Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
LES CARNETS METAPHYSIQUES & SPIRITUELS

A propos

La quête de sens
Le passage vers l’impersonnel
L’exploration de l’être

L’intégration à la présence


Carnet n°1
L’innocence bafouée

Récit / 1997 / La quête de sens

Carnet n°2
Le naïf

Fiction / 1998 / La quête de sens

Carnet n°3
Une traversée du monde

Journal / 1999 / La quête de sens

Carnet n°4
Le marionnettiste

Fiction / 2000 / La quête de sens

Carnet n°5
Un Robinson moderne

Récit / 2001 / La quête de sens

Carnet n°6
Une chienne de vie

Fiction jeunesse / 2002/ Hors catégorie

Carnet n°7
Pensées vagabondes

Recueil / 2003 / La quête de sens

Carnet n°8
Le voyage clandestin

Récit jeunesse / 2004 / Hors catégorie

Carnet n°9
Le petit chercheur Livre 1

Conte / 2004 / La quête de sens

Carnet n°10
Le petit chercheur Livre 2

Conte / 2004 / La quête de sens

Carnet n°11 
Le petit chercheur Livre 3

Conte / 2004 / La quête de sens

Carnet n°12
Autoportrait aux visages

Récit / 2005 / La quête de sens

Carnet n°13
Quêteur de sens

Recueil / 2005 / La quête de sens

Carnet n°14
Enchaînements

Récit / 2006 / Hors catégorie

Carnet n°15
Regards croisés

Pensées et photographies / 2006 / Hors catégorie

Carnet n°16
Traversée commune Intro

Livre expérimental / 2007 / La quête de sens

Carnet n°17
Traversée commune Livre 1

Récit / 2007 / La quête de sens

Carnet n°18
Traversée commune Livre 2

Fiction / 2007/ La quête de sens

Carnet n°19
Traversée commune Livre 3

Récit & fiction / 2007 / La quête de sens

Carnet n°20
Traversée commune Livre 4

Récit & pensées / 2007 / La quête de sens

Carnet n°21
Traversée commune Livre 5

Récit & pensées / 2007 / La quête de sens

Carnet n°22
Traversée commune Livre 6

Journal / 2007 / La quête de sens

Carnet n°23
Traversée commune Livre 7

Poésie / 2007 / La quête de sens

Carnet n°24
Traversée commune Livre 8

Pensées / 2007 / La quête de sens

Carnet n°25
Traversée commune Livre 9

Journal / 2007 / La quête de sens

Carnet n°26
Traversée commune Livre 10

Guides & synthèse / 2007 / La quête de sens

Carnet n°27
Au seuil de la mi-saison

Journal / 2008 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°28
L'Homme-pagaille

Récit / 2008 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°29
Saisons souterraines

Journal poétique / 2008 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°30
Au terme de l'exil provisoire

Journal / 2009 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°31
Fouille hagarde

Journal poétique / 2009 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°32
A la croisée des nuits

Journal poétique / 2009 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°33
Les ailes du monde si lourdes

Poésie / 2009 / Hors catégorie

Carnet n°34
Pilori

Poésie / 2009 / Hors catégorie

Carnet n°35
Ecorce blanche

Poésie / 2009 / Hors catégorie

Carnet n°36
Ascèse du vide

Poésie / 2009 / Hors catégorie

Carnet n°37
Journal de rupture

Journal / 2009 / Hors catégorie

Carnet n°38
Elle et moi – poésies pour elle

Poésie / 2009 / Hors catégorie

Carnet n°39
Préliminaires et prémices

Journal / 2010 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°40
Sous la cognée du vent

Journal poétique / 2010 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°41
Empreintes – corps écrits

Poésie et peintures / 2010 / Hors catégorie

Carnet n°42
Entre la lumière

Journal poétique / 2011 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°43
Au seuil de l'azur

Journal poétique / 2011 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°44
Une parole brute

Journal poétique / 2012 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°45
Chemin(s)

Recueil / 2013 / Le passage vers l’impersonnel

Carnet n°46
L'être et le rien

Journal / 2013 / L’exploration de l’être

Carnet n°47
Simplement

Journal poétique / 2014 / L’exploration de l’être

Carnet n°48
Notes du haut et du bas

Journal poétique / 2014 / L’exploration de l’être

Carnet n°49
Un homme simple et sage

Récit / 2014 / L’exploration de l’être

Carnet n°50
Quelques mots

Journal poétique / 2014 / L’exploration de l’être

Carnet n°51
Journal fragmenté

Journal poétique / 2014 / L’exploration de l’être

Carnet n°52
Réflexions et confidences

Journal / 2014 / L’exploration de l’être

Carnet n°53
Le grand saladier

Journal poétique / 2014 / L’exploration de l’être

Carnet n°54
Ô mon âme

Journal poétique / 2014 / L’exploration de l’être

Carnet n°55
Le ciel nu

Recueil / 2014 / L’exploration de l’être

Carnet n°56
L'infini en soi 

Recueil / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°57
L'office naturel

Journal / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°58
Le nuage, l’arbre et le silence

Journal / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°59
Entre nous

Journal / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°60
La conscience et l'Existant

Essai / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°61
La conscience et l'Existant Intro

Essai / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°62
La conscience et l'Existant 1 à 5

Essai / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°63
La conscience et l'Existant 6

Essai / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°64
La conscience et l'Existant 6 (suite)

Essai / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°65
La conscience et l'Existant 6 (fin)

Essai / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°66
La conscience et l'Existant 7

Essai / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°67
La conscience et l'Existant 7 (suite)

Essai / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°68
La conscience et l'Existant 8 et 9

Essai / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°69
La conscience et l'Existant (fin)

Essai / 2015 / L’exploration de l’être

Carnet n°70
Notes sensibles

Journal / 2016 / L’exploration de l'être

Carnet n°71
Notes du ciel et de la terre

Journal / 2016 / L’exploration de l'être

Carnet n°72
Fulminations et anecdotes...

Journal / 2016 / L’exploration de l'être

Carnet n°73
L'azur et l'horizon

Journal / 2016 / L’exploration de l'être

Carnet n°74
Paroles pour soi

Journal / 2016 / L’exploration de l'être

Carnet n°75
Pensées sur soi, le regard...

Journal / 2016 / L’exploration de l'être

Carnet n°76
Hommes, anges et démons

Journal / 2016 / L’exploration de l'être

Carnet n°77
La sente étroite...

Journal / 2016 / L’exploration de l'être

Carnet n°78
Le fou des collines...

Journal / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°79
Intimités et réflexions...

Journal / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°80
Le gris de l'âme derrière la joie

Récit / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°81
Pensées et réflexions pour soi

Journal / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°82
La peur du silence

Journal poétique / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°83
Des bruits aux oreilles sages

Journal / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°84
Un timide retour au monde

Journal / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°85
Passagers du monde...

Journal / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°86
Au plus proche du silence

Journal / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°87
Être en ce monde

Journal / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°88
L'homme-regard

Récit / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°89
Passant éphémère

Journal poétique / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°90
Sur le chemin des jours

Recueil / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°91
Dans le sillon des feuilles mortes

Recueil / 2016 / L’intégration à la présence

Carnet n°92
La joie et la lumière

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°93
Inclinaisons et épanchements...

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°94
Bribes de portrait(s)...

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°95
Petites choses

Journal poétique / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°96
La lumière, l’infini, le silence...

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°97
Penchants et résidus naturels...

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°98
La poésie, la joie, la tristesse...

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°99
Le soleil se moque bien...

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°100
Si proche du paradis

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°101
Il n’y a de hasardeux chemin

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°102
La fragilité des fleurs

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°103
Visage(s)

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°104
Le monde, le poète et l’animal

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°105
Petit état des lieux de l’être

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°106
Lumière, visages et tressaillements

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°107
La lumière encore...

Journal poétique / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°108
Sur la terre, le soleil déjà

Journal poétique / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°109
Et la parole, aussi, est douce...

Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°110
Une parole, un silence...

Journal poétique / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°111
Le silence, la parole...

Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°112
Une vérité, un songe peut-être

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°113
Silence et causeries

Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°114
Un peu de vie, un peu de monde...

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°115
Encore un peu de désespérance

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°116
La tâche du monde, du sage...

Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°117
Dire ce que nous sommes...

Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°118
Ce que nous sommes – encore...

Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°119
Entre les étoiles et la lumière

Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°120
Joies et tristesses verticales

Journal poétique / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°121
Du bruit, des âmes et du silence

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°122
Encore un peu de tout...

Journal poétique / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°123
L’amour et les ténèbres

Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°124
Le feu, la cendre et l’infortune

Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°125
Le tragique des jours et le silence

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°126
Mille fois déjà peut-être...

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°127
L’âme, les pierres, la chair...

Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°128
De l’or dans la boue

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°129
Quelques jours et l’éternité

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°130
Vivant comme si...

Journal / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°131
La tristesse et la mort

Récit / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°132
Ce feu au fond de l’âme

Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°133
Visage(s) commun(s)

Recueil / 2017 / L’intégration à la présence

Carnet n°134
Au bord de l'impersonnel

Journal / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°135
Aux portes de la nuit et du silence

Recueil / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°136
Entre le rêve et l'absence

Recueil / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°137
Nous autres, hier et aujourd'hui

Récit / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°138
Parenthèse, le temps d'un retour...

Journal poétique / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°139 
Au loin, je vois les hommes...

Journal / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°140
L'étrange labeur de l'âme

Recueil / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°141
Aux fenêtres de l'âme

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°142
L'âme du monde

Recueil / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°143
Le temps, le monde, le silence...

Journal / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°144
Obstination(s)

Journal poétique / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°145
L'âme, la prière et le silence

Journal poétique / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°146
Envolées

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°147
Au fond

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°148
Le réel et l'éphémère

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°149
Destin et illusion

Recueil / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°150
L'époque, les siècles et l'atemporel

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°151
En somme...

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°152
Passage(s)

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°153
Ici, ailleurs, partout

Recueil / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°154
A quoi bon...

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°155
Ce qui demeure dans le pas

Journal poétique / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°156
L'autre vie, en nous, si fragile

Journal poétique / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°157
La beauté, le silence, le plus simple...

Recueil / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°158
Et, aujourd'hui, tout revient encore...

Journal / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°159
Tout - de l'autre côté

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°160
Au milieu du monde...

Recueil / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°161
Sourire en silence

Recueil / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°162
Nous et les autres - encore

Journal / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°163
L'illusion, l'invisible et l'infranchissable

Journal / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°164
Le monde et le poète - peut-être...

Journal / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°165
Rejoindre

Recueil / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°166
A regarder le monde

Paroles confluentes / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°167
Alternance et continuité

Journal / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°168
Fragments ordinaires

Paroles confluentes / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°169
Reliquats et éclaboussures

Paroles confluentes / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°170
Sur le plus lointain versant...

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°171
Au-dehors comme au-dedans

Paroles confluentes / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°172
Matière d'éveil - matière du monde

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°173
Lignes de démarcation

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°174
Jeux d'incomplétude

Journal poétique / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°175
Exprimer l'impossible

Regard / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°176
De larmes, d'enfance et de fleurs

Récit / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°177
Coeur blessé, coeur ouvert, coeur vivant

Journal / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°178
Cercles superposés

Journal poétique / 2018 / L'intégration à la présence

Carnet n°179
Tournants

Journal / 2019 / L'intégration à la présence

Carnet n°180
Le jeu des Dieux et des vivants

Journal / 2019 / L'intégration à la présence

Carnet n°181
Routes, élans et pénétrations

Journal / 2019 / L'intégration à la présence

Carnet n°182
Elans et miracle

Journal poétique / 2019 / L'intégration à la présence

Carnet n°183
D'un temps à l'autre

Recueil / 2019 / L'intégration à la présence

Carnet n°184
Quelque part au-dessus du néant...

Recueil / 2019 / L'intégration à la présence

Carnet n°185
Toujours - quelque chose du monde

Regard / 2019 / L'intégration à la présence

Carnet n°186
Aube et horizon

Journal / 2019 / L'intégration à la présence

Carnet n°187
L'épaisseur de la trame

Regard / 2019 / L'intégration à la présence

Carnet n°188
Dans le même creuset

Regard / 2019 / L'intégration à la présence

Carnet n°189
Notes journalières

Carnet n°190
Notes de la vacuité

Carnet n°191
Notes journalières

Carnet n°192
Notes de la vacuité

Carnet n°193
Notes journalières

Carnet n°194
Notes de la vacuité

Carnet n°195
Notes journalières

Carnet n°196
Notes de la vacuité

Carnet n°197
Notes journalières

Carnet n°198
Notes de la vacuité

Carnet n°199
Notes journalières

Carnet n°200
Notes de la vacuité

Carnet n°201
Notes journalières

Carnet n°202
Notes de la route

Carnet n°203
Notes journalières

Carnet n°204
Notes de voyage

Carnet n°205
Notes journalières

Carnet n°206
Notes du monde

Carnet n°207
Notes journalières

Carnet n°208
Notes sans titre

Carnet n°209
Notes journalières

Carnet n°210
Notes sans titre

Carnet n°211
Notes journalières

Carnet n°212
Notes sans titre

Carnet n°213
Notes journalières

Carnet n°214
Notes sans titre

Carnet n°215
Notes journalières

Carnet n°216
Notes sans titre

Carnet n°217
Notes journalières

Carnet n°218
Notes sans titre

Carnet n°219
Notes journalières

Carnet n°220
Notes sans titre

Carnet n°221
Notes journalières

Carnet n°222
Notes sans titre

Carnet n°223
Notes journalières

Carnet n°224
Notes sans titre

Carnet n°225

Carnet n°226

Carnet n°227

Carnet n°228

Carnet n°229

Carnet n°230

Carnet n°231

Carnet n°232

Carnet n°233

Carnet n°234

Carnet n°235

Carnet n°236

Carnet n°237

Carnet n°238

Carnet n°239

Carnet n°240

Carnet n°241

Carnet n°242

Carnet n°243

Carnet n°244

Carnet n°245

Carnet n°246

Carnet n°247

Carnet n°248

Carnet n°249

Carnet n°250

Carnet n°251

Carnet n°252

Carnet n°253

Carnet n°254

Carnet n°255

Carnet n°256

Carnet n°257

Carnet n°258

Carnet n°259

Carnet n°260

Carnet n°261

Carnet n°262

Carnet n°263
Au jour le jour

Octobre 2020

Carnet n°264
Au jour le jour

Novembre 2020

Carnet n°265
Au jour le jour

Décembre 2020

Carnet n°266
Au jour le jour

Janvier 2021

Carnet n°267
Au jour le jour

Février 2021

Carnet n°268
Au jour le jour

Mars 2021

Carnet n°269
Au jour le jour

Avril 2021

Carnet n°270
Au jour le jour

Mai 2021

Carnet n°271
Au jour le jour

Juin 2021

Carnet n°272
Au jour le jour

Juillet 2021

Carnet n°273
Au jour le jour

Août 2021

Carnet n°274
Au jour le jour

Septembre 2021

Carnet n°275
Au jour le jour

Octobre 2021

Carnet n°276
Au jour le jour

Novembre 2021

Carnet n°277
Au jour le jour

Décembre 2021

Carnet n°278
Au jour le jour

Janvier 2022

Carnet n°279
Au jour le jour

Février 2022

Carnet n°280
Au jour le jour

Mars 2022

Carnet n°281
Au jour le jour

Avril 2022

Carnet n°282
Au jour le jour

Mai 2022

Carnet n°283
Au jour le jour

Juin 2022

Carnet n°284
Au jour le jour

Juillet 2022

Carnet n°285
Au jour le jour

Août 2022

Carnet n°286
Au jour le jour

Septembre 2022

Carnet n°287
Au jour le jour

Octobre 2022

Carnet n°288
Au jour le jour

Novembre 2022

Carnet n°289
Au jour le jour

Décembre 2022

Carnet n°290
Au jour le jour

Février 2023

Carnet n°291
Au jour le jour

Mars 2023

Carnet n°292
Au jour le jour

Avril 2023

Carnet n°293
Au jour le jour

Mai 2023

Carnet n°294
Au jour le jour

Juin 2023

Carnet n°295
Nomade des bois (part 1)

Juillet 2023

Carnet n°296
Nomade des bois (part 2)

Juillet 2023

Carnet n°297
Au jour le jour

Juillet 2023

Carnet n°298
Au jour le jour

Août 2023

Carnet n°299
Au jour le jour

Septembre 2023

Carnet n°300
Au jour le jour

Octobre 2023

Carnet n°301
Au jour le jour

Novembre 2023

Carnet n°302
Au jour le jour

Décembre 2023

Carnet n°303
Au jour le jour

Janvier 2024


Carnet n°304
Au jour le jour

Février 2024


Carnet n°305
Au jour le jour

Mars 2024


Epigraphes associées aux carnets
 

© Les carnets métaphysiques & spirituels

Publicité
10 décembre 2017

Carnet n°83 Des bruits aux oreilles sages

Journal / 2016 / L'intégration à la présence

A l'écoute des minutes – et des heures – qui passent. Et qui tombent, une à une, dans l'escarcelle de l'ogre aux aiguilles. Tic tac sans fin de l'instant perpétuel sourd aux sarcasmes et aux murmures. Ancré à l'assise mouvante de l'écoute où l'on s'absente à soi-même. Reléguant le défilé des ombres et des fantômes à la main inerte des songes.

 

 

Face à la sauvagerie du monde, le cœur innocent et l'esprit avisé accueillent les mécanismes instinctifs. Et parviennent ainsi à y échapper...

 

 

On est. Sans attribut ni qualificatif. Et il est impossible d'apprendre à être dans l'expérience et l'action. Celles-ci aident simplement à se familiariser avec la conscience d'être. Et lorsque cette conscience devient progressivement plus vive, plus profonde et plus stable, notre être – et notre façon d'être – s'en trouvent transformés. Et ils agissent alors de plus en plus substantiellement sur ce que nous faisons et expérimentons...

 

 

Le corps et l'esprit demeurent sur le fil tendu de la temporalité, suspendus entre l'abîme de l'agrément et celui de l'inconfort. Mais dans l'espace inaliénable – et éternel – de l'impersonnel, le regard – et le cœur – peuvent s'abriter avant d'être en mesure de l'habiter pleinement. Protégés en quelque sorte de toutes les circonstances en dépit d'une extrême sensibilité à l'Existant. D'une totale sensibilité qui, à son paroxysme, se transmute en une parfaite unité avec l'ensemble des phénomènes*.

* Unité entre la conscience et chaque phénomène...

 

 

L'inaltérable vocation des jours pour celui qui est habité par le souffle puissant de la compréhension – et de la résolution du grand mystère de l'être.

 

 

La présence de Dieu dans notre existence. Offrant à l'être son Amour au quotidien. Et, à travers lui, à ceux qui le croisent comme à ce/ceux qui l'entoure(nt)...

 

 

Après la solitude, la tristesse et l'angoisse du silence naît (de ce même silence) la joie du cœur.

 

 

La grande affaire de l'être n'est pas dans l'existence. Ni dans nos agissements passés, présents ou à venir. Elle se trouve en soi à jamais. Et il nous appartient de le découvrir. Et d'apprendre à s'en faire le digne représentant. Et l'humble porte-drapeau...

 

 

Apprendre à découvrir l'être est le chemin. L'habiter pleinement le saint Graal. Mais lorsque l'on y accède, les chemins n'en sont pas (pour autant) interrompus ni achevés. La vie et le monde n'en continuent pas moins d'exister. Et de se renouveler. Et ils n'en finiront d'ailleurs jamais de renaître. Mais notre façon de nous y inscrire se transforme. Et ne cesse de les transformer...

 

 

Le silence est un pays sans sommeil que les bruits du monde ne peuvent entacher. Espace vif et sensible – espace infini et éternel – d'accueil dont les assoupissements ne naissent que de notre inattention.

Découvrir les bruits du monde depuis l'espace de silence leur offre une tonalité différente. Et l'on ressent une sorte d'émerveillement qui ne peut s'interrompre à leur cessation. Comme si le silence savourait sa propre texture indépendamment des bruits qui peuvent le traverser...

 

 

Face à la matière et à la chair fragiles et altérables – mais toujours renaissantes –, le silence du regard. Et le grand sourire des lèvres. Nés de la virginité du cœur...

 

 

Aux yeux des hommes, l'existence est un chemin extérieur d'épreuves et de défis. Et lorsqu'ils ne sont pas soumis aux contraintes, à l'imprévu et à l'inconfort, leur vie est empreinte, l'essentiel du temps, de fadeur et d'inconsistance qu'ils s'empressent de recouvrir de jeux, de distractions et de sensations – de misérables passe-temps en vérité – afin d'en oublier la platitude et la monotonie. Et comme une maladroite façon de se sentir vivant et exister. Voilà la voie commune malhabile et inopérante...

Pour que puisse éclore la joie exaltante de l'être – avec son intensité et sa profondeur – il faut être en mesure de faire face à l'ennui, à la fadeur et à l'inconsistance. Et se rendre compte de l'omnipotence de nos représentations, de nos désirs, de nos attentes et de nos espoirs à l'égard de la vie et du monde. Ainsi que de notre défaut de sensibilité et de sensorialité. Cette prise de conscience constitue sans doute les premiers pas vers l'intensité et la profondeur...

 

 

Le pouvoir, la richesse(1) et le plaisir(2), voilà le seul or de l'humanité. Voilà ce qui anime toutes les hordes sauvages qui se sont succédé sur la terre depuis le premier homme. Héritage à peine affiné de l'archaïsme animal. Révélant, comme toujours, la lente – la très lente et très laborieuse – percée de la conscience dans les esprits où l'ignorance et la cécité règnent sans partage – et résistent avec force à leur naturelle et progressive éviction.

(1) L'abondance et l'argent...

(2) En particulier, l'alcool, le sexe et le jeu depuis déjà tant de millénaires...

 

 

Tout (toute forme) toujours s'élance vers l'expansion et l'infini et résiste aux attaques des autres éléments combinatoires de l'Existant et aux assauts permanents de l'éradication et du néant. Forces et mouvements antagonistes qui donnent au monde sa nature si conflictuelle. Et des allures de champ de bataille perpétuel.

 

 

La vie permanente – la vie incessante et renaissante – si pourvoyeuse d'épreuves et de peines pour le corps, le cœur et l'esprit englués dans la mélasse du monde. Soumis sans trêve à ses fourches. Les blessant, les éreintant, les épuisant, les usant et les fragilisant tout au long de leur courte existence. Et à force d'encaisser sa violence et ses brutalités, voilà l'esprit et le cœur bientôt saturés. Si encombrés et surchargés qu'ils essayent chaque jour (tant bien que mal) de trouver un peu de répit dans le repos, le sommeil et l'abrutissement distractif. Et voilà bientôt le corps si exténué qu'il sombre dans la maladie et s'éteint dans la mort. Vidé de ses ressources et de sa substance énergétique.

La seule voie valide pour se désengluer de cette mélasse intricative s'amorce avec la dissociation – et la désidentification – du regard avec le corps, le cœur et l'esprit engagés dans les situations du monde. Et d'habiter ce regard neutre et impersonnel – cet espace d'accueil – totalement non impliqué mais porté par un Amour infini et une extrême sensibilité, entièrement dévoué à l'observation – et à la contemplation – des ébats, des débats, des sursauts, des réactions et des agissements permanents des forces phénoménales du monde*. Et à travers l'être – et la perception sensible – capable de les pénétrer afin d'éclairer et d'orienter leurs actes à la lumière de l'Amour et de l'intelligence...

* Dont, bien sûr, le corps, le cœur et l'esprit auxquels nous avons pris l'habitude de nous identifier...

 

 

Le regard semble plus facile à cerner – et à comprendre – que le cœur. Les yeux et l'écoute peuvent quitter l'avant-plan égotique pour l'arrière-plan – pour la présence impersonnelle. Mais qu'en est-il du cœur ? Comment passe-t-il de la sensibilité restreinte et autocentrée à l'Amour infini et unitaire ? En dépit de quelques avancées compréhensives, ce processus conserve pour l'heure son indéfectible mystère...

 

 

En matière de compréhension, plus on tente d'éclaircir – et de résoudre – les énigmes de l'être, plus le mystère semble s'épaissir. Voilà sans doute pourquoi il convient de demeurer dans la présence – et l'écoute – vierges et innocentes de l'instant. Et qu'il nous faut également éviter de conceptualiser à outrance et d'élaborer des constructions intellectuelles totalement inutiles... Et il est évident que les événements, les circonstances et les phénomènes nous y encouragent tout au long de notre existence en nous invitant inlassablement à demeurer sans la moindre assise ni la moindre certitude...

Néanmoins le silence du cœur – un cœur sans intention, vierge de désirs et d'attentes – et le silence du regard – un regard neutre et impersonnel – sont, de toute évidence, un refuge pour le corps et l'esprit agités – et malmenés – par les phénomènes du monde.

 

 

L'inconsciente traversée de l'existence – et du monde – avec les stigmates de l'ignorance vissés au cœur. Et le sceau des instincts gravé dans la chair. Ainsi séjournent les hommes sur terre.

Est-ce une malédiction ? Un maléfice ? Non ! Simplement la résultante de la lente pénétration de la conscience dans les esprits. Et sa lente imprégnation de la matière...

Les griffes sauvages du temps. Lacérant les armures. Et déchiquetant les costumes et les rêves. Forçant l'esprit à pénétrer l'étroit – et précaire – goulot de l'atemporalité. Renouvelable à l'infini. Pour se percher sur l'assise instable, mouvante et sans cesse renaissante de l'instant. Et de l'incertitude...

 

 

La compagnie et la parole des hommes – l'échange de propos anodins et futiles, les conversations et même les discussions et les débats – ont toujours souligné avec force ma différence. Ma singularité d'être atypique.

Et la fréquentation des êtres humains a toujours renforcé mon sentiment de solitude et d'isolement. Aussi n'ai-je jamais pu fréquenter l'humanité – ni même la côtoyer plus que nécessaire – ni trouver ma place parmi les hommes. La seule posture confortable et appropriée s'est toujours située à l'écart – et dans l'observation – du monde...

En revanche, avec les êtres singuliers ou affublés d'une différence (quelle qu'elle soit*...) ainsi qu'avec les animaux et au sein de la nature, je n'ai jamais ressenti la moindre gêne. Au contraire, en leur compagnie, j'ai toujours éprouvé du plaisir – et même de la joie – en particulier lorsqu'un sentiment de proximité rendait compte de notre lien. Notons néanmoins que j'éprouve à leur endroit le même sentiment qu'à l'égard des plus purs représentants de la normalité lorsque les atypiques se sentent obligés d'adopter les codes et les postures des normo-pensants : une répulsion spontanée et viscérale...

* Retard mental, dysmorphie, particularités physiques ou psychiques, surdouance etc etc.

Les masses, la majorité et la normalité ont toujours soulevé chez moi un malaise et une antipathie – voire même une aversion naturelle – (liés sans doute, en partie, à leur tyrannie imbécile et à l'omnipotence de l'organisation, des lois et des règles qu'ils ont édifiées pour leurs seuls intérêts et à leur seul avantage) alors que la différence, la singularité, la marginalité et les minorités – en particulier lorsqu'elles se montrent opprimées ou ostracisées (ce qui est toujours – et a toujours été – plus ou moins le cas...) ont toujours suscité un élan naturel de sympathie...

 

 

Dans les représentations et les rapports quotidiens, les animaux – tous les animaux, les animaux (dits) de compagnie et a fortiori tous les autres quelle que soit leur espèce : mammifères, oiseaux, poissons, insectes etc etc – sont – et ont toujours été – considérés par les hommes comme des objets, des instruments ou, au mieux, comme des êtres de seconde zone.

Rares – voire même exceptionnels – sont les êtres humains* qui les appréhendent – et les respectent – comme des êtres à part entière, sensibles et conscients (au même titre que les hommes) et qui entretiennent avec eux des relations de quasi parfaite égalité, ne privilégiant ni les sapiens ni eux-mêmes en matière de partage et de bien-être. Et qui agissent en prenant en compte l'intérêt de tous en demeurant attentifs aussi bien aux hommes qu'aux chiens, aux chats, aux vaches, aux cochons, aux écureuils, aux renards, aux sangliers, aux hérissons, aux araignées, aux mouches, aux fourmis et même aux tiques et aux moustiques quasiment sans la moindre distinction...

* Engagés naturellement – et profondément – dans une perspective anti-spéciste...

Notons néanmoins que ces représentations et ces postures de réification, d'instrumentalisation et de piètre considération concernent également les êtres humains même si cette perspective n'est, le plus souvent, pas consciente ni socialement (et humainement) acceptée. Comme toujours, autour de sa propre individualité – centre infime et étroit – gravitent plusieurs cercles concentriques où l'on classe – et range – les êtres selon un degré de proximité décroissant... Êtres dont on se sert, que l'on instrumentalise (d'une manière ou d'une autre et de façon plus ou moins forte et consciente) et que l'on considère (en général) comme beaucoup moins importants que soi... et ce d'autant que les êtres s'éloignent du centre...

 

 

Tout meurt – et s'efface – autour de nous. Et tout s'éteint en soi. Jusqu'au moindre désir. Jusqu'au plus infime élan. Comme une incessante invitation à contempler l'évanescence du monde. Et le cycle sans fin des êtres, des choses, des idées et des émotions qui naissent, passent et disparaissent. Et qui renaissent. Indéfiniment.

La seule vérité est celle de l'instant. Toute autre – ou qui se présente comme telle – est une imposture. La vérité de maintenant n'est pas celle de l'instant précédent. Et ne sera pas celle de l'instant suivant. Comme la vérité d'aujourd'hui n'est pas celle d'hier. Et ne sera pas celle de demain.

Naissance et mort de toute chose dans le regard. Dans le regard de l'instant. Seule et fragile certitude qui s'efface aussitôt qu'elle apparaît. Voilà sans doute le grand secret – en tout cas l'une de ses facettes fondamentales – que cherchent les hommes depuis la nuit des temps. Et qu'ils peinent tant à trouver. Et à vivre.

Vérité qui ne peut s'approcher. Qui ne peut se saisir. Et qui ne peut même s'expliquer. Vérité apophatique qu'il convient simplement de vivre – d'éprouver et de ressentir – à chaque instant. Et qui nécessite, le plus souvent, un long et âpre chemin de désencombrement, de désappropriation et de désapprentissage...

 

 

Qui es-tu aux yeux des étoiles ? Une ombre – un peu de glaise – parmi les lumières du jour. Qui es-tu pour l'univers ? Une silhouette sans visage sous un soleil de passage. Qui es-tu pour l'Amour ? Une âme esseulée qui implore et proteste contre le silence. Un corps à caresser. Un cœur à chérir. Qui es-tu pour le regard ? Des yeux tristes et inconsolables. Une aire encombrée, ronronnante et ensommeillée. Oui, tout cela nous l'avons été avant d'habiter l'espace qui nous cherchait...

 

 

Un siècle infini où s'étire l'indigence de l'homme. Et la pauvreté de ses ambitions. A l'ère moyenâgeuse des croyances ont succédé les idées des Lumières. Puis est venu le sacre des objets détrôné aujourd'hui par l’hyper sensationnalisme virtuel. A dire vrai, les hommes n'ont jamais vraiment quitté l'obscurité...

 

 

Le bateau ivre des hommes. A l'équipage assoupi. Et au commandement borgne des officiers et de la capitainerie. Heurtant tous les récifs de la terre...

 

 

Les terres ombrageuses se couchent sous le soleil paresseux. Et les hommes gesticulent dans leurs ténèbres. Tristes contrées...

 

 

La lumière n'a jamais été un espace. Elle est une présence. Et son absence assombrit – et endeuille – la terre. Et la transforme en tombeau inviolable où l'on meurt – où l'on s'enterre – et où l'on renaît. Indéfiniment. Et pourtant le ciel – le ciel lumineux – est là, irradiant les ombres terrestres. Leurs pas minuscules. Et leurs mains tendues vers lui – implorantes et démunies.

 

 

Le monde œuvre à son édification comme à sa perte. A l'instar de toutes choses, il est porteur, malgré lui, de forces créatrices et destructrices. Seul le regard échappe à cette emprise. A toute emprise. Il n'est animé par aucune force. Il est un espace d'accueil et d'écoute totalement vierge et inattaquable. Indemne du temps et du monde. Et accessible aux êtres perceptifs – et à l'intelligence sensible – dont l'esprit et le cœur ont été désencombrés – épurés en quelque sorte de leurs amassements et de leurs certitudes, devenus suffisamment mûrs : assez vides pour le ressentir et l'habiter et assez poreux pour éprouver l'unité avec les phénomènes du monde.

 

 

Être. Espace infini et contemplatif. Bienveillant et accueillant. Et êtres divers et protéiformes agissant et gesticulant. Langagiers parfois. A inégale distance de leur nature originelle. Et la cherchant en faisant chemin à rebours. Et se faisant, édifiant le monde malgré eux.

Curieuse épectase tous azimuts. Débroussaillant des milliards de chemins – une infinité sans doute. Tous tendus vers un seul but : retrouver le Seul...

 

 

La curieuse assemblée du monde. Mains agissantes et applaudissantes des spectacles. L’œil plongé au dedans des jeux. Et étrangement extérieur à la scène. Investissant le moindre strapontin, la moindre bouche, le moindre figurant et le plus infime élément du décor. Et lumière – et espace total – du théâtre.

 

 

En dehors du chaos règne le silence. La matrice des âges et des désirs qui fit naître le monde.

 

 

La léthargie des yeux myopes. En profonde somnolence. Impuissants à opérer le recul nécessaire de la perception pour adopter une vision neutre, vaste et pénétrante.

 

 

L'origine des songes est la peur et le refus. Le désir d'un ailleurs introuvable...

 

 

Le temps – ses disciples et ses apôtres – sont des sorciers maléfiques dont les tours et la malice nous aveuglent – et nous fascinent. Et qui clouent nos yeux aux apparences. Impossible dès lors de s'extraire de la magie. Vouant ainsi le cœur et l'esprit à l'illusion. Soumettant – et condamnant – notre vie entière à la prestidigitation. Une existence de poudre aux yeux...

 

 

L'insomnie des jours des silhouettes somnambuliques. Yeux clos – et atterrés – où brillent des songes impossibles. Irréalisables. Vies de fantôme dans la brume – et la buée – du monde qui s'évanouissent avec l'aurore...

 

 

Le langage est un pas – une tentative – vers la vérité. Un essai complexe et catastrophique pour la définir. Et l'approcher. Un échec cuisant de l'esprit qui se retranche derrière ses lustres et sa brillance. Et l'infinité des combinaisons n'y change absolument rien. La vérité, bien sûr, demeurera, toujours en deçà – et au delà – des mots...

 

 

Les ruses sauvages des hommes pour s'extraire de la terre. Pour échapper à l'immonde des instincts...

 

 

Sous la pluie ininterrompue des jours, l'âme haletante. Balbutiante et titubante. Harassée et bientôt noyée par l'averse – par les déferlantes du temps dont elle n'est familière. Au sein duquel elle ne sait – ni ne peut – s'insérer...

 

 

L'âme et le cœur sont la jointure entre le regard et l'esprit et le corps. L'interface entre l'instant, fief du premier et la temporalité, cadre dans lequel s'inscrivent les seconds.

 

 

L'imprévisible espace du monde où les êtres – et les hommes – s'étonnent, luttent et protestent. Où ils s'insèrent, se terrent et s'enterrent. Comme d'infimes éléments de la glaise dont ils ne peuvent s'extirper.

 

 

Le monde est le décor mobile et vivant d'un seul acteur : la conscience qui donne vie à la scène et aux personnages. Qui les anime et les éclaire...

 

 

La lumière éparse dans les yeux des créatures. Un seul regard éparpillé en une infinité d'entités. Infimes fragments d'un Seul que le cœur réunit.

 

 

La sainte misère de la souffrance qui éveille – aiguise et épure – les cœurs alanguis. Sommeillant dans leur sillon creusé par les jours et leurs aînés qui y traînèrent leurs pas. Comme le son du gong pour qu'éclosent les yeux et l'âme sur la grand place qui entoure le temple, encerclé par les rings et tous les lieux de combats où s'acharnent les hommes.

 

 

Le soleil cadenassé par les yeux – et le jeu des ombres – avant la naissance de l'aurore.

 

 

L'étrange chorégraphie des abeilles et des fourmis – les unes infatigables pourvoyeuses de vie et les autres inépuisables adeptes du nettoyage et de la liquidation – qui s'activent inlassablement à leur tâche. En dignes ouvrières de la terre et des saisons.

 

 

Ombres éructantes et orgueilleuses. Fières de cracher à la ronde leur fiel et leur vilenie.

Ombres éphémères à l'âme lourde et opaque. Impropre à l'envol en dépit de sa nature légère.

 

 

Rien en ce monde n'est sans conséquence. Le moindre geste. Le moindre souffle. Le moindre soupir. Tout prend place – et s'insère – dans une chaîne (plus ou moins longue) de causes et d'effets. Et le réel n'est sans doute que le déroulement implacable de ces chaînes innombrables, simultanées et infinies qui s'entrecroisent. Edifiant ainsi un réseau incroyable et monstrueux de liens et de nœuds. Une trame complexe – et à peine imaginable – dans laquelle chacun se retrouve prisonnier et acteur. Et qu'il contribue à façonner et à défaire avec les mille bobines de fil et le sécateur dont il est pourvu. Emmailloté – et emmaillotant – de mille façons... Et lorsque certaines chaînes se défont – ou s'interrompent – d'autres apparaissent – ou sont créées – continuant ainsi à développer – et à sculpter – l'immense réseau alimenté de façon perpétuelle par la source intarissable de l'énergie, des nécessités et du désir...

 

 

Tout en ce monde n'est que flux et courants. Et toutes les formes (êtres et choses) et combinaisons de l'Existant non seulement y sont plongées – et happées – mais, bien sûr, y participent.

 

 

Le maigre secours de la parole face au monde. Face à toute chose – et en particulier face à la souffrance et à la misère. En la matière, rien ne saurait détrôner la présence. La pleine présence. Une écoute totalement ouverte et bienveillante.

 

 

En ville, seuls le naturel et le fragile m'émeuvent. Un chien, un pigeon, un arbre, une herbe, un visage timide ou apeuré, une silhouette chancelante ou mal assurée. Les autres formes – et leurs mouvements – m'irritent, m'agressent ou, au mieux, m'indiffèrent. Partout l'artifice et les apparences, la flânerie ou la célérité des pas, la posture faussement assurée des allures. Les yeux indifférents rivés sur leur trajectoire. Les groupes bruyants et aveugles à leur environnement. Moi qui n'ai quasiment plus jamais la nécessité de fréquenter les villes, leurs habitants et leur agitation, je ne comprends que trop les raisons qui m'ont incité à vivre à la campagne – loin de la fureur des cités.

Et du monde je n'ai plus aucune envie de parcourir les chemins et les contrées, en particulier les contrées civilisées et urbaines. Et même les contrées naturelles et sauvages ne suscitent plus guère mon intérêt. J'abhorre le tourisme, les touristes et leur survol superficiel. Visiter un lieu en quelques minutes – ou en quelques heures – alors qu'une vie entière ne suffirait pas à faire le tour d'un brin d'herbe. A être pleinement présent – et réceptif – à son existence et à sa nature profonde. Quant à le comprendre, il faudrait peut-être passer mille ans en sa compagnie... Alors qu'on ne me parle pas de voyage, de tourisme ou de séjour de détente ou d'agrément. Simple remplissage d'un temps vide. D'une existence à la fois éteinte et saturée...

 

 

Terres d'abondance et d'obsolescence au goût âcre de l'immaturité et de l'artifice.

 

 

Le cœur cisaillé par l'aveuglement et la maladresse d'un monde sans excuse. Mais pardonnable...

 

 

L'aube des premiers jours. L'abandon des stigmates, du sacrifice et du renoncement à soi. Pelletées de terre jetées par dessus le tombeau entrouvert.

A peine nés que les hommes meurent déjà.

La longue agonie des élans. D'infimes plaisirs en futilité, des petits jeux des sentiments aux chevauchées épiques du cœur qui parcourt les grandes plaines face au mur infranchissable des identités. D'îlots de silence en îlots de solitude, la défaite implacable de l'homme. L'échec et la débâcle. Les cris face à la mort qui rôde – et qui s'approche. L'âme effarouchée par son fief à force d'en être éloignée.

Une nuit de mystère éviscérée. Les entrailles jetées aux vautours depuis les falaises de l'ignorance. Puis l'envol de l'ange vers les hauteurs. Vers les sommets de la terre. Petits tertres où pousse l'herbe des plaines.

 

 

A l'écoute des minutes – et des heures – qui passent. Et qui tombent, une à une, dans l'escarcelle de l'ogre aux aiguilles. Tic tac sans fin de l'instant perpétuel sourd aux sarcasmes et aux murmures. Ancré à l'assise mouvante de l'écoute où l'on s'absente à soi-même. Reléguant le défilé des ombres et des fantômes à la main inerte des songes.

 

 

A rebours sur l'échelle du triomphe, réjoui par le suspens des heures, la cessation des brimades du temps où sommeillent les hommes. Assis à califourchon – et en déséquilibre – sur l'abîme sans paroi, l'attente se mue en écoute claire qui accueille et efface aussitôt tous les nouveaux arrivants qui ne périront plus dans la mémoire. Libéré des mailles du temps...

 

 

Assoupissement des corps et des esprits avachis. Le cœur et le regard absents. Ombres qui peuplent la terre. Qui la colonisent. Et la souillent de leurs déjections.

L'abomination des bruits des hommes, des formes crépitantes et de leur fureur surgissante – et bondissante. Et l'impossibilité d'y échapper. L'immature et illusoire fantasme de la cessation du monde. Des phénomènes du monde. L'impossible et chimérique aspiration au silence*. Comme implacable révélateur de notre incapacité à vivre le regard parmi les êtres. Parmi les yeux du monde, spectateurs, réprobateurs ou inquisiteurs dont la proximité ravive notre absence à nous-mêmes...

* Le silence phénoménal...

 

 

Un excès d'implication (personnelle) engendre des élans inappropriés vers le monde et des attentes de réciprocité et de retour d'engagement à l'égard des êtres que nous fréquentons, que nous aidons ou accompagnons. Tout surinvestissement individuel restreint le recul – et la distance – nécessaires pour habiter l'espace impersonnel. Et agir de façon juste et adéquate. Cette perspective égotique agit comme une sorte de focus hyper grossissant affublé d'un filtre émotionnel tendancieux qui rétrécit – et colore – d'une façon si substantielle le champ perceptif qu'il entrave l'infini, la neutralité et l'ouverture bienveillante du regard.

 

 

Les êtres – et le monde – emplissent (en général) une grande part de l'espace perceptif. Et nous pouvons nous y habituer d'une façon si puissante et insidieuse qu'ils peuvent nous plonger dans une forme d'accoutumance. Les êtres et le monde révèlent alors la dimension déséquilibrée de notre psychisme. Notre inévitable dépendance et notre sentiment d'incomplétude. Nous prenons ainsi conscience que le monde et les êtres – leurs mouvements et leurs agissements – nous sont nécessaires – sinon vitaux. Et lorsque, pour une raison ou pour une autre, ils sont amenés à s'absenter – ou à disparaître – nous comprenons que leur présence dans notre existence – ou à nos côtés – occupait une place centrale. Une place magistrale. Et que pour notre esprit, ils comblaient – et recouvraient en quelque sorte – un vide et une béance qui nous ont toujours effrayés – et que nous avons toujours fuis comme la peste. Et face auxquels nous nous sommes toujours sentis (presque) totalement démunis et désemparés...

 

 

Habiter l'intensité et la profondeur malgré la superficialité ambiante. L'insensibilité et la futilité des êtres – et des hommes.

 

 

Dans le ciel brouillé – et si clair pourtant – que les yeux ignorent et sur la terre ensanglantée par tant de massacres qui recouvre depuis les origines tant de carcasses dont la chair et les os alimentent le terreau perpétuel où renaît le monde, comment faire du regard un allié, un refuge, une assise et une demeure ? Comment laisser le corps habiter les ténèbres sans s'enterrer avec lui dans tous les tombeaux qu'il fréquente – et où on le jette ? Comment vivre avec les corps de passage et célébrer, dans le même intervalle, l'unité du cœur et l'infini de l'esprit ?

Qu'il est difficile d'être un homme sage dans la folie d'un monde sans envergure dont les mains entachent – et avilissent – tout ce qu'elles touchent. Tout ce dont elles s'emparent...

 

 

Nous ne sommes rien ni personne. Qu'un regard infini parmi des yeux – et des cœurs – frileux. Qu'une présence parmi des yeux – et des cœurs – pointés vers un ailleurs impossible. Qu'un espace d’accueil parmi les refus. Que des mains accueillantes – et caressantes – parmi les poignards et les épées. Qu'une promesse (une promesse véritable) parmi des espoirs sans épaisseur. Qu'une bouche tendre – et un espace de silence – parmi les menaces, la médisance et les jugements. Nous ne sommes rien ni personne. Qu'un être sans visage parmi des mains qui prennent et des bouches qui crient... Et notre cœur appelle parfois le silence dans sa détresse. Lorsque tout le happe – et le meurtrit. Et qu'il gît, impuissant, dans la débâcle du monde. Dans le mépris et l'indifférence des ombres qui peuplent la terre.

 

 

En un instant tout ce que l'on nous aura offert sera repris. En un instant tout ce que nous aurons assemblé sera éparpillé. En un instant tout ce que nous aurons édifié sera détruit. Mais l'être jamais ne pourra nous être dérobé. Il s'effacera naturellement à chaque instant si nous savons l'habiter pleinement avec le regard – et le cœur – posés dans l'infini, la virginité et l'innocence.

 

 

Le monde phénoménal est la sculpture (et le fruit) – du jeu (et de l'art) du vide et du plein sous contraintes. Contraintes d'ordre énergétique, physico-chimique et biologique auxquelles il convient d'ajouter celles d'ordre psychique pour les hommes (et, en partie, pour les animaux).

 

 

La virtualité – la réalité et l'Existant virtuels – ne sont sans doute que l'extériorisation de l'immatérialité cérébrale. Une façon de transcender la matière et le monde objectal. Leur pesanteur, leur inertie et leurs limites. Ainsi que les écueils et les conséquences qu'ils génèrent dans le monde réel. Ils constituent une phase de l'évolution naturelle des formes terrestres qui se rapprochent, pas à pas, de l'insubstantialité de la conscience.

Et comme à leur habitude, au début de chaque révolution ou de chaque ère nouvelle, les hommes développent leurs recherches tous azimuts en s'y investissant – et en s'y jetant – à corps perdu et s'emparent des innovations avec fébrilité et empressement. Et l'on voit peu à peu toutes les sphères de la vie se transformer. Le vulgaire – la majorité de la population – toujours friand de jeux et de confort et essentiellement intéressé par les retombées personnelles du progrès et de la nouveauté en bénéficie dans les aspects les plus distractifs et narcissiques de l'existence(1). Les stratèges toujours avides de richesse et de pouvoir en usent à des fins d'instrumentalisation des masses(2). Et les idéalistes en infatigables partisans d'un progrès partagé par tous et en inlassables bâtisseurs d'un monde meilleur tentent de créer des usages pour le bien-être collectif et s'en servent pour inventer des outils et des instruments permettant à chacun de progresser vers un peu plus d'amour et d'intelligence(3)...

(1) Aujourd'hui par exemple (et entre autres exemples), les réseaux sociaux, les selfies et les innombrables applications pour smartphone...

(2) Aujourd'hui par exemple (et entre autres exemples), le piratage et l'accès aux fichiers informatiques (les contenus personnels des ordinateurs, les consultations internet et les échanges mail et SMS etc etc) par des institutions étatiques et des firmes commerciales...

(3) Aujourd'hui par exemple (et entre autres exemples), la mutualisation des savoirs grâce aux encyclopédies en ligne...

 

 

Être – et vivre – dans le monde – parmi les êtres – sans se débattre avec les pensées et les émotions, les attentes et les sollicitations, voilà le défi. En laissant les actes et la parole émerger du silence. Sans blâmer ni inhiber les corps, les cœurs et les esprits. Sans entraver ni freiner leurs élans.

 

 

Radieux séjour en volupté. Dans les draps sensuels du silence. Lové – et enveloppé – dans les bras de la présence et de l'Amour.

Un cri. Une extase. Dieu qui appelle parmi les bruits. Et parmi les rires. Un escabeau, un peu d'escalade, un bout d'échelle avant que le vent ne se charge de l'envol. Puis les bourrasques alertes sur les pentes de l'ascension poussent vers l'assise fragile et infinie en suspens qui s'efface et renaît inlassablement à l'instant...

 

 

Regard vide et accueillant émergeant du fond des yeux opaques – tristes et gris – rivés sur les rives maladroites de l'avenir. Animés par l'espoir de l'ailleurs – et de l'après. Porteurs de tant de sacrifices et de renoncements. Et pourvoyeurs de tant de désillusions.

Espace vierge glissant entre les joutes. Recueillant la sueur et le sang, les paroles poisseuses, les cœurs abrupts et hermétiques. Et l’œuvre des mains indélicates.

 

 

Paroles de sagesse déchirées par les bras ignares et scélérats qui se heurtent aux armatures et aux briques des forteresses édifiées à la hâte – dans l'urgence des coups portés et des attaques incessantes de l'armée des ombres. Qui se fracassent sur les armures invisibles des soldats casqués – les armes à la main et les munitions au ceinturon – protégeant leur fief étroit, le séant posé sur leurs trésors dégénérés. Et lançant par dessus les murailles leurs paroles sauvages – et leurs gestes indignes et barbares – pour éloigner les assauts du silence et de la sagesse. Arc-boutés sur leur patrie patronymique – et leurs contrées claniques. Prolongeant ainsi la résistance de l'ombre, l'indigence et le néant que leur cœur frileux a partout édifiés en royaume...

 

 

Devant l'espace immaculé, la foule patiente, rit, danse et s'égosille. Regarde passer les chars, les nuages et les caravanes. S'extasie des étoffes et des victuailles des marchés. S'étrille, vitupère et prie en scandant des formules mystérieuses et incompréhensibles qu'elle lance au ciel au nom d'un Dieu dont elle ne se rappelle que le nom – et qu'elle a dépouillé de son identité. Qu'elle interpelle comme un guide – comme un père – chargé de la torcher de ses miasmes en continuant de remplir la vie – et le monde – de son absence. Ignorant que son royaume est partout. Sur la terre comme au ciel. Au plus proche du regard lorsque l'absence de soi devient si tangible que le vide – si souvent appréhendé comme un néant – s'emplit et rayonne de sa présence. Les têtes n'ont plus alors qu'à s'incliner. Les cœurs à s'agenouiller et à se remplir de sa joie et de son Amour. Et les mains à se baisser pour ramasser ses offrandes et les distribuer à la ronde devenant ainsi les parfaits serviteurs de sa grâce. Et de son règne.

L'excitation des mains et des pas. L'esprit et le corps traversés par les phénomènes. Ebouriffant le cœur ardent voué à l'irrépressible tâche des expressions. Pensées et ressentis faisant naître les émotions. Emotions donnant naissance aux gestes et à la parole. Soubresauts et vibrations émanant du monde, traversant l'être et retournant au monde. Porosité universelle des formes et des créatures rejetant en cascade les unes sur les autres les vagues de l'infini et du silence. Rejets affectés, augmentés et agrémentés de leur particularisme. Ronde incessante des échos se cognant – et pénétrant – tous les obstacles les transmutant aussitôt en réceptacle et en rampe de lancement... en étroit et profond labyrinthe relié à l'immensité labyrinthique du monde. Valse perpétuelle des éléments et des phénomènes, des désirs et des émotions, des gestes, des pas et des paroles enfantés par l'infini et le silence parcourant toutes les formes et les créatures du monde – et s’insérant dans tous leurs espaces labyrinthiques – avant de s'effacer dans l'infini et le silence. Origine, déroulement et fin, un seul espace accouchant, avalant, recrachant et effaçant toutes les manifestations de l'Existant au fil de leur étrange et mystérieux itinéraire...

 

 

Laisser arriver les événements, les gestes, les paroles et les pas. Et les recevoir pleinement – totalement – tels qu'ils arrivent. Sans tricher. Sans les transformer ni les travestir. Sans les manipuler ni jouer avec eux, sans les édulcorer de leur substance et de leur puissance afin d'en faire des alliés ou de les convertir en source d'agrément ou de réconfort. Les accueillir – et les vivre – tels qu'ils se présentent. Et les laisser traverser l'être de part en part – et de fond en comble – avec honnêteté et innocence. Sans les saisir, sans les retenir ni les éloigner. Sans qu'ils rencontrent la moindre aspérité. Ni la moindre résistance. Les laisser libres. Totalement libres. Et ainsi s'en libérer.

Accueillir le monde – ses phénomènes et ses événements – depuis l'espace de silence et d'Amour avec une extrême – et intense – sensibilité. Et ainsi les servir. Et s'en libérer.

 

 

Être à la fois le regard total – l'Absolu impersonnel – et l'infime instrument agissant au service de sa souveraineté dans l'univers relatif des phénomènes.

 

 

Les yeux contemplent le grand silence de la nuit éclairée – et constellée d'étoiles – qui offre à la terre une profondeur que le jour ignore. Le monde, les êtres et les hommes sont endormis. Et ils peuvent sommeiller en paix. Et se laisser bercer par l'innocence. L'âme veille... partout où le regard – et le cœur – sont présents...

 

 

Un regard nu sur un espace épuré. Voilà notre fantasme. Un regard dénudé sur un monde foisonnant. Notre aspiration. Et un regard encombré sur un monde pléthorique d'opulence et de prolifération. Notre réalité – notre triste réalité...

 

 

Il y a encore chez moi une forme d'abomination du monde objectal et de la vie phénoménale et organique. Un bannissement de l'efflorescence, de l'excès et de l'abondance. Comme le reflet d'un regard encore chargé et embarrassé, entaché et troublé par quelques fantasmes et exigences purificatoires...

 

 

Une seule porte parmi les jours. Et un seul chemin parmi l'infinité que le monde propose. Mille chemins que nous explorerons – et déblayerons. Et qui ne seront, au bout du compte, que de minuscules tours – d'infimes circuits – dans l'espace.

 

 

Être présence. Ecoute ouverte qui accueille les bruits et les paroles. Et main tendue lorsque les yeux – et les cœurs – le réclament.

 

 

L'aurore s'est levée sur le monde. Ses habitants brillent d'une lumière plus vive. Et plus saine. Le chaos est en ordre. Baignant dans la clarté. Ses éléments naissent, alimentent les rouages et s'effacent avec allégresse. Ronde parfaite dans le regard que la puissance et les excès ne peuvent blesser. Pas légers et danses profondes et graves participent aux spectacles. A la chorégraphie morbide et extatique. Et dans nos mains innocentes que le vent caresse, le sable s'envole...

 

 

Il avait encore de grands espoirs sous les paupières. Et la vie jamais ne lui ouvrit les yeux. La cécité de l'âme avait rendu son cœur valeureux. L'autorisant à jeter ses songes partout dans le monde. Mais il savait qu'il ne pourrait jamais voir ainsi éclore l'innocence et l'Amour. Ni naître le regard et la main tendue...

 

 

Le noir et le gris menacent la blancheur des yeux. La souffrance est toujours un guide pour les aveugles. C'est elle qui nous apprend à marcher. A explorer le monde. Et à découvrir l'être. Sans elle, la terre resterait un tombeau – un charnier sans fin – pour les âmes lourdes et timorées.

 

 

Ensorcelés par la beauté des forêts et des étoiles, les pas succombent à la terre et au ciel. Ils ne peuvent se défaire des tresses qui les relient à l'espoir et aux nuages. Et on les voit, leur vie durant, sautiller de brin d'herbe en brin d'herbe, la main tendue vers l'horizon.

 

 

Les fleurs enivrent et empourprent les joues. Aveugles que nous sommes aux dépouilles de la vie. Un baiser au ciel – et le silence du cœur – valent pourtant plus – toujours plus – que les plus beaux bouquets garnis...

 

 

Dans son humble hutte de montagne, le sage dissertait avec les rochers et les nuages. S'accordait aux paroles du vent. Et restait silencieux tout le jour. Contemplant du ciel les chants de la terre et les battements du cœur. Touché par la grâce du monde et du silence.

 

 

Il n'y a qu'un pas à franchir. Un pas ténu – et gigantesque – presque impossible entre le peu et le rien, entre le je et le soi, entre les yeux et le regard pour quitter l'abîme de l'immonde et l'indigence – la grande mendicité – et accéder à l'indicible. Aux merveilles et aux offrandes du tout.

 

 

Que la marche s'enlise lorsque nous avançons – et tournons en rond – sur les chemins du monde. Et que l'envol est proche pourtant. Il suffit que les yeux accèdent au ciel. Et en ces lieux, Dieu pourrait arriver – et nous surprendre – pour nous tirer des ornières où nous errons. Et transformer le cœur en espace ouvert – et accueillant. En refuge infini pour l'Existant et tous les infortunés habitants de la terre.

 

 

Les hommes – bien des hommes – pourraient passer des siècles sans rien partager – ni rien échanger – d'essentiel. Rester silencieux pendant des jours. Pendant des semaines. Pendant des années. Comme absents – perpétuellement absents – au monde et à eux-mêmes.

Des yeux superficiels – distraits et inattentifs – survolant les plaines de la terre. Une solitude absorbée – et absolue – malgré la présence du monde. Malgré la présence des êtres. Malgré leurs paroles et leurs bruits. Des yeux et des cœurs hermétiques. Repliés sans doute sur leurs propres chimères. Refusant de s'encombrer – et de se blesser – avec celles des autres. Inscrits dans une perspective qui bannit – et exclut – toute curiosité, toute quête et toute rencontre. Univers clos et obscur de l'entre soi individuel et exigu. Et de l'absence. Assis au bord du chemin où circule l'essence des êtres. Des âmes à la circonférence restreinte. Et à la destination improbable. Fantômes glissant dans la nuit du monde...

 

 

Accueillir et effacer. Encore et encore. Accueillir et effacer. A chaque instant. Rester nu et vierge. Ne rien conserver. Ni les événements. Ni les émotions, ni les sentiments et les pensées qu'ils ont suscités.

 

 

La dilatation et la contraction du cœur au contact des êtres. L'étroite correspondance entre la respiration de l'âme et celle du monde...

 

 

Au cœur des songes, le langage remplace la parole. Et au cœur du silence, la parole s'efface au profit de la présence.

 

 

Les hommes appréhendent – et vivent – les jeux du monde comme des enjeux essentiels. Ils s'y prêtent – et s'y investissent – avec sérieux et gravité. Sans entendre les grands éclats de rire de Dieu qui sommeille dans leurs tréfonds...

 

 

Dieu n'a jamais quitté les terres noires du monde où brillent l'indolence et la prétention. Les massacres et les pitreries. Il veille en silence. Son absence n'est qu'une apparence pour les yeux – et les cœurs – naïfs. Il attend sans impatience. Et se montrera à tous le moment venu. Lorsque la maturité sera accessible aux hommes. Et on le voit déjà pénétrer quelques âmes délicates – et ouvertes à l'innocence – qui émergent lentement du panier où les poings serrés et les mains crispées continuent d'imposer leurs lois.

La solitude est la porte que Dieu pousse pour pénétrer les âmes. Et lorsque Dieu s'en empare – et qu'il investit les lieux, c'est à travers elle que l'être peut éclore et s'épanouir. Et c'est de ce lieu qu'il se diffuse – et rayonne. L'être devient alors la vitrine lumineuse du Divin.

 

 

Sur le visage des morts, un sourire invisible émerge des cicatrices et des blessures infligées par la terre. Annonciateur de la grande paix espérée de leur vivant. Et que le monde n'a su faire naître. Les yeux trop impliqués – et trop absorbés – par les rixes et la danse des jours.

 

 

L'amour des ombres signe le refus de la vérité. Et les hommes s'en entourent – et s'en emparent – pour recouvrir – et cacher – le vide et l'instabilité de l'assise qui la jouxte. Et qui y mène. Le refus et l'amassement, voilà le grand drame des hommes...

 

 

Du fond de leur nuit, les hommes appellent en jetant en contre-bas leurs rebuts et leurs immondices. Oubliant que le creux les ceinture et les affecte bien davantage que les sommets.

Plus l'en-bas est souillé, plus les portes de l'être se verrouillent. Bien des hommes l'ignorent. Et tous – presque tous – marchent vers les hauteurs en fuyant les décharges qu'ils alimentent. Empêtrés dans le cercle vicieux – quasi maléfique – de l'effort et de l'espérance alors que gît au plus bas sur les sables mouvants de l'instant la seule vérité qui les libérerait de leur détention.

 

 

Creuser la roche et fouiller la terre de nos certitudes pour y dénicher le joyau insaisissable : la vérité sans cesse mouvante, mourante et renaissante...

 

 

Les chants de détresse et de désespoir sont plus proches du Vrai que ceux de l'espoir et de l'allégresse votive. Vivre – et accueillir – ce qui est vaut toujours davantage que nos vœux de bonheur et de prospérité. Malgré les apparences, la joie se dissimule toujours derrière nos déchirements.

 

 

Ne t'endors jamais à l'abri des songes. Déchiquette-les un à un. Et lorsqu'ils se coucheront à tes pieds, la vérité insaisissable sera perceptible. Et accessible. Sur elle jamais tu ne pourras construire et édifier mais tu pourras habiter son étroit – et infini – espace sans cesse renouvelé. Et elle s'offrira. Et avec elle la joie des justes et des innocents.

 

 

La terre si bruyante. Si pleine d'agitation et de fureur. Si pleine de gesticulations et de querelles. Et si silencieuse en matière de sagesse. Si sourde à la paix et à la joie du cœur. A l'intensité et à la profondeur de l'être.

 

 

La nuit bouffie – écarlate – se dilate dans le sommeil. Et il y a cette pensée obtuse qui frappe à la porte. A chaque événement, elle revient. Et insiste. Elle veut pénétrer les lieux. Aller là où on la refuse. Entrer là où on la rejette. Alors de dépit, elle s'insère dans la chair par le cœur. Là où le canal est le plus large. Là où les sentinelles ont baissé les armes – et où la garnison est au repos – les armes remisées dans les tréfonds. Elle arrive toujours par le chemin où on ne l'attend pas. Et elle reviendra encore. A chaque occasion, elle reviendra. A chaque occasion, elle retentera sa chance. Encore et encore. Jamais lasse d'arriver et de s'étendre. Et de prendre ses aises. Et elle continuera ainsi – inlassablement – à forcer toutes les portes pour conquérir le territoire. Et à asseoir son fief. Elle s'y acharnera tant qu'on lui opposera une résistance. Tant qu'elle ne rencontrera un espace d'accueil pour la recevoir – et où elle pourra se sentir aimée et acceptée. Où elle pourra enfin fondre – et dans lequel elle pourra se fondre – se laisser entièrement aller à la dissolution.

 

 

L'inquiétude naît de l'attente. De notre disgrâce. De notre exil. Et de notre inépuisable volonté de marcher partout sans blessure ni encombre – et d'un pas certain – parmi les décombres. Dans tous les lieux de désolation de la terre. Parmi la misère que nous n'avons jamais cessé de fréquenter.

 

 

Qu'attendent les hommes des gestes et de la parole du monde sinon une distraction, un réconfort, un appui ou un encouragement ? La vérité ne les concerne pas. Elle leur semble trop absurde – presque incongrue. Si lointaine. Si inaccessible et dérisoire face à l'espoir d'une existence bonhomme, face à l'espoir de pas sereins et de lieux tranquilles où ils s'empresseront de planter leur drapeau – et leurs mâts de cocagne. Et dont ils feront leur fief qu'ils agrémenteront, bien sûr, de quelques visites en terres de plaisir et de distractions – et en pays de volupté. Du monde – de ses gestes et de sa parole – les hommes n'en attendent (et n'en espèrent) pas davantage...

 

 

Marcher seul – et en silence – à l'ombre des grands arbres. Parmi les herbes et les hautes frondaisons de la terre. Voilà de quoi réjouir les âmes rétives et effarouchées par l'absurde contentement du monde. La superficialité et les artifices, l'indifférence et l'insensibilité des hommes.

 

 

La mort des ombres, des hommes et des âmes. Ainsi s'achève l'espérance. Ainsi débute la vraie vie. Et le règne de la conscience.

 

 

Les clairs simulacres des caprices. L'esprit qui fait le dos rond ou les yeux doux pour obtenir les grâces – et les faveurs – du monde.

 

 

L'âpre – et rude – convivence des êtres aux antagonismes et aux conflits, aux heurts et aux affrontements inévitables. Tensions et déséquilibres appelant inéluctablement aux compromis et à la composition. A la négociation et aux échanges. Le vivant ne sait – et ne peut – cohabiter autrement...

 

 

De l'effacement naturel et de l'auto-dérision, voilà les outils essentiels de l'être dans le monde.

 

 

S'incliner devant les nuages. Et mourir. Geste sincère et profond de la grande humilité avant le trépas...

 

 

L'interrogation et le langage sont les premiers signes de l'homme. Les prémices de son épectase. Auxquels succèdent la quête identitaire et la recherche de la vérité qui mènent au Divin.

L'homme en quête comme l'homme de Dieu suivent, eux aussi, une progression graduelle. Et cheminent étape par étape vers la pleine réalisation du Divin en eux.

Ainsi l'être en l'homme – et l'homme en l'être – n'en finissent jamais d'apprendre et d'explorer, de découvrir et de s'unir pour que le Divin se réalise pleinement sur terre. Et que les hommes se réalisent pleinement en Dieu...

 

Publicité
Publicité
10 décembre 2017

Carnet n°82 La peur du silence

Journal poétique / 2016 / L'intégration à la présence

A la grande infirmité des jours, nulle béquille pour le monde hormis la grande illusion dévastatrice. L'horreur meurtrière que le sang n'effraie pas. Et au plus proche comme au plus lointain, les longues traces rouges qui abreuvent la terre. Et la joie des mains ensanglantées qui applaudissent à la volée.

Comment habiter cette terre désastreuse ? Avec ses mensonges en cascade. Les ruses retorses des infirmes et des scélérats. Les chagrins recouverts par le clinquant des anneaux et la blancheur des sourires. L'indigence des statuts. L'aridité des paroles et des épaules. Partout la tristesse comme un lac glacé un soir d'hiver venteux et floconneux qui empile les congères comme des barrières infranchissables encerclant la solitude – la grande solitude – du monde. Et la voix des hommes qui appelle comme un cri dans le silence d'un crépuscule interminable.

De l'autre côté du jour, j'ai vu frémir la flamme des chandelles éteintes. Des chandeliers renversés. La misère amorphe des hommes sommeillants. Accoudés à la terrasse des heures. Silhouettes somnambuliques au teint d'albâtre s'approchant à pas timides de la mort. Et sur mon cœur fondit la vérité brunâtre des ténèbres. Et il demeura inconsolable.

 

 

Le monde sans dédale – le monde sans mystère – naît de cette lumière que l'homme cherche – et dont il se nourrit. Ainsi s'édifie le monde. De ce mystère voué à la résolution de sa propre énigme.

 

 

Sur la jetée fourbe patientent les hommes – la masse sombre de l'humanité. Avides de soleil. Et dont la brume du large avale les yeux. Guettant l'horizon qui supporte les astres. Aveugles au dedans. Et geignant des massacres et des morsures ardentes du cœur blessé. Toujours incompris. Toujours inaimé.

