroyable qui tente de (nous) percer les yeux…

 

 

Au-dessus du souffle – au-dessus des rêves – une douce volupté à l’allure – et à la saveur – austères. Insaisissable. Indéchiffrable. Comme un lieu au cœur de tous les lieux. Une présence au cœur de toutes les choses et de tous les visages. Une attention crucifiée par nos foulées – notre vie et notre quotidien – si automatiques. Le monde, en quelque sorte, replié au milieu de tous les mondes inventés par l’esprit…

 

 

Nous veillons sur le monde – et sur nous-mêmes – sans autre raison que l’attente d’un soleil plus clair…

 

 

Un jour, un lieu et un rêve de rencontre pour donner à la solitude la force d’espérer encore…

 

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20 mai 2018

Carnet n°147 Au fond

Regard* / 2018 / L'intégration à la présence

* Ni journal, ni recueil, ni poésie. Un curieux mélange. Comme une vision – une perception – impersonnelle, posée en amont de l’individualité subjective, qui relate quelques bribes de cette vie – de ce monde – de ces idées – de ce continuum qui nous traverse avant de s’effacer dans le silence…

Nous sommes nus au-dedans d’un regard qui nous sauve de tout amassement…

Routes entre les étoiles promises et l’espérance d’un rêve – d’un ciel. Parcours au milieu des vagues et des tempêtes. Et, pourtant, n’existe qu’un seul chemin – qu’une seule lumière – au fond de ce qui nous engloutit déjà…

Il faut creuser sous la cendre – trouver dans les flammes matière à parfaire le regard posé sur le monde. Il faut du silence et un désir puissant de lumière pour porter la tête haute – humble et fière – et déterrer la grâce cachée derrière les charniers. Il faut être un homme sans illusion – debout au milieu des preuves – pour interpeller ce qui, en chaque homme, végète dans la barbarie…

 

 

Ce qui hante la pensée – tout élan. Ce qui surnage même emmuré dans le sommeil. Cette force qui emporte tout jusqu’à l’infini…

 

 

Nous sommes nus au-dedans d’un regard qui nous sauve de tout amassement…

 

 

Nous sommes l’homme. Nous sommes l’arbre et la terre – et la lampe allumée un peu plus loin. Et ce feu qui brille sous les étoiles. Nous sommes le goût, le doute et ce qui se laisse happer par la lumière. Ce reste d’âme au fond du monde. Et ce silence obstiné au fond de l’âme…

 

 

La pensée se dilate, puis éclate en minuscules étoiles pour déchirer la nuit qui la retenait prisonnière…

 

 

La tête vacillante entre ce qui vient et se retire – entre la nuit – profonde toujours – et l’aube naissante…

 

 

Le noir et le rouge, partout dominants – même après la lumière. Comme les couleurs, peut-être indélébiles, du monde et de la terre…

 

 

Dans la nuit, l’étincelle de l’impossible face à l’irréparable…

 

 

Un coin d’azur en plein hiver. Et ces larmes qui coulent devant tant de merveilles. Brume et brouillard dissipés à présent – laissant apparaître le rayonnement d’un soleil inimaginable…

Emporté loin du sommeil et de ces mille sentiers creusés par la peur d’aller seul dans les forêts du monde…

 

 

Sève, sentier, ciel. Qu’importe la route et les offenses pourvu que l’air soit respirable – et visibles les cimes…

 

 

On donne à voir (simplement) ce que révèle la Vision

 

 

Un cœur qui avance vers l’humanité entière – sensible au vivant dans toutes les veines – sensible au silence sur les épaules et aux voix qui interpellent l’impossible…

 

 

Frémissements à la portée de la moindre fouille patiente – assidue – tenace et téméraire…

 

 

Nous lançons des mots dont le sens échappe à la raison. Comme des feuilles mortes errant sur des allées – poussées par le vent vers un monde insensible à leurs attaches – et à cette ardeur née de l’origine…

 

 

Une voix, un visage. Et l’étranglement progressif de la gorge qui n’a osé vivre – et se défaire de ses ambitions – pour glisser dans le silence…

 

 

Une fierté traversée de soupirs et de larmes qui arrache l’herbe folle et se pend à quelques idoles pour donner un peu de sens à son existence – et paraître moins vide – et moins triste – qu’elle n’en a l’air…

 

 

A la lisière de tous les sentiers (nous) attend un silence – un parfum d’éternité qui attendrit la rage des pas et le besoin d’exister. Un univers mystérieux qui ne s’atteint qu’à genoux au milieu du désert et des amours fragiles traversées – l’aiguille de la souffrance pointée comme un dard – et la tête déchargée des rêves de rencontre. Seul(s), en somme, aux frontières de nous-mêmes…

 

 

Jeux encore après l’écartèlement. Jeux toujours – piochés dans l’escarcelle du temps…

 

 

Semences et récoltes de la zizanie pour les yeux aussi indifférents que les pierres – et toujours insensibles aux murmures et aux poèmes lancés par-dessus les murs…

 

 

L’usure du monde – l’usure du temps – ressassées par nos aïeux – balayées par la main tenace qui porte le regard au-dessus des visages et des années…

 

 

De la nuit, l’aube semble grise – irréelle. Elle n’est, pourtant, que l’autre versant de notre visage dégagé du rêve et de la pluie…

 

 

Le secret du temps et de la mort livré à ceux dont la faim s’est convertie en Amour – si proche des chemins où s’épuisent les désirs…

 

 

Exister – comme la fleur discrète – et innocente – au milieu du monde. Comme l’eau des rivières et l’herbe folle devant les yeux assoupis et indifférents. Libres des bouches qui y puisent leur substance et des foulées qui les traversent ou les piétinent. Ivres du même soleil qui porte l’Amour et l’effacement au-dessus des soupirs – au rang des plus hautes vertus du monde…

 

 

Crasse et lueur. Dans la tentation des yeux. Le rêve d’un seul chemin – d’une seule étoffe – qui se porterait comme le jour. A genoux, les yeux découverts et l’âme amoureuse embrassant jusqu’aux brumes noires qui flottent au-dessus du monde – et au-dedans des têtes recluses dans leur nuit…

 

 

La mort – la révélation d’un monde inapproché – traversé mille fois pourtant, les yeux fermés – aveugles encore à l’éblouissement de la lumière…

 

 

Le sacre du monde honoré par le chant de l’oiseau qui coule jusqu’à ces pierres noires contre lesquelles nous sommes adossés…

 

 

Un bruit, un poème. Un seuil pour faire éclore le désir le moins sauvage. L’enfance au milieu de l’aveuglement. Le silence parmi les bruits. L’éternité au-delà des siècles…

 

 

Un vent léger souffle encore sur le désordre et les désastres – et tourne les têtes vers ce dedans trop délicat pour les yeux barbares…

 

 

Une légende – un mirage souvent – entaille la volonté – l’ultime désir de se défaire. Comme si le mythe et l’illusion étaient plus tenaces que l’innocence qui attend (pourtant) sans impatience – et dans le silence – à proximité de nos bruits et de nos élans fatigués…

 

 

Des mots brûlés – déchirant d’aveux – écrits avec la plume – et le cœur – trempés dans l’encre du monde et de l’âme – essentiels peut-être – abscons sûrement – délivrant leur message dans l’urgence de l’inespéré. Incapables, pourtant, de faire frissonner les hommes qui rêvent au fond de leur cachot…

 

 

Quelque chose éclate pour nous sauver – et dégringole, comme une fuite du temps, pour nous faire franchir l’impensable…

 

 

Le recueil véritable est celui de la fragmentation rassemblée – le silence et le langage éparpillés comme les gouttes et l’écume qui retrouvent leur unité sur la page – au fond de l’océan. Immobiles et dessinant, d’un même élan, la figure de notre rêve – le visage parfait des retrouvailles…

 

 

Fulgurances, parfois, qui traversent l’opacité des yeux, du monde et de l’âme. Jaillissant au milieu de la cécité pour rompre – trop précocement sans doute – la certitude d’un visage – d’une vie – et ôter notre résistance à ne voir que la laideur sur ces rives un peu tristes où l’éblouissance et le merveilleux sont, trop souvent, dissimulés par le noir…

 

 

Le poème jette une lumière sur la multitude – et nous invite à plonger au cœur du même visage. La poésie est le monde surgissant entre les rêves. L’évidence de la beauté au milieu du sang que font jaillir les instincts…

 

 

Il faut creuser sous la cendre – trouver dans les flammes matière à parfaire le regard posé sur le monde. Il faut du silence et un désir puissant de lumière pour porter la tête haute – humble et fière – et déterrer la grâce cachée derrière les charniers. Il faut être un homme sans illusion – debout au milieu des preuves – pour interpeller ce qui, en chaque homme, végète dans la barbarie…

 

 

La poésie est un cri lancé vers le ciel – une force brute qui s’abat comme une sentence – un poing levé contre l’ignominie, la cécité et la couardise. Le poème est l’invitation – et le lieu – de l’envol. La réponse aux larmes et à la cendre laissées par les hommes à leur départ. C’est la métamorphose du rêve en réel – le rayonnement pur de la poussière que soulèvent nos pas.

La poésie, c’est l’incandescence portée jusqu’à la transparence. C’est le ciel descendu enfin jusqu’à nous – et une danse vers son ascension et son plus tangible rapprochement…

 

 

La vie et la mort des vivants – aussi grossières que le labeur terrestre. Armes et outils à la main. La soumission commune au monde et la liquéfaction, sans répit, des corps et des âmes…

 

 

Partout, la démence et ces pauvres mesures de démantèlement pour réorganiser – et reconstruire – le prolongement d’un monde déjà ancien – périmé…

 

 

La couleur et la neige. Et le frémissement du rocher sur lequel tout se bâtit…

 

 

Le monde comme un orchestre aux notes et aux visages dissonants – disharmonieux – incomplets pris séparément – par petits bouts – au-dessus de chaque parcelle – et étrangement beaux et équilibrés lorsque le regard est capable d’envol – et de voir le tout depuis les hauteurs – en surplomb de la terre…

 

 

Eveil encore au fond de ce qui s’élève. Le partage de la première heure et du soleil novice qui traversent les averses et les siècles de cette nuit pleine – entière – infranchissable…

 

 

Le printemps, les rêves et le hasard – tout un arsenal à la dérive. Le sang, les fleurs et les groseilles – le festin offert par la vie aux voyageurs qui titubent sur leur fil. Et l’hiver, la solitude et la mort – les fruits de l’achèvement de tout voyage avant le définitif effacement…

 

 

A quoi bon l’homme si la bulle se perce. A quoi bon le ciel si la nuit est impardonnable. Et à quand les rives lointaines sur ces crêtes chavirées d’ennui. Et à quand la vie plus libre que le jour… lorsque l’âme saura (enfin) se suspendre au silence et à ce qui reste lorsque tout a été perdu – et abandonné…

 

 

Aux pieds de quelques lignes, cette évidence de la vérité, entrée (presque) par effraction dans l’encre du poète – assis au milieu de ses pages et du silence venu ébranler quelques certitudes…

 

 

Epaules, joie et sanglots – et leur dénominateur commun : la solitude et le mystère – ce silence évidé de tout sens. L’être pur, en somme, qui se moque des siècles et des outrages – et qui n’attend personne pour vivre heureux – avec ou sans postulant. Le sacre de tous les sacres, en quelque sorte, qui efface les visages et les noms pour préparer, sans doute, le plus bel avenir de l’homme…

 

 

L’éternel visage de ce qui demeure à travers les siècles et les modes. L’atemporel du plus vif secret qui se dissimule sous maints simulacres et bagatelles…

 

 

Rien n’échappe à la convoitise – pas même la vérité. Et c’est un grand malheur que de se saisir de tous les « il y a » – sans comprendre la téméraire et discrète splendeur du regard – de ce qui voit sans rien s’approprier…

 

 

Enfants d’une terre au même visage – mordu(s) mille fois par la mort – et jeté(s) autant de fois dans la misère – à l’ombre de ce qui ne peut encore éclore…

 

 

Balayée la croyance d’un autrefois, d’un ailleurs, d’un plus tard. Balayés le temps, le monde et l’homme commun pour l’être le plus ordinaire – celui qui vit au milieu des clous parmi presque rien – et qui s’avance, pourtant, vers les malades – vers tous ceux qui errent au fond de leurs désirs – sans le moindre blâme. Celui qui a ressuscité les fleurs sous la cendre et la braise laissées par le grand feu des hommes. Assis sous le même arbre depuis mille ans – depuis le début du monde peut-être – laissant les pas aller dans la nécessité de ce que certains appellent le hasard. Ivre d’un ciel dont l’envergure l’étend jusque dans le silence et l’acquiescement – l’Amour comme une brindille dépassant de ses lèvres…

 

 

On s’endort parfois encore au milieu des rêves – dans la douce (et trompeuse) certitude d’exister et d’avoir un avenir à vivre, à bâtir, à défendre – dans cette folle ambition de vouloir étendre notre voix, notre main et notre sang au-delà du cercle fragile – et éphémère – au-delà de notre visage qui n’est qu’une goutte – qu’une vague peut-être – infiniment passagère dans l’océan…

 

 

Eclatés en un seul visage – fragments rudes – âpres – vertigineux – du même mystère – du même silence – nés de cet élan – de cette danse insatiable pour se désunir et se retrouver…

 

 

Loin devant les vivants, cet ici – préféré au ciel et aux mirages – cette présence plus vaste – et plus simple – que Dieu au visage et à l’envergure si énigmatiques – et si mensongers sûrement…

 

 

Assis près des Dieux, les hommes à la figure emblématique dont l’âme s’est dissipée – avalée, peut-être, par le brouillard. Et devant nous, ces yeux – cet espace – rejoint(s) par l’hiver et cet Amour blotti au milieu de toutes les tempes…

 

 

La langue se fait parfois âpre – effrayante – et éminemment dangereuse – lorsqu’elle pourfend les rêves – entaille ce contre quoi nous sommes blottis. Elle secoue – elle éveille – à travers quelques battements de cils et les volets clos – ce que nous avons gravé à l’envers de notre sommeil…

 

 

Plaines, visages et sourires défaits – annihilés dans leurs tentatives de soumettre les vivants à la mort. Parole brève – gestes concis – comme un chant – un chemin – une lumière – pour dire ce qui s’avance en nous – et lutte contre tout éloignement…

 

 

Profil bas – enivré de sang et de promesses – et de cette gloire offerte à l’innocence et à cet Amour (à peine) replié sur lui-même. Comme un temps divisé – une heure – une vie – au milieu desquelles gît l’instant – annonciateur d’un Dieu sans nouvelle – d’un Dieu sans représailles – pour ce qui s’approche lentement vers son centre…

 

 

Pieds nus au fond du plus sauvage. Tête accroupie sous le silence. Bras levés d’où s’envole, entre les rires et les tombes, le message de ceux qui ont vaincu leurs croyances…

 

 

N’importe quoi pourvu que le tunnel – le passage – soit franchi. N’importe quoi pourvu que dure l’incendie. Hommes et sages au corps à corps – dans une lutte insensée – visages grimaçants sous le poids de la volonté – et cette folle ambition de convertir tous les yeux – toutes les âmes – aux chimères de leur message. Et tous redoutant le poète dont les sandales dansent au milieu des vents – au milieu de tous les élans – un sourire nu sur les lèvres qu’aucun dogme ne peut pervertir…

 

 

Rêves, blés, désirs. Cette folie joyeuse des vivants à aller à contre-courant du sens – à se laisser porter par les instincts – ces élans si risibles – si naturels – et si pardonnables depuis l’indicible – depuis l’impénétrable…

 

 

Depuis le règne du sang jaillissent mille chimères – et l’œuvre des poètes pour enrichir l’espace voué aux histoires et aux mensonges – et dépouiller le regard – creuser l’intervalle nécessaire à la fouille et à la découverte de l’impensable…

 

 

Neige lancée comme le jour sur la terre – la brume – l’indésirable. Comme des crocs jetés presque au hasard parmi les rêves et les nuages pour dire – et redire encore – les privilèges de l’enfance sur la vieillesse – et tout ce qui s’égare au fond de la ligne du temps inventée pour survivre à la braise et à la glace où sont emmurés les vivants…

 

 

Un souffle sur l’indigence et la paresse. Un éclat – mille éclats peut-être – pour terrasser le sommeil et le malheur. Et affranchir le monde d’un destin suspendu à quelques lèvres et aux assauts mercantiles. Redressant un rivage – le seul possible pour que revivent en nous l’usage du réel et le sacre d’un Amour plus équitable qui partagerait sa tendresse avec tous les visages sensibles et disponibles…

 

 

Tables, couronnes, fruits – cette atroce passion des hommes pour l’amassement. Le rejet de tout voyage – de toute échappée. Le monde – et la terre – comme des voies navigables où chacun se faufile pour creuser à même le sol quelques pauvres chemins de richesse – quelques failles entre les rives incertaines de l’innocence…

Pauvres vivants, en vérité, livrés au sable et à la désespérance…

Terres étrangères au pays natal offertes à la houle des siècles sans même l’espoir d’un jour tranquille et d’une tendresse à partager…

 

*

 

Tout extérieur n’est que l’intérieur projeté. Nous vivons dans la représentation d’un monde qui nous ressemble…

 

 

La monde existe peut-être (qui peut savoir) sans le regard que nous posons sur lui. Mais c’est toujours avec la couleur de notre perception que nous habillons les formes qui le peuplent et les interactions qu’elles nouent entre elles…

 

 

Pour aimer le monde, il convient d’abord de s’en éloigner (de façon physique) avant de pouvoir vivre dans la distance intérieure nécessaire à la proximité des visages et des choses…

 

*

  

On ne fait – ni n’agit – plus pour obtenir quoi que ce soit – mais pour prolonger (ou répondre à) un élan naturel et spontané – né de la joie ou de la nécessité…

  

*

 

Lumière – lumière – première – neuve – élémentaire – qui serpente et s’immobilise entre les rives et les crêtes pour illuminer les incendies allumés par les hommes dont les visages, trop lointains, ne peuvent vivre au-delà des cendres…

 

 

Rocher, soir, étoiles. Quelques laisses – et un peu de sueur à nos attaches. Et ces vêtements lourds encrassés de sang. L’allure exemplaire des hommes qui arpentent la terre, la boue et la nuit – en quête d’une ligne au-dessus de l’horizon – d’un Amour moins fragile que leur chair – d’une aire de répit où ils pourraient (enfin) jeter leurs rêves et leur colère – à la recherche d’une bouche, en somme, qu’ils pourraient embrasser sans pudeur – et avec urgence et rudesse – pour conjurer leur peur et leur faim…

 

 

Epaules rudes descendant des montagnes. L’âme aiguisée au mystère – au silence – dont les yeux invitent à sauter par-dessus les carnages – et à danser parmi les larmes et les étoiles sur l’obscur planté si haut – planté si loin – partout où nous vivons…

 

 

Racines vendangées là où tout s’abreuve – là où tout s’égare et s’égaye. Bribes de personne au cœur d’un monde où les noms et les visages durent plus que de raison…

 

 

Flammes vivantes au milieu d’une parole qui désosse la mémoire. Mains brèves – furtives – entre le début et la fin des rêves. Quelques fluides : un peu de sang – un peu de sueur – et cette semence qui a la folie de se répandre parmi les désastres pour léguer son héritage…

 

 

Une langue qui claque comme une gifle sur la certitude et l’espérance. Pour éveiller – faire naître peut-être – la peau neuve du monde enroulé autour de lui-même – au centre de ces profondeurs qui donnent à nos yeux le goût du rêve…

 

 

Peines multiples – nous condamnant à défaire ce que nous avons bâti et érigé au nom du plus vivable. Nous condamnant à anéantir les constructions qui ont alimenté la haine et les frontières. A devenir ce que nous avons haï – et tant redouté. Ce plus nu – ce plus simple – sans visage porté par l’Amour et la candeur – cette sensibilité recouverte – soucieuse (depuis toujours) des monstres qui nous défigurent et entaillent notre véritable vocation

 

 

Tout est mort – ou destiné à mourir. Et tout se relève, pourtant, et recommence dans l’angoisse permanente de la chute et de l’effacement…

 

 

Espoir et désespérance lancés au jour. Jetés par-dessus les larmes et les désirs. Balayés d’un geste par l’envers du silence – cette face en nous persuadée de notre inimportance

 

 

Enfance, nuages, et mille inconnus au-dedans de cette nuit qui a pris des allures de fête pour oublier – et repousser – (si vainement) la mort…

 

 

Marcheurs courbés – tête lasse – occupés à des jeux sans importance – à des existences sans horizon – livrés à des soucis, à des savoirs et à un destin qui jamais ne pourront traverser la mort – ni s’en affranchir…

 

 

Routes entre les étoiles promises et l’espérance d’un rêve – d’un ciel. Parcours au milieu des vagues et des tempêtes. Et, pourtant, n’existe qu’un seul chemin – qu’une seule lumière – au fond de ce qui nous engloutit déjà…

 

 

Ce qui monte du jour a le parfum de l’hiver. Et ce qui tombe de la première étoile, l’odeur indéfinissable des saisons qui recommencent…

 

 

Un matin, un vertige. Et l’élan nécessaire à tout voyage. Et le goût du péril pour rejoindre ce qui vit – immobile – sous la chair – cette âme peut-être à l’envergure infinie – l’inimaginable caché au-dedans de ce qui s’écoule – et qui finit par s’éteindre et s’effacer…

 

 

La vie écartèle et rompt ce qui s’insinue sous les masques – dans les failles. Favorise le naufrage de tout ce qui avance – et précipite nos voilures vers le pays natal. Ouvre, en quelque sorte, les racines d’un chemin qui mène vers la seule étoile de l’homme : l’effacement et le recommencement du monde livré aux assauts permanents des mal-pensants – et trop assujetti au rêve et à la décadence pour embrasser les dérives et la tendresse qui surnage entre la semence et le sang…

 

 

Main tendue vers quelques étoiles – quelques nuages à demi morts. Un cercle au-dessus de la toile suspendue au milieu de la boue.

Songes, sang, ciel, terre. Quelques souffles – quelques idées entre les tempes – passagères. Un vent – un feu – venus se blottir contre notre paume…

 

 

Le destin d’un homme – bribes de lumière – à califourchon sur le pire et le rêve – entre la matière et l’invisible – réfutant Dieu pour le silence…

 

 

[Lointain hommage à René Depestre]

Noires, mortes, perdues. Une petite lampe sur la terre pour toutes les âmes vaincues par la poussière – tordues par le doute et les prières – marchant au milieu de leur douleur – d’un jour sans soleil – dans l’ombre grandissante de la nuit et du sommeil.

Une petite lampe sur la terre pour offrir un peu de courage – et un peu d’allant – à tous ceux qui errent au milieu de leur désir – au milieu de leur partage – pour dire le plus sacré et ce qui se mélange sans se perdre.