 

 

Spectacles grandioses où l'on ne peut s'inviter. Jours moroses jetés par poignées. La tristesse s'étale sur les visages languides. La beauté consumée par les feux brûlants du désir. La vie transparente. La vie exsangue. Comme un corps crucifié par quelques mains habiles – et porteuses de clous. Et dans ce sombre décor, on voit les hommes accrocher des guirlandes aux murs ensanglantés. Et allumer quelques modestes bougies parmi les confettis de la fête.

 

 

Une beauté réparée tient en déséquilibre sur son socle de sable. Dans les tranchées creusées à même le cœur des hommes. Et qui aspire au réconfort des anges. A leurs baisers partisans et impartiaux. A une main de délivrance qui la portera haut dans le ciel parmi le cri des oiseaux. Et leur vol éternel.

 

 

Dans l'écoute claire de la chair. Dans l'accueil caressant des brimades, un ciel sans toit. Un faîte sans limite qui coiffe tous les horizons de misère vers lesquels rampent les hommes.

 

 

Partout la mort est présente. Dans tous les trous de la terre. Au creux de tous les renoncements. Parmi les désirs et les poutrelles que jettent les hommes entre les abysses. Partout la mort est présente. Comme un ciel noir. Comme un rideau de servitude que la vie ceinture et emporte au creux de sa chair tendre.

 

 

Les hommes vont et viennent. Et Dieu les regarde sans étonnement. A peine surpris que quelques mains se hissent parmi ses frasques jusqu'à la pointe de ses cheveux hirsutes pour découvrir sur son visage quelques sillons sans vigueur – et sans éclat – que la terre arrose de son sang et de sa sueur. Ah ! Bienheureux les innocents...

 

 

Passés l'orage et l'ouragan, les vents se taisent. Et la pluie cesse. Ainsi naissent les saisons vierges. L'innocence du soleil dont la lumière ne s'est jamais retirée. Les yeux étaient simplement clos à l'intérieur d'un cœur sans vie. Et sans refuge.

 

 

Sentiers sillonnant par les fleuves jusqu'à l'océan. Oublieux des ombres et des silhouettes de papier. Palimpseste de l'instant où tout s'efface pour renaître, semblable et différent. Où tout s'égare. Et se retrouve. Où les gouttes du néant glissent comme des larmes sur la peau. Et avec elles, se retire l'aurore. La fin des crépuscules. Et la lente débâcle des idoles.

 

*

 

L'esprit juvénile – presque innocent. Le cœur largement pubère. Presque mature. Et le corps vieillissant. La silhouette harassée. Usée par la longue marche. Assaillie par les épreuves. Et rendue fragile. A quelques encablures encore de l'homme sage à l'esprit toujours frais du nouveau-né. Et au cœur mûr quel que soit l'état de la terre et du corps.

 

 

La parole sans épaisseur des hommes. Engluée dans le pragmatisme, la médisance et les contingences utilitaires du monde et de l'existence. Et parmi ces bruits du corps et de l'âme, une parole neuve. Une parole inconnue accolée à aucun repère. Ne délivrant aucune référence. Offrant la fraîcheur – et la paix – du silence.

La poésie devrait toujours naître de cet instinct sauvage. Et de cette douceur. De cette délicatesse. Fille légitime de l'Amour et de la vérité. Offrant à tous sa franchise et sa tendresse.

 

 

Le silence accueille et recouvre la parole scélérate des hommes. Leurs mensonges et leurs ruses perfides à visée d'appropriation. Et cette hospitalité les efface aussitôt qu'ils jaillissent de leur bouche malhonnête.

 

 

Ah ! L'impossible effacement des cycles incessants et harassants qui usent – et épuisent – notre patience...

 

*

 

On aime les êtres honnêtes et humbles. Dignes et sans orgueil. Droits dans leurs bottes. Animés par un sens de la justice et de la vérité. Ceux-là sont nos frères de cœur. Et parmi eux, ceux qui s'interrogent profondément – et s'acheminent vers l'impersonnel, l'émerveillement et l'innocence sans fléchir devant l'adversité, les déconvenues, les remises en question et la souffrance, sont nos frères d'âme... nos semblables face à Dieu.

 

 

Dieu, la connaissance, la vérité, l'Absolu et la sagesse ne se trouvent dans quelques traités de métaphysique ou dans quelques essais – ou témoignages – religieux. Ni même dans quelques recueils de poésie. Ils sont au cœur même de la vie. Au cœur même du monde. Au cœur de l'esprit. Au cœur du cœur et du regard. Et pour les découvrir, il n'y a d'autres façons que de s'en approcher soi-même...

 

*

 

A la guerre sans cesse remisée, la stupeur naîtra de l'apocalypse. L'éclatement de tous les fruits de la terre. Comme une grêle meurtrière sur les âmes insecourables. Et de cette pluie jaillira la paix. Le grand silence du monde.

 

 

Terre sans parole. Terre sans éclat. Misère souterraine du manque qui surnage à travers les rêves. Et toutes les emprises. Les têtes s'enracinent aux parois de verre. Agonisent dans la putréfaction de leur source. Et le cœur attend, tristement, qu'on le délivre de sa détention.

 

 

Avec l'hiver, la glace répand sa force. Offre au pas – et à la terre – sa transparence. Mais de la dureté, les hommes ne se relèveront pas. La tendresse des bourgeons sonnera la cloche. L'asphyxie de la défaite. Et dans leur lit de mousse, les cœurs devront patienter jusqu'aux saisons prochaines.

 

 

De l'autre côté du jour, j'ai vu frémir la flamme des chandelles éteintes. Des chandeliers renversés. La misère amorphe des hommes sommeillants. Accoudés à la terrasse des heures. Silhouettes somnambuliques au teint d'albâtre s'approchant à pas timides de la mort. Et sur mon cœur fondit la vérité brunâtre des ténèbres. Et il demeura inconsolable.

 

 

A la grande infirmité des jours, nulle béquille pour le monde hormis la grande illusion dévastatrice. L'horreur meurtrière que le sang n'effraie pas. Et au plus proche comme au plus lointain, les longues traces rouges qui abreuvent la terre. Et la joie des mains ensanglantées qui applaudissent à la volée.

Comment habiter cette terre désastreuse ? Avec ses mensonges en cascade. Les ruses retorses des infirmes et des scélérats. Les chagrins recouverts par le clinquant des anneaux et la blancheur des sourires. L'indigence des statuts. L'aridité des paroles et des épaules. Partout la tristesse comme un lac glacé un soir d'hiver venteux et floconneux qui empile les congères comme des barrières infranchissables encerclant la solitude – la grande solitude – du monde. Et la voix des hommes qui appelle comme un cri dans le silence d'un crépuscule interminable.

 

 

Dans le désert de la parole, l'âme se réfugie. A l'abri des éclats et du bruit. Désemparée par les cris du monde, la voilà affaiblie. Seule, elle s'en va dans le silence sauvage des vallées sans visage.

 

 

Un visage. Mille visages. Une silhouette. Mille silhouettes. Une armée d'ombres aux aguets. Et l'aurore menacée d'une présence jamais née qui ne pourra encore éclore. Et traverser le monde.

 

 

Tic tac douillet où les cœurs se réfugient. Asile précaire d'un instant. Protégés de l'espace occupé par les vents. De la houle tapageuse, de la furie sans intervalle des appels inaudibles des sommets. Et des pleurs des enfants.

 

 

De l'espace est née la matière que des mains hasardeuses ont façonnée en souffle. Avant que les haleines fétides envahissent la terre. Avant que les corps ne déferlent sur la plaine. Avant que les édifices recouvrent les vallées – et ne dissimulent aux visages la splendeur des montagnes. Avant que les pavés – et le bitume – assassinent les grandes étendues d'herbe. Et les arbres. Puis, les yeux se sont affrontés. Les dents et les bras se sont entre-tués. Des murs ont été bâtis entre deux caresses par des mains féroces. Le mensonge et la ruse ont été élus roi et reine des cités. Les corps ont pullulé. Dieu a été invité avec maladresse. Et avec bêtise. Puis on l'a tué. D'autres royaumes – et d'autres souverains – se sont établis. Des empires ont été bâtis. A la hâte. Toujours à la hâte. Et le monde a continué de brûler. Et les cœurs – et les corps – de saigner. Et à présent, l'espace et le silence ont perdu leur innocence. Les places encerclées par les armes – et envahies par les jeux – ont été abandonnées aux gladiateurs. Aux masques loufoques. Et aux costumes meurtriers. Et l'esprit qui n'a jamais pu naître en ces lieux agonise à présent sous les bruits. Et l'agitation perfide des mains. En attente peut-être du grand nettoyage du monde...

 

*

 

Nul visage et nulle circonstance ne sont nécessaires pour ressentir – et vivre – la profondeur et l'intensité. Inutile de les chercher au dehors. En dehors de soi. Cette consistance légère habite nos tréfonds. Il convient simplement d'être attentif à demeurer en contact avec elle en veillant – si possible – à la quiétude et à la virginité du cœur et du regard. Ainsi le lien – et la jonction – seront maintenus et facilités...

 

*

 

A la guerre imparable des hommes, aux crevasses du monde, ne prêtons les flancs. Droits dans le regard. Le cœur debout. Sans aile ni origine. Sans survol ni panier d'amassement. Sans fuite ni échappatoire. Et sans rechange.

L'innocence claire et brute. Et l'âme intense et sans frémissement à l'écoute des vibrations de la terre. Et des appels incessants du ciel. Une vie franche et loyale. Transparente. Des pas honnêtes et précis, libérés des hasards. Un regard d'airain sans fêlure ouvert aux vastes horizons.

 

 

Dans la nuit si particulière des hommes, une voix silencieuse apparaît. Une parole sage que leur cœur dédaigne. Une brisure dans leurs certitudes. Un sombre éclat sur le rouge de l'asphalte. Et dans le gris des jours. Une promesse brisée. Un espoir anéanti auquel l'âme se refuse. Terrée dans son cachot hermétique. Dans sa cellule de barreaux de verre. Et pourtant, le ciel est si proche...

 

 

Âmes assoupies. Corps avachis. Et cœurs en lambeaux. Quel triste spectacle offert par les hommes... Et un regard sans doute les délivrerait. Ou peut-être les anéantirait... Voix timide dans leur longue nuit. Ecrasée par la peur. Effrayée des stratagèmes pour la faire taire, elle qui promet le silence...

 

 

La ronde épouvantable – la ronde merveilleuse – des corps et des paroles. Des cœurs lâches qui s'isolent et se mêlent. Enchevêtrés dans les fils invisibles de la terre. Emmaillotés. Ligotés comme des gigots écarlates et innocents livrés à l'avidité des lèvres. Et à l'appétit des mains ensorceleuses.

 

 

Devant la glace sans tain, un visage invisible qui interroge. Qui s'insinue dans les paroles mensongères. Qui déblaye le parfum funeste dont s'entourent les chimères. Qui brise les élans pour distiller, au goutte à goutte, sa vérité.

Mais les yeux sombres, les corps caverneux et les âmes d'outre-tombe n'ont jamais connu l'aurore. Aussi comment pourraient-ils le voir ? Comment pourraient-ils le croire ?

 

 

La longue marche des ombres vers l'abîme dont les silhouettes transparentes remontent les gouffres pour repeupler la terre. Jouets cycliques. Jouets mécaniques des vents, des pulsions et de la respiration du ciel. Figurines de glaise gesticulantes et acharnées. Vouées à l'extinction sans fin. Soumises aux appétits féroces du monde avalant et recrachant, digérant et déféquant ses créatures enfantées, façonnées à la tenaille, sourdes aux injonctions du silence. Aveugles à la main de l'invisible. Séparées du souffle de Dieu par leurs yeux borgnes et leurs mains cadenassées aux maigres trésors de la terre.

 

 

Ah ! L'inquiétude des masses face à leur vie minuscule – au destin sombre du monde – dont le cœur lumineux n'a encore su s'enflammer...

A qui les troubles pourraient-ils donc susciter l'éclat ?

 

 

Aux vents frondeurs et à l'inhospitalité barbare du monde qui déciment les hommes, offrons notre visage agenouillé. Conservons la foulée modeste. Et le pas habile et souple posé dans le courant des circonstances. Et nous serons épargnés par la furie des tempêtes. Et par la houle impétueuse des saisons.

 

 

Dans le ciel, une lune sans pareille qui guide les hommes vers le désastre. Mais pourquoi donc confondent-ils ainsi la lune, les doigts pointés vers elle et le regard qui en témoigne ?

Ronde incessante sur la sphère étroite et infinie. La tête en l'air. La tête en bas. Et le cœur chaviré par les tangages et les roulis. Le corps las et harassé virevoltant parmi les fleurs et les étoiles.

 

 

Dialogues de soufre et de désirs. Dialogues d'épées et d'aimants. Dialogues de sourires et de chaînes qui s'ébruitent dans le silence. Qui empêchera les mains de se tenir. Et de se blesser. Qui empêchera chaque cœur de s'attacher. De s'accrocher aux ronces de l'autre. Barbelés séduisants dont on reste prisonnier bien longtemps après la clôture de toutes les histoires frémissantes des hommes et du monde.

 

*

 

On écrit peut-être ce que l'on aimerait lire chaque jour. Et que l'on ne trouve que trop rarement dans les bibliothèques du monde. On écrit comme un confident témoin – et scribe – quotidien de notre chemin d'existence et de compréhension. Et comme un ami qui accompagnerait – et guiderait – nos pas. Chacun des pas de notre itinéraire...

 

 

Pourquoi ce si peu de partage dans la parole des hommes – dans leurs bras timides et frileux – et dans leur cœur glacial – si insensibles et indifférents – auxquels s'accrochent pourtant tant de médailles et de revers ?

 

*

 

Dans les joutes implacables du monde, pas une seule once d'or. De la ferraille et du métal façonné par des haches barbares et la soif des ambitions. Exploités par le cœur vacillant – et éteint – qui somnole cahin-caha dans les frasques du jour. Et dans l'interminable nuit de son sommeil.

A l'arrière des guimbardes, des tôles froissées, des rebuts d'antan aux airs de modernité, du superflu sans âme. Et des pelletées du monde ramassé à la hâte qui finissent en mur d'encerclement sans jamais protéger des ennemis du dedans. Du péril qui couve sous tous les amassements. Ah ! Que le cœur est fragile ! Et qu'il est lâche de s'emplir ainsi de tant de néant !

Aucun amant ne l'ignore. L'amour a déserté la place. Les petits soldats emmurés aux tourelles périront dans leur sombre armure et sur leurs remparts inutiles guettant tristement par les meurtrières détruites les ruines de l'âme auxquelles ils se sont adossés...

 

 

Aux délices amers des promesses, les âmes défaites de leur espoir. Accroché aux sandales d'un vent magique qui ébouriffera l'avenir, il reviendra encore. Encore et encore avant de mourir sur d'innocents champs de bataille, les armes à la main. Et avec dans le cœur de la grisaille. Et des paroles apeurées prêtes à pardonner (pourtant) son départ. Son inéluctable départ comme un effacement naturel de la maladive ritournelle des hommes. Espérant encore. Espérant toujours malgré la mort.

Et dans l'infatigable terreur, les songes se terreront. Se cacheront du regard. Et de ses éclats judicieux qui les mettraient à nu. Qui les mettraient à jour. Sans pitié pour ces mastodontes brumeux à la chair de papier. Géants de glace fondant à la chaleur du cœur qui les côtoie. Et dans l'inaltérable terreau de l'espérance, ils retourneront. En attente d'un nouvel élan. D'un nouveau départ que le regard – et le cœur – anéantiront une nouvelle fois. Mille ans pourraient passer, on les retrouverait indemnes et frais. Les pieds enferrés à leur assise après chaque dislocation. Infatigables songes dont nous nous abreuvons. Edifiant – et façonnant – le monde. Et le menant à sa perte dans un mécanisme imparable que nul ne pourrait gripper. Grains de poussière pourtant parmi les étoiles qui jusqu'au firmament des âges feront loi.

 

 

Des gratte-ciels hideux. Des tours de pacotille. La magie frileuse des hommes côtoyant la brume des nuées. S'imaginant fréquenter le ciel de leur luxe tapageur. Espérant le tutoyer et y faire leur place. Ignorant que l'escalier des hauteurs – et le royaume souverain – dissimulent leurs portes souterraines dans les bas-fonds du monde. Là où resplendissent l'innocence et l'humilité.

 

 

De bruit en bruit, de parole en parole, les hommes s'imaginent détruire le silence. Le remplir et l'agrémenter. Mais l'oreille demeure sourde et la bouche muette à ses appels. On les voit mélanger les recettes et perfectionner leurs outils pour se distraire de sa présence irréductible.

Cœurs amoindris et cœurs assoupis que la vie endurcit au lieu d'attendrir. Piètres élèves face à l'exercice naturel, ânonnant leurs leçons élémentaires.

 

*

 

Que les hommes partagent-ils en vérité ? Quelques rires, quelques pleurs. Des repas, du repos. Une couche, un logement. Des loisirs*, l'éducation des enfants. Des soucis, des épreuves et quelques joies. Des instants fugaces de partage, vécus – le plus souvent – sans intimité ni proximité. Sans présence ni sensibilité. Sans profondeur ni intensité. Comme des automates animés par leur mécanique...

Ce que nous partageons avec le plus de force et de profondeur, nous le vivons seuls. En un mot, l'essentiel de la vie : la solitude, la peur, l'angoisse, le désir, les rêves et les espoirs, la frustration, la peine et les désillusions. Et la mort...

* Quel vilain mot...

 

 

Les hommes. Ces passants insouciants. Ces flâneurs indifférents. Impénitents solitaires à la grégarité déconcertante qui traversent le monde et l'existence presque impassibles. Presque insensibles. Emus parfois, il est vrai, par quelques êtres et quelques circonstances, et cédant alors à quelques rictus, à quelques grimaces ou à quelques clignements d'yeux – et allant même jusqu'à céder à quelques larmes – vites oubliés.

Et ces caractéristiques ressemblent à un clin d’œil inconscient à l'indéfectible et profonde solitude de la conscience-présence – totalement neutre et impersonnelle – peu concernée par le monde – mais qui se montre, en revanche, sensible. Extrêmement sensible. Si sensible qu'elle est en mesure de ressentir une Unité parfaite avec chacun des êtres et chacune des choses de ce monde. Avec chacune des formes de l'Existant.

Et l'homme en chemin dont la compréhension et la sensibilité s'aiguisent doit apprendre – et il apprend nécessairement – à faire naître – et à vivre au quotidien – ces deux dimensions de la conscience : l'Amour qui mène à l'Unité avec tous les objets du monde (êtres et choses) et l'intelligence qui mène à la neutralité impersonnelle...

Le regard infini et l'exercice jamais achevé de l'existence. Comme une parfaite et interminable continuité agrémentée de quelques ruptures apparentes. Et de quelques pauses formelles...

 

*

 

Un éclair, un soupir, une ombre belliqueuse et voilà l'âme qui s'affole. Aveugle à la lumière. Comme coupée du ciel. Eclairée par la nuit obscure de la terre. Sursautant à chaque pas. A la merci des rumeurs et des murmures. Cisaillée par les coups. Et les lèvres blanches à force de craintes et de brimades. Attendant que se lève le jour...

 

 

Sur les chemins qui mènent à la cité, les hommes assoupis s'endorment les yeux mi-clos. Le front bas incliné vers le ciel. Les désirs inertes et blêmes. Et les espoirs presque remisés, attendant la mort. Le coin de l’œil vissé pourtant sur l'improbable venue des anges. Imméritée sans doute par l'ordinaire barbare de leurs jours voués au vil labeur du gagne pain, aux tablées des cafés et à la petite ritournelle des chansons chuchotée aux oreilles des femmes. Âmes esseulées assemblées par lâcheté et par paresse. Pour affronter au coude à coude – et dans la fausse chaleur du monde – l'attente interminable du couvercle noir qui leur couvrira les yeux dans la fosse.

 

 

La terre suintante de l'été. Liquéfiant les corps de sa chaleur. Assoupissant les cœurs déjà fragiles. Et le soleil féroce écrasant les têtes chapeautées qui patientent à l'ombre des grands arbres. Dilapidant les élans. Anéantissant les pas infébriles qui s'usent sur l'asphalte sans espoir de voir le ciel tomber sur leurs sandales d'hommes usés. De misérables pêcheurs en vérité aux filets gorgés de proies et de victuailles. Et que les trésors de la terre ont contentés...

Embarqués dans l'averse rafraîchissante du soir, les sourires naissent sur quelques lèvres timides. Mais la moue gagne l'essentiel des visages déjà tristes – et si moroses – surpris d'être encore vivants. Et que le crépuscule ne pourra effacer. Les yeux hagards de toute une vie ne pourront voir la main tendue vers eux. Leur âme ne pourra gagner les contrées de l'inconnu. Elle errera, défaite, sur la plaine sans envergure qui les a enfantés. Elle ne pourra abandonner leur dépouille emmaillotée dans la terre. L'envol viendra plus tard. Et la liberté – la grande liberté – ne pourra s'offrir qu'après l'abandon. A la suite peut-être d'existences sans couleur qui jetteront au fleuve toutes les histoires – et toutes les prétentions – pour mettre à nu l'innocence – la grande innocence – recouverte.

 

 

Jamais les visages ne perdront leur charme. Mais dans les yeux, la transparence dévoilera la mécanique du désir. Et derrière le brasier, les derniers espoirs s'envoleront. Dissipés dans le vaste espace du ciel sage. Révélant sa riche et pleine vacuité dans laquelle brille une lumière ininterrompue que les hommes ont laissée en sommeil.

Terre de jachère aux éclats silencieux. Et à la beauté invisible dont les hommes – et le monde – se privent pour des décharges où croulent les immondices.

 

 

Dans les eaux troubles croupissent les hommes. Que leur cécité aménage en lacs, en lagons, en torrents, en cascades enivrantes pour que leurs pieds puissent fouler l'archipel des moribonds. Et le déguiser en prétentieuse merveille où ils pourront s'adonner aux délices des jeux et de la chair. Et croire en leur éden misérable. Sans connaître – ni s'interroger sur – la ruse de son origine. Hommes si peu curieux du trouble dans lequel ils vivent. Et des chimères qui les entourent.

 

 

Mensonges épars que la vérité rassemble. Et dissipe. Edifices fragiles qu'elle brûle. Et jette à terre. Elans qu'elle consume. Supports qu'elle efface. Pour déblayer l'espace – son socle vide – et le virginiser à jamais...

 

*

 

Les êtres passent. Mais les cages restent. Ainsi est la vie – et va le monde. Et ainsi joue la conscience.

 

*

 

A la marche lente des pas, l'équilibre précaire des bras. Le buste droit. La tête altière et modeste inclinée vers la terre. Mais dans les yeux, le vaste regard des sages. Une tendresse sauvage – une tendresse indomptable – et incorruptible – révélant l'infini du cœur. L'assise légère et ferme offrant à la silhouette une allure de nuage. Le visage vierge. Et les lèvres entrouvertes dans le silence.

 

 

Derrière les murs idolâtres des foules, une arène aux dimensions de cage autour de laquelle les hommes se pressent pour assister aux joutes des lèvres et des corps. A la tuerie codifiée des luttes. Relations ordinaires du monde avec ses apôtres et ses combattants. Et ses armées d'ombres applaudissantes, partisans bestiaux du sang et de sensations. Sociétés pariant sur le règne de la jungle. Brisant l'innocence et la fragilité dans leurs élans de beauté. Interdisant au ciel de s'asseoir parmi la furie des spectateurs assoiffés d'espoir et de défaites où les victorieux du jour seront les victimes de l'acharnement des foules de demain. Monde de poings levés et de poings liés. Terre d'honneur et d'atrocité où s'entassent – et s'encouragent – les hommes pour livrer combat. Monde de bêtes humaines aux visages d'ange avec dans le cœur les fourches diaboliques des instincts.

 

 

Dans le fatras des heures – dans le fatras du monde – dans ce lupanar à ciel ouvert aux airs de marché et de kermesse, les ombres se croisent et s'emmêlent. Se mordent et se caressent sous le regard silencieux des origines. Attendri et désappointé par le merveilleux et sordide spectacle de sa progéniture.

 

 

Le grand sourire qui illumine le visage du monde vient du vent à la commissure des lèvres. Et son teint hâlé du soleil des plaines où il se repose parmi les bruits. Mais dans ses yeux rieurs, les innocents devinent une larme – une larme immense – presque infinie née des horreurs qu'il a enfantées – et qui se retient de couler. Mais le jour où elle inondera les vallées de la terre, l'instant sonnera le glas. Et nous verrons partout la débandade des hommes qui périront, eux aussi, comme les créatures exterminées par leur barbarie. Et le monde soupirera à la fois d'aise et de tristesse. Inconsolable de cette trahison et soulagé de sa virginité nouvelle...

 

 

Il y a un monde d'avant le jour que la nuit a enfanté. Et c'est sa longue robe qui recouvre aujourd'hui la lumière. Et dans ses replis que les yeux des hommes se terrent. L'aube tarde à s'inviter. Elle se lèvera dans les yeux dessillés. Mais en cette heure, le sommeil écrase encore la terre. Les gestes ne sont que des rêves d'envol. Et les ombres somnambuliques n'en finissent de prolonger leur nuit même si l'on voit sur l'horizon quelques âmes aux yeux clairs annoncer les tous premiers frémissements de l'aurore.

 

 

Marche saccadée vers l'innocence. Enjambant les ponts et les débris. Sourde au clairon et aux armées. Aveugle aux sourires. Impassible devant la folie des hommes. Et les dés jetés par le monde. Foulées impatientes de retrouver leur fief. Avides d'herbes et de nuages. Pendues au visage du ciel qu'elles vénèrent.

 

 

Monde de détails où l'Absolu s'immisce. Monde de grisaille où la joie se cache. Monde d'attentes et d'impatience où s'arrête le temps. Monde de folie où la sagesse se terre. Monde de créatures où la présence s'insère. Monde minuscule où l'infini s'invite. Monde de bruits que le silence habite. Monde d'yeux clos que le regard éclaire. Monde humain où le Divin se dérobe. Désert des âmes où Dieu se montre pour offrir au monde – à tous ces mondes – sa lumière.

 

*

 

L'intelligence sensible de l'homme. Si légère – presque imperceptible – au quotidien. Et pourtant si profonde – et si vaste – à l'intérieur. Comme encore inéclose. En devenir sans aucun doute...

Oui ! Quelle merveilleuse et touchante intelligence sensible... Encore si brute. Si immature. Si balbutiante. Comme le frémissement d'une conscience qui s'ignore. Et qui arbore des airs épouvantables lorsqu'elle endosse ses costumes – ses postures et ses coutumes – de barbare...

 

 

La prétention glaciale de l'intelligence dépourvue de sensibilité. Et la chaleur naïve de la sensibilité privée d'intelligence. Il n'y a aucun doute, la sensibilité et l'intelligence constituent les deux centres de la conscience à partir desquels les hommes peuvent y accéder...

 

*

 

Le monde n'est encore qu'un océan de barbarie encerclant un infime îlot d'intelligence qui émerge lentement – très lentement – des eaux noires de l'ignorance.

 

 

Il n'y a qu'une seule fraîcheur dans le ciel – comme dans les yeux humbles : celle de l'innocence.

 

*

 

Les hommes. Des âmes avachies au soleil pendant que l'ombre s'étend pernicieusement au dedans...

 

 

Le corps et l'esprit sont dans un entre-deux permanent. Entre deux instants. Entre le passé et l'avenir. Entre la naissance et la mort. Ainsi sont-ils perçus par le psychisme. Et le regard et le cœur demeurent dans l'instant éternel. Etrangers à toute temporalité.

 

 

On peut raisonner l'esprit, si sensible aux arguments et aux compromis. Mais jamais on ne peut corrompre le cœur dont la loi est la vérité et l'Absolu. Sources intarissables de l'Amour et de l'innocence.

 

 

En ce monde, il y a des êtres, des activités et des existences (l'immense majorité) voués à assembler, à construire et à édifier. Et d'autres (une infime minorité) destinés à ôter, à détacher et à effacer. Les deux participent à l'équilibre général du monde. Les premiers contribuent à son évolution. Et les seconds à l'avènement de la compréhension.

 

*

 

Un tourbillon de vent – né du désir éclatant des chimères – s'étale sur l'horizon. Et de désespoir en désillusion, on le voit rejoindre la jetée des origines. Ramené d'un souffle timide vers la bouche génitrice.

 

 

De cœur perdu en cœur perdu, la solitude empiète sur le monde. Et gagne la chair moribonde qui autrefois s'extasiait. D'île en île, les terres anciennes – et l'archipel des souvenirs – s'effacent. Et au loin, l'aile fragile apparaît. Se rapproche du fil tendu entre les abîmes où nous nous tenons, apeurés et malhabiles.

 

 

Lorsque l'aurore et le crépuscule se rejoindront, l'instant explosera. Et sous la pression des éclats, le cœur anxieux éclatera. Les miettes de sérénité impartagées qui gisent aujourd'hui sur le sol disparaîtront. Démunies et inutiles sous la percée du silence à l'orée des mondes engloutis où surnageront pourtant la paresse des pas. Et les larmes sèches sur les masques que notre visage frileux avait empruntés aux heures fastes et mensongères de l'arrogance.

 

 

Aujourd'hui, la terre est froide. Et le monde dépeuplé. Les survivants ont déserté les lieux. Evanouis peut-être entre les souvenirs. Les mains levées dans la mémoire. Implorant de leurs gestes désespérés le pardon de la solitude et de l'innocence.

 

 

Du silence à l'infini, il n'y a qu'un pas. Un abîme infranchissable qu'une aile pourtant peut combler d'un seul battement. Pour le franchir, la tête modeste doit se faire humble. Les yeux clos doivent s'éveiller à la pendaison de l'âme. Au cœur effrité. Rongé par l'absence. Au corps malmené par les eaux noires du monde. Alors émergera un sourire qui invitera l'aile à s'ouvrir. Et à rejoindre le territoire espéré du vivant moribond de l'âme.

Dans le déni du mensonge et de l'omission, la fronde de la terreur et de l'impuissance. La tragédie maquillée en réjouissance. Avec encore quelques paillettes dorées sur la blancheur des sourires bien en peine de dissimuler la noirceur du gouffre où l'on s'est jeté soi-même.

 

 

Vie d'infinie lumière où résonnent encore les chevauchées d'autrefois dans le pays des songes auxquels nous avons crû. Et qui s'éloignent peu à peu. Et avec eux, l’orgueil des pas. La mascarade – la grande mascarade – des costumes d'apparat. Et le soufre sur nos lèvres. Le venin sous les ongles et dans la parole jetée à chaque griffure et à chaque morsure offertes à la ronde. A ce monde que nous tenions pour sans pitié – et dans notre main abusive – pour le ligoter à notre mensongère liberté.

 

 

La main sur le visage des morts. Et un doigt sur la bouche pour les faire taire. On se couvre les oreilles pour effacer leurs paroles qui assaillent les souvenirs. Et les yeux cerclés de noir encore avides d'images aspirées dans le grand tourbillon du temps. Qui tournent. Et qui tournent. Et que la main ne peut arrêter. Finissant dans l'abîme où tous les morts sont enterrés.

 

*

 

Les principes agissants du corps et de l'esprit. Et les souffles actifs du cœur, de la vie et du monde. L'infatigable – et indestructible – mécanisme de la marche. De la ronde incessante que rien ne saurait interrompre ni réprimer. Unique et éternelle puissance à l’œuvre dans l'univers puisant sa force, ses mouvements et ses cycles dans son origine. Et ses inépuisables tréfonds. Manœuvres récurrentes et évolutives pilotées par la main discrète – la main invisible et incontournable – de la conscience, porteuse de lumière. Offrant, au fil des pas, à ce monstrueux agglomérat d'énergies entremêlées une foulée lente et progressive, éclairée par une forme d'intelligence et d'Amour de plus en plus tangible...

 

*

 

Sur le sol émietté des songes et des rumeurs, les murmures inaudibles du silence, présents aux prémices de l'aurore. Amertume et rancœurs gelées. Anéanties. Effacées par le cœur aimant. Encerclées par la fente béante qui les a englouties. Et sur l'horizon, quelques fumerolles. Dans le brasier éteint, les ruines d'autrefois qui furent naguère de prétentieux édifices, d'imposants monuments à la gloire de notre nom effacés, eux aussi, par les souffles du ciel et les vents dévastateurs de la terre. Et sur ces débris, une fleur pousse sur le sable que nous avions pris pour de l'or. Pour les joyaux souverains. Et de ce trésor funeste balayé par l'immensité pourra naître le silence. Le berceau de l'innocence. Et sur ce sable nouveau s'effaceront l'horreur édifiée par les hommes, leurs querelles de chiffonniers et leurs paroles éphémères.

L'océan reprendra alors ses droits sur la grève. Sur les côtes et les ports populeux où le macabre, les peines et les signes de l'indigente richesse continueront d'affluer. Eux aussi seront balayés à chaque instant par les marées qui bercent le cœur. Et ces terres défigurées – ces terres boursouflées – par la bêtise et la crasse seront nettoyées par les vagues immenses de l'Amour. Et le silence amoindri – le silence amputé de sa plénitude – resplendira sans ombre. Et sans tache. Victorieux de toutes les offenses et de tous les massacres. Indemne de toutes les défaites que les hommes ont cru lui infliger pour l'embellir ou l'atteindre.

Et dans le silence du soir, nos bras débarrassés de leurs armes accéderont à son socle. Et nous poserons notre séant par dessus les abîmes au milieu des vents qui continueront d'assoiffer les plaines où naissent et s'enterrent les hommes. Et de nos jours de sommeil – et de nos nuits agitées par les songes, le monde pourra enfin guérir. Et retrouver la liberté que nous lui avions dérobée. Le silence alors s'installera en tous lieux où l'écoute deviendra souveraine. Eclairant l'obscurité immature des songes qui continueront de prolonger la longue nuit du monde – et la longue nuit des hommes.

Habitant ainsi le silence dans la parfaite plénitude de l'être, sensible au monde qui n'en finira jamais de renaître...

 

10 décembre 2017

Carnet n°81 Pensées et réflexions pour soi

– Petit état des lieux du monde et de l'être avant le silence peut-être... –

Journal / 2016 / L'intégration à la présence

La mystérieuse identité de l'homme – la mystérieuse identité de l'être – que l'humanité cherche de ses pas aveugles. Et dont le visage est si proche qu'il glisse sur tous les yeux fébriles. Et dont l'invisibilité échappe à toutes les mains tendues. Monde borgne courant après les nuages – et d'étranges songes – poussés par les vents hilares. Pourquoi les hommes n'ont-ils donc pas l'idée d'offrir leur cœur aux bourrasques pour déblayer leur terre de ses édifices hideux et de ses monuments prétentieux et se remplir du vide qu'ils pressentent ? Pourquoi les hommes n'ont-ils donc pas l'idée de s'asseoir sur leur séant et d'attendre, sans impatience, la vérité – en la laissant s'approcher à pas lents ? Et toutes les énigmes seraient aussitôt résolues. Percer ce mystère originel n'empêcherait sans doute pas la course folle du monde, les incessants tournoiements des hommes, leurs sempiternels atermoiements, leurs savantes arabesques et leurs gesticulations mécaniques d'automates stupides mais leur ôterait cette gravité déconcertante, cette pesanteur de pachydermes moroses qui les confine à une danse lente et frénétique – à une danse triste et inquiète – autour d'eux-mêmes. Les yeux et les cœurs enfin ouverts au mystère – enfin dessillés – revêtiraient alors la robe légère et profonde de l'être...

 

 

Emu jusqu'aux larmes par la tendresse du monde. Dont les hommes parfois savent se faire les plus magnifiques représentants...

 

 

Le monde et la vie sont d'incroyables terrains – et un inépuisable terreau – d'histoires. Une source infinie d'inspiration pour celui qui écrit. Chaque jour, on y plonge son cœur, ses yeux et sa plume. Et la récolte apparaît presque aussitôt sur la page.

 

 

On aimerait parfois voir les hommes éparpillés comme les herbes sauvages. Mais il y a ce travail – ce maudit travail – et cette quête – cette quête odieuse – qui les réunissent en rang sur les chemins. Sur tous les chemins étroits des villes et du monde.

 

*

 

Les hommes se montrent, en général, bienveillants et indulgents à l'égard des enfants – en particulier envers les jeunes enfants – et à l'égard des personnes âgées – en particulier envers les vieillards. Cette indulgence et cette bienveillance se manifestent sans doute en raison des représentations habituelles associées à ces deux catégories situées aux extrémités de la vie humaine qui sont presque toujours synonymes, aux yeux des hommes, de fragilité et d'une certaine forme d'irresponsabilité fort excusable ou pardonnable... Les premiers sont aussi appréhendés comme le parfait symbole de l'innocence et les seconds bénéficient d'une forme de respect naturel liée à leur grand âge et à leur longue expérience de l'existence qui suscitent à leur endroit égards et révérence.

Mais au vu de l'infantilisme – voire de la puérilité commune – des hommes adultes, peut-être conviendrait-il d'adopter aussi une totale indulgence et une parfaite bienveillance à l'égard de tous : êtres et hommes quel(le) que soit leur âge (et leur fonction). Mais il est parfois bien difficile de s'y livrer car nul n'échappe complètement à sa propre puérilité. Et à son propre infantilisme. A l'égard desquels il convient, bien entendu, d'être aussi indulgent et bienveillant que possible...

 

 

Lorsque (presque) malgré soi(1), on s'engage dans un cheminement spirituel, on ne peut imaginer qu'il n'aura de fin... Il semblerait, pourtant, que le processus de désencombrement se poursuive indéfiniment... comme s'il n'en finissait jamais. Travail intérieur de longue haleine – et de chaque instant – jamais achevé... Et c'est là une bien surprenante – et une très étrange – aventure intérieure avec ses chemins, ses impasses, ses lois, ses découvertes, ses régressions, ses déconvenues, ses souffrances, ses cycles, ses avancées et ses surprises. Avec ses joies et avec ses peines. On y est happé sans pouvoir y échapper. A l'instar de la vie – lorsqu'elle apparaît, elle se déroule selon ses propres mystères jusqu'au dernier souffle –, la spiritualité, une fois découverte, le cheminement vers la connaissance se déploie jusqu'à son terme. Aucune force n'est en mesure de stopper sa progression. Et nous voilà contraints d'avancer tout au long de ce voyage sans fin : pour accéder peut-être, un jour, à la lumière de la connaissance. A Dieu et à l'ouverture complète de son royaume.

Mais après s'être familiarisé avec le regard pur – la perception impersonnelle – puis après s'y être établi (ou pouvoir y accéder avec une certaine aisance), le voyage – et le cheminement – n'en sont pas pour autant achevés... Car le regard, la lumière et le royaume de Dieu qui ne s'inscrivent – rappelons-le – dans aucune temporalité, ne peuvent jamais s'acquérir ni être définitifs... Il convient simplement (si l'on peut dire...) de se maintenir dans cette perception nue, vierge et ouverte (d'y accéder ou de la faire naître...) – encore et toujours – à chaque instant. Indéfiniment. Accueillant, instant après instant, le flux incessant – et sans doute, lui aussi, sans commencement ni fin – des mouvements phénoménaux et énergétiques(2)...

(1) Nul ne décide de s'inscrire dans un cheminement spirituel (comme dans toutes choses d'ailleurs...) sans que de mystérieuses forces intérieures nous y poussent et nous y invitent... La spiritualité – comme toutes les autres activités, sphères, dimensions et rencontres de l'existence – surgit lorsque nous sommes mûrs pour la vivre et/ou lorsqu'elle est le support ou le moyen nécessaire pour que se développe la progression vers la maturité...

(2) Il est loisible de penser que le duo conscience-énergie (que l'on pourrait également appeler le duo nouménal-phénoménal ou le duo perception/présence – mouvements et formes) n'a ni commencement ni fin. La conscience-présence perceptive sensible étant impersonnelle, immuable, éternelle et « valide » uniquement, en quelque sorte, dans l'instant et l'énergie regroupant l'ensemble des phénomènes (les formes, leurs mouvements et leurs interactions) étant inscrite dans la temporalité (un déroulement temporel)...

 

 

Ces derniers temps, presque chaque soir, je m'allonge sur le vieux tapis de la pièce à vivre devant la bibliothèque. Et je prends un livre, guidé par une vague intuition, un titre, le nom d'un auteur. Et je l'ouvre au hasard*.

* Si tant est qu'il existe...

Quel merveilleux sentiment de se sentir ainsi entouré par tous ses amis qui viennent vous parler sans fard – à cœur ouvert – un à un. Déposant directement leurs paroles au fond de votre cœur.

Et en fin de soirée gisent sur le sol plusieurs livres posés, ici et là, dans lesquels mon âme a pioché une phrase, une atmosphère, un infime bout de vérité. La confirmation d'une intuition ou d'un sentiment sur le réel, sur notre façon d'être en vie – et notre façon d'être un homme...

 

 

La compulsion de l'achèvement. Et de la perfection. Infatigable moteur. Et obstacle rédhibitoire à la paix...

 

 

D'ordinaire, les hommes – et leur compagnie – m'ennuient, me blessent ou m'irritent bien davantage qu'ils ne m'offrent de joie. Et même de plaisir. Aussi comment pourrais-je me résoudre à les fréquenter ? La solitude, elle, m'offre infiniment plus de joie – et de plaisirs (sans compter la paix qu'elle procure...) – que d'ennuis, de tristesse et de colère (qui se manifestent bien rarement en sa présence). Aussi comment pourrais-je me résoudre à la quitter ?

 

 

Les êtres – et les hommes – donnent ce qu'ils peuvent, bien sûr. Mais bien souvent, ils n'ont rien à offrir. Ou si peu... En revanche, tous – quasiment tous – prennent à pleines poignées – et autant qu'ils en sont capables – selon leurs besoins, leurs capacités et leurs exigences morales. Tous – quasiment tous – se servent à pleines brassées par la force ou la ruse, avec indifférence, dureté, gentillesse ou amabilité dans le fabuleux coffre du monde. Allant parfois même jusqu'à piller et dépouiller les êtres – et les hommes – fragiles, vulnérables ou aisément extorquables, à la générosité ingénue ou simplement soucieux de l'Autre et enclins au partage.

En chacun veillent un prédateur, un instrumentalisateur et un profiteur. Et chez la plupart, un rien les anime. Et les incite à sortir leurs outils et leurs instruments d'appropriation... Et même chez les moins avides, les moins voraces, les plus inhibés, les plus autonomes ou les plus ouverts à l'Autre se négocient – sciemment ou non – les termes de l'échange et les transactions, chacun calculant à la louche ou à la virgule près, les dons, les gestes et les contre-dons en veillant à ce qu'ils ne se montrent trop inégaux ou disproportionnés... Chacun obéissant à cette loi implicite(1) – vieille comme le monde : chacun, au mieux, doit être gagnant dans l'échange et ne doit surtout jamais donner davantage qu'il ne reçoit(2)...

En ce monde, ceux qui savent – et peuvent – se donner tout entier – s'offrir sans compter – corps et âme – sont rares. Et il me semble en faire partie... Et ceux qui s'y prêtent sans attente – sans la moindre attente –, je n'en connais pas. Et je n'appartiens évidemment pas, moi-même, à cette catégorie minuscule où les représentants humains doivent se faire rarissimes...

(1) Et même la mère qui nourrit et prend soin de son enfant reçoit parce que sa présence représente – et lui offre – tant de choses bénéfiques qu'elle a le sentiment de recevoir pour son dévouement – ou parfois même pour son abnégation...

(2) Sauf, bien sûr, comme stratégie à terme avec « attentes » de retour sur investissement...

 

 

J'ai le sentiment que l'attachement et l'attente relationnelle exclusive et globale sont si profondément présents – et ancrés – chez moi que la solitude – la solitude intégrale ou quasi intégrale – est la seule réponse possible – la seule réponse appropriée – tant qu'ils persisteront. Tant qu'ils ne seront pas totalement éradiqués. Le jour – s'il arrive – où je sentirais leur déracinement complet, j'aviserais alors de ce qu'il convient de faire : continuer à vivre en solitude ou m'inscrire davantage dans le monde humain. Mais la mort, sans doute, me frappera avant...

 

 

Là où est le réel – et le vivant – il y a des échanges : des collisions et des collusions. Là où sont les hommes, il y a des guerres et des affaires. Le monde entier – l'ensemble de l'univers – n'est qu'une zone infinie de transactions et de petits arrangements entre amis d'un jour et ennemis de toujours où les alliances succèdent aux hostilités. Et où les trahisons succèdent aux alliances qui ouvrent un nouveau cycle d'hostilités... Indéfiniment. Ce que perdent les uns, les autres le gagnent. Ce que les uns gagnent, les autres le perdent. Dans un parfait équilibre général. Et il est peu dire que les rares êtres – les rares partisans de la paix, de l'équité et du partage – dont l'aspiration n'est (et n'a jamais été) ni le gain ni le pouvoir mais l'innocence et l'Amour* se sentent bien démunis et bien désemparés dans ce monde de luttes et de négoce... Il y a chez eux une immense tristesse à vivre en de tels lieux...

* Innocence et Amour qu'ils ne parviennent encore à habiter pleinement...

 

 

En ce 14 juillet 2016, nouvel attentat en nos paisibles contrées. Pas si paisibles en vérité... Un camion, conduit par un partisan aveugle et haineux du terrorisme islamiste (et identitaire), a écrasé de façon volontaire (et abjecte) des centaines de personnes assistant aux réjouissances nationales. Bilan : 84 morts.

La barbarie et la bêtise habitent toujours profondément le cœur des hommes. Et qu'elles s'expriment à travers les gestes ordinaires et quotidiens ou de façon si ostensible, l'horreur est presque toujours au rendez-vous... De ces dernières, les hommes se disent, bien naturellement, outrés. Et elles font, très souvent, naître (de façon compréhensible) la colère, la haine et l'instinct de vengeance... Mais nul n'a vraiment conscience des premières. Elles sont si courantes – et si répandues – que nul ne s'en offusque... Que les hommes laissent leurs enfants écraser des centaines de fourmis par simple jeu ou ennui sans broncher (ou en riant même de ce geste...), qu'eux-mêmes éradiquent des milliards d'insectes à coups de bombes et de traitements insecticides et qu'ils tuent, assassinent, blessent, maltraitent et confinent des milliards d'animaux (chaque année) dans des conditions sordides et insupportables, rares sont ceux qui s'en scandalisent...

Je ne minimise aucunement le drame qui s'est joué aujourd'hui pour des centaines d'individus, leur famille et leur entourage (et mon cœur éprouve de la peine à leur égard et se joint à leurs douleurs...) mais je ne peux passer sous silence l'incroyable hiérarchisation qu'opèrent les hommes dans l'horreur et la barbarie. J'aimerais tant que chacun prenne conscience qu'elles se manifestent partout. Et presque à chaque instant. Et qu'aucune d'entre elles n'a sa place en ce monde...

 

 

A travers les situations, les événements et les circonstances qu'ils offrent (qu'ils nous offrent), la vie et les êtres, le monde et les choses sont nos maîtres. Nos seuls maîtres, en vérité.

Avant que nous nous éveillions à nous-mêmes (à notre nature profonde – à notre nature véritable), ils nous enseignent. Ils ne cessent de nous enseigner, investis, le plus souvent malgré eux, dans leur rôle de maîtres d'apprentissage et de formation.

Et après avoir goûté l'ineffable – et en habitant (un tant soit peu) l'instant et l'impersonnel –, nous les servons avec promptitude et dévouement* comme maîtres souverains et dirigeants... Jamais nous ne cessons – et ne cesserons – d'être à leur écoute. Et à leur service...

Ainsi, quel que soit notre degré de compréhension, la vie et les êtres, le monde et les choses sont – et seront toujours – nos seuls (et uniques) maîtres...

* Autant que possible...

 

 

Instruits-toi et nourris-toi de l'expérience et des enseignements de tes congénères, de tes aînés ou de tes prédécesseurs sur le chemin de la compréhension. Ne t'en prive pas. Et tu peux, bien sûr, t'y livrer tant que tu en ressentiras le besoin. Mais n'oublie pas que « ces instructions » ne te dispenseront jamais de marcher, seul et pas à pas, sur ton propre chemin. Jamais elles ne pourront remplacer tes propres expériences, tes propres découvertes et tes propres avancées. Et elles seules auront, en fin de compte, quelques valeurs dans la progression réelle de la compréhension. Les faits et les circonstances jamais ne cesseront d'éprouver – et de vérifier – la validité de ton parcours spirituel et perceptif. Et n'oublie pas qu'en la matière (comme en toutes choses d'ailleurs – qu'elles relèvent du monde nouménal ou du monde phénoménal...), rien ne sera jamais définitivement acquis. A chaque période de ton existence (et de ton cheminement), puis, de plus en plus fréquemment jusqu'à ce que cela survienne à chaque instant, il te faudra oublier tes avancées et tes certitudes pour repartir à zéro. Avec un regard totalement neuf, vierge et innocent. Avec l'esprit du débutant qui sans même s'en rendre compte deviendra, malgré lui et sans la moindre volonté ou aspiration d'ordre individuel, de plus en plus large et impersonnel, de plus en plus juste et avisé...

 

 

Pénétrer l'esprit du monde – l'esprit des êtres et des choses –, seul l'être en est capable de façon juste et entière. De façon pleine. Porté par l'Amour et l'impersonnel, il n'en usera jamais à des fins égotiques. Il en fera toujours usage de façon avisée et appropriée lorsque les situations l'exigeront. Pour aider le monde – les êtres et les choses. Et les guider vers la vérité.

 

 

Il y a toujours eu chez moi comme un effroi et une réticence à aller vers le monde*. A le fréquenter. Et même à le traverser. Comme si en apercevant quelques représentants de l'espèce humaine, on versait soudain une tonne de plomb dans mon cœur. Et dans mes souliers. Je me sens alors incapable de faire le moindre pas. Et lorsque je ne peux y échapper (oui ! La fuite et l'évitement toujours...), je me faufile entre les silhouettes comme une ombre furtive.

* Le monde humain...

Les bruits, l'agitation, les cris et les gesticulations ont toujours un peu effrayé – et décontenancé – mon âme impressionnable. Mais ma crainte la plus vive est sans doute liée au fait de ne trouver aucune place (aucune place satisfaisante et acceptable) parmi les hommes. Et de ne pouvoir m'abandonner à la futilité ambiante. Comme si mon cœur savait depuis longtemps qu'on ne peut rencontrer personne en ce monde. Et que toute rencontre y est même impossible... Que l'on ne peut être utile à quiconque sur les choses essentielles. Et que nul, non plus, ne vous sera d'aucun secours. En tout cas, pas avant de s'être rencontré soi-même sur l'essentiel...

Il est plus aisé pour moi d'avoir des amis naturels. Et des amis de papier. Ou de rencontrer le monde entre quatre yeux. En entrevue individuelle où chacun a déposé ses masques et son costume et peut livrer à l'Autre – et à cœur ouvert – les nécessités essentielles qui le touchent ou le préoccupent. Lorsque les conditions de la rencontre sont réunies, il est rare qu'elle ne se produise... Lorsque les âmes et les cœurs n'ont plus rien à dissimuler, ils se dévoilent. Et la rencontre a lieu, le temps de l'entrevue, à l'issue de laquelle chacun repart (vers sa solitude) avec le cœur à la fois plus riche et plus ouvert. Plus sensible aux êtres et aux choses. A la vie et à l'Existant.

Mais comment de telles rencontres pourraient-elles avoir lieu dans le monde ? Les costumes, les masques, les groupes, la futilité et les distractions n'en laissent jamais ni la place ni l'occasion... Et je n'ai jamais été – et ne serais sans doute jamais – disposé à me prêter aux déguisements et à la frivolité... Question de nature et de caractère peut-être...

 

 

D'horizon en horizon se dessine la verticalité. Les linéaments de la verticalité. Peu à peu les lignes horizontales s'estompent pour laisser apparaître les premiers frémissements de l'aplomb. Jusqu'au jour où le ciel vous agrippe par les épaules. Et vous redresse. Ensuite votre regard apprend à se tenir debout. Ce qui ne dispense pas les yeux, le cœur et les pas de ramper encorede temps à autre lorsqu'il leur arrive d'oublier la présence du regard ou lorsque les circonstances leur sont (trop) douloureuses...

 

 

Lorsque le cœur s'est dépouillé de la plus grande part de ses désirs (et donc de ses projections), il cesse de se jeter vers l'avant. Et vers l'avenir. Lorsque le regard s'est suffisamment familiarisé avec la verticalité, les ambitions et les intentions s'effacent progressivement. Et le corps se redresse alors naturellement. Cette caractéristique est particulièrement évidente – et probante – lors de la marche. Les pas perdent radicalement leur dimension horizontale. Ils ne sont plus irrésistiblement aspirés vers l'avant. Ils ne sont plus projetés vers un but ou une destination à atteindre. Ils cessent donc de glisser sans ancrage sur le sol. Au contraire, ils y prennent appui – à la verticale du sol –, à la fois de façon légère et ferme avec la colonne et la tête qui se redressent, elles aussi, naturellement vers le ciel...

Comme si le regard et le cœur insufflaient en quelque sorte au corps – et à la matière – leur propre verticalité. Leur propre manière de se tenir droits et debout. Présents simplement à l'instant. Insoucieux de ce qui adviendra l'instant suivant. Effaçant donc l'horizontalité des pas – et de la foulée – pour leur offrir une verticalité incontestable. Et jusque là jamais éprouvée de façon si claire et évidente...

 

 

Celui qui aspire (pour je-ne-sais-quelles obscures ou nécessaires raisons) à connaître son passé – à savoir ce qu'il était – doit se tourner vers le présent. Et non vers ses souvenirs. Et celui qui aspire (pour les mêmes ou d'autres obscures ou nécessaires raisons) à connaître son avenir – à savoir ce qu'il sera – doit, lui aussi, se tourner vers le présent. Et non vers quelques fumeuses projections anticipatives.

Le présent est, en vérité, la seule entité temporelle à ne pas négliger... Il contient à la fois l'instant, l'anamnèse de l'individualité et son devenir. Parce qu'à chaque instant, l'être manifeste tous les signes de son existence (et de son mode de fonctionnement) tels qu'ils sont aujourd'hui, tels qu'ils étaient hier et tels qu'ils seront demain... Et tout le reste (ou l'essentiel de ce qui est advenu, advient et adviendra) en découle presque directement... Voilà pourquoi il convient d'être particulièrement attentif – pleinement et profondément attentif – à ce que nous sommes – et à la façon dont nous fonctionnons – aujourd'hui... car toutes les traces antérieures, actuelles et ultérieures de notre être y sont réunies...

 

 

Le regard impersonnel et le cœur ouvert et sensible – immensément tendre – accueillent le monde. Ses pas, ses gestes, ses paroles et ses bruits. Et assignent le corps et l'esprit (qui appartiennent, eux aussi, au monde) à s'en faire les serviteurs attentifs et diligents. Dans une soumission joyeuse et pleinement acceptée... Et lorsqu'il arrive au cœur et à l'esprit de manifester encore quelques résistances et rebuffades, le regard se penche vers eux avec tendresse pour mettre au jour leurs embarras et leurs obstructions. Il leur offre un éclairage juste et magnanime, respecte leurs exigences et leur permet de se fluidifier – de dissiper et d'effacer leurs embâcles – à leur propre rythme.

 

 

[Donner. Et après ?]

Donner à l'Autre – aux autres – le meilleur de ce que l'on peut offrir. Immédiatement et sans compter. Faire tout son possible – vraiment tout son possible – pour répondre avec diligence et promptitude à sa (ou à leur) demande. Comme si on le faisait pour soi-même. En s'y investissant et en s'y engageant pleinement. Totalement. Soucieux de leur confort et de leur bien-être autant (et peut-être même davantage) que nous le serions des nôtres... Et s'y atteler sans rechigner comme un impératif prioritaire en reléguant ses propres priorités au second plan. Et s'y livrer de toutes ses forces en repoussant même ses limites (limites physiques et psychiques). Peu d'hommes donnent ainsi. Moi, je ne sais faire autrement*... Mais la plupart des hommes aident en dilettante, ne consentant qu'à de très maigres efforts et interrompant leur assistance bien avant d'avoir franchi les premiers confins de l'inconfort, faisant toujours passer leur agrément, leur emploi du temps, leurs désirs, leurs exigences et leurs caprices de façon prioritaire. Et offrant à l'Autre – aux autres – le temps et l'énergie qu'il reste du bout des lèvres. Du bout des doigts... En attendant avec avidité, après avoir médiocrement offert leurs services, que les autres leur manifestent quelques marques d'attention, leur dispensent quelques compensations ou leur accordent quelques récompenses pour les remercier de leurs pauvres gestes...

* Révélant un manque de recul patent – un défaut évident de distanciation – à l'égard de l'Autre comme à son propre endroit...

Dans ces deux façons de donner – presque diamétralement opposées – je ne sais laquelle est la plus juste. Les uns savent s'écouter. Être à l'écoute de leurs possibilités, mesurer leurs dons et tempérer leurs efforts en demeurant, le plus souvent, bien en deçà de leurs capacités à s'investir et à donner... Les autres se livrent tout entier à la demande de l'Autre – des autres – remisant leurs propres désirs et demandes au second rang. Et allant même parfois jusqu'à les nier – ou à les oblitérer. Les uns sont très attentifs à leur propre individualité, ce qui semble juste à certains égards et les autres très attentifs à l'Autre, ce qui semble juste à d'autres égards... Il y a, bien sûr, dans l'attitude des seconds de l'excès, de l'outrance, du sérieux et la nécessité de rendre service (et de faire plaisir) en répondant avec promptitude et de façon aussi pleine et consciencieuse que possible aux demandes des êtres. Et du monde. Cette inclination cacherait-elle un besoin inconscient de reconnaissance – reconnaissance de son sérieux, de sa générosité et de son abnégation (voire même de son sacrifice) ? Ou cela est-il si profondément inscrit en soi que nulle attente – fut-elle inconsciente – n'est nécessaire pour que se manifeste avec force et spontanéité cette attitude d'altruisme (ou, au minimum, de prise en compte de l'altérité)... ? A dire vrai, je n'en sais rien...

 

 

[Scènes de la vie ordinaire]

Tu me fais plaisir. Ça me fait plaisir. Je te fais plaisir. Faire plaisir, quelle étrange expression ! Comme si le plaisir se fabriquait... soulignant ainsi son caractère artificiel. Le plaisir serait-il donc un édifice factice ?

Tu me fais mal. Ça me fait mal. Je te fais mal. Faire mal, quelle horrible expression ! Comme si le mal était toujours intentionnel... Terrifiante volonté...

Œil pour œil, dent pour dent. Baiser pour baiser, caresse pour caresse. La loi du Talion et celle de la réciprocité agréable et bénéfique. Jamais nous ne sortons de l'échange. Du don et du contre don. Bilatéralisme positif ou négatif qui tire sa source de l'identification égotique, incapable de sortir de son cercle étroit. Et qui emprisonne l'Amour. L'Amour captif de l'échange. Faux amour en vérité dont les baisers et les caresses ne trompent que les âmes naïves – et qui sont bien vite percés à jour lorsqu'ils se transforment en coups et en morsures. Combien de couples se séparent-ils ? Combien d'amitiés explosent-elles ? Combien de mariages s'achèvent-ils en divorce ? Combien de coups et de baisers, combien de morsures et de caresses chacun aura-t-il reçu et aura-t-il donné au cours de son existence ? Comme si la vie des hommes n'était (presque) qu'une longue liste de gestes et de paroles pour faire plaisir et pour faire mal. Qu'une longue suite de baisers, de caresses, de coups et de morsures...

Et en vivant en société – et dans la compagnie des hommes –, nous passons notre vie dans une indifférence et une insensibilité à l'Autre quasi générales, interrompues par quelques accolades et une succession de blessures que nous infligeons et recevons. Ah ! Que de gestes gauches et malhabiles dans cet Amour qui se cherche. Et qui ne parvient à se trouver. Tant de maladresse dans notre impétueux et irrépressible besoin d'aimer et d'être aimé... Symbolisant (presque) à lui seul le tragi-comique de l'existence (de notre existence). Et du monde dans lequel nous ne passons que quelques brèves décades...

 

 

Happés par le cours des choses et la présence des êtres – leurs appels, leur demandes, leurs sollicitations et leurs exigences, nous essayons de prendre en compte leurs aspirations et faisons notre possible pour composer avec leurs intérêts. Et ces préoccupations – et les soucis qu'elles font naître – nous font presque toujours oublier d'être. De contempler la vie et le monde (les êtres et les choses). De les sentir et de les goûter avec profondeur et intensité. Comme s'ils nous obligeaient à survoler l'existence – et le monde. Et à les parcourir avec superficialité. Comme si la nature même du réel et l'inclination naturelle de la perception à la saisie, à l'absorption, à la restriction et à la contraction nous empêchaient en quelque sorte de vivre dans le regard impersonnel...

Comme si nous occuper – et nous préoccuper – de façon (trop) exclusive des êtres et des choses nous éloignaient inéluctablement de nous-mêmes. De notre nature réelle et profonde. Voilà pourquoi il convient de ne pas se laisser distraire et absorber à tout propos par leur compagnie. Et qu'il nous faut, quels que soient les événements, maintenir notre attention au niveau du cœur et du regard...

Mon incapacité (ma grande incapacité) à vivre dans le monde – et en compagnie des autres – révèle sans aucun doute, outre quelques attentes à l'égard de la tranquillité (phénoménale) et quelques exigences à l'égard de mon entourage, mon surinvestissement et ma trop grande implication à l'égard du réel, du monde, de la vie, des êtres et des choses. Un manque de distance évident. Je me jette à corps perdu sur le moindre de leurs mouvements, le moindre de leurs gestes et la moindre de leurs paroles. Comme s'ils constituaient un aspect fondamental et essentiel de l'existence – presque une question de vie et de mort... Les recevant pleinement, les analysant et essayant d'y répondre avec promptitude et efficacité ou, selon les cas, de me dégager des embarras qu'ils pourraient occasionner... Et cette attitude atteste de mon impossibilité à conserver, en présence des autres – et du monde –, un regard impersonnel neutre et non impliqué (sur les plans cognitif, émotionnel, sentimental et existentiel...) et un cœur large, ouvert, aimant et bienveillant en mesure d'accueillir avec profondeur, recul et Amour ce qui advient. De recevoir sans attente ni exigence, la vie, les êtres, le monde et les choses tels qu'ils surgissent et se manifestent...

 

 

Oblats séculiers de la conscience. Et frères de la communauté énergétique. Qui en ce monde peut échapper à cette appartenance ? Quel être peut s'exclure de ce vaste aréopage ? Nul, bien sûr... Mais les hommes préfèrent – et ont un goût bien plus prononcé pour – les petites assemblées. Les cercles restreints (et étriqués). Les sociétés particulières aux caractéristiques et singularités ordinairement humaines : amicales de la pétanque du village, confréries des joueurs de belote ou des fumeurs de pipe, communautés des budokas, des fonctionnaires de police ou des joggers du dimanche etc etc. L'universel dans le particularisme. L'infini dans la restriction. L'unité dans la division. Ainsi sont les hommes – et est l'esprit des hommes. Et ainsi s'amuse (avec eux – et avec nous) la conscience...

 

 

En définitive, on n'agit que pour soi (pour soi-même). Et l'on ne parle qu'à soi (qu'à soi-même). Que l'on en ait conscience ou non... Que l'on s'inscrive dans une perspective totalement, partiellement ou aucunement égotique... Que l'on ait le sentiment de faire les choses pour sa propre personne, pour les autres, au nom d'une cause, selon les exigences situationnelles ou pour je-ne-sais-quelle-autre raison personnelle ou impersonnelle, c'est toujours la conscience qui, à travers chaque être, s'exprime et est vue – et entendue – par elle même. Toujours la conscience qui se manifeste dans ses expressions et leur écoute quels que soient les êtres et les situations concernés...

 

 

Lorsque les soucis et les préoccupations envahissent l'esprit – et le regard –, ils sont absorbés par l'attention perceptive qui leur octroie une place centrale (et qui leur offre parfois l'occasion de se déployer dans la totalité de l'espace de perception). Et cette absorption évince tous les autres objets du monde – êtres et choses. Cette attention sélective se révèle souvent nécessaire en cas d'urgence situationnelle lorsque l'être – et le corps – se trouvent par exemple confrontés à un danger immédiat en leur permettant, grâce à ce point de focal, de leur offrir toutes les chances d'y faire face ou d'y échapper (selon la nature de l'être et du danger). Mais elle se révèle éminemment trop restrictive pour aborder l'existence en général et la vie quotidienne en particulier... Cette attention limitée, restrictive, absorbée et centrée est d'un piètre secours pour vivre de façon ouverte, large et détendue. Elle constitue même une sorte d'aliénation. Un obstacle rédhibitoire à la paix, à la joie et à l'infini du cœur.

 

 

[Une (bien) gentille lapalissade...]

Plus les êtres sont nombreux, plus il y a d'interactions et de mouvements. Plus il y a d'interactions et de mouvements, plus il y a d'agitation et de bruits. Plus il y a d'agitation et de bruits, plus l'espace de perception est envahi. Plus l'espace de perception est envahi, plus le psychisme sature. Plus le psychisme sature, plus la tranquillité d'esprit s'efface. Conclusion (évidente) : il est extrêmement difficile de rester tranquille – et de conserver la paix du cœur – en présence de nombreux êtres.

 

 

Le monde – le monde naturelsélectionne les êtres et leur attribue une place (en son sein) en fonction de ce qu'ils sont – de ce qu'ils font et sont capables de faire. A ces critères, la société humaine en ajoute un supplémentaire qui devient de plus en plus essentiel et déterminant en cette ère d'apparence et de superficialité où l'image prime magistralement sur le réel (sur l'être, les compétences et le savoir-faire) : ce qu'ils représentent aux yeux du monde...

 

 

En ce monde, les êtres et les choses apparaissent, s'agrippent, se collent et s'assemblent puis se détachent, se défont, se désunissent et disparaissent. Avant que ne surgisse un nouveau cycle d'apparition et d'agrégation suivi d'un autre cycle d'abandon et d'effacement. Et ainsi indéfiniment.

 

 

[Donner. Et après ? (suite)]

Dans cette incroyable promptitude à répondre pleinement aux demandes de l'Autre – des autres –, le sentiment (inepte et illusoire) de responsabilité joue, je crois, un rôle essentiel. Comme si nous nous sentions (presque entièrement) responsables de leur bien-être. Et de leur mal-être. Des agréments et des désagréments de leur existence. Comme si nous étions induits en erreur par une perception encore quelque peu égocentrique et autocentrée... Ce sentiment de responsabilité s'avère non seulement exagéré mais aussi erroné puisque nous ne sommes, en réalité, qu'un élément parmi une infinité d'autres (et un élément parfois même totalement secondaire ou dérisoire) de leur environnement et de leur existence. Mais sans en avoir, le plus souvent, conscience, nous sommes victimes, en quelque sorte, d'une incroyable distorsion perceptive mâtinée d'une forme d'égocentrisme et d'altruisme entremêlés qui nous invite à penser que nous sommes la clé de voûte ou l'élément central qui pourrait jouer en faveur de leur bien-être (de leur confort, de leur satisfaction ou de leur compréhension) et que notre présence – et notre intervention – seront en mesure d'atténuer leur mal-être (leur inconfort, leur insatisfaction ou leur ignorance) si nous répondons de façon pleine à leurs demandes. Et ce quelle que soit la sphère de l'existence concernée...

Dans cet élan d'altruisme, se manifestent aussi sûrement d'autres points essentiels : en premier lieu, notre incapacité à dire non. Ne pas répondre aux demandes de l'Autre – des autres – nous mettrait au supplice et engendrerait chez nous un sentiment d'inconfort et de culpabilité très conséquent qui provoquerait un désagrément bien plus fort – et bien plus redouté – que les désavantages (pourtant souvent nombreux) à répondre favorablement aux demandes et aux sollicitations d'autrui. Ensuite il semble évident que cette promptitude à satisfaire les désideratas du monde est une projection inconsciente de notre propre incapacité à éprouver la frustration – et de notre aspiration à répondre à nos propres désirs de façon complète et dans les plus brefs délais. Enfin, nous ne pouvons passer sous silence un troisième élément primordial : il y a – et on éprouve toujours – une grande joie – une joie immense – à voir l'Autre heureux – et satisfait – en particulier si nous avons le sentiment illusoire d'en être à l'origine... révélant ainsi un entremêlement quasiment inextricable d'égotisme et d'altruisme, de personnel et d'impersonnel...

Voilà sans doute pourquoi nous ne pouvons décliner la moindre demande. Voilà sans doute pourquoi nous ne pouvons faire passer nos propres besoins et désirs avant ceux des autres. Voilà sans doute pourquoi nous ne pouvons pas ne pas offrir aux autres le meilleur de ce que nous pouvons leur donner. Voilà sans doute pourquoi nous ne pouvons les faire attendre – ni d'ailleurs les importuner de quelque façon que ce soit... Lorsque l'on nous sollicite ou que l'on nous demande un service ou une aide, nous y répondons toujours. Et toujours de façon totale et prioritaire...

Il y a dans cette attitude une très forte exigence à notre égard comme dans la façon de répondre aux besoins de l'Autre. Et il n'est pas improbable que cette manière d'être relève d'une haute forme de spiritualité (et de conscience impersonnelle) amoindrie – et corrompue – cependant par une certaine attente de réciprocité puisqu'il n'est pas rare que nous exigions de l'Autre, lorsque nous sollicitons (qu'il nous arrive de solliciter) une aide ou un soutien quelconque, qu'il y réponde avec la même promptitude. Avec le même sérieux. Et avec la même rigueur. Ce qui est très rarement le cas...

Et cette absence de réciprocité, le fait d'offrir bien plus que l'on est sans doute, en vérité, capable de donner, l'occultation de nos propres besoins et désirs sans compter les abus fréquents des êtres à bénéficier de nos largesses qui nous sollicitent encore et toujours sans la moindre remise en question ni la moindre règle éthique (on connaît fort bien l'opportunisme des êtres vivants...) engendrent non seulement des tensions mais aussi, très souvent, une assez vive saturation. Et un certain seuil franchi, on explose... vitupérant à la ronde et blâmant le monde pour ses sempiternels caprices et exigences, pestant avec virulence contre l'incapacité des êtres à se donner et à offrir, à leur tour, le peu que l'on exigeou que l'on réclame...

 

 

J'ai toujours vécu avec un incroyable degré d'exigence à mon égard. Mais aussi, bien sûr, à l'égard des êtres, de la vie et du monde. Avec un nombre considérable d'attentes et d'espoirs. Mais aussi de tensions (et de colère) lorsque le réel n'était pas à la hauteur de mes exigences... Et le réel se montre, bien sûr, très rarement à la hauteur de nos exigences... Et aujourd'hui encore, je ne sais que faire de ces requêtes, de ces attentes, de ces tensions et de cette colère... Les constater – et les reconnaître – est sans doute le premier pas... Mais j'ignore ce que seront les suivants. Ni même d'ailleurs s'il m'appartient, à titre personnel, d'y remédier. De les accepter. Ou de les effacer. Je crois qu'il convient de laisser les êtres, la vie et le monde œuvrer à leur érosion progressive. Ou à leur éradication soudaine. Et de laisser le cheminement en soi œuvrer à leur totale et parfaite acceptation...

Certaines postures intérieures et certaines attitudes extérieures semblent si profondément ancrées en nous que l'on se demande s'il sera, un jour, possible de les voir disparaître. Et celles que je viens d'exposer dans cet opuscule (et dans l'opuscule précédent) me paraissent parfois inébranlables. Quasiment indéboulonnables... Je sais – et je sens – qu'elles entravent la paix et la joie dont j'étais familier en vivant dans la solitude (en vivant en solitude). Et en dépit de quelques progrès, les êtres – et le monde – m'apparaissent toujours aujourd'hui comme des obstacles à la tranquillité du cœur. Mais en vérité, mon cœur n'est sans doute pas encore totalement en paix. Voilà pourquoi les êtres – et le monde – continuent de le perturber. Et de le déranger... J'oublie que les êtres – et le monde – agissent toujours comme des validateurs de notre progression perceptive et spirituelle. Et comme de rigoureux et implacables maître d'apprentissage...

Ah ! Mon Dieu ! On n'en finit donc jamais d'apprendre, de se désencombrer, de se vider et de se purifier ! Et de remettre inlassablement – et indéfiniment – son ouvrage sur le métier ! Ah ! Qu'il est difficile parfois le labeur de l'homme au prise avec la science, le travail et la pratique de l'être...

 

 

Partout les rires. Les mêmes rires. Partout les pleurs. Les mêmes pleurs. Partout la gaieté et l'enthousiasme. La même gaieté et le même enthousiasme. Partout les épreuves et les malheurs. Les mêmes épreuves et les mêmes malheurs. Partout le même spectacle des hommes dont le cœur tourne – et se colore – au gré des événements et des histoires...

 

 

Le cœur sensible et à vif sous la colère...

 

 

Certaines phases du cheminement spirituel ressemblent à des régressions. Et mettent à jour une kyrielle d'encombrements et d'attitudes que l'on croyait éteints, effacés ou éradiqués. Au cours de certaines circonstances, ils ressurgissent. Mais au fil de nos avancées perceptives, ces caractéristiques et ces traits de caractères sont peut-être accueillis avec moins de réticence... Peut-être que le cœur est de plus en plus disposé à recevoir nos désillusions, nos frustrations, notre colère et notre sentiment d'échec... Peut-être est-il plus enclin à accepter les parts les plus sombres, les parts les plus détestables et les plus inquiétantes de notre personnalité ? Peut-être... Oui, peut-être après tout...

Je sens néanmoins qu'une part en moi (ou une part de mon âme, qui sait ?) qui éprouve une sorte de manque de confiance ontologique renforcée en partie par ma solitude, mon isolement, mon ostracisation du monde et ma progression spirituelle d'autodidacte sans maître, sans communauté, sans repère ni référence couplée à un seuil homéostatique naturel très bas peu propice à essuyer les contrariétés et les frustrations rencontre de grandes difficultés à vivre ce qu'elle considère comme un échec. Sans doute parce que cette part appréhende encore la vie – et le cheminement spirituel – de façon bien trop projective et linéaire...

Ce constat nous invite comme à l'accoutumée (et comme toujours) à accueillir ce qui est là. Et ce qui se manifeste. L'ensemble des phénomènes, des mouvements et des manifestations quels que soient les habits qu'ils semblent revêtir ; qu'ils prennent ceux de la vie, ceux du monde, ceux des autres ou de nous-mêmes...

Ah ! Quel âpre labeur ! Et quelle rude besogne ! Mais ce travail de l'être est incontournable. Il constitue la seule issue possible. Le seul salut possible pour le cœur, l'âme et le regard. Mais aussi pour le corps, l'esprit, la vie et le monde...

 

 

Dans toute discipline – comme dans toute matière – et en toute chose en définitive –, ne pas imiter. Ne jamais imiter. Mais pénétrer l'esprit. On pénètre l'esprit en pratiquant. Et en ressentant profondément. C'est l'invisible sous le visible qu'il convient de connaître. Et de vivre.

 

 

Le monde comme aire de jeu, de séduction et de plaisirs. Ah ! Misérables hommes... Quelle médiocre et dérisoire façon d'échapper à l'ennui, à la solitude et à l'insipidité de leur existence. A l'insondable tristesse et à la pathétique platitude de leur être...

 

 

L'immaturité des hommes me rend à la fois inconsolable et fort irritable. Devant de tels spectacles, comment la part la plus immature de notre être ne pourrait-elle pas être triste et en colère ?

 

 

L'essentiel des hommes – leurs agissements, leurs postures et leurs attitudes – me navrent. Créant un mouvement naturel de rejet, d'effroi et d'incompréhension. Et seule une infime partie de l'humanité me touche profondément. Et m'émeut jusqu'aux larmes. Créant un élan naturel de sympathie et de tendresse.

 

 

Les mystères de l'existence (personnelle). Et les étranges et ambigus sentiments de l'amour. L'aspiration inquiète à vivre sa vie et la frayeur de passer à côté. L'indécision et l'incertitude de tout. La terreur d'exister et l'angoisse de la mort. 

Cette étrange sensibilité du cœur (égotique) empli d'émotions et de sentiments entremêlés et contradictoires où la vérité et le mensonge, le bien et le mal, le courage et la lâcheté, l'Amour et l'égoïsme s'affrontent, s'entrecroisent, s'emmêlent, s'interpénètrent, se cachent et se dissolvent les uns dans les autres.

Et cet impénitent et éternel besoin d'amour. Intolérable. Inoxydable. Aimer et être aimé, que cela peut-il donc signifier pour le cœur égotique ? Un peu de compagnie pour entourer sa solitude. Un peu d'authenticité dans les sentiments pour éprouver une forme de profondeur. La coïncidence des attentes, des représentations et de l'image renvoyée (bilatéralement). Un besoin de contrôle, de pouvoir et de réconfort. Un besoin de liberté et d'innocence. L'implacable ambivalence de tout. Se balançant sans cesse entre les joies et les peines. Entre la liberté et la détention...

En définitive, nous ne sommes personne. Qu'un amas réactif et inextricable de ressentis, d'apprentissages, de conditionnements, d'émotions, de sentiments et de pensées animé par la peur, l'attente et le désir et voué aux élans et aux résistances qui gesticule dans l'implacable réalité du réel, qui n'est, lui-même, que l'agglomération de tous ces amas. Empêtré jusqu'à l'os – jusqu'à la moelle – dans la relativité des phénomènes. Corps et esprit, pieds et poings liés. Prisonnier d'un nœud infini et insoluble...

 

 

A côté de la folie, nous nous tenons avant qu'elle ne creuse son antre au dedans. Dévorant l'esprit. Se déversant pernicieusement dans le cœur. L'envahissant. L'inondant de son poison inodore, salvifique et scélérat. Nous faisant oublier jusqu'aux plus infimes résidus de notre humanité. Ni bête ni homme. Ni Diable ni Dieu. Une chaîne de liens. Une carapace transparente sur une chair inexistante. Une bouteille sans cloison. Sans contenant ni contenu. Un mirage peut-être. Un hologramme. Une image sans matière. Une matière sans substance. Nous ne sommes rien ni personne. Et nous n'en avons pas même la certitude. Ignorance complète. Méconnaissance générale d'une identité mouvante, fuyante, amalgamée. Inexistante sans doute... Sans épaisseur malgré la densité du cœur et la présence du regard. L'instant comme seul horizon qui s'efface. Avant on ne sait pas. Après n'existe pas. Présent soluble à lui-même. Inconsistance de tout. Présence souveraine. Profonde. Intense. Peut-être... Qui sait ? Avant l'effacement du monde. Avant l'effacement de tout. Et leur rejaillissement. Dans un cycle éternel – dans un cycle infini... JE SUIS. Mais nul n'en aura jamais la preuve. Ni la certitude. Entre-deux permanent et instable entre tous les abîmes où les yeux, les corps et les pas glissent – et dans lesquels ils tombent – sans jamais se fracasser ni pouvoir trouver la moindre paroi. Le moindre appui ni le moindre fond. Quelle terrifiante, merveilleuse et énigmatique existence... Pas totalement fou ni pleinement lucide. Qui sait ce que nous sommes en vérité ? Rien. Ni personne. Le silence toujours. Le silence magnifique. Le silence effrayant qui nous attend. Et qui nous sauve – et qui nous sauvera toujours – de cette débâcle sans fin...

 

 

Lorsque l'on perd pied – que les pas du cœur et de l'esprit perdent tout appui –, la vérité se rapproche. Elle s'enfonce en nous plus profondément. Jusqu'au jour peut-être – jusqu'au jour sans doute – où elle s'y installera définitivement. Lorsque les lieux auront été complètement vidés – et qu'ils seront capables à chaque instant de faire place nette, elle y élira domicile pour rejaillir sur les pas du corps quotidiens. Ceux que nous posons sur la terre parmi les êtres du monde. Le jour où tous les pas – ceux du cœur et de l'esprit comme ceux du corps – perdront leurs appuis – tout repère et toute référence – la vérité nous habitera tout entier. Définitivement... même si, je suis presque certain que « définitivement » est un terme impropre – foncièrement impropre – pour aborder – et tenter de circonscrire – la vérité toujours insaisissable. Et relater sa réalité vécue...

 

 

En ce bas-monde(1), tout – absolument tout – n'est qu'échanges, interactions, pénétrations et interpénétrations. Et tout n'est qu'affaire de distance et de proximité, de contenus, de quantités échangées, interagissantes, pénétrantes et interpénétrantes et de la puissance(2) de leurs mouvements. Aellesseules, ces caractéristiques dessinent l'ensemble de la palette des possibles. Et étant donné l'incroyable capacité créatrice de l'Existant et l'extraordinaire diversité qui en résulte, cette palette recèle un potentiel de combinaisons infinies... dont les évolutions retracent d'une façon parfaite l'histoire du monde (puisqu'elles le constituent)...

(1) Dans le monde phénoménal.

(2) Avec force ou douceur. Avec célérité ou lenteur...

 

 

Le lent et progressif délitement de l'ipséité... Les nébuleux souvenirs de ce que l'on a vécu – et de ce que l'on était. Les rêves brumeux des histoires anciennes. Bribes du passé sans importance. Sans la moindre importance...

Se tenir vierge dans le présent, sans même savoir ce que l'on est... Comment pourrait-on dès lors accorder le moindre intérêt à ce qui fut – et qui ne sera jamais plus*...

* Sauf ce qui subsiste encore dans ce que l'on croit être...

 

 

La mystérieuse identité de l'homme – la mystérieuse identité de l'être – que l'humanité cherche de ses pas aveugles. Et dont le visage est si proche qu'il glisse sur tous les yeux fébriles. Et dont l'invisibilité échappe à toutes les mains tendues. Monde borgne courant après les nuages – et d'étranges songes – poussés par les vents hilares. Pourquoi les hommes n'ont-ils donc pas l'idée d'offrir leur cœur aux bourrasques pour déblayer leur terre de ses édifices hideux et de ses monuments prétentieux et se remplir du vide qu'ils pressentent ? Pourquoi les hommes n'ont-ils donc pas l'idée de s'asseoir sur leur séant et d'attendre, sans impatience, la vérité – en la laissant s'approcher à pas lents ? Et toutes les énigmes seraient aussitôt résolues. Percer ce mystère originel n'empêcherait sans doute pas la course folle du monde, les incessants tournoiements des hommes, leurs sempiternels atermoiements, leurs savantes arabesques et leurs gesticulations mécaniques d'automates stupides mais leur ôterait cette gravité déconcertante, cette pesanteur de pachydermes moroses qui les confine à une danse lente et frénétique – à une danse triste et inquiète – autour d'eux-mêmes. Les yeux et les cœurs enfin ouverts au mystère – enfin dessillés – revêtiraient alors la robe légère et profonde de l'être...

 

 

D'autres mots viennent pour dire le silence. Et sous cette terre étrangère souffle une brise inconnue. Un oxygène neuf. Jamais né. Que les murs disloqués laissent à présent s'échapper. Et cette respiration offre au cœur une nouvelle vie. Une vie si ancienne que nul ne sait d'où elle vient. Ni qui l'a enfantée. Et dont nul ne pourrait se souvenir de son origine. Une vie sans stigmate. Une vie sans blessure. Et sans espoir. Une vie fraîche. Eternellement fraîche que seul le cœur peut recevoir. Et au sein duquel elle s'épanouira pour mourir aussitôt. Et qui, peu après, repartira ailleurs. Capable de visiter en un instant mille contrées et de les délaisser l'instant suivant pour les préparer à la mort. Et au renouveau. A la renaissance et à l'effacement perpétuels. Et cette vie nouvelle et ces lieux moribonds perdureront ainsi jusqu'à l'impossible fin des temps. Ce souffle qui traverse le monde, qui l'anime de son passage et l'endeuille de son départ ne peut mourir. Le regard en est le témoin privilégié. Et l'amant solitaire – l'amant exclusif – qui le guide de sa main discrète. Les hommes l'appellent Dieu mais le regard se moque bien de savoir comment on l'appelle. Il n'a d’yeux que pour le souffle puissant – et fuyant à grandes enjambées sur le monde, priant en silence pour que les êtres – toutes les formes tribales et indigènes – le reconnaissent et le rejoignent dans la célébration du souffle. Et les noces permanentes de la terre et du regard.

Le poème n'est qu'une excroissance de ce souffle. Qu'une invitation à cette célébration. Et à ces noces. Mais le silence – le silence triomphant – est son assise. Sa demeure – son unique demeure – d'où il contemple le monde qui fait danser – et virevolter – les êtres au rythme des vents que la terre fait naître dans ses plaines.

Et l'on s'en va seul sur ses chemins. Rejoindre la grande solitude. Avec l'éclatante diversité du monde dans son cœur pour célébrer l'union avec la vie – avec toute la vie – et chanter les louanges de tous les édifices de la terre.

 

 

Dans l'embarras du cœur se dissimule l'envol. Le chant des oiseaux est l'appel. Et les hommes s'enferrent à leurs rêves. Ils ne savent entendre le silence. Ses incessantes invitations. L'espérance s'attache à leurs gestes. Et les maintient captifs. Incarcérant l'âme. Lui ôtant ses ailes. La privant du souffle qui l'envolerait vers la présence. Auprès du regard éternel. Rivant leurs pas à l'avenir. Et reléguant l'union aux lendemains sombres où ils pourront enfin écouter leurs plaintes et leurs espoirs. Les effacer d'un geste sans peur. Et recouvrir le rien qui les habite – et les anime – du silence inaugural.

 

 

De ce Bien invisible qui nous est si proche, il faut déterrer la clé transparente. Jamais ne la chercher ailleurs qu'en soi-même. Elle pend mystérieusement dans les tréfonds de notre être. Ne pas essayer de la saisir. La laisser nous envahir. Lorsque son expression sera totale, elle deviendra le monde entier. Il sera alors inutile de la ramasser. Elle s'offrira – et nous éblouira – de sa lumière. Et nous l'honorerons de notre sagesse silencieuse. De notre présence claire et immobile. De notre présence non saisissante. Et nous ouvrirons, grâce à elle, toutes les portes de l'inconnu.

Ce qui est dans l'ombre s'éclairera. Illumination des ténèbres. De toutes les ténèbres. Mettant à jour l'étincelance du noir. Frappés par le soudain éclat du monde. Lumière non frémissante. Non agissante. Ni gémissante, bien sûr. Lumière silencieuse. Lumière immobile. Lumière invisible. Ouvrant le regard à la vision de l'ineffable. Faisant scintiller toutes les parcelles du visible jusque dans ses plus obscurs recoins.

 

 

Dans le délire glabre des moissons s’ingénient les hommes. Porteurs de paille dont les poutres sont délaissées. Abandonnées sur les chemins d'abondance pour de maigres récoltes...

 

 

Le feu s'insinue à travers nos nuées. Et nous troquons le brasier – l'indicible brasier – pour de minuscules feux follets. Et dans la fumée épaisse et aveuglante, nous suffoquons. Pleurant le grand incendie du ciel – et du monde – qui n'aura pas lieu. Remisé peut-être au jour du grand départ...

Et dans cet envol – ce possible envol – brumeux, des bruits d'ailes affolées rabattront leurs jumelles vers la terre où elles sont nées. Vers la terre que le ciel a vu naître. Holocauste organisé les poussant vers le trou que les pioches et les pelles ont creusé pour elles. A leur injuste intention. Et que l'on refermera d'un grand couvercle opaque et sombre. Obstruant ainsi tout recours au ciel où elles auraient, sans doute, aimé s'ébattre. Et devenir libres. Mais on ne fuit pas ainsi la terre, âmes apeurées ! Il vous faudra mille fois affronter la mort ! Et lorsque les trous auront disparu de la plaine – et que soufflera le vent puissant qui déblayera vos chaînes –, le ciel, soyez-en sûres, vous ouvrira ses portes...

En l'instant suprême, ne priez pas ! Regardez-vous périr ! Ecoutez s'amenuiser le souffle ! Prêtez l'oreille au dernier râle ! Et embrassez l'ultime soupir ! Dieu se tiendra en contre-bas. Au creux des derniers soubresauts du corps. A l'exacte jointure de la vie et de la mort. Ô âmes, vous qui n'avez su sentir sa présence du vivant de la chair, sachez qu'il était là pourtant à chaque instant des jours, veillant sur vous tout au long de votre longue nuit. Attendant sans impatience le baiser que vous n'avez pu lui offrir. A présent, il vous attendra dans l'étroit passage de la mort. Et si d'aventure, âmes sommeillantes, vous ne pouviez lui tendre votre visage, il patientera encore, près de vous, sur votre chemin nouveau...

 

 

Une mort sucrée s'installera à nos côtés. Sur la plage déserte des pensées. Mort surnaturelle du vivant où le monde s'effacera. Et dont les mains porteront Dieu sur son pinacle de sable. Les bras ouverts à l'horizon. La tête rieuse embrassant les lèvres tristes des hommes. Et dans le cœur un bouquet de roses sauvages pourra éclore. Répondant à l'appel tendre surpris dans le lit de la mort. Comme envoûtés par les charmes de l'invisible enfin découvert...

Et le monde – si sinistre et si merveilleux – s'endormira sous le regard bienveillant.

Ah ! geint une voix plaintive, que l'on aimerait éprouver une telle tendresse pour le monde lorsqu'il braille, mord et gesticule... Oui, dit le ciel, voilà un bel et âpre exercice auquel tu seras bientôt convié...

 

 

Tous les visages du monde – toutes les figures de l'humanité –, tous les cœurs vivants – et vibrants – et tous les corps fragiles ne constituent, en vérité, qu'une seule matière – et qu'un seul (et même) regard – fragmentés. Comme démultipliés à l'infini. Ah ! Quel étrange sentiment de sentir – et d'apercevoir – cette unité éparpillée en tant d'infimes et solides éclats...

 

 

La bestialité humaine si commune. Si ordinaire. Héritage ancestral de la terre. Et le cœur, don du ciel et allié du regard, encore si immature mais dont les frémissements – les frémissements de conscience – attestent avec évidence (avec tant d'évidence) son potentiel infini. Comme de la glaise sauvage façonnée par les souffles lents de la terre et la main délicate de Dieu qui s'éveille, peu à peu, à la sensibilité et à l'interrogation...

 

 

L'extérieur et l'intériorité (avec leurs extensions*) restreints et étriqués – les frontières dérisoires et les murs indigents érigés par les hommes – pulvérisés par l'infini...

* Les projections...

 

 

Présence sans aucune contrariété. Jamais, puisque sans identification, sans attente, sans élan ni espoir. Les éventuels ressentis corporels et énergétiques douloureux*, les expériences et les circonstances porteuses de souffrance* avec leur lot d'émotions inconfortables ainsi que les éventuelles actions enjointes au corps et à l'esprit par les exigences situationnelles laissent le regard totalement indemne si ce dernier est pleinement habité – lorsque l'être est capable de s'inscrire dans cet espace de perception d'arrière-plan sans répondre – ni se prêter – à l'invitation identificatoire opiniâtre et forcenée de l'esprit...

* Eprouvés-(ée) par l'esprit...

Quant à l'esprit (au psychisme), contrairement à la présence-regard, il est presque toujours en proie à la contrariété. Au prise avec les ressentis douloureux, les expériences et les circonstances porteuses de souffrance et leur lot d'émotions inconfortables, avec les peurs, les attentes, les désirs, les élans et les espoirs sans cesse entravés ou contrecarrés par le réel : la vie, les êtres, le monde, les choses et les événements...

Et nul ne saurait prétendre qu'il est aisé de délaisser l'esprit pour le regard. D'abandonner l'espace de perception d'avant-plan identifié à l'esprit et au corps pour l'espace de perception d'arrière-plan impersonnel et neutre. En particulier lorsque les événements et les contenus perceptifs sollicitent, malmènent ou envahissent le corps et le psychisme...

 

*

 

Que faut-il pour être vivant ? De quoi avons-nous réellement besoin ? Être en vie, répondraient certains. Sans doute les plus conciliants – et les moins exigeants. Mais qui pourrait se résoudre à cette indigence ? Peut-être les fous, les sages et les animaux (à deux et quatre pattes)... Les autres – l'essentiel de l'humanité – répondraient : du pain, des vêtements, un toit, un travail et une famille. Et les plus capricieux ajouteraient : des plaisirs, du confort, des loisirs, des amis, des amours, de l'agrément et des voyages. Et une poignée rétorquerait : oui, voilà pour les nécessités auxquelles il convient d'ajouter du sens, des questionnements, des interrogations, des idées et des réflexions. Et quelques rares spécimens s'accorderaient à dire : Oui ! Très bien ! Mais inutile de s'attarder sur ce préambule. Occupons-nous en comme d'une simple formalité. Et a minima. Et exigeons plutôt la vérité sur la vie, le monde et nous-mêmes. Exigeons Dieu, la sagesse et l'Absolu. Et quelques rares fous inspirés s'y attelleraient leur vie durant, délaissant les préoccupations habituelles des hommes pour apprendre à devenir pleinement vivants...

Ah ! Quelle âpre tâche ! Si nécessaire. Et si naturelle...

 

 

L'esprit aspire à la tranquillité et au confort. Et le regard octroie la paix et la joie*. Mais ce présent ne peut être offert qu'à ceux qui n'ont craint d'affronter – et de se laisser submerger par – la plus grande intranquillité et le plus extrême inconfort...

* Jamais définitivement, bien sûr... Mais instant après instant pourvu que l'on sache, à chaque instant, habiter pleinement (ou,au moins, partiellement) le regard...

 

 

En dépit de leur nervosité, de leur stress et de leur anxiété, les hommes (dans leur ensemble) vivent plutôt de façon tranquille. Lorsqu'ils ne sont pas absorbés par leur travail ou les contingences du quotidien, ils se posent en un lieu agréable et confortable pour se reposer, faire la sieste ou se divertir. Ils s'adonnent au farniente, rêvent, baillent aux corneilles et trompent leur ennui (plus ou moins bien assumé) en s'investissant tranquillement dans leurs petites lubies et leurs petites manies...

Moi, je n'y parviens pas. Jamais je n'y suis parvenu. Et même avec la plus grande volonté, je ne pourrais m'y résoudre. Un souffle mystérieux et puissant m'a toujours habité qui m'oblige, presque à chaque instant, à m'adonner à la profondeur et à l'intensité... poussé et guidé par une aspiration continue – et inépuisable – à ressentir avec intensité et profondeur ce que l'on pourrait appeler la vraie vieintense et profonde... Rivé de façon permanente au labeur, à l'exercice et à l'effort avec l'énergie chevillée au corps et une pensée gesticulante toujours encline à s'immiscer partout et dans toutes les profondeurs... Avec un esprit irritable et exigeant, qui se courrouce à la moindre contrariété (et Dieu sait si elles sont nombreuses en cette vie...), inquiet – et même affolé – dès que l'on s'écarte de la profondeur et de l'intensité, de la métaphysique et de la spiritualité vécues, et qui n'a de cesse de vouloir les retrouver dans les plus brefs délais si d'aventure elles venaient à s'éloigner... Animé par cette exigence peu commune, par quelques attentes égotiques et l'aspiration à un degré de conscience (sans doute plus large, plus fin et plus profond que celui que l'on prête ordinairement aux hommes) qui l'invite à ne blesser(1) personne – pas le moindre insecte, pas la moindre plante et donc, a fortiori, tous les autres – et à prendre en considération toutes leurs sollicitations, toutes leurs attentes et leur bien-être, cette existence s'avère souvent – très souvent – un exercice éprouvant et épuisant(2). Plongé en permanence dans cette mission jamais achevée. Attaché à ce sacerdoce incessant – et réellement sans fin. Happé dans ce cycle infernal et récurrent, je ne peux m'adonner à la tranquillité coutumière des hommes. Je ne peux me livrer qu'à la paix intense et profonde du cœur... lorsque cela m'est offert – lorsque les circonstances laissent quelques répits à mon esprit accrocheur et sérieusement enclin à l'exploration et à la saisie tous azimuts...

J'ai bien conscience d'éprouver les pires difficultés à ne pas m'investir dans cette quête harassante. La raison voudrait que je prenne – et apprenne à prendre – du recul, que j'aborde l'existence avec davantage de tempérance et de relativité. Mais cette ascèse est un exercice extrêmement difficile – presque impossible – pour un adepte inconditionnel et obstiné (voire même un partisan obsessionnel) de l'excès (outrancier), de la saisie, du surinvestissement et de l'Absolu, y compris, bien sûr – et surtout –, au sein du monde relatif...

(1) Dans tous les sens du terme...

(2) Psychologiquement et physiquement...

 

 

Aux yeux des hommes, l'existence est une aventure personnelle et apparemment extérieure en lien avec le monde apparent. Mais elle s'inscrit, en réalité, dans une totale intériorité impersonnelle puisque tout se manifeste – et se déroule – au sein de la conscience-présence. Tout. Toutes les formes interdépendantes et entremêlées de l'Existant et leurs mouvements – ce que l'on a coutume d'appeler les phénomènes, le monde, les êtres, les choses et leurs incessants échanges et interactions – ce que l'on désigne habituellement comme des événements et des circonstances... Mais aussi l'ensemble du processus spirituel – la totalité du cheminement de la compréhension vers la connaissance sensible – de la première interrogation jusqu'à ce que l'on nomme Dieu ou l'accès à la vérité et à la sagesse...

Et nous sommes tous happés dans cette étrange et extraordinaire expédition à la fois si gesticulante et si immobile. Si personnelle et si impersonnelle. Si fragmentée et si unitaire. Si continue et si atemporelle. Ah ! Quel agencement complexe et prodigieux ! Et quel mystère insondable que l'existence !

 

 

Le monde (humain) m'afflige. Voir partout cette ignorance et cet aveuglement en mouvement – cette insensibilité et cet irrespect – me navre. Parfois mon cœur aimerait y rencontrer un peu de conscience. Et des êtres habités par elle (même de façon partielle). Des hommes dont le cheminement leur aurait permis de l'approcher... Mais ce genre d'individus semble bien rare sur cette terre...

 

 

Je crois qu'il est judicieux d'appréhender la vie, le monde, les êtres et les choses comme le premier homme. Le premier être. L'être originel. S'interroger, explorer, découvrir, expérimenter et comprendre en oblitérant tous les savoirs acquis au fil de l'histoire humaine et terrestre. Ne jamais se contenter – ni prendre pour argent comptant – les édifices, les réalisations et les percées vers la connaissance existants. Il convient toujours d'élargir le cadre. Le cadre de son investigation. Le cadre de sa pensée. Le cadre de ses recherches. Chercher comme le premier homme pour découvrir l'unité du cœur et de la conscience. Cette voie est sans doute âpre, difficile et périlleuse mais elle me semble l'une des plus justes pour approcher – et cheminer vers – la connaissance...

 

10 décembre 2017

Carnet n°80 Le gris de l'âme derrière la joie

Récit / 2016 / L'intégration à la présence

Lorsque la dernière fenêtre relationnelle et affective se referme, le noir envahit la pièce. L'espace vaste – ou étroit – du cœur. Le condamnant au cachot sombre de la réclusion. Nous implorons alors le ciel. Nous implorons alors la lueur vive – pourtant chancelante et malmenée par les vents et l'aridité du monde – d'éclairer notre défaite. Et de la transformer en feu ardent pour enflammer nos pas – nos derniers pas peut-être... – sur le chemin qui mène à la lumière... 

Mon cœur lève les yeux au ciel. Et lui demande :  Ô ciel ! Combien de blessures, combien de fêlures devrais-je encore endurer ? Le ciel le regarde avec tendresse et lui dit : connais-tu des hommes dont le cœur ne porte aucune peine ? Connais-tu des hommes dont le cœur ne porte aucune cicatrice ? Je ne sais pas, dit mon cœur. Regarde donc leurs yeux ! lui dit le ciel, regarde ce voile derrière la gaieté et les sourires où se terrent leurs blessures. N'y a-t-il donc rien à faire ? demande mon cœur. Si, lui répond le ciel, sois nu, accueille et reconnais. Et toutes les traces s'effaceront sur le champ !

 

 

Prologue

 

Encerclé par la fausse gaieté et les malheurs de la terre. Em mailloté dans l'hypocrisie et l'avidité. Et tu me demandes, homme, comment échapper au cercle du monde ? Demande-toi plutôt comment vivre en ta compagnie...

 

 

En dépit d'évidentes avancées perceptives, l'esprit et le cœur personnels sont toujours marqués par plusieurs caractéristiques parfois encore un peu encombrantes... Ainsi le cœur personnel conserve quelques fragilités aisément décelables : de vieilles et profondes blessures pas totalement cicatrisées (et pas pleinement acceptées) qui se réactivent lorsque ressurgissent certaines situations – et certains événements – ayant trait à la trahison et à l'abandon et qui mettent à mal la croyance émoussée – mais encore persistante dans les tréfonds du psychisme – de l'existence d'âmes sœurs ou de frères de cœur, semblables et fidèles, quêteurs d'Absolu obstinés et sans concession (comme lui) avec lesquels il aimerait croire qu'il pourrait entretenir un sentiment d'amitié et de proximité indestructible... Et il est peu dire que le cœur personnel, encore sujet à une forme d'attente (même minime ou résiduelle) est amené à revivre cette souffrance lorsqu'il se trouve confronté à l'indifférence et à l'insensibilité du monde. Et, en particulier, à celles de son cercle restreint...

Quant à l'esprit personnel, lorsqu'il se laisse aller en roue libre à l'avant-plan, il est toujours porté non seulement sur le questionnement métaphysique, l'analyse et la synthèse (singularités sans conséquences majeures liées à son fonctionnement cérébral) mais se montre aussi très sujet à la critique, au jugement et à la récrimination. Caractéristiques beaucoup plus embarrassantes...

Et devant la prégnance de ces traits de personnalité, on reste sans voix. Et on ne sait que faire... Y a-t-il d'ailleurs quelque chose à faire ? Après tout, peut-être que ces blessures, ces croyances et ces traits de caractère – et le lot de chagrins, de frustrations, de problématiques et de souffrances qu'ils peuvent encore déclencher – demeureront quelle que soit la progression perceptive ? Peut-être s'amenuiseront-ils pour disparaître naturellement ? Peut-être ont-ils encore un rôle à jouer dans la poursuite du désencombrement psychique ? Et qu'ils disparaîtront totalement lorsque le regard sera véritablement nu et dépouillé. Et que ne subsistera dans le psychisme pas la moindre trace d'attente et de désir – même infimes et inconscients ? Peut-être ne s'éteindront-ils qu'avec la mort (la mort du corps et du cerveau) ? Qui sait ? Et pourquoi s'en faire à ce sujet ? Adviendra ce qui adviendra. Que ces traits de personnalité persistent ou s'effacent, d'une façon ou d'une autre, nous serons bien obligé de continuer à vivre. Avec ou sans eux...

 

 

Vivre en solitude* sans que le regard puisse habiter le ciel. Sans que les pas et les gestes puissent habiter la terre. Sans pouvoir ressentir la plénitude et la complétude dans son cœur. Sans pouvoir ressentir pleinement l'Amour et la tendresse du ciel et de la terre – et ceux de leurs créatures – à notre égard est un exercice délicat. Et porteur, souvent, de souffrances et de frustrations. On pourrait même dire que la solitude vécue sans ces/ses dimensions divines ou impersonnelles, constitue une expérience inhumaine. Si douloureuse qu'elle oblige parfois – et souvent même dans certains cas ou à certaines périodes – à la fuir, à la combler ou à en compenser les manques de maintes façons. Mais ces gesticulations n'éloignent non seulement jamais de Dieu mais elles invitent aussi à voir – et à accueillir – notre misère. Et par là-même nous en rapprochent...

* Dans une totale et complète solitude : sans le moindre rapport humain...

 

 

En définitive, le ciel, la terre, la vie et leurs créatures – et ce que nous portons en nous – sont nos plus sûrs alliés sur le chemin de la compréhension. Mais sur les plans existentiel et individuel, je sais, de toute évidence, que mes chiens, mon carnet, mon bâton, la nature et les nuages sont mes plus fidèles amis. Mes plus fidèles compagnons de route pour traverser l'existence. Et aller, chaque jour, sur les chemins du monde.

 

 

Emportés par les tourbillons de l'existence phénoménale, les êtres tournent indéfiniment autour d'eux-mêmes. Et de la vérité. Surnageant dans l'horizontalité poisseuse et étouffante du réel. Lorsqu'ils ont suffisamment nagé et bu la tasse (maintes et maintes fois), ils deviennent assez mûrs. Alors ils s'immobilisent. Cessent tout mouvement. Et tentent de se redresser. C'est au cours de cette tentative que la main de Dieu surgit pour achever de les relever. Et les aider à trouver leur parfaite verticalité.

 

 

Jamais, bien sûr, on ne se met en avant. On sait demeurer à sa place. On sait vivre tranquillement dans son coin. Et lorsque le monde ne réclame plus votre présence, il faut alors savoir s'effacer totalement...

 

*

 

– As-tu quelque chose à demander à quelqu'un ?

– Non. Rien à personne.

– As-tu quelque chose à donner aux hommes ?

– Oui. Tout à chacun.

– Qui es-tu ?

– Tu l'apprendras en t'approchant vers moi.

– Et comment te reconnaîtrais-je ?

– Tu le sauras en m'habitant.

 

Je suis toi. Mais l'ombre que tu poursuis à travers le monde te cache mon visage.

Je me tiens si près de ton souffle. Si près de tes mains. Si profond en ton cœur qu'il te faudra approcher à pas lents pour me surprendre. Tu sentiras ma présence les yeux fermés lorsque le monde aura vidé ton âme de sa gêne. Et de son poids. Elle me reconnaîtra entre mille car elle me connaît déjà. De ma chair, elle est née. Et c'est moi qui l'ait enfantée. Un enfant reconnaît toujours sa mère. As-tu oublié le visage de celle qui t'a donné la vie ? Comment le pourrais-tu ?

Façonné dans l'invisible, le cœur est la boussole. Demande à ton âme de me chercher. Et elle me trouvera. Nous nous retrouverons, n'est-ce pas homme ? Marche sans crainte. Ton âme et moi prendrons soin de toi. Les épreuves ne seront que des escales. Des tremplins vers l'allègement. Ne t'en soucie pas. Laisse-toi mener par les exigences que nous placerons sur ta route. Le ciel descendra un jour. Peut-être le jour où il fera le plus sombre... Crains-tu l'obscurité, homme ? Qu'elle ne t'effraye pas ! Car c'est avec elle, souvent, qu'arrive la lumière. La pleine lumière...

 

 

La présence de Dieu s'ébruite en silence parmi les bruits du monde. Aussi qui peut l'entendre ? Qui peut la recevoir dans le silence du cœur ?

 

 

Qu'y a-t-il à attendre du monde ? Qu'y a-t-il à attendre de la vie ? Le sais-tu, ciel ? Et qu'en dit le cœur des hommes impies ? Quelle brume y as-tu glissée pour que l'Amour ne puisse éclore ?

 

 

Entre les mains jointes de la prière se cache l'indicible – et l'inavouable – misère des hommes.

 

 

Seule la présence différencie la main du sage de celle du meurtrier. Mais c'est elle qui fait toute la différence...

 

 

Que tes exigences s'éteignent pour que ton regard se dénude. Lorsqu'il sera totalement nu, ce qui est suffira à ta joie.

 

 

En ce monde, il n'y a ni erreur ni accident. Il n'y a que des événements qui font mûrir le cœur. Et grandir l'âme. Des invitations à se rapprocher de Dieu.

 

 

Le jour s'éclipse. La nuit arrive. Et avec elle, les heures sombres où l'âme s'ensommeille. L'esprit et le cœur égarés et impatients le jour. Somnambuliques et assoupis la nuit. Comment les hommes pourraient-ils découvrir le visage de Dieu ? Croyez-vous vraiment qu'il se cache derrière l'agitation et la somnolence ?

 

 

Parmi toutes les créatures, Dieu a choisi l'homme en pensant qu'il serait capable de faire le chemin entre l'animal et lui. Mais on dirait qu'il s'est trompé de cheval... Pourquoi donc a-t-il choisi un canasson aussi lent et aussi têtu, arc-bouté sur ses traditions instinctuelles ?

 

 

Si tu ne sens la présence de Dieu en ton cœur – dans tes gestes et dans tes pas – ne la cherche pas ailleurs. Approfondis ton exploration et ta sensibilité.

 

 

Episode nocturne

 

Dans la tranquillité des jours, je me repose. Seul, seul, seul. Avec le ciel pour abri. Et quelques frères pour compagnie. La nuit tombe déjà. Et l'idiot à l'air triste et ahuri rentre chez lui. Et en voyant son pas lent appuyé misérablement sur son bâton et sa mine déconfite – sa mine des mauvais jours –, le ciel et la lune se regardent avec inquiétude ne sachant comment ils pourraient l'aider à apaiser ses tourments. Et en le voyant pousser la porte de la maison avec les joues inondées de larmes, ils se dirent qu'il était trop triste. Vraiment trop triste. Si triste qu'ils ne pourraient rien faire pour lui...

 

 

Sous nos yeux, la vie violente tisse sa toile. Et fond en prédateur redoutable – en bourreau implacable – sur ses proies. Victimes que l'innocence et le ciel ne pourront sauver. Le ciel et l'innocence, bien sûr, n'ont jamais sauvé – et ne sauveront jamais – personne. Mais qui connaît leur travail – leur besogne titanesque – sur les âmes immortelles ?

 

 

L'intelligence et la sensibilité de l'ombre. Perdues parmi la bêtise et l'indifférence des foules. Invisibles aux yeux communs. Dénigrées par les cœurs ordinaires et anonymes. Et que seuls, Dieu – et le ciel – reconnaissent, louent et apprécient. La solitude – la grande et terrible solitude – de l'homme singulier – de l'homme atypique – parmi ses semblables si différents...

 

 

Le regard mûr aime. Jamais ne s'attache. Aussi nu qu'un ciel d'été sans étoile sur les banquises de la terre.

 

 

Notre place est là où la vie nous mène. Mais en notre cœur, nous savons que notre seule demeure est le ciel. Les bras de Dieu qui nous accueillent. Et d'où nous pouvons voir tous les chemins du monde où l'existence nous mène...

 

 

La vérité vécue seul – totalement seul et sans partage* – est une épreuve supplémentaire sur le chemin qui mène à son intégration effective.

* Sans le moindre partage...

 

 

Lorsque les yeux s'éloignent – ou se sont effacés – même les plus chers – précipitant notre mort en quelque sorte, nous sentons l'ombre de la souffrance, tapie au fond du cœur, s'approcher. Et guetter sa proie, l'écume à la bouche. La chair fraîche – et encore frémissante – que nous nous apprêtons à lui jeter en pâture. Et qu'elle dépècera pour s'en repaître avec sa façon carnassière...

 

 

Mourir – mourir totalement à soi-même – dans des conditions qui jamais ne s'y prêtent ou y préparent – est l'expérience et l'exercice les plus douloureux que puisse connaître un homme. Bien des morts – et des agonisants – ne s'y sont jamais prêtés. Et moins encore parmi les vivants...

 

 

Le cœur rétif – réfractaire – des vivants qui palpite sans une once d'amour. Ô Dieu ! Pourquoi m'as-tu fait homme ?

 

 

La trop vive – et tragique – lucidité sur soi comme sur le monde bouleverse – et met en pièce – le cœur sensible – éminemment sensitif – si l'âme n'est pas suffisamment préparée à la vérité. Et à la poignante – et déchirante – réalité du monde.

 

 

Pourquoi pleures-tu, mon cœur ? N'as-tu pas aimé le monde de toutes tes forces ? Ne lui as-tu pas prouvé cet amour à travers les mille gestes et les milliers de pages que tu lui as offerts ? Oui, répond mon cœur. Alors pourquoi pleures-tu ? Parce que cet amour n'a pas rencontré une seule âme vivante en ce monde... Ne t'inquiète pas, lui dit le ciel, les hommes sommeillent encore...

 

 

Ah ! Que le jour est sombre aujourd'hui. N'est-ce pas plutôt la tristesse – et sa sueur grise – qui ont recouvert ton cœur ? Et, de sa main ensanglantée, il frotta sa chair avec ardeur pour essayer d'essuyer la suie qui l'avait étouffée. Et sa main devint aussi noire que son cœur...

 

 

Est-ce la pluie ou est-ce les larmes qui inonde(nt) notre visage ? Il ne le savait lui-même. Son cœur et le ciel étaient si proches...

 

 

Plus le monde se montre déloyal, plus le cœur doit s'ouvrir à l'innocence. Et essayer de s'y maintenir.

 

 

Parmi les arbres, sa tristesse s'apaisa. Laissant entrevoir un mince filet de joie.

Parmi les hommes, il avait longtemps attendu un miracle. Mais jamais il n'arriva...

 

 

Mon fidèle bâton. Loyal entre tous. Qui prendra soin de toi à ma mort ? Entre quelles mains tomberas-tu ?

 

 

Il y avait cette terre promise par les hommes qu'il n'avait su trouver en ce monde. Il la dénicha dans les limbes du ciel après une marche périlleuse sur une longue sente étroite et escarpée. Et c'est en redescendant, avec elle dans le cœur, que le monde – tous les déserts et toutes les banquises du monde – se transformèrent en éden. En terre d'accueil inespérée.

 

 

Qui prend soin de toi dans la solitude ? Les gestes tendres de Dieu et du cœur. Leurs caresses au fond de mon âme.

 

 

Qui se souviendra de toi lorsque la terre aura recouvert ton visage ? Dieu, après ta mort comme durant ta vie, sera sans doute ton seul ami. Et ta seule compagnie.

 

 

Dans le silence de la plaine, le vent se recueille. Et mon âme, attendrie, l'accompagne. Je tends la main et la pose sur son épaule puissante. Et d'un geste tendre, sa main recouvre la mienne. Comme deux solitaires, solidaires et compatissants, réunissant leur solitude pour communier ensemble quelques instants.

 

 

On peut sans doute pardonner avant d'habiter l'Amour. Mais il est probable que quelques traces de colère ou de ressentiment subsistent encore dans notre cœur. Dans les méandres sinueux et les recoins obscurs de notre cœur. Lorsqu'il émane de l'Amour, le pardon devient total. Intégral. Sans la moindre ombre pour ternir l'Amour...

 

 

L'authenticité, l'honnêteté et la lucidité sont des voies qui conduisent à Dieu. Et à la vérité. A force d'authenticité, d'honnêteté et de lucidité, on laisse Dieu – et la vérité – cheminer imperceptiblement en nous jusqu'au jour où l'on se retrouve, seul et démuni, face à notre ombre. Et face à la leur. Après cet éprouvant face-à-face, Dieu – et la vérité – peuvent sortir de l'obscurité. Et avec eux apparaît lentement la lumière. On ne voit encore leur visage. Mais on devine leur présence. Qui devient évidente. Eminemment palpable. Puis, si Dieu et l'âme y consentent, on les sent poursuivre leur intégration. Leur lente intégration. Remplir la moindre parcelle vacante – déblayant les résidus singuliers inutiles et encombrants – jusqu'à nous habiter pleinement. Ainsi se déroule, je crois, l'âpre – et le merveilleux – cheminement du Divin – et de la vérité – en l'homme...

 

 

Le lieu de la débâcle aux horizons rétrécis. Obscurcis. Où le sombre s'installe. Et prend ses aises. Où la peur devient frémissante – couleur de glaise. Où l'imaginaire se fige. Se glace. Impuissant. Impensable. Impossible d'envisager l'inconnu. Impossible d'espérer. Prisonnier de l'étau qui se resserre. Enserrant la tête. Le corps dans son carcan. Le cœur déchiré. Eclaté en lambeaux sous la pression de l'attente. Vaine. Et les poussées funestes du désespoir. Le noir complet envahissant tous les recoins déjà obscurs. Et les mains dépossédées de tout pouvoir. Immobiles. Pétrifiées. La mort ? Peut-être. La délivrance ? Quelle délivrance ? La tête a explosé. L'âme s'est asséchée. Les vents se sont tus. Le monde s'affaisse. Croule déjà. Disparaît bientôt. Le néant s'ouvre. Agrippe la chair et la soumet. Les pieds résistent. Cherchent un appui. Une issue à la chute. En vain. Une secousse, un cri, des larmes. La sueur putride de la peur. On s'enfonce. On s'enlise. On tombe. La chute. Longue. Profonde. Implacable.

 

 

La lumière douce du soir sur les collines rappelle à mon âme que la beauté et la paix n'ont pas totalement disparu de ce monde.

 

 

Lorsque l'on vit – ou que l'on est – seul (totalement seul*), il est alors possible de faire de chaque instant une rencontre. Et de chaque rencontre, une fête. Je crois alors que Dieu n'est plus très loin. Son cœur est presque tout entier dans le nôtre...

* Depuis longtemps. Et pour longtemps...

 

 

Où est l'homme ? Où sont les hommes ? Derrière les masques. Et dans les yeux de ceux dont la vie les a brisés. Et jetés au sol. Et qui laissent apparaître, nues et sans artifice, la misère et la peur d'où affleure – ou pointe – l'interrogation. L'étincelle vive qui attend les vents de la terre – et la main de Dieu – pour que l'être s'enflamme. Et soit conduit vers la connaissance.

 

 

Noyer sa voix éteinte dans d'autres voix. Pour que la parole humaine ne s'efface définitivement. Ultime passerelle – ultime rempart – avant la solitude intégrale.

 

 

A l'ombre numismate ne prête tes jours. Elle te soudoierait. Et le revers de la médaille te laisserait le cœur vide. Tu t'enfoncerais alors dans la grande pauvreté que Dieu même ne pourrait convertir en or. Et ton âme, malheureuse, se dessécherait. Anéantie...

 

 

Les amours lointaines. Et, distantes, peut-être. Et lui, le cœur toujours trop près des visages. Collé comme une sangsue. Mordant les lèvres. Et dévorant les yeux. Cherchant l'Absolu dans chaque trait. Et s'égarant à chaque fois. Toujours il s'était égaré. Cherchant Dieu là où il n'était pas. Là où il n'était pas encore...

 

 

 

Il portait une gousse d'ail en guise de collier. Un pauvre pendentif, en vérité, qui faisait fuir les foules. Et les visages. Personne, jamais, n'avait osé s'approcher. Qui aurait pu deviner qu'elle renfermait un diamant ? Longtemps, bien longtemps après sa mort, on le découvrit. Et on célébra sa solitude... et sa sagesse.

 

 

La solitude du ciel n'a rien à envier à celle de la terre. Elle est simplement plus vaste. Plus accueillante. Et plus aimante. Beaucoup plus vaste. Beaucoup plus accueillante. Et beaucoup plus aimante. Et dans la première, Dieu est présent. Eminemment présent. Alors que dans la seconde, les hommes sont là – vaguement là –, accompagnant médiocrement – et maladroitement – nos pas et nos gestes d'un air distrait et absent.

 

 

Les êtres vivent en groupe. Ou vont par deux. Rares sont les solitaires en ce monde.

 

 

Mes chiens me sont fidèles. Et se montrent loyaux envers moi. Comme je leur suis fidèle. Et me montre loyal envers eux. Toujours nous l'avons été. Et toujours nous le serons. Jamais je n'ai vécu en ce monde de plus fidèles et loyales relations...

 

 

Les pierres, les montagnes, les vents, les océans, les nuages, les arbres et les herbes sont fidèles à la terre et se montrent loyaux envers elle. Comme le ciel est fidèle à Dieu et se montre loyal envers lui. Tous vivent – et agissent – avec dévouement et honnêteté. Dans le respect implicite et silencieux des règles qui les régissent. Mais les êtres – et les hommes –, eux, ne savent tenir leur promesse secrète. Leur cœur tourne comme une girouette dans les bourrasques. Se tournant, toujours, vers le plus offrant...

 

 

Y a-t-il un œil ouvert et une oreille attentive en ce monde ? Oui, celui et celle de Dieu présents en chacun. Mais que le bruit et l'agitation recouvrent. Et qui les rendent, malgré lui, aveugle et sourde...

 

 

Cette voix dans le silence qui m'invite à m'enfoncer davantage dans le silence pour que mon cœur comprenne (enfin) que toutes les voix du monde – tous les bruits des êtres et des choses – naissent en lui. Et qu'elles aimeraient mourir dans une oreille qui lui soit digne...

 

 

Les hommes ne sont guère attachés aux êtres. Et moins encore ils les aiment et les comprennent. Seul ce qu'ils représentent à leurs yeux a quelque importance...

 

 

Une foule de choses séparent les hommes – et les êtres. Et combien de vraies, de profondes et de consistantes les réunissent-elles vraiment ? Hormis la profondeur métaphysique et la quête de Dieu*– dont l'accès est très inégal –, je crains qu'il y en ait bien peu...

* Symbole de l'Absolu, de l'Amour et de l'intelligence...

 

 

Qui m'offre un peu de joie aujourd'hui (en cette période difficile) ? Le ciel, les nuages, le vent, les arbres, les herbes et les pierres comme à leur habitude. Mais aussi, bien évidemment – et plus que jamais – le sourire et la bouille radieuse de mes chiens allongés à mes côtés ou qui courent avec tant de bonheur dans les collines.

 

 

Si tu ne ressens – ou même si tu ne peux concevoir – l'infini, demande aux nuages où s'achève le ciel ? Et si ce cadre te semble trop étroit, demande aux étoiles et aux galaxies où finit l'univers. Et si ce décor te semble encore trop étriqué, demande à l'espace où sont ses frontières ?

 

 

Je n'ai jamais particulièrement aimé la solitude. Ni être seul d'ailleurs... Mais aucune compagnie humaine ne m'a jamais comblé pleinement. Et mon caractère entier, exigeant et sans concession m'a toujours porté vers une quête de la relation totale. De la relation globale et exclusive. Certes mes critères en matière affective ou amicale ont toujours été – et restent toujours – nombreux et drastiques. Mais il ne s'agit aucunement d'une liste d'exigences capricieuses (même si l'on peut convenir qu'ils s'y apparentent grandement...), mon cœur a simplement toujours eu besoin d'aimer pleinement ceux qu'il rencontre. Sans bémol ni restriction. Et il est difficile d'aimer tous les aspects et toutes les dimensions d'un être sans ressentir quelques réticences ou quelques incommodités à l'égard de certains traits ou de certaines caractéristiques...

Et cette quête absurde et idiote de l'Absolu dans le monde relatif – et l'existence phénoménale – qui m'aura offert le plus grand bien en matière de cheminement spirituel – et de progression perceptive –, m'aura aussi causé les plus grands torts dans ma vie personnelle et affective. Sans compter, bien sûr, les difficultés relationnelles et intégratives liées à ma singularité sensible et cognitive d'individu atypique. Aussi que reste-t-il à l'être différent en quête d'Absolu, inassimilable et inadapté au monde ordinaire des hommes sinon la solitude ?

 

 

Lorsqu'un être est cher à votre cœur, important (voire même indispensable*), il est particulièrement difficile d'être à son égard vierge de toute attente. Voilà ce que m'apprennent aujourd'hui les événements. L'effacement de celle qui partagea ma vie pendant de nombreuses années et qui fut le témoin privilégié de l'essentiel de mes expériences, de « mes découvertes » et de mon cheminement...

* Indispensable à votre équilibre. A l'équilibre que votre psychisme a essayé tant bien que mal de construire pour s'assurer une forme minimale de bien-être (phénoménal)...

Je n'avais, me semble-t-il, plus guère d'attentes à l'égard des hommes, du monde et de la vie. Et voilà que disparaît à présent l'ultime appui – l'ultime œil et l'ultime soutien – humain que mon cœur avait conservé. Comme source secrète peut-être de réconfort et ultime recours à ma solitude. Rude épreuve. M'invitant à m'enfoncer plus profondément encore dans cette solitude – et cette forme de vie autarcique – déjà immense. Presque totale. Et me voilà seul pour de bon. Seul pour de vrai. Seul, il est vrai, en présence du Divin. Mais seul tout de même dans le monde humain. Sans le moindre contact, ni le moindre échange. Sans la moindre parole, ni le moindre partage. Sans le moindre secours, ni le moindre réconfort. Et la tristesse – et la peine – sont intenses. Et profondes.

Dans quelques temps, je sais que cette tristesse et cette peine s'effaceront, elles aussi. Offrant à mon cœur une nudité intégrale qu'il n'a encore jamais connue. Subsisteront néanmoins, je le sais, quelques attachements peut-être indéracinables à l'égard de soi-même, du corps et de l'esprit avec lesquels nous entretenons un lien privilégié. La crainte, par exemple, de vivre l'amputation d'une partie du corps ou de voir le visage défiguré. Ou l'espoir que la vie ne nous offre l'occasion d'éprouver de trop vives souffrances auxquelles mon psychisme fragile, je le sais, aurait toutes les peines du monde à s'adapter... Ces attachements ne seront pas aussi prégnants, bien sûr, que les attentes que nous pouvons avoir à l'égard des êtres. Ils ne constitueront que de simples encombrements enfouis dans les tréfonds du mental dont le poids restera sans doute infime – et presque nul – au quotidien. A travers ce constat, je me demande tout de même si l'homme est vraiment capable d'habiter un regard totalement nu et vierge à chaque instant de son existence... Je l'ignore. Je sais seulement que cette nudité et cette virginité vécues de façon permanente m'apparaissent aujourd'hui presque impossibles. Et me semblent même, à certains égards, inhumaines...

 

 

Une relation où les échanges, le partage et les dons ne sont pas entièrement réciproques (ou bilatéraux) tant sur le plan qualitatif que quantitatif – et où les représentations de l'autre et les attentes à son égard sont trop différentes ou inégales – est une relation déséquilibrée. Et une relation déséquilibrée, comme toutes les choses en déséquilibre en ce monde, est une construction bancale. Vouée inexorablement à la chute*. Tôt ou tard. On a beau essayer de maintenir à bout de bras une relation – ou une chose – en déséquilibre, vient un jour où les forces nous manquent. Et l'édifice s'écroule. Inéluctablement...

* Tout assemblage (et a fortiori toute édification ou construction) qu'il paraisse bancal ou non, est voué de toute façon à se défaire tôt ou tard... C'est l'une des grandes règles de la vie phénoménale : la recombinaison incessante des formes interdépendantes dont les mouvements et les échanges permanents modifient de mille façons la structure de chacune d'elles à chaque instant.

 

 

Marcher seul et pieds nus sur le sol – le corps et le cœur (presque) nus eux aussi – est une expérience hautement animale et spirituelle. Une forme de retour aux sources. Une façon de retrouver – et de goûter à nouveau – la condition originelle de l'homme. De l'homme sans compagnie, sans accessoire ni artifice, forme naturelle parmi les autres formes naturelles. Et dans cette nudité affleure avec clarté ce qui différencie l'homme des autres créatures terrestres : le questionnement, fondement premier de toute métaphysique. Et préalable indispensable à toute spiritualité. Ainsi, dans cette nudité, l'homme sent avec évidence qu'il est naturellement animé par – et porté vers – le Divin...

 

 

Créatures mortes parmi les cimes. Et parmi l'herbe rougeoyante que la lumière n'atteindra plus.

 

 

Ombres blafardes parmi les jours. Nées – et pas même vivantes. L'Amour n'aura su les toucher. Et la gueule béante de la mort les avalera bientôt.

 

 

Il est aisé – et heureux – d'être seul. Mais il est rude – et douloureux – d'être trahi...

 

 

La solitude ne m'attriste pas. La solitude ne m'affecte pas. Bien au contraire... Mes tourments viennent seulement du sentiment de ne plus avoir d'âme amie en ce monde. D'avoir perdu une âme ouverte au partage et à la confidence. Et ce qui me blesse est le sentiment d'avoir été dupé. D'avoir été trahi. Et ce qui m'offense est le manque d'honnêteté* et le défaut de loyauté des hommes. Mais n'est-on pas simplement, en réalité, leurré et abusé par ses propres espérances – et ses propres exigences – à l'égard des êtres et du monde ? Oui, sans doute...

* Non-dits, propos déguisés, mensonges...

En définitive, j'ai le sentiment que nous ne pouvons accorder notre confiance à aucun être – ni à aucun homme – en ce monde où les cœurs, si instables, tournent avec tant de désinvolture au gré des vents. Selon les contingences et les opportunités. Selon les désirs et les caprices du moment... Comme si, en vérité, nous ne pouvions accorder notre confiance – et nous fier – qu'à ce qui est dans l'instant. Tout, toujours, en ce monde, nous y ramène. Inéluctablement. Comme si ce qui est dans l'instant était, en vérité, la seule réalité tangible et accessible. La seule réalité que nous connaissons. Et à partir de laquelle nous pouvons agir. Le reste – tout ce qui n'est pas dans l'instant – n'est que brume, illusions et chimères. Buée inconsistante. Et vapeur d'éther...

 

 

Le cœur prisonnier sape toute liberté. Et prive l'être de la joie et de la paix qu'il cherche. Les êtres et les choses auxquels il est attaché le maintiennent captif. Lorsqu'ils sont présent à ses côtés, il craint de les voir se dégrader, s'éloigner ou disparaître. Et lorsqu'ils se détériorent, s'écartent ou s'effacent, la tristesse l'envahit. Et l’accapare.

 

 

La vie. Souffrance après souffrance. Indéfiniment. Des plus légères aux plus profondes. Des plus grossières aux plus subtiles. Des plus simples aux plus complexes. L'incessant processus du désencombrement à l’œuvre. Inlassablement penché sur sa besogne. Polissant, repolissant – et repolissant encore – le cœur de ses impuretés – le nettoyant de ses scories – pour que brille – flamboyant – et étincelant – le diamant inaltérable et éternel. Pour qu'il resplendisse dans l'obscurité comme en pleine lumière. Infiniment aimant. Mais sans exigence – sans la moindre exigence – à l'égard du monde.

 

 

Las – infiniment las – de la grande kermesse du monde avec son insouciance et sa frivolité, ses masques prétentieux et sordides, ses histoires insipides, ses mensonges, ses faux sourires et ses paillettes de fête foraine. Ô ciel, pourquoi si peu d'hommes sont prêts à affronter leur misère les yeux dans les yeux pour délivrer le monde de sa crasse, de sa bêtise et de son indigence ?

 

 

Lorsque la dernière fenêtre relationnelle et affective se referme, le noir envahit la pièce. L'espace vaste – ou étroit – du cœur. Le condamnant au cachot sombre de la réclusion. Nous implorons alors le ciel. Nous implorons alors la lueur vive – pourtant chancelante et malmenée par les vents et l'aridité du monde – d'éclairer notre défaite. Et de la transformer en feu ardent pour enflammer nos pas – nos derniers pas peut-être*... – sur le chemin qui mène à la lumière...

* Qui sait ? Qui pourrait savoir ?

 

 

Il faut avoir suffisamment fréquenté la solitude, la fragilité et le dénuement pour que s'aiguise la sensibilité. Qu'elle demeure si vive que tout événement* – le moindre événement – une feuille d'arbre qui tombe sur le sol, une vieille femme qui porte un cabas, une herbe minuscule qui pousse entre les pavés d'un trottoir, le sourire timide dans les yeux d'un enfant, un insecte sur une branche – se transforme en rencontre. En rencontre intense et émouvante qui bouleverse le cœur. Et l'émeuve jusqu'aux larmes...

* En réalité, tout événement, bien sûr, est une rencontre...

 

 

Quelques tours sur la place. Quelques caresses. Quelques baisers. Quelques ruades. Quelques morsures. Et quelques blessures. Et nous voilà bientôt congédiés. Allant seuls sur le chemin de la mort. Aussi seuls que nous l'avons toujours été parmi les hommes. Dans l'effroyable désert des vivants.

 

 

Ô mon âme, ne pleure pas ! Toi qui as connu la grâce du ciel et du silence, ne te morfonds pas dans l'affliction. Dieu veille à ce qu'elle devienne parfaite. Voilà la rude épreuve qu'il t'envoie à présent...

 

 

Ô mon cœur ! Quelle âpre douleur que la tienne ! Je sais – je sens – ta tristesse. La fleur du désespoir que tu tends vers moi. Et que le monde n'a jamais daigné accueillir. Je la tiens serrée dans ma main. Et contre ta joue tendre et rebelle. Nous nous offrirons bientôt des rires dans le silence. Oui, bientôt. Crois-moi ! Que tes larmes n'assèchent ton âme. Qu'elles l'égayent de ce désert où tu crois mourir. Vallée de sang et vallée de larmes ne laisseront bientôt en toi aucun éclat. Sinon un sourire. Une main secourable. Tes yeux perdront cet éclair de colère que tu pensais indispensable. Ton regard deviendra clair. Limpide comme l'eau des torrents des montagnes. Vaste. Aussi vaste que le ciel et les océans réunis. Et il bercera les hommes – non plus d'illusions – mais de contes et de chants magnifiques devant lesquels ils s'agenouilleront. Prêts pour le grand voyage que tes pas, eux-mêmes, ont accompli sans mains levées. Et sans yeux approbateurs. Crois-moi, mon cœur ! L'Amour est proche. Dessaisis-toi de tes griefs. Et de tes envols. La morsure est ardente. Mais Dieu bientôt t'ouvrira les bras. Et t'accueillera en son sein. Le royaume et toi, bientôt, ne seront plus étrangers. Vos yeux et vos gestes se confondront. Et sur tes joues couleront des larmes de tendresse. Un peu de patience, mon cœur. Nous y sommes presque...

 

 

Ce qui nous manque, en vérité, nous allège. Si le cœur sait s'en dessaisir...

 

 

Plus le cœur se vide et se déverse, plus il s'épure. Plus le cœur s'épure, plus le joyau qu'il abrite transparaît. Et rayonne. Plus le joyau rayonne, plus le monde s'éclaire. Plus le monde s'éclaire, plus l'Amour grandit. Plus l'Amour grandit, plus le cœur se vide et se déverse. Plus le cœur se vide et se déverse, plus il s'épure...

 

 

[Hommage à Stanislas Rodanski]

 

Désespoir d'outre glacée. Comme un bouchon hermétique au ciel, le désert me noie. [De la gourde et du verre d'eau]

 

 

Mais en quel honneur m'a-t-on offert le désespoir ? Cadeau mystérieux enveloppé de ficelles bariolées – de ficelles célestes – avec une fleur – une immense fleur rouge – sur le dessus. Délivrant son parfum funeste. Et annonciateur peut-être de l'espérance. Traîtresse espérance toujours. Remettant la mort au lendemain. Et le jour suivant à plus tard. Retardant toujours le massacre. Avec les heures scélérates qui le diffusent au goutte-à-goutte. Comme un présent empoisonné...

 

 

Brisons la malédiction de Socrate. Levons les bras à la bise glacée. Offrons notre visage aux affronts. Et sourions à la mort. Ô vivant ! Ne crains de sourire à la mort ! C'est dans ses bras que s'achèvera le bal...

 

 

Odieux spectacles de la vie que mes yeux vomissent chaque jour. Et qu'elle me force à réingurgiter, bouchée après bouchée, le lendemain. Et que mes yeux revomissent le jour suivant. Et qu'elle m'oblige à ravaler le jour d'après... Pas de gâchis ! me dit-elle, il faut finir son assiette ! Nous sommes bien obligés de nous plier à sa volonté, n'est-ce pas ? Quel enfant serait-il assez effronté pour désobéir ainsi continuellement à sa mère ?