Une petite lampe sur la terre pour donner à voir ce qui enfante et prolonge le monde ; le silence de tous les débuts – et la force qui traverse le chagrin et la mort…

 

 

Ennemis, guerres et cet exil au fond des forêts parmi les vents rieurs – au-delà des hommes et des siècles pervertis – dans cet antre mystérieux où s’enfantent les poèmes…

 

 

Source de tous les périls et de tous les franchissements, cet âge d’or enveloppé de sommeil qui sait traverser les siècles et la mort – recouvert par tous les temps d’ardeurs contraires, de boue et de symboles. Bravant l’orgueil et la hargne des hommes pour défaire, peu à peu, leurs certitudes…

 

 

Trop de luxe, de drapeaux et de bonheur – trop de prétextes, de rage et de rancœur – pour traverser la blancheur du miroir – et laisser s’épanouir la rose première – le chant inimitable du silence parvenu au bord de l’âme, après un long voyage dans ses profondeurs – remontant, un à un, les courants des délices et des instincts pour rejoindre la source natale – la source originelle – qui enfanta le monde, les hommes, les arbres et les bêtes plongés dans le chagrin et la détresse…

 

 

Jeux et mensonges d’un sang sans maître ni bailleur – qui se répand avec panache pour une gloire infime et inutile…

 

 

Larmes incertaines. Quelques mots dans ces heures désœuvrées comme une fragile accalmie pour les mains en quête du jour – comme un destin creusé à même l’âme – à même la chair – pour étouffer le sang sacrilège – et abolir ses méandres et ses œuvres de basse noblesse – encensés pourtant par les hommes. Le début d’une ère nouvelle où apparaissent déjà, dans la brisure des signes et l’éloignement des pas, quelques merveilles anciennes – quelques axiomes premiers – la fantaisie, un peu hermétique, du silence et la parole innocente et émerveillée des poètes…

 

 

Un flot de lumière sur le visage de l’Autre lancé depuis nos décombres – et nos déchirures encore gisantes dans l’ombre…

 

 

Un tumulte, quelques ruines et maintes voix qui s’élèvent pour dézinguer la torpeur – cette brume épaisse – opaque – sur le bitume et dans les âmes – porteuses d’un secret qui ne s’offre qu’aux icônes – à ces visages privés de chair – et dont le destin, pourtant, ravive l’allant des hommes…

 

 

Ombres, partout – de tous côtés – glissant – et nous faisant glisser – vers cette nuit profonde – indomptée – infranchissable sûrement – dont la splendeur brille (déjà) au fond de nos âmes – irrésistiblement attirées vers elle comme vers un miroir aux reflets trompeurs et facétieux…

 

 

Carcasses dans la brume – poings et voix levés vers l’inconnu – cet étranger à l’imperceptible odeur – à la silhouette silencieuse – et à l’envergure insoupçonnée – presque invisible lorsqu’il s’avance vers nous pour détruire toutes les promesses du monde, anéantir l’espoir et nous plonger la tête au milieu de ce qui cisaille et déchire – au milieu de ce qui ouvre et dégorge l’inutile avant de jeter à terre nos costumes, nos masques et nos cottes de mailles qui ont relégué le rêve à cette folle tentative d’exister en bâtissant au-dedans, et aux alentours, d’imparfaites et risibles forteresses…

Place sauvage où tout est démonté – déconstruit – pour un avenir improbable – et un présent solide et ressuscité…

 

 

Homme sans idéologie qui plonge son encre dans le vent et la mort pour éloigner le monde de ses dogmes – et dont la voix si droite – si innocente dans le silence – n’est pas entendue…

 

 

Pas de rire ici – qu’un long passage – dense – obscur – où le pire arrive – et où les hommes s’enlisent, s’entre-tuent et s’enterrent dans un long gémissement qui recouvre le ciel et le chant un peu triste des âmes qui s’élève un peu plus haut…

 

 

Une porte dérobée au milieu des paysages dessiné(e)s à notre intention. Un jardin, quelques pelletées de charbon pour passer l’hiver et réchauffer ce grand frisson qui dure – presque permanent depuis que nous avons condamné notre enfance à vivre hors de sa patrie…

 

 

Une nuit sans pareille blottie contre notre sein – exaltant nos mains assassines – et cette flamme de détresse brûlant jusqu’à nos yeux…

 

 

Traître – et triste – cette couronne posée en équilibre sur nos têtes coutumières de la foudre et de l’orage – familières des rires lancés à l’infortune des rivages. Ingrate, en somme, à l’égard de ce qui se partage…

 

 

Une poigne – un choc brutal – nés de cet accident du réel survenu au milieu de la quête pour brûler l’espérance et l’illusion…

 

 

Et ça souffre de cette cruauté animale chez les hommes au regard plein de songes – plein de mirages. Et ça crie – ça couine – et ça râle – comme des appels – des cris – presque inaudibles – et que nul n’entend – ni les hommes, ni les Dieux. Las – bien trop las sans doute – d’attendre ce qui ne vient pas – ce qui ne viendra, peut-être, jamais…

L’Amour, la vie et la mort comme les jeux de l’impossible entente entre l’innocence et les fronts meurtris – comme le prolongement d’un secret qui se cache – insaisissable – entre la découverte et le néant – ce point de passage où se délite ce qui est conquis – et où s’ouvre l’inconnu – la présence d’un ailleurs ici même – à cet instant précis…

 

 

Une voûte plus haute que l’infini. Et un ciel plus vaste dans ce ciel trop étroit pour nos yeux brûlés par le sommeil qui rêvent d’une joie – et d’une tâche – incapables de s’imposer sur cette terre…

 

 

Sous les cendres, cette main si douce qui enveloppe les restes – ce peu de chair qui entoure encore les os – et qui les jette dans ce soleil étrange – lointain – qui n’aura su réchauffer ni les hommes ni les bêtes de leur vivant…

 

 

L’enfer et la mort. Que de paroles vaines pour dire ces lieux où nous sommes plongés – tête et âme. Dans ce bain de larmes – avec le poids du chagrin qui habite nos yeux – et notre front courbé sous la fatigue qui n’aura su trouver la paix parmi ces visages…

 

 

Personne. Comme un désert encerclé – et soulevé – par l’Amour. Des yeux seulement – et quelques âmes – portés par la mélancolie et l’ignorance – arrachant, dans leur attente, un peu de glaise pour dénicher la source…

 

 

Des pierres, des pensées, quelques rêves pour oublier cette faim au fond de l’âme qui s’épuise sur ces rives. Un miroir, un ciel, quelques attaches. Et le plus vieux désir du monde qui cherche son assise chez les hommes…

Paroles maintes fois reprises – répétées comme une vieille litanie – lancées sur les pages de livres que nul ne prend la peine d’ouvrir – et qui tombent, comme nos larmes, au milieu de la poussière et de la cendre laissées par tous les incendies…

 

 

Danses d’hier – pas d’aujourd’hui – deviendront chute et silence demain – lorsque l’enthousiasme se sera éteint – et que le monde s’en sera allé vers d’autres visages, d’autres rythmes, d’autres rengaines…

 

 

Qu’avons-nous donc pour survivre sinon ce fol espoir – sinon ces bras noués à nos propres retrouvailles. Et ce silence fier – mystérieux – qui accompagne chacune de nos foulées…

 

 

Il n’y a rien qui ne vaille nos combats, pensons-nous illusoirement. Terre, monde, visages, forêts, richesse, idées – loin du pays des choses – loin du silence. Mais, ici, tout s’embourbe et se perd. Tout se dégorge et s’achève. Tout meurt de notre propre main à vouloir trop montrer – trop reprendre – trop donner. Et l’Amour n’a nul besoin de soldat…

 

11 mai 2018

Carnet n°146 Envolées

Regard* / 2018 / L'intégration à la présence

* Ni journal, ni recueil, ni poésie. Un curieux mélange. Comme une vision – une perception – impersonnelle, posée en amont de l’individualité subjective, qui relate quelques bribes de cette vie – de ce monde – de ces idées – de ce continuum qui nous traverse avant de s’effacer dans le silence…

Nous sommes le jour qui vient – qui monte – de cette nuit première. Nous sommes la peur et la joie d’être plus vivants que les morts. Nous sommes ce qu’il faudra anéantir – et effacer – pour que demeure ce qui nous échappe – ce qui nous élève et nous rapproche de notre vrai visage. Nous sommes les fleuves, l’océan et le poème. Le vent qui cingle les visages et la pluie qui gorge les sols de la terre. Nous sommes la vie, le temps et les moissons abondantes. Nous sommes la faim – et le rien que dessine la main sur le sable et les destins. Nous sommes l’orage et le miracle. Nous sommes les larmes, les bêtes et les hommes. Nous sommes le rire et ces grands arbres que l’on abat pour passer l’hiver. Nous sommes les fleurs et le soleil posés au milieu de l’infortune. Nous sommes l’esprit, l’âme, les merveilles et la richesse – et la figure des mal-lotis. Nous sommes ce qu’un seul poème – et des milliers de livres – ne suffiraient à décrire. Nous sommes la langue et ce qu’elle cherche à travers ses dérives – ses excès – ses silences. Nous sommes Dieu – le monde – et tout ce qui les peuple et les entoure. Nous sommes le voyage, les voyageurs et tous les chemins – et la route que nous avons oubliée depuis trop longtemps pour nous reconnaître…

 

 

Cette fièvre dans le sang qui a anéanti tant de peuples et de merveilles – laissant la terre à demi morte – exsangue – et, sous la boue, cette vermine grouillante prête à ressurgir partout sur la terre et dans les veines…

 

 

A demi-mot, nous susurrons ce qui ne peut s’épanouir que dans le silence – dans notre absence…

 

 

On frissonne parfois dans cette nudité de l’éternel. Et nous n’avons que nos bras pour nous réchauffer – et cet Amour qui émerge là où tout est glacé – recouvert par nos yeux plongés dans le sommeil, le rêve et l’indifférence animale…

 

 

Un arbre, une maison, une colline. Et ce mariage insensé – et mystérieux – du ciel et des yeux qui se pose comme un miracle sur ces rivages tranquilles – presque banals. Et nos pas sur la neige qui a recouvert la boue des chemins. Et cet Amour qui perce comme un soleil venu réchauffer les âmes – notre âme – et exalter la joie des récoltes et des saisons. Lisses, à présent, au milieu du monde – au milieu du silence – cet arbre, cette maison, cette colline…

 

 

Nous sommes l’haleine de la terre – et ce qui rôde dans les parages. La vie, l’amour, la mort – et cette odeur – cette couleur – de déjà vu

 

 

S’abandonner au silence de ce qui s’est tapi dans le regard – posé au loin – posé au plus proche – et qui console ce qui vit au milieu des pierres – ce vivant à l’âme et à la chair si fragiles – et parfois trompeuses – si soucieuses de traverser les frontières…

 

 

Nous-mêmes pris entre les âmes – entre les choses – déposées là pour on ne sait quelle obscure raison. Nous-mêmes, plus tard, devancés par tout ce qui nous précède – et loin de tout ce que nous avons laissé derrière nous – ici même où s’est effacé le hasard – en ce lieu que les sages appellent de leurs vœux – et de leurs prières – à cet instant même où la foudre a frappé pour éloigner nos yeux de la prudence et du sommeil. Au milieu de ce qui nous sépare et de ce qui nous rejoint. Assis sur cet escalier hors du monde – hors du temps – pour contempler la solitude des hommes…

 

 

Nous sommes le jour qui vient – qui monte – de cette nuit première. Nous sommes la peur et la joie d’être plus vivants que les morts. Nous sommes ce qu’il faudra anéantir – et effacer – pour que demeure ce qui nous échappe – ce qui nous élève et nous rapproche de notre vrai visage. Nous sommes les fleuves, l’océan et le poème. Le vent qui cingle les visages et la pluie qui gorge les sols de la terre. Nous sommes la vie, le temps et les moissons abondantes. Nous sommes la faim – et le rien que dessine la main sur le sable et les destins. Nous sommes l’orage et le miracle. Nous sommes les larmes, les bêtes et les hommes. Nous sommes le rire et ces grands arbres que l’on abat pour passer l’hiver. Nous sommes les fleurs et le soleil posés au milieu de l’infortune. Nous sommes l’esprit, l’âme, les merveilles et la richesse – et la figure des mal-lotis. Nous sommes ce qu’un seul poème – et des milliers de livres – ne suffiraient à décrire. Nous sommes la langue et ce qu’elle cherche à travers ses dérives – ses excès – ses silences. Nous sommes Dieu – le monde – et tout ce qui les peuple et les entoure. Nous sommes le voyage, les voyageurs et tous les chemins – et la route que nous avons oubliée depuis trop longtemps pour nous reconnaître…

 

 

(Un) regard sur : ni journal, ni recueil, ni poésie. A la fois perception – vision – impersonnelle et instantané subjectif sur quelques bribes de cet étrange continuum qui nous traverse avant de rejoindre le silence…

 

 

Naufragé d’un rêve qui se serait éteint – d’une brume, aujourd’hui, disparue. Quelque chose qui aurait grandi à l’ombre du sommeil – devenu, à présent, le fruit de tous les passages – la fleur d’une aurore autrefois déjà présente…

 

 

Tout s’avance davantage dans le jour. Êtres et choses au bord du regard – happés par le silence – glissant vers cet instant – cette heure parfois – où la nuit s’est dissipée…

 

 

Tout s’émeut de notre présence. Même les pierres et les hommes, si indifférents autrefois, deviennent sensibles à notre partage

 

 

Seul(s) au milieu des merveilles qui dansent dans notre regard. Seul(s) au milieu de ce qui s’efface – et s’acharne à revenir…

 

 

Humble(s) et discret(s) – comme la parole du poète anonyme, nous allons pour nous seul(s) entre les lignes des siècles rejoindre ce qui ne nous cherche plus…

 

 

Le vent passe – s’égare (souvent) au milieu des visages dépourvus d’envergure. Il cherche à franchir l’affolante géographie des traits dont l’ombre, parfois, s’éclaire sous la lumière de quelques étoiles. Il cherche la lisière – la voie des oiseaux sauvages qui traversent le ciel bordé de nuages…

 

 

Dans l’empyrée d’un monde dont l’absurdité des rêves confine, peut-être, au sublime…

 

 

Tout langage est une chute – une dérive née d’une volonté d’ascension – enfanté par le mariage – l’union provisoire – du silence et du cri qui rêve de fixer ce qui passe – et d’atteindre ce qui n’est accessible qu’en deçà de la parole…

 

 

Tout est obscur à la fenêtre malgré le ciel. Tout a la couleur de l’encre et la nostalgie de la neige…

 

 

Nous luttons contre un sable insensible à la propagation du ciel – dans un temps impossible – et qui, pourtant, s’écoule. Nous luttons contre les vents – contre la glace – contre l’indifférence du monde – avec des mots volés à l’innocence…

Il faudrait peut-être, pour vivre mieux, casser nos jouets – taire la parole – et rester suspendus au silence. Ne pas même dire ce qui passe et ce qui demeure lorsque les jours ont délaissé leur bohème – leurs chimères – leur religion – toutes ces idéologies qui mènent les existences à la baguette. Il faudrait s’allonger en dessous du monde et laisser s’effacer les désirs et les saisons. Devenir aussi libres que les oiseaux de passage – et aussi beaux et fragiles que les fleurs. Se laisser mourir sans craindre ni les yeux, ni les visages qui s’avancent et se détournent. Se convertir à l’éternel…

 

 

Sensible à l’authentique. Yeux et mains nourris de l’essentiel – du plus sacré, sans doute. Joints, à présent, au silence…

 

 

Captif encore parfois de cet appel – lointain – premier – exigeant – qui réclame le témoignage de la traversée – et le prolongement du désert malgré les visages – la continuité du silence dans le monde…

 

 

Rôle singulier – initiatique – du monde qui dévoile (progressivement) ce dont il est privé. Sa fonction première peut-être – comme une cage à la porte ouverte – l’étroit passage qu’il faut franchir pour rejoindre, derrière les ailes du désir – derrière la misère des vivants – la vie pleine dégagée des drames – servante de tous et de cet ailleurs – si proche – enfoui en nous-mêmes…

 

 

Quelque chose, en nous, persiste qui ne condamne ni l’infini, ni le monde – ni même la parole. Quelque chose comme un silence et une fougue à vivre – et à dire – ce que nul ne veut découvrir – et n’est encore prêt à entendre. Comme une fleur qui se dresse dans l’hiver – et contre l’indifférence des hommes sans rien réclamer sinon le droit d’exister et d’aller jusqu’à la mort à contre-courant des saisons et du sens commun. Comme une eau entre des murs labyrinthiques qui s’écoulerait discrètement jusqu’à sa source…

 

 

Corps et têtes plongés dans les eaux du monde. Et l’esprit, telle une bulle, remontant (progressivement) à la surface – irrésistiblement attiré vers les hauteurs – et parvenant, parfois, à rejoindre l’espace en surplomb des vagues…

 

 

Rien ne nous arrêtera – pas même la mort, sans cesse, renaissante. Nous irons toujours sur ce fil tissé de nos blessures, à travers nos ruines, vers cet éternel enfantement

 

 

Face au jour, cette douleur. Et sur le front, quelques épines – abandonnées là par la couronne qu’auront emportée les vents…

 

 

Enfouis au fond d’une terre qui nous ignore – chavirés par ses eaux qui serpentent entre nos boussoles – cherchant le seul rivage où se perdre – où les vents nous déferont de ce qui, en nous, persiste – à mi-hauteur – entre le ciel et la boue…

 

 

La roche encore – rude – friable – qu’il nous faut abattre et escalader dans le dévouement au plus sacré. Et attendre l’homme à mi-parcours – toujours prisonnier des yeux, des failles, des cordes et des broussailles – pris entre le doute, les questions et la crainte de l’abîme…

Exister encore pour que s’effacent les interdits – que reculent les brimades et que s’assèche un peu le temps. Devenir le bégaiement tragique des hommes et leur plus haute étoile. Mendier d’une main l’abandon que l’autre façonne. Dire encore le menu du voyage, la disgrâce, l’effacement et le silence. Et mourir sous le labeur du jour, l’âme et la main attelées à leur tâche…

 

 

Deux pierres, un visage, quelques pas. Et cette échelle posée entre les horizons. Et le ciel si serré contre nos âmes. Et cette ardeur – cette fougue – qui donne l’élan et la force de supplier pour conjurer la malédiction du départ et les périls de la traversée…

 

 

La terre est noire. Autant que nos yeux posés sur la lave – et nos corps mélangés – englués – coincés dans le magma. Roche bouleversante, pourtant, où les pas étirent notre passion pour toucher – rejoindre – un soleil – une lumière – perdu(e) et inaccessible…

 

 

Poitrine serrée où la vie a reflué parmi les secrets et le silence étonné de l’âme. Un désir encore – celui d’entendre le monde supplier notre chant dans le crépitement des flammes où les suppliciés brûlent encore – brûlent toujours – comme à la première heure.

Siècles vains – désastreux – nourriciers, pourtant, de toutes les histoires aux allures de drame…

 

 

Arbres, livres, poème, silence. Un petit chemin où le cœur dessine un monde peuplé de bêtes et d’innocence. Voilà notre ivresse – et notre quotidien assouvi. Le ciel et la nuit dansant ensemble dans la confusion des sens, la tête tout étourdie de réel et de baisers…

 

 

Un destin anonyme d’envergure céleste où la chair serait un soleil au milieu de l’âme – sans honte pour les vivants – et sans fascination ni pour les fous, ni pour les hommes, ni pour les sages. Le pardon limpide – transparent – sous nos ailes besogneuses. Dieu et le poète ouvrant ensemble le passage où tout peut arriver ; l’envol, l’Amour et la mort – et cette lumière que nous nous échinons à faire éclore – et à traverser…

 

 

Le versant de l’aube le plus long – et le plus vivant peut-être – où l’étreinte se reflète dans tout ce qui se mêle et s’ignore – où la solitude a le goût des étoiles retrouvées – et où le chemin devient fenêtre sur le monde et l’invisible…

 

 

Seules demeureront, peut-être, quelques empreintes sur le sable. Le signe de l’effacement…

 

 

Le destin d’un Seul – clair – lumineux – définitif – éternel. Et le sort de la multitude – opaque – sombre – hésitant – provisoire – indéfiniment tant que n’aura pas été découvert – et ne sera pas habité – l’unique visage…

 

 

Les noces du désir et de la mort sur ces rivages où tout se distingue. Les larmes comme un vertige – l’abolition du monde – le rapprochement inexorable de l’Un...

 

 

Si las de ce monde ancien avec ses guerres et ses visages insensibles à toute autre promesse que celle de l’or – avec ses fronts querelleurs et ses mains obstinées qui creusent – et saccagent – la terre. Avec les butins de l’arrogance et de l’ignorance suspendus à toutes les poitrines comme d’horribles trophées…

 

 

Dieu est mort – la religion agonise – et la spiritualité titube sous le poids du consumérisme, du désir et de l’indécision ; cette tiédeur des âmes qui refusent tout engagement – tout risque – toute responsabilité – soucieuses seulement de leur développement – et de leur salut – terrestres. Et dans ce fatras (transitionnel) vers une nouvelle terre, nous avons toutes les peines du monde à voir émerger le nécessaire en l’homme…

Un adieu fécond, voilà, sans doute, ce qui nous sauverait de cette ronde absurde – de cette pagaille où l’on chante le silence sans se soumettre à ses exigences…

 

 

Des joutes, des râles. Et tout un arsenal qui prête à rire. Des rêves plein la tête – et la mémoire brisée – rompue – pour survivre à l’atrocité que nos mains ont façonnée dans l’insouciance…

 

 

Prêts de nous, ceux qui vivent avec plus d’instincts que les bêtes. Ceux qui dénaturent le rôle – et la portée – des étoiles. Ceux qui jurent, les deux mains plongées dans le sang. Ceux qui piétinent les poèmes. Ceux qui guettent la lumière penchés sur leurs livres. Ceux qui jouissent de leurs pauvres jouissances. Ceux qui se réjouissent de l’abondance – et de cet or amassé sur le dos des mal-lotis. Ceux qui font commerce de tout – et qui vendent jusqu’à leur âme pour quelques richesses supplémentaires…

N’est pas né le jour de l’Amour – le règne de l’humilité et de la tendresse. N’est pas née encore l’ère des retrouvailles

 

 

Ombre, poussière. Un peu d’encre sous le soleil pour célébrer l’humilité nécessaire. Quelques lignes encore pour chanter l’effacement indispensable…

 

 

Forces neuves sous le sérieux et l’austérité – pour explorer le vaste continent sous la langue – le silence – cet oubli du monde…

 

 

Tout est folie – démence – en ce monde – jusqu’à la joie des ébats. Tout s’approche et se guette. Tout s’avale et se gifle. Et, pourtant, tout toujours s’accompagne…

 

 

Qui écoute – qui est capable de se réjouir du silence – et de vivre à l’écart des fous… Qui sait vivre sans penser – et penser sans jugement… Qui sait être lui-même profondément – et intensément libre au milieu des visages et des fleurs…

Qui sait offrir à la solitude son lit de roses – et aux hommes l’espérance d’un effort – d’une montée étrange où l’abandon signe à la fois la chute et l’envol… Qui sait vivre – et être – le mystère vivant – et ressentir la complétude souveraine au milieu du chaos…

 

 

Au fond de la chambre, vaincue, cette âme éprise – le sommeil plongé dans le froid – apte, à présent, à vaincre la mort – à transcender la fin – pour une indéfinissable continuité – une étrange éternité…