 

*

 

L'heure s'éreinte à nous épuiser. Chancelants – et ivres de sommeil –, nous titubons. Et nous tombons, ivres de fatigue. Avant que la mort ne vienne nous faucher.

 

 

Tu te plains de t'ignorer. Demande donc au ciel qui tu es. Mais crois-tu vraiment que son silence puisse t'éclairer ?

 

 

Chut ! Tais-toi ! Arrête de parler ! Arrête d'écrire ! Cesse tes bruits et tes jérémiades. Tes poncifs, tes questions et tes appels. Cesse d'abreuver le monde de tes intuitions et de tes vérités. Laisse donc les hommes sommeiller en paix...

 

 

Lorsque tu agis, réagis, espères, crois, penses et parles sans avoir conscience d'agir, de réagir, d'espérer, de croire, de penser et de parler, tu t'éloignes de l'être. Et de la présence.

 

 

Dis-moi, mon cœur, pourquoi crois-tu encore que l'herbe est toujours plus verte ailleurs ? Penses-tu vraiment que le monde soit une paisible prairie verdoyante où les êtres vivent avec joie, profondeur, consistance et vérité ? Ne te souviens-tu donc pas de la grande misère qui se cache sous les masques insouciants et la gaieté apparente ? As-tu oublié les réjouissances feintes ou frivoles, l'ennui, la bêtise, la frustration, l'avidité, la colère, la haine et l'ignorance ? Y a-t-il donc si longtemps que tu n'as fréquenté les hommes ? As-tu oublié qu'il t'arrivait autrefois de marcher dans le monde, mon cœur ? Ecoute-moi ! Malgré ta tristesse, bien des hommes – même s'ils ne te l'avoueraient jamais avec franchise – envieraient ton parcours. N'as-tu donc jamais remarqué leurs yeux envieux et admiratifs lorsqu'ils s'entretenaient avec toi des choses essentielles de la vie ?

Et mon cœur remercia le ciel pour ses paroles réconfortantes. Elles lui redonnèrent un peu de joie – un peu de couleur – dans cette longue journée grise et un peu morose. Et il comprit que sans la présence et la tendresse du ciel, il ne pourrait, sans doute, survivre en ce monde...

 

 

Si tu ne sens Dieu dans ton cœur, ralentis ton pas. Et ralentis tes gestes. Et tu le sentiras dans ta marche. Sur ta peau. Dans ton corps. Et dans tes mains.

Dieu est partout. L'homme de Dieu le sait, évidemment. Mais il lui arrive de ne plus sentir sa présence. Sa tête, son cœur et son corps trop encombrés d'idées et de pensées, d'émotions et de sentiments, de précipitations et d'automatismes lui en interdisent l'accès. Aussi le silence et la lenteur – l'immobilité et le suspens – lui sont alors nécessaires.

Le vide et la nudité sont les conditions requises – et le chemin le plus court – pour être en présence de Dieu.

 

 

Dans le silence et la solitude adviennent les plus belles – et les plus déterminantes – rencontres : avec soi, avec l'infini en soi, avec Dieu et quelques créatures du ciel fort amicales et bienfaisantes...

 

 

Ne t'occupe – et ne te préoccupe – jamais de ce que font et vivent les autres*, de la façon dont ils s'y prennent avec la vie, avec le monde et avec eux-mêmes dans leur existence comme dans leur cheminement (si tant est qu'il y ait un cheminement...). Demeure en toi-même. Et avec ce qui est là, ici et maintenant. Accorde-toi avec toi-même. Avec ce que tu portes. Et ce qui surgit. Et tu éviteras d'encombrer ton esprit et ton cœur de choses – et d'affaires – inutiles et superflues dont tu ne saurais que faire. Et qui ne te seront jamais d'aucun secours. Ainsi tu créeras les conditions les plus propices pour être, vivre et cheminer dans une plus grande paix. Et avec une sérénité moins fragile...

* Excepté, bien sûr, si la situation l'exige, s'ils se trouvent en ta présence ou s'ils t'en font la demande...

 

 

On rencontre toujours ce dont on a besoin...

 

 

Nous avons beau chercher partout des alliés, nous sommes, bien sûr, seuls face à la vie. Seuls face au monde. Seuls face aux hommes. Seuls face à Dieu. Et seuls face à la mort. Seuls. Toujours seuls. Ainsi sont les êtres... Mais si nous n'étions, en vérité, qu'un seul (et même) visage contemplant, dans les yeux inconsolables, toutes les solitudes du monde…

 

 

Mon cœur lève les yeux au ciel. Et lui demande :  Ô ciel ! Combien de blessures, combien de fêlures devrais-je encore endurer ? Le ciel le regarde avec tendresse et lui dit : connais-tu des hommes dont le cœur ne porte aucune peine ? Connais-tu des hommes dont le cœur ne porte aucune cicatrice ? Je ne sais pas, dit mon cœur. Regarde donc leurs yeux ! lui dit le ciel, regarde ce voile derrière la gaieté et les sourires où se terrent leurs blessures. N'y a-t-il donc rien à faire ? demande mon cœur. Si, lui répond le ciel, sois nu, accueille et reconnais. Et toutes les traces s'effaceront sur le champ !

 

 

Chez les hommes, le mensonge et l'espérance, les idées et les croyances ont toujours suscité plus d'intérêt et de passion – beaucoup plus d'intérêt et de passion – que la vérité. Leur attrait est immense. Et leurs partisans innombrables. La vérité, elle, a toujours été – et ne peut être que – sans parure. Sans apôtre ni disciple. Et elle ne peut user de ses charmes ni de séduction. Elle en est totalement dépourvue. Elle n'attire – et ne peut attirer – que les âmes simples et désireuses de se dépouiller de tout appui et de tout artifice. Des âmes éprises – follement et farouchement éprises – d'Absolu.

La vérité est insaisissable. Et sans idéologie. Et ces caractéristiques rebutent et découragent les hommes. Elles les embarrassent autant qu'ils s'en méfient. Voilà pourquoi l'immense majorité s'en détourne. Voilà pourquoi si peu aspirent à la connaître.

 

 

Glossolalie ténébreuse ? Peut-être... Paroles abstruses ? D'aucune façon. Eternelle prière de l'homme voué à la misère, à la solitude et à la peur de l'homme quémandant au ciel quelques signes. Et à Dieu une aide. Une main secourable. Un salut peut-être entrevu...

 

 

Les hommes absents. Eternellement absents. L'esprit et le cœur occupés à leurs bricoles. A leurs babioles. A leurs fadaises. Et à leurs niaiseries. Oublieux du monde. Et oublieux d'eux-mêmes. Rivés toute leur existence – à chaque instant de leur existence – à leurs misérables élans et à leurs médiocres tâches dont ils usent, en général, comme faire-valoir personnel, comme pitoyable trompe-ennui ou comme façon de se convaincre de tenir un rôle et d'être utiles...

Les hommes se cachent derrière leurs soucis. Soucis qui ne sont, en vérité, que de piètres envols d'eux-mêmes. A distance d'élastique. Accrochés à leurs pieds comme des boulets qu'ils jettent sur toutes les têtes qui passent à leurs côtés. Et l'on nous invite à rejoindre le monde ? A célébrer dans la liesse (qui n'est qu'une fausse gaieté, bien sûr...) notre appartenance à l'humanité ? De qui les hommes se moquent-ils ? De tous. Et d'eux-mêmes sans doute... Mais qu'ils prennent garde ! Dieu a peut-être – Dieu a sans doute – d'autres atouts dans sa manche ! Et que les hommes ne s'étonnent guère s'il lui prenait l'envie, un jour, de balayer leur espèce d'un excusable revers de main, trop las de leur fâcheuse prétention, de leur paresse et de leurs bassesses pour leur octroyer une énième chance...

 

 

L'insatiable appétit de vérité. Force majeure. Force magistrale. Et implacable couperet qui scinde l'homme en deux. Deux moitiés qui se fuiront – et s’éloigneront du monde – pour avancer, désunies, sur le chemin. Et s'offrir à Dieu. Deux moitiés irréconciliables vouées aux luttes – et aux combats acharnés – jusqu'à la mort. L'une avide d'Absolu tenant les rênes avec fougue et rudesse. Et tenant la bride serrée à l'autre. La contraignant, elle qui ne pourra jamais totalement faire le deuil du monde, à se soumettre tristement. Et à la suivre à regret.

 

 

Vivre. Avancer et se souvenir. Remonter les jours à la rame. Et ne voir que l'écueil devant soi...

 

 

Que ferais-je après l'été ? Peut-être seras-tu mort... Aussi, tâche de ne pas y songer...

 

 

Ne jamais oublier la différence entre ce que l'on croit être (les représentations de soi) qui conduit souvent à l'autosatisfaction ou, au contraire, à la dévalorisation de soi, et ce que l'on est à l'épreuve du réel et des faits (qui demeure, par définition, factuel, neutre et objectif). Et en cas d'omission, pas d'inquiétude ! Les événements et les circonstances seront toujours prompts à nous le rappeler. Essayant toujours de nous permettre de faire coïncider les deux de plus en plus justement. Et de plus en plus parfaitement. Jusqu'à ce que les représentations de soi* deviennent caduques et inutiles. Et qu'elles disparaissent dans la présence de l'instant, sans idée, sans pensée ni projection mentale...

* Comme d'ailleurs toutes les autres représentations : représentations sur les hommes, le monde, la vie, le temps, la sagesse, la vérité etc etc.

 

 

Il y a chez l'homme une sorte de manque de confiance ontologique. Comme l'atteste, avec évidence, son aspiration viscérale à chercher partout – et par tous les moyens possibles – à se rassurer. A chercher durant toute son existence une approbation. Et une confirmation de ce qu'il vit, de ce qu'il voit, de ce qu'il éprouve, de ce qu'il croit et pense à tout propos. Et à propos de tout, bien sûr...

 

 

Comment résumer (essayer de résumer) le monde, la conscience(1) et leurs liens ? L'énergie, l'engluement, l'entremêlement et les cycles. L'infini, l'immuable, la nudité, l'accueil et l'Amour. Et la perte(2), l'abandon, la complétude et l'Unité.

(1) La présence, le regard impersonnel...

(2) Le sentiment de perte...

 

 

Nos modiques ententes et nos dérisoires affrontements. Nos modestes souffrances et nos minuscules réjouissances. Que représentent-ils – et que pèsent-ils – dans l'économie générale de l'univers ? Si peu de chose, de toute évidence...

 

 

On écrit (souvent) comme l'on vit. Et l'on voit malheureusement le désastre s'inscrire sur nos pages... Soumis, en quelque sorte, à une triple peine : le désastre de l'existence. Vécu, écrit et lu...

 

 

Le mensonge et la vérité. L'illusion et la lucidité. L'illusion et le mensonge sont le manteau commun des hommes. La parure dont ils aiment s'habiller. La lucidité et la vérité, les loques transparentes de quelques pauvres fous avides de sagesse. Et dont ils savent bien qu'elles sont l'unique vêtement – et l'unique issue – dans ce monde d'apparence misérable et prétentieux. Avec son cortège de fantômes déguisés et peinturlurés dont les gestes et les paroles n'abusent qu'eux-mêmes. Et le monde qui leur ressemble...

 

 

L'odieuse fébrilité de l'attente. La crainte stérile de l'absence. Et l'espérance maladive d'être reconnu par les yeux du monde. Vivre, croire, espérer et mourir sous l'emprise et le pouvoir fascinants des yeux de l'Autre...

 

 

Une relation qui ne semble plus essentielle ni nécessaire (à l'un et/ou à l'autre) n'a plus de raison d'être...

Il y a néanmoins entre certains êtres une proximité et une intimité à la fois en deçà et au delà des attentes et des exigences égotiques habituelles que chacun porte, malgré lui, avec plus ou moins de bonheur et d'insistance...

 

 

Les mains tardent à répondre à l'appel. A rassurer de leur présence. A désigner là-bas quelque part sur l'horizon le point de la rencontre...

 

*

 

De l'humain au divin : l'abandon, les encombrements et le travail jamais achevé...

 

Tant de deuils en cette vie. Tout nous échappe. Les êtres et les choses. Tout finit toujours par nous quitter. Comme si l'abandon semblait non seulement rythmer l'essentiel de notre existence mais constituait aussi notre seule issue. Et notre seul salut. L'abandon comme apprentissage. Et comme retour à une (plus) juste perception du réel.

 

Abandonner les êtres et les choses non comme ils nous abandonnent – ou comme nous croyons qu'ils nous abandonnent... mais s'en dessaisir. Se les désapproprier – car, contrairement aux usages communs – et contrairement à ce qu'imagine l'immense majorité des hommes, les êtres et les choses ne sont ni à notre service ni notre propriété. Aucun ne nous appartient – ni n'a de compte à nous rendre – comme nous le pensons si souvent. Et ils ne nous doivent rien. Jamais.

 

Mais tant que l'on vit, agit, pense et se comporte comme un homme – un individu (une individualité séparée du reste du monde), on estime que les êtres et les choses sont présents pour répondre à nos attentes, à nos besoins et à nos désirs. Et on les instrumentalise d'une façon ou d'une autre – consciemment ou non – pour qu'ils nous assurent une certaine forme d'utilité, de soutien, de confort ou de réconfort...

 

En revanche, lorsque l'on passe du personnel à l'impersonnel – lorsque l'on quitte les yeux et le cœur humains pour habiter le regard divin, on comprend que l'on s'est fourvoyé depuis nos premiers pas dans l'existence. Que nous avons totalement inversé la perspective. Le monde, les êtres et les choses – ainsi que nous-mêmes en tant que forme (le corps et l'esprit auxquels nous avons pris l'habitude de nous identifier) – ne sont pas là pour notre usage (notre usage en tant que forme), ils jouent simplement leur rôle, au vu de l'interdépendance phénoménale, dans notre existence, notre fonctionnement organique et psychique et dans notre compréhension progressive de notre nature profonde. Mais nous (en tant que regard – regard qui constitue notre nature profonde), nous sommes là, en vérité, pour eux. Pour les accueillir, les écouter, les aimer et les servir...

 

Comment se déroule ce passage de la saisie, de la crispation et de l'attente égotique à la désappropriation, au lâcher prise et à la présence ancillaire ? Comment se déroule ce processus de transformation du personnel à l'impersonnel, de l'humain au Divin ? Par l'abandon tout au long de la vie.

 

A force d'attentes et de désirs déçus, de déceptions et de désillusions, de pertes et de deuils, de résignation et de renoncement, le cœur perd progressivement son esprit de désir, de conquête et de lutte et les forces – ou le courage – se retirent ou viennent à nous faire défaut. Comme si la vie s'appliquait sans cesse, en quelque sorte, à nous faire capituler. A nous détacher du monde – et de la vie : des êtres, des choses, des circonstances et des événements. Comme si la vie nous invitait sans cesse à nous abandonner à l'abandon. Jusqu'à ce qu'elle nous offre aucune alternative et qu'elle nous donne le coup de grâce* : la cessation de tout espoir.

* Dans les deux sens du terme : nous faire mourir à tout espoir. Et dans cette mort, nous révéler notre identité profonde associée aux caractéristiques de l'impersonnalité : plénitude, complétude, paix, joie et Amour.

 

Le temps constitue une composante essentielle – sinon primordiale – dans ce processus. Il permet de « digérer » et d'accepter (en général) partiellement les déceptions et les désillusions. Les unes après les autres. Et de ne pas (trop) engranger de frustration, de colère et de ressentiment. A force d'échecs, de coups et de brimades, les hommes finissent, comme ils le disent si souvent, par se faire une raison... Mais rarement, ils renoncent. Rarement ils parviennent à couper l'espoir à sa racine.

 

L'espoir subsiste parce qu'il est puissant, parce que les événements contribuent parfois à le renforcer et parce que des espoirs, le cœur en recèle à foison : des grossiers et des subtils. Des énormes et des infimes cachés dans les plus lointains et obscurs recoins. Isolés ou amalgamés, aisément décelables ou discrets – voire invisibles – enfouis dans quelque lieu retranché et inaccessible... Sortant ensemble en petits groupes ou les uns après les autres pour se confronter au réel – au monde et à la vie.

 

Ainsi souvent, tout au long de leur existence, les hommes continuent d'espérer. Présumant que l'avenir leur permettra, à travers un changement, une nouvelle situation, une rencontre, de satisfaire leurs désirs. Et de voir leurs attentes – et leur espoir – enfin « récompensés ». Et tant que l'espoir est encore vivant – et vivace – en nous, nous ne sommes pas totalement mûrs pour nous abandonner à l'abandon. Nous abritons encore en notre for intérieur des espoirs, de l'espérance et des marques de résistance au détachement.

 

Les larmes de tristesse mêlées de ressentiment, de colère et de résignation accompagnent presque toujours ces douloureux renoncements. Ces abandons vécus dans la douleur. Ces abandons pas totalement acceptés. Nous ne sommes pas encore prêts à nous détacher ni de l'espoir, ni du monde – ni des êtres et des choses – ni de la vie – ni des événements et des circonstances. Mais l'espoir, à force d'être chahuté et malmené par les faits tout au long de l'existence, peut finir par s'éteindre. Renvoyé, en quelque sorte, à sa dimension illusoire et utopique (non réelle et infondée).

 

Ainsi, la vie et le monde – les êtres, les choses, les événements et les circonstances œuvrent inlassablement à leur besogne de sape – de sape incessante – des espoirs. Les réduisant au néant les uns après les autres. Veillant aussi à ce que nous n'accumulions pas dans les tréfonds de notre psychisme de l'aigreur, du chagrin, de la rage et de l'animosité. Vidant ainsi progressivement le cœur de tout espoir et de toute tristesse – jusqu'au dernier et jusqu'à la plus infime trace résiduelle – afin qu'il devienne totalement vide et parfaitement nu. Alors surgit – peut surgir – l'abandon.

 

Ainsi, d'abandon « forcé » en abandon « forcé », d'espoirs déçus en désespoir peut arriver le jour où l'on est mûr pour s'abandonner réellement. Pleinement et totalement. L'abandon et le détachement s'imposent alors à nous factuellement. Ils apparaissent comme la seule option possible. Mais il ne nous appartient ni de les inviter ni de choisir le moment où ils se manifesteront... Ce sont eux qui « décident » du moment le plus opportun (lorsque, sans doute, nous sommes prêts – et suffisamment mûrs – pour les recevoir et les vivre...). On ne peut s'y livrer – ou franchir le pas – que lorsque quelque chose en nous lâche (ou se brise...). Alors l'abandon survient... Et il est vécu comme une sorte de soulagement profond, réel et total. Il devient un apaisement libérateur... où les tensions s'effacent. Et disparaissent. Où le regard devient étrangement étranger au réel. Où le regard devient impersonnel ou quasiment impersonnel. Comme si les événements que nous avons toujours considérés – et que nous aurions considérés quelques instants plus tôt – comme relevant de notre existence personnelle et qui nous auraient, à ce titre, affectés (de façon positive ou de façon négative) ne nous concernaient plus vraiment... Regard neutre et distant observant le cours des choses – et le cours de la vie – comme s'ils se déroulaient sur un écran. Spectateur impartial et bonhomme d'un film sans importance. Spectateur sans jugement et sans attente à l'égard du déroulement du scénario. Arrive ce qui arrive. Il peut arriver n'importe quoi. Cela arrive – c'est tout. Cela n'a aucune importance. On est simplement là, en tant que regard accueillant et observant – en tant que regard aimant et bienveillant, écoutant et servant les formes – les êtres et les choses – tels qu'ils sont et se manifestent dans la situation de l'instant...

 

L'abandon mène à la fois à la liberté et à l'obéissance joyeuse, apaisée et pleinement consentie (sans résistance). A la liberté totale et à la parfaite soumission. A la liberté absolue du regard. Et à la soumission complète du corps, de l'esprit et du cœur aux exigences situationnelles. Aux impératifs et aux nécessités du monde, des êtres et des choses...

 

 

S'abandonner à ce qui est là. Et à ce qui surgit...

 

 

La vie change, évolue et passe. Le monde, les êtres, les idées, les émotions et le temps changent, évoluent et passent. L'esprit – inscrit dans la temporalité – le sait. Il le sent. En outre, il a la conviction que certains aspects et dimensions de la vie, du monde, des êtres et du temps et que certaines idées et émotions lui appartiennent. Qu'ils constituent des éléments tangibles – et indiscutables – de ce qu'il nomme son existence. Le regard, lui, dont le seul territoire est l'impersonnalité et l'instant, demeure absolument neutre, juste, impartial, lucide et bienveillant. Totalement décollé, en quelque sorte, des notions personnelles et temporelles.

Et le défi des hommes – du moins ceux engagés sur une voie spirituelle – est de passer du personnel à l'impersonnel. Et de la temporalité à l'instant. Passer de l'esprit (du psychisme et des représentations mentales) et du cœur humains personnels au regard impersonnel (ou divin) en laissant le monde, autrement dit les corps, les esprits et les cœurs apparemment personnels (dont ceux auxquels il s'est identifié...), libre de se manifester selon ses conditionnements.

Le mystère qui relève véritablement de l'alchimie – et dont on ignore à peu près tout – réside dans la façon dont l'impersonnel et le divin imprègnent peu à peu ce que l'on apparente en général au personnel... Imprégnation énigmatique de la tête (à travers l'esprit), du corps (à travers la sensorialité) et du cœur (à travers la sensibilité) de l'être. De chacun des êtres...

 

 

Il est douloureux – très douloureux – de mûrir. De laisser le cœur mûrir. Puisqu'il s'agit de faire le deuil, en général de façon progressive, de toutes choses*... Et bien des hommes – sinon tous – n'en ont ni l'aspiration, ni la force ni même le courage. Préférant (et on peut les comprendre, bien sûr...) rester leur vie durant dans une forme d'infantilisme ordinaire (qui essaye pourtant avec maladresse de se cacher derrière quelques attitudes et postures de responsabilité et de sérieux). Mais l'homme est, en général, sur les plans existentiel, relationnel, affectif, émotionnel, cognitif et spirituel un être encore très fortement immature... Cette forme d'infantilisme est très commune et répandue. Si commune et si répandue qu'elle est acceptée socialement partout (et par tous) à travers le monde. Et qu'elle constitue même la norme. Même si l'immense majorité des hommes n'en a sans doute pas conscience...

* Et la racine première de tous nos attachements est, bien sûr, l'attachement à soi en tant que personne...

 

 

Lorsque les événements sont vécus avec douleur et souffrance par l'esprit et le cœur, il est extrêmement difficile d'habiter le regard. De maintenir la perception dans l'impersonnalité. Non qu'il faille s'y forcer ou s'y contraindre, bien sûr... On est simplement irrésistiblement et littéralement aspiré par la zone d'inconfort ou le point douloureux. Et cet extrême désagrément – parfois insupportable (dans tous les sens du terme) nous invite – ou nous oblige parfois – à regarder avec davantage de distance et de lucidité les raisons de cette souffrance. Comme si le regard – et la perception – se focalisaient toujours sur les dimensions problématiques, les aspects entravants et encombrants (embarras, profusions et obstructions psychiques et nœuds énergétiques) qui font barrage à la progression du corps, du cœur et de l'esprit vers plus de nudité et de virginité... Sur tout ce qui bloque leur ouverture, leur fluidité et leur progression vers ce que l'on peut considérer comme leur état naturel : vide, fluide et ouvert aux interactions, appréhendé avec un état perceptif impersonnel totalement nu et vierge – complètement pur en quelque sorte...

 

 

Au cours de certaines phases de ce cheminement perceptif (ou de cette « progression spirituelle » si ce terme vous agrée davantage...), on sent l'imminence de quelque chose dont on ignore tout. La survenance d'une chose en soi dont on ignore absolument tout. Et qui nous réduit au silence. Nous confinant dans une sorte d'immense et vaste « je ne sais pas – je ne sais rien – je ne comprends pas – je ne comprends rien ». L'inconnu de l'inconnu pour toutes choses : passées, présentes et futures. Pour tous domaines et toutes directions. ON NE SAIT PAS. Et ON N'EN SAIT RIEN. Sans même avoir la certitude que l'on sera amené à voir. A savoir et à comprendre. Peut-être ? Peut-être pas ? Ignorance totale de TOUT...

Et cet état d'ignorance générale est sans doute une percée dans la nudité et la virginité évoquées dans les fragments précédents (n'en déplaise à notre esprit – à notre mental infantile, frileux, apeuré et immensément trop rationnel en matière de spiritualité, de sagesse et de vérité)... Mais quel être – quel homme – dans la vie quotidienne est-il capable de vivre dans cet état d'ignorance totale à chaque instant – simplement ouvert et accueillant à l'égard de ce qui est ?

Et pourtant on s'accroche. On continue (avec tant d'aisance et de naturel...) à s'agripper à tout ce qui nous aide, à tout ce qui nous soutient, à tout ce qui nous rassure, à tout ce qui nous emplit, à tout ce qui nous réconforte. Jamais nous ne cessons de chercher des repères, des certitudes, des alliés, des amis et des amours pour venir à notre rescousse... Et cette recherche s'avère, en définitive, vaine car le « si peu fiable » et le « si peu d'Amour » que l'on y rencontre ne méritent peut-être pas que l'on s'y attache... Ils ne méritent peut-être pas que l'on attende quoi que ce soit de leur part, que l'on en souffre, que l'on s'y accroche et qu'on leur accorde la moindre importance. Ils ne méritent peut-être pas que l'on espère. Ce « si peu fiable » et ce « si peu d'amour » ne méritent peut-être même pas d'être accueillis par l'Amour parce qu'ils ont besoin qu'on leur renvoie leur propre image. Qui est laide, étroite, encombrée et bien peu aimable. Et peut-être pas même encore dignes d'être aimés. D'être aimés pleinement...

En définitive, il n'y a rien ici-bas sur lequel nous puissions réellement trouver appui. Excepté, bien sûr, ce qui est dans l'instant. Et qui se dissipe aussitôt l'instant suivant... Notre seul salut réside donc dans le regard qui nous permet de trouver un ancrage immuable dans ce monde de fantômes et d'évanescence...

 

 

Epilogue provisoire*

* En ce monde, tout est toujours provisoire, bien sûr...

 

Lorsque l'on croit habiter le regard nu (Ah ! La force des illusions*...), il arrive que subsistent quelques espoirs méconnus ou très profondément enkystés – et parfois très difficilement déracinables – qui obstruent la parfaite virginité du cœur...

* Voilà pourquoi toute idée, toute pensée, toute croyance et toute construction (sur soi, la vie, le monde, les êtres, Dieu, la vérité, la spiritualité, la sagesse, l'Absolu...) éloigne toujours de soi, de la vie, du monde, des êtres, de Dieu, de la vérité, de la spiritualité, de la sagesse et de l'Absolu. Tout est si insaisissable qu'il nous faut demeurer à chaque instant nu et vierge (vierge de tout) pour être en mesure d'accueillir l'instant comme il vient et l'abandonner l'instant d'après pour être à nouveau en mesure d'accueillir ce qui vient dans l'instant suivant...

Et je sens aujourd'hui encore quelques espoirs en mon cœur. Pas totalement mûr (donc) pour une nudité et une virginité parfaites. Aussi dois-je me résoudre à laisser la vie et le monde poursuivre leur œuvre. Les laisser libres dans leur incessante besogne de désencombrement et d'épuration...

La lucidité et l'honnêteté nous obligent comme toujours à l'humilité. Et l'humilité nous enjoint à la bienveillance. Nous invitant comme toujours à accueillir ce que l'on est, le monde et la vie tels qu'ils sont : mûrs ou immatures, vides ou chargés d'espoirs et d'encombrements, sages ou ignorants. Nous livrant ainsi éternellement – et à chaque instant –, jour après jour, année après année (et sans doute même vie après vie...) à l'âpre tâche de l'être : à notre travail jamais achevé de polissage pour que rayonne – que continue de rayonner – le cœur aimant...

 

 

Les heures grises semblent s'éloigner. Mais je sais que d'autres viendront après elles. Et peut-être serais-je alors capable de les recevoir (cette fois-ci) avec le cœur plus transparent. Avec le cœur plus tendre et plus ouvert... Et alors le gris peut-être sera magnifique. Aussi beau, aussi léger et admirable que n'importe quelle autre couleur...

On aimerait parfois que le cœur soit aussi coloré – et multicolore – que la vie. Il l'est pourtant. Et nous le savons bien. Mais les yeux – si ternes, si peu vifs – presque éteints – refusent l'évidence. Ce sont eux qui lui donnent ces teintes si tristes. Ces teintes à pleurer...

On peut, bien sûr, en sourire aujourd'hui... Mais seuls les yeux, je crois, nous privent de la beauté – et de la lumière – pour accueillir dans la joie toutes les couleurs de la vie – et de la terre.

 

10 décembre 2017

Carnet n°79 Intimités et réflexions impersonnelles

Journal / 2016 / L'intégration à la présence

Une parole – une pensée – me vient. Elle arrive de loin. De très loin. Du regard qui jouxte le cœur. De plus loin encore peut-être... Qui sait où elle débute ? Elle poursuit son chemin à travers moi qui ne suis pour elle qu'une très modeste étape (pas même nécessaire sans doute). Elle me glisse entre les doigts pour s'étaler sur le papier. Qui n'est, lui aussi, qu'une humble escale dans sa longue aventure.

La parole – la pensée – n'en finit pas d'arriver... Elle traversera encore mille cœurs – dix mille cœurs peut-être –, poursuivra en eux son périple et continuera sa route inlassablement. Avant un jour peut-être d'être ramenée à l'espace où elle est née (ou d'être rappelée à lui, allez savoir ?). Retrouver l'espace originel qui l'a vue naître pour la première fois. Alors peut-être s'éteindra-t-elle définitivement. A moins, bien sûr, qu'elle ne survive discrètement – ou secrètement – dans quelques cœurs – et dans quelques livres – et qu'un regard la ranime – ou la réveille – pour qu'elle poursuive son interminable voyage...

 

 

Les instants du jour. Et le jour des instants. Avant que ne survienne le jour de l'instant où celui-ci devient la seule référence temporelle...

 

 

Suis les instincts du jour. Ils donneront un peu de chair à ta vie...

 

 

Au cœur frivole, rien ne s'attache. Sinon la futilité des jours...

 

 

La défaite des jours offre au cœur la seule victoire possible. Une pluie de caresses dans les yeux ouverts...

 

 

Et si le monde n'était qu'un grand corps endormi qui attend le baiser de Dieu pour s'éveiller...

 

 

Les rêves maléfiques des hommes que le Diable, dans leur sommeil, a embrassés à pleine bouche...

 

 

L'homme de Dieu – encore immature – ne doit se comparer aux hommes. Ni s'en plaindre ni les condamner. Il doit soumettre ses yeux, son cœur et ses gestes à la mesure de Dieu. Celui-ci sera, s'il en éprouve encore le besoin, sa seule référence.

 

 

La magie d'un regard ne tient pas à son mystère. Mais à son ampleur.

 

 

Si tu n'éprouves toujours aucune tendresse pour la plus infime créature de la terre, Dieu n'a pas encore suffisamment empli tes yeux et ton cœur d'Amour.

 

 

La violence, la barbarie et l'ignominie du monde, aime-les avec patience. Il n'y a d'autre voie pour qu'elles s'éteignent. Il n'y a de façon plus directe de les voir disparaître définitivement...

 

 

Les saisons ne se succèdent que pour les yeux naïfs. C'est le ciel qui habille la terre selon les circonstances. Et l'âme qui lui donne ses couleurs...

 

 

Un cœur pur est un cœur nu. Entièrement démaquillé. Auquel on a pris soin d'ôter toutes ses poudres. Et tous ses fards.

 

 

A la beauté du monde ne peuvent répondre pleinement que la grâce et l'innocence.

 

 

Un homme sans manière n'est pas, comme l'on pourrait le croire trop hâtivement, un être rustre et vulgaire. Mais un cœur vierge et sans référence. Un regard nu et ouvert aux situations.

 

 

Dieu offre à chacun quelques grâces(1). Et quelques infirmités(2). Exactement celles dont il a besoin pour s'éveiller à son visage...

(1) Les miennes concernent essentiellement la sensibilité, la curiosité insatiable, le goût d'apprendre et de connaître et la soif inextinguible de vérité...

(2) Principalement mon incapacité à vivre parmi les hommes et à m'épanouir dans leur monde...

 

 

Nul, bien sûr, ne peut voir le visage de Dieu. On ne peut qu'en deviner – ou en apercevoir – les signes et les expressions. Seul le cœur peut réellement ressentir sa présence. Son évidente présence en – et parmi – nous...

 

 

Autrefois les pèlerins pérégrinaient avec un bâton sur les chemins. Pour soutenir leurs pas au cours de leur longue marche et se défendre contre d'éventuels brigands. Aujourd'hui, il est rare que mon bâton ne m'accompagne pas au cours de mes longues sorties quotidiennes dans les collines. Il m'est particulièrement utile sur les sentes escarpées – très nombreuses en ces lieux. Et outre son utilité pratique, mon goût très prononcé pour sa manipulation martiale, l'évident esthétisme des mouvements qui y sont associés et la joie éprouvée par son utilisation, il pourrait servir – ne sait-on jamais – au modeste pèlerin de vent(1) de taille modeste et toujours seul dans ses périples, et jamais à l'abri, bien sûr, de rencontrer quelques visages hostiles et agressifs comme cela est déjà arrivé à plusieurs reprises(2) où il a dû faire face seul, sans aide ni soutien, sans arme ni artifice à la violence verbale et physique de quelques groupes d'excités. Et il semble évident que le maniement habile et avisé du bâton pourrait décourager les plus téméraires à laisser libre cours à leur violence ou à s'adonner à quelques velléités agressives. Et permettrait d'éviter l'affrontement. Ou éventuellement de mettre hors d'état de nuire celui ou ceux qui aurai(en)t l’imbécillité ou le courage de se livrer au combat... En espérant, bien évidemment, que cette éventualité ne se produise jamais...

(1) Votre serviteur...

(2) Quelques démêlés avec des groupes de chasseurs menaçants et belliqueux – et parfois même très remontés de voir mes chiens courir en toute liberté sur ce qu'ils considèrent, à tort bien sûr, comme leur pré carré et des bandes d'individus agressifs et/ou fortement alcoolisés toujours prêts à en découdre... Et qui n’interviennent, le plus souvent, qu'en équipe ou en nombre...

Je suis, de tout évidence, un partisan de la non violence. Mais bien des hommes ne partagent pas cette perspective... La violence est pour eux un mode expressif privilégié. Et nous qui déambulons toujours seul sur les chemins déserts du monde, nous n'avons aucune envie de nous retrouver impuissant et démuni, face à l'hostilité imbécile de quelques brutes agressives. D'autant que les hommes se déplacent presque toujours en groupe et font presque toujours appel aux membres de leur famille, de leur clan ou de leur communauté pour leur venir en aide. Et nous, nous sommes seul sans personne pour nous épauler ou venir à notre rescousse. Le bâton reste donc notre meilleur soutien. Le plus avisé. Et sans doute le plus dissuasif...

 

 

Ecoute ces paroles, homme ! Une chose en toi guide tes pas. Entends-la. Ecoute ses conseils et ses directives. Et consulte-la autant que nécessaire. Elle te donnera de précieuses indications sur le chemin de l'existence. Et le cheminement vers la vérité. Elle s'exprime par divers canaux. Mais l'intuition et la voix intérieure semblent ses modes expressifs les plus courants. Et les plus facilement perceptibles par les hommes. Toutes deux émanent directement de l'espace impersonnel. Et l'intelligence sensible du cœur décrypte – et transmet – leurs messages. Si tu aspires à faire de ta vie un véritable chemin, n'y sois pas sourd...

 

 

Le petit homme – le petit homme simple – au cœur sensible et incomplet – meurtri par la bêtise et la violence du monde – apprit au fil des pas à transformer ses faiblesses et sa sensibilité en portes de la connaissance. Il erra longtemps dans son anti-chambre avant que le ciel ne s'ouvre – et ne puisse offrir à son âme deux petites ailes pour qu'elle s'envole vers Dieu – et explore son royaume infini. Tout au long de son voyage, il rédigea des notes pour donner quelques indications et quelques conseils aux hommes. Dire ce que le chemin et son exploration lui avaient appris. Puis il put raconter la découverte du royaume céleste. Ses merveilles. Et ses trésors. Mais les hommes – la plupart des hommes – n'ont jamais prêté attention à sa besogne. Et il en a longtemps été attristé...

Aujourd'hui, il demeure dans les montagnes et redescend de temps à autre dans la plaine. Mais son cœur n'est plus en peine. Il marche dans le monde sans attente à l'égard des hommes. La solitude et la montagne sont sa seule patrie. Et son travail et sa joie, Dieu seul les lui donne...

 

 

Si l'on ne découvre l'Amour en soi, jamais on ne rencontre l'Amour.

 

 

Au cœur de la plus grande sagesse se cache la plus grande folie. Au cœur de la plus grande folie se cache la plus grande sagesse. La normalité, elle, n'est qu'une maladie de l'âme, soumise au mimétisme imbécile, à l'insipidité et aux restrictions de la lâcheté, de la tempérance et de la crainte excessive.

 

 

Lorsque tu n'auras plus besoin des hommes comme témoins (témoins de tes actes, de tes gestes, de ton travail et de ta vie), comme faire-valoir ou instruments sensibles et émotionnels destinés à t'offrir ou à te procurer plaisir, satisfaction ou réconfort, la compagnie de Dieu suffira à ton existence. Et seuls son regard – et le ressenti sensible et sensoriel – seront nécessaires pour te combler pleinement. Tu pourras alors aller dans le monde – et parmi les hommes – le cœur parfaitement ouvert et sans attente...

 

 

Qu'est-ce que vivre ? Qu'est-ce que la sagesse ? Quelques mots suffisent à offrir une réponse simple. Et recevable. Contempler. Observer. Ecouter. Ressentir. Aimer. Accueillir. Et agir si nécessaire...

 

 

Tant que les hommes n'ont qu'une vague idée des règles de la terre et du ciel, ils vivent selon leurs conditionnements. En créatures instinctuelles. Lorsqu'ils les ont quelque peu intégrées, ils se familiarisent avec la présence. Et lorsqu'elles ont été parfaitement intégrées à leur être, ils vivent selon la grâce de Dieu.

 

 

A l'apôtre des jours, il faut donner. Les autres tendront la main à sa générosité. Et à son Amour. Et tous recevront ses dons – non selon leurs désirs mais selon ce qui leur est nécessaire...

 

 

Une parole – une pensée – me vient. Elle arrive de loin. De très loin. Du regard qui jouxte le cœur. De plus loin encore peut-être... Qui sait où elle débute ? Elle poursuit son chemin à travers moi qui ne suis pour elle qu'une très modeste étape (pas même nécessaire sans doute). Elle me glisse entre les doigts pour s'étaler sur le papier. Qui n'est, lui aussi, qu'une humble escale dans sa longue aventure.

La parole – la pensée – n'en finit pas d'arriver... Elle traversera encore mille cœurs – dix mille cœurs peut-être –, poursuivra en eux son périple et continuera sa route inlassablement. Avant un jour peut-être d'être ramenée à l'espace où elle est née (ou d'être rappelée à lui, allez savoir ?). Retrouver l'espace originel qui l'a vue naître pour la première fois... Alors peut-être s'éteindra-t-elle définitivement... A moins, bien sûr, qu'elle ne survive discrètement – ou secrètement – dans quelques cœurs – et dans quelques livres – et qu'un regard la ranime – ou la réveille – pour qu'elle poursuive son interminable voyage...

 

 

L'essentiel ? La présence. Quel que soit l'état...

 

 

Quelques chevaux d'un haras touristique parqués dans un pré exigu et broussailleux sans arbre ni abri, offrent aux hommes, à l'instar de tous les animaux sauvages et domestiques, une incroyable leçon de courage. Sans doute la plus grande qui soit, bien que les hommes, dans leur stupidité et leur aveuglement, n'y soient guère sensibles...

Impassibles sous la pluie et la neige comme sous le soleil harassant. Supportant le froid et endurant la chaleur sans broncher. Stoïques face au harcèlement permanent des mouches, face aux attaques continues des taons pendant la journée et des moustiques durant la nuit. Et contraints par les hommes qui en ont fait « leur propriété(1) » de se laisser monter(2) à toute heure du jour par des postérieurs suants et malodorants, maladroits ou habiles mais toujours exigeants, capricieux et dominateurs(3) les menant selon leurs exigences(3) et leur « bon plaisir ». Contraints de répéter inlassablement les mêmes tours de manège, d'effectuer les mêmes sauts d'obstacle et de galoper plusieurs fois par jour à brides serrées dans d'interminables courses. Endurer cette existence-là avec cet héroïsme ordinaire et quotidien(4) devrait clouer le bec à tous les blanc-becs humains qui s'enorgueillissent de leur courage de pacotille et de leurs actes de bravoure à quatre sous. Mais non ! Les hommes continuent de fanfaronner pour leurs pauvres gestes ! Et pire ! Ils ignorent non seulement le réel courage de leurs frères à quatre pattes mais les maintiennent asservis dans des conditions abjectes et intolérables ! Cette humanité-là, si stupide et si insensible – si ignorante et si nuisible –, est à pleurer...

(1) Quelle ignominie de confiner un être au rang d'objet... et de le cantonner à un rôle d'instrument. Toute l'horreur de la réification y est présente...

(2) Sans compter le débourrage, procédé violent pour les dominer et les asservir...

(3) Quel être accepterait sans contrainte qu'on l'affuble d'un mors, d'un harnais et d'une selle pour le chevaucher ? Les hommes n'en ont pas conscience, mais le cheval (comme bon nombre de ses frères de misère aux conditions d'existence encore plus déplorables : porcs, poules, dindes, vaches, poulets, poissons d'élevage, animaux sauvages chassés et en cage, chiens à l'attache, ânes, mulets, bœufs et dromadaires destinés aux transports ou servant de force motrice pour actionner un moulin ou une pompe etc etc) est le symbole d'une domination abjecte et terrifiante exercée de façon inique et illégitime par l'espèce humaine qui se comporte à l'égard des autres espèces vivantes comme un animal dominateur et sans conscience...

(4) Notons que la vie des hommes n'est parfois pas si différente : travail usant et éreintant, tâches quotidiennes exercées avec pénibilité et dans un esprit de devoir, d'obligations et de contraintes, repos et sommeil constituent, bien souvent, l'essentiel de leur existence... Existence qui, à bien des égards, n'est pas si éloignée de la vie animale...

 

 

Sache te faire le trait d'union entre le cœur et le monde. Deviens leur corde sensible. Et tu vibreras à l'unisson de Dieu et des hommes. Des êtres et des astres. Des herbes, des pierres et des étoiles. Et tes notes – et ta partition – seront entendues partout dans l'univers...

 

 

Il vit son âme se reposer quelques instants à l'ombre d'un vieux chêne. Harassée par la chaleur et l'agitation du monde. Savourant sa courte halte avant de reprendre sa danse dans le ciel. Et son travail auprès des hommes.

 

 

Refuge des âmes et miroir des hommes. Serait-ce là les deux grandes missions du ciel ?

 

 

Vivre avec le cœur nu parmi les hommes est un exercice délicat. Mais nécessaire à la stabilisation de la présence.

 

 

Un monde sans marécage serait comme un ciel sans nuage. Impossible. Et impensable. Ils offrent à la terre et à l'azur ce qui leur est nécessaire. Les éléments indispensables à leur fonctionnement. Et les conditions requises à leur pleine maturité...

 

 

Les yeux et le cœur humains discriminent, jugent et séparent. Le regard divin, lui, égalise, accueille et unit ce qui a été divisé, élevé, abaissé, rejeté ou banni de façon illusoire par les hommes.

 

 

En général, ce que l'on donne aux êtres – et aux hommes – s'offre à Dieu. Et ce que l'on offre à Dieu se donne aux êtres – et aux hommes. Mais il arrive parfois, en particulier au cours de certaines phases du cheminement, que ce que l'on offre aux êtres – et aux hommes – prive des dons de Dieu. Et ce que l'on donne à Dieu ne peut être directement offert aux êtres – et aux hommes. Ou les en prive provisoirement...

 

 

On ouvre un livre comme l'on consulterait un ami, médecin et spécialiste de l'âme, qui vous montrerait exactement l'emplacement du cœur où il faudrait ouvrir – et inciser – pour que s'échappe un peu d'Amour. Un mince filet pour vous sauver de votre sauvagerie. Ou un jet puissant pour vous débarrasser de votre haine et de votre amertume tenaces. De votre colère. Et de tous vos ressentiments*.

* Car il y a, bien souvent, chez les hommes beaucoup d'aigreur, de chagrin, de frustration, de rancœur et parfois même de la haine et de la rancune accumulés insidieusement au fil des années (processus amorcé, bien sûr, depuis la plus tendre enfance)...

 

 

Contrairement à ce que l'on pourrait penser(1), l'essentiel n'est ni soi, ni les êtres, ni le monde ni même la vie, mais la façon dont on entre en relation avec eux. Et avec toute chose(2). De notre manière d'être en lien dépend l'essentiel de l'existence terrestre. Plus le regard et le cœur savent se faire nus, ouverts et tendres(3), plus les relations se déroulent de façon détendue, harmonieuse et bénéfique(4). Et plus la vie devient simple et aisée. Naturelle et heureuse.

(1) Et à ce que pense la plupart des hommes...

(2) Avec tous les phénomènes : soi-même (et tous les pans et aspects de sa personnalité), les êtres, les choses, les situations, les événements, les circonstances, les pensées, les émotions etc etc.

(3) Pour que cette nudité, cette ouverture et cette tendresse apparaissent, il est bien souvent nécessaire de s'être préalablement rencontré et d'avoir découvert l'Amour en soi...

(4) Bénéfique pour tous, pour soi (en tant que forme), pour les autres, pour le monde et pour la vie...

 

 

Le cœur sensible est sans cesse malmené, maltraité, blessé et meurtri par le monde. Et par les hommes. Voilà pourquoi il éprouve souvent le besoin de se recueillir dans les bras de Dieu (avant de pouvoir – lorsqu'il est suffisamment mûr – y habiter) pour être en mesure d'accueillir pleinement l'animosité et la malfaisance des gestes et des comportements. Et convertir cette misère – toute cette misère – en Amour et en joie. L'espace divin est si infini que lui seul peut offrir l'hospitalité à la malice, à la bêtise, à la bassesse, à l'abjection et à la haine. Et les recevoir en hôtes princiers. Son accueil est si large et si profond qu'ils disparaissent. Enveloppés et recouverts de tendresse et de compréhension. Le cœur sensible peut alors se laisser traverser par toutes les ignominies du monde – et de la terre –, il sait qu'il restera indemne s'il se montre suffisamment nu, ouvert et transparent pour qu'elles puissent glisser – et s'éteindre – dans l'immensité divine.

 

 

L'illusion est ce qui n'est pas dans l'instant. Et les encombrements sont ce qui n'est pas nécessaire à ce qui est dans l'instant. A la situation telle qu'elle se présente ici et maintenant. Pour s'en défaire, il ne faut pas les rejeter. Ni lutter ni combattre contre eux. Au contraire, il convient de les accueillir. Et aussitôt accueillis de les reconnaître pour ce qu'ils sont : des illusions et des encombrements. Et ainsi éclairés (à la lumière de la présence), ils se désintègrent. Et disparaissent. Et ne demeurent alors que ce qui est, dépouillé de tout sur-ajout, et le regard nu, vide de tout encombrement et de toute illusion, qui éclaire et accueille ce qui est de façon neutre et ouverte.

 

 

Lorsque l'on est en compagnie des hommes (avec ou parmi eux), il faut être attentif. Ne pas laisser les yeux être ramenés à la surface des choses – à la surface du monde et de la vie. Il convient autant que possible de maintenir le regard dans les profondeurs afin de ne pas être happé ou absorbé par les événements et voir ainsi disparaître l'intensité et la consistance du cœur.

 

 

Il est toujours nécessaire de recevoir avec tendresse et Amour toutes les fois où notre cœur ne sait accueillir ce qui est avec Amour et tendresse.

 

 

L'inconfort* et la tranquillité ont toujours été les moteurs les plus puissants et les plus répandus en ce monde. Depuis les débuts de l'humanité – et même depuis l'émergence du vivant – les êtres ont toujours été actionnés par la fuite de l'inconfort et de l'intranquillité. Et, bien sûr – a contrario –, par la recherche du confort et de la tranquillité. Tout – presque tout – la quasi totalité des besoins, des désirs, des gestes, des activités et des projets s'y enracine. Ou y prend sa source.

* L'inconfort ressenti par le psychisme...

 

 

Dans les représentations humaines, la grandeur et la force(1) sont évidemment associées au masculin. Et la beauté au féminin. Ces associations sont sans doute à l’œuvre depuis des temps immémoriaux(2). Et il est évident qu'elles ont toujours correspondu globalement (de façon schématique et fort réductrice) aux qualités essentielles attendues – consciemment ou non – par l'un et l'autre des sexes (quelle que soit l'époque de l'histoire humaine). Aussi les femmes et les hommes se sont toujours définis malgré eux sur leur échelle respective. Et le rang(3) qu'ils s'attribuent et auquel les « placent » les autres sur cette échelle contribue grandement à construire leur représentation d'eux-mêmes, qui, à son tour, a une profonde incidence sur la façon dont ils entrent en relation avec les autres. Et avec le monde. Ainsi un homme grand et fort et une femme belle et séduisante seront dotés en général d'une forme d'assurance et de confiance et d'une aisance relationnelle bien plus élevées qu'un homme petit et faible et qu'une femme disgracieuse ou à la beauté quelconque. Comme si ces archétypes ancestraux se transmettaient non seulement de façon quasi génétique de génération en génération mais conservaient aussi toute leur puissance dans la partie la plus ancienne et primitive du cerveau – et de la mémoire –, continuant d'influer sur le psychisme humain de façon conséquente. En tout cas jusqu'à aujourd'hui. Et pour sans doute encore bien des générations...

(1) Force et grandeur réelles (physiques) ou symboliques (richesse, pouvoir, rang social etc etc)...

(2) Bien que ces dernières décennies, on a vu en Occident – et en particulier dans les zones urbaines – émerger une recombinaison des représentations et se développer une forme de mixité timide en dépit de traditions sexistes (voire machistes) encore très fortement ancrées dans les esprits...

(3) Le rang sur cette échelle : rang médiocre, passable, élevé...

En dépit de la puissance de ces représentations masculines et féminines, n'oublions pas – pour autant – que l'essentiel des actes humains ne vise qu'à s'assurer* – illusoirement bien évidemment – d'être aimé. Et celles et ceux qui « occupent » une « place honorable » sur leur échelle essaieront de faire valoir ce rang dans leur besoin fondamental de reconnaissance et d'amour. Et les autres – ceux qui ne peuvent se hisser qu'à un rang médiocre ou passable tenteront souvent d'autres voies pour parvenir à leur fin : intelligence, gentillesse, habileté, douceur, humour, etc etc. Espérant ainsi compenser un rang jugé « insuffisant »...

* Assurer le psychisme et le mental...

 

 

Pour agir avec justesse – avec la plus grande justesse possible –, il convient, bien sûr, d'être à l'écoute de la situation. De l'ensemble des éléments et des protagonistes de la situation. Mais il convient aussi de conserver à l'esprit que la situation, ses éléments et ses protagonistes, s'inscrivent toujours dans un cadre plus large – beaucoup plus large. Et que les circonstances actuelles ne sont qu'un infime épisode d'un long – très long (sinon infini) – processus. Nous ne devons jamais oublier que ce qui est vécu à un instant donné n'est que la conséquence logique et implacable(1) – et sans doute nécessaire(2) – d'un déroulement amorcé, le plus souvent, très antérieurement...

(1) N'en déplaise aux partisans du hasard, bien peu avertis. Et bien trop étroitement rationnels...

(2) Pour qu'ils vivent, éprouvent et comprennent ce qu'ils ont à vivre, à éprouver et à comprendre...

 

 

On vit ici comme l'on pourrait vivre ailleurs. Les lieux n'ont, en définitive, aucune importance... Seule notre manière d'y être présent – et de les habiter – est déterminante. Certes, certains lieux comme certains êtres peuvent avoir nos faveurs mais c'est toujours notre façon d'être avec eux qui est essentielle.

Il convient néanmoins – si on en a la possibilité – d'être à l'écoute de ses besoins et de ses aspirations en matière de mode de vie, d'environnement et de relations aux hommes – et au monde. De les respecter. Et de s'y conformer(1). Cette écoute et ce respect seront le gage d'une vie phénoménale juste et appropriée. En nous offrant les conditions d'existence adéquates, adaptées à notre nature profonde, on se libère des tensions et des conflits inutiles – liés à une certaine forme d'incompatibilité ou de discordances naturelles (sans compter, bien sûr, les soucis et les préoccupations qui y sont associés) et l'on peut ainsi réunir les conditions propices à une forme de tranquillité minimale nécessaire(2) au cheminement intérieur...

(1) D'ordinaire, nous aimons illustrer cette thématique avec l'exemple de la girafe et du pingouin. La nature de la girafe la contraint à vivre dans la savane. La banquise constitue pour elle un environnement hostile et inadapté. Quant au pingouin, sa nature le contraint à vivre sur la banquise. La savane est pour lui un environnement totalement inapproprié. Il ne viendrait à personne l'idée de faire vivre une girafe sur la banquise et un pingouin dans la savane. Pour qu'ils puissent vivre à leur aise, ils doivent l'un et l'autre respecter leur nature et opter pour un mode de vie adapté à leurs caractéristiques...

(2) Notons néanmoins que les « épreuves phénoménales » peuvent aussi constituer – lorsque cela s'avère encore nécessaire – le cadre pratique d'un travail sur soi : processus de désencombrement psychique, élargissement de l'accueil etc etc. Mais se contraindre ou se forcer en oubliant d'être à l'écoute de ses caractéristiques, de ses besoins et de ses aspirations constitue une violence. Et ne peut-être considéré, sauf exception*, comme un instrument judicieux dans notre cheminement spirituel...

* Dans certains cas précis comme par exemple au début du cheminement lorsque les aspirations correspondent davantage à des désirs d'ordre personnel ou à des exigences capricieuses liés aux représentations mentales qu'à des nécessités naturelles et profondes...

 

 

[Représentations humaines du masculin et du féminin – suite]

Il semble pertinent, à certains égards, de penser que la « grandeur » et la « force » sont les symboles les plus évidents de la puissance. Et que la beauté est sans doute le symbole le plus juste de la grâce. Nul ne contesterait non plus que les femmes, pourvues, en général, de grâce mais dépourvues de puissance(1) cherchent cet attribut chez l'homme. Et que les hommes, en général, pourvus de puissance et dépourvus de grâce sont en quête de cette caractéristique chez la femme(2). Comme si hommes et femmes cherchaient à réunir en une seule entité ces deux dimensions(3). En tentant d'y parvenir maladroitement à travers la réunion de deux êtres. A travers le couple et l'amour (au sens commun et ordinaire). Rappelons également que l'amour est l'un des moteurs principaux des êtres (chacun cherchant, évidemment, à être aimé...).

(1) Au sens réel... ce qui n'empêche nullement, bien évidemment, que l'essentiel des femmes soit dotée d'une grande force et d'un grand courage...

(2) Dans le cas de l'homosexualité, l'un des partenaires est bien souvent associé à la puissance et l'autre à la grâce bien que les deux puissent évidemment réunir ces deux attributs(3)...

(3) Certes, certains êtres parviennent à réunir en eux-mêmes la puissance et la grâce. Mais tous aspirent néanmoins à trouver l'amour... Sans compter, bien sûr, que la puissance et la grâce finissent toujours, tôt ou tard, par se flétrir. Et par perdre, au fil des années, de leur superbe...

La puissance et la grâce évoquent aussi très naturellement des caractéristique divines. Des attributs de Dieu qui est aussi le plus haut symbole de l'Amour. Que pouvons-nous donc conclure de cette triple association ? Il serait loisible de penser que les êtres qui ressentent inconsciemment leur incomplétude cherchent d'une façon malhabile à réunir cette divine triade : puissance, grâce et amour avec les « moyens phénoménaux » à leur disposition. Sans être en mesure encore de comprendre – et de sentir – que Dieu (l'espace impersonnel, la conscience, la présence – et qu'importe les termes !) les réunit d'une parfaite façon. Et moins encore capables, bien sûr, de découvrir qu'ils sont profondément cet espace – ce regard – divin...

Cette hypothèse semble à la fois plus judicieuse et plus profonde pour essayer d'éclaircir – et de comprendre – l’irrésistible attrait et l'impérieux besoin de rapprochement entre les êtres que les triviales explications habituelles sur les besoins et le plaisir sexuels et affectifs et les nécessités de perpétuation de l'espèce... A dire vrai, sans doute que ces deux voies sont complémentaires car l'homme porte en lui, et parfois de façon inextricable, une indéniable composante animale et une incontestable dimension métaphysique et spirituelle...

Quoi qu'il en soit, il semble évident que l'aspiration humaine à l'Absolu et à la complétude – son épectase* – doive passer, en général, par une phase phénoménale (un peu gauche et triviale) à travers le couple – ou du moins, la recherche d'un partenaire – avec son lot habituel de déceptions et de désillusions ordinaires avant de pouvoir se tourner de façon plus juste vers la voie spirituelle conduisant à Dieu. A l'absolue complétude. Et à la triade Amour, grâce et puissance réellement vécue et ressentie...

* Qui signifie aussi, comme une sorte de petit clin d’œil divin, mourir pendant l'orgasme...

En vérité, tout geste – tout acte – et, bien sûr, tout désir – est une recherche de Dieu. Mais l'essentiel des hommes n'en a conscience...

 

 

On cherche d'abord l'amour (et l'attention), la beauté, la joie et la paix (et parfois l'intelligence), dans le monde. Et dans la vie. Dans les mille activités – et les mille aspects et dimensions – du monde. Et de la vie. Puis, déçu (oui, forcément déçu car ils ne s'y trouvent pas – en tout cas jamais de façon pleine et durable...), on se tourne vers soi*. Débute alors un cheminement – un long cheminement – vers sa nature profonde qui débouche, dès que la rencontre est réelle et effective, sur l'espace divin d'Amour et de paix – sur un regard d’accueil infini – et infiniment lucide et clairvoyant – et pleinement comblé qui s'habille – autant qu'il habille le monde et la vie – de joie, de beauté et d'intelligence.

* Et ceux qui ne peuvent encore se tourner vers eux-mêmes ne sont pas suffisamment mûrs : ils se satisfont – ou se contentent – des petits bouts ou des maigres parcelles d'amour, de beauté, de joie, de paix et d'intelligence(1) qu'ils ont réussi tant bien que mal à dégoter dans la vie et le monde...

(1) Et plus exactement, ce qui semble correspondre plus ou moins à leurs représentations de l'amour, de la beauté, de la joie, de la paix et de l'intelligence...

 

 

La vie humaine n'est, en vérité, qu'une longue série de gestes, d'attentes et de soucis quotidiens appréhendés – et éprouvés – avec un esprit de routine, de crainte et d'exaspération. Parsemée, ici et là, de repos et de menus plaisirs. Et émaillée d'événements dévastateurs ou porteurs de grandes souffrances.

Lorsque la vie n'est pas habitée, elle semble, le plus souvent, ennuyeuse, insipide et douloureuse. Si angoissante que les hommes se jettent avec avidité sur tout ce qui peut les rassurer : idées, représentations, argent, possessions, systèmes de sécurité et de protection, partenaire, entourage et environnement rassurants etc etc. Et si peu exaltante qu'ils se jettent avec ardeur sur tout ce qui permet d'y échapper : rêve, imaginaire, jeux, travail, divertissements, sexe, fête, alcool, drogue etc etc. A seule fin de se convaincre que la vie – leur vie – n'est au fond pas si misérable et malheureuse. Et qu'elle vaut, malgré tout, la peine d'être vécue...

Mais quelle indigence – et quelle triste résignation – que de s'en contenter ! Et de s'y complaire ! Comme si l'essentiel des hommes n'était encore suffisamment mûr ou expérimenté pour être en mesure de s'interroger et de ressentir la possibilité d'une autre perspective... Ah ! Quel malheur ! Ah ! Si les hommes savaient...

Mais comment leur parler de la joie, de la paix et de l'Amour ? Comment leur parler de Dieu, de l'infini et de l'Absolu ? L'immense majorité n'a aucune envie d'être entretenue ou « instruite » sur ce genre de thématiques, si ennuyeuses, si inutiles et si inintéressantes à ses yeux. Si éloignées de ses préoccupations quotidiennes et de ses aspirations. Les hommes n'ont aucune envie qu'on les invite à s'interroger. Et à se questionner. Aucune envie d'apprendre. Aucune envie d'entendre qu'une autre perspective est possible. Aucune envie de remettre en cause ou en question leur existence. Et leurs choix de vie*. Aucune envie qu'on remue le couteau dans la plaie en exposant au grand jour leur indigence et leur misère...

* Qui n'en sont pas, bien évidemment... Ils ne sont que la résultante de conditionnements, de formatages et d'apprentissages...

Il n'y a donc rien à faire pour les hommes. Rien à faire pour les aider. Et leur être utile. Sinon patienter sagement – et tranquillement – dans son coin. Et être présent – et les écouter – lorsqu'ils en éprouvent le besoin... Et attendre sans impatience que les esprits – et les cœurs – s'éveillent. Qu'ils apprennent à s’éveiller à leur propre rythme. Alors peut-être pourrons-nous modestement – très modestement – contribuer à les encourager et à les soutenir. A les accompagner vers plus d'amour, d'intelligence et de lumière. Il n'y a d'autre possibilité... Aussi convient-il d'être patient et bienveillant à leur égard. Voilà tout ce que nous pouvons faire pour eux...

 

 

La nuit, le monde se repose du bruit et de la fureur des hommes. Les arbres respirent (à pleines branches). Les animaux sommeillent (à leur aise) dans leur tanière ou dans leur abri. Les pierres et les montagnes veillent tranquillement. Les rivières s'écoulent avec une lenteur majestueuse. L'eau qui roule sur les galets offre son chant – et ses doux clapotis – à la nuit. Les océans bercent la terre et ses rivages. Et la lune prête à tous sa lumière douce et tamisée. Celui qui sait lire sur le visage du monde, y découvre une paix profonde. Et une confiance inébranlable. Et dans cette confiance, on peut déceler un immense espoir. Celui de voir, un jour, les hommes devenir sages et silencieux. Le monde sait qu'il se transformerait alors en une magnifique terre de paix. En un incroyable paradis...

 

 

En passant devant le cimetière d'un village que j'ai habité il y a quelques années, je suis effaré par l'ampleur du changement. Une kyrielle de nouvelles maisons et une flopée de nouvelles tombes sur des espaces qui ne leur étaient pas dévolus autrefois. Quel idiot ! Comment peut-on oublier qu'en ce monde, les êtres n'en finissent jamais de naître... et de mourir...

 

 

Le monde. Un chemin. Des pas sur le chemin. Un sac. Un carnet. Un œil et un cœur qui apprennent au fil des pas à se faire regard. Des notes à foison. Et une œuvre modeste qui se dessine au fil des chemins. Voilà résumée l'essentiel de mon existence.

 

 

Il y a très longtemps que je n'étais revenu en ces lieux isolés et enchanteurs où les à-pics et les falaises de calcaire offrent aux collines une beauté supplémentaire. Comme un supplément d'âme et de grâce. Et au cœur de ce lieu superbe affleurent à la mémoire quelques souvenirs sans importance...

 

 

A mes yeux, il y a chez les hommes deux choses particulièrement difficiles à accepter. Et à aimer. En premier lieu, la façon dont ils se servent – et tirent profit – de leurs capacités cognitives. Au détriment de leurs congénères, des autres espèces et de l'ensemble de l'Existant terrestre. L'immense majorité des êtres humains se comporte en créatures instinctuelles. En prédateurs sans conscience. En second lieu, leur maladive propension à revêtir de multiples déguisements pour cacher – recouvrir ou travestir – leur nature profonde (mensonges, non-dits, prétextes, subterfuges, mauvaise foi, dénis, masques, costumes, maquillages* etc etc). Tous les autres êtres vivants (les animaux et les végétaux en particulier...) ne dissimulent jamais leur nature véritable. Ils n'en ont évidemment ni la capacité ni la possibilité... Aussi sont-ils toujours ce qu'ils sont. Passant ainsi la totalité de leur existence sans jamais trahir – ou déformer – les lois naturelles qui les régissent. Notons cependant que s'ils étaient dotés d'un psychisme semblable à celui des hommes, ils se comporteraient sans aucun doute exactement comme leurs frères à deux pattes.

* Au sens réel mais, aussi et surtout, au sens figuré...

Bien que les instincts humains – et leurs modes d'expression – se soient légèrement transformés au fil de l'histoire de l'humanité et que quelques progrès aient été réalisés en matière de conscience – en matière d'Amour et d'intelligence – à travers l'émergence très progressive de valeurs comme le respect, l'équité, le partage désintéressé, l'égalité, la fraternité et la prise en considération des plus faibles et des minorités, les deux dimensions du comportement humain précédemment citées attestent avec force (et entre autres éléments...) de la profonde animalité encore présente chez les hommes. Et révèlent avec évidence qu'ils se trouvent encore à un stade évolutif peu avancé : à la frontière entre l'instinct animal et la conscience. Il semble pertinent de penser que lorsqu'ils auront atteint* un degré de développement plus élevé, leur inclination ancestrale à la domination, à l'exploitation et au déguisement s'estompera, déclinera et disparaîtra naturellement. Et sans ces odieuses caractéristiques, il nous sera plus aisé – beaucoup plus aisé – d'accepter les hommes. Et de les aimer pleinement... Et malgré notre patience, nous ne verrons sans doute jamais cette transformation se réaliser en cette vie... Tant pis...

* Les hommes ou leurs descendants (voire même une autre espèce encore inexistante aujourd'hui)...

 

 

Il est surprenant de constater que la nature a tendance à réveiller le poète qui sommeille en nous. Un (très) modeste poète, bien sûr. Et que les hommes nous donnent plutôt l'occasion de nous faire philosophe. Un (très) humble philosophe, évidemment. Nous savons, avec certitude, de quel côté penche notre esprit. Mais nous voyons notre cœur balancer... Entre les deux, il ne peut choisir... Aussi nous le laissons s'exprimer à sa guise au fil des pas et des paysages. Tantôt plongé au cœur de la nature sauvage pour se faire l'écho du ciel, des collines et des forêts*, tantôt à proximité du monde pour esquisser quelques traits de l'espèce humaine – et dessiner quelques croquis de la société que les hommes ont bâtie...

* Et de tous leurs habitants...

 

 

Il n'y a jamais – ou quasiment jamais – chez les hommes (et dans la communauté humaine) le moindre signe de présence, d'écoute et d'attention réelles et profondes. Il y a parfois une forme de gentillesse ou d'amabilité apparente. Mais le plus souvent, il n'y a qu'une mentalisation excessive et autocentrée, de l'indifférence et de l'insensibilité. Ou pire, du mécontentement ou de l'agressivité... Aussi comment se résoudre à vivre parmi les hommes ou à habiter en leur compagnie ? Et comment même se réjouir de les fréquenter ? Excepté celui qui cherche dans le monde (humain) un quelconque moyen de satisfaire ses besoins et ses désirs, qui peut décemment y trouver quelque agrément ?