 

 

La nuit comme une grève immense – un rivage accidenté – une falaise – un long mur qui soumet les cœurs à l’infirmité. Des yeux dans le noir – inquiets – angoissés à l’idée de vivre – et de mourir – sur ce versant où les chants ne sont que des larmes déguisées…

 

 

Amour, fenêtre, désespoir, incendie. Les traits d’un monde incompris – incompréhensible peut-être. Et cette dévotion pour le feu, et, un peu plus tard, pour la cendre. Et cette inclination à la rudesse – comme une tristesse versée dans la colère face à ce qui laissera toujours les mains vides…

La morsure et le baiser. Et les pieds dans la fange – sous la lumière d’un ciel hilare – et triste, aussi sans doute, de voir son génie contesté par les destins…

 

 

Voici revenus le temps de la mort – le soupir et le rire de l’invisible parmi nous célébrant le règne indiscutable du feu et de la poussière…

 

 

Aussi loin que pousse le regard – jusqu’au morcellement de l’atome et de l’horizon – recombinés – et reconstruits en infini perceptible…

 

 

Trop douce et trop mièvre est l’époque – derrière la violence à peine conjurée – entre ses parois de verre – ses lanternes et ses écrans. La grande célébration du numérique qui captive les esprits – et endosse le rôle du rêve et de la nuit. Jetant les ruines de l’histoire les unes sur les autres – sans ordre précis. Etalant la réclame – toutes les propagandes – parmi les savoirs vite consommés. Offrant aux visages la possibilité d’une notoriété passagère. Façonnant un monde de figures calfeutrées derrière les clics et les lumières clignotantes. Abêtissant les cerveaux – reléguant les âmes à la marchandisation – et nous éloignant du temps, à jamais révolu peut-être, des véritables prophètes…

 

 

Lanternes, tribus, collines. Et la route qui serpente entre tous les territoires. Un soleil assidu – et vagabond – cherchant dans la nuit un appui – une aide – pour redresser les âmes – célébrer le sol et la fin des horizons – et amorcer le début d’une nouvelle ère où les visages auraient l’humilité – et l’envergure – de la terre…

 

 

L’enfer n’a disparu. Les mêmes lames au croisement des chemins. La même pagaille née des désirs et des assauts. Le même désert où sont plongés les yeux. Et cette candeur des âmes égarées parmi les galaxies – trop lointaines pour voyager à l’abri des chimères. Et ces lèvres tournées vers n’importe quoi – vers n’importe qui – pourvu qu’on approuve leurs rêves – leurs espoirs – tous leurs délires…

 

 

L’écriture, sans doute, est trop grave – trop dense – et si vaine pour les hommes aux yeux clos – pour ces âmes (encore) gonflées de désirs – pour ce monde où les flammes ont dévasté la nécessité du questionnement et de la réflexion – et recouvert la lucidité et le goût de la vérité

L’encre lancée comme un pont entre l’ignorance et ce qui s’interroge n’aura, sans doute, été qu’une passerelle pour celui qui l’a jetée sur la page…

Notre visage s’était, pourtant, présenté comme le miroir d’un monde oublié – un phare dressé contre la bêtise et le sommeil – mais devant lui, tous les yeux se seront détournés…

 

 

Au côté du vent toujours, cette mémoire défaite. Ce goût (intense) pour le présent – ce qui surgit à l’instant où nous nous tenons – sans même l’appui du souvenir – ni même le désir d’un ailleurs ou d’un après…

 

 

Le ciel, le cœur et la forêt. Et ces pas, si légers, sur les pierres. Et ces notes, comme tombées d’un ailleurs – d’un soleil inexprimable. Et cette façon d’aller si libre – et si innocent – sur les pages et les chemins…

 

 

Pénétrer dans l’intime matière des choses – et le silence au milieu des visages. Effacer les ombres pour révéler ce que dissimulent les masques et la fatigue – cette lumière au cœur de tous les rêves…

 

 

Enfermés dans le cercle du temps – à compter les pas et les points de passage dans cette ronde sans fin… Pourtant, la liberté existe – en deçà des pas – au milieu du regard suspendu au-dessus du sommeil. Dans cette clarté qui veille au-dedans des yeux fermés qui ne rêvent que de s’ouvrir – et d’échapper aux danses du monde – pour visiter les surplombs et cet horizon que cachaient les murs…

 

 

Nous vivons face aux choses – face au monde – face aux êtres et aux circonstances – le nez plongé dans leur odeur – le regard collé à la surface – aux apparences – soumis au même noir que les enfants qui se cachent les yeux avec les mains…

Du ciel nous ne savons rien. De l’océan nous ne connaissons que ce que nous en disent les poissons attrapés dans nos filets. Et de la terre nous ne voyons que le rouge – et l’or – étalés devant nous…

La lumière, partout présente – et dominante partout – nous est – presque totalement – étrangère. La seule couleur du monde sera toujours celle où glissent notre sang et notre faim…

 

 

Nous vivons face à la nuit – au milieu de l’hiver – avec ce feu – et ces flammes – inventés par les hommes oublieux du secret du monde et des choses – reléguant la lumière aux seuls élans des fous et à la prière de quelques visages obstinés…

 

 

L’aube atteinte – l’aube réfléchie – l’aube saturée – n’est pas (et ne sera jamais) l’aube véritable. Elle n’est que le reflet de l’aube première – originelle. L’ersatz et le miroir aux alouettes, en quelque sorte, de la seule aurore possible…

 

 

Un coin sauvage au milieu de la terre – au milieu de l’azur. La fin de l’hiver – la fin de la nuit. Comme le vol des oies sauvages ouvrant la route vers le soleil – la seule voie possible vers l’impensable…

 

 

Que deviendra le jour – et que deviendra la nuit – sous cette lumière sans brouillard… Que deviendront les pas – et que deviendront les lignes sans même le désir d’un destin… Et où irons-nous dans l’absence d’étoiles… Serons-nous aussi vagabonds que la route – et aussi sages que les fleurs qui voient passer tous les convois…

 

 

Nous irons encore ceinturés par notre élan – au milieu des vents qui donneront un peu d’air à notre visage – au cœur d’un désert posé au croisement de tous les chemins – pour découvrir le centre du voyage – cette aire où l’âme peut enfin rejoindre notre foulée et le silence…

 

 

On nous a ensevelis sous les miroirs – et sous les prières. On nous a dit de voir – et de croire – de perpétuer la promesse d’un Dieu à notre image. On a jeté la vérité au milieu des flammes pour donner à nos gestes un semblant – un simulacre – de fraternité. On nous a dit de respecter les anciens – et la tradition millénaire des hommes. On nous a plongés dans l’ignorance pour donner souffle à l’espoir d’un ciel – d’un visage penché sur notre misère. Et on nous a menti. Et de ces mensonges, le premier homme n’en a que faire. Il voyage – continue de voyager – en se dressant comme un vaisseau au milieu du monde – en vénérant l’incertitude et le silence laissé à l’abandon. Il navigue sans trace, sans repère et sans boussole parmi les rires et les hommes. Et jette son encre dans quelques paroles pour dire l’évidence d’un Dieu véritable, caché partout, hurlant sa joie et sa douleur au milieu de ceux qui se mirent et prient encore…

 

 

Tout commence par la brume – la bouche pâteuse à notre réveil. Les yeux fermés sur l’intime. Et l’harmonie passagère des regards tournés vers nous. Puis, arrivent les premiers pas – les premières gloires – les premiers émois – avant que la langue ne découvre les premiers mensonges. La défaite et l’ignorance des hommes. Leur crainte de vivre et leur peur de la mort. L’arrogance partout qui rivalise avec l’effroi. Le sommeil où fleurissent les rêves et l’espoir. Et la découverte du sensible qui offre aux ombres un espace de répit. Puis, les dernières désillusions franchies, jaillissent le désir d’une autre vie – d’un autre monde – moins douloureux, la solitude et la fouille ardente. La traversée des brumes et du désert – animé de son seul visage. Le commencement de ce long voyage vers soi-même entre le doute et la certitude…

 

 

Etoiles, écharpes, volutes. Le ciment de tout désir. L’alcôve où se terre le monde. Et l’abri de toutes les infortunes…

 

 

Nous sommes l’autre face du jour – son versant de multitude et d’abondance avec ses pierres, ses fleurs et ses visages endormis à l’ombre du sommet – pétris de doutes et d’espoir d’atteindre, avant la mort, la crête où le soleil brille au milieu de la nuit…

 

 

Têtes renversées. Peurs disséminées partout. Voix et pas broussailleux – maladivement fiers – rêvant de favorable et de certitude en ces contrées construites à la hâte pour dissiper le doute – et vaincre le temps et la mort…

Voie ouverte contre le vent et le silence trônant plus loin – au-dessus des âmes dont les poches pleines d’or et de pierres ralentissent la marche…

 

 

Un souffle passe – plus ardent que la colère – ôte aux ramures leurs feuilles et aux hommes leurs rêves. Comme un trait au milieu de l’automne dessiné par la douleur…

Et la sève, refluant au centre du cœur, se dresse – résiste aux assauts du vent mêlé à la joie et au soleil qui regarde notre chute – notre effritement – nécessaires à l’invalidation des larmes – et à la venue, sans conteste, du royaume de l’hiver. La seule route possible – la seule route envisageable – vers le silence – cet espace divin qui loge au cœur du regard et qui, seul, peut transformer le monde, les yeux, les fleurs et les visages – toute cette peine entassée sur les pierres…

 

 

La vie – les hommes – devenus mémoire – s’abritent de l’ardeur nécessaire à la marche, à la fouille et à la découverte de l’innocence…

 

 

Le monde est un chant sous la terreur – sous l’effroi – que n’entendent que les arbres et les poètes. Inaudible par les hommes et les bêtes – trop occupés à se désaltérer aux eaux des fleuves et à récolter les fruits de leurs semailles…

 

 

Ce qui mendie ouvre l’espace – libère la terre de ses lois – celles qu’ont reprises les hommes pour gouverner le monde et ses créatures. Comme le pire outrage, peut-être, au Divin – à son exercice et à sa découverte…

 

 

Celui qui écoute lave les pieds de celui qui juge – et vitupère – coincé entre la colère et son besoin de visages. Celui qui écoute panse la douleur de celui qui est blessé. Celui qui écoute devient le centre du monde – l’espace nécessaire pour guérir ceux qui saignent – et libérer les hommes de leurs frontières. Il se fait Dieu à la modeste figure face à ceux qui souffrent et qui crient. Il est le premier pas vers la fin de l’enfer – le début du silence que réclament les âmes et les têtes plongées au milieu du désastre…

 

 

Nous chuchotons au monde une parole trop vive – une parole qu’il ne peut entendre – et qui propose, pourtant, une issue pour vivre heureux parmi les pierres, les visages et le silence – pour vivre sans inquiétude l’imminence de la catastrophe. Une voie pour transcender la mort et notre destin livré aux malheurs…

 

 

Des mots pleins – denses – presque reptiliens – mouillés d’une magie étrangère à ce monde – chargés d’un réel – d’une vérité peut-être – qui ont la beauté – et la modestie – de l’herbe – et la grâce de l’eau qui s’écoule et qui abreuve, sans même le vouloir, les terres qu’elle traverse…

 

 

Nous sommes le charme et les blessures. La chambre où s’empilent les restes de notre sommeil. Nous sommes le nom et les magiciens. Nous sommes les signes et la fumée. La peau qui éclate sous les coups et le baume qui sèche les larmes. Nous sommes ce qui tombe et se relève. Et le goutte-à-goutte qui s’écoule sur ceux qui se prosternent. Nous sommes le rêve et la nuit. Les noces du miroir et du feu. La tombe, la mort et le crépuscule. Nous sommes ce que les hommes appellent l’Amour. Et le silence qui traverse le temps. Nous sommes la lumière. Nous sommes l’infini – et toute la démesure de nos divagations…

 

 

Nous creusons un coin près de l’œil où tombe tout ce qui nous échoit ; visages et circonstances qui, peu à peu, se convertissent en mémoire – cette (douloureuse) expérience du temps qui nous maintient captifs d’un monde à l’apparence si vivace…

 

 

Nous veillons sur des continents aussi vastes qu’une feuille morte – près d’un puits à l’eau si pure – si claire – qui initie ceux qui s’abandonnent à la magie de l’infini et du présent – hors du monde – hors du temps…

 

 

Un bain – comme un répit peut-être – dans les cimes du langage en compagnie de notre (propre) écho – revenu des parois du monde qui l’amputèrent et le rendirent (presque) infirme. A quelques encablures de ce sommeil – et de ces angoisses – qui, autrefois, nous terrifiaient et gouvernaient notre fouille et notre parole…

 

 

Au cœur d’un retour – d’une grâce – où le fragile et l’éphémère émerveillent – et où le nom n’est qu’un son prononcé à l’intention des imbéciles. L’étonnement passe, puis déterre ce qui gisait là sous le sommeil. La mort devient belle – prend une allure vivante – moins triste – et se fait signe et passage des plus folles promesses. Le jour devient libre – et plus sage. Les visages perdent leur morgue. Tout s’accueille sans le poids de la mémoire. Nous devenons alors le chant – et ce qu’il tentait de toucher autrefois. Moins soucieux d’hier – et moins inquiets de ce qui se trame, en cachette, dans les malles du temps inventé par les hommes…

 

 

Nous portons le même souffle que la terre – et le même courage que les bêtes que l’on mène vers la mort. L’âme enfouie – et le visage recouvert seulement d’un peu de glaise. Bien au-dessus de la faim qui anime les bouches et les mains qui se mettent en quête de leur pitance. Aussi près du seul désir de l’homme qu’est loin la sagesse du monde – hors de lui sans doute…

 

 

Nous déclarons comme les idiots et les fous notre ignorance – la mort de Dieu – et close l’ancienne ère de l’espérance. Nous affirmons – et célébrons – la présence – l’instant – et la capitulation du temps. Le règne de l’infini au cœur de la plèbe et du mensonge. Et l’effacement des noms et des rivages. L’envergure du silence à portée de regard. Et le réenchantement du souffle après cette fin du monde…

 

 

Nous confions notre chant aux hommes – à ceux qui viendront exalter cette promesse. Et proclamons à leur intention l’extinction de la parole et la consécration du monde et du silence…

 

 

Fervent jusqu’à la mort – et au-delà – pour que jamais ne meurent la poésie et les poètes – les chants et le silence. Pour nous défaire des fanatiques et des partisans triomphants du néant et de l’apocalypse – éveiller ce qui gît au fond du sommeil – et que rayonnent de joie les visages affranchis des idéologies…

 

 

Libre – mystique – incompréhensible peut-être – cette parole. Sensuelle – réhabilitante – dans un monde voué à l’habitude, à la paresse et à la somnolence. Innocente – merveilleuse (si l’on peut dire) pour échapper à l’ignorance et à la brutalité des siècles. Verticale parmi toutes ces têtes si horizontales. Atemporelle, en somme, pour que durent l’extase et l’envol – au-delà de l’expérience. Et définitivement inachevée – et inachevable sans doute…

Pointe d’une vérité infinie perdue – cachée dans les méandres et la boue des têtes encore ignorantes. Un archipel – une issue – contre la barbarie, les saccages et l’incessante roue de l’infortune alimentée par les songes, le sommeil et les promesses…

Avec un élan – un goût – passionné pour la vie et pour l’Autre dénudé – affranchi de tous les masques…

 

 

Ni guide ni prophète – à peine un poète. Une plume, peut-être, trempée non dans le simulacre et les apparences mais dans le plus vieux rêve de l’homme. Dévoré par cette ardeur à faire éclater la vérité partout où elle est niée et rejetée au nom du conformisme et des traditions – partout où la torpeur et la certitude ont remplacé la curiosité et l’interrogation…

 

 

Homme vivant parmi les morts et les nouveaux visages. Paroles libres et profanes vouées à la désacralisation du mystère pour le rendre accessible à ceux qui demeurent étonnés…

 

 

Une parole – quelques lignes – comme le fer rouge sur la peau des suppliciés. Comme un vent ancien revenu vers nous avec l’annonce du printemps…

 

 

Vertige au-delà du rêve et du néant – mariant l’infime et l’immense – le monde et le silence – notre vrai visage libéré de l’horreur et du temps. L’espace où la pierre et la poussière deviennent les seules foulées du voyageur – et où les yeux et les noms s’estompent pour une folle liberté…

 

 

Nous marcherons encore au-delà de ce qui vient pour enflammer cette aire où le sang n’est plus le véhicule des chimères…

Figures autour d’une seule voix pour transformer l’horizon en leurre, puis en désert et en lumière afin d’ouvrir à l’Amour le chemin le plus direct et le plus sincère. L’authentique voie vers ce qui demeure au-delà de la mort – et au-delà de toute fin. L’impossible, l’infime et l’impensable réunis dans notre main – libre d’aller alors là où le monde et les circonstances l’appellent – vers des jours et des siècles plus visionnaires que nos anciens détours…

 

2 mai 2018

Carnet n°145 L’âme, la prière, le monde et le silence

Journal poétique / 2018 / L'intégration à la présence

Une parole, comme une fenêtre, donne à voir le monde – et dans le monde, les pierres et les visages – et derrière, le plus vaste – l’infini qui se dérobe…

Quelque chose – quelqu’un peut-être – crie, murmure et danse au fond de notre absence. Un Dieu – un jour – plus vrais que notre vie – plus vrais que notre chair et notre visage. Le silence, peut-être, aussi pur que la neige…

Hors de la mémoire subsiste le rêve d’un franchissement – cet allant qui nous porte vers nous-mêmes. Avec, dans chaque main, une lune aussi ronde que le jour – aussi ronde que le temps – et ces barreaux qui emprisonnent nos têtes – éclairées déjà par cet inépuisable désir de lumière…

 

 

Pays de seuils, de deuils et de peu de scrupule où les visages ont les traits de la mort et de la lumière – et le voyage, des allures de tombeau (de triste sépulcre) – où l’effacement, pourtant, sonne la réconciliation du regard avec les ombres et les pierres – le franchissement des frontières qui nous séparent de ce qui dure – et l’émerveillement sur ce qui passe sur le fil du temps…

 

 

L’aube encore, partout – en éclairs qui s’offrent à travers les grilles de nos cages…

 

 

Des rivaux, mille limites au-dedans de tout ce qui s’émiette et s’évapore. Grains, flaques, buée. Comme la tentative discrète (et incomprise) de sonder les mystères du monde…

 

 

Toujours à distance de ce qui nous sépare – et dont le franchissement sonnerait, pourtant, le glas des frontières…

 

 

La poésie de l’Autre comme l’étincelle qui propage le feu de notre (propre) parole poétique – le prolongement d’un silence véhiculé par des lignées de voix à l’âme éprise – fascinées par ce qui les dépasse – le mystère de toute vie et de toute naissance – et la possibilité de vaincre la mort et l’apparence, parfois si atroce, de ce monde…

 

 

Nous marchons souvent comme les fous et les morts – dans cet outrage (permanent) à la vie et aux vivants – sans savoir que nos pas sont porteurs d’un mal incurable – multiple ; l’ignorance et la nécessité de la survie qui donnent à nos foulées des allures d’outil sacrilège dont chacun use et bénéficie autant qu’il en paye le prix…

 

 

Les poches pleines de cette joie qui tend la main – et offre à la vie ses mille bouquets – et le rien du partage – pour façonner un monde plus beau et plus vivant – et, sans doute, moins cruel – et donner aux murmures et à l’étonnement le goût du silence…

 

 

Nous pleurons comme les enfants dans les jupes de celui qui ne se laisse voir – et qui ne s’apprivoise que dans le silence – et les prières muettes – sans réclamation…

 

 

Quelque chose – quelqu’un peut-être – crie, murmure et danse au fond de notre absence. Un Dieu – un jour – plus vrais que notre vie – plus vrais que notre chair et notre visage. Le silence, peut-être, aussi pur que la neige…

 

 

La langue, la lumière et le monde. Assis si maladroitement en nous que leurs éclats écorchent davantage qu’ils ne guérissent le doute et les malheurs…

 

 

Supplique mécanique des voix qui, à l’approche du silence, trépignent davantage dans leurs prières. Comme si Dieu pouvait leur faire franchir, d’un seul saut, ce qu’elles ont amassé – et ce qui les encombre – depuis la naissance du monde…

 

 

Un oiseau silencieux patiente dans nos gestes fébriles – guette l’incandescence – ce pourquoi nous sommes nés…

 

 

A notre porte, les frontières du silence sur lesquelles traînent encore nos voix – tous les délires de l’âme épuisée par la prière…

 

 

Yeux percés par trop de savoirs – et trop de pouvoir – aveugles encore à ce qu’offrent la solitude et la candeur…

 

 

Le tumulte des oiseaux, le silence et l’envergure de la mort dans nos œuvres – nos ouvrages – qui défient les colonnes du temps. Appelant, au fond de la solitude, un espace d’émerveillement et de gratitude tourné vers le monde...

 

 

Terre, livres, pierres étalés dans un coin de la chambre ouverte sur le jour – ouverte sur le monde – près des pages sur lesquelles se consument le rêve et la mémoire – et où se clarifie (et se propage) le silence…

 

 

Un versant derrière l’inquiétude – une ombre étalée en signes déchiffrables. La nuit et le rire sur ce que dessinent le ciel et les hommes. Et quelques mirages tracés à la craie. Le froid des jours et le sommeil des visages. Quelques notes encore pour déterrer les racines qui enfantèrent le sang dans nos veines – et ces élans par-dessus les toits pour fréquenter les forêts et les oiseaux qui traversent l’hiver. Le bonheur tout naturel de vivre, en somme…

 

 

L’évidence encore sur ces pentes menacées par la certitude d’exister – et le roulis des pierres emportant les hommes dans leur chute. Une arène, quelques labours pour tacher la neige neuve qui a recouvert le sable. Des années perdues – gâchées peut-être – par l’attente (si vaine) des récoltes – avec, au loin, le chant des oiseaux – rescapés des hécatombes. Puis, de nouveau, le silence et la nuit. L’éternel retour des tristes saisons…

 

 

Que reste-t-il de la parole abandonnée sur le sable… A-t-elle réussi à se déposer, en petits éclats, derrière les fronts…

 

 

Une parole, comme une fenêtre, donne à voir le monde – et dans le monde, les pierres et les visages – et derrière, le plus vaste – l’infini qui se dérobe…

 

 

Ciel, partout, qui déborde – qui dévale et s’insinue là où l’on s’efface…

 

 

Et cette insoumission aux malheurs qui nous éloigne du plus juste. Comme un refus – une insubordination totale à ce qu’est la vie – et à ce que nous offre la moitié du monde…

 

 

Doués d’un vertige que nous ignorons. Comme des animaux blessés – traqués jusque dans leur chair – refusant le silence – la bonté du ciel qui s’offre à la plaie – qui, peu à peu, nous vide de notre sang…

 

 

Un monde où il nous faut composer avec la douleur de vivre – et le mystère de l’être. Un monde sans amitié où l’on révoque – et répudie – les fous, la pauvreté et l’admirable abandon à ce que nous ignorons. Un monde arrogant – et fier de ses conquêtes et de son actualité – qui méprise la mort et l’intelligence. Un monde aux gesticulations pathétiques dont il faut s’éloigner…