Au cœur de la nature – parmi les arbres, les pierres, les animaux, les herbes et les nuages – et en sa propre compagnie – jamais on ne se trouve happé, interpellé, alpagué, malmené ou agressé(1) comme dans la société humaine. Et si le cœur et l'esprit y consentent, le silence s'habite pleinement. Sans effort. Et sans risque de le voir entamé(2) à la moindre occasion. Et à la moindre rencontre...

(1) Excepté évidemment dans un environnement naturel hostile et/ou totalement sauvage où une flore envahissante ou étouffante et/ou une faune (en nombre) particulièrement excitée ou dangereuse laisse(nt) parfois peu de répit...

(2) Elément qui atteste sans doute de la fragilité et de l'instabilité avec lesquelles nous habitons le silence aujourd'hui...

 

 

Notre pratique du bâton martial se réalise sans maître ni instructeur. A l'abri des regards. Au cœur de la nature. Ou parfois dans notre modeste masure. Avec l'esprit du novice offrant ses gestes – et l'énergie des mouvements – au ciel et à la terre. Laissant le corps et le bâton trouver leur point d'équilibre. Et écoutant les ressentis et leurs directives. Toute notre existence – nous le savons – sera un long apprentissage pour parvenir à une parfaite unité avec le bâton. Pour devenir l'exact point de jonction, à la fois dense, vide et ouvert, entre la terre et le ciel...

 

 

Chacun avance vers son destin qui se dessine au fil des pas. Qui construit, en apparence, une existence. Mais qui offre surtout la possibilité de poursuivre son cheminement vers la compréhension...

 

 

La plupart des hommes ont le sentiment qu'il leur faut, selon leur propre expression, « avancer dans la vie ». Construire une existence. Et tous s'y emploient. Passant de désir en satisfaction* et de satisfaction en désir*. Pour eux, « avancer » signifie poursuivre indéfiniment la chaîne des rêves et des aspirations. Ils ont tort. Et ils ont raison. Tort parce qu'aller ainsi de désir en satisfaction et de satisfaction en désir ne constitue qu'une forme de gesticulation autour d'un seul et même point : soi-même. Et raison parce qu'au bout de ce long chapelet de désirs réside l'ultime désir : l'aspiration à la compréhension qui mène jusqu'à l'extinction de tout chemin personnel...

* Ou de désir en déception et de déception en désir jusqu'à la totale et parfaite désillusion...

 

 

Regardes-tu autant le ciel que la terre ? Ou tes yeux ne peuvent-ils se fixer que sur ce qui tourne – et gravite – autour de toi ?

 

 

Je n'ai jamais réellement compris* pourquoi il y avait tant de pragmatisme et de futilité dans la vie des hommes. Et si peu de profondeur, de consistance et de métaphysique. Comme si Dieu en avait seulement pourvu quelques-uns qui, bien souvent, vivent – et agissent – comme de modestes – et acharnés – éclaireurs. Comme d'humbles lanternes dans l'obscurité du monde. Et chez eux, l'aspiration à l'Absolu est si puissante – et si totale – qu'elle rivalise non seulement, sans fléchir ni rougir, avec le prosaïsme myope et un peu crasse ambiant. Mais supplante aussi avec maestria toute la niaiserie et l'utilitarisme animal de l'humanité.

* Ou que trop compris la dimension essentiellement animale de l'être humain...

 

 

Chacun porte déjà en lui, à la naissance, l'existence qui sera la sienne. Celle qu'il devra vivre. Nul ne sait comment celle-ci adviendra ou s'actualisera. Mais rien ni personne ne pourra s'y opposer. Sorte d'impedimenta karmiques* qui se manifesteront quel que soit l'environnement. Toujours les circonstances s'imbriqueront pour qu'ils éclosent, s'ouvrent et s'épanouissent afin que ce qui doit être vécu et compris le soit de façon réelle et effective...

* Ce que d'aucuns pourraient appeler ainsi...

 

 

Toute intentionnalité est un encombrement... Ni désir. Ni intention. Ni projet. Ni idée. Ni repère. Seulement ce qui est maintenant...

 

 

Tout peut arriver. Tout peut toujours arriver. Combien d'hommes l'oublient-ils en menant leur existence quotidienne ? Le mental a beau anticiper explicitement ou intuitivement les événements et les situations, il arrive toujours ce qu'il arrive. Souvent, les circonstances corroborent les projections psychiques et donnent aux hommes le sentiment qu'il ne se passe rien(1) ou que la vie se déroule sans accroc selon leurs attentes, leurs désirs et leurs aspirations. Comme une impression de routine (ou de programme) bien huilé(e). D'autres fois, elles contrarient partiellement ou totalement les anticipations. Et provoquent alors, en général, une forme de désappointement, de tracas ou d'irritation. Quant aux circonstances totalement inattendues – ou imprévisibles –, soit elles se montrent favorables (favorables à ceux qui les vivent) et elles suscitent alors une grande joie, soit elles revêtent un caractère funeste ou douloureux, et deviennent, aux yeux des hommes, source de plus ou moins grandes souffrances(2). Mais quels que soient les événements, n'oublions jamais que les circonstances ne sont que ce qu'elles sont. Et qu'elles amènent toujours avec elles les situations qu'il nous est nécessaire de vivre – et le lot d'émotions et de sentiments qu'il nous faut éprouver... pour que se réalise la compréhension. Il n'y a d'autre voie pour que celle-ci s'intègre profondément – et de façon indéracinable – à notre être...

(1) Révélant une forme d'opacité perceptive, sensible et sensorielle chez la plu-part d'entre-eux...

(2) En vérité, ce ne sont pas les circonstances qui sont à l'origine de cette souffrance mais le décalage entre les événements et les anticipations projectives du psychisme... ou entre les événements et nos représentations mentales (idées sur nous-mêmes, sur les êtres qui nous entourent, sur la vie et sur le monde, attachements à soi, à la vie, aux formes et aux individus, à nos repères, à nos habitudes, à nos référentiels, etc etc.)...

 

 

Il est courant que les hommes fassent la fête avec leur famille et/ou leurs amis. Ils se réunissent souvent en fin de semaine pour oublier leurs soucis et noyer leur ennui et leur misère dans l'alcool et la musique. Nous, la fête, nous la faisons chaque jour au cœur de la nature – et parfois même à chaque instant de notre course lente dans les collines – avec tous nos frères : animaux, arbres, nuages, herbes et fleurs sauvages. Célébrant avec lucidité – et en silence – la joie et l'innocence d'être pleinement unis dans le regard de Dieu...

 

 

Cette existence nous donne l'occasion de vivre et d'éprouver – de l'intérieur – la vie d'un homme. Son fonctionnement, sa perception, ses ressentis, ses émotions, ses sentiments, son potentiel et ses limites. Et lorsque le regard se glisse dans la peau du personnage, on sent comme un jeu et une distance. Un formidable jeu et une incroyable distance. Et aussi une certaine forme de malice et de jubilation. Comme si ce glissement n'était qu'un jeu provisoire – très provisoire. A la fois essentiel et totalement sans importance. Ne constituant que le modeste et bref épisode d'une longue série commencée de façon si ancienne qu'on ne peut – et ne pourrait même si l'on s’attelait à remonter le fil de la mémoire... – se souvenir de son origine. Une longue série qui connaîtra encore, de toute évidence, de très nombreuses aventures et péripéties. Toutes aussi agréables et douloureuses(1). Toutes aussi passionnantes et ennuyeuses(1). Une longue série sans commencement ni fin...

Ce sentiment – ou cette impression – ne relève pas d'une simple histoire de karma et de réincarnation(2) « personnels » vécue sur le plan individuel mais s'apparente bien davantage à une sorte de jeu de la conscience impersonnelle (tenant à la fois de la plaisanterie et de l'amusement) qui ne manque jamais l'occasion de se glisser, ici et là, maintes et maintes fois dans maintes et maintes formes afin de vivre pendant quelques temps dans la peau de chacune d'elles. Et pouvoir ainsi goûter de l'intérieur toutes les dimensions de son existence. Et les innombrables possibilités qui lui sont offertes...

Ainsi la conscience poursuit indéfiniment le jeu – l'incroyable jeu – qu'elle a, elle même, instauré. Un jeu complètement fou en vérité – compte tenu de son ampleur et de la complexité de son organisation mais également parce que ce dernier semble s'inscrire à la fois dans une perspective temporelle (lorsqu'on l'appréhende mentalement) et dans la globalité des formes et des existences à un même instant(3)...

(1) Variant selon les formes. Et les circonstances de leur existence...

(2) Ou, plus exactement, de transmigration...

(3) Puisqu'il semblerait qu'il en soit ainsi pour chacune des formes à un moment donné mais aussi lorsque l'on appréhende chaque forme dans une perspective temporelle avec ses incessantes transformations et recombinaisons, vie après vie...

Les êtres incarnent leur personnage avec tant de vérité – chacun tient son rôle avec une telle sincérité – que nul ne se souvient – et ne peut se souvenir – qu'il ne s'agit en réalité que d'un jeu. Chacun s'est identifié de façon si profonde et si complète à son personnage qu'il est intimement persuadé d'être ce personnage. Et que ce dernier existe bel et bien. Ce jeu et ces rôles semblent si réels et si tangibles que l'ensemble des acteurs et des participants offrent une incroyable authenticité au vaste théâtre vivant – permanent et grandeur nature – que constitue le monde. Chacun est si profondément inscrit – et engagé – dans sa posture et son emploi et les scènes se rejouent tant de fois (à l'identique ou avec quelques variations) que personne n'est plus capable de se rendre compte qu'il n'est qu'un personnage provisoire joué par la conscience impersonnelle dans une pièce sans commencement ni fin aux ressorts à la fois comiques et tragiques, réalisée, interprétée et mise en scène de façon magistrale par ses propres soins sur la grande scène du monde. Comme si la conscience impersonnelle interprétant tous ces rôles et tous ces personnages – et entrant dans la peau de chacun avec tant de sérieux et de justesse – avait fini, elle-même, par croire qu'elle était réellement chacun d'eux. Comme si tous ces jeux et ces rôles lui avaient fait oublier qu'elle était l'unique chef d'orchestre, l'unique acteur et l'unique spectateur de cette grande et vaste farce...

 

 

Avec l'été revient le chant des grillons et des cigales. Le lancinant crissement de leurs ailes* infatigables...

* Et de leurs cymbales...

 

 

Vivre en couple, au sein d'un collectif, d'une communauté ou de la société n'offre des avantages qu'à ceux qui ne savent vivre pleinement leur solitude. Qui ne savent (encore) apprécier les joies de l'indépendance et de la liberté(1). Qui ne peuvent se passer des autres pour satisfaire un certain nombre (et parfois même un très grand nombre) de leurs besoins et de leurs désirs. Et qui doivent en contre partie consacrer beaucoup d'énergie – et une large part de leur journée – à gérer des situations et à résoudre des problèmes qui n'existeraient pas s'ils vivaient seuls. Et de façon autonome... Bref la crainte – et la méconnaissance – des individus à l'égard de la solitude sont si grandes qu'ils sont prêts, pour subvenir à leurs attentes, à supporter de nombreux soucis et tracas, à endurer d'interminables tergiversations et de stériles conversations et à vivre d'innombrables différends et conflits – bref à payer un lourd tribut – pour ne bénéficier, bien souvent, que d'une médiocre compagnie et se voir illusoirement – ou très partiellement – satisfaits dans leurs désirs et leurs attentes à l'égard des autres(2). Cette attitude – et cette posture – semblent totalement insensées(3) mais c'est (pourtant) ainsi que vivent les hommes...

(1) Liberté phénoménale, bien sûr...

(2) Et ceux qui voudraient nous chanter le mauvais refrain de l'amour des autres et de son prochain dans les relations humaines et la nécessité du « vivre ensemble » manquent sérieusement d’honnêteté et de lucidité... On les invitera donc à regarder avec plus d'attention, de profondeur et de circonspection les rapports humains dans la société où ils vivent et les raisons qui les poussent, eux-mêmes, à vivre en société et à rechercher la compagnie des autres... Ils ignorent sans doute – ou feignent d'ignorer – que l'Amour réel – et effectif – ne souffre le moindre désir ni la moindre attente à l'égard d'Autrui. Sinon ce n'est qu'un déguisement hypocrite. Une stratégie égotique qui prend les habits de l'Amour et de l'altruisme... mais qui n'en a, assurément, ni le goût ni l'ampleur...

(3) Mais ne jetons pas l'anathème trop hâtivement sur cette caractéristique humaine car c'est peut-être en partie grâce à cette aspiration à être ensemble (et avec les autres) et à l'insatisfaction relationnelle que se développe – que peut se développer – le besoin spirituel. L'appel vers Dieu. Et vers l'Amour... Qui permet alors d'aimer les êtres – et les hommes – inconditionnellement. Et sans la moindre attente...

 

 

[Fragments-hommage à Yves Bonnefoy, mort le 1er juillet 2016]

 

Dans les limbes métaphysiques de la parole, le silence, attentif, écoute. Jamais ne s'égare dans le bruit et les mots. Le poème peut alors jaillir. Rassuré. L'audience sera infinie...

 

 

L’œuvre magistrale du monde que le poète, d'une pichenette, fait vaciller. Non pour édifier le néant en certitude. Mais pour que se goûte le silence. La joie silencieuse de l'être.

 

 

Spectacles exsangues pour les foules ensommeillées et ahuries. Pour abrutir encore davantage leurs velléités de questionnement. Les laisser s'égarer dans le labyrinthe étroit du monde où elles appellent, agonisantes et à bout de force, des lèvres et un visage qu'elles ne verront jamais.

 

 

Bonimenteurs de malheur avec leurs grimaces et leurs discours trisomiques* acclamés par une foule décérébrée. Et léthargique.

* Ne vous méprenez pas sur l'emploi de ce terme, nous éprouvons une tendresse toute particulière pour les trisomiques (les trisomiques 21) que nous connaissons relativement bien pour en avoir fréquenté quelques-uns avec beaucoup de bonheur et d'assiduité... Et ils ont – et ils le savent bien – toute mon affection. Et tout mon respect...

 

 

Un soupir sur l'estrade. Et tu prendras la fuite vers le désert où le visage des hommes brille du sourire des anges. Et tu verras, dans leurs yeux profonds, Dieu qui attend.

 

 

Y a-t-il un homme sur cette terre dont le sourire émerveillerait le silence ?

 

 

La condamnation des hommes que Dieu récuse. Et qu'il porte en son sein comme des oisillons blessés. Et affamés de son visage.

 

 

La grande chimère des heures qui fait tourner les aiguilles de l'horloge. Et les rêves et les espoirs accrochés au tic-tac de la pendule auquel les hommes se pendent.

 

 

A la corde de l'instant, je m'élance. Et le temps – et les hommes – chavirent. Balayés par la lame tranchante des pas qui résonnent dans l'infini. Et la main de Dieu qui soulève les routes et les montagnes. Offrant au monde le vide. Et son éternité.

 

 

Epouse le ciel. Embrasse la terre. Offre tes lèvres à l'aube. Et tes paroles à l'innocence. Tends la joue aux malices. Et le baiser des anges te sera donné. Dieu se tiendra dans leurs ailes fragiles. Ne lui demande rien. Ne lui pose aucune question. Agenouille-toi en silence. Et tes interrogations tomberont en cendres. Et avec il recouvrira les chemins du monde. Tous les chemins du monde où marchent – et se questionnent – les hommes. Les vents se chargeront de transmettre leurs messages. Et soulèveront leurs demandes vers les anges qui viendront se poser sur leurs murs. Et qui leur montreront le ciel. Et la terre. Qui les inviteront à offrir leurs lèvres à l'aube. Leurs paroles à l'innocence. Et à tendre la joue aux malices...

 

*

 

Le petit homme replié sur l'infini qui loge en son cœur entend le vent gronder dans la plaine du monde minuscule où vivent les hommes. Et soudain, il a un geste de recul. Comme s'il était actionné par une crainte secrète blottie au fond de ses yeux. La crainte des regards flamboyants – des regards foudroyants – presque éteints pourtant sous les paupières pétrifiées où l'innocence à chaque instant est menacée. Territoire barbare encerclé de remparts barbelés que l'Amour ne peut atteindre. Où l'Amour ne peut éclore. Et une larme coule sur la joue du petit homme que son cœur triste recueille. Et qu'il transforme d'une main délicate en torrent de joie s'écoulant pour moitié sur le territoire infini et pour l'autre dans la plaine du monde minuscule où vivent les hommes. Et l'on entend partout un énorme grondement que les uns associent à un cri d'effroi sinistre et épouvantable et où les autres décèlent une cascade de rires interminable...

 

 

[Hommage à Yves Bonnefoy – suite]

Que le philosophe et le poète* sont seuls face au monde. Plongés – tout entiers – dans leur travail silencieux. Dans leur œuvre. Marchant à pas lents vers la présence. Au plus proche d'elle souvent. En son sein même parfois. Pour que jaillisse l'instant sacré – l'instant divin – où les mots peuvent témoigner du silence et de la beauté. De l'innocence et de la joie. Et du chemin – du long chemin – parcouru pour se tenir, humbles, à leurs côtés...

* Et tous les artistes...

 

 

L'acédie monacale correspond, me semble-t-il, à la grande désillusion – à l'immense et douloureux à quoi bon* ? – éprouvé(e) par les chercheurs d'Absolu qui précède le passage vers l'impersonnel. Au seuil de l'ouverture au Divin.

* « A quoi bon chercher ? Et à quoi bon vivre ? » se demande le chercheur, « puisque toutes mes recherches – toutes mes longues recherches obstinées – sont restées totalement infructueuses. Qu'elles ne m'ont mené nulle part. Et que je me retrouve exactement au même point : seul, misérable et ignorant ». Voilà ce que ressent avec force, douleur et impuissance celui qui cherche lorsqu'il se trouve (sans le savoir, bien sûr...) au seuil de la présence...

 

 

Que la consistance habite ton cœur ouvert et vide. Et le regard innocent dilatera l'instant pour y faire entrer toute la profondeur du réel. Que tu pourras goûter avec une intensité inégalable...

 

 

Animaux, maîtres de force et de courage, vos enseignements me bouleversent. Et je me prosterne à vos pattes pour que vous pardonniez l'infamie des hommes...

 

 

Le petit homme, le poète et le philosophe offrent leur cœur au monde. Mais celui-ci passe sans un regard. Cédant parfois – de temps à autre – à une courte halte, curieuse ou intéressée. Mais il ne daigne s'y attarder. Il ne veut – ni ne peut – les fréquenter avec assiduité. Le monde redoute tant la lucidité et l'innocence. Et il se méfie comme de la peste de la profondeur et de la consistance. Il sait, à coup sûr, que le cœur du petit homme – celui du poète et du philosophe – viendraient entacher – et compromettre sérieusementla joyeuse futilité des jours.

 

 

Dans les yeux se conjuguent l'horreur et la gaieté. L'envie et le manque. La perte et l'espérance. Le regard, lui, délivre de toute caractéristique...

 

Publicité
Publicité
10 décembre 2017

Carnet n°78 Le fou des collines qui danse avec son bâton et embrasse le ciel

– Regard, instants, paroles, consignes et bavardages –

Journal / 2016 / L'intégration à la présence

Chaque jour, le fou des collines qui danse avec son bâton et embrasse le ciel marche à petits pas sur les sentiers. Je vois son visage et son sourire. Dieu lui mange les yeux et le cœur. Et à la place, il y pose son regard. Un regard brûlant. Un regard tranchant. Qui fascine et effraye les hommes. Mais aussi un regard infiniment doux et accueillant où les yeux innocents et attentifs voient se refléter leur beauté et leur folie. La figure entière du monde et de Dieu.

 

 

Ouvres-tu les bras aux vents du monde ? Ou restes-tu cloîtré derrière ta clôture ? A quelle race d'homme appartiens-tu ?

 

 

Un matin brumeux dans la plaine. Entends-tu le chant des oiseaux ? Et le vent gronder dans la vallée ? Délaisse un instant ta besogne. Et écoute-les. Mais que tes yeux ne quittent jamais la montagne.

 

 

A qui appartient la terre ? Et qui gouverne le monde ? Peux-tu y répondre ? Ou préfères-tu plonger dans la vie océanique ?

 

 

Es-tu apôtre ? Prophète ? Poète ? Philosophe ? Ou homme de la rue ? Qui que tu sois, sache rester à ta place. Et sache en changer. Ecoute les vents et le ciel qui dessineront ton chemin. Interroge-les souvent. Et laisse la terre guider tes pas. Le ciel sera ton appui. Et ta destination. Ne l'oublie pas, homme !

 

 

De quoi donc est fait le cœur des hommes pour qu'ils tentent ainsi d'évincer Dieu ? Et pour qu'ils s'acharnent – avec tant d'obstination – à vouloir prendre sa place ?

 

 

En cette ère sombre d'orgueil, le soleil ne brille plus ni dans les yeux ni dans les cœurs. La flamme rouge de la prétention a tout envahi. Sache demeurer avec le cœur humble, mon frère...

 

*

 

A mon grand désespoir, mes chiens sont d'incorrigibles chasseurs. Parmi tous les chiens qui m'ont accompagné au cours de mon existence, eux seuls montrent de profonds instincts de chasse. Sans doute parce que l'un et l'autre ont dû se livrer à cette ignoble activité avant que je ne les accueille : le premier a sûrement passé ses jeunes années chez un chasseur, et l'autre s'est probablement résolu à tuer quelques petits rongeurs pour survivre lors des longs mois qu'il a passés à la rue. Et aujourd'hui, l'un et l'autre continuent à aimer flairer des pistes et à courir sans compter après tout animal en fuite. Mais ils ont une préférence toute particulière pour traquer et débusquer les lapins. A chaque promenade, je les vois avec impuissance s'adonner à leur instinctive activité de prédateur. Et dès qu'ils coursent un pauvre lagomorphe inoffensif, à grand renfort de bonds et d'aboiements, je prie pour qu'il leur échappe. Ce qui se produit presque toujours* sauf lorsqu'ils poursuivent un jeune lapereau peu alerte et peu expérimenté ou un vieux lapin malade aux sens émoussés et à la course malhabile. Ce qui, heureusement, n'arrive que très rarement... En quelques années – et à raison d'au moins quatre heures d'escapade quotidienne –, ils n'ont réussi – si j'ose dire – qu'à en tuer trois ou quatre. Et malgré de sévères réprimandes, je ne suis jamais parvenu à les détourner de cet instinct cynégétique. Aussi ai-je fini, malgré moi, par accepter cette inclination naturelle et ancestrale...

* Dans 99,9% des cas.

 

 

Une grande part des activités humaines est liée à l'organisation et au fonctionnement de la société. Et au regroupement massif d'individus. Bon nombre d'activités et de fonctions n'existeraient pas dans une collectivité à taille humaine. Ou dans une communauté de solitaires... Cet élément, comme bien d'autres, en dit long sur la monstruosité d'un système qui, à l'instar de tout organisme, n'aspire qu'à s'étendre et à se développer... Quel degré de promiscuité, de violence, de surveillance et de barbarie faudra-il atteindre pour que les hommes comprennent que le seul « vivre ensemble » juste et viable ne peut se réaliser qu'au sein de communautés modestes et autonomes. Communautés dégagées des contraintes et des conséquences délétères des regroupements de masse qui pourraient dès lors entretenir entre elles des liens fraternels de solidarité, de partage et de coopération. Et au sein desquelles les individus pourraient entretenir des relations saines et équilibrées*...

* Et qui seraient facilitées plus encore si les individus s'inscrivaient dans une perspective spirituelle authentique...

 

*

 

Un Dieu guerrier et sans joie ? Un Dieu de pénitence et de flagellation ? Ah ! Que les hommes ont l'esprit tordu (et retors) pour inventer un Dieu en mesure de légitimer leurs instincts et leur ignorance...

Dieu aurait, paraît-il, créé l'homme à son image. Fadaises* sans aucun doute. Le Divin a créé le monde (la matière) et le vivant (les êtres) en respectant les règles et les lois qui régissent l'énergie. Et en composant avec l'ensemble de ses caractéristiques et de ses potentialités. En revanche, l'homme, lui, a créé un Dieu à son image. Un faux Dieu – une image erronée et corrompue – pour les fanatiques, les idolâtres et les croyants ignares...

* Fadaises anthropocentriques et anthropomorphiques inversées...

 

*

 

Nuages profonds du ciel qui résonnent en ton cœur. Ne crains de marcher vers l'averse, homme ! Sois digne sous la pluie. Recueille-la d'une main généreuse.

 

 

Marche lente au son du koto parmi les pins altiers de la forêt. Les insectes dansent autour de nous. Avec la caresse du soleil sur les visages.

 

 

Les guerriers s'approchent. Mais les gardiens du temple veillent. Jamais l'Amour ne sera conquis par la force.

 

 

Une extase dans la brume. Comment est-ce possible ? Le cœur est ouvert. Simplement ouvert.

Au cœur ouvert, l'innocence. La joie des pas dans l'obscurité du monde.

 

 

La nuit succède au jour sans intention. Elle répète inlassablement le rythme qui lui est familier. Et le jour n'en sait pas davantage. Seul le soleil connaît leur secret...

 

 

La mélodie du vent dans les arbres. Et la paix du cœur qui accompagne l'harmonie des accords. Parfaite saison pour l'âme fidèle.

 

 

La magie des bois dans la lumière. Qui donc éclaire le monde ? Celui qui ouvre – qui a su ouvrir – les yeux du cœur. Et le regard qui y pénètre devient alors le magicien des couleurs.

 

 

Le matin, gestes et pas de l'aurore. Le soir, gestes et pas du crépuscule. Entre, gestes et pas du jour. Gestes et pas du cœur ouvert que l'âme habille d'innocence. Simplicité du quotidien dans la beauté parfaite des jours.

 

 

Le son profond de la forêt. Et de la flûte de bambou. L'âme et le cœur caressés par l'éternité.

 

 

Cœur ouvert et innocent. Et le Divin apparaît. Et dans les gestes se reflètent toute la pureté – et toute la beauté – du regard.

 

 

Vent d'automne au printemps. Et les mains applaudissent. Le cœur s'ouvre aux saisons changeantes.

 

*

 

Simplicité du geste. Consistance, légèreté et profondeur. Reflet du silence où le Divin danse et rayonne.

 

 

Que ton cœur accueille le silence et la danse de Dieu. Et la grâce te sera offerte.

 

 

La vérité qui s'éprouve et le Divin qui s'habite ouvrent l'âme à l'infini. Et le cœur à la beauté. Il n'y a de plus grande joie pour un homme.

 

 

Comment offrir au monde – et aux hommes – le Divin ? Être et se faire présence (sa présence) à chaque instant. Il n'y a de voie plus directe. Et magistrale. Même les yeux naïfs et les cœurs encombrés sauront le reconnaître...

 

 

Lorsque le cœur et l'âme savent se faire silence et profondeur, grâce et légèreté, présence et tendresse, Dieu nous habite. Sans conteste. Et la beauté, la justesse et l'Amour accompagnent nos gestes aussi sûrement que le navire trace un sillage dans les eaux.

 

*

 

Le théâtre est désert. Personne sur la scène. Nul spectateur dans la salle. Pas même un petit strapontin occupé. Et l'envers du décor n'est que vide. Et néant. Aucun acteur dans les coulisses ni dans les loges. Le monde est devenu un grand désert. Les figurants, eux aussi, ont déserté la place. Et je m'assois seul parmi les arbres silencieux. Et les oiseaux dont les chants se sont tus. Pas un nuage dans le ciel sombre du soir. Comme si la vie s'était arrêtée. Trop lasse de poursuivre sa rude besogne. Le temps même semble fatigué de tourner inlassablement. On dirait qu'il s'est figé. Et Dieu perché sur quelque sommet me regarde en souriant. Et son silence m'invite à sourire. Nos yeux se croisent. Et je devine sa joie. Le monde a répondu à son invitation. Et à son silence. Puis le monde sort de son sommeil. De sa douce léthargie. Le théâtre se remplit, les acteurs reprennent leur place sur la scène, les spectateurs regagnent la salle. Les coulisses et les loges retrouvent leur fébrilité. Les aiguilles des horloges se remettent à trotter de leurs petits pas mécaniques. La terre de nouveau accueille le chant des oiseaux. Le ciel de nouveau accueille la course des nuages. Le monde renaît. Le monde revit. Et je vois Dieu qui nous regarde en souriant. Et ce sourire m'invite à chanter son silence et sa joie. Je quitte le théâtre. Je quitte les acteurs, les figurants et les spectateurs. Je quitte le monde pour suivre la voix de Dieu. Et rejoindre sa joie et son silence.

 

*

 

Lorsque le regard habite le geste, Dieu retrouve – et emplit – l'espace du monde pour un instant. Celui dont les gestes sont toujours pleinement habités est l'hôte permanent du Divin.

Il n'y a que le regard* qui différencie le sage du commun.

* La présence du regard...

 

 

Des gestes simples et habités dans un quotidien simple et habité. L'homme ne peut offrir au monde de bien plus précieux. Et Dieu n'en demande pas davantage...

 

 

Le cœur profondément solitaire. Lorsque l'esprit – et le corps – ne cherchent plus de compagnie dans le monde, Dieu peut s'inviter. Et offrir à l'homme ce qu'il cherchait avant de célébrer leurs noces. Mais en dépit de cette union, il peut arriver que l'esprit (et parfois même le corps) montre de temps à autre quelques désirs pour la tendresse que le monde pourrait lui dispenser. Dieu pourtant pourvoit à cette demande d'Amour mais l'homme – pris dans ses anciens mécanismes – n'est plus en mesure de le ressentir... C'est souvent à cette occasion que la sensibilité et la sensorialité se font plus vives. Pour que l'homme puisse à nouveau éprouver avec intensité et acuité la puissance de l'Amour – et toute la tendresse du Divin...

 

 

Je t'en prie, ne passe pas chacune des minutes de ton existence à tirer plaisir, parti ou bénéfice de la vie et du monde. Tu n'es pas sur terre pour savourer et profiter sans comprendre. Regarde-toi profondément. Regarde la vie et le monde profondément. Et essaie de comprendre ce que tu es. Et ce qu'ils sont. L'identité de l'homme tient toute entière dans cette compréhension fondamentale. Ne la néglige pas, ne la corromps pas, ne l'abandonne pas. Crois-moi, après le temps de la quête et de l'apprentissage viendra celui de la compréhension. Et avec la compréhension viendront la joie, le jeu et la célébration. Puis, plus tard encore, pourront naître la paix et le rayonnement. Il appartient à l'homme de comprendre. Non de vivre comme un automate sans substance animé par le confort et le plaisir ou comme un animal qui n'use de ses capacités cognitives que pour dominer et asservir la terre et les êtres de ce monde...

Après la compréhension, sache que l'homme peut incarner cette connaissance. Et qu'il devient enfin capable de faire rayonner l'Amour et l'intelligence. Je t'en prie, trouve l'aspiration et le souffle nécessaire – le souffle métaphysique nécessaire – pour délaisser tes jeux, tes futilités et tes stratagèmes de mammifère instinctuel. Retrouve un peu de dignité envers toi-même, envers les hommes et les êtres qui peuplent la terre. Et fais-toi pleinement homme sinon ton existence – ton existence si précieuse – n'aura sans doute que peu de valeur et d'intérêt...

 

 

Lorsque Dieu t'aura suffisamment comblé d'Amour et de tendresse, tu pourras devenir le canal à travers lequel il pourra offrir cet Amour et cette tendresse au monde. A tous les êtres du monde.

 

 

Lorsque la parole émane du silence – ce qui est presque toujours le cas avec les notes exposées dans ces carnets –, j'ai le sentiment d'être l'émissaire – le très modeste émissaire, il va sans dire... – du Divin. Mais à voir l'indifférence et le manque d'intérêt des hommes à l'égard de notre travail – et la tristesse ou l'agacement que ce mépris peut encore parfois susciter chez moi –, je sens bien que je n'ai ni la grâce ni la puissance de mon maître(1). Ni, bien sûr, sa patience et sa bienveillance. Comme si je n'étais, en vérité, qu'un pauvre petit canal terrestre, malhabile et maladroit, n'ayant pas encore achevé sa croissance et son éducation – et accédé à la maturité – pour être en mesure d'accueillir pleinement ce qui est : la réalité du monde et des êtres. Pas encore assez ouvert et innocent(2) pour se faire l'exact reflet du Divin. Et encore bien trop encombré d'idées et de désirs pour laisser rayonner librement son Amour sans la moindre attente à l'égard des créatures de la terre et du ciel.

(1) Ceci dit, Dieu a toujours suscité peu d'intérêt réel chez les hommes. Et lorsqu'ils se tournent vers lui, beaucoup se jettent à ses pieds comme des croyants infantiles. Seul un nombre infime, hier comme aujourd'hui, a été – et est – en mesure de s'inscrire dans une quête métaphysique profonde. Et un nombre bien moindre encore a été – ou est – capable de s'engager dans un cheminement spirituel authentique*...

* Les hommes n'aspirent qu'aux belles histoires. A ce qu'on leur raconte de belles histoires. Pour les aider à rêver et qu'on leur donne la force d'espérer une vie meilleure. Lorsqu'il s'agit de faire face au réel, d'affronter ses peurs, son inconfort, ses désirs et ses frustrations et de comprendre ses idées, ses représentations et ses émotions, il n'y a plus personne...

(2) Avec des encombrements terrestres (et, en particulier, psychiques) qui bloquent, limitent et déforment l'Amour, la beauté et l'innocence du Divin...

 

*

 

La conversion du cœur – transformer réellement les yeux humains(1) en regard divin(2) de façon profonde, stable et permanente(3) – est chez l'homme l'exercice – et l'apprentissage – le plus long, le plus complexe et le plus délicat que je connaisse...

(1) Le regard personnel égotique.

(2) En regard impersonnel.

(3) Voire de façon complète et définitive. Mais le regard peut-il réellement s'habiter de façon définitive ? Pour l'heure, il me semble plus juste de dire que le regard peut s'habiter à chaque instant – d'instant en instant – mais sans doute que l'accès au regard peut devenir plus aisé et permanent...

 

 

Les hommes vivent comme si les êtres qui composent leur entourage, les objets qui les environnent et ce qu'ils estiment avoir édifié ou acquis étaient dans l'ordre des choses. Comme si ces êtres, ces objets et cet environnement étaient des composantes indéfectibles et éternelles de leur existence qui ne pourront jamais leur faire défaut et sur lesquelles ils pourront toujours s'appuyer... A leurs yeux, ces éléments font partie intégrante de leur existence. Et ils ne peuvent imaginer leur vie sans eux et n'osent pas même envisager ce qu'elle deviendrait s'ils venaient à disparaître. Cet aspect existentiel leur semble sans doute trop douloureux, insécure et anxiogène pour qu'ils osent y songer au quotidien.

Ils manquent à ce point de sensibilité et de compréhension qu'ils ignorent (ou s'échinent à ne pas admettre...) que rien n'est durable et certain. Que rien n'est éternel. Que rien ne leur appartient (pas même ce qu'ils appellent « leur existence »). Que l'ordre des choses n'existe pas (excepté dans leur psychisme). Et qu'ils ne peuvent, en définitive, prendre appui et compter sur rien ni personne.

Avec un peu de maturité, leur cœur s'emplirait pourtant d'humilité devant leur vulnérabilité et la précarité de l'existence. Avec un peu de maturité, ils ressentiraient aussi gratitude et tendresse pour tout ce qui leur est offert : les êtres qui vivent autour d'eux, les objets et les choses qui les entourent, les avantages et les privilèges dont ils bénéficient... Et ils cesseraient de se comporter comme des êtres ingrats et insensibles, désabusés et capricieux dont tous les actes sont régis par la crainte inconsciente de tout perdre... et de se retrouver seuls, nus et démunis... Posture qui constitue en vérité – qu'on le veuille ou non – qu'on le craigne ou non – la nature profonde des êtres de ce monde*...

* Les animaux, eux, le savent bien – et en ont même profondément conscience – puisqu'ils vivent ainsi...

 

 

Tant que les hommes continueront de fanfaronner et de jouer les bravaches au lieu de se prosterner avec humilité – avec une profonde et authentique humilité –, le monde ne connaîtra de changements significatifs...

 

 

La solitude, la simplicité, la pauvreté, la précarité et l'absence de titre, de fonction et de place dans le monde (humain) renforcent l'humilité authentique. Et par conséquent, la conversion du cœur.

 

 

Le christ crucifié est un formidable exemple de la parfaite humilité. Mais les hommes – et les chrétiens en particulier – en ont fait à tort l'image d'un martyr et d'un sauveur. Et cette interprétation absurde et erronée continue encore aujourd'hui d'être la source d'un nombre considérable de contre-sens et d'aberrations, alimentant une idéologie trompeuse et mortifère à l'origine de nombreux comportements stupides, bornés et haineux...

 

 

L'homme* de Dieu (moine, religieux, ermite mais aussi, bien sûr, chercheur solitaire sans appartenance religieuse et communautaire...), lorsqu'il se sent ou se fait faible et désemparé et/ou lorsqu'il traverse – en tant qu'individu – une période difficile ou douloureuse, ne peut rien demander aux hommes. Ni aide, ni soutien, ni réconfort. Et s'il ne dispose pas dans son entourage d'un semblable ou de quelques frères – frères de cœur, de cheminement et de vérité –, il ne peut adresser sa requête qu'à Dieu lui-même. Et s'il ne sait l'entendre, malheur à lui... Voilà sans doute l'une des raisons essentielles qui incite l'homme de Dieu à creuser toujours plus profondément en son cœur pour que résonnent de façon toujours plus tangible et permanente l'Amour et le silence du Divin...

* Au féminin comme au masculin, bien évidemment...

 

 

Homme humble et solitaire dont le cœur poétique et philosophique – profondément métaphysique – s'épanche. Et que Dieu tente de convertir à la vérité. Ah ! Mon Dieu ! Quelle aventure ! Et quelle épopée ! Avec ses dangers, ses avancées, ses enlisements et ses retournements... Et sur ce chemin – cet incroyable chemin –, le petit homme n'est sûrement pas au bout de ses surprises...

 

 

Parmi les hommes, la conversion du cœur* semble difficile. Voire impossible. Il convient donc de se tenir à l'écart. Et d'entretenir avec ses congénères des rapports ponctuels et discrets. Aimables et chaleureux, bien sûr, lorsque les êtres – et la situation – s'y prêtent. Mais le plus souvent simplement courtois et distanciés.

En revanche, la nature, la solitude et le dépouillement se prêtent très largement à la conversion du cœur. Ils constituent même des conditions très favorables. Ils invitent l'âme mûre – suffisamment mûre dans le cheminement perceptif – à s'y livrer avec foi, ardeur et détermination dans un esprit d'ouverture et d'abandon...

* Le processus de conversion...

 

*

 

La présence fidèle des nuages à nos côtés. Apôtres et messagers du ciel silencieux. Et le vol des oiseaux comme des anges graciles et virevoltants. Toujours ils enseignent à l'homme qui les fréquente. Et prend soin de les regarder.

 

 

La paresse languide des coteaux où le soleil vient se coucher. Et c'est toute la terre qui s'endort du sommeil des justes où les rêves d'innocence supplantent les actes guerriers et les âmes conquérantes du jour.

A l'homme qui marche nu s'offrent toutes les merveilles de la terre.

 

 

Dieu s'offre aux plus humbles comme aux plus faibles parce que la vie leur a ôté leur esprit de conquête. Et leur âme orgueilleuse.

 

 

Les êtres – tous les êtres – sont précieux non pour ce qu'ils croient être mais parce que tous appartiennent au dessein divin qui leur demeure mystérieux. Dieu, on le sait bien, ne livre pas ainsi ses secrets...

 

 

Chaque jour, le fou des collines qui danse avec son bâton et embrasse le ciel marche à petits pas sur les sentiers. Je vois son visage et son sourire. Dieu lui mange les yeux et le cœur. Et à la place, il y pose son regard. Un regard brûlant. Un regard tranchant. Qui fascine et effraye les hommes. Mais aussi un regard infiniment doux et accueillant où les yeux innocents et attentifs voient se refléter leur beauté et leur folie. La figure entière du monde et de Dieu.

 

 

Laisse-toi être ce que tu es. Laisse le monde être ce qu'il est. Laisse la vie être ce qu'elle est. Lorsque l'espace en toi(1) – et le regard – seront pleinement habités, tu deviendras une immensité tendre et hospitalière. Un lieu(2) d'ouverture et d'Amour infinis où tous les phénomènes – et l'ensemble de l'Existant – seront accueillis inconditionnellement. Et reçus comme il convient. Avec justesse. De façon caressante ou tranchante(3). Avec douceur ou rudesse(3). Mais toujours avec pertinence, sensibilité, affection et vérité.

(1) L'espace impersonnel.

(2) Un lieu non localisé bien évidemment...

(3) Si cela s'avère nécessaire : Dieu agissant bien souvent comme dispositif expressif spéculaire des formes et de leurs comportements afin de les éveiller à la compréhension...

 

 

Le travail, les activités et l’œuvre d'un homme ne sont pas essentiels. Mais, en revanche, ses gestes le sont. Sont-ils habités par Dieu ? Ou ne le sont-ils pas ? De cette simple différence, les conséquences sur les êtres – et le monde – seront profondes et considérables. Déterminantes.

 

 

Lorsque l'on agit en homme – avec les yeux et le cœur d'un homme –, il faut s'en remettre à Dieu. Lorsque l'on agit au nom de Dieu(1) – avec un regard divin –, il convient de l'offrir aux hommes(2)...

(1) Depuis l'espace divin...

(2) Et à tous les êtres...

 

 

Le regard vaste et désencombré embrasse l'infini. Les bruits, les cris, les rires et les pleurs peuvent bien se faire entendre. Les ruses, les coups, les morsures et les caresses peuvent bien pleuvoir à foison. Tous seront reçus. Et aimés avec tendresse.

 

 

Le regard divin n'est ni un mythe – ni une chimère – destinés à remplir de haine le cœur des fanatiques. Et d'espoir celui des naïfs. Il est une réalité que vit l'homme dont le cœur est assez mûr pour s'accomplir en Dieu.

 

 

De l'innocence du cœur naît la transparence des yeux. De la porosité du cœur naît la sensibilité de l'âme. L'innocence et la sensibilité sont les portes du royaume céleste. Lorsque l'âme et le cœur s'y installent, Dieu leur offre un baiser avant d'y poser son regard. Et lorsqu'ils ont été pleinement investis, les gestes de l'homme deviennent marqués du sceau divin.

 

 

Quelle que soit la situation, que ton accueil se fasse tendre. Et que tes gestes et ta parole émanent de cet espace de tendresse.

 

 

Pour l'âme innocente, les morsures de Dieu (les souffrances engendrées par – et sur le chemin vers – l'intelligence et l'Amour) ont bien plus de valeur, de poids et de saveur que les baisers du Diable (les plaisirs liés à l'ignorance et à la haine). Et elle se prête, bien sûr, plus volontiers aux premières qu'aux seconds car elle sait qu'il n'existe d'autre voie – ni d'autre façon – d'opérer un rapprochement* vers Dieu.

* La souffrance ressentie n'est très souvent qu'une opposition entre ce qui est (la réalité d'une situation) et ce qui habite le cœur et l'esprit (idées, désirs, croyances, représentations, espoirs). Cette souffrance invite donc à se défaire de ces encombrements qui empêchent la nudité du cœur et de l'âme et entravent l'ouverture au Divin – à la présence impersonnelle.

 

 

Le monde devient très vite un horizon familier et sans surprise pour les yeux et les cœurs las et désabusés(1). Mais il est à chaque instant une nouveauté pour les yeux innocents et transparents(2).

(1) Le mental chargé de souvenirs, de références et de comparaisons. Qui s'inscrit dans une temporalité et qui pose donc sur le quotidien des yeux très routiniers...

(2) Les yeux et le cœur qui se font – ou savent se faire – regard impersonnel nu et ouvert, exempt de toute encombrement et qui échappe à toute perspective temporelle...

 

*

 

Le son de la cloche du soir. Le bruit du vent dans les feuillages. Et la lune souriante dans le ciel.

 

 

Un regard transparent. Et sans mystère. Mais si profond que le ciel y glisse sans résistance...

 

 

Le maître des heures est tombé. Terrassé par l'instant. Sous les pas, les aiguilles – et le tic-tac – de l'horloge se sont brisés. Au loin, on entend un coucou chanter.

 

*

 

[Le silence – itinéraire du silence]

Le silence d'abord nous effraye. Il nous est impossible de l'entendre. Puis la vie fait en sorte qu'il nous entoure. Vient ensuite le temps où il nous enveloppe. Puis, plus tard encore, il nous pénètre. Et enfin lorsqu'il nous estime suffisamment mûr pour le recevoir pleinement, il nous habite...

 

 

Privés de notre source et de nos liens fondamentaux avec notre environnement naturel, nous nous desséchons. Et nous périssons. Il en est ainsi pour toutes les choses de ce monde. Le corps, bien sûr, mais aussi le cœur et l'esprit ne peuvent survivre si on leur ôte leurs nourritures essentielles.

Il appartient donc à chaque homme de savoir de quoi il se nourrit. Comment il alimente le corps, le cœur et l'esprit. Et de connaître avec soin les aliments qui lui sont nécessaires. L'essentiel des problèmes et des dysfonctionnements provient d'une alimentation énergétique(1) inappropriée et déséquilibrée (déficitaire ou excessive)... Le reste tient sans doute principalement au processus d'épuration karmique(2) et de désencombrement psychique(3) nécessaire pour l'actualisation du potentiel de compréhension qui mène à l'espace impersonnel...

(1) Alimentation énergétique corporelle, intellectuelle, émotionnelle, environnementale et spirituelle...

(2) Evénements et circonstances nécessaires pour que l'esprit et le cœur comprennent profondément ce qu'ils doivent comprendre...

(3) Elimination des désirs, des idées, des représentations, des croyances et des espoirs qui encombrent le psychisme...

 

*

 

La pluie chante sur les toits. Et gorge la terre. Présence du divin qui enchante le monde et le promet à la vitalité et à l'abondance. Et la douce mélodie – comme tous les dons ciel – est accueillie dans le silence radieux du cœur.

 

*

 

Les yeux des hommes. Et le regard de Dieu. Leurs gestes et son Amour. Leurs bavardages et sa parole. Leurs pas et sa présence. Leur agitation et son accueil. Leur fureur et sa paix. Leurs bruits et son silence. Lorsque tes yeux et ton cœur – tes yeux et ton cœur humains – sauront pleinement se faire regard – regard divin –, tes gestes et tes paroles pourront parfaitement refléter l'Amour, la présence, la paix et le silence de Dieu parmi les hommes. Il se sera alors intégralement – et incontestablement – établi en ton cœur.

 

 

Revêtir des yeux humains parmi les hommes revient immanquablement à endosser le rôle de juge réprobateur craintif ou agressif – selon la nature de la personnalité et les circonstances. En revanche, transformer les yeux – et le cœur – en regard divin sera toujours le gage d'un accueil et d'une ouverture exempts de critique et de condamnation. Laissant les yeux, la parole et les gestes humains* libres de leurs restrictions et de leurs mouvements.

* Et de tous les êtres...

 

 

Les hommes vivent les uns sur les autres. Et, au mieux, les uns à côté des autres. Cet entassement exerce sur eux un étouffement et une inhibition mais aussi une surveillance et un contrôle implicites incessants. Et bien que cette bulle oppressive puisse éclater à tout instant – en particulier en cas de frustration ou de saturation excessive – son emprise est puissante et permanente. Ainsi l'homme passe l'essentiel de son existence entouré de ses congénères en soumettant la quasi totalité de ses gestes et de ses comportements aux lois, aux règles et aux codes de sociabilité et de bienséance en vigueur dans la société où il vit. Et ce mode de vie entièrement grégaire(1) ne lui permet jamais – ou quasiment jamais – de disposer d'espaces de solitude où il pourrait laisser libre cours à ses aspirations et à ses penchants(2) sans la moindre restriction. Jamais – ou quasiment jamais –, il n'a l'occasion d'une liberté complète(3) pour découvrir les tréfonds de sa personnalité, trouver dans une absence totale de cadre ses propres limites et gérer ses lacunes et ses excès sans le moindre témoin. Bref de s'exercer de façon parfaitement autonome à se découvrir et à être son propre maître (ou à apprendre à le devenir) en découvrant ce qu'il est profondément et en gérant ce qui l'anime de façon irrésistible... Aussi, avec la barrière que représente le regard d'Autrui et le lot de suggestions, d'autorisations, d'interdictions, de freins et de compromis qu'elle véhicule dans l'esprit, comment voulez-vous que les hommes comprennent profondément ce qu'ils sont et comment ils fonctionnent... Comment voulez-vous qu'ils aient conscience des ressorts qui les animent réellement...

(1) On connaît la crainte des hommes à l'égard de la solitude...

(2) Il est vrai que l'essentiel des hommes n'aspire qu'au plaisir et à la tranquillité. Et à tout ce qui permet de les lui procurer : sexe, argent, amusements, pouvoir. Et n'a goût, en général, que pour les activités qui se pratiquent en présence de ses congénères...

(3) Liberté phénoménale. Cette liberté est, somme toute, très relative. Mais bien que l'individualité soit un concentré d'apprentissages, de formatages et de conditionnements, la liberté phénoménale se manifeste par une absence de cadre restrictif (qui joue bien souvent un rôle d’inhibiteur) afin de révéler la nature profonde et fondamentale de l'individualité : ce pour quoi elle est naturellement faite...

 

*

 

Sur la colline des ombres confuses, la lumière éclaire et accueille le soleil matinal qui dissipe la brume. L'eau de la nuit ruisselle sur les rochers. L'âme s'agenouille. Et les grenouilles de l'étang accompagnent son salut.

 

 

La rose sous ses pétales a revêtu la robe de Dieu. Et chaque matin, la rosée lave les rires de la nuit que les insectes et les hommes assoupis dans leur sommeil n'ont su entendre.

 

 

Il cueille l'instant. Et le glisse dans sa besace. Puis il vide son sac. Et expose ses trésorsses pauvres trésors – aux yeux curieux et oisifs. Sa main ne sait encore se faire ouverte et sage. Paume vide saluant le ciel. Et recueillant la grâce des jours. Ouverte aux vents et aux nuages qui passent. Cœur docile à l'éphémère. Et au fugace passage des anges.

 

 

L'âme crottée de trop de boue s'enlise dans les sillons de la terre. Manque le baiser de Dieu qui vole au sommet de l'herbe fraîche dont l'innocence s'égaie dans la rosée du matin.

 

 

Sur le nuage blanc, l'âme se repose de sa longue traversée. La terre et les hommes ont épuisé son innocence. Et elle doit à présent – de son visage défait – embrasser le silence du ciel. Retrouver sa candeur. Et sa fraîche simplicité. Plus tard, elle pourra regagner le monde. Et se laisser de nouveau chahuter par les mains fébriles occupées aux semences et aux récoltes de la terre.

 

 

Une nuit sans lune. Un jour sans soleil. Que font donc les astres dans la grisaille ? Ils se moquent des hommes. Et de l'opacité du ciel. Qui connaît la danse permanente des vents au dessus de l'azur ? Et le rayonnement incessant de la lumière ?

 

 

Le climat sombre attriste le cœur des hommes. Ils prient Dieu et les saisons le nez sur leur souliers. Et les yeux sur leur terre d'infortune. Mais comment pourraient-ils les entendre ? Et exaucer leurs vœux ? Malgré leurs cris, leur voix est si faible – presque inaudible. Et leur cœur si exsangue...

 

 

Au fil des jours déserts où l'on ne voit – ni ne parle à – aucun homme, on ne sait si l'on a encore figure humaine... Et l'on se demande si Dieu n'aurait pas eu la malice de dessiner sur notre visage deux petites ailes fragiles aux extrémités d'une immensité accueillante... Qui sait ? Peut-être... Et nous rions de cette éventualité.

 

 

Humble prince du rien parcourant la terre dans sa cape de vent. Marchant à pas discrets sur les allées désertes du monde. Saluant avec tendresse ses frères. Tous les habitants qui peuplent les paysages : arbres, nuages, insectes, oiseaux, pierres et herbes sauvages. Croisant de temps à autre quelques troupeaux pacifiques : vaches, chèvres et brebis. Quadrupèdes inoffensifs auprès desquels il s'arrête longuement pour leur témoigner son affection, leur donner quelques nouvelles du monde et les avertir du sort que les hommes vont leur réserver. Et en les invitant toujours à vivre avec intelligence et générosité chaque instant de l'existence. Il aime leurs yeux malicieux. Et il y trouve bien plus de bonté et de lumière que dans le regard stupide des bipèdes bruyants ou agressifs qu'il rencontre parfois réunis sur les chemins en troupeaux ou en hordes barbares. Qui battent la campagne en ordre de marche selon les exigences et les impératifs saisonniers : promeneurs et flâneurs bavards et désœuvrés pendant les beaux jours d'été et de printemps munis de bâtons encombrants et inutiles et la méprisable communauté des chasseurs à l'automne et en hiver armés de fusils et de cartouches qui parcourent le territoire sans la moindre attention et la moindre considération – ni, bien sûr, la moindre marque d'amour – pour ceux qu'ils croisent comme pour ce qui les environne...

 

 

Dieu entoure la solitude. Et d'une main de magicien l'habille d'un air de fête. Avec des anges joyeux qui dansent sans jamais s'interrompre au dessus de notre tête. Et qui font tomber une pluie d'étoiles sur nos lèvres ravies. Et dans nos pas aussi clairs et limpides qu'un ciel de printemps.

 

 

Il s'agenouilla en silence devant le soir. La lune offrait sa beauté à la nuit. Et à ses yeux le seul spectacle du jour.

 

*

 

Les jours de pluie, j'aime marcher dans les cités désertées par leurs habitants. Elles prennent des allures de villes fantômes où le flâneur solitaire peut déambuler sans être importuné par l'agitation et la fureur habituelles. L'espace révèle alors sa dimension intime – presque secrète – que les yeux citadins familiers et absorbés – trop absents – ne savent voir. En baguenaudant dans les rues et les ruelles dépeuplées comme un vagabond émerveillé – comme un étranger sans toit et au cœur sans attache – on peut promener ses yeux sur le détail d'un pont ou d'un porche, sur le tronc d'un arbre solitaire ou le banc d'un square, sur une herbe ou une fleur fragile qui pousse entre les pavés ou le bitume d'un trottoir. On peut observer les animaux qui peuplent la ville, fidèles malgré la pluie. Et heureux – si heureux – que les hommes aient déserté la place. Au cours de ces déambulations, on peut aussi se plaire à imaginer les reliefs, les montagnes, les collines et les cours d'eau – l'ensemble de l'environnement – toute la topographie de la ville – sans les habitations. Et pendant quelques instants, on offre à l'espace sa virginité d'autrefois. Avant que les hommes n'envahissent les lieux – et n'affirment leur domination – avec leur affreuse et détestable prétention. Et leur illégitime souveraineté...

 

*

 

Le monde et la nature sont les amants de Dieu. Eux seuls permettent à son Amour et à sa joie d'être vivants...

 

*

 

Assis à la terrasse des heures, j'écoute le vent. Regarde les arbres, les nuages et les jours qui passent. Dans le silence fébrile du printemps.

 

*

 

Les yeux perdus et apeurés des êtres de ce monde font peine à voir. Ah ! Mon Dieu ! Si la terre ne peut les aider, que le ciel vienne donc à leur secours...

 

 

Installé sur les collines ou assis dans le jardin qui entoure la maison, je regarde la vie frémir. Faire ses mille cabrioles. Jaillir de son socle pour explorer les alentours. Pendant des heures, je contemple l'existence. Ses facéties, sa puissance et sa violence. Et derrière les paupières closes, le regard est silencieux. A l'abri des tours. Et de la malice des jours.

 

 

Que donneraient – que seraient prêts à donner – les hommes pour quitter leurs jours fébriles et inconsistants – délaisser leur existence sans épaisseur – pour vivre un instant plein – un seul instant de totale et parfaite plénitude ?

 

 

Tout émane du regard. Le monde, le silence et la paix.

 

 

Les hommes parcourent le monde – et l'existence – avec fébrilité à la recherche de la joie, de la beauté et de la tranquillité. Trop immatures encore pour demeurer sans impatience dans le silence du cœur.

Comment leur dire ? Comment partager avec eux ce secret ? Il est impossible qu'ils l'entendent. Impossible de leur transmettre. Nous le savons bien. Leur cœur doit s'ouvrir au silence et à la vérité à son propre rythme. Il n'y a d'autre voie...

 

 

Si l'on pouvait assembler toute la connerie du monde, on construirait sans doute le plus grand édifice jamais réalisé sur terre...

 

 

Que serait le ciel sans les nuages ? Un espace vide et accueillant ? Et que seraient les nuages sans le ciel ? Existeraient-ils seulement ? Que serait la conscience sans les êtres et le monde ? Un infini vierge et ouvert ? Et que seraient les êtres et le monde sans la conscience ? Auraient-ils seulement pu voir le jour ? Et leur existence – et leur évolution – ne seraient-elles pas encore plus sombres qu'elles ne le sont déjà ?

 

 

Le ciel(1) est toujours l'exact reflet de la terre(2). Il en est le plus fidèle miroir qui sait réfléchir mieux que quiconque son essence et les états qu'elle exprime (ou traverse). La laissant toujours libre d'exposer toutes les combinaisons qui lui sont offertes. Et les reflétant d'une façon parfaite : ciel tempétueux, ciel orageux, ciel pluvieux, ciel brumeux, ciel couvert, ciel ensoleillé, ciel parsemé de nuages blancs discrets, ciel immaculé etc etc.

(1) Le ciel à la fois comme manifestation physique et comme symbole du nouménal...

(2) La terre à la fois comme manifestation physique et comme symbole du phénoménal...

 

 

Dans la nudité et l'innocence du cœur se cache le rire de Dieu qui apparaît au monde sur les lèvres de l'homme sage.

 

*

 

Nous partageons de moins en moins de choses avec l'humanité. Nous n'avons plus aucun goût, aucun intérêt ni aucune perspective en commun. Mais nous n'en restons pas moins un homme...

 

 

Les hommes ne savent convertir en joie le tragique de l'existence. Le transformer en célébration joyeuse de l'éphémère et de la précarité. Ils préfèrent – et n'ont d'autre possibilité pour se donner l'illusion d'une existence décente – d'une existence à peu près vivable – que d'essayer de – le noyer dans l'amusement et la frivolité. Ou de le recouvrir d'une gaieté d'apparat...

Ils ne peuvent encore vivre – et accueillir – le spectacle des jours – le triste et joyeux spectacle des jours – dans la gaieté silencieuse du cœur.

 

 

Seul l'instant – et ce qui s'y déroule – est précieux. Le reste n'est que brume où l'on s'égare...

 

 

La marche infatigable du pèlerin épuise ses semelles autant qu'elle allège sa main. Ouvre son regard autant qu'elle rend son cœur humble. Et les feuilles de son carnet, si sombres au début du périple, s'égayent au fil des pas. Et elles se couvriront bientôt entièrement de joie. Se rapprochant inéluctablement de la lumière. Et du silence.

 

 

Je suis heureux – incroyablement heureux – et humblement fier de retrouver chaque jour mes frères : arbres, nuages, herbes, rochers, insectes et oiseaux. Et de parcourir en leur compagnie les sentiers des collines. Nous marchons d'un même pas. Au rythme des jours et des saisons. Et il y a entre nous – comme avec mes chiens – une complicité et une tendresse que l'on ne trouve que très rarement chez les hommes...

Nous marchons en silence. Avec dans les mains cet humble bâton* qui tournoie dans le ciel et danse avec les vents. Et qui soutient nos pas sur les sentes escarpées.

Ici nous sommes seuls. Les hommes ne fréquentent guère les lieux. Et leurs bruits dans la vallée nous semblent lointains. Si lointains. Seuls le ciel et le soleil s'invitent – et se mêlent – au cortège. Tantôt nous précédant et nous ouvrant la voie. Tantôt fermant la marche. Mais toujours présents en notre cœur. Et dans chacune de nos foulées légères et rayonnantes.

* Un bâton martial.

 

*

 

Un cœur honnête. Et un regard sensible. Voilà ce qui te sauvera, homme !

 

*

 

Un arbre penché – terriblement penché – par les vents. Comme s'il adressait une humble et joyeuse révérence – un peu hiératique il est vrai – à la terre et au ciel. Comme s'il leur offrait une allégeance éternelle.

 

 

Dans l'attente du lendemain – et des lendemains qui chantent –, les hommes occupent le jour. Pourquoi ne comprennent-ils pas que chaque jour ne sera que la plus ou moins parfaite réplique de la veille ? Le psychisme inscrit dans une perspective temporelle et avide de contenus existentiels nouveaux et plus attrayants ne renoncera jamais à l'espoir des jours meilleurs.

Le cœur doit être nu pour s'ouvrir à l'instant. A l'éternité de l'instant.

 

 

Un arbre à moitié arraché repose sur un autre. A-t-on déjà vu celui-ci demander quelques explications ou quelques comptes à son compagnon d'infortune ou à la forêt ? Non, il supporte sans broncher ni frémir, sans maugréer ni médire son frère mal en point. Et il le soutiendra ainsi sans fanfare ni trompette – et sans médaille – toute sa vie durant. Et après on vient nous parler du mérite et du courage – de l’héroïsme – des hommes... En comparaison, ils ne sont – le plus souvent – que de petits bras orgueilleux et geignards qui réclament des titres et des honneurs – des marques de reconnaissance – pour le moindre geste. Le plus petit doigt levé...

En revanche, je songe à ces mères admirables et courageuses qui élèvent et prennent soin de leur enfant lourdement – ou très lourdement – handicapé, incapable d'effectuer le moindre geste ni de subvenir seul aux besoins les plus ordinaires. Et que leur mère porte chaque jour à bout de bras avec tendresse et délicatesse. Et dont elle s'occupe avec amour et abnégation tout au long de leur existence. Amour sans borne émaillé parfois, bien sûr, de découragement, de lassitude et parfois même peut-être de colère mais qui n'a d'autre choix que de s'abandonner à la réalité. A la triste réalité des faits. Et bien que cette existence puisse être vécue – et ressentie – comme difficile et douloureuse, je suis certain que le cœur de ces mères s'ouvre, par des forces insoupçonnées, à la joie. Et qu'elles réussissent à transformer « ce fardeau » – et même « ce calvaire » – en merveilleux présent. En existence douce et chaleureuse, joyeuse et réconfortante malgré la douleur et la souffrance. Peu – très peu – d'hommes seraient disposés à ce renoncement à soi. Cette noblesse porte sans conteste les traits admirables du féminin...

 

*

 

J'entends parfois le vent applaudir en silence ma main qui achève de noter sur son carnet une parole du ciel. Et je sais – et je sens – que se joignent à lui les plus humbles créatures de la terre. Celles que les hommes pourraient appeler les sans voix. Et je suis heureux – et fier (humblement fier) – que le ciel ait choisi ma main pour en faire l'un de leurs modestes porte-paroles.

 

 

L'écriture – toutes ces notes – sont une histoire entre le ciel et mon cœur. Entre ma main et le vent. Elles ne concernent que très indirectement les hommes...

 

 

Comme vous l'aurez compris, je fréquente davantage le ciel, les collines et les forêts que les hommes, les églises et les places de marché...

 

 

Il n'y a personne à imiter. Il convient simplement d'écouter son cœur et les circonstances dicter leurs impératifs et leurs exigences. Le chemin se dessine ainsi...

 

*

 

Si tu ne sens la tendresse – la tendresse vivante – de la terre, la caresse du vent et de la pluie sur ton visage, la caresse de l'eau sur tes mains et ton corps, la douceur du sol sous tes pieds et celle de ta couche sur ton dos, la saveur du pain et des fruits sur tes lèvres, qui prendra soin de toi en ce monde ?

 

 

Reste sourd aux cris et aux vociférations des hommes. A moins que leur cœur ne réclame un geste...

 

 

Au gré de la présence du cœur et de l'état des pas sur les sentiers, l'écriture se fait tantôt poétique ou philosophique, tantôt anecdotique ou analytique, tantôt personnelle ou impersonnelle. Reflet direct du ciel – de la parole du ciel – traversant le canal singulier de l'individualité.

 

 

Assis dans les collines, je contemple paisiblement le monde.

 

9 décembre 2017

Carnet n°77 La sente étroite du bout du monde

Journal / 2016 / L'exploration de l'être  

Rien jamais ne commence. Rien jamais ne s'achève. Tout toujours continue. Excepté le regard qui seul demeure. Et qui s'habite – et se vit – dans l'instant. Dans l'éternité de l'instant.

Mille années ne feront jamais un homme. Mais un seul jour peut le défaire. Et lui offrir les merveilles que ses pas usés cherchaient avec tant de fébrilité...

L'infini en soi. Et le champ de tous les possibles devant soi. Mais un seul chemin. Ainsi vit l'homme sage.

 

 

La sente étroite du bout du monde(1) empruntée par l'homme seul cheminant vers le Seul(2). Et les voies immenses aux larges carrefours où s'empressent – et s'entassent – les hommes. Ces longues artères qui ne mènent nulle part. En des lieux où personne ne trouve jamais rien ni personne... Où l'absence pousse comme du chiendent. Lieux de misère et de mendicité. Déserts d'indifférence, de malheurs et d'incongruité.

(1) Titre du célèbre ouvrage de Bashō.

(2) Petit clin d’œil à Plotin...

 

 

En te rencontrant, tu découvriras Dieu. Ensuite, tout deviendra rencontre. Et ta présence au monde sera claire et lumineuse. Eclairante pour les yeux attentifs. Et insatiables de vérité. Pour tous les affamés d'Absolu. Sinon tu ne sortiras jamais de ta chambre close. De ton réduit sombre et exigu. Et les lumières de la raison, de l'intelligence et de l'orgueil ne te seront d'aucun secours pour trouver la clé des champs...

 

 

Le silence. Le silence du cœur et de l'esprit au sein duquel se réinvente – et se réenchante – la vie. Il n'y a de lieu plus simple et plus profond. Il n'y a de lieu qui offre autant de joie et de paix. Porteur d'un Amour infini qui permet – qui permet à l'être – d’accueillir avec tendresse et attention chaque parcelle du monde.

 

 

Vie de vocation et vie de vacation(s). Dans la première, l'existence entière est consacrée à une seule et même perspective. Chaque acte – chaque geste – est dédié à l’œuvre ou à « la mission » vers laquelle l'âme se sent naturellement portée. Et qui peut parfois l'aspirer jusqu'à l'obsession. Chaque jour est un pas supplémentaire vers ce Graal. Dans la seconde, il n'y a que des activités auxquelles on se consacre par nécessité, pour satisfaire quelques désirs ponctuels ou passagers, pour tirer quelques plaisirs ou quelques bénéfices ou pour échapper à l'ennui et à la vacuité des jours.

Les êtres de vocation et les êtres de vacation(s) appartiennent à des univers trop différents pour se comprendre et se fréquenter. Entre eux, l'incompréhension est le plus souvent totale. Et leur mode de fonctionnement bien trop différent pour espérer le moindre rapprochement...

 

 

Ne vis pas comme si tout était éternel. Vis chaque instant comme si le suivant n'existait pas*...

* Ce qui est vrai : l'instant suivant, en vérité, n'existe pas...

 

 

Le cœur dolent creuse l'abîme où les êtres se perdent. Et de ce lieu seul peut naître l'Amour...

 

 

Une disposition de l'âme à contempler. Et à témoigner de la beauté et de la noirceur du monde.

 

 

La marche est un enseignement. Et la nature et le monde des enseignants. Et parmi eux, les arbres, les rochers et les nuages sont des maîtres incomparables. Des maîtres inestimables. Des maîtres silencieux. A la fois tendres et puissants à qui sait les voir, les sentir et les écouter.

En vérité tout est enseignement. La vie entière enseigne. Et seul l'état d'esprit – et de cœur – de l'élève qui apprend et étudie donne leurs qualités à l'enseignant et aux enseignements. Voilà le secret de tout apprentissage.

 

 

Contemplatif joyeux – infiniment joyeux. Et parfois désabusé – quelque peu désabusé. A la fois heureux et triste des spectacles du monde. Et en particulier par ceux qu'offrent les hommes. Mais confiant en leur potentiel. Et en leur avenir...

 

 

En vérité, la vie ne cesse d'enseigner aux yeux et au cœur. Pour qu'ils apprennent à se faire regard*. C'est le temps long et éprouvant – et parfois même douloureux – de l'apprentissage. Puis vient le temps du jeu et de la célébration avant que ne survienne celui du rayonnement.

* A devenir pure perception sensible et impersonnelle...

 

 

L'eau de la rivière s'écoule paisiblement dans son lit. Les nuages traversent tranquillement l'immensité du ciel. Il n'y a que l'homme qui s'éreinte avec fureur et opiniâtreté à demeurer sur terre. Cette aspiration révèle ce qu'il pressent sans le savoir : qu'il est éternel. Qu'il est le regard éternel. Mais il est encore si naïf et maladroit qu'il se méprend sur l'éternité. Il confond l'immortalité du corps avec celle de l'âme. Il ne comprend encore que l'éternité ne peut s'inscrire dans aucune perspective temporelle. Qu'elle n'existe – et ne peut exister – que dans le regard. Et dans l'instant.

La vérité, bien sûr, ne peut être saisie. Ni capturée. Elle se goûte – et se vit – si le cœur et le regard sont suffisamment nus et humbles. Suffisamment vierges et ouverts. On peut simplement exposer – ou expliciter – le cheminement nécessaire pour déblayer la terre où elle peut s'implanter...

 

 

L'archipel des solitudes où l'on n'est jamais seul qu'en présence de soi. Et de toutes choses. Le regard ne peut s'extraire de cette solitude intrinsèque. De cette solitude ontologique. Au contraire, il y est plongé au cœur. Mais l'infini du monde – et de la vie – lui offre accès à la diversité. Et lui donne la possibilité de goûter la pluralité dans l'Unité.

 

 

Le bâton*. La caresse du bâton qui fend l'air avec précision et délicatesse. Qui prend appui sur le sol. Et les énergies terrestres. Présence du geste. Harmonie du mouvement et du souffle. Unité du regard et des énergies. Un dans l'action et la contemplation. Perfection de l'instant...

* Le bâton martial.

 

 

On peut apprécier et admirer les beautés et la grâce du monde, mais on ne peut oublier* que la vie – et en particulier la vie sauvage – porte en elle une violence inouïe et quasi permanente. Avec le vivant – et au sein du monde organique –, il ne peut en être autrement. Et il est même fort probable que cette violence s'inscrive jusque dans les tréfonds du code génétique. La vie sauvage est un incroyable champ de bataille où les agressions, les conflits, les meurtres et les tueries sont légions et où les coups, les plaies et les bosses sont monnaie courante. Les êtres sont loin – vraiment loin – d'être tendres entre eux. Le vivant est une jungle effroyable. Et ses lois sont tranchantes. Et implacables. Les créatures les plus faibles et les plus fragiles – les moins armées ou les moins bien équipées au combat – n'ont d'autre choix que la fuite ou la soumission, corps et âme, à leurs agresseurs. Pas de pitié. Aucune pitié dans le monde sauvage. Faire face, prendre le dessus, fuir ou crever, telle est la rude et impitoyable réalité de cet univers.

* Les citadins – et en particulier les habitants des beaux quartiers ou des résidences sécurisées l'ont peut-être oublié. Ou feignent de ne plus s'en souvenir...

On comprend bien – on ne comprend que trop bien – l'aspiration ancestrale et viscérale de l'homme – animal chétif et de faible constitution – à s'armer et à se protéger. Et les raisons qui l'ont poussé, au fil de son histoire, à améliorer et à perfectionner son armement et son arsenal de défense. Avec l'homme sont nées aussi, bien sûr, l'éducation et quelques lois de respect et d'équité pour tenter de juguler ses instincts et son animalité profondément sauvages. Lois et dispositif éducatif destinés à le « civiliser »... Et bien que quelques progrès aient été réalisés dans le « vivre ensemble* », l'homme et les mesures qu'il a édifiées portent encore aujourd'hui en leur cœur une violence latente ou avérée. Ah ! Mon Dieu ! Que le chemin est long pour que les êtres accèdent à l'Amour et puissent enfin vivre en paix !

* En particulier au sein de la communauté humaine. Et, dans une bien moindre mesure, avec les animaux...

 

 

L'homme sage ne craint ni l'adversité ni la violence – la violence intrinsèque du monde phénoménal. Il en connaît les lois, les règles et les fondements. Et il est suffisamment avisé pour y faire face lorsqu'elles se présentent et qu'il ne peut y échapper. Lorsque la violence ou l'adversité se manifeste, il y fait face de toute son âme. Et parfois l'accueil est insuffisant. Il arrive que la violence soit la seule réponse possible à la violence. Mais jamais – au grand jamais – elle ne s'inscrit dans la haine ou la vengeance, elle trouve immanquablement son origine dans l'Amour et les circonstances. Et se révèle toujours comme l'attitude la plus juste à la situation...

 

 

Au vu de la violence du monde actuel, il est clair que l'histoire du vivant ne s'est pas réalisée dans la soie, le coton et la tendresse. Et le tribut et le poids karmiques(A) sont encore aujourd'hui très conséquents. Les exactions, les atrocités et les souffrances des êtres en témoignent – continuent d'en témoigner. Le monde – et les êtres – ne sont donc pas prêts d'en voir le bout – ni même d'en venir à bout – puisque la violence (en général) entraîne la violence dans une chaîne presque sans fin. Et que son enrayement ne peut naître qu'avec l'éducation(B) (lorsque celle-ci est possible(1)...) et sa cessation totale avec l'Amour(2)... Le karma(A) du monde – et des êtres – n'est donc pas prêt de s'épurer...

(A) La somme de souffrances que doivent endurer les êtres pour qu'ils comprennent ce qu'ils ont à comprendre afin qu'ils adoptent un comportement et des attitudes plus justes et appropriés, porteurs d'Amour et d'intelligence...

(B) Ou en modifiant le code génétique des êtres, option qui pourrait peut-être connaître quelques succès à l'avenir – lorsque le progrès et la technologie le permettront – mais qui restera malgré tout une voie dangereuse où les apprentis-sorciers ne seront pas à l'abri de nombreux écueils et de maints excès et dérives...

(1) Lorsque les capacités cognitives le permettent...

(2) Lorsque la perception psychique laisse place à la perception impersonnelle...

 

 

En cette vie, les êtres – hommes et animaux – mais aussi, bien sûr, tous les organismes vivants n'ont d'autre choix que de se battre, de ruser(1) ou de séduire(2) pour assurer leur survie, leur subsistance et satisfaire leurs besoins ordinaires(3). Au sein du monde et de toute collectivité(4), il n'y a bien souvent d'autre alternative pour obtenir satisfaction, se procurer ce qui est nécessaire – les choses du monde indispensables au corps et en mesure de répondre aux exigences psychiques élémentaires – ou pour conserver ce qu'ils peuvent légitimement considérer comme leur appartenant(5) : terrain, territoire, acquis, droits etc etc. Et dans la mesure où chacun défend bec et ongles ses intérêts, il ne faut pas s'attendre à beaucoup d'honnêteté et de probité dans les interactions, les échanges ou les transactions...

Il va sans dire que moins l'on dépend du monde – des êtres et des choses du monde –, plus on s'affranchit, bien sûr, des jeux, des lois et des règles collectives, mais aussi – et surtout – des enjeux et des nombreux conflits inhérents à toute collectivité. Au delà des bienfaits et des agréments offerts par l'autonomie, l'autarcie – ou la solitude autarcique – constitue souvent le prix à payer pour s'extraire des contraintes collectives et des caractéristiques les plus grossières de toute vie sociétale mais aussi – et principalement – des différends, des querelles, des altercations et des affrontements que génère inévitablement le groupe, le regroupement d'individus ou la proximité(6) avec les autres êtres...

(1) Avec une large palette de stratagèmes possibles...

(2) En particulier chez les hommes où la séduction n'est, bien sûr, qu'une forme de ruse...

(3) Sans compter la satisfaction des désirs chez les êtres humains, qu'ils soient simples, naturels, exigeants ou sophistiqués...

(4) Quelle que soit sa nature : société humaine, société animale etc etc.

(5) Ou ce qui apparaît comme relevant de « leurs possessions » ou de « leur propriété »...

(6) Voire la promiscuité...

 

 

Quelle grâce lorsque l'esprit s'arrête – et se met en suspens – pour devenir silence. Pure présence. La vie – et le monde – continuent de tourner bien sûr. Mais on n'est – et on ne se sent – plus concerné que par leur contemplation. Tel est l'un des aspects de l'être : la présence témoin. L'autre tient sans doute au sentiment d'unité avec la vie – et avec le monde. Avec tous les phénomènes et mouvements qui surgissent. La contemplation et l'action – le silence et les manifestations – réunis en une parfaite unité*.

* Un dans la diversité. Un dans la pluralité...

 

 

Il arrive encore de temps à autre que l'on se sente seul (au sens commun du terme). Mais ce sentiment offre au cœur une exacerbation de la sensibilité qui intensifie d'une incomparable façon notre sensorialité*. Et notre manière d'être au monde. Ce sentiment de solitude ordinaire devient alors une grâce que l'on accueille. Et que l'on chérit de toute son âme.

* Ce propos rend donc caduque ce que nous écrivions dans un fragment récent au sujet de l'absence de liens directs entre le cœur et le corps. Entre la sensibilité et la sensorialité...

 

 

La solitude est une merveilleuse invitation à l'autonomie*. Dans la vie quotidienne. Dans l'ensemble des sphères de l'existence comme dans notre façon d'être au monde. Alors que la collégialité implique nécessairement le partage et la séparation des tâches. La spécialisation. Mais également, bien sûr, la dépendance (voire même l'assujettissement) et les attentes qu'elle génère très souvent à l'égard d'Autrui.

* Ou à l'autonomisation...

 

 

Lorsque la sensibilité et la sensorialité deviennent éminemment vives (ou dans ce que l'on pourrait appeler en état de pleine sensibilité et de pleine sensorialité(1)), tout – le moindre phénomène – traverse le cœur et le corps de part en part en accédant aux zones les plus profondes. Et aux recoins les plus inaccessibles(2). Comme si une longue vibration divine secouait l'âme – l'âme toute entière – avec délicatesse pour la remplir d'une joie intense et lui offrir une incroyable profondeur. Une profondeur abyssale et légère. Si tendre et si légère... La vie alors devient éminemment dense, intense et aérienne. Et elle vous traverse, elle aussi, avec force et délicatesse. Il n'y a pour l'âme, je crois, de plus beau présent. Comme si elle était traversée par une longue et délicieuse caresse – une douce extase continue – qui la rend plus humble encore. Plus accueillante et plus sensible aux beautés et aux merveilles du monde comme à sa misère et à sa détresse. Comme si l'instant soudain se dilatait en une plus longue éternité...

(1) Autant que nous avons pu l'expérimenter...

(2) Ou, du moins, aux recoins habituellement inaccessibles...

 

 

Feuillages verts. Nuages gris. Le cœur s'éveille à une autre lumière. Offerte par la sensibilité de l'âme...

 

 

Aux terrains et aux parcours accidentés, aux circonstances dévastatrices et déstabilisantes, à la fureur et à l'agitation du monde répond une terre de paix et de recueillement à qui rien – ni personne – ne peut s'opposer. Et qui accueille tout – et tous – à bras ouverts.

 

 

Un instant à la fois. Une heure à la fois. Un jour à la fois. Une vie à la fois. Le temps ne peut s'offrir autrement...

 

 

Ah ! Tous ces hommes – tous ces pauvres hommes – qui emplissent leur vie de petites (ou de grandes*) activités, de petits (ou de grands(1)) succès, de petites (ou de grandes(1)) gloires en se pavanant sur les petites (ou les grandes(1)) scènes du monde. Et qui vous regardent de haut (du haut de leur petite – ou de leur grande(1)hauteur) en vous exposant leur belle réussite et leur belle assurance que vous pourriez pourtant anéantir(2) en quelques instants. Et que la vie, bien sûr, se chargera d'effriter et de réduire tôt ou tard en poussière(3). Mais laissons ces fieffés imposteurs à leurs mensonges et à leurs impostures. Et à leur misérable gloire... Ces hommes-là sont bien plus à plaindre qu'à blâmer... Et en les voyant, je ressens une immense tendresse – et une incroyable sympathie – pour tous les paumés, tous les empruntés, les mal assurés et les traîne-savates de la terre qui ne feignent jamais d'être autre chose que ce qu'ils sont : des êtres fragiles et vulnérables qui crèvent de solitude, de misère et d'incompréhension. Ceux-là, au moins, ne se bercent plus d'illusion... ils sont ce qu'ils sont. Et ils vivent bien souvent au plus juste d'eux-mêmes. Un coup de pouce de Dieu (ou du destin...) pour déblayer les quelques restes d'orgueil avec peut-être éventuellement quelques menus aménagements intérieurs pour achever de dessécher quelques désirs, quelques idées et quelques espoirs, et ils seraient presque prêts – en tout cas bien davantage que les précédents – à rejoindre la troupe des belles âmes humbles que forment les hommes les plus sages de ce monde...

(1) Il n'existe en ce monde de grandes choses : ni grande activité, ni grand succès, ni grande gloire...

(2) A condition, bien sûr, que leurs mécanismes de défense psychique, en général survitaminés, tels que le déni ou la dénégation (entre autres exemples bien évidemment) n'aient pas bétonné jusqu'à la plus petite faille de leur grand néant...

(3) Et laissons-la donc à son œuvre et à son travail sans nous sentir obligé d'intervenir...

 

 

L'ardeur, la vitalité et la robustesse accompagnent souvent les jeunes années. Et la première partie de l'existence. Et même s'il n'est pas rare de voir apparaître dès le plus jeune âge – voire même dès la naissance* – des dysfonctionnements et des dérèglements d'ordregénétique, physiologique ou psychique, l'usure, la défaillance et le dysfonctionnel se manifestent en général plus tard. Souvent au cours de la seconde partie de l'existence. Comme si la fragilité, l'affaiblissement et la dégradation étaient les reflets – et le symbole – les plus exacts et les plus communs de la matière et du vivant voués de façon permanente, au cours de leur brève existence, aux interactions et au temps – aux vicissitudes des relations et aux méfaits du temps – les condamnant, bien sûr, de façon irrévocable et implacable – à l'altération, à la vétusté et à la disparition. Quant au psychisme – et au cerveau qui en constitue sans doute le support central –, ils sont eux aussi, bien sûr, livrés aux préjudices et aux détériorations perpétrés par la vie, le monde et le temps. Et en voyant un être – ou une chose – usé(e), ébréché(e), mal en point ou dysfonctionnel(le), le cœur s'émeut profondément. Il éprouve une tendresse infinie pour tous ces représentants de la vie terrestre : précaire(s), fragile(s) et éphémère(s).

* Ou même dès la conception...

 

 

Le monde est parfois si obscur que la flamme dans le regard – lorsqu'elle se fait trop faible – ne parvient à l'éclairer...

 

 

Habiter l'azur – continuer d'habiter l'azur – lorsque le personnage – le petit bonhomme – est au prise et se débat – continue de se débattre – avec et parmi les formes* qui l'habitent, qui l'entourent et l'environnent...

* Êtres, choses, pensées, sentiments et émotions...

 

 

L'orage gronde au loin. Le ciel s'obscurcit. Et je vois soudain les arbres et les herbes danser de joie. S'exciter dans une douce jubilation. Comme s'ils se préparaient à recevoir l'averse à venir. Heureux d'accueillir – et de s'offrir – à la pluie.

 

 

Lorsque la vie quotidienne – et l'existence – sont délaissées – et livrées à elles-mêmes –, la matière et l'organique ont vite fait de tout envahir. Et nous voilà bientôt submergé. Plongé dans le désordre et le chaos. La discipline ne consiste pas en une ascèse exigeante et rigide. Elle n'obéit pas non plus aux représentations habituelles de l'ordre et de la propreté. Il ne s'agit en aucun cas de tout réglementer ni de respecter de façon stricte et scrupuleuse une organisation incarcérante et mortifère. Il s'agit simplement de faire les choses. De s'en occuper lorsqu'elles exigent que l'on s'en occupe. Une chose arrive et demande à être réglée. On l'accomplit tranquillement. Sans avidité, sans attente ni volonté fébrile d'achèvement. Une chose après l'autre. Dans l'ordre où elles se manifestent et/ou selon le degré de priorité qu'elles réclament. La discipline n'est rien d'autre, en définitive, qu'un quotidien fluide. Et libre de tout encombrement. Où les choses – et les gestes – sont accomplis avec bon sens. Et de façon naturelle, spontanée et joyeuse.

 

 

La beauté poignante – la beauté déchirante – d'un visage ou d'un paysage. D'un vieil arbre tordu et digne ou d'une herbe sauvage. Et leur misère que Dieu a habillée de grâce.... Comment ne pas être chaviré – ne pas être bouleversé – par la tendresse de ce geste qui transparaît jusque dans la plus infime expression du monde ?

 

 

Il n'y a de vraie bonté sans amour. Et il n'y a d'amour vrai que dans un regard et des gestes qui émanent d'un espace où il n'y a personne. Personne pour donner. Et personne pour recevoir. Regard et gestes purs. Sans tache, sans désir ni attente.

 

 

La nature et les poètes dont les livres m'accompagnent poétisent mes notes. Le monde et les philosophes dont j'ouvre les ouvrages les philosophisent. Mes yeux – et ma main – sont si sensibles et poreux à ce qui est devant eux. Moi, je ne suis rien. Qu'un scribe. Qu'un modeste messager d'une parole qui ne m'appartient pas...

 

 

Avec mon stylo – et mon bâton* –, j'ai parfois le sentiment d'être un paysan qui laboure le ciel. Et qui attend la maigre récolte de son labeur. Et ce qui pousse a souvent le goût de la terre. On ne se défait pas ainsi du poids – et des forces – terrestres qui nous habitent. La légèreté des anges est une grâce à laquelle bien peu d'hommes accèdent. Et parfois l'âme et le cœur nus et humbles n'y suffisent pas...

* Mon bâton martial

 

 

Deux petites marguerites sur un chemin de pierres aride m'ont transpercé le cœur. Et de gratitude, je leur ai offert un peu d'eau*.

* A chacune des pauses que nous effectuons au cours de nos promenades, je propose à mes chiens de se désaltérer. Je leur verse l'eau d'une petite bouteille dans un vieux sac plastique qui ne quitte pas ma besace. Et je prends soin à chaque fois d'offrir le reste aux herbes et aux fleurs sauvages qui nous entourent...

 

 

La tendresse est la main de l'amour. Et la bonté en est le bras. Muni de cette grâce – de cet instrument merveilleux –, nous pouvons aller dans le monde – et le parcourir – sans la moindre crainte. Toutes les portes s'ouvriront. Et celles qui resteront closes – ou résisteront – ne méritent pas qu'on se donne la peine de les pousser. Elles ne protègent que des trésors inutiles...

 

 

Le corps démuni, le pas léger, le cœur joyeux et le regard innocent. Il n'y a, je crois, de plus belle façon d'aller dans le monde.

 

 

Il n'y a de plus précieux ami – ni de meilleur allié – que soi-même. La vie – et le monde – peuvent bien se faire hostiles ou inhospitaliers, on peut toujours compter sur son aide, son soutien et son réconfort. Mais si tu demeures ton pire ennemi – comme bien des hommes en ce monde –, tu seras le terrain de mille conflits – et de mille luttes intestines. Et l'adversité finira par te terrasser...

 

 

Cette folie des hommes à vouloir s'accaparer et amasser alors qu'il suffirait de ne rien désirer pour tout recevoir....

 

 

Être en vie n'est rien d'autre que l'art – et le don – de recevoir. Et d'aimer. Vivre un peu ou pleinement comme cela nous est donné. Et goûter et contempler si cela nous est offert. Vivre, c'est aussi apprendre. Apprendre un peu. Apprendre à s'effacer – et à mourir – avant de disparaître...

Rien jamais ne commence. Rien jamais ne s'achève. Tout toujours continue. Excepté le regard qui seul demeure. Et qui s'habite – et se vit – dans l'instant. Dans l'éternité de l'instant.

 

 

La nature, les arbres et les animaux restent incroyablement dignes et stoïques face aux abominations des hommes. Et face à l'humanité, je suis à leur côté. Face à la barbarie, mon cœur sait se faire plus naturel, animal et végétal qu'humain.

Je suis toujours aux côtés de mes frères de misère. Et toujours du côté de ceux qui subissent l'oppression et l'ignominie des classes dominantes. En mon cœur bat un communiste ontologique, indomptable et incorruptible mâtiné de libertaire pacifique...

 

 

L'identité humaine est profondément naturelle. Ancrée dans la terre. Et profondément spirituelle. Vouée au ciel. Et tant d'hommes l'ont oublié. Leur vie entière n'est consacrée qu'à l'artifice et à la futilité...

Bien des choses réjouissent mon cœur en ce monde. Mais rien ne me réjouit davantage, je crois, qu'une humanité simple et fraternelle. Respectueuse et aimante. Intelligente et spirituelle.

 

 

On peut s'adresser aux vivants. Comme aux morts. Toute la création – passée, présente et future – nous écoute. Et nos paroles – et nos confidences – nous délivrent parfois de nos pauvres soucis...

 

 

Le ciel bleu. Les jours fastes et joyeux. Et le ciel gris. Les jours mornes et tristes. Dieu nous joue parfois d'étranges farces. Mais à nous de déchiffrer son langage. Si simple. Et si mystérieux...

Un oiseau sur un fil. Immobile. Le regard tendu vers le ciel. Je crois qu'il attend l'éternité. C'est son silence qui m'offrira la première joie du jour. Quelques heures plus tard, nous repassons au même endroit. Et il n'a pas bougé. Après tout peut-être l'a-t-il trouvée ?

 

 

Où vont les nuages lorsqu'ils quittent l'horizon ? Le ciel leur offre-t-il un abri pour leurs vieux jours ?

 

 

Seul dans le jour. Avec la vie toute proche. Au plus proche. Et le monde au loin. Avec la joie qui m'accompagne. Et la nature qui m'attend au dehors. Un pas pour franchir le seuil de la porte, et elle m'accueille. Le soleil me tend sa poigne brûlante. Le vent m'enlace de ses bourrasques. Les arbres se penchent. Les herbes dansent. Les insectes et les oiseaux virevoltent autour de moi. Et aujourd'hui – comme tous les autres jours – nous irons ensemble battre la campagne pour quelques heures.

 

 

Les nuages vous saluent toujours avec grâce. Les hommes, eux, en guise de salut, vous font souvent une vilaine grimace...

 

 

En cette vie, il y a cette simple et belle épopée* qui attend les hommes. Et eux préfèrent s'affairer dans le monde. S'éreinter à leur tâche. Et après ils se sentent si fatigués qu'ils n'aspirent qu'au repos. Et à prendre des vacances...

* Epopée métaphysique et spirituelle. Aventure et cheminement perceptifs, compréhensifs et sensibles...

 

 

Une multitude de minuscules sentiers creusés par les animaux sauvages* sillonnent les collines. Nous marchons au cœur d'une véritable agglomération et d'un immense réseau de pistes sauvages. Il faut donc se faire discret. Prendre soin de ne rien abîmer. Et de ne déranger personne. Il convient plus que jamais d'être respectueux...

* Lapins, lièvres, blaireaux, chevreuils et sangliers.

 

 

Entre un pied de thym et un bouquet de romarin, deux jeunes lézards jouent à cache-cache – ou à chat perché peut-être. Je les regarde avec ravissement. Ils ont l'air si heureux. Si insouciants. Lorsqu'ils s'aperçoivent de ma présence, ils se figent, surpris. Intrigués. Et sans doute un peu effarouchés. J'en suis si désolé que je recule à pas lents. Soucieux de ne pas les importuner et d'interrompre leurs jeux. Je m'esquive donc avec précaution. Et à peine parti, les voilà déjà à reprendre leur course et leur poursuite...

Plus loin, deux papillons se font la cour. Et il y a de la grâce dans cette rencontre amoureuse. Et aussi du respect, de la courtoisie et de la gaieté. Leur chorégraphie céleste prend même des allures divines. Comme si deux anges orchestraient avec légèreté leurs amours délicates et aériennes.

 

 

Que de contorsions parfois pour éviter d'écraser les fourmis en nombre qui peuplent les sentiers. Et pas l'once d'une reconnaissance lorsque je m’assois sur le sol. Aussitôt une armée bien organisée m'entoure et m'assaille. Et chasse bientôt l'importun qui a eu le malheur et l'audace de fouler leur territoire. Ah ! Chère nature, tu manques parfois d'amabilité...

 

 

Lorsque tu n'as rien à offrir au monde – et aux hommes –, excepté une façon d'être et une parole étrangères* – peu propices à répondre à leurs attentes, ils passent leur chemin en détournant la tête. Ah ! Mon Dieu ! Que la terre me semble parfois loin du ciel...

* Qui leur sont étrangères...

 

 

Mon carnet, les nuages, la terre et la marche accompagnent toujours ma solitude – ou ma tristesse* – comme les meilleurs amis du monde. Et les plus fidèles des compagnons. Rarement ils n'ont su égayer mon visage d'un sourire. Et souvent même d'un rire franc. Et tonitruant. Comme un pied de nez à mes pauvres épanchements. Et une invitation à les abandonner à leur sort. Ou à en prendre soin de la plus tendre façon...

* Lorsqu'elles se manifestent... Lorsqu'il arrive qu'elles se manifestent...

 

 

L'ingratitude des êtres – et des hommes – tient souvent à leur ignorance. Et à leur insensibilité. Sans amour, il ne peut y avoir de remerciements sincères. Ni de gestes de tendresse. Seule la sensibilité mène à l'amour.

 

 

L'intelligence et l'amour. Les deux mamelles – les deux seins – du Divin que les hommes rechignent à approcher. Et auxquelles ils peinent à se nourrir. La première comprend. Et offre à l'être la compréhension. La seconde aime. Et lui donne à aimer. L'intelligence sans amour conduit à la connaissance et à la discrimination froides et distanciées. L'amour sans intelligence mène – ou peut mener – aux gestes inappropriés. A la non justesse. Et parfois même à la bêtise.

Seul le sage aime – et comprend – avec justesse car il habite à la source même du Divin.

 

 

La solitude et la tristesse aiguisent d'une intense façon le sentiment d'être vivant. Elles offrent à l'âme – et à l'homme – une sensibilité incomparable.

 

 

La vie ne cesse d'effriter nos représentations, nos idées, nos ambitions. Et notre orgueil. Par petits bouts. Ou par pans entiers. C'est l'une de ses tâches. L'une de ses fonctions essentielles. Et l'édifice finit un jour par s'effondrer. Mais il n'est pas rare que subsistent quelques vestiges... Ruines et fondations que la vie continuera d'anéantir jusqu'à la dernière pierre. Jusqu'à faire table rase. Pour que naissent la nudité et l'humilité parfaites. Seul terrain où peut apparaître – et croître – l'innocence...

 

 

Je ris – et m'amuse – de cet air d'idiot du village que doivent me donner mon allure et mes postures contemplatives. Scrutant le ciel, les nuages et l'immensité pendant des heures. Les yeux et le cœur éminemment présents mais le corps immobile ne se livrant à aucune des activités usuelles des hommes. Et cette attitude – et ce comportement – pourraient sans doute donner aux yeux extérieurs une impression d'absence ou même de débilité légère ou profonde. Mi-sage, mi-idiot. Mi-humain, mi-regard. Toujours dans cet entre-deux de l'homme...

 

 

Après avoir longuement contemplé deux arbres, je me suis prosterné devant eux, louant leurs belles qualités. Et leur confiant qu'ils portaient davantage de patience et de capacité d'accueil que je n'en aurais peut-être jamais. Et je crois qu'ils m'ont souri. Avec un peu de fierté dans les yeux...

 

 

Dans les livres, il y a une bise que l'on n'entend pas. Et qui nous offre le soleil.

 

 

Enlève ton chapeau lorsque tu marches. Et tu verras le soleil se poser délicatement dans tes pas.

 

 

Une armure de mensonges. Ainsi s'habillent les hommes. Et toute rencontre vire à la ruse et au combat. Ah ! Que le ciel nu me semble loin parfois...

 

 

Une douce écorce sur ma peau que le ciel m'arrache pour m'habiller de vent. Ainsi l'âme est plus vive.

 

 

Il y a des heures – et des jours – où l'on s'enlise. Gris comme la nuit. Mais si l'âme est légère, toujours le soleil brillera.

 

 

Il n'y a de pas tristes. Le cœur peut parfois pencher vers la tristesse. Mais si l'âme habite le ciel, il posera un baiser sur ses lèvres. Et lui offrira un sourire.

 

 

Mille années ne feront jamais un homme. Mais un seul jour peut le défaire. Et lui offrir les merveilles que ses pas usés cherchaient avec tant de fébrilité...

 

 

Le fou et le sage ne peuvent se tromper. Ils vivent avec le cœur juste. L'homme de la rue, lui, se déguise. Et son cœur bafouille. Mais Dieu et le ciel ne sont pas dupes.

 

 

Il y a un poids énorme – un poids terrible – qui emprisonne et écrase le cœur de l'homme. Et que seul le vent peut balayer. Et faire disparaître. Pour y parvenir, il faut non seulement y consentir mais laisser son cœur nu et à vif. Et le poser sans défense au cœur de la vie. Et du monde...

Au centre du cœur se cache une innocence brûlante. Une innocence incandescente. Au cœur de cette innocence se loge un espace infini. Un espace éminemment tendre où rayonne la puissance de l'Amour...

 

 

Dans le regard du sage, il y a une profondeur – et une présence – qui effrayent et fascinent les hommes. Et où leur âme se perd. Elle y sombre un instant avant de regagner le cœur de leur hôte, plus légère et innocente...

 

 

Tes idées, tes désirs et tes espoirs(1) à l'égard de la vie, du monde et de toi-même t'encombrent. Débarrasse t'en. Et tu seras libre. Pour t'en débarrasser, accueille-les. Embrasse-les(2) et unis-toi à eux pour qu'ils fondent en toi. Lorsqu'ils auront disparu, demeure vigilant. Dans une attention ouverte et détendue. Et sens le grand vide que tu es. Et qui peut tout accueillir. Y compris ce que tu croyais être, ce que tu désirais et espérais de la vie et du monde...

(1) Tout référentiel mental et conceptuel personnel, humain et temporel...

(2) Avant d'effectuer nos premiers pas sur le chemin de l'intériorité, nous sommes dans l'incapacité de les embrasser. Leur attrait et leur puissance sont si forts – et si irrésistibles – que nous n'avons d'autre choix que de leur obéir. Et de les suivre. Mais de désillusion en désillusion car jamais leur satisfaction n'offre un parfait sentiment de joie, de paix et de plénitude, ils nous ramènent immanquablement vers nous-mêmes. C'est à cet instant-là que nous sommes prêts à les embrasser...

 

 

Il n'y a que deux positions en ce monde : entre et au dedans. Entre pour les phénomènes. Et l'univers phénoménal(1). Et au dedans pour le regard(2). Et la présence. Toutes les autres postures ne sont que des concepts. De simples constructions mentales.

(1) On est toujours « entre » : entre deux instants, entre la naissance et la mort, entre deux activités, entre deux états, entre deux pensées, entre deux émotions, entre (ou parmi) les choses, entre (ou parmi) les êtres...

(2) On habite le regard et la présence ou on ne les habite pas... même si nous sommes toujours en leur sein...

 

 

N'être rien* – et ne rien désirer – est sans doute la meilleure façon d'accueillir ce qui vient...

* Avoir profondément conscience de ne rien être...

 

 

En cas de fatigue (ou de déficit énergétique), rends-toi au cœur de la nature. Assis-toi ou allonge-toi quelques instants*. Puis effectue une marche de quelques kilomètres au rythme qui s'imposera. Et tu constateras qu'au fil des pas, la fatigue se dissipera. Tu seras revitalisé par les énergies terrestres naturelles qui t'envelopperont et te traverseront...

* Le temps nécessaire pour retrouver quelques forces...

 

 

L'infini(1) en soi. Et le champ de tous les possibles(2) devant soi. Mais un seul chemin(3). Ainsi vit l'homme sage.

(1) La présence nue et vierge (sans encombrement).

(2) Où tout peut arriver...

(3) Celui exigé ou impulsé naturellement par la situation...

 

 

La nudité de l'esprit est la condition de la fraîcheur et de la légèreté du regard. Mais aussi de la liberté. Alors que l'encombrement(1) est non seulement une source de tensions qui réclame une incroyable quantité d'énergie(2) mais il constitue toujours une entrave. Et une restriction.

(1) L'encombrement psychique : désirs, peurs, idées, représentations, croyances, espoirs...

(2) Qu'il puise en nous au point parfois de nous assécher...

 

 

Seul le cœur porte l'élan du rituel et de la célébration qu'il peut éventuellement extérioriser et offrir à la situation. Ce ne sont jamais le rituel et la célébration qui offrent la grâce au cœur et à la situation. Ce qui n'empêche nullement les apprentis (fidèles, disciples, moines...), les églises (qui s'adressent à des croyants peu initiés) et les institutions (soucieuses de leur image...) de procéder ainsi, dans leur vain souci de systématisation et leur absurde espoir de faire émerger l'Amour ou le Divin. Et il va sans dire que ces pseudo rituels et ces pseudo célébrations (qui passent pourtant aux yeux du monde pour réels) s'effectuent malgré leur décorum et leur grandiloquence simiesque* de façon plate et superficielle sans jamais imprégner les âmes en profondeur...

* Qui imitent avec ostentation et de façon feinte la joie et l'amour véritablement ressentis...

 

 

Un jour, il y a la vie. Et un autre jour, elle n'est plus. Et puis, un autre jour encore, elle revient. Ainsi en est-il évidemment de toutes les choses de ce monde. Chacune obéissant, bien sûr, aux cycles perpétuels des énergies.

 

 

Les mots offrent une représentation de la réalité(1). Mais ils lui donnent aussi une existence(2). Sans mot, pas d'existence reconnue par les hommes(3). Et comme l'essentiel des êtres humains ne peut accéder à la réalité que par l'intellect et le langage (et un peu également, il est vrai, par la sensibilité du système nerveux), leur accès au réel – et sa représentation – sont infiniment restreints. Et il va sans dire que jamais les mots n'offriront à l'homme un accès direct et global à la réalité. Jamais ils ne lui permettront de la goûter sans intermédiaire. Au mieux ils agiront à travers la conceptualisation et l'imaginaire pour lui en donner un vague et superficiel aperçu...

(1) De ce que l'on nomme la réalité...

(2) L'exemple le plus trivial qui me vient à l'esprit est le nom que l'homme attribue aux animaux domestiques. Les animaux sauvages eux ne portent aucun nom, ils n'ont donc pas d'existence réelle pour les hommes. Ils ne sont et ne représentent rien comme l'affirme aujourd'hui le droit : les animaux sauvages sont Res nulius. L'homme peut donc les traiter et les tuer comme bon lui semble...

(3) Cf les liénitudes (néologisme trouvé il y a quelques années par votre serviteur) que l'on pourrait définir par un assemblage de choses* – ou une composition de plusieurs éléments appartenant dans le langage courant à diverses choses ou formes distinctes – non défini par les mots. Voici quelques exemples parmi les plus grossiers et les plus triviaux : un morceau de pomme entre les dents, une main tenant un livre posé sur une table, un canapé devant une fenêtre donnant sur un jardin où l'on peut apercevoir un bout de ciel...

* De toutes les choses en vérité car toutes les choses de ce monde sont reliées entre elles de mille façons...

 

 

Il n'y a (bien souvent) que la souffrance et la mort qui incitent les vivants à s'interroger sur l'existence. Et sur eux-mêmes. Et encore... On se demande* s'il ne faudrait pas qu'ils meurent et renaissent un milliard de fois avant qu'ils ne comprennent réellement ce qu'ils sont...

* Sans doute avec un certain à propos...

 

 

La vie collective n'est qu'un misérable trompe-solitude. Qu'un pauvre trompe-misère pour les âmes peu exigeantes et avisées. Si les êtres étaient un peu plus lucides et honnêtes, ils sauraient qu'on ne se sent jamais aussi seul que dans un groupe. On y trompe – et y recouvre – son ennui. On se distrait de soi-même (et de son quotidien triste et morne) en remplissant le vide d'indigentes activités et d'affligeants amusements pour se donner l'illusion d'une « vie pleine ». Et pourtant les hommes s'y livrent sans retenue depuis l'aube de l'humanité. Et aujourd'hui plus que jamais en cette ère d'individualisme (où l'individu se sent sans doute encore plus seul qu'autrefois...), la vie collective est au cœur de l'existence humaine. Et on voit les êtres prêts à tout – et à tout endurer – avec le monde, la société, le groupe et les autres hommes pourvu qu'ils échappent (qu'ils croient échapper) à la solitude. Bien peu ont conscience qu'ils ne parviendront jamais ainsi(1) à s'extraire de la tristesse et de la morosité. Ni même, bien évidemment, de la solitude. Car la plupart ignore que ce sentiment de solitude (la solitude que ressent chacun) n'est que le reflet – le pâle reflet – de la grande solitude ontologique de la présence, unique sujet – unique conscience – dans un univers infini d'objets, de formes, de mouvements et de phénomènes(2).

(1) Ou si médiocrement...

(2) Le monde phénoménal

 

 

En vérité, les êtres n'ont pas plus de choix (dans ce qu'ils appellent « leur existence ») qu'un insecte prisonnier d'une toile d'araignée. Sauf que nous ne sommes pas pris dans la toile – la grande toile du réel phénoménal. En dépit de notre impression d'en être séparé, nous en faisons intiment – et intégralement – partie.

La seule liberté réside donc dans le regard. Et lorsqu'il est en mesure d'habiter pleinement l'espace impersonnel, celle-ci devient totale. Absolue.

 

 

Chaque seconde, chaque heure, chaque jour et chaque année de l'existence (de toute l'existence et de toutes les vies successives(1)) ne se déroulent que dans l'instant. Aussi être présent à (et dans) l'instant constitue non seulement la meilleure façon d'être en vie – de se sentir vivre et vivant – mais aussi l'unique manière de se libérer des griffes de la temporalité. Et de toute perspective temporelle. Ainsi que de la lourdeur et de la lassitude éprouvées si souvent face à la récurrence de ses cycles. Bref, la seule voie pour accéder à – et vivre dans – l'éternité(2).

(1) Au vu de la nature des êtres (des formes) et de la récurrence de tous les cycles naturels et énergétiques, la pluralité des existences ne fait (presque) aucun doute...

(2) L'éternité de l'instant, bien sûr...

 

 

La nuit – la longue nuit d'obscurité – illuminée par les étoiles. Minuscules lueurs dans l'immensité qui éclairent le chemin des hommes. Et sous chacune d'elle, un ange qui veille à ce qu'elle ne s'éteigne jamais. Et Dieu au dessus qui orchestre la symphonie lumineuse...

 

 

En apparence, l'existence offre à chacun (à chaque être et à chaque forme) de vivre un grand nombre de situations qui ne représente pourtant qu'un infime échantillon parmi l'infinité des possibilités. Parmi l'infinité des combinaisons possibles. Grâce à ces situations (grâce à chacune d'entre elles), l'existence offre ainsi à chacun (à chaque être et à chaque forme) l'occasion d'éprouver d'innombrables ressentis et émotions afférentes ou associées. Avec là aussi une palette infinie de combinaisons et de nuances. Des plus tempérés aux plus extrêmes. Des plus doux aux plus éprouvants. Des plus extatiques aux plus douloureux. Mais l'ensemble des situations, des ressentis et des émotions n'est, semble-t-il, expérimenté et éprouvé (comme nous l'avons déjà explicité à plusieurs reprises...) que par la Conscience qui les vit et les goûte à travers chaque être et chaque forme. Et au vu du nombre infini d'êtres, de formes, de situations, de ressentis, d'émotions, de nuances et de combinaisons possibles, il est peu dire que la Conscience – l'Être-Présence – montre un goût immodéré pour la diversité et l'exhaustivité. Et qu'elle se comporte comme une entité dotée d'une incroyable et pharamineuse machinerie capable de la satisfaire de façon aussi vaste, fine et subtile que possible...

 

 

Quelle infime part de nous-mêmes léguerons-nous à la terre, aux êtres et aux hommes à notre mort ? Et comment cet humble héritage sera-t-il accueilli ? Leur offrira-t-il plus d'amour et d'intelligence ? Les aidera-t-il à vivre plus libres ? Leur permettra-t-il de se rapprocher de la beauté et de la vérité ? Saura-t-il être l'humus – une modeste poignée d'humus, il va sans dire – qui ensemencera la terre(1), fertilisera le cœur des hommes(2) et l'esprit des êtres(3) pour que s'épanouisse l'innocence ?

Si nous pouvons – mais comment le pourrions-nous ? – imaginer que notre humble legs pourra y contribuer – même très modestement –, je crois alors que notre vie – et notre œuvre – n'auront pas été vaines...

(1) Une partie de la terre...

(2) Le cœur de quelques hommes...

(3) L'esprit de quelques êtres...

 

 

Sans profondeur, sans intensité ni plénitude, l'existence n'est qu'une forme de frivolité légère et misérable. Qu'une sorte de niaiserie douloureuse et superficielle parsemée, ici et là, d'insipides plaisirs (dont les êtres se délectent autant qu'ils se contentent...). Qu'un songe sans substance qui n'est pas réellement vécu. Et qui, à bien des égards, ne vaut peut-être pas la peine de l'être... Tels sont les propos que me dicte mon cœur. Si grave en cette heure obscure et tardive...

 

 

Rōnin* inoffensif du ciel sur la voie pacifique. Marchant sur les chemins du monde avec pour seules armes, le regard, une maigre besace, un carnet et un bâton.

* Le rōnin était un samouraï sans maître dans le Japon médiéval.

 

9 décembre 2017

Carnet n°76 Hommes, anges et démons

– Les êtres, la nature et le regard –

Journal / 2016 / L'exploration de l'être 

Sur la terre, les dessins du jour. Le dessein des jours. Et dans le ciel, Dieu qui tient la plume... Et au dessus de chacun, un ange avec une feuille blanche entre les mains...

Se défaire de la terre ? Impossible. Se défaire du ciel ? Impensable. Nous sommes cloués à leurs horizons...

L’œuvre du temps sur les visages. Et les corps. Et sur la compréhension et la fréquentation du regard. Toujours neuf. Et éternel.

Qui voit son propre visage, voit le visage du monde. Qui voit le visage du monde, voit le visage de Dieu. Lorsque tout est vu, rien ne s'efface. Mais tout meurt et renaît sous une autre lumière... 

 

 

[Prélude angélique]

 

Une douleur vibrante, vivante – une douleur écarlate – me ronge les gencives, la joue. Et le palais. Comme un ange exilé du ciel, j'ai replié mes ailes. Et j'attends. Allongé sur mon lit de pierre et de désolation, les draps de la souffrance sur les épaules. J'attends que la douleur se retire. Qu'elle aille courir d'autres contrées...

L'herbe et les pierres des collines m'attendent. Et les chiens aussi patientent sagement, surpris de me voir si mal en point. Je leur serai fidèle. Je me lève, fragile et vacillant. Et nous voilà marchant à pas lents rejoindre nos terres familières. Le ciel est inaccessible aujourd'hui mais nous irons là où le monde est le moins inhospitalier. Sur la colline que l'on aperçoit depuis la fenêtre de la maison. Je manque de force et d'ardeur pour aller plus loin.

La douleur, le manque de sommeil, la fièvre et la fatigue donnent à mes pas une foulée de plomb. Et à ma silhouette une allure de fantôme chancelant et mal assuré dans cet espace trop vaste – et trop venteux.

Mais étrangement, après plusieurs centaines de mètres en ces lieux si chers à notre cœur, je retrouve un peu d'ardeur. Ici, l'air – et le monde – sont plus respirables. Et la douleur plus supportable.

Un livre de poésie et mon carnet m'accompagnent. Je les sors de ma besace et trouve la force d'écrire cette petite note.

 

 

L'ange – l'ange qui est dans le regard – me voit. Et je devine son sourire. Il se penche vers moi et me murmure une parole réconfortante. Sa présence est secourable. Il veillera sur moi le temps de la guérison. Et le temps de la convalescence. Plus tard, nous nous retrouverons comme les meilleurs amis du monde. Comme des frères. Comme des amis fraternels et inséparables. Mais « demain » et « plus tard » n'existent pas dans le langage des anges. Leur seul espace est le présent. Et la présence.

 

 

L'ange de la vie et l'ange de la mort sont les deux faces du visage de Dieu.

 

 

Les anges sont la part de nous-mêmes la plus innocente. Et la plus libre. La part divine des créatures terrestres. Elle nous accompagne depuis toujours. On en prend conscience lorsque le cœur est suffisamment mûr – suffisamment nu et humble – pour les recevoir. Pour écouter leur parole sage et réconfortante. Se laisser porter sur leurs épaules et mettre nos pas dans les leurs sans craindre les moqueries des hommes ni la chimérique colère divine qui n'existe que pour les âmes et les cœurs craintifs et ignorants.

Dieu et les anges sont Amour. Leurs gestes et leurs paroles sont portés – et guidés – par l'Amour. Comment pourraient-ils éprouver la colère ? Ils peuvent nous offrir quelques épreuves et nous faire goûter à quelques périodes douloureuses ou difficiles. Mais ils n'ont trouvé d'autres voies pour épurer notre cœur et notre âme. Et les rendre suffisamment humbles pour que nous puissions découvrir leur visage. Et être enfin capables de dialoguer avec eux.

Et j'entends leur parole : « Agissez et comportez-vous avec les êtres(1) – avec chacun des êtres que vous rencontrez – comme s'il(s) étai(en)t(2) votre fille ou votre fils, votre mère ou votre père agonisants et sur le point de rendre l'âme ! Apprenez à avoir le cœur plus fraternel !

(1) Tous les êtres vivants et toutes les formes de l'Existant.

(2) Ce qu'ils sont et ce que nous sommes tous les uns pour les autres en vérité...

 

*

 

On ne comprend qu'en éprouvant. Le reste (tout le reste) – les livres, les idées, les débats et les pensées – ne sont que des préambules. Et les préambules ne sont pas toujours nécessaires. L'être – et les êtres – sont ainsi faits. Chez eux, la compréhension pour être réelle et profonde – inamovible – doit être sensible. Sinon elle ne peut franchir les frontières de la tête – et du psychisme. Pour qu'elle devienne authentique et indiscutable, elle doit toucher la tête, le cœur et le corps et en traverser les couches les plus profondes. Sans ce triple accès – et cette triple résonance – l'être – et les êtres – ne comprennent pas. Ils savent ou croient savoir simplement...

 

 

L'homme seul face au groupe, face à la communauté, face à la société – face à tout système et à son organisation – face à ses règles et à ses lois, face aux intérêts qu'il défend, face à l'image et à la réputation qu'il veut conserver ou offrir au monde – est un grain de poussière. Un grain de poussière qui gène en particulier si l'homme seul vit en électron libre, s'il n'est affilié ou n'appartient à aucune structure et qu'il refuse d'obtempérer aux injonctions tacites, de se plier aux accommodements et de participer au grand messe de l'apparat et des représentations, aux combines, aux magouilles et aux autres petits arrangements. Un grain de poussière dont on nie presque même le droit d'exister. Un grain de poussière que l'on bannit et que l'on punit pour son refus d'intégrer le collectif et de participer à ses jeux et à ses mascarades. Un grain de poussière que l'on évince, que l'on balaye, que l'on écrase, que l'on élimine ou que l'on réduit au silence et à l'impuissance pour éviter qu'il ne grippe les rouages de la belle mécanique collective... L'honnêteté et la probité individuelles – le fait de rester bien droit dans ses bottes – n'ont jamais fait bon ménage avec les ruses, les bassesses, les stratagèmes, les mensonges et les compromissions à l’œuvre dans tous les groupes.

 

 

Pris dans la trame du monde. Pris au piège au cœur d'une multitude de forces adverses et antagonistes qui tirent à hue et à dia. Ballotté. Bringuebalé comme un brin de paille dans les vents tournoyants. Tel est le sort des vivants. Et vivre à l'écart des hommes, au milieu de nulle part, ne nous épargne que des tourbillons les plus grossiers...

 

 

Seul dans la nuit de ténèbres. Terrassé par la douleur. Démuni et apeuré. Terrorisé. Mais le regard de l'ange veille...

 

 

Le monde (en général) respecte les titres. Et la fonction. Plus rarement les hommes. Quant à moi, il n'y a que l'être – la qualité d'être et de présence – chez un individu qui me semble essentiel. Et digne de respect. Le reste, on l'accueille avec authenticité et bienveillance (autant que possible). Et l'on compose avec (mais a-t-on vraiment le choix?)...

 

 

La musique lorsqu'elle est grossière, criarde et tonitruante est une offense au silence. Et une façon maladroite et vulgaire de le remplir... Mais lorsqu'elle sait s'en faire le reflet harmonieux – ou y invite –, elle fait vibrer cette part de l'âme sensible à la beauté. Et au divin.

 

 

Sur la terre, les dessins du jour. Le dessein des jours. Et dans le ciel, Dieu qui tient la plume... Et au dessus de chacun, un ange avec une feuille blanche entre les mains...

 

 

Être. Être en vie. Être à la vie. Voir, écouter et apprendre. Ressentir et éprouver. Faire et agir. Laisser faire et laisser agir. Accueillir, offrir et partager. Comprendre un peu – et si possible transformer les yeux et le cœur en regard. Et aimer surtout. Voilà ce qu'est vivre. Voilà ce qu'est le métier de vivre. Et le métier d'homme.

 

 

Vivre est à la fois une grâce. Et une malédiction. A nous de savoir de quel côté du ciel nous aimerions goûter la vie. Mais en vérité, nous n'avons le choix. Tantôt la grâce, tantôt la malédiction nous foudroie. Et nous – pauvres de nous – nous n'avons que nos yeux pour pleurer. Et nos lèvres pour sourire. Et parfois une main implorante tendue vers le monde...

 

 

En cette vie, nous n'avons le choix ni des bagages, ni du chemin, ni des paysages, ni des visages. Ce qui arrive à l'homme* appartient à son mystère. Et à son âme. Il nous appartient seulement – si le ciel y consent – de convertir les yeux et le cœur en regard. Pour le comprendre. Les accueillir. Et les aimer.

* Et aux autres êtres...

 

 

En ce jour férié, les berges sauvages sont envahies par des hordes de motos cross et de quads pétaradant avec outrance et débordement. Dans tous les coins, des dizaines et des dizaines d'engins à moteur. Apparemment le nouveau lieu de rendez-vous de tous les décérébrés à pédales des villages alentour. Nous sommes littéralement encerclés. Et entre les engins de loisir et les agriculteurs dans leurs champs perchés sur leur tracteur qui nous interdisent de couper à travers les cultures, notre espace de paix et de solitude est sérieusement entamé. Et notre escapade vire à la fuite. En vain. Nous sommes contraints soit de rebrousser chemin, soit d'étendre considérablement notre circuit. Nous choisissons la seconde option. Vaillants dans la tourmente, nous nous enfonçons donc dans les recoins les plus sauvages des iscles – exit donc les envahisseurs – pour retrouver un peu de paix et de sérénité.

 

 

Entre une vaste étendue herbeuse et une forêt de fourrés et de bosquets, un petit terrain en friche sur lequel se sont installés des milliers de coquelicots balayés par le vent. Dessinant une mer rouge – d'un rouge vif – écarlate – secouée de milliers de vaguelettes impétueuses. J'aime les coquelicots. Sous leur air fragile et délicat se cachent des rebelles inoffensifs. Ils sont comme un clin d’œil à l'éternité. Et un pied de nez à la puissance du monde. Jamais le coquelicot ne se laissera apprivoiser. Si on lui ôte son esprit sauvage, il dépérit. Le présent – l'instant – est sa seule demeure.

 

 

Les livres – les livres véritables – sont source de réconfort. Et d'encouragement. Ils exposent la façon singulière dont leur auteur a traversé la vie. Et la façon dont il a vécu certains événements et certaines épreuves. Ils attestent – et vous rappellent – avec force que d'autres ont dû faire face aux défis, aux enjeux et aux exigences de l'existence. Aux circonstances douloureuses et à son adversité parfois. Bref que d'autres ont dû eux aussi affronter le destin commun des hommes. Et ce témoignage vous donne la force de traverser la vie – votre vie – avec les outils, la sensibilité et la compréhension qui vous sont propres. Ils vous invitent à chercher en vous la plus juste – et la meilleure – façon d'être vous-même. Au plus proche de vous-même. Pour traverser la vie comme un homme*.

* Comme un être humain...

En vérité, les livres sont les meilleurs amis du monde. Ils vous donnent ce que bien peu d'êtres de chair et de sang ne seront jamais capables de vous offrir. Une aide et un soutien sans attente ni arrière-pensée.

Bien peu d'hommes lisent ainsi. Avec cet esprit-là. Je le sais bien. Beaucoup n'ouvrent un livre que par souci d'évasion. Comme un simple passe-temps. Une simple distraction. Tant qu'ils ne chercheront rien d'autre dans les pages qu'ils tournent, ce genre de lecteurs – et les ouvrages qui décorent leur bibliothèque – ne sont, bien sûr, pas concernés par ces propos.

Quant à moi, certes, j'écris par nécessité. Et par gratitude – par infinie gratitude – envers tous les auteurs qui m'ont accompagné (qui ont si bien su m'accompagner) au cours de mon existence. Mais j'écris aussi – et surtout – pour toi lecteur qui tomberas un jour sur ces fragments. Toutes ces notes – tous mes ouvrages – ne sont, bien sûr, qu'une minuscule pierre sur le chemin – qu'un infime grain de poussière dans la vie des hommes. Et l'histoire du monde. Ils ne sont, bien sûr, qu'un dérisoire maillon dans la longue chaîne de ceux qui ont traversé la vie – et qui en ont témoigné – mais je crois au pouvoir magique – et à la transmission – véhiculés par les livres... Comme un immense et invisible fil d'Ariane qui relie – et rapproche – les hommes à travers les lieux et les âges...

 

 

Tu n'empêcheras pas – jamais tu n'empêcheras – le monde de tourner. Mais selon ta sensibilité, deux grandes options s'offrent à toi. Entrer dans la danse. Ou t'asseoir et la contempler. Si la première voie semble s'accorder à tes aptitudes et à tes prédispositions, un simple conseil : inscrits-toi dans le cours des choses. Si la seconde offre à ton cœur davantage de résonance, sache que tu n'échapperas pas à la danse. Dans tous les cas, n'oublie jamais d'être toi-même. De rester au plus proche de toi-même. Et d'écouter ce qui surgit...

 

 

L’œuvre du temps sur les visages. Et les corps. Et sur la compréhension et la fréquentation du regard. Toujours neuf. Et éternel.

 

 

Ceux qui sont préoccupés de façon permanente (de façon régulière ou très fréquente) par eux-mêmes – et leur propre existence – sont, bien sûr, peu disponibles aux autres. Et au monde. Peu disposés à aider, à soutenir et à accompagner. Et ils sont, en général, de piètres sources de réconfort. Et ceux qui se prêtent momentanément au jeu de l'altérité – et même de l'altruisme – (entre deux occupations ou deux préoccupations personnelles) demeurent des appuis faibles et peu fiables. Ils sont – et se sentent – trop peu concernés. Trop peu enclins à accorder du temps (et de l'énergie) à Autrui. Si ce n'est peut-être dans le cadre de leur fonction si celle-ci éventuellement s'y prête... Mais là encore, ils n'exécutent leur tâche que parce qu'elle est rémunérée ou qu'ils en tirent un quelconque bénéfice... et/ou qu'être en présence des autres, s'en occuper ou être à leur écoute fait partie de leurs attributions professionnelles... Mais soyons clair, il y a chez eux aucun – ou peu de – signe(s) d'empathie (ou alors une empathie feinte). Peu d'écoute. Et aucune forme de présence...

 

 

Bien des hommes ne sont que des créatures instinctuelles et gesticulantes. Des figurines de glaise animées. Et vaguement douées de paroles. Avec un cœur et un esprit étroits. Penchés sur leurs seuls intérêts. Et dont l'intelligence (si l'on peut dire...) – ou du moins les capacités intellectuelles – n'est qu'un simple outil pour tirer parti et avantage de leur environnement. Et de leur entourage. Ces hommes sont de l'énergie brute dont les mouvements sont, bien sûr, totalement autocentrés mais aussi – le plus souvent – étriqués et aveugles. Sans âme ni profondeur.

Mais peut-on vraiment qualifier ces individus d'êtres humains ? Sont-ils vraiment des hommes ? Appartiennent-ils réellement à l'humanité ? Ces questions pourraient fâcher – ou même paraître choquantes ou méprisantes – mais qu'est-ce qu'un homme sinon un être de chair et de sang – une créature organique – qui actualise le potentiel d'Amour et d'intelligence qu'il recèle en ses profondeurs. Ou, au minimum, qui prend conscience de l'espace de cœur et d'esprit qui l'habite... Sinon ne pourrait-ton pas penser à juste titre – et sans la moindre condescendance ni la moindre animosité – que ce genre d'individu n'est ni plus ni moins qu'un animal doté de capacités cognitives légèrement supérieures à celles de ses congénères à quatre pattes ? La question reste ouverte, bien entendu...

 

 

La futilité et la frivolité des hommes – de leurs propos et de leur existence – sont-elles le reflet de la légèreté du regard ? Ou celui de la bêtise ? Mon âme trop grave ne saurait répondre...

 

 

Se défaire de la terre ? Impossible. Se défaire du ciel ? Impensable. Nous sommes cloués à leurs horizons...

 

 

La marguerite et l'aigrette du pissenlit s'effeuillent au vent. Et toi, qu'égraines-tu lorsque le temps passe ?

 

 

Souvent – le plus souvent – je contemple le monde. Et il m'arrive parfois de le goûter. Et sa saveur dépend tout entier du regard. De la plénitude du regard.

 

 

Il y a parfois dans ses yeux une ombre – une nuit profonde et silencieuse. Un océan nocturne de braises et de glaces qui le fait chavirer...

 

 

J'aimerais parfois être un oiseau au vol infini. Un oiseau dont le vol n'en finirait jamais. Passant l'éternité à habiter le ciel. Et à tournoyer dans les vents. Quel délice cela serait pour l'âme...

Et je sais que l'homme est – ou peut devenir – cet oiseau. Le regard fréquentant le ciel. Et le corps, le cœur et l'esprit virevoltant au gré des souffles de la terre...

 

 

Mes fragments sont comme de petites fleurs qui poussent sur mon carnet. Et mes livres d'immenses parterres aux couleurs bariolées. Ils occupent tant d'espace dans la prairie de mon existence qu'on ne sait où donner de la tête. Il suffirait pourtant de s’asseoir par terre. Et de les regarder un à un, furtivement, pour s'enivrer de leur parfum. On pourrait aussi en cueillir quelques-uns et confectionner un petit bouquet pour la journée. Ou pour la semaine. Le jardinier alors serait heureux de son travail. De sa modeste besogne humblement offerte aux yeux – et au cœur – des hommes.

 

 

Que ton regard soit profond, consistant, solide, nu et innocent. Le corps, le cœur et l'esprit pourront connaître d'âpres ou de douloureuses périodes, mais l'âme traversera les circonstances sans encombre...

 

 

Les yeux – et les dieux – du ciel et des collines contemplent notre marche lente. Saluent en silence l'humble équipage. Et sur nos lèvres se dessine un sourire de gratitude. Un remerciement infini (pour cet accueil) que le ciel et les collines reçoivent avec tendresse.

 

 

Le bleu du ciel. Quelques nuages blancs. Et le vert des collines. Un paysage simple et harmonieux contente les yeux. Apaise le cœur. Et offre à l'âme toute la joie nécessaire. Et lorsque le vent et le chant des oiseaux s'invitent, la fête est à son comble. Le pas peut alors se faire serein. Pleinement serein.

 

 

La joie et la liberté se mesurent en instants de vie pure. Lorsque le cœur et l'esprit habitent le regard plein. La plénitude du regard...

 

 

Lorsque le cœur est en paix, le pas est mesuré. Lorsque les pas s'emballent, toujours le cœur fuit ou cherche quelque chose... Œuvre à combler une incomplétude. En vain, bien sûr...

 

 

La quantité est toujours l'ennemie de la qualité. Sache donc rester modeste en tes ambitions. En tes œuvres. Et en tes édifications.

 

 

L'instant plein est celui où le cœur est en paix. Tendre et aimant. Et où l'âme est légère et joyeuse. Accueillante.

 

 

A la rudesse du relief, du climat ou des jours, seule l'âme tendre et bienveillante peut répondre. Il n'y a d'alternative à l'adversité.

 

 

A petits pas. Geste après geste. Ainsi chemine l'homme.

 

 

Vivre en présence. Ecrire et marcher au cœur de la nature. Voilà résumé l'essentiel de notre existence. Vivre en présence – habiter le regard – ne nécessite aucun instrument*. Marcher demande une paire de sandales, un pantalon et une chemise en coton. Et éventuellement un sac de toile et un bâton. Quant à l'écriture, quelques feuilles et un stylo suffisent. Et nous voilà parfaitement équipé pour parcourir les jours...

* Si ce n'est peut-être un cœur humble et un esprit nu et vierge...

J'aime aller dans la vie – et dans le monde – avec cette simplicité. Et ce dépouillement. La traversée n'en sera que plus belle. Et plus humble. Et le lieu où nous logeons devrait être presque aussi dépouillé. Quelques meubles et quelques ustensiles indispensables. Installation et habitat simples et provisoires. Aussi fragiles et précaires que notre existence abritant pour quelques temps notre fugace passage sur terre.

 

 

Des rêves. Et des élans du cœur. Attisés par les souffles de la terre. Et la mécanique – la mystérieuse mécanique – céleste à l’œuvre dans l'âme de chacun. Ainsi fonctionnent les hommes. Et se transforme – et évolue – le monde.

 

 

De contingence en contingence, le geste – et l'âme – s'épuisent. Il convient d'habiter le geste tout entier pour que s'efface le poids des contingences. Et la lassitude de l'âme.

 

 

Nous mourrons comme nous sommes nés. Sous les yeux émus de quelques visages. Mais l'essentiel de notre existence, nous la vivons dans l'indifférence générale. Excepté peut-être en cas de déconvenues particulières ou de circonstances exceptionnelles où les yeux familiers – ou étrangers – peuvent – il est vrai – momentanément se faire tendres, aimants ou secourables. Ainsi naissent, vivent et meurent les hommes(1).

Et pour les êtres au cœur sensible, ce manque de compagnonnage et de mansuétude peut paraître infiniment triste et amer. Et sans doute même désespérant.

Seuls les êtres qui viventdans le regard savent que la présence(2) est le seul amour possible. La seule mère aimante et attentive. La mère de tous offrant son amour à chacun. Et eux seuls peuvent s'en faire les justes émissaires. Pour les autres comme pour eux-mêmes...

(1) Et les animaux sont évidemment encore moins bien lotis que les humains en matière de tendresse, d'amitié et d'assistance...

(2) La conscience.

 

 

Tout est dans le regard. Il n'y a donc rien à attendre de la vie. Et du monde. Sinon vivre et accueillir ce qui est offert. Si tu as quelques forces à jeter dans la bataille, ne t'occupe pas de l'existence. Excepté peut-être pour répondre aux exigences et aux nécessités du corps, du cœur et de l'esprit. Œuvre plutôt à te défaire des encombrements, de l'inutile et du superflu* qui alourdissent – et assoupissent – l'âme afin de faire naître la plénitude du regard.

* Et c'est là bien sûr, l’œuvre naturelle de la vie qui, de désir en satisfaction et de satisfaction en désillusion, épure le cœur et l'esprit...

 

 

Les yeux donnent sur la fenêtre de la maison qui s'ouvre sur le paysage qui s'étend jusqu'à l'horizon où se dessinent les confins de la terre et du ciel. La terre et le ciel concentrés sur l'horizon ramènent au paysage qui ramène à la fenêtre de la maison qui ramène aux yeux. Et lorsque s'ouvre le regard, tout se relie en une seule trame. En une seule étoffe entre-maillée et continue...

 

 

L'existence terrestre. Une vie de labeur, d'attentes, de contingences et de menus plaisirs. Bien des êtres en ce monde vivent ainsi. Hommes et animaux. Enfermés dans le cercle restreint de l'organique. Et de la matière. Encerclés par les frontières exiguës du psychisme. Petit carré d'existence où ne peuvent naître ni la paix ni la joie. Et où l'amusement, la distraction, le repos et la tranquillité sont les seuls instants exonérés de la longue série de servitudes quotidiennes. Et qui tiennent lieu – bien souvent – de consolations avec parfois l'espoir de sortir de cette étroite ornière. Seules réponses possibles – et envisageables – à leur légitime aspiration au bonheur...

 

 

Fréquente-toi avec assiduité. Et honnêteté. Observe la façon dont tu vis – et traverses – les circonstances. La façon dont tu entres en relation avec la vie. Avec le monde. Et avec toi-même. La façon dont tu entres en relation* avec ce qui arrive – tout ce qui arrive et surgit. Et tu comprendras qui tu es. Et comment tu fonctionnes. Puis viendra le temps où tu finiras par comprendre ce que tu es...

* La façon dont tu te comportes à l'égard des désirs, des pensées, des émotions, de la frustration ; du confort, de l'inconfort ; de la dureté, de la haine, de la violence ; de la bonté, de la tendresse, de la fragilité ; de la beauté, de la laideur ; de la bêtise, de l'intelligence ; de la normalité, de la différence ; de l'espoir, de la désillusion, du désespoir ; de la douleur, de la souffrance, de la solitude, de l'ennui etc etc.

 

 

Si tu n'éprouves – ou ne tires – aucune joie de ta vie, de tes jours, de ton travail ou de ton œuvre... et si tu attends des hommes – et du monde – quelques louanges ou quelques signes d'encouragement*, délaisse aussitôt ton labeur et les aspects inutiles de ton existence où tu peines et t'éreintes dans le seul but d'obtenir quelques marques d'amour et de reconnaissance. Et cherche une besogne – et des activités – qui t'offrent naturellement la joie de chaque geste tout au long de leur accomplissement...

* Les hommes n'aiment ou n'apprécient que ce qui leur procure un quelconque bénéfice. Et si l'existence, le travail ou l’œuvre d'Autrui ne leur en offrent aucun (et ne leur occasionnent aucun préjudice...), ils n'y prêtent aucune attention...

 

 

Les émotions et les sentiments forts ou denses résonnent en profondeur. Ils peuvent éveiller (ou réveiller) une intense sensibilité. Et faire naître de profondes réflexions qui éclairent l'existence en lui offrant une lumière plus vive, plus fine et plus vaste.

 

 

Seul le mystère des destins pousse les êtres les uns vers les autres. Ou les écarte les uns des autres... On peut bien échafauder mille explications plausibles ou vraisemblables, aucune n'en livrera le secret. Cette énigme restera toujours impénétrable au cœur humain...