L’exil comme unique possibilité, peut-être, pour aimer les visages – chaque visage de ce monde…

 

 

On glisse, on tombe et on se relève – toujours plus léger. Comme si le destin nous façonnait à coup de chutes et de soustractions. Dessinant un chemin – un long chemin de supplices parfois – pour nous initier aux vertus de l’abandon et de l’effacement – à cette humilité docile – authentique – acquiesçante – sans nom ni visage. La seule gloire possible de l’homme, en vérité…

 

 

La lumière, le calme et la solitude. Cet espace plus ample que notre âme qui donne au silence et au jour cette envergure si radicale…

 

 

Quelques cimes encore par-dessus la neige. Dans cette ascension sans fin qui enchaîne les voyages – et les étapes – sous la lumière de ce qui demeure…

 

 

Pas encore si fébriles – soumis aux frémissements du temps et à ces embardées qui ressemblent à d’étranges dérives…

 

 

Nous ignorons le malheur penché sur nous. Comme un œil pris dans les bourrasques et les tourbillons – englué sur les chemins de pierres – au milieu des épaves qui jonchent les paysages du monde – sous la lumière de quelques étoiles qui éclairent (médiocrement) les pas…

 

 

Un nouveau jour – un nouveau printemps – se dessinent sous nos ailes laborieuses. Un visage sur le sable tracé par le chant de la lumière. Quelques pas encore dans la boue. Un éclaircissement de la voix. Le franchissement du seuil où les rêves se rompent pour un espace plus clair…

 

 

Qu’avons-nous (donc) à dire de plus fulgurant que le silence…

 

 

Hors de la mémoire subsiste le rêve d’un franchissement – cet allant qui nous porte vers nous-mêmes. Avec, dans chaque main, une lune aussi ronde que le jour – aussi ronde que le temps – et ces barreaux qui emprisonnent nos têtes – éclairées déjà par cet inépuisable désir de lumière…

 

 

Ici n’est comparable à aucun ailleurs – plus réel que tout autre lieu – toujours embelli par le rêve…

Nous sommes cet instant – et ces visages à portée de regard – à portée de main – qui dansent à la manière des astres autour de leur mort. Nous sommes le sable et la patience des pierres. Nous sommes le vent et le soleil qui griffent – et caressent – la peau. Et ce monde où s’entassent les carcasses. Nous sommes la mort qui suce la chair – et qui léchera les restes de nos os enfouis quelque part sous la terre…

 

 

Entre hier et aujourd’hui, nous avons désappris ce qu’aura inventé le monde pour nous distraire – et nous soumettre à l’obéissance.

Et nous aurons lancé plus d’un poème à la gloire de ce qui ne peut nous échapper. Nous aurons expérimenté l’angoisse, le désir et l’aurore – et cette folle possibilité d’un retour vers ce qui a précédé notre naissance…

 

 

Malgré les dérives de la chair entre la terre et l’horizon des astres, jamais la mort n’évincera cette fièvre d’infini qui dessine, déjà, la courbure du ciel au cœur des prémices du voyage…

 

 

Nous renaîtrons dans les débris du langage – paroles humbles, oubliées des civilisations anciennes, piétinées par les tourments et les égarements du monde. Nous reviendrons comme les visages et la tempête pour défiler le hasard et l’attente (absurde) des vies prochaines – et retrouver le sable, le sang et la terre. Nous deviendrons ce qui s’avance sans frémir – et sans brusquerie – et le moment décisif du passage. La vérité que ne peuvent enfermer – ni avilir – les noms et les désirs. L’aveu d’un possible. La victoire du réel et de l’éternité sur la mort et l’imaginaire…

 

 

Nous ne revendiquons ni la paix ni le recommencement. Ni la vie, ni la mort – ni même l’innocence du renouveau. Et moins encore les idées que nous échafaudons à leur sujet. Nous ne revendiquons ni la connaissance, ni la vérité – mais notre présence – et notre goût pour ce qui demeure au-dedans de ce qui s’efface…

 

 

Sans repère, sans refuge. Dans ce passage permanent du temps qui passe. Entre mille choses – mille êtres – mille visages. Au milieu de tous les gués. Au cœur du regard immobile sur l’incertain qui, en nous, creuse son chemin à travers nos pauvres certitudes…

 

 

Angles, pics, pentes, coteaux et recoins – les multiples visages du même désert. Arbres, pierres, herbes, bêtes et hommes – quelques figures embarrassées devant le même silence – ce mystère à l’œuvre bien avant la naissance du monde…

 

 

Ce que nous révèle le plus seul au milieu des ailleurs rassemblés – parmi tous ces visages éparpillés dont la gloire cessera avec la mort…

 

 

Au seuil de ce vrai nom qu’est l’exil où les errances ne sont plus que joie…

 

 

A chaque souffle recommence la passion – l’élan du verbe qui cherche, à travers ses tirades, son éclosion, son épanouissement et sa fin – jusqu’à l’épitaphe finale – jusqu’à l’effacement – le silence d’avant l’écriture – le silence d’avant le monde…

 

 

Demain sans moi sera la marque du jour – de la liberté née de l’effacement. Le signe que l’élan aura rejoint ce qui l’a précédé – l’origine première du monde, des êtres et des choses…

 

 

Un tremblement accompagne parfois nos lignes. L’indécision du geste et la timidité des mots. Tout autant que l’impudeur de révéler ce qui ne peut être atteint que sans témoin – dans la solitude totale de l’être exilé du monde – à l’écart des yeux dont l’emprise, parfois, peut rester (atrocement) vivace…

 

 

Il ne peut y avoir de croisade contre la bêtise. Le plus bel élan sera toujours celui de l’attente – de l’accueil des grimaces et des simagrées – et du retour à la solitude et au silence. L’exil, en somme. Le retrait nécessaire à la patience au cœur de cette sagesse qui laisse le monde s’extraire, à son rythme, du sommeil, de la prétention et de la faim…

 

 

Laissons nos chants d’adoration se résoudre au silence – et se résorber en acquiescement – en aire d’hospitalité pour accueillir ce qui surgit dans nos vies encore si rêveuses et sauvages…

 

 

L’éphémère n’est jamais le signe du tragique et du hasard. Mais celui de la beauté qui s’offre au plus provisoire. La marque de l’éternel qui nous guide jusqu’à lui à travers nos intervalles…

 

 

L’air, l’eau, le feu et la terre surgissent dans l’espace – et se convertissent en vibration – en souffle. Ils dessinent mille visages pour donner aux yeux l’illusion d’un monde – d’une apparence – pour soulager d’abord notre solitude, puis pour nous y plonger et l’explorer jusqu’à la folie à seule fin de nous transformer en regard – en Amour – en présence pureaffranchie des figures de la diversité…

 

 

A notre suite, la nuit et ses traînées de folies qui nous font nous déhancher pour maintenir une forme d’équilibre au milieu de ce qui tourne sur la neige comme des choses – comme des bêtes sauvages. La fin d’un chemin. Le seuil, peut-être, d’une ère nouvelle où les routes auront la couleur du silence – taché, sans doute encore, d’un peu de sang…

 

 

Notre main s’agite sous la dictée de l’incompréhensible. Elle court, elle court pour dire ce que les hommes apparentent à l’indicible – pour énoncer le moins sauvage du monde et la beauté des âmes abandonnées au cœur des rivages – livrées au froid des sépulcres qui ornent les chemins…

 

 

Nous passons mille jours – et mille nuits – sur terre sans voir ni l’effroi, ni le mystère de ce bref passage. Retenant notre souffle, dès la première heure, pour ne pas crier – et ne pas nous rompre – devant la fureur du monde. Les mots coincés au fond de la gorge laissant tout juste passer assez d’air – un mince filet seulement – pour survivre à l’atrocité de ce qui nous entoure…

 

 

Une route froide – interminable – au milieu de l’hiver. Comme un enfermement au-dehors qui confine l’âme à chercher son feu au-dedans – loin de la cendre et des visages offerts – et comme abandonnés – par le monde…

 

 

Nous nous heurtons à ce que nous avons bâti pour affirmer notre éclat – notre existence. Pourtant, un jour, il nous faudra tout détruire – et anéantir jusqu’au moindre amas – pour effleurer l’espace et la liberté que nous avons emprisonnés dans les tours, si souvent impénétrables, du désir…

 

 

Nous descendons vers un jour que nos lèvres, à force de paroles, ont fini par assécher. Une rosée plus libre – et plus belle – que le poème. Un silence moins fragile – et moins hésitant – que nos lignes. La consécration, en somme, de notre effacement…

 

 

L’espace entre nous – entre les mille choses du monde – en dira toujours davantage que nos vaines dissections et nos inutiles descriptions et analyses des visages et des objets. Le foisonnement et la diversité ne sont que l’apparence d’une unité jusqu’à présent invisible par l’homme. Le monde n’est qu’un corps – et plus exactement, qu’un infime élément d’un corps bien plus vaste – dont nous sommes, de toute évidence, les yeux uniques et éparpillés…

 

 

Un monde, un visage, une terre, une fleur, un arbre, un enfant que l’on rencontre – et que l’on découvre, chaque jour, comme les premiers – et non comme les chaînons d’une suite interminable…

L’espace et le silence au milieu de la solitude et de notre absence – aussi exigeants que leur ampleur. Et les seules conditions pour aimer ce qui vient vers nous…

 

 

Il n’y a d’heures plus belles que celles du plein jour lorsque l’Amour (nous) délivre de ce que l’on a toujours haï, renié, condamné – et que la vie et la mort révèlent la fragilité du plus précieux ; ce regard en amont du feu, des flammes et de la cendre qui livrent le monde et le temps à l’oubli et à la dévastation…

 

 

Pourrait-on seulement nous entendre dans ce silence incandescent – muet à force de coups et de réenchantements affranchis des vertus et des atrocités du monde…

 

 

L’âme, une fenêtre pour demain – ouverte sur l’impensable – l’impérissable. La clarté qui demeure au milieu du sommeil. La seule espérance, en vérité, pour échapper à la nuit de l’homme…

 

 

Prisonniers d’un monde dont les barreaux séduisent et rassurent. Comme du grain offert à la lutte et à l’apitoiement. Captifs d’un sommeil qui donne à la solitude un air de fête et de partage – et à nos ongles le courage nécessaire pour griffer les murs et fouiller la poussière de notre cellule…

 

 

Solitaire parmi la foule – et les souvenirs en pagaille qui rivalisent pour nous donner le sentiment d’avoir vécu une existence digne et appréciable entourée d’âmes aimables et charmantes…

 

 

Le cœur en silence – chargé de trop de poids – de trop d’idées et de trop d’images – pour accepter le vide qui l’étreint et le compose. Mains et âme portant le fardeau commun de l’homme sans oser rompre la malédiction du temps et de la mémoire…

 

 

Une main donne ; l’autre reçoit. Et une âme s’approche des visages qui marchent seuls – ou par deux parfois – ou en groupe, le plus souvent, pour donner du courage à leur solitude ou la tromper par des rires et des connivences fragiles et éphémères – sans même une main – sans même une âme – à laquelle offrir son trésor. Pleurant parfois entre deux élans, le front appuyé contre la vitre qui la sépare du monde…

 

 

Un bruit, une voix, une ardeur où glisse parfois la parole. Et le besoin d’un écho – même lointain – même étranger à notre langue – pour donner à nos lignes – anonymes – une raison d’être et de se faire entendre. A la recherche, peut-être, d’un visage derrière le silence…

 

 

Un monde, un jour, des lèvres. Et cette parole encore franchissant tous les abîmes – et tous les déserts – pour atteindre (et révéler) ce qui demeure au cœur de l’éphémère…

 

 

Quelque chose flotte au-dessus de la vérité. Un sourire – un secret peut-être – qui étonnerait bien des yeux penchés sur leurs livres...