 

 

Au cœur d'une minuscule pinède entourée de chênes verts, nous avons fait halte pour trouver un peu d'ombre après une longue marche harassante sous le soleil. Assis sur une fine couche d'aiguilles de pins, à proximité de longs rochers couverts de lichens, nous avons trouvé refuge sous les branchages des grands arbres. L'endroit est calme. Et magnétique. Et nous savourons cet espace – et ces instants de plein air – qui nous sont si familiers. Heureux comme chaque jour de nous retrouver au cœur de la nature sauvage sans la moindre présence humaine à proximité.

Et si nous le pouvions, c'est dans l'un de ces merveilleux endroits isolés que nous aimerions installer un petit cabanon en bois pour y passer le restant de nos jours. Malheureusement en ces contrées, la législation et la réglementation sont devenues si strictes et si complexes en matière d'habitat qu'il n'existe quasiment plus aucune possibilité de s'installer en de tels lieux sauvages et isolés ni d'ailleurs dans la moindre zone naturelle sauf à s'inscrire dans une totale illégalité* (et se voir, le cas échéant, intimé l'ordre par injonction administrative ou pénale de détruire notre lieu de vie et de décamper au plus vite avec l'appui des forces de l'ordre...).

* Aujourd'hui, seules de très rares municipalités ferment encore les yeux sur les installations dites sauvages... La société réprouve et condamne avec force ce que certains technocrates et hauts fonctionnaires appellent la cabanisation du monde. Et décourage donc l'installation d'habitats alternatifs non reliés aux réseaux...

 

 

Offre – et partage – avec le cœur à la fois vide et plein. Offre ce que tu as à offrir et partage ce que tu sais et/ou ce qui te semble juste de partager. Mais fais-le sans attente ni arrière-pensée. Sinon garde-toi de partager... Ton offrande aurait le goût âcre du devoir teinté d'idéologie, de l'enseignement condescendant ou du besoin inconscient de réciprocité ou de reconnaissance. Pour offrir, il convient, bien sûr, d'être à l'écoute des situations et des circonstances mais aussi – et surtout – de s'effacer. Il n'y a d'autre façon de donner...

 

 

Les chiens et la nature, les insectes, les oiseaux, le ciel, la terre et les paysages offrent tout l'amour dont un homme a besoin. Et lorsqu'il lui arrive d'être plus peiné qu'à l'ordinaire, la présence lui offre – à travers un surcroît de sensorialité – ce qui lui est nécessaire pour retrouver la paix, la joie et la sérénité. Des hommes, je crois, qu'il n'y a rien – vraiment rien – à attendre. Hormis peut-être un soutien ponctuel ou un réconfort superficiel. Mais, le plus souvent, ce genre d'accompagnement ne peut contenter l'âme de façon profonde et durable...

 

 

Fin d'après-midi entre ombre et soleil. Ultime pause de notre escapade du jour. Assis par terre au bord du chemin, avec un livre de poésie sur les genoux, entre mes deux chiens couchés à mes côtés, harassés par la chaleur printanière – presque estivale – et notre longue promenade. Délicieux instants de paix et de plénitude.

 

 

Si l'on ne goûte à l'instant plein – à l'instant pur – autant que l'on en est capable au cours d'une journée – et si possible à chaque instant où cette grâce nous est offerte –, alors on ne vit pas. On est actionné par de simples forces mécaniques qui donnent à notre cœur et à notre âme – mais aussi à notre existence – des allures d'automate sans vie ni substance.

 

 

A l'effroyable et colossale colonisation de la terre par les hommes, les fourmis n'ont rien à envier. Elles ont bâti dans tous les sous-sols de la planète d'incroyables cités et d'invraisemblables galeries qui ressemblent étrangement aux gigantesques mégalopoles et aux impressionnants réseaux routiers et autoroutiers des êtres humains. Avec peut-être quelques autres espèces comme les rats, voilà deux peuples aux aspirations expansionnistes très ambitieuses. Et forts envahissants...

 

 

La journée s'achève. Une journée supplémentaire parmi les 29 200 que compte ordinairement la vie d'un homme contemporain(1). Un jour ordinaire. Même si chacun est vécu sur un mode qui l'est un peu moins offrant à chaque heure – voire à chaque instant – un caractère unique et singulier(2). Un jour presque quelconque avec ses longs espaces de liberté, ses instants de présence – ses instants de vie pure, ses menus travaux domestiques, une longue escapade au cœur de la nature, l'écriture de quelques fragments et les merveilleux moments de jeux et de tendre complicité avec mes compagnons à quatre pattes. Le cœur est serein. Et en paix. Et l'âme pleinement comblée...

(1) Selon une espérance de vie à la naissance d'environ 80 années dans ces contrées du monde en ce début de 21ème siècle...

(2) Voire même exceptionnel...

 

 

Qui voit son propre visage, voit le visage du monde. Qui voit le visage du monde, voit le visage de Dieu. Lorsque tout est vu, rien ne s'efface. Mais tout meurt et renaît sous une autre lumière...

 

 

A petits pas sur le chemin. Le cœur et l'âme aimants.

 

 

Les corps renaissent des corps. Le monde renaît du monde. Sous le regard immobile et éternel du ciel. Mais le mystère des jours reste entier...

 

 

Le désir rétrécit le monde. Sans désir, le monde s'élargit. Il devient si vaste qu'il ensemence le terrain de tous les possibles. Et le ciel toujours s'enivre de notre joie d'être au monde.

 

 

Dans le ciel, un oiseau passe furtivement. Avant de disparaître dans l'immensité. Lorsque l'on est – un tant soit peu – attentif à ce qui nous environne, on comprend que l'éphémère et l'éternel toujours se saluent. Et s'entremêlent. Et cette rencontre est toujours un délice incomparable pour le cœur de l'homme...

 

 

L'homme humble et simple à l'existence tranquille et dépouillée ne peut vivre dans le monde de bruits, d'agitation, d'abondance et d'orgueil qu'ont bâti ses congénères. La vie – et les lois naturelles – veillent à ce qu'il se tienne à l'écart. Il en va du respect – et de la paix – de chacun...

La pluie sur le toit, le vent dans les feuillages et le chant des oiseaux sont la seule musique qu'il lui est possible d'écouter. Les bruits humains sont presque toujours ressentis comme une agression. Une offense au silence naturel de la terre.

 

 

Instant de vie éternelle à qui sait le goûter...

 

 

Le pas aussi léger que le vent. Ne laissant aucune trace de son passage. Heureux homme celui qui traverse la vie – et le monde – ainsi.

 

 

Les hautes herbes, les fleurs sauvages, les arbres, les hirondelles facétieuses dans le ciel gris, les collines qui se détachent au loin. Et le vent qui donne à ces merveilles – à toutes ces merveilles – comme un surcroît d'ardeur et de vitalité. Quel spectacle grandiose et harmonieux pour les yeux. Et quelle source de joie pour l'âme et le cœur...

L'homme qui n'a jamais goûté à ces instants – en étant pleinement attentif et ouvert – pleinement sensible – n'a jamais vécu. N'a jamais vu et ressenti les beautés de la terre.

Comment ne pas s'attarder davantage en ces lieux magiques pour contempler dans le soir couchant cette grâce – et cette lumière – qui nous sont offertes ? Malgré l'heure tardive, nous resterons encore quelques instants pour admirer la vie et les paysages. Nous aurons bien le temps de retourner à la maison avant que la nuit ne s'installe...

 

 

Le chant du vent dans les arbres. Comme les louanges naturelles de la terre au Divin.

 

 

Sois ton propre temple. Et ta propre église. Et lorsque tu auras le cœur suffisamment humble et accueillant, Dieu t'ouvrira les portes. Et te confiera ses secrets.

 

 

Aucun vocation religieuse. Mais une aspiration spirituelle* totale. Absolue.

* Aspiration à la vie pleine... La paix et la joie sont offertes par surcroît...

 

 

Il y a tant de façons de vivre. Tant de manières d'être. De marcher, de parler, d'écrire, de manger, de rire et de pleurer... Et chaque chose que nous faisons – chaque geste que nous réalisons – est l'expression parfaite – l'exact reflet – de ce que nous sommes. C'est tout notre être – avec ses caractéristiques et ses singularités – qui s'y expose. Et s'y affirme. Il ne peut en être autrement...

 

 

Aucune rose n'exhale le même parfum...

 

 

L'homme a beau être présence ou vivre en présence, sa vie – et ses gestes – n'en demeurent pas moins ceux d'un homme...

 

 

L'homme occidental s'est tant éloigné de lui-même, il s'est tant détourné de sa nature profonde et il est devenu si orgueilleux qu'il s'imagine seul et isolé. Seul dans l'existence. Seul au monde. Et seul maître à bord. Pauvre et misérable petite créature si étrangère à ses racines terrestres – et à sa vocation métaphysique et spirituelle si essentielle à son identité fondamentale – qui se jette à corps et à cœur perdus dans maintes futilités. Et dans une course absurde et effrénée au progrès. Comme piètres compensations et maigres sources de réconfort à sa misère...

 

 

La profondeur* d'un homme – sa fragilité et sa misère* – m'émeuvent profondément. Ses mensonges, ses manigances, ses facéties, sa futilité et sa prétention au mieux m'indiffèrent. Au pire m'exaspèrent...

* Comme celles de tous les êtres bien évidemment...

 

 

Les moines – et les solitaires(1) – sont les sentinelles(2) de l'humanité – de notre humanité. Les plus dignes. Et les plus brûlantes.

(1) Les solitaires assumés en quête d'Absolu...

(2) Même si, bien sûr, tous y participent : artistes, poètes, philosophes, scientifiques, hommes et femmes de la rue...

 

 

Il y a un temps pour vivre. Apprendre, découvrir et explorer. Et un temps pour contempler. Se laisser découvrir et explorer. Non que la vie et les circonstances disparaissent, bien sûr. Mais avec les années (et la maturité), l'existence et les événements nous traversent à la fois avec plus de profondeur et de légèreté. On y est toujours associé. Mais on y est moins engagé. On y est investi d'une manière plus ouverte et détendue. De façon moins personnelle...

 

 

Dans l'épreuve, se manifeste la dignité ou la veulerie. Et nous n'avons pas même le choix d'en décider...

 

 

Au cours de quelques recherches, j'ai découvert par hasard – par le plus grand des hasards (mais existe-t-il seulement ?) – la vie de Marguerite Porete, poétesse et mystique du 13ème siècle, rattachée au mouvement des Béguines(1), jugée hérétique et brûlée vive avec son ouvrage Le miroir des âmes simples(2) où elle aborde – et analyse – le fonctionnement de l'Amour divin. J'ai également appris qu'elle était sûrement l'une des grandes inspiratrices de maître Eckhart, la célèbre figure de proue du mysticisme rhénan.

(1) Merveilleux mouvement de femmes libres à la fois religieuses et laïques qui se regroupaient parfois en communautés essentiellement dans les Flandres....

(2) Le titre exact et complet est Le miroir des âmes simples et anéanties et qui seulement demeurent en vouloir et désir d'amour

 

 

L'inspiration poétique et artistique tire essentiellement sa source de la porosité de l'être. Et de la sensibilité. De la capacité à se laisser profondément traverser – et toucher – par les événements, les êtres et ce qui nous environne...

 

 

J'envie parfois les nuages qui vivent en toute liberté dans le ciel. En se laissant porter par le vent. J'aime cette existence libre et sauvage. Sans territoire ni frontière. Avec l'azur comme seule aire de jeu et le vent comme unique compagnon*. Ah ! Quel délice cela serait pour l'âme si l'homme pouvait vivre ainsi...

* Compagnon de voyage et d'agrément...

 

 

Celui qui implore le ciel pressent ce qu'il ne peut vivre encore... En posant le pied sur la première marche de l'escalier céleste, il honore malgré lui la dimension métaphysique de l'homme. Et sa vocation spirituelle...Ainsidébute l'ascension vers le sommet des hauteurs divines...

 

 

Qu'avait donc le christ pour vivre sinon sa foi inébranlable à l'égard de Dieu ?

 

 

Ne sois sûr de rien. Vis dans l'incertitude de chaque instant. Il n'y a de plus juste façon de vivre. Et d'être au monde.

 

 

Hors de toute temporalité, la présence est. L'âme nue et humble peut la goûter. Vivre ainsi est vivre en présence. Dans la présence de Dieu. Il n'y a d'autre chemin pour combler le cœur d'un homme.

 

 

Vis où est ta place. Et de la façon qui t'est la plus naturelle. Si tu ne sais comment t'y prendre, sonde ton cœur. Et il te dira où aller. Et comment vivre. Aie confiance en ce qu'il t'offrira. La présence sera son offrande la plus précieuse. Honore-la autant que tu en seras capable...

 

 

Si tu as besoin d'appui, de soutien, de conseils, ne les cherche pas dans le monde. Cherche en toi. Et dans les âmes vivantes. Le monde se trouve là où sont les âmes vivantes. Il n'y a d'autre monde sur cette terre...

 

 

Je cherche l'âme du monde – et la présence de Dieu – dans les yeux des hommes. Et je ne vois qu'une immense angoisse. Comme un sombre manteau qui recouvre l'ignorance et la stupeur d'être au monde. Avec parfois quelques pauvres guirlandes accrochées à l'entrée du puits sans fond où les hommes craignent tant de s'enfoncer...

 

 

S'abîmer dans la contemplation. Jusqu'à la dissolution. Jusqu'à la disparition. L'effacement est une grâce. Et une perpétuelle invitation à la joie. Et à la paix.

 

 

La solitude offre à l'être une densité – et une intensité – que le monde érafle, ampute ou désintègre. Cette destruction partielle ou complète est une malédiction pour les êtres. Mais tant que l'on est incapable de vivre en sa compagnie, les charmes pervers du monde grégaire continueront à nous séduire...

 

 

Dans le ciel, seul le vent impose aux habitants azuréens le rythme. Et les itinéraires. Ici, sur terre, ce sont les jours qui dictent leurs exigences. Et il n'y a qu'une seule manière de vivre au zénith comme au nadir : obéir aux injonctions du ciel et de la terre. S'y opposer – ou y résister – serait se condamner à l'inconfort. Et à la dévastation*. Et malgré nos efforts, tous nos édifices seraient vite balayés ou anéantis. Nul ne peut rivaliser avec la puissance de vie à l’œuvre sur terre comme au ciel. Quant à la vaincre, il ne faut pas y compter... Sa souveraineté est implacable.

* A l'inconfort et à la dévastation des lois contre-nature...

 

 

Les hommes – la plupart des hommes – sont des animaux ignorants. Leurs instincts leur dissimulent le cœur métaphysique et spirituel qui fonde (pourtant) leur humanité. Ils n'ont encore achevé leur croissance – leur maturité d'esprit et de cœur – pour être qualifiés d'êtres humains. L'essentiel d'entre-eux restera toute son existence dans cet entre-deux : mi-homme mi-bête. Des pré-humains en quelque sorte...

 

 

Ah ! Si vous saviez comme les nuages se rient de nous ! En regardant le ciel, j'entends leurs moqueries. Et je devine leurs rires narquois. Et parfois même leurs sarcasmes. Et à mon tour, j'éclate de rire. Vus du ciel, les hommes ont l'air de si petites choses. Et depuis les hauteurs, leurs activités – et leurs comportements – ne ressemblent qu'à de pauvres gesticulations. Les nuages ont raison de railler le peuple qui, malgré sa misère et ses gestes dérisoires, s'imagine le seigneur des lieux...

 

 

Les nuages, les arbres et les herbes sauvages sont tellement plus sages, plus dignes et plus aimables que les hommes. Leur compagnie est toujours un enchantement. Sans doute parce que la terre et le ciel sont leurs maîtres. Et qu'ils leur obéissent sans jamais rechigner. On ne peut malheureusement pas en dire autant des hommes...

 

 

Devant un sourire – un seul sourire – un sourire vrai – un sourire authentique –, le monde s'efface. Et ne reste bientôt sur nos lèvres que le goût sucré de l'Amour...

 

 

Le symbole le plus fort – et le plus juste – de l'humanité est, à mes yeux, un homme seul qui marche dans le monde. Avec, au loin, l'horizon qui se dessine... Ou un homme seul assis sur un rocher en pleine nature qui médite devant l'eau fuyante d'une rivière. Toute autre image me semble impropre à représenter l'homme de façon aussi précise et aussi complète...

 

 

A quel Dieu sacrifies-tu ta vie, homme ? N'es-tu pas las* de dédier ta besogne et tes œuvres – toutes tes œuvres – aux divinités de l'or et du confort ? Ne vois-tu donc pas qu'existent d'autres Dieux sur terre comme au ciel que tu as toujours négligés – et qui attendent eux aussi que tu te prosternes devant eux ? Lorsque tu sauras t'agenouiller avec joie et tendresse devant le Dieu Amour, la richesse véritable coulera à flot. Et ton or se convertira aussitôt en joie et en paix. Ecoute-moi, homme ! Tu ne trouveras de Dieu plus prodigue en ce monde...

* Suffisamment exsangue et presque moribond...

 

 

Les chiens, les nuages, les oiseaux et les arbres sont nos plus fidèles amis. Chaque jour, ils attendent notre lever. Que nos yeux se lèvent vers eux pour leur témoigner notre gratitude d'être présents à nos côtés...

Pour les hommes – mais aussi pour les êtres (les êtres humains) qui appartiennent au cercle restreint de mes fréquentations – je suis une fenêtre – une petite fenêtre qu'ils ouvrent (qu'ils prennent le temps et la peine d'ouvrir) régulièrement ou de temps à autre pour faire entrer un peu d'air frais dans leur existence, leur perception ou leur univers idéatif. Une petite fenêtre qui offre une autre perspective. Et qui expose – et donne à voir – un autre univers qui semble les intéresser ou les attirer – et parfois même qui les fascine – le temps de la rencontre. Rencontre qui a lieu, en général, lorsqu'ils sont en proie à la réflexion, au doute ou qu'ils traversent quelques épreuves douloureuses... Mais petite fenêtre qu'ils préfèrent, l'essentiel du temps, laisser fermée pour ne pas être emportés par le grand vent frais – et déstabilisant – de l'inconnu et la remise en cause totale de leur façon de vivre et d'être au monde. Petite fenêtre qu'ils délaissent alors soit qu'ils se sentent trop peu disposés ou préparés à l'aventure de l'inconnu, soit qu'ils préfèrent retrouver les piliers étroits certes mais familiers et rassurants de leur monde après leur petite escapade en terre inconnue, soit qu'ils estiment nécessaire de prendre le temps d'intégrer quelques-uns des éléments entrevus au cours de leur visite...

Tout au long de mon existence, je n'ai jamais cessé d'être cette petite fenêtre à disposition que l'on ouvre et que l'on referme à sa guise. Et jamais, je crois, je ne cesserai d'être cette petite ouverture. Aux yeux des hommes(1) – et en leur présence –, jamais je ne pourrais être autre chose(2)...

(1) Qu'ils me soient proches ou non...

(2) On me fréquente rarement pour mes beaux yeux, mon visage accort, mon amabilité, mon savoir vivre ou ma façon d'être... La simplicité et l'austérité de mon quotidien, l'hétérodoxie de ma perception, de mes savoirs et de mon existence, la façon dont je sonde et pousse dans ses derniers retranchements mon interlocuteur, le côté abrupt et tranchant de mon être viscéralement rivé à l'essentiel et le caractère foncièrement indépendant et solitaire de ma personnalité doivent sans doute en rebuter plus d'un...

 

 

Les références personnelles(1), temporelles(2) et humaines(3) encombrent l'esprit. En s'en défaisant, l'esprit se dénude et se libère. Devient disponible aux situations et aux ressentis(4) de l'instant. Et aux gestes, aux paroles ainsi qu'aux pensées(5) et aux émotions(5) qui pourraient éventuellement surgir...

(1) Représentations et repères habituels de la perception et de la pensée...

(2) Inscription dans toute forme de temporalité. Et projections mentales dans le passé et le futur...

(3) Lois, règles, normes et représentations sociales...

(4) Ressentis corporels et énergétiques...

(5) En lien en particulier avec ce qui est vécu dans l'instant et ce qui nous environne de façon présente...

 

 

En ce qui concerne les gestes – et les activités – qui nécessitent une technique, un savoir ou un savoir-faire, déniche-toi des enseignements et/ou un instructeur. Et laisse-toi instruire. Accorde-toi un temps d'apprentissage. Et consacre-toi à l'étude jusqu'à ce que la technique, le savoir ou le savoir-faire soient totalement (et si possible parfaitement) intégrés à ton être – à toutes les dimensions de ton être* – de façon à ne faire qu'un avec eux. Puis oublie-les. Et redeviens nu et vide de savoirs et de références. Lorsque la situation exigera l'usage d'une technique, d'un savoir ou d'un savoir-faire, laisse-les surgir naturellement et s'organiser spontanément. Et dans tous les cas, sers-t'en avec l'esprit innocent du débutant. Et il est alors fort probable que tes gestes non seulement portent en eux une parfaite maîtrise technique mais s'effectuent de façon juste, appropriée et efficace. Et soient exécutés (tant sur le fond que sur la forme) de manière irréprochable...

* Tête, corps et cœur(1)...

(1) L'intégration au cœur (à la sensibilité) est sans doute le plus long et le plus complexe des apprentissages...

 

 

Habiter poétiquement le monde. Il n'y a pour moi – comme pour les hommes – d'autre issue. Vivre de façon simple et humble. Dans une frugalité joyeuse et responsable. En harmonie avec l'environnement et dans le respect profond de l'Existant. En se faisant l'exact reflet de la beauté et de la précarité de l'existence terrestre.

Cette manière d'être au monde est à la fois un pied de nez et un pacifique mouvement de résistance et d'opposition à la vie contemporaine – bien trop complexe, artificielle et sophistiquée – fondée pour l'essentiel sur la peur et le désir (les peurs et les désirs de tous ordres), l'abondance, le confort luxueux, l'inutile, le superflu et le gaspillage à outrance.

 

 

Il ne faudrait écrire que par surplus poétique. Lorsque l'être saturé de présence – submergé par l'Amour, la joie et la paix n'a d'autre choix pour se désenivrer que d'en laisser s'échapper quelques coulées ou quelques gouttes. Il n'y a que dans ce courant que peuvent naître la beauté et la justesse. La grâce d'une parole. Je tâcherais donc, désormais, de me faire plus silencieux...

 

9 décembre 2017

Carnet n°75 Pensées sur soi, le regard, la vie, le monde, les hommes et les êtres

– Un peu de philosophie dans son coin –

Journal / 2016 / L'exploration de l'être 

Assis à la même place depuis des siècles, le vieux sage regardait le monde et les saisons défiler. Tant de cycles et de costumes il avait observés au cours de sa longue existence. Mais son regard demeurait inchangé : doux, ouvert, innocent et accueillant. Ne blâmant jamais les modes ni le climat. Ôtant ou réajustant simplement de temps à autre le vieux châle qui lui couvrait les épaules.

La mission de tout homme est de découvrir – et d'accomplir – la tâche pour laquelle il est né. Malheur à celui qui ne parvient à la trouver. Ou qui la trahit pour de fumeux ou fallacieux prétextes.

 

 

Que serait la vie – et le monde – sans toi ? Et que seraient-ils sans le regard ?

 

 

L'espace éminemment poreux et hermétique du monde – et de la vie – que l'on peut pourtant pénétrer d'un seul regard...

 

 

Dans sa grande malice, Dieu n'a pas oublié d'offrir au monde sa part de noirceur et de grisaille qu'il a pris soin de mélanger à ses merveilles et à ses beautés. En saupoudrant le tout d'une bonne dose d'humour et d'espièglerie...

Et l'on voit partout les hommes chercher à démêler les fils avec sérieux et application...

 

 

Tu ne sais que faire ? Ni où aller ? Regarde simplement (sans a priori ni impatience) ce vers quoi la vie – et le monde – te porte naturellement. Puis marche pas à pas. La direction pourra changer. Mais demeure fidèle aux mouvements qui surgiront naturellement. Et aux rythmes qui guideront ton allure.

L'emboîtement des pas dans le silence. Ou comment laisser l'individualité s'épanouir selon sa sensibilité et ses prédispositions en demeurant au sein de l'espace de présence impersonnel...

 

 

Regarde le monde. Regarde les formes naturelles. Que font-elles ? Elles vivent selon leur nature. La rose vit simplement – et naturellement – son existence de rose. Rien n'est plus aisé pour elle. Elle se laisse mener par les lois naturelles qui régissent son destin (son destin de rose). L'homme* a toujours été si emprunté en matière d'existence... se posant toujours mille questions idiotes et inutiles*...

* Illustration probante de l'entre-deux humain : l'homme jusqu'à aujourd'hui s'est toujours situé à la jonction de ses instincts organiques (de ses besoins instinctuels d'animal) et de ses caractéristiques préconscientes induites par sa cognition et ses capacités balbutiantes d'interrogation et de distanciation...

 

 

Exercice individuel (sensibilité, affinités et prédispositions) : présence, profondeur et tranquillité. Philosophie, poésie et écriture. Solitude, consistance et simplicité. Quotidienneté, rusticité et dépouillement. Sérieux, austérité et autonomie(1). Liberté, oisiveté(2) et contemplation. Chiens, nature(3), marche et bâton martial(4) .

(1) Pas totale ni complète, bien sûr, au vu de l'interdépendance des formes phénoménales...

(2) Au sens noble du terme... heures libres et longue plages d'instants de vie pure...

(3) Espaces sauvages...

(4) Bâtons japonais (Bō et Jō).

 

 

Et pourquoi ne pas simplement s'allonger au soleil. Et vaquer à ses nécessités – selon les exigences du quotidien et les activités vers lesquelles on est naturellement porté* – en posant un regard bienveillant sur le monde et en usant de gestes et de paroles justes, tendres et réconfortants à son égard en attendant que les circonstances impulsent les pas...

* Ou vers lesquelles la journée nous porte naturellement...

 

 

Tant d'êtres – et tant d'hommes – se battent et se débattent avec la vie. Avec leur vie. Nous tous en vérité. Et je songe à quelques auteurs (lus ou, plus ou moins, lus) : Georges Haldas et ses Carnets de poésie, César Pavese et son célèbre Métier de vivre, Primo Levi et son fameux Si c'est un homme, Fernando Pessoa et son Livre de l'intranquillité et à bien d'autres encore qui nous exposent parfois par le menu (ou de façon synthétique) les affres de leurs combats, la misère de leur quête. Et de leur vie. Leurs minuscules victoires. Les leçons (les pauvres leçons souvent) tirées de leur expérience. Leur compréhension de l'existence. Et du monde. Leurs espoirs et leur désespoir. Bref, le destin commun des hommes. Je songe aussi aux guides et aux manuels de sagesse : les philosophes antiques, le Manuel d'Epictète, les Pensées de Marc-Aurèle, mais aussi celles de Pascal, les Essais de Montaigne etc etc qui tentent de déchiffrer et de décrypter le vrai, le juste et le réel afin de parvenir au Bien souverain... Et puis je songe aux livres de lumière – rares et précieux – qui éclairent celui qui comprend mais qui plongent sans doute les autres – tous ceux dont le cœur est encore trop immature pour comprendre – dans un abîme d'effroi, d'efforts, d'espoir et de désespoir. Les êtres – et les hommes – n'en ont donc pas fini de se battre et de se débattre avec la vie. Avec leur vie. Une longue route les attend... Mais ne doutons pas un instant – un seul instant – que ce cheminement les mènera pas à pas vers la compréhension. Vers la joie et l'Amour. Vers la paix, l'intelligence et la lumière...

 

 

En habitant l'impersonnel*, on ne devient pas un surhomme. On voit l'homme – sa fragilité et sa misère – avec lucidité. Et on l’aime tel qu'il est. On le réconforte et l'assure de notre amour inconditionnel pour qu'il puisse (un jour peut-être...) grandir et mûrir afin d'apprendre à son tour à aimer sans condition.

* L'espace de présence impersonnel...

 

 

Du monde, il ne restait rien. Quelques ruines. Vestiges des civilisations barbares des premiers millénaires.

Serait-ce le début d'une histoire ? Oui, peut-être... Et qu'importe ! Mille histoires ne feront – et n'offriront – jamais un instant plein. Aussi à quoi bon écrire des histoires...

 

 

Une marche humble et lente. Ainsi chemine le sage en toutes contrées.

 

 

La solitude de l'homme n'est rien – elle est même totalement inexistante – en comparaison de la solitude du regard face au monde...

  

 

Trois petits tours sur l'horizon – sur la petite ou la grande scène du monde. Quelques caresses et quelques coups. Et les formes disparaissent...

Et qui sait non combien dure* mais combien demeure le regard ?

* Le regard ne peut durer puisqu'il ne s'inscrit dans aucune temporalité...

 

 

Jour après jour. Semaine après semaine. Mois après mois. Année après année. Les cheveux poussent et blanchissent... Et toi, qu'as-tu fait de tes heures ?

 

 

Qu'a-t-on à partager avec les hommes ? Quelques paroles futiles ? Quelques propos frivoles autour d'un verre ? Les actualités du moment ? Un repas de fête bien arrosé ? Quelques affinités, quelques projets ou quelques souvenirs en commun ? Non, rien de tout cela. On leur tend parfois la main – un geste sans doute bien maladroit – mais à la joie, à la consistance et à la profondeur, ils préfèrent le rire, la légèreté et l'insouciance... Aussi que peut-on faire pour eux ? Sinon les aimer à distance du fond de notre solitude...

 

 

La misère(1) fait partie de la vie de l'homme(2). Seul le regard – le regard impersonnel – peut la transcender. Et la transformer en joie lucide et assumée. En paix bienveillante et réconfortante...

(1) La misère organique et psychologique.

(2) Et, plus généralement, de la vie terrestre...

 

 

Pour les yeux*, l'existence – et le monde – se balancent sans cesse entre le misérable et le merveilleux. Ce qu'ils sont, l'un et l'autre, fondamentalement selon le prisme perceptif (et le filtre psychologique) adopté. Quant au regard, il voit ce qui est : l'existence, le monde, l'angle de vue et la coloration psychiques tels qu'ils sont. Et se manifestent...

* Pour le psychisme – la perception psychique ou mentale...

 

 

Vivre dans la solitude. Et devoir parfois traverser l'hostilité des jours – et du monde – sans appui, sans soutien ni réconfort. Sans autre amitié que la sienne. Sans autre confident que son carnet. Ne pouvant compter que sur soi, la présence, la nature et ses frères naturels. Pourrais-tu vivre ainsi ?

Oh ! Bien sûr, il nous arrive de souhaiter rencontrer un semblable – un cœur semblable. Mais où se trouve-t-il sur cette terre ? Comme il nous arrive de penser à la longue lignée des ermites – et à sa merveilleuse figure de proue, Han Shan ! Et cette idée de communauté – trans-temporelle et trans-géographique – nous console de nos ponctuels(1) chagrins de solitaires.

Mais il y a aussi le ciel, les nuages, les arbres, les montagnes, les herbes, les insectes, les oiseaux et la bouille radieuse de nos compagnons à quatre pattes qui nous préservent des trop lourds stigmates de la solitude car il n'est pas toujours aisé pour un homme – quand bien même il est amené à fréquenter Dieu(2) régulièrement sinon quotidiennement – de vivre éternellement en sa compagnie. Et de vivre à chaque instant en bonne intelligence et en parfaite harmonie avec les circonstances. En particulier lorsque la période se montre difficile, douloureuse ou pesante pour on-ne-sait-quelles obscures et lumineuses raisons... même si, de toute évidence, l'exercice de la solitude est bien moins délicat et éprouvant que l'existence vécue dans la compagnie des hommes...

(1) Et parfois profonds...

(2) Ou, si vous préférez, à habiter la présence impersonnelle...

 

 

La présence. Habitante de l'instant. Et témoin du jour. Et du monde.

 

 

Le ciel et un chemin. Des pierres et des herbes. Un sac* et un bâton. Un pas après l'autre. Ah ! Que la marche – et la vie – sont simples et belles !

* Avec quelques nécessités...

 

 

As-tu remarqué la lumière sur les collines ? Et la lueur qui brille dans tes grands yeux sombres ?

 

 

Le monde, bien sûr, est un incroyable réseau énergétique. Et en son sein, la vie, un incroyable réseau organique. Mais avec l'homme est né un incroyable réseau matériel et communicationnel, réflexif et émotionnel qui a ouvert le champ des possibles. Et bien qu'il soit à l'origine de quelques progrès, son expansion a progressivement asservi l'homme, déjà soumis à de multiples dépendances énergétiques et organiques incontournables, en créant d'innombrables – et toujours plus nombreuses – dépendances psychologiques (qui finissent d'ailleurs toujours, tôt ou tard, par se transmuter en dépendances matérielles et organiques). En réalité, le développement de ce réseau n'a jamais cessé de réduire l'individu à un rôle de maillon – d'infime (et de toujours plus infime) maillon – dans un système de plus en plus complexe et monstrueux. L'éloignant ainsi, au fil des siècles et « des progrès », de toute possibilité d'autonomie et de toute souveraineté sur son existence...

Combien d'hommes aujourd'hui pourraient-ils vivre hors de ce réseau omnipotent, invasif et tentaculaire ? Combien d'entre nous pourraient-ils vivre sans compagnie (humaine et autres....), sans électricité, sans eau courante, sans réseau routier, sans véhicule (en tous genres), sans chauffage, sans médecin, sans boulanger, sans médicament, sans produit de beauté, sans banque, sans plombier, sans architecte, sans supermarché, sans smartphone, sans écran, sans internet etc etc etc(1). Combien pourraient-ils vivre sans les innombrables commodités du monde moderne ? Très peu en vérité. Et en dépit de quelques mouvements de résistance à cette généralisation progressive et inéluctable du réseau – comme les « off the grid » ou « les survivalistes » (entre autres exemples) –, les individus autonomes se raréfient. Et il y a fort à parier que leur nombre fléchira encore à l'avenir. Au point peut-être (au point sans doute ?) de disparaître un jour(2) car le réseau se développe de façon si envahissante dans toutes les sphères de l'existence, créant tant de « nouveaux besoins » qu'il apparaît bientôt incontournable. Si incontournable que nul ne peut plus dès lors s'en soustraire.

Notre propos n'est pas, bien sûr, de s'interdire ou de se priver de ces progrès(3) mais d'en user avec un esprit de liberté et de ne se livrer aux activités qu'ils offrent ou permettent qu'avec détachement et sans accoutumance afin de ne pas asservir, ne pas avilir, ne pas rétrécir et ne pas complexifier inutilement notre existence.

(1) La liste est très longue...

(2) Dans un avenir pas si lointain peut-être...

(3) Ce qui serait un non sens au vu de l'évolution naturelle du monde...

Une chose en nous place l'autonomie – et la simplicité – au rang des plus belles et des plus dignes qualités. Et elle s'attriste donc de cet amer constat. Et de cette évolution sans doute inexorable...

Vivre dans un esprit d'autonomie – et de simplicité – est pourtant, à nos yeux, le garant d'une certaine forme de perspective généraliste et interdisciplinaire qui offre à l'homme non seulement la capacité d'agir seul de façon à pouvoir tout faire – ou du moins l'essentiel – par soi-même mais aussi de pouvoir faire face de façon indépendante à toutes les situations de la vie dans tous les environnements du monde.

Se priver de cette perspective généraliste et interdisciplinaire est non seulement la porte ouverte à l’hyper-spécialisation mais aussi la voie royale à l'abêtissement général et à la réduction conséquente des capacités individuelles (de tous ordres). Et à voir l’accélération insensée des progrès et la généralisation de cette mise en réseau, peut-être serons-nous bientôt contraints (sauf à s'exclure radicalement de la société humaine) de vivre dans la maladive dépendance de tout et dans la pathologique dépendance des autres pour survivre comme des êtres toujours plus fragiles, bancals et incomplets dans la masse étouffante, pris au piège jusqu'au cou dans cette somme d'intrications ankylosantes...

 

 

L'homme ne trouve sa grandeur que dans la solitude. Mais il ne peut la faire rayonner – et lui donner sa pleine mesure – qu'à travers le monde.

 

 

On juge (et reconnaît) la qualité d'un être – et d'une société – à la façon dont ils considèrent et se comportent à l'égard de la différence, de la singularité et des minorités(1). Plus ils se montrent ouverts et accueillants (et, a contrario, moins ils agissent de façon discriminante ou ostracisante), plus ils font preuve d'un degré élevé de sensibilité et d'intelligence(2).

(1) Quelles qu'elles soient...

(2) Et plus ils se font, accessoirement, le reflet des lois divines...

 

 

Ô forces naturelles qui déplacez les montagnes, les rivières et les océans, autorisez-nous à rejoindre votre cours. Et à nous unir à votre puissance...

 

 

L'homme est un infime et magistral trait d'union entre les forces de la terre(1) et la sagesse du ciel(2). Mais combien de millénaires devra-t-il encore œuvrer pour marier les deux en un parfait mélange – et en devenir l'exact reflet ?

(1) L'énergie.

(2) La conscience.

 

 

Marche dans la nature. En solitaire. Fréquente les forêts et les montagnes désertes ou sauvages. Et tu apprendras l'humble – et la merveilleuse – condition de l'homme où le factice et le visage conquérant deviennent d'ineptes et inutiles panoplies. Munis-toi du strict nécessaire : de quoi boire, manger, dormir et t'abriter. N'est-ce pas là suffisant à ta vie – et à ton bonheur ? Et de cette existence simple et humble – de cette existence pleine – pourra naître la joie...

 

 

Lorsque le regard se fait grâce, le monde émerveille.

 

 

Accorde-toi à la nature, aux saisons, aux rythmes et aux cours naturels des choses. Et ton existence sera juste.

 

 

Vois simplement ce qui est. Et s'il y a lieu, agis en conséquence...

 

 

De la simplicité et de l'épure naît la justesse. Et de l'accord à la nature et aux cours naturels des choses naît l'harmonie. Justesse et harmonie sont le reflet de la beauté, de l'Amour et de l'intelligence. Et de la terre et des êtres, le Divin n'attend autre chose...

 

 

Depuis des millénaires, le monde s'agenouille et se prosterne devant ses idoles. Et Dieu, éminemment seul, patiente en silence. Sans tristesse ni impatience. Encourageant sans rudesse les regards à ne plus se méprendre. Ne blâmant pas même le commerce des idoles*...

* Comme toute activité, le commerce des idoles n'empêchera jamais ceux qui ont le cœur mûr d'embrasser le visage de Dieu. Comme il ne leur permettra jamais d'y accéder. Quant aux autres, quoi qu'ils fassent, leur cœur est encore trop immature – et encombré – pour le découvrir ou l'apercevoir...

 

 

Vis sans repère ni référence. Et ton existence sera libre et spontanée...

 

 

Simplifie ton existence. Recentre-toi sur l'essentiel. Ne conserve que le nécessaire. Et ne subsistera que ce dont ta nature a besoin...

 

 

Arpenter la terre avec un esprit d'ouverture et de paix. Marcher au sein de contrées sauvages et naturelles avec le regard et le pas humbles et nus, je ne connais de plus belle – et de plus saine – activité pour un homme.

 

 

Assis à la même place depuis des siècles, le vieux sage regardait le monde et les saisons défiler. Tant de cycles et de costumes il avait observés au cours de sa longue existence. Mais son regard demeurait inchangé : doux, ouvert, innocent et accueillant. Ne blâmant jamais les modes ni le climat. Ôtant ou réajustant simplement de temps à autre le vieux châle qui lui couvrait les épaules.

 

 

La lune se couche sur l'horizon. Le vent emporte les nuages derrière la montagne. Les oiseaux rejoignent leur nid. Les arbres veillent sous le halo lumineux. Tout est paisible. Le regard est en paix.

Le soleil se lève sur l'horizon. Le vent pousse les nuages vers la montagne. Les oiseaux s'élancent vers le ciel. Les insectes disparaissent sous la terre. Le feuillage des arbres s'affole sous les bourrasques. Les yeux s'inquiètent, les jambes courent et les cœurs s’enflamment. Le regard est en paix.

 

 

Les oiseaux – comme tous les autres animaux – ne se plaignent ni du vent ni de la pluie. Ni de la chaleur ni du froid. Ni même des prédateurs. Ils s'accordent aux saisons et au climat. Au grand cours de la vie. Et à ses cycles. Ils peuvent en souffrir mais ils vivent avec justesse. Libres et pleinement vivants. En harmonie avec la nature.

Il n'appartient pas à l'homme de s'accorder à quoi que ce soit*... Ni au climat, ni aux saisons. Ni à la nature. Ni à la vie. Il bâtit, invente, se protège, s'approprie et utilise toujours plus que de raison. De cette inclination naît le progrès. Ses écueils et ses excès... Qui provoqueront soit le dépassement de son état naturel. Soit sa perte...

* Si ce n'est à ses exigences psychiques...

A-t-on déjà vu un animal posséder quelques biens ? Non ! Bien sûr ! Il naît, vit et meurt dans la plus parfaite nudité. Dieu l'a pourvu des vêtements adéquats et lui offre de quoi se nourrir et s'abriter. Rien d'autre ne lui est nécessaire...

 

 

[De l'encombrement : parenthèse grise et brumeuse]

Vient cette heure que je redoutais tant. Mon regard – et mon âme – ne sont plus capables de poésie. Comme si le ciel m'avait exilé. Et je me morfonds en gémissant dans ma vie grise et misérable... traînant mes yeux dans quelques livres de lumière et mes guêtres sur quelques chemins printaniers. Mais je le sens bien : le cœur n'y est plus...

 

 

Sans le ciel, tout me paraît vide et fade. Sans attrait ni couleur. Comme si la grisaille avait tout recouvert. Les heures me semblent tristes et vaines. Si tristes. Et si vaines. J'erre tout le jour comme un fantôme avide et nostalgique du temps glorieux où le regard teintait le monde de merveilleux...

 

 

Terre d'abstinence que le désir ressuscite. Et qu'il transforme aussitôt en aire de jeux répugnante...

 

 

Dans son lit d'infortune, il baillait. Indifférent aux heures grises ou ensoleillées. Ne sachant que faire de son corps pesant et de son existence morne. Il ne songeait qu'au sombre à venir. Oubliant même la malice dont Dieu avait habillé son regard.

 

 

Et pourtant il sentait la joie toute proche. A portée de main. Si proche de son regard absent. Mais il avait recouvert la nudité de soucis illusoires et d'encombrements inutiles. L'avenir ne fléchirait pas. Il savait le présent souverain. Mais sa gloire était loin aujourd'hui. Il la voyait fuir à grandes enjambées vers le futur incertain.

 

 

La volubilité des yeux le martyrisait. Mais que pouvait-il faire face au désordre et à l'amassement ? Il se sentait si embarrassé. Si emprunté face aux déconvenues. Son cœur était trop faible pour encaisser le poids de l'inutile. Et trop chargé encore pour retrouver l'innocence et la nudité de l’accueil. Fallait-il qu'il se laisse mourir une nouvelle fois ? Combien de trépas avait-il déjà traversés ? Et cette pensée lui glaça les sangs. Tétanisé à l'idée de se dépouiller encore du peu qui lui restait... Et il savait pourtant que c'était là l'unique passage. La seule possibilité pour renaître plus nu encore. Mais la peur, malgré tout, restait toujours aussi vivace... Mourir. Tant de fois. Mourir encore. Mourir toujours. L'âme inépuisable survivrait. Deviendrait plus belle. Et plus mûre. Il en était certain. Mais que de frontières à franchir pour le cœur...

 

 

A chaque instant, il fallait retrouver l'innocence. La nudité et la virginité. Jamais acquises. Jamais. Démêler les nœuds qu'inlassablement le cœur édifiait avec la complicité diabolique de l'esprit. Et ses sempiternels encouragements. Sans cesse défaire la trame. Sans cesse dénouer les fils. Sans cesse redécouvrir le regard nu. Sans cesse. Comme Sisyphe se délestant – ne cessant jamais de se délester tout au long de sa misérable existence – de son rocher invisible...

 

*

 

Lorsque la parole s'écoule avec lenteur, il lui faut parfois des heures – et parfois même des jours – pour mûrir dans le silence. Dans le silence du regard et de la promenade. Avant qu'elle ne puisse s'exposer sur les pages de ce carnet. Et d'autres fois, elle coule avec limpidité et fluidité presque sans discontinuer – presque sans se tarir – au cours de notre escapade quotidienne. Passant du regard au cœur, puis du cœur à la main qui la dépose sur la page. Et le temps de la noter sur ce carnet, cette parole occupe la totalité de l'espace et du silence. Et bien qu'elle émane de la paix et de la nudité, sa retranscription est presque comme un instant qui leur est dérobé... Mais quel que soit le flot de la parole – et son intensité –, on doit respecter son rythme. Et se faire aussi humble que possible pour la recevoir et la retranscrire avec justesse et fidélité. Sinon écrire ne consiste qu'à noircir du papier. A remplir la page de mots inutiles et sans consistance...

 

 

Seul le sage est riche de l'invisible. Et, très souvent, pauvre du visible. Sans pour autant se retrouver démuni face à lui... Le sage a l'esprit du débutant. Vide, vierge et innocent. Mais il a le cœur ouvert et avisé. Confiant face aux circonstances et apte à laisser le non savoir – l'esprit du non savoir – impulser les pas, les gestes et la parole...

 

 

Plus l'être devient simple, nu et dépouillé – et plus le cœur, l'esprit et l'existence le deviennent –, plus l'âme se rapproche du ciel. Et se réjouit.

Cette réjouissance tire sa source du sentiment de s'ouvrir à toutes les forces célestes. A toute la puissance et à toute la sagesse du Divin. Comme si elles se déversaient avec plus d'aisance dans le réceptacle de plus en plus vide et réceptif que l'on apprend à devenir*... Et de cette grâce offerte par l'humilité et le dépouillement, on éprouve une grande joie...

* Selon l'état – parfois fluctuant – d'encombrement...

 

 

Le regard peut revêtir différentes qualités : qualité de présence (liée principalement à la tête et au cœur) et qualité d'être – et de relation au monde et à l'Existant – (liée principalement au cœur, au corps et à l'environnement).

La qualité de présence dépend substantiellement du degré d'identification(1) du regard à l'esprit et au cœur. Mais également du degré de nudité (ou d'encombrement(2)) et du degré d'humilité de l'un et de l'autre. Plus le regard est nu, désidentifié, vierge, dépouillé, vide, innocent et ouvert, plus la qualité de présence est élevée. A contrario, moins il l'est, plus l'être est, agit et se comporte en mode égotique et automatique, plus il se montre restreint et fermé. Avide et en attente par rapport à la vie et au monde pour qu'ils lui offrent matière à plaisir, à distraction et à divertissement (pour le détourner de lui-même, de son ennui et de ses propres manquements).

(1) Capacité de distanciation à l'égard des pensées et des émotions.

(2) Pensées et émotions plus ou moins invasives...

Quant à la qualité de l'être, elle dépend essentiellement du degré de sensibilité et du degré de sensorialité (les deux semblent a priori peu liés...). Le degré de sensibilité se caractérise (et peut se mesurer) par le degré de tendresse et de gratitude – que l'on pourrait synthétiser en degré d'Amour pour ce qui est, pour le monde et l'Existant. Plus le degré de sensibilité est élevé, plus l'être est ouvert et accueillant à l'égard de ce qui est, des êtres, du monde et de la vie. De tout ce qui surgit. Plus il éprouve de tendresse pour tout ce qui existe et se manifeste (et même, bien sûr, pour ce qui semble préjudiciable aux formes ou à lui-même). Et, a contrario, plus le degré de sensibilité est faible, plus l'être est fermé et exigeant. En attente et en demande par rapport à la vie, aux autres et au monde. Quant au degré de sensorialité, il pourrait se définir comme la capacité à ressentir le corps, les énergies corporelles et environnementales. Plus le degré de sensorialité est élevé, plus l'être ressent avec force et intensité les mouvements – jusqu'aux plus imperceptibles mouvements – corporels et énergétiques. Plus ces mouvements sont en mesure d'être ressentis profondément et finement, plus le corps – et plus l'être – se sentent comblés. Et, a contrario, moins ces mouvements sont ressentis, plus l'être est avide de sensations, de changements et de nouveautés.

 

 

Vivre en solitude – et dans un esprit d'autonomie – signifie pouvoir toujours compter sur soi. En toute occasion. Et devoir le cas échéant prendre en charge ses propres défaillances. Défaillances de tout ordre : corporel, physiologique, psychologique, spirituel, matériel et environnemental...

 

 

En marchant dans les collines, le bâton à la main – et en pratiquant quelques exercices martiaux entre deux fragments sur la solitude et l'esprit d'autonomie notés sur mon carnet –, me vient cette idée un peu saugrenue de comparer un individu à une nation. Et de définir pour moi-même – et mon propre usage – le type de gouvernement dont je suis affublé et le mode de fonctionnement et l’œuvre des différents ministères dont j'ai la charge pour conduire le petit bonhomme dans son existence (tous les aspects du petit bonhomme dans toutes les dimensions de son existence). Oui ! Voilà une idée un peu singulière ! Mais je ne peux résister au plaisir de l'exposer ici (de façon résumée) :

 

Le gouvernement : un surprenant mélange d'autocratie éclairée à la fois ouverte et autarcique et parfois un peu véhémente et bourrue, de théocratie laïque, libérale et non dogmatique et de roi fainéant (qui déteste et rechigne à gérer les contingences existentielles, à administrer un budget et à se prêter à toute exigence administrative : remplir le moindre papier ou le moindre formulaire le confine au supplice...).

 

Le ministère des affaires étrangères : ouvert (très ouvert) sur le monde (le monde naturel) sauf en matière de relations avec les hommes où l'on se montre plutôt fermé (et parfois même très fermé). Et où les rapports humains sont rares et ponctuels...

 

Le ministère de la défense : quelques restes (un peu décatis) de pratique martiale. Et le bâton japonais. Un point, c'est tout ! La porte de la maison est toujours ouverte – jour et nuit (à quelques exceptions près*...)

* Lorsque l'on s'absente pour une longue période par exemple...

 

Le ministère de l'éducation (et de la recherche) : apprentissages divers, quasi permanents et tous azimuts (j'aime apprendre... apprendre et découvrir : des mots, des savoirs, des disciplines et des champs nouveaux comme aujourd'hui, par exemple, où un changement de vie (et de mode de vie) m'incite à apprendre quantité de choses sur les lois, l'urbanisme et moult pratiques de construction, de rénovation et de fabrication en électricité, plomberie, charpente etc etc (moi qui ai pourtant toujours détesté le droit et bricolage...). Sans compter, bien sûr, l'incroyable appétit pour la vérité et la vraie vie* à traversla quête métaphysique qui m'a toujours profondément habité...

* La vie pleine (joie, plénitude et sentiment de complétude).

 

Le ministère de l'économie et des finances : pauvre, frugal mais rigoureux. Pas plus de dépenses que de recettes. L'argent n'a aucune importance... Assurer la satisfaction des nécessités premières, voilà sa seule fonction*...

* Dans ce maudit système où nul ne peut vivre sans un minimum pécuniaire...

 

Le ministère de la justice : honnêteté, probité et aspiration à la parfaite équité (en tous domaines). Toujours droit dans ses bottes...

 

Le ministère de l'intérieur : un cadre large (voire très large) mais rigoureux. Malgré quelques règles précises dans certains domaines, une grande libéralité – et parfois même du laxisme – dans ce cadre. Avec une assise de l'autorité parfois virulente en cas de franchissement de ligne...

 

Le ministère des affaires sociales : totale exécration des inégalités. Equité absolue. Toujours prêt à rendre service en cas de nécessité. Offre volontiers ses savoirs, ses expériences et sa connaissance (malgré une demande timorée...)

 

Le ministère de la jeunesse et des sports : Marche quotidienne. Et bâton martial (de façon régulière).

 

Le ministère de la culture : Amour et pratique des livres. Et de l'écriture.

 

Le ministère du travail : totale abomination du travail au sens conventionnel du terme. Mais pour autant, travail permanent – et de chaque instant – en matière de pratique spirituelle et d'écriture. Une besogne ancrée dans la quotidienneté. Pas de frontière (jamais de frontière) entre la vie, la spiritualité, l'écriture et le quotidien...

 

Le ministère de l'écologie et de l'environnement : amour profond et immodéré (presque incommensurable) pour les animaux et la nature. Pour tous les espaces sauvages et naturels. Et pour tous les animaux – du puceron à l'éléphant, du moustique à la baleine avec une forte prédilection pour les canidés et, en particulier, pour les chiens.

 

Le ministère du logement : petit coin tranquille dans la nature. Confort rustique. A l'écart de la société des hommes.

 

Le ministère de l'agriculture : denrées basiques et alimentation végétarienne. Avec petit jardin biologique et quelques fruitiers à venir (sans doute très prochainement...).

 

Et enfin le ministère des transports et des télécommunications(1) : marche (essentiellement), véhicule(2) (pour les nécessités), téléphone portable préhistorique ultra basique (avec un usage très modéré) et ordinateur portable connecté.

(1) Dans son appellation un peu désuète...

(2) Et le train pour les très rares voyages au long cours...

 

 

Ah ! Nos pauvres gestes du quotidien : préparer le repas, balayer la maison, faire la vaisselle, se mettre à table, boire, manger, uriner, déféquer... le moindre de nos mouvements (et Dieu sait combien nous en faisons au cours d'une journée...) respire à la fois la misère et la grâce... Question de regard (ou même, plus basiquement, de point de vue) bien évidemment...

 

 

En consultant quelques sites sur l'autoconstruction (cabane, écodome, petit chalet en bois...), je découvre un univers inconnu. Et une communauté assez informelle d'hommes et de femmes à l'ingéniosité et aux savoir-faire parfois époustouflants. Très encline à partager (à partager gracieusement) ses connaissances et son expérience. Cette mutualisation gratuite des compétences (via internet) est fabuleuse. Et très émouvante. Mais aussi très rassurante pour l'avenir de l'humanité...

En revanche, je note qu'il y a, bien souvent, dans cette sphère néo-rurale, débrouillarde, citoyenne, fraternelle et indépendante un abus de langage manifeste et très répandu concernant la notion d'autonomie. Notion qui constitue en général l'un des fondamentaux – voire le pilier central – de leur existence. Beaucoup arborent – et revendiquent même – avec fierté et un esprit rebelle et écologique (bien compréhensible) leur autonomie vis à vis du monde, de la société et des divers réseaux (eau, électricité, chauffage, assainissement etc etc). Mais comment oublier que l'autonomie ne peut être que relative ? Ne serait-il pas alors plus juste de parler d'esprit d'indépendance et d'autonomie ? Même ceux qui parviennent à s'autonomiser et à « s'isoler » de la plus parfaite façon, ne peuvent prétendre qu'à une forme relative d'indépendance vis à vis du monde, du système sociétal et de ses réseaux technologiques et de commodités. Personne ne peut être totalement – et parfaitement – autonome. Nul ne peut vivre 3 minutes sans air, 3 jours sans eau et 3 semaines sans nourriture. Sans compter, bien sûr, les innombrables interactions et échanges sociétaux, humains et non humains auxquels nous contribuons tous et dont chacun bénéficie. N'oublions pas que nous ne sommes que des formes interdépendantes. Et aucune d'entre elles ne peut vivre – et moins encore prétendre exister – de façon autonome. Ce qui ne les empêche nullement, bien entendu, de pouvoir mener une existence avec un esprit d'indépendance et d'autonomie...

 

 

Soudain une tempête étoilée dans ses grands yeux sombres. Comme de petites flammèches de joie éclairant l'obscur de l'âme...

 

 

Qu'y a-t-il à comprendre du monde ? Rien. Trois fois rien. Peut-être quelques lois et quelques règles pour son usage. Mais le monde se moque bien d'être compris. Il ne demande qu'à être aimé. Et écouté.

 

 

Plusieurs centaines de marguerites ont élu domicile dans le jardin. Petites, fragiles et délicates, elles se sont installées sur la vaste étendue herbeuse qui entoure la maison. Dansant avec gaieté dans le vent frais du jour. Si vaillantes dans le printemps. Et si innocentes sous le ciel. Plus qu'un tableau printanier, une merveille de la terre. Admirable. Et émouvant. Offrant à la folie et à la misère de ce monde mal en point un peu d'innocence. Un peu de beauté et de poésie. Les yeux ne se lassent pas de leur présence à la fois discrète et magistrale. Et de leur candeur qui réjouit le cœur. Et enchante l'âme.

 

 

Hormis le potentiel(1) qu'il recèle – et l'actualisation de ce potentiel –, il y a (bien souvent) peu de choses réjouissantes(2) dans le cœur d'un homme.

(1) Le potentiel d'Amour et d'intelligence...

(2) A l'exception de quelques traits et caractéristiques liés à ce potentiel et à son actualisation...

 

 

Que dire d'autre que la vie – la vie qui est là devant soi ? Et la façon dont elle touche le cœur ?

 

 

Il n'y a rien de plus émouvant qu'un homme qui se livre à cœur ouvert en se moquant de la bienséance et des conventions. Qui cherche le vrai, le juste et le bon dans le marécage de l'existence, du monde et des pensées. Et qui n'aspire qu'à vivre – et à goûter – simultanément toute l'épaisseur et la légèreté de la vie. Sa parole sera toujours belle et authentique. Et d'émotion, on l'embrasserait. Et le remercierait pour sa maladresse et sa fragilité. Pour sa quête désespérée – et parfois désespérante – de consistance, de joie et de vérité...

 

 

Ecoute les chants du monde. Les plus beaux sont les plus silencieux. Et les plus émouvants ceux qui savent se faire discrets – presque imperceptibles...

 

 

Pourquoi aspires-tu – et pourquoi les hommes aspirent-ils – à donner un sens à leur vie* ? A emplir leur existence de ceci et de cela ? Les fleurs se soucient-elles d'elles-mêmes ? De connaître leur rôle ? De savoir de quoi sera fait demain ? Non ! D'un geste – d'un coup de vent –, elles balayent ces balivernes pour offrir au monde leur présence et leur beauté. Et dans cette innocence peuvent resplendir leur essence et leur grâce. Jusqu'à la plus infime parcelle de leur nature divine.

* Oui, on en comprend les raisons profondes et les mécanismes psychiques à l’œuvre mais quelle maladresse – et quelle absurdité parfois...

 

 

Il y a de nombreux instants merveilleux de solitude où la terre et le ciel se réunissent en notre cœur. Et qui amènent avec eux un surcroît de joie et de légèreté. Ces moments de grâce arrivent souvent au cœur de la nature – toujours fraîche et vivante. Et lorsque le cœur est assez vide pour les recevoir...

 

 

La mission de tout homme est de découvrir – et d'accomplir – la tâche pour laquelle il est né. Malheur à celui qui ne parvient à la trouver. Ou qui la trahit pour de fumeux ou fallacieux prétextes.

 

 

Mon regard glisse entre le vert des champs et le gris du ciel. Sur la ligne d'horizon où se dessinent les collines. Et je vois soudain la main de Dieu me saluer. Je lui réponds d'un sourire. Et le remercie de m'apprendre à reconnaître partout les signes de sa présence...

 

 

Dans leur bâtisse, les hommes se protègent du soleil et des ondées. De l'hiver et de l'été. Lissent les effets du climat et des saisons. Se coupent de leur nature originelle. De la vie et de ses cycles. Et après ils viennent vous parler des plaisirs du grand air...

 

 

Dans les fossés, l'herbe est aussi verte que celle des prés et la pelouse des jardins. Mais elle a sur elles quelques avantages : elle est libre de pousser – et de vivre – comme elle l'entend. Et elle est dotée de cette force brute magnifique qui caractérise si bien l'instinct sauvage.

 

 

Vivre en présence. A l'abri des saisons et des heures où l'instant est le seul souverain. Unique terrain et unique témoin de ce qui est...

 

 

Un seul homme. Et le monde resplendit de beauté. Deux hommes. Et déjà le désastre s'annonce...

 

 

Les hommes ne savent pas à quels saints se vouer. Il y a tant de diableries dans leur cœur. Et dans leurs gestes. Et Dieu pourtant est si proche... Mais l'aveugle vivant en pleine lumière ne demeure-t-il pas lui aussi dans la plus profonde obscurité ?

 

 

Un pas. Puis un autre pas. Un geste. Puis un autre geste. N'est-ce pas ainsi que se bâtissent les œuvres et les cathédrales ? Que s'édifient le monde et les existences ? Avec l'approbation du ciel émaillée parfois de quelques courroux bienveillants que nous prenons – à tort – pour des détours, des épreuves ou des embûches...

 

 

Y a-t-il en ce monde plus libre qu'un oiseau* allant là où le vent et les saisons le portent ? Sur cette terre rares sont ceux qui ont su se parer de plus de nudité et de dépouillement. Et j'envie en secret cette existence si simple. Et si épurée.

* Un oiseau sans nid ni progéniture...

 

 

Cette part de l'âme qui ne demande qu'à être libérée pour s'ouvrir. Pourquoi si peu d'hommes sont-ils enclins à répondre à ses attentes ? Et pourquoi la plupart y rechignent-ils avec tant de fermeté* ? La vie – et le monde – deviendraient pourtant si beaux. Et si simples.

* Par manque de maturité d'esprit et de cœur, bien sûr...

 

 

Les hommes ont beau vénérer la technologie. Jamais un avion – ou tout autre objet volant – n'aura la grâce d'un oiseau.

 

 

Aux êtres et aux choses sans grâce, Dieu offre la sienne. Et s'il lui arrivait par mégarde d'en oublier quelques-uns, offrons-leur la nôtre...

 

 

Quelques hirondelles malicieuses virevoltent au dessus de nos têtes. Dessinant avec agilité de savantes et harmonieuses arabesques*. Indifférentes à nos yeux admiratifs.

* Hormis le sort réservé aux insectes qui composent leur menu, a-t-on déjà vu plus gracieuse façon de s'alimenter ?

 

 

Les événements douloureux (décès, accidents, pertes, maladies...) qui surviennent de façon soudaine et inattendue rappellent à l'esprit la grande fragilité – et la brièveté – de l'existence. Ils soulignent avec force que tout peut basculer d'un instant à l'autre. Et nous invitent à renoncer à toute certitude pour vivre l'instant (dans l’absence de constructions et de projections temporelles), nous qui avons la fâcheuse habitude de mener notre existence comme si tout (tout en nous – et tout autour de nous) était éternel...

 

 

En présence, l'homme est un instrument du regard au service du monde chargé de faire advenir l'Amour et l'intelligence. Et d'accompagner les êtres jusqu'à ce qu'ils deviennent eux-mêmes de parfaits instruments.

Sans présence – ou autrement dit avec une perception psychique ordinaire (si habituelle chez les êtres humains) –, l'homme est principalement un instrument au service de lui-même (et accessoirement un instrument au service du monde grâce à ses interactions avec les autres formes) qui tente de s'aider – et de s'accompagner – avec le plus d'amour et d'intelligence possibles. Dans la mesure de ses capacités. Et de sa compréhension. Et d'aider et d'accompagner également (mais souvent dans une moindre mesure) son entourage : les êtres qu'il considère comme les plus chers ou les plus proches...

Quant aux êtres sans perception (comme les végétaux par exemple) et les autres formes (comme les objets inertes*), ils constituent eux aussi des instruments au service du monde dans la mesure où leurs interactions et/ou leur utilisation contribuent non seulement au fonctionnement général mais participent également au bien-être ou au mal-être – et donc indirectement à l'intelligence et à l'amour – de ceux qui les environnent. Et de ceux qui s'en servent ou les utilisent...

* Entre autres exemples...

 

 

Il y a – il y a souvent – plus de beauté, de grâce et d'innocence dans une fleur (un merveilleux coquelicot par exemple) que dans le cœur d'un homme(1). Et leur fragilité et leur dénuement m'émeuvent bien davantage que la richesse, le pouvoir, l'abondance et le luxe(2) que la plupart d'entre eux édifient. Et tous les stratagèmes dont ils s'entourent pour se protéger ou se croire à l'abri...

(1) Que dans le cœur de bien des hommes...

(2) Que j’exècre...

 

 

Les hommes ont toujours façonné la vie – et fait en sorte de la maîtriser. Mais ils l'ont tant aménagée à leur goût qu'ils en ont étouffé la substance. Presque l'essentiel. Voilà pourquoi leur existence – et tout ce qui passe entre leurs mains – semble si éteint. Presque mort.

 

 

A l'heure du lever, les hommes dorment encore. A l'heure des travaux domestiques nécessaires au corps, ils travaillent à l'usine, au bureau ou au champ (avec leurs instruments mécaniques, électroniques ou informatiques). A l'heure de la sieste, ils retrouvent leur besogne. A l'heure de l'oisiveté salutaire et naturelle, ils poursuivent leur tâche et leurs travaux. A l'heure du coucher, ils veillent en somnolant devant leurs écrans. Et après ils s'étonnent – ou se plaignent – de mener une existence toxique, délétère et dénaturée...

Ah ! Pauvres humains ! Esclaves des temps modernes comme ils l'étaient déjà aux périodes antiques. Le joug, les fers et les chaînes ont peut-être changé. Mais les maîtres sont toujours les mêmes...

 

 

La vie ne dure que l'espace d'un souffle. Et l'on voit pourtant les hommes s'éreinter, se déchirer – et parfois même se tuer* de façon symbolique ou réelle – pour quelques histoires, quelques arpents, quelques rêves, quelques idées ou quelques espoirs. Passant l'essentiel de leur existence à courir après des chimères – et à les protéger une fois acquises. Des broutilles. Et de la pacotille... Des existences brumeuses et sans consistance. De la vapeur qui finit en buée sur la vitre du temps...

* Se tuer à la tâche ou s’entre-tuer...

 

 

La nudité est la seule posture que peut décemment adopter le regard. Et la seule vêture dont il peut s'habiller. Le reste n'est que folklores et encombrements. Efforts et surcharges inutiles.

 

 

Plus le temps passe, plus les nuages m'apparaissent comme les plus belles – et les plus émouvantes – créatures (les plus belles et les plus émouvantes formes) de ce monde. Et les plus représentatives. A la fois si réels et si irréels. Si denses et si légers. Si majestueux et si humbles. Si insignifiants et si essentiels. Si fragiles et si invulnérables. Si proches de la terre et si proches du ciel. Si changeants et si permanents*. Si éphémères et si éternels. Plus je les regarde, et plus je les trouve merveilleux. Si merveilleux que j'aimerais parfois faire de mon existence un nuage...

* Donnant une impression illusoire de permanence, bien sûr...

 

 

Le regard – et le ciel – témoins du terrain que représentent le monde – et la terre. Et de tous les mouvements qui s'y déroulent.

 

 

La vie est Une. Et si commune. Nous traversons tant d'épreuves ensemble. Et souvent les mêmes épreuves. Pourquoi ne sommes-nous donc pas plus attentifs les uns aux autres ? Plus bienveillants ? Plus aimants ? Et plus solidaires ?

 

 

Dans ce petit coin des urgences où l'on m'avait placé (et un peu oublié), j'assistais – patient et incrédule – à l'effervescence de la vie hospitalière ; les plaintes et les doléances des arrivants, leurs cris parfois, les conversations téléphoniques avec l'entourage, les incessantes allées et venues des pompiers, le va-et-vient du personnel, le professionnalisme bien huilé des internes, des infirmières, des aide-soignants, des brancardiers et des médecins, leur nonchalance, la routine de leurs pas et de leurs gestes, les procédures et les paroles automatiques, la lassitude sur les visages, les rires et les blagues, les échanges anecdotiques sur la vie des uns et des autres, le désœuvrement parfois, les fréquentes réunions informelles dans la salle réservée au personnel autour de la machine à café comme de régulières récréations nécessaires ou paresseuses. Devant moi s'étalait toute cette vie hospitalière grouillante et populeuse à l'image de la fourmilière où chacun est rivé à sa tâche – et à sa fonction –, délaissant avec régularité un soin – ou un patient – pour un autre. Revenant, le délaissant de nouveau, partageant une parole – une conversation – avec un collègue, un rire avec un autre, accueillant les nouveaux venus, prenant en charge les urgences vitales et reléguant les autres à une attente interminable en les confinant dans des box minuscules. Faisant tout simplement leur travail – et le faisant sentir aux pauvres naufragés des urgences – avec bien peu d'humanité à l'exception, il est vrai, de quelques rares soignants dont le regard et la présence révélaient avec évidence le dévouement et la volonté d'aider, d'accompagner au mieux, de soigner et de soulager la douleur de cette foule hétéroclite – de cette micro-société des urgences hospitalières.

Aujourd'hui je crains que l'hôpital ne soit devenu une usine comme – presque comme – les autres où les hommes, les malades, la douleur, la souffrance et l'inquiétude sont traités comme de la marchandise. Et des dossiers. Illustrations tragiques et symptomatiques de nos sociétés modernes dans cette ère de désengagement et de déresponsabilisation individuelle où sous couvert de professionnalisme, d'efficacité et de rendement, le système s'organise en standardisant, en protocolisant et en réifiant la vie et les actes. Les êtres et le vivant. Dans cette perspective – et dans ces conditions – la mort n'est jamais très loin... Pauvre monde. Pauvre – et triste – monde...

 

 

Le monde et les lieux n'ont aucune âme. Ce sont les êtres – et à travers eux la présence – qui leur en donnent une. Et il y a sur cette terre beaucoup d'hommes – et beaucoup d'endroits peuplés – qui brillent par leur absence d'âme...

 

 

Un grand nombre d'êtres n'est mu que par les automatismes et les conditionnements. Et il y a chez eux – et dans leurs comportements(1) – peu de qualité d'être. Et de présence. L'instinct(2) et le psychisme(3) gouvernent l'essentiel de leurs actes. Ils ne s’intéressent – de façon exclusive ou quasi exclusive – qu'à leur existence, à leur corps et à leur esprit(4) – ne s'occupant et ne se préoccupant que de leur confort et de leur bien-être, et, dans une moindre mesure, à ce qui touche ou concerne les formes (les êtres et les choses) dont ils se sentent proches ou qui leur sont nécessaires(5). A leurs yeux, seule cette infime part du monde a quelque importance. Et en dépit de quelques signes de politesse et de bienséance, de quelques aménités et des quelques manifestations de gentillesse ou d'altruisme qu'ils peuvent exprimer de façon fréquente ou occasionnelle, toute leur existence se construit sur – et tourne autour de – cette sphère minuscule. Ainsi fonctionnent l'essentiel des hommes.

Rares sont les êtres humains à travers lesquels la présence peut rayonner. Et il est pourtant aisé de voir si un homme vit en présence car les expressions de ce rayonnement ne manquent pas : une qualité d'être, une profondeur, une consistance et une légèreté dans les gestes et la parole, une attention bienveillante, une pertinence et une justesse dans l'attitude et une douceur patiente et affectueuse à l'égard de toutes manifestations. A l'égard de tout ce qui surgit...

(1) Gestes, pas et paroles...

(2) En particulier chez les animaux.

(3) En particulier chez les hommes.

(4) Et plus précisément, l'existence, le corps et l'esprit de la forme à laquelle ils se sont identifiés...

(5) Ou, plus exactement, qu'ils estiment nécessaires à leur existence et à leur bien-être...

 

 

La vie est une misérable merveille. Pour les yeux, elle est une misérable merveille. Mais pour le regard, qu'elle paraisse misérable ou merveilleuse, elle est toujours ce qu'elle est...

 

 

Ecrire la vie. La vie qui vient et qui va. La vie qui passe. Non pour la retenir*. Mais comme une façon de témoigner de son essence. Et de sa substance. De sa violence. De ses combats. De ses merveilles. Et de sa beauté. Comme une invitation à en goûter la saveur, la force et la fragilité. Et l'offrir – offrir cette modeste récolte – à ceux qui passent... Encourager les pas et le travail de l'homme. Donner au regard plus d'innocence et de lucidité. Pour vivre avec plus de profondeur et d'intensité. Et avec le cœur plus ouvert...

* Ce qui serait une activité vaine et stupide...

 

 

Mon travail – mon humble tâche – n'est pas de mettre de la vie dans les mots. Ni de leur insuffler une épaisseur crédible. Cette besogne est celle des écrivains. Mon travail est plus modeste – et plus ambitieux. Il consiste à témoigner de la vie et du monde (autant qu'il est possible...). D'offrir à travers les mots une compréhension de quelques-unes de leurs lois et de leurs règles, et quelques outils pour mieux les comprendre – afin de mieux les vivre et les aimer –, mais surtout – et principalement – pour encourager les mains (et les esprits) à abandonner les livres – les images et les idées – et aller vers la vie et le monde avec le cœur plus pur et plus éclairé afin d'offrir (que nous soyons capables d'offrir) aux êtres – et à l'Existant – plus d'Amour, d'intelligence et de beauté.

 

 

Ecrire est pour moi un geste d'Amour. Un vrai geste d'Amour et de gratitude. Une façon très personnelle d'être en vie. Et d'être au monde. Avec et parmi les hommes. Je n'en ai pas trouvé(s)* de plus puissant(s). Et de plus digne(s). C'est le don – le modeste don – que la vie m'a accordé. Et dont je dispose humblement – et peut-être avec maladresse – pour dire au monde – et à l'humanité – le peu que la vie m'a appris...

* Je n'en ai pas trouvé(s) en moi de plus digne(s) et de plus puissant(s)...

 

 

Le monde – et les êtres –, champs de bataille où se livrent les plus âpres combats. Et l'innocence du regard* qui en perçoit toute la beauté. Et sa lucidité qui en comprend les jeux. Et les enjeux. Le sage s’assoit. Et regarde. Agit lorsqu'il convient d'agir. Parle lorsqu'il convient de parler. Mais il demeure en paix.

* Le regard nu et impersonnel.

 

 

Mener une existence agreste. Et habiter avec profondeur et stabilité le regard nu et impersonnel. Voilà ma seule ambition terrestre...

 

8 décembre 2017

Carnet n°74 Paroles pour soi

Journal / 2016 / L'exploration de l'être 

Quelques fleurs jaunes éparses sur les collines parsemées de thyms, de romarins et de brachypodes rameux. Comme les sentinelles d'or solitaires du singulier parmi l'ordinaire. Le reflet discret et éclatant de l'innocence et de la maturité au sein du commun – encore trop vert pour se faire le reflet du Divin... 

 

 

Le monde(1) contemporain est un univers d'abondance et de rebuts. Et la vie, un espace de frugalité et de recyclage sans fin. Dans leur insatiable quête de facilité – de confort et de praticité – les hommes n'ont eu de cesse, au cours de leur histoire(2), de s'éloigner de la vie. De ses lois et de ses règles.

Avant qu'ils ne saccagent et ne détruisent entièrement(3) la terre, il est temps – vraiment temps – qu'ils apprennent à respecter (profondément) le vivant. Et à s'inspirer de ses cycles et de son fonctionnement pour édifier et organiser leurs sociétés...

(1) Le monde humain.

(2) De leur fulgurante évolution...

(3) Et de façon irréversible...

 

 

Demain viendra un jour écrit le poète ou le philosophe(1). Oui, mais quand ? ajouterait le clown (le philosophe et le poète savent aussi se faire pitres(2)...).

(1) A votre convenance et selon vos préférences...

(2) Ou, à défaut, faire le pitre...

 

 

Dire la vie, le monde et les hommes. Dire Dieu, le ciel et la terre. Tel est sans doute notre travail. La tâche à laquelle Dieu, le ciel et la terre, la vie, le monde et les hommes nous ont assigné. Mais à quelle fin ? Si peuse pressent au dessus de nos pages... Comme si ces milliers de notes et de fragments restaient lettres mortes... presque sans aucune résonance auprès de nos congénères.... Ces lignes seraient-elles destinées à ceux de demain ? A ceux d'après-demain ? A ceux qui viendront plus tard encore... ? Nous n'en savons rien. Pour l'heure, nous nous contentons d'écrire (comme nous l'avons toujours fait au cours de cette existence...). De dire ce que nous inspirent Dieu, le ciel et la terre, la vie, le monde et les hommes. Gageons simplement que les uns et les autres y trouveront au moment opportun les réponses à ce qu'ils cherchent*...

* En fouillant dans ces milliers de pages, ils pourront sans doute y dégoter quelques pistes, quelques repères et quelques conseils. Et même quelques pépites et quelques vérités appréciables...

 

 

L'escalier du néant est l'exact contrepoint des escaliers de la gloire. Les hommes se précipitent tous – à peu près tous – sur les seconds et laissent le premier désespérément vide. Dommage ! dit Dieu. Les seconds mènent aux feux de la rampe. Et de l'enfer*. Et le premier au sous-sol inconfortable et nauséabond qui se transforme, dès la porte franchie, en ciel infini qui déverse sur les rares postulants de l'en-bas – et en leur cœur – une pluie ininterrompue de joie, de paix et d'Amour. Quant aux autres – aux postulants de l'en-haut – ils ne récolteront que tristesse, envie, avidité, jalousie et frustrations. Ennuis, désillusions et incomplétude. Pauvres hommes ! dit Dieu. La route sera encore bien longue avant qu'ils ne découvrent mon visage...

* L'enfer de l'individualité et de l'égocentrisme – et leur cortège d’infamies...

 

 

Chacun – et chaque forme – avance vers son destin(1). La terre(2) et le vent(3) font naître les circonstances et proposent les situations. Et le ciel(4) en dispose et orchestre la multitude en impulsant les gestes, les paroles et les pas de chacun...

(1) Sa destinée de forme.

(2) Le monde phénoménal.

(3) L'inévitable cours des choses...

(4) La conscience – l'espace de perception sensible et impersonnel.

 

 

Le ciel nous dit sa joie d'être à l'écoute. Et la terre celle d'être entendue*...

* Il serait plus juste d'écrire : « Et la terre sans voix – toujours sans voix – nous fait comprendre sa joie d'être entendue »... En effet, la terre ne semble pouvoir s'exprimer qu'à travers le cours des choses – son évolution – et à travers le ciel(1), seul à être en mesure de relater son état...

(1) Ou autrement dit, la conscience...

 

 

Les vivants sont comme la rosée. Nous ne sommes pas attentifs(1) – pas vraiment attentifs – à leur présence. Et n'avons pas conscience – pas vraiment conscience – de la brièveté de leur existence. Et à leur mort, nos souvenirs ne sont qu'un rêve. Qu'un songe brumeux qui nous égare. Ou nous attriste...

Être là – pleinement présent – à ce/ceux qui nous entoure(nt), il n'y a de plus beau présent. De plus belle attention à offrir. Comme un don sacré et divin(2)...

(1) Il n'est pas rare que le psychisme les considère – ou du moins les appréhende – au quotidien comme des éléments mobiles et éternels du décor...

(2) Dans la mesure où le Divin est la conscience-présence – l'attention impersonnelle – à l’œuvre dans l'ensemble du manifesté à travers la perception sensible de chaque être. Et de chaque forme.

 

 

En tes joutes stériles prends garde aux blessures orgueilleuses ! Renonce à ces ineptes combats ! Et pars affronter l'inconnu. Pour te défaire de toute victoire. Et que l'indicible puisse habiter les terres familières que ton cœur a toujours désertées...

 

 

Dieu s'égosille. De son silence, il appelle les hommes à fouler le territoire. Les anges décochent leurs flèches. Et s'arc-boutent contre les murs – invisibles – du paradis pour en accroître la surface. En maintiennent les portes grandes ouvertes. Peine perdue. L'éden demeure désert – quasiment désert – peuplé de rares visages qui s'interrogent à voix basse sur le sort des hommes.

 

 

Sous les sommets communs – et emboîtés – des vallées patiente l'apogée des sous-sols aux allures repoussantes. A la réputation sulfureuse. Seul accès pourtant au ciel. Et à la lumière des hauteurs. Pour voir le jour originel pour la première fois.

 

 

Tantôt vifs et primesautiers, tantôt languides et indolents, les hommes s'enlisent en leurs tourbillons...

 

 

Au nombre – et au surnombre – nous préférons l'Un. Et la relation de qualité. L'homme des foules est hypocrite et superficiel. Infidèle au monde et à lui-même. Seul l'homme des solitudes, libre des influences et des séductions, ancre ses actes et sa parole en ses profondeurs. Et demeure authentique.

 

 

La matière se combine. Et l'esprit se pénètre. De Saint Martin, je crois, avait vu juste... En lisant quelques fragments de l'Homme de désir, je trouve quelques perles. Et une certaine familiarité* avec ce philosophe inconnu. Appartiendrais-je moi aussi à cette étroite lignée d'illuminés gnostiques ?

* Voire parfois une certaine connivence...

 

 

En marchant les yeux baissés et l'âme humble sur les chemins de solitude, pensées, soucis et préoccupations disparaissent. Et le poids du monde s'efface. Et les jambes légères – si légères – montent et descendent les sentes avec aisance et intuition...

 

 

Quelques fleurs jaunes éparses sur les collines parsemées de thyms, de romarins et de brachypodes rameux. Comme les sentinelles d'or solitaires du singulier parmi l'ordinaire. Le reflet discret et éclatant de l'innocence et de la maturité au sein du commun – encore trop vert pour se faire le reflet du Divin...

 

 

Le ciel est notre dojo(1). Et les nuages nos seuls maîtres. Le reste – tout le reste – n'est que contingences et accointances superflues(2).

(1) Lieu où l'on pratique la voie...

(2) Relations lénifiantes et nécessités utilitaires...

   

 

La solidité et la stabilité de la roche et des pierres. La beauté et l’évanescence des nuages. La grandeur et la patience des arbres. La force et le courage des animaux. La bêtise et la barbarie des hommes. Leur fausse sagesse, leurs œuvres et leurs manœuvres d'apprentis-sorciers et leur ignominie recouvrant leur potentiel d'Amour et d'intelligence – la puissance du Divin – caché(e) en leurs profondeurs qui n'aspire qu'à éclore...

 

 

Dieu a octroyé sa part* à chacun. N'offrant à l'homme qu'une ébauche mal esquissée de lui-même. Et qu'il lui appartient, bien sûr, de compléter et de parfaire jusqu'à devenir son exact reflet. Son plus fidèle dépositaire. Et son plus dévoué représentant...

* L'une de ses parts...

 

 

L'esprit et la bouche de l'homme se font mensongers pour le protéger de la vérité. De ses facettes et de ses éclats tranchants. Lorsque celle-ci fond sur vous, elle vous ôte tout appui. Et peu d'hommes peuvent vivre ainsi...

 

 

Les artifices et le maquillage voilent les apparences. Les masques cachent les visages. Mais jamais les cœurs qui transparaissent à travers tous les stratagèmes. Et toutes les tromperies...

 

 

Lorsque la beauté et l'innocence naissent – parviennent à naître – de l'hostilité et de la désolation, notre cœur s'émeut profondément. Comme s'il reconnaissait la part indestructible – la part inaliénable – de lui-même...

 

 

Petite annonce du cœur spirituel : petit être sensible et intelligent cherche désespérément un semblable pour l'aimer...

 

 

En ce monde, il n'y a – le plus souvent – que des cœurs et des visages hideux et grossiers. Pour se résoudre à les aimer, il faut soit être aveugle ou aveuglé, soit percevoir derrière chacun d'eux la part divine – la part de grâce, de beauté et d'innocence – recouverte par une épaisse couche de pelures et d'immondices qui appelle en silence du fond de son cachot...

La part enfantine – et presque angélique – de la moue et du refus qui voile la dimension divine d'accueil et d'acceptation. D'ouverture infinie qui reçoit – qui reçoit tout – sans rien rejeter.

 

 

L'homme ancestral doit mourir pour que naisse un monde nouveau. Et il est aujourd'hui à peine sorti de l'enfance. Ah ! Comme j'aimerais assister à son agonie ! A ses vains sursauts de résistance et à ses pauvres soubresauts convulsifs avant que le trépas ne l'arrache à sa barbarie...

 

 

L'Amour s'affranchit de tout. Des pièges, des chausse-trappes, des ruses et des mensonges. Des usages, des lois et des convenances. Du mépris, de la haine et de l'indifférence. L'Amour s'affranchit de tout. Excepté de lui-même...

 

 

Marcher sur la terre(1) et laisser cheminer la compréhension(2) sans détruire, sans amasser ni accumuler le moindre objet(3) ni la moindre pensée(4). Voilà le signe d'un esprit libre, sage et mûr. Peu d'hommes en ont été, en sont et en seront capables...

(1) Laisser le personnage libre de ses pas... vaquer à ses nécessités...

(2) La laisser cheminer en soi...

(3) Excepté, bien sûr, ceux qui sont ressentis comme absolument nécessaires...

(4) Ne rien s'accaparer – rien ni personne, bien évidemment...

 

 

Marcher dans la nature. Et noter les pensées qui nous traversent sur ce carnet – cet éternel petit carnet – qui nous accompagne, je ne connais d'activité plus stupide et inutile. Ni plus sensée et nécessaire...

Nous y a-t-on contraint ? Non, bien sûr. C'est une disposition de l'âme qui nous y a invité. Et une force irrépressible qui nous y enjoint... Et chaque jour*, nous nous y livrons par nécessité et obéissance...

* ou presque...

 

 

Vivre dans la plus parfaite solitude de l'Être. Sans ennemi parmi les êtres du monde. Œuvrant avec Amour – autant qu'il nous est possible* – selon les exigences des situations.

* Selon les caractéristiques du personnage et des créatures...

 

 

Puissions-nous vivre nus et sans secret. Pleinement transparents. Jusqu'à en devenir invisibles. Se réaliser en un effacement si pur et si complet qu'on en devienne pleine présence...

 

 

En ce monde prévalent l'apparence et la fonction. Et si rarement l'être...

 

 

Lorsque notre marche ne sait se faire présence, elle peut devenir – et devient très souvent – un profond entretien avec soi. Ou à défaut, une longue méditation sur la vie, sur le monde et les hommes. Déterminants (en tout cas) pour rejoindre nos profondeurs. Et pouvoir à nouveau vivre en présence.

 

 

Ces notes – toutes ces notes – écrites au cours de ces nombreuses années tentent de répondre ou invitent à répondre à toutes les questions* qu'un homme peut se poser. Et que se pose naturellement tout chercheur de vérité – tout postulant à la liberté et tout aspirant à la vraie vie – avant que ne s'effacent tous les questionnements et toutes les interrogations pour goûter le silence – situé au delà de toute question et de toute réponse. Pour vivre la vérité et la vraie vie sans besoin de certitudes et d'explications...

* ou du moins aux questions essentielles...

 

 

Entre le ciel et le livre*, je perçois de multiples correspondances. Comme si chacun était le reflet de l'autre. Lorsqu'il m'arrive d'ouvrir un ouvrage en promenade, je ne peux m'empêcher de regarder le ciel au cours de ma lecture. Et j'y lis – et y ressens – de mystérieux échanges. Et d'évidentes résonances...

* Livres de sagesse et de compréhension et livres de poésie...

 

 

Le contemplatif n'est pas un être inactif. Sa méditation guide – et accompagne – tous ses gestes. Gestes pleins, simples et sans avidité. Gestes de joie et d'Amour qui s'offrent par nécessité. Et pour la joie et l'Amour...

 

 

Ecrire comme disposition de l'esprit à contempler. Et à relater l'essentiel. L'écriture n'a chez moi d'autre fonction. Ni d'autre ambition. Comme une invitation à s'y laisser mener. Et à s'y perdre. Pour goûter et vivre l'ineffable...

 

 

Devant le ciel* et les grands espaces naturels, comment ne pas sentir le dérisoire de nos existences, l'insignifiance de nos vies étroites et l'incongruité de nos ambitions mesquines ? Et comment ne pas sentir l'infini que nous portons en nous – et que nous sommes profondément ?

* Et, accessoirement, face à l'immensité de l'univers...

 

 

Être au service des êtres. Et de l'Existant. Serviteur de la terre et du ciel. Petite main de Dieu. Voilà, en vérité, le seul travail – et la fonction réelle – de l'homme en ce monde.

  

  

Chaque être – et chaque chose – en ce monde(1) ne prend-il pas déjà soin de lui ? Et ses interactions naturelles avec les autres formes de l'Existant ne sont-elles pas suffisantes(2) pour sa croissance, son entretien, son épanouissement et l'actualisation de son potentiel(3) ?

(1) Et le monde lui-même d'ailleurs...

(2) Tout au long de son existence...

(3) Potentiel karmique diraient certains, potentiel divin diraient d'autres... pour que chaque être – et chaque forme – vive les circonstances qui lui sont nécessaires afin de s'éveiller à lui-même et à sa nature profonde...

L'homme – nous le savons bien – intervient (et aime intervenir) partout et en toute chose pour faire durer et rendre l'existence plus aisée et confortable. Mais en dépit des apparences, ces agissements semblent non seulement inutiles mais engendrent aussi – très souvent – de profonds déséquilibres. Et de nombreux dégâts.

Certes quelques progrès – parfois nécessaires (et parfois même inestimables) – ont été réalisés. Mais combien de préjudices ont-ils provoqués ? Bien sûr, il semble évident que ces progrès suivent le cours de l'histoire – et plus globalement le cours naturel de l'évolution(1) – afin sans doute(2) de faire advenir en ce monde l'Amour et l'intelligence – le règne du Divin. Mais il nous semble pourtant que dans bien des cas – et en particulier dans la vie quotidienne –, il serait plus juste de nous garder d'intervenir à tout instant et à tout propos. Et de nous laisser aller (avec moins de retenue) au non-agir...

(1) L'évolution de l'Existant.

(2) On le sait bien ou on le devine...

Il serait même sage de ne se résoudre à intervenir qu'en cas de réelle nécessité. Et non pour obéir aux exigences du psychisme et à son lot de peurs et de désirs pour orienter le réel selon nos goûts, nos caprices ou nos extravagances. Notre seule motivation devrait être le Bien commun. Et nous devrions sans doute nous abandonner à l'action comme d'humbles et désintéressés intervenants « rectifiant » avec parcimonie et de façon pertinente le cours naturel des choses – et des êtres – lorsque les situations y invitent ou l'exigent. Comme des acteurs en réserve qui laissent le premier rôle au cours naturel des choses et des êtres et qui n'entrent en scène que lorsqu'ils sont en mesure d'offrir (de façon appropriée) un surcroît d'Amour et d'intelligence aux situations et aux protagonistes concernés...

 

 

Observer l'incessant mouvement et le perpétuel changement de tout depuis l'Eternel inchangé – etinchangeable. Depuis l'absolue permanence – et l’absolue immobilité – du regard silencieux.

 

 

Être au monde – être présent au monde – et prendre soin de chaque être de ce monde comme l'on serait au chevet d'un mourant. Ce que le monde et ce que les êtres sont profondément et ce que jamais ils ne cesseront d'être en vérité*...

* Même lorsque dans quelques décennies, l'espérance de vie aura considérablement augmenté ou lorsque dans quelques siècles, on pourra vivre peut-être quelques centaines ou quelques milliers d'années...

 

 

A la bêtise et aux instincts barbares, il n'y a qu'une réponse : l'Amour.

L'Amour, en vérité, est – et sera toujours – la seule réponse. A toute question. A toute situation. A toute chose.

 

 

L'écriture me vient comme un envol. Et c'est peu dire de la légèreté de ces fulgurances que mon être et ma main – si terrestres – alourdissent malgré leur dévouement et leur fidélité...

 

 

Le jour et la nuit remplissent leur fonction. Et au crépuscule et à l'aube, ils reprennent leurs échanges. Et deviennent (enfin) des espaces de récréation où l'on peut goûter au calme des heures. Et au merveilleux de la terre et du ciel enfin assagis. Avec l'approbation des astres qui se saluent...

 

 

Aux réclamations du temps, oppose l'instant. Et tu ne seras plus – plus jamais – l'esclave des heures. Et des jours.

 

 

En l'instant plein, le monde et la vie révèlent leur pleine saveur.

 

 

Nous sommes tous des idiots aux jours comptés. Mais il y a l'Amour qui nous aime – et qui nous accueille – tel que l'on est...

 

 

Sur l'asphalte vert, partout, la mousse est accueillante. Et j'entends les grands éclats de rire de mes pieds nus qui parcourent la place autour du grand arbre que mes mains joyeuses saluent avec candeur. Et le ciel s'ouvre sur notre passage.

La joie est la clé de toutes les portes. L'Amour le seul passeport. Et l'innocence la seule vêture. Et pourtant, je vois les souliers vernis de mes congénères parés de flanelle et de leurs plus belles dentelles qui peinent à quitter leur parquet de bois précieux. Et leur tapis luxueux. Je vois leurs grands yeux tristes sur le balcon chercher tantôt la lune tantôt le soleil derrière l'horizon. Et l'espoir dans leur cœur de trouver un jour la joie, l'amour et l'innocence – les heures pleines – qu'écrasent les aiguilles de l'horloge et les bibelots dans le grand salon.

 

 

Il y a en nous cette profondeur qui invite aux hauteurs. A la joie. A la légèreté et à la consistance. A l'intensité. A la paix. A l'Amour et à l'intelligence. Elle œuvre sans relâche. Et rien ne saurait la détourner de sa tâche avant que nous goûtions(1) l'ineffable. Cette force – et cet appel – mystérieux, je les ai toujours sentis(2) en moi – en mon for intérieur. Dès la plus tendre enfance. Eux seuls ont guidé mes pas au cours de cette existence. Me priant – ne cessant jamais de me prier – de les délivrer de leur cachot. De mes trop grossières et ordinaires caractéristiques humaines... Et aujourd'hui encore ce sont eux qui orientent ma foulée. Et qui dessinent mon chemin pour les faire advenir avec plus de force et de stabilité. Pour qu'ils transparaissent à travers moi(3) avec plus de clarté et d'évidence. Et inlassablement, ils polissent et façonnent le réceptacle – l'heureux et docile réceptacle – que je suis devenu pour rayonner avec plus de puissance en ce monde.

(1) Que nous le goûtions à chaque instant...

(2) Sentis vivants...

(3) Leur humble et dévoué serviteur.

 

 

C'est au cœur des collines – et sous le ciel immense – que mon cœur se réjouit. Se réjouit d'être au monde. Et c'est là que mon âme puise toute sa vigueur.

 

 

En ce jour de printemps – à la chaleur presque estivale –, le vent, les insectes et les herbes sauvages nous accueillent. Et nous offrent le spectacle de leur vitalité.

Après l'austère – et la belle – saison du silence et du repos, le vivant piaille d'impatience. Et s'affaire avec effervescence à son renouveau. Et à son efflorescence. Devant nos yeux, le monde prolifère, parade, invente, bâtit, rivalise d'exubérances et d'originalité, offre ses cris, ses danses et ses pirouettes. Et ses nouvelles parures printanières dans une pagaille harmonieuse et insensée*.

* Et un peu envahissante parfois...

 

 

L'existence terrestre est misérable, indigente et sans envergure. Et bien des êtres – bien des hommes – vivent dans l'obscurité de façon obscure, avec le cœur noir, au cœur des déserts et des abysses qu'ils décorent de quelques guirlandes et de quelques lampions pour apaiser (ou oublier) leur peine.

Comment leur dire l'indicible ? Comment pourraient-ils imaginer qu'existe un regard qui réenchante le monde – et la vie ? Un regard plein et innocent. Un regard infini et tendre qui accueille le monde et ses formes – toutes les créatures – avec un amour et une bonté sans pareils. Un regard si profond et si léger qui offre à tout ce qui est vu une beauté et une grâce incomparables. Comment pourraient-ils imaginer que tout en ce monde est beau, bon et grand ? Que le cœur s'émeut de rien et de ces petites choses que l'on croit dérisoires ou insignifiantes. Et que les larmes coulent sans raison(1) devant tant de beauté, de bonté et de grandeur. Comment pourraient-ils imaginer que tout est digne d'Amour ? Et que le merveilleux est partout même dans ce qui nous paraît abject ou immonde. Comment leur expliquer qu'ils sont tout cela. Ce monde – jusqu'à la plus petite chose de ce monde. Et le regard qui les contient...

Ah ! Hommes ! Si vous saviez... Mais je sais qu'une chose en vous le sait déjà. Et le sent. Comme elle devine qu'un rien vous en sépare(2) pour que vous puissiez le goûter. Et le vivre...

(1) Ou pour ces mille raisons...

(2) Ou, plus exactement, leur en prive l'accès...

 

 

Il est facile de déceler l'immonde et la barbarie derrière la bienséance, les usages, les règles et les conventions, la politesse, les sourires et la gentillesse apparente des comportements. Pourquoi les hommes ne le voient-ils donc pas ? Parce qu'ils sont aveuglés par l'idéologie et les représentations. Elles leur bouchent tant la vue qu'ils ne peuvent accéder qu'à l'apparence. Et à la surface des choses. Toute profondeur leur est empêchée...

 

 

La vie est une sombre – et fragile – étincelle sous la lumière.

Et – disons-le ouvertement et sans animosité – la lumière des villes et des écrans, les néons des vitrines, des bars et des salles de conférence, les lampes des salons et des bibliothèques, les réverbères des rues et l'obscurantisme des cœurs et des esprits ne favorisent pas son embrasement(1) dans la lumière.

La vie(2) terrestre – et celle des hommes – demeure encore (bien souvent) un prolongement de la nuit noire ancestrale...

(1) Ni celle du monde...

(2) Et le monde.

 

 

Ne fais halte dans les contrées d'abondance et de foisonnement. Elles contentent le cœur avide, frivole et frileux. Mais écœurent l'esprit et assoupissent l'âme. En t'y installant, elles t'endormiraient pour l'éternité.

 

 

Nous allons bientôt devoir quitter les collines* pour d'autres horizons. Peut-être – espérons-le – pour d'autres lieux sauvages...

* Dans quelques semaines, nous ne pourrons plus nous acquitter du paiement de notre loyer. Et face à cette indigence pécuniaire, nous n'aurons d'autres options que de dégoter un petit terrain isolé – situé au cœur de quelque région désertique et perdu au fond des bois pour y installer une yourte ou une cabane ou nous initier aux joies de la réfection de ruines...

 

 

Rencontre impromptue en ce début de printemps* avec deux chasseurs parcourant les collines au volant de leur 4x4 . Ils m'informent que nous sommes – mes chiens et moi – dans une réserve de chasse et qu'il est interdit de s'y promener. Piqué au vif, je leur rétorque que l'espace naturel appartient à tous. Et qu'il n'est pas – absolument pas – la propriété des chasseurs. Sûrs de leur bon droit, ils se lancent alors dans quelques explications propagandistes et apocryphes à visée pseudo-pédagogique sur le rôle hautement écologique des tueurs de « gibier » et leur participation à la protection des espèces animales... [arguments abominables puisqu'ils ne veillent en réalité qu'à s'assurer que les zones naturelles soient suffisamment peuplées d'animaux pour assouvir leur passion meurtrière la période de chasse venue]. Leur pauvre diatribe à l'égard des opposants à la chasse achevée, ils redémarrent le moteur de leur voiture, et s'éloignent sur la piste étroite et cabossée qui monte vers la crête. Je ramasse ma besace, mon bâton et nous poursuivons notre chemin dans la réserve de chasse comme si cette affligeante rencontre n'avait pas eu lieu (ou presque)...

* La période de chasse est close depuis bien longtemps...

A l'issue de ces médiocres échanges*, je ressens une intense colère. Une chose en moi éprouve – et a toujours éprouvé – une haine farouche pour l'appropriation, l'abus de pouvoir, les lois iniques et les mensonges. Mais aussi pour l'autorité, la contrainte et la restriction. Ah ! Comme je déteste être obligé, limité ou rappelé à l'ordre par des règlements (et des êtres) stupides et illégitimes ! Et comme je déteste cette sanguinaire engeance ! Plus le monde et ses pitoyables représentants m'obligent à respecter leurs règles absurdes et inadmissibles, moins je m'y soumets...

* Et même si cette rencontre s'est déroulée sans grande agressivité...

Et il m'arrive parfois – et même fréquemment à certaines périodes(1) –, dans un geste de rage un peu puéril mais qui apaise momentanément ma hargne, de mettre en pièce et de jeter à terre quelques postes de tir (utilisés pour la chasse aux sangliers) ou d'arracher(2) sur des dizaines de kilomètres toutes les pancartes afférentes à la chasse(3) qui parsèment les collines en essayant de nous persuader, de façon honteuse et outrancière, que ce territoire est le pré-carré d'une poignée de rustres à carabine.

(1) Lorsque nous croisons en nombre ces abominables représentants de l'activité cynégétique...

(2) En prenant soin de les prendre avec moi pour ne pas polluer l'environnement...

(3) Chasse gardée, réserve de chasse, fédération départementale de chasse etc etc.

Je ne suis pas fier – pas tellement fier – de ces misérables et vindicatives « exactions » mais je n'en rougis nullement. Je n'y vois qu'une pauvre et vaine tentative d'effacer de façon symbolique l'appropriation des territoires par une minorité qui impose ses lois sanglantes à tous (hommes et animaux). Et un moyen peu approprié et peu intelligent d'apaiser ma colère contre cette odieuse et archaïque communauté*...

* Peu de « communautés » – et, plus précisément, les idées, les actes et les comportements de leurs membres – ont le pouvoir de faire naître en moi une telle colère : les chasseurs, les fachos et les exploiteurs-profiteurs de tout poil...

 

 

Les choses du monde(1) et les choses de l'esprit(2) ont perdu(3) leur attrait. Aujourd'hui, seuls le cœur, l'être, l'innocence et l'authenticité à l'égard de l'Existant(4), l'Amour et l'intelligence trouvent grâce à mes yeux.

Le reste me fait l'effet d'un costume inutile et dérisoire. Bon à ranger au fond d'un tiroir. Ou mieux, à déchirer – et à transformer en chiffons – pour lustrer – et servir – le réel. Afin de le faire briller.

(1) Les affaires et les préoccupations ordinaires des hommes.

(2) Les idées et les préoccupations intellectuelles.

(3) Ont réellement perdu leur attrait...

(4) Les êtres, les choses et l'environnement.

 

 

Je ne suis ni un aventurier ni un bâtisseur. Ni un marginal ni un rebelle. Et moins encore un homme de conventions ou de traditions. Je n'aspire qu'à vivre en paix parmi les arbres et les nuages. Auprès de mes chiens. Et à l'écart des hommes. Dans un confort rustique et fonctionnel* au cœur de la solitude et de la nature. Avec la visite occasionnelle de quelques frères pacifiques...

* Avec un poêle à bois, une douche, un ordinateur connecté, quelques livres et quelques feuilles de papier...

 

 

Ecoute ton cœur profond. Et il répondra à chacune de tes interrogations. Il te dira où vivre, comment vivre et avec qui... Entends-le. Et sois-lui fidèle. Ton bonheur – ton bonheur phénoménal* – en dépend...

* Bonheur phénoménal ou terrestre : sentiment de paix et de contentement induit par l'écoute des besoins individuels (les besoins du personnage) qui donne le sentiment d'être en accord avec soi et en harmonie avec le monde...

 

 

En ce monde – et en cette vie – tout, bien sûr, interagit. Tout, bien sûr, se meut, change et évolue. Tout, bien sûr, occupe une place. Et une fonction. Et est voué de façon progressive ou abrupte au dysfonctionnement. Et à la disparition.

Seule la présence – l'indicible regard silencieux – échappe à cette ronde. A cette ronde furieuse et perpétuelle de caresses et de frictions. De mariages et de fracas.

Ah ! La paix du regard ! Et l'infernale et inépuisable fureur énergétique ! Il est peu dire que ces deux-là – apparemment inséparables – forment un duo bien étrange ! Et bien mystérieux !

 

 

Ah ! L'inéluctable défilement des saisons. Le printemps, saison du renouveau et de l'efflorescence. L'été, saison de la lumière et des exubérances. L'automne, saison de la douceur et du déclin. Et l'hiver, saison du silence et du repos.

J'aime les deux dernières. Elles s'accordent à mon âme foncièrement solitaire. Et à mon cœur plutôt mélancolique...

 

 

En lisant l'ouvrage de Michel Jourdan, Vivre en solitude(1), j'apprends (entre autres choses(1)), que le mot « anachorète » trouve son origine dans le grec « anakhôrein » qui signifie « se séparer(2) ». En rapprochant ce terme de « religare », à l'origine du mot « religion », et que l'on pourrait traduire par « relier », je note – avec une certaine joie et une certaine malice – que l'ermite (et plus généralement le solitaire) – qui fuit ou s'éloigne de la compagnie des hommes ne se sépare en réalité qu'en apparence des apparences pour se retirer profondément en lui afin de se relier plus intensément – et plus intimement – à Dieu, à l'Autre et au monde...

Encore – et comme toujours – délaisser la surface et les apparences pour les profondeurs. Profondeur des résonances et des ressentis. Profondeur du regard et du cœur...

(1) En dépit de son intérêt incontestable, d'une bibliographie riche et fouillée et de la résonance ressentie avec la « grande famille » des ermites exposées dans ce livre, le ton de cet ouvrage est trop catégorique. Trop partisan et péremptoire. Un plaidoyer (un peu trop) virulent et tendancieux, à mon goût, pour la vie érémitique (même si l'on peut comprendre – et parfois même s’associer à – cet esprit de résistance face à la crasse età l'uniformisation des masses grégaires et à la tyrannie de la normalité et des standards sociaux dans les sociétés humaines). Bien que la solitude réunisse maintes conditions propices à la rencontre avec soi et l'infini que l'on porte en soi, elle n'est pas exempte d'écueils et parfois de restrictions. Et elle ne constitue pas, à mes yeux, l'unique voie de la délivrance même si elle doit être vécue – et semble même incontournable – au cours de certaines phases du cheminement (cheminement intérieur de la compréhension ou vers la compréhension – comme cela vous agrée...).

(2) Ou « se retirer »  ἀνά, ana (« à l’écart ») et χωρέω khoreo (« je vais »).

 

 

Trouver refuge sous le feuillage d'un arbre pour se protéger de la pluie, je ne connais d'abri plus merveilleux. Et plus accueillant. Ah ! Quelle tendresse – et quelle gratitude – j'éprouve pour mon protecteur... Les larmes jailliraient presque tant je suis ému par cet accueil. Et cette entraide naturelle...

 

 

Lorsque je suis contraint de marcher parmi les fleurs sauvages(1) – réunies en larges et épais massifs – qui ferment l'accès à un sentier, mon pas se fait léger et sautillant pour éviter de les meurtrir (autant que possible). Et en passant l'allure légère et précautionneuse, je les prie d'excuser ma lourdeur. Et les désagréments occasionnés par mon passage.

 

 

J'aimerais parfois être un oiseau transparent. Vide et sans substance(2). Ne dégradant rien. Et ne blessant personne. Ne fendant pas même l'air pendant son vol...

(1) Ou parmi la multitude de limaçons des tiges (agglutinés en nombre) qui recouvrent les vastes étendues herbeuses...

(2) Il est aisé de déceler dans ce fantasme l'analogie – l'évidente analogie – entre l'oiseau sans substance et le regard silencieux, éminemment présent mais dont la présence n'affecte jamais le réel – pas la moindre parcelle du réel...

  

  

« Vaurien » est le seul statut – et le seul emploi – dont je serais fier en ce monde. Dans ce pauvre monde qui marchande et monnaye toutes choses, allant jusqu'à convertir en or* les plus essentielles. Et les plus impalpables...

* A donner une odieuse valeur monétaire...

 

 

Le rien et le peu sont nos biens les plus précieux...

 

 

Mon œil est très sensible au relief. Et aux lignes d'horizon*. Et la joie m'envahit lorsqu'ils reflètent l'harmonie.

* Et à la topographie en général avec une préférence marquée pour les milieux à la fois accidentés et arrondis...

 

 

De nos jours, peu de sociétés peuvent se vanter d'avoir un ministère de la culture. Certes... mais lorsque l'on sait à quoi l'on réduit (en général) la culture et comment fonctionne le marché de l'art(1), on a vite fait de déchanter...

Il m'arrive de rêver à un grand ministère(2) du Regard – et de l'art – poétique. Et je suis persuadé qu'il ferait bon vivre dans ce genre de société qui aurait la clairvoyance d'ériger la sensibilité et l'intelligence au rang de priorités(3)...

(1) Quel mot horrible (mais réaliste) pour une discipline si noble – et quasiment divine...

(2) Comme existait à l'époque de Kamo no Chômei un bureau de la poésie au Japon.

(3) A condition, bien sûr, qu'elle n'institue pas le regard et l'art poétiques en système légal et obligatoire mais comme le simple reflet collectif de l'intériorité profonde de chacun (ou d'une grande partie) de ses membres. Et comme une invitation au silence et à la beauté...

 

 

Qui songe à la brièveté – et à la fragilité – de l'existence devant son bol de café, en allant aux toilettes ou au travail, en allant faire les courses ou chercher ses enfants à l'école ? Et mieux encore, qui les ressent ? Et qui éprouve (profondément) l'absence de temps en habitant à chaque instant l'éternelle présence ?

 

 

Une phrase de Timothy Leary – un trublion iconoclaste et psychédélique américain du 20ème siècle – découverte dans le livre de Michel Jourdan m'a fait beaucoup rire. Il évoque les valeurs de notre société (sécurité, confort et travail) qui « menacent de détruire la vie libre de cette planète » et qui n'apportent aucune réponse aux questions essentielles. Et il s'interroge sur « ce qui viendra après ». Et conclue sa sentence douce-amère et non exempte d'humour ainsi : « le confort et le plein emploi sont-ils le sens unique de la vie ? Le code génétique évolue-t-il depuis trois milliards d'années, seulement pour nous permettre d'ouvrir de nouvelles autoroutes ? ».

Non, aurait-on envie de lui répondre, les autoroutes sont simplement le reflet d'une médiocre – mais nécessaire – étape. Et comme vous, cher Timothy, nous attendons avec impatience la suite des événements. Et les prochaines étapes*...

* Sans doute encore pleines de pauvres inventions à court terme mais également pleines de potentiel et de promesses à moyen et long termes (cf l'ouvrage La conscience et l'Existant)...

 

 

Nos seules richesses sont en nous(1). Et nos seuls biens devraient être sur nous(2). Et les quelques autres nécessités – les commodités d'usage courant exigées par le quotidien – chez nous(3). Et il serait heureux d'offrir le reste aux plus nécessiteux que nous rencontrons...

(1) En notre for intérieur.

(2) Que l'on porte sur soi.

(3) Là où nous logeons.

 

 

Ah ! Mon Dieu ! Comme le regard peut s'encombrer vite et à tout propos ! Le moindre événement, le moindre souffle, le moindre bruit, et le voilà chargé de mille ressentis, de mille émotions, de mille pensées...

Lorsque le regard se laisse aller à l'avant plan – ou lorsque le monde phénoménal revient « à la charge » en devenant quelque peu invasif, il convient de rester attentif – et vigilant – afin de demeurer dans la nudité perceptive. Sans rien saisir ni amasser. Sinon le « piège » – le piège du monde, du mental et de la pensée – se referme aussitôt... Mais n'oublions pas que nous pouvons nous extraire de ce « piège » à tout moment. Dès que l'attention réintègre le regard nu...

 

 

En cette fin d'après-midi printanière, alors qu'il ne nous reste que quelques kilomètres à parcourir, j'aperçois un insecte aux ailes vertes et noires qui gît, immobile, sur le dos au milieu du chemin. Mort. Je m'arrête et m’assois à ses côtés. Et je me mets à lui parler avec douceur et simplicité – presque avec cérémonie*. Je suis si surpris par cette mort « prématurée » survenue en ces premiers jours de printemps que je lui demande s'il connaît les raisons de ce départ alors que les beaux jours – et la belle saison – ne font que commencer... puis très vite, je le rassure et lui dis qu'il a vécu ce qu’il devait vivre en tant que petit insecte ailé... Et qu'à présent d'autres cieux – et d'autres terres – l'attendent. Qu'il ne doit pas s'inquiéter. Que tout ira bien. Et que d'autres habitants du regard seront là pour l'aider. Et l'accompagner... Puis nous restons en silence pendant quelques instants. Avant de me lever, je lui adresse une dernière pensée. Puis je reprends mon chemin, l'âme gaie et (pourtant) un peu chavirée par le destin éphémère de ce frère minuscule...

* Une cérémonie naturelle, bien entendu...

 

 

J'éprouve une grande – et parfois même une immense – tendresse pour ces minuscules et dérisoires fragments. A mes yeux, ils sont le reflet d'une infime part du ciel que je peux voir et habiter. Et le reflet d'une infime part de la terre que j'habite et dont je suis composé...

 

 

Agenouille-toi devant le regard poétique. Et pleure. Tes pauvres notes patienteront. Viendra le temps où tu pourras t'asseoir en son sein de façon pleine et souveraine. Avec une parfaite humilité. En magistral représentant céleste.

Cette terre accueille tes pas. Comme l'herbe et les pierres des chemins. Rends leur grâce de ton passage.

 

 

Au cours de cette existence, j'ai arpenté bien des chemins*. Et de cette humble marche ne subsiste que l'usure des pas. Et l'épure du regard.

* Chemins de vie, chemins du monde (quelques chemins du monde), chemins de campagne et chemins des collines...

 

 

Marche solitaire sur les chemins fraternels... Et je me souviens avec tendresse des premières foulées, des paysages sombres, des visages funèbres et des ornières rencontrés au cours du périple que mon cœur jugeait avec hostilité. Il n'avait su – n'avait pu – encore pénétrer le cœur du monde et de la vie. La profondeur des âmes et des êtres...

 

 

Le regard à la fois tendre et pénétrant, caressant les paysages. Et s'unissant à eux. Ô divine perception...

 

 

Il nous faut d'abord passer par la grande humilité avant de laisser (de pouvoir laisser) resplendir en toute liberté – et à sa pleine mesure – toute la splendeur et la beauté de l'individualité*.

* du personnage.

 

 

Je regarde avec beaucoup de bonheur les tableaux de Jean-Louis Mendrisse. J'aime son trait (et son graphisme*), les formes simplifiées de ses portraits, la composition complexe de ses toiles et le monde intimiste à la fois réaliste et onirique qu'il offre à notre regard.

* Qui n'est pas sans rappeler parfois le style de certaines œuvres de son père, Jean Mosnier... Comme une sorte de prolongement et de renouveau dans la filiation...

Bon nombre d'artistes offre un univers poétique. Mais le grand art consiste à faire naître le regard poétique chez le spectateur, l'auditoire ou le lecteur... Tâche qu'il est possible d'accomplir à condition de travailler avec une profonde nudité de l'âme pour que le geste – et l’œuvre – puisse se faire l’exact reflet de la grâce...

 

 

Ah ! Toutes ces parts de nous-mêmes qui ne demandent qu'à être aimées et écoutées. Et à grandir sous le regard bienveillant qui les épanouira...

 

 

Mon métier ? Cueilleur de pensées célestes que je dépose à ma fenêtre pour offrir au monde un peu de grâce et de beauté. Quelques fleurs par jour suffisent. Il ne faut pas encombrer le regard des hommes si l'on souhaite les ouvrir à l'infini...

 

 

Quelques riens sous mes pas que j'honore – et vénère – comme si je marchais sur le visage de Dieu.

 

 

On pourrait marcher dans le désert. Le regard suffirait...

 

 

Il y a une telle paix – et une telle joie – dans ce regard d'Amour qu'il invite au silence. Et à la contemplation. Et dans ce silence contemplatif, on peut goûter et admirer les merveilles de la terre. Les remercier, leur rendre grâce et honorer leur présence. Et leur offrir l'espace et la tendresse – tout l'espace et toute la tendresse – dont elles ont besoin pour qu'elles s'épanouissent...

 

 

Au plus fort de la présence, j'entends parfois Dieu se pencher vers moi et me dire de sa voix silencieuse : « Ah ! Que je t'aime, petit bonhomme, avec tes habits élimés, tes vieilles sandales et tes cheveux hirsutes ! Avec ton cœur humble et ton regard pur*. Et comme j'aime ta marche lente avec ton bâton, ta besace et ton carnet ! Toi qui apprends à fréquenter mes terres, peut-être seras-tu bientôt suffisamment mûr pour rejoindre les sages et les anges à mon service qui œuvrent avec humilité et ardeur au rayonnement du ciel sur la terre. Peut-être continueras-tu d'écrire mon visage et le merveilleux du monde... ou peut-être te confierais-je d'autres missions – et d'autres tâches – pour ensemencer le cœur des hommes...

* Ton regard nu...

 

 

Avant que ne se flétrissent les visages, offre des gestes et des paroles* qui adoucissent les esprits. Et réconfortent les cœurs et les corps. Et à ceux qui sont mûrs, offre ce que le chemin t'a appris. Accompagne leur pas vers l'innocence.

* Sans jamais oublier d'être toi-même...

 

 

L'humilité – et la beauté – d'une fleur sous le ciel qui sait se faire l'exact reflet de toutes les merveilles de la terre. L'homme devrait être ainsi... Et lorsqu'il le sera, les frontières du ciel et de la terre s'effaceront. Et pourra naître – et s'épanouir – le règne de l'innocence et de la beauté.

 

 

Ô homme, garde-toi de tout mensonge. Conserve en ton cœur l'honnêteté et l’authenticité. Qu'elles guident tes gestes et tes paroles. Sois-leur fidèle en toutes circonstances. Et sois-en certain, le temps que le cœur s'épure, l'humilité et l'Amour suivront...

 

 

Offre-toi à ta pleine et juste mesure. Et jamais tu ne connaîtras la trahison.

 

 

Sous le ciel clair, les pas se font radieux...

 

 

Vivre avec ce qui est là. Qui va et qui vient. Mais a-t-on réellement le choix ?

 

 

On ne sait ce que sera la vie – et le monde – dans un instant(1). Comme on ne sait si le regard sera habité(2)... Et qu'il le soit ou non, la vie et le monde seront ce qu'ils seront... Pourvu que tu demeures à l'écoute des situations, que ton âme sache rester humble et nue et ton cœur honnête et authentique, il n'y a aucune raison de s'inquiéter. Tu traverseras les circonstances avec justesse. Comme il convient...

(1) Ni, bien sûr, a fortiori demain, le mois prochain ou dans 10 ans. Ces références temporelles n'ont aucune existence réelle puisqu'elles ne sont que de simples constructions mentales...

(2) Ni de quelle façon, avec quelle profondeur et quelle stabilité...

 

 

Ah ! Mon Dieu ! Quel spectacle ahurissant pour le regard – pour notre regard – témoin (unique témoin) de l'infinité des formes et des mouvements de ce monde ! Qui observe et contemple les manœuvres et les trajectoires – la danse tantôt folle tantôt sage – des hommes, des nuages, des pierres, des montagnes, des rochers, des arbres, des oiseaux, des arbustes, des insectes, des herbes, des étoiles, des planètes, des galaxies, des molécules et des atomes de l'univers. Tous inexorablement soumis à leur destin. Et au cours naturel des choses. Tous, jouets et terrains de mille entrelacements et de mille entremêlements. Tous, soumis aux échanges et aux combinaisons. A la création et à la destruction. A l'édification, à la chute et à la disparition. Dans une implacable et inépuisable mécanique. Ah ! Quel incroyable et insensé magma énergétique que ce monde !

Et puis il y a le silence – et la tendresse – du regard qui les goûte, qui célèbre leurs jeux, leurs cabrioles, leurs coups, leurs morsures, leurs accolades et leurs caresses et orchestre avec maestria la symphonie en orientant imperceptiblement leur marche...

 

8 décembre 2017

Carnet n°73 L'azur et l'horizon

– Lorsque les pas s'en mêlent – 

Journal / 2016 / L'exploration de l'être

Ne te contente jamais de vivre à la surface des choses. A la surface de ton être. A la surface du monde. Vis en profondeur. Là se trouve le secret. Et la vérité. En ces profondeurs, la vie, le monde, l'infini, l'Amour et l'éternité se ressentent intensément. La vraie vie n'est pas ailleurs...

Ne crois pas à ces paroles avec légèreté. Eprouve-les. Vérifie leur authenticité. Même si la vie, le monde et Dieu conservent aujourd'hui leurs mystères, laisse-toi guider par tes aspirations et mener par les événements pour les comprendre – et les ressentir – profondément. Alors tu découvriras et goûteras ces vérités.

Une fois que Dieu t'aura montré son visage, des larmes couleront sur tes joues. Puis l'Amour, la paix et la joie jamais ne te quitteront. Quels que soient les chemins et les circonstances, tu arboreras un sourire inaltérable – un tendre et immense sourire – comme le parfait reflet de ton cœur sur tes lèvres. Je t'en prie, aie confiance en ce que tu portes et en ce que la vie t'offre. Au fil du cheminement, tu comprendras ce que tu n'as jamais cessé d'être – que tu ignores encore à cette heure et que tu es pourtant déjà...

 

 

Deux colombes s'envolent sous nos pas. Et de leurs ailes robustes nous hissent jusqu'au ciel où les anges et toutes les créatures du monde accueillent les nouveaux venus. Toutes les âmes légères et joyeuses libérées de leur gangue de glaise qui pourront, après la fête organisée en leur honneur, retourner sur la terre pour guider les hommes sur les chemins de l'innocence.

 

 

Dans les actes des hommes – et des autres créatures de l'Existant –, le ciel s'engage autant que la terre. Ce sont leurs œuvres qui peuplent le monde. Et toutes, bien sûr, prennent racine dans la terre. Et s'élèvent vers le ciel...

 

 

De terre désastreuse en terre désastreuse, les hommes cheminent vers le ciel. Et ce n'est qu'en accédant à l'espace céleste qu'ils perçoivent (pleinement) la beauté et les merveilles de la terre.

 

 

Le temps s'empare des beaux jours et fait naître la pluie pour que s'égaye le cœur des hommes.

 

 

La plupart des hommes aiment et mettent un point d'honneur, selon leur propre expression, à progresser. A « avancer » – comme ils le disent et le claironnent à tout-va. Tous aspirent à devenir. Et à faire advenir leurs rêves, leurs projets ou je-ne-sais-quels autres désirs...

Cet élan et cet attrait pour l'avenir sont sans doute impulsés par une forme de refus du présent et l'espoir que l'avenir leur offrira une existence plus douce et favorable. Mais ils tirent leur source plus fondamentalement encore dans la nature profondément terrestre et énergétique de l'être humain (et l'impératif besoin de mouvement qu'elle fait naître) et dans la nostalgie – très souvent inconsciente – de retrouver l'espace de perception sensible impersonnelle (la présence silencieuse et souveraine).

 

 

La vie défile. Et la solitude a tout recouvert. Et par dessus, l'Amour est arrivé. Et plus haut encore, Dieu qui sourit de notre étonnement. Et devant ces mystères – ces grands mystères – nous éclatons de rire. Comment ne pas éclater de rire ? N'est-ce pas là la seule réponse possible face à la vie et à la solitude ? Face à l'Amour et à Dieu ?

 

 

Deux corbeaux jouent dans le ciel sous le soleil timide qui commence à percer l'épaisse couche de nuages qui flotte sur la plaine depuis des jours. On les voit tantôt se poursuivre, tantôt entrecroiser leur vol dans une frénésie de battements d'ailes enjoués et malicieux. Comme un appel – une invitation – à la joie. Un prélude orchestré par deux anges aux allures d'oiseaux de bon augure pour que le ciel et la terre à nouveau s'ensoleillent.

 

 

Le vent parfois pose tendrement sa main sur mon épaule et me dit : « comme il est bon d'être ensemble ». Et nous voilà enchantés – et tout joyeux – de déambuler bras dessus bras dessous sous le regard attendri du ciel.

 

 

Que veux-tu être que tu ne sois déjà ? Tu es le monde – le tout de ce monde. Ce qu'il accueille et abrite comme ce qu'il chasse et répudie. Ce qu'il blesse et détruit comme ce qu'il relève et édifie. Pose ton regard un peu plus haut dans le ciel, et tu verras – et sentiras – que chaque chose est – et se déroule – en toi... Et tu t'inclineras – comment ne pas s'incliner ? – devant la majestuosité des phénomènes et des paysages du monde.

 

 

En d'incroyables rondes s'emmêlent la vie et le monde. Dans une danse interminable de joutes et de caresses. Terribles et somptueuses.

 

 

Sentir le souffle de Dieu, à travers notre main, coucher sa parole sur ce petit carnet. Comment ne pas s'en émouvoir ? Il est bien naturel que les larmes coulent sur nos joues...

 

 

La vie toujours est pluriel. Diversité. Chaos harmonieux. Apparente désorganisation très savamment orchestrée. En ce monde, seule la raison avec ses craintes insensées et ses folles aspirations à la sécurité, à la praticité et à l'ordonnancement uniformise. Lisse, égalise et gomme les différences. Anéantit la pluralité pour mettre le monde et ses créatures au pas de son pathologique besoin d'ordre, de cohérence et de standardisation.

Comme si la raison – à travers le psychisme qui agit envers elle comme un mentor tyrannique et un conseiller maladroit et qui, rappelons-le, n'a accès qu'à une infime part de la conscience et ne dispose que d'une compréhension et d'une perception partielles s'estimait en droit (ou de son devoir) d'usurper la place et d'agir au nom de la conscience impersonnelle qui, seule (et elle seule) – dispose de la capacité d'appréhender la totalité de l'Existant et d'orchestrer – avec et à travers lui – l’ensemble de son organisation. L'analogie avec un enfant s'avère sans doute ici judicieuse. On pourrait, en effet, affirmer que le psychisme est – et se comporte – comme un enfant. Tout le monde s’accorderaient à dire qu'un enfant n'est pas un adulte. Il n'est qu'un adulte potentiel ou – plus précisément – il porte en lui les graines qui pourront faire de lui un adulte. Et à l'instar de l'enfant, le psychisme n'est pas la conscience impersonnelle pleine et entière, il ne l'est que potentiellement. Et pour que ce potentiel s’actualise et devienne effectif, il lui faut accomplir un cheminement – que l'on apparente en général au cheminement spirituel... au même titre qu'un enfant qui pour devenir adulte doit grandir et mûrir...

 

 

Devant le soir qui s'avance, je m'incline. Et je salue la lune qui apparaît. Aujourd'hui, le ciel est silencieux. Et je n'ai aucune parole à lui offrir. Notre silence nous suffit. Ensemble nous regardons la terre qui achève sa journée. Et qui se prépare pour la nuit.

Et devant l'infini – l'infini du ciel – je m'agenouille. Devant tant de beauté, cette joie et cette paix qu'il vous offre, comment ne pas s'agenouiller ? Notre cœur se penche, vacille... Remercie le regard et le monde. Et pleure en silence.

 

 

Dans leur folie industrieuse, les hommes ont transformé la terre originelle – vierge et fertile – en aires aseptisées. Et en paysages de désolation. Comment peut-on convertir tant de beauté – et de grâce – en laideur ? Et faut-il être aveugle et idiot pour se persuader du contraire ?

 

 

Aujourd'hui, le froid a gagné la plaine. Et sur les collines, le vent glacial nous fouette le visage. Mais nos amis – tous nos amis – sont présents. Et nous accueillent comme à l'accoutumée en nous ouvrant le chemin comme les princes de la terre, nous, qui passons aux yeux du monde pour de crotteux et infortunés vagabonds. Et le ciel au dessus de nos têtes est ravi de ces retrouvailles quotidiennes et de cet accueil au bel et humble équipage d'heureux infortunés.

Comme à tous les sans-grades, il ouvre sa porte. Et ses bras. Nos amis les arbres et les nuages, les plantes et les insectes, la mousse des bois et les pierres des chemins connaissent sa mansuétude. Et tous, nous lui sommes reconnaissants de pouvoir cheminer sous son regard clément. Ne cessant de louer sa douce miséricorde. Et sa tendresse infinie.

 

 

L'heureux déroulement des saisons. Le ciel toujours pare la terre des habits de circonstances. L'habillant et la déshabillant avec la plus parfaite justesse.

 

 

A chaque nouvelle lune, nous regardons s'endormir la terre. Et ses créatures. Et à chaque nouveau soleil, nous saluons leur réveil. Les jours passent ainsi. Sous le regard tendre du ciel qui veille sur sa création.

 

 

L'immensité toujours accueille l'infime qui loge en lui. Et qui lui est possible d'habiter – même si en ce monde bien peu le savent ou y parviennent...

 

 

Après la longue nuit de ténèbres – de saison en enfer en saison en enfer –, au plus bas du monde, au plus vil du cœur, au plus immonde de l'esprit, la grâce soudain vous frappe. Eclaire le regard. Illumine l'âme. Et ensoleille le monde. Toutes les ombres alors s'effacent. Comme si la lumière ne s'était jamais éteinte. Ni dans le monde ni dans l'âme. Ni dans le regard, ni dans l'esprit, ni dans le cœur. Ni en enfer ni dans les ténèbres.

La lumière clairvoyante dissipe l'obscurité de l'infime et des apparences. Et l'obscur de l'infini et des profondeurs. Offrant son éclat, ses heures claires et sages – la vie glorieuse (pleinement glorieuse) à tous les yeux humbles et dessillés.

 

 

En ces terres de malheurs et d'ornières, les âmes humbles – après avoir traversé les monts et les vallées, les plaines populeuses et les déserts – chevauchent leurs montures ailées sans souci de la misère et des reliefs. Les anges – et les autres créatures du ciel – leur ont ouvert le chemin. Les murs et les portes ont disparu. Comme effacés. Ainsi cheminent les bienheureux qui se sont délestés de leurs charges – et de tous leurs bagages – durant la douloureuse et salvifique traversée des contrées terrestres.

Pas après pas. De situation en situation. Circonstance après circonstance. Ainsi cheminent les âmes humbles. Au fil de la marche, Dieu et le monde leur ont livré leurs secrets. Comment pourraient-ils à présent craindre les visages, les paysages et les chemins ? A leur passage, les bras s'ouvrent. Les esprits s'épanchent et se confient. Et les âmes toujours s'en trouvent allégées. Et il arrive même que certains cœurs aspirent à les rejoindre. A emprunter la voie du délestage qui mène sur les terres du dépouillement, de la simplicité et de l'essentiel, unique porte d'entrée vers les contrées célestes.

 

 

L'heure creuse en son réceptacle. Sonde ses racines. Jusqu'aux fondements de son origine. Les aiguilles d'abord s'affolent. Puis sont pulvérisées. Après l'effacement du temps, demeure l'instant. A jamais l'instant. Et ce qui est dans l'instant. L'âme alors devient libre. Et s'envole là où Dieu et le monde la réclament. En servante fidèle et dévouée, ne comptant ni ses heures ni sa peine. Obéissant aux injonctions divines de la terre et du ciel. Soumise, le cœur en joie et en fête, à l'ordre divin et à ses règles pour servir ses sœurs – toutes ses sœurs – et tous les êtres – toutes les créatures du monde – et les aider avec amour, patience et intelligence à se rapprocher du ciel*.

* A rapprocher leur regard du ciel...

 

 

Le cœur étroit sent sa dernière heure venir. Sa fin toute proche. Et durant son agonie, il pleure, geint et se plaint. Ne pouvant imaginer encore l'avenir. Et le destin qui l'attend. Et dans cet ultime repli sur soi, comment pourrait-il se douter du potentiel que ses tréfonds recèlent ? Comment serait-il capable d'entrevoir l'infini, la puissance et l'humilité que sa renaissance – si peu envisageable pour lui – lui offrira ? Comment pourrait-il deviner qu'émergera du fond de ses ténèbres une lumière – jamais éteinte – dont la qualité, l'intensité et l'étendue ne cesseront de croître pour briller, éclairer et rayonner de plus en plus fort. Et de plus en plus loin. Comme un phare céleste dans le monde guidant les naufragés des rivages – de tous les rivages – de la terre. Et toutes les âmes défaites en quête d'une terre d'Amour et de liberté.

 

 

Tu erres dans les marécages – dans les marécages brumeux – du monde. Surnages parmi les corps et les immondices. Te nourrissant des détritus de la terre et les abandonnant. En quête d'une île où régneraient la beauté et la sagesse. Où le soleil brillerait – intact.

Regarde donc en ton cœur. Et creuse. Libère-toi de ses oripeaux. Défais-toi de ses pauvres secours. Et de ses appuis de flottaison. Laisse-toi couler en ses profondeurs. Et au fatidique instant de la noyade, émergera la contrée sans pareille que tes rêves marécageux avaient tant espérée.

En tous lieux de la terre, le ciel est-il le même ? Est-il présent – vraiment présent – pour chacun ? Et équanime avec tous ? Oui, en dépit des apparences, comment en douter... Toujours il est là. Toujours. Il fait simplement vivre à chacun ce dont il a besoin pour s'éveiller à sa présence. La différence tient seulement dans le fait de l'habiter avec plus ou moins d'encombrements, de conscience et d'ampleur.

 

 

La terre connaît les conflits et les guerres. Et le ciel connaît la paix. Si tu veux vivre la mésentente, l'affrontement et les différends de façon tranquille et pacifiée, il te faudra d'abord regarder et comprendre la part farouche et craintive et la dimension combative et guerrière que tu recèles. Les accueillir et les accepter sans retenue. Lorsque tu seras en paix avec elles et que ton âme (ton cœur et ton esprit) se seront suffisamment dépouillée(s), tu pourras habiter – et parcourir – la terre avec le regard pacifique du ciel. Et s'il arrivait – selon les circonstances – que tes pas et tes gestes se fassent encore terrestres – trop lourdement terrestres (et comment pourraient-ils y échapper?) – demeure à l'écoute du ciel qui t'offrira le regard nu (ou t'aidera de nouveau à le dénuder) afin de guider leurs mouvements et leur direction. Et leur offrir toute leur justesse.

 

 

Un arbre penché par le vent. Et combien d'êtres – combien d'hommes – courbés ou pliés par le poids des circonstances ?

 

 

A quoi s'apparente le bonheur du monde ? A dire vrai, à peu de choses(1). Et la joie du ciel ? A toute chose(2), évidemment...

(1) liées aux exigences, aux représentations et à l'étroitesse du psychisme.

(2) liée au regard impersonnel global et enveloppant.

 

 

Le ciel et la terre se laissent parcourir – et explorer – selon leurs propres lois. L'une à travers les routes et les chemins qui parsèment la surface du globe. L'autre à travers le sentier du regard qui ouvre sur l'espace de clairvoyance où l'infini, l'Amour et l'intelligence dévoilent peu à peu leurs innombrables paysages (par les canaux de la perception, de la sensibilité et de la sensorialité). Ainsi le ciel comme la terre se laisse progressivement découvrir au fil de la marche et du cheminement*...

* le cheminement de la compréhension perceptive et sensible.

 

 

Au cœur de la forêt – parmi les arbres – on sent la respiration de la nature. Les rythmes de la terre. Et le souffle divin. On entend le vent dans les feuillages, les branches qui craquent et le chant des oiseaux. On chemine sur d'étroits et tortueux sentiers jonchés de feuilles mortes, de mousses et de lichens. Au plus proche des éléments et des représentants naturels des saisons et du climat.

Au cœur des villes – parmi la foule – on sent la transpiration et les haleines fétides. La crasse des rues et des hommes. On entend leurs bavardages et leurs paroles creuses, le vrombissement des moteurs et la cacophonie urbaine. On marche sur de larges trottoirs crasseux et rectilignes jonchés de papiers et de détritus. Au plus près des rebuts de leur terrifiant surnombre et de leur effarante promiscuité.

Les forêts – contrairement aux hommes – ont toujours obéi et respecté