 

 

Dieu lui-même, accroupi au milieu des jeux et des joueurs – agenouillé avec ceux dont les mains se sont jointes en prière – accolé à tous les visages que l’on frappe – retenant discrètement, sans doute, les mains sans pitié qui se jettent dans la bataille. Dieu partout – et plus qu’ailleurs peut-être, dans le silence de ceux qui regardent – conscients de leur impuissance à intervenir – laissant les farces et les farceurs à leurs joutes et à leurs ambitions…

 

 

Tout s’ouvre – et se livre – au feu permanent de la déperdition. Mains, langage, visages, prières. Ce qui s’étreint comme ce qui s’arrache. Ce qui s’avance comme ce qui s’efface. Ce qui passe toujours au milieu du silence

 

 

Nous implorons d’une main le pardon que l’autre piétine. Nous prions l’impossible – la cessation de cette lutte acharnée entre les forces du monde – et des âmes – en équilibre au milieu de ce qui les porte et de ce qui les foudroie…

Il faudrait nous arracher à cette terre qui se perpétue de ses massacres – où ce qui est donné est (presque) aussitôt repris – où tout se prolonge à travers ses crimes – et où les crimes ne sont que les possibilités du renouvellement de ce qui a été blessé – et qui ne peut durer dans la proximité de la violence…

Il faudrait devenir plus grands que les instincts – et plus forts que la peur qui nous incite à continuer – à répandre le pire dans la croyance de pouvoir y échapper. Il faudrait plonger au cœur du feu – et se laisser brûler par les flammes – pour devenir l’eau – et la chair – réparatrices – acquiesçantes – libres des jeux et des atrocités…

 

 

Il n’existe aucune appartenance totale sinon à l’être – à la conscience et à l’énergie entremêlées – unies – à travers la multiplicité de ses visages…

 

 

Comme un cri violent contre la peur. Comme une braise – un soleil – sur la peau que l’on assassine. Et, pourtant, on se tient debout – écorché vif peut-être – mais paré à toutes les sournoiseries – au plus près d’une mort qui nous ressemble…

 

 

Et ces os mal enterrés qui se disputent notre mémoire. Comme la promesse d’une identité qu’ils voudraient éternelle – et qui, pourtant, s’effacera avec l’amoncellement d’autres os, plus neufs, sur les anciens…

 

 

Un théâtre où la parole parodie le silence – où les danses ne sont que l’imitation d’une vie promise à la mort – où les personnages jouent les âmes candides – et où les masques nous font perdre la raison – et que l’on pourrait franchir d’un seul bras levé vers le ciel – au-dessus d’un mondé voué qu’à son propre mirage – qu’à sa propre légende…

 

 

Tout arrive – et s’efface sous la neige. Le silence d’un autre monde – inconnu – incompréhensible – par les hommes. Comme le ventre d’un ogre aussi vaste que le ciel et l’océan réunis. Et nous voilà happés par cette bouche à la langue plus puissante que les vagues. Et nous voilà, bientôt, hachés menu – et digérés – inexistants au milieu du sang et des larmes que l’on entend couler le long des parois…

 

 

Partis encore vers un autre âge – une autre légende – animés par cette foi d’arriver, un jour, quelque part – en des lieux moins tristes et moins noirs...

 

 

Une silhouette se dessine derrière la grâce. La main du vent, peut-être, qui fait défiler les visages pour les rassembler en une seule figure – en une seule voix – celle du silence qui pénètre déjà nos âmes si dociles et sauvages…

 

 

Mains levées contre l’imposture pour ressusciter l’épaisseur oubliée – massacrée – par nos frondes et nos conquêtes. Un pas seulement vers ce que nul ne peut étreindre ni oublier. Le juste endroit où nul jamais ne laissera la moindre trace…

 

 

Un souvenir – la volupté d’un songe – qui porterait l’avenir entre nos mains – et l’effacement au milieu du monde. Comme la seule échappée possible…

 

 

Une parole – quelques paroles – pour soi. Pour ne pas oublier le silence…

 

 

L’ivresse de notre pauvre mémoire tournée vers ce qu’elle ne peut réédifier – les miasmes des souvenirs qui nous font comme un bouclier contre ce qui s’approche – et réclame son dû : notre entière attention à ce qui existe aujourd’hui – à cet instant même…

 

 

Parcours sur des chemins encore trop pentus pour deviner l’horizon promis. Et ces pas dans le juste sillage du silence, porteurs à la fois de tout ce qui nous a précédés – de nos mille voyages antérieurs – et de tout ce qui est nécessaire pour s’affranchir du périple. Ce qui est là présent, simplement, au milieu de notre foulée et des visages à nos côtés – sur ces pierres qui ont déjà vu le monde mille fois tourner et se perdre…

 

 

Boire d’un seul trait à cette source du partage – et offrir aux rivières le déni de la boue et des caniveaux qui nous auront vu nous approcher de l’espace – et jeter nos rêves pour un réel – un monde – plus simple que nos choix – ces demi-mesures toujours vouées à la controverse…

 

 

Nous franchirons les frontières qui nous séparent du sol – du monde – et de cette porte au milieu de nulle part qui débouche sur cet intervalle hors du temps – où le jour embrasse la nuit (et lui pardonne) – où les visages perdent leur effroi pour la couleur de l’innocence – et où le cœur, enfin uni, devient plus grand que toutes les fresques du monde qui dépeignent un Dieu au visage si inaccessible et intransigeant…

 

 

Le poète penché sur ses pages, au milieu de l’automne, se moque du froid, des jours et de la solitude. Quelque chose avec lui s’est penché sur son souffle – sur sa main – pour trouer le ciel des hommes, inventé par la peur et le mensonge. Il dit tout – affirme l’essentiel – et décourage la mort d’arriver trop prématurément et la cendre de recouvrir tout ce que nous avons essayé pour être des hommes. Il sait qu’il ira seul vers ce que le monde ignore – et récuse de (presque) toutes ses forces. Il s’avance, au-delà des égarements de l’âme et du langage, vers le silence et l’effacement – la seule issue possible pour que sa parole devienne éternelle – et puisse (enfin) être comprise…

Un chant au milieu de l’incertitude – celui de l’évidence d’être – et de vivre au milieu du monde et des visages…

 

*

 

Une nuit sans visage. Puis, soudain, le surgissement d’une lumière qui réveille l’âme assoupie et tremblante…

 

 

Une pierre, un bout de terre. Et l’âme déjà plongée au cœur de l’infini. Voilà ce qui nous est offert pour le voyage avant que les visages ne viennent tout ternir et abîmer…

 

 

Un ciel, une ombre et la magie de la lumière qui sait si bien manœuvrer au milieu du noir – au milieu de la nuit…

 

 

Le jour, parfois, nous enchante. Et notre boiterie prend alors des allures d’envol…

 

 

Le chemin se dessine au milieu de tout. Monde ou désert – qu’importent les lieux pourvu que l’âme abandonne son poids et ses rêves…

Nulle part sera, bientôt, rejoint – aussi sûrement que le silence…

 

*

  

Le plus pur de l’âme est le silence – toujours sans patrie – et sans ascendance...

Et nous pouvons le rencontrer lorsque nous devenons le lieu de la prière – affranchi(e) du rêve et du désir. Notre esprit, notre existence et nos mains se transforment alors en aire d’accueil – et se mettent au service du plus sacré et de ce qui se présente devant nous…

 

 

Sois heureux avant que n’arrive la mort – et que l’avenir ne contamine ton sang. Sois heureux des jours – du quotidien – des visages – offerts – livrés à tes mains. Sois heureux de cette nuit où hurlent (encore) les chiens affamés. Ne te méprends pas sur les briques brunâtres empilées par les hommes. Ne te méprends pas sur les fleurs qui poussent le long des rivières. Ne te méprends pas sur le soleil entrevu par la fenêtre de la chambre. Ne te méprends pas sur la manière dont le monde occupe les existences. Sois le premier à la suite de ceux qui t’ont devancé sur le chemin. Sois le premier qui osera être véritablement vivant. Sois celui par qui seront annoncées la lumière et la tendresse. Et qui que tu sois – et où que tu ailles – n’oublie jamais l’infini qui te porte – et de vivre pleinement avant de mourir…

 

 

L’autre côté du monde – l’autre côté des choses – révèle le regard affranchi des griffes du désir et du devenir – soulevé par le silence et l’infini – porteur toujours de la plus grande innocence…

 

 

L’aube encore – souriant devant notre mutisme – devant ce silence qui en dit long sur la nuit, le froid et la pluie que nous avons dû traverser – et sur notre patience à guetter les premières lueurs du jour…

 

 

Une terre, un ciel, une tombe. Quelques sourires, quelques mains tendues, quelques poings levés – vite passés – et si lentement oubliés. Puis, quelques cierges pour accompagner notre dernier souffle – scellant la fin d’une traversée – et la poursuite, bien sûr, du voyage…

 

 

Cette parole (la nôtre) est le signe d’une folie à peine décelable qui se jette entre les tempes pour dire l’absurdité de l’espoir et du mensonge – et détrôner le hasard juché sur les pistes où le langage s’est dévoyé – et a corrompu sa mission d’innocence et de découverte pour devenir l’outil – l’instrument affûté – au service du rêve et de la bien-pensance…

 

 

La mainmise des siècles sur la terre – livré(e)s à mille équations insolubles. Tournant – et faisant tourner les têtes – au milieu d’un suicide programmé. Faces noires – rongées par leur incapacité à se résoudre – et à retrouver la pureté et l’innocence d’avant la naissance du monde et des hommes…

Quelque chose comme une reddition serait, sans doute, nécessaire. Une allégeance à ce qui tremble – à cette sensibilité en amont de l’esprit qui soupèse le pour et le contre et qui finit par détruire tout ce qui l’indiffère – et tout ce qu’il ne peut comprendre…

 

 

On écrit sous l’autorité – et la responsabilité – d’un ciel qui, peut-être, nous fait défaut. On écrit pour rompre l’indifférence et convertir la peur en silence acquiesçant. On écrit pour ceux qui tremblent dans l’arène et ceux qui désespèrent de leur destin. On écrit pour que se redresse ce qui nous sépare de la joie – et l’exposer, bien en évidence, à ceux qui douteraient encore de leurs entraves. On écrit pour rompre et traverser les frontières – et pour ceux dont l’âme est encore prisonnière. On écrit pour tous ceux qui rêvent d’une allégresse et d’une intelligence perdues – fourbues à force de guerres et de malheurs. On écrit à la limite du possible – à la limite de l’exprimable – pour que l’invisible soit vu – et célébré comme la seule loi. On écrit pour affirmer la présence de l’impossible au milieu du monde – et au cœur de chacun. On écrit pour que nous osions enfin être des hommes.

On écrit... et demain, sans doute, écrira-t-on encore…

 

 

L’Amour redonne à la vie et à la mort ce que nous leur avons emprunté. Il rehausse ce que nous avons piétiné – et oublié sous trop de désirs. Il fouille nos yeux à la recherche d’un espace vacant pour y déposer le baiser nécessaire à l’abandon – et scrute notre innocence pour réhabiliter l’écoulement naturel de sa source. Il œuvre ainsi avec patience, tout au long de notre vie, avec l’ardeur des naïfs et l’indulgence des sages – à seule fin de nous hisser jusqu’à ses hauteurs – et de nous voir briller – et rayonner – avec la même ampleur que l’élan qui a su traverser nos origines…

 

 

Ce qui s’ouvre demeure au-delà de la mort. Ainsi continuons-nous, de vie en vie, à rejoindre ce que nous sommes…

 

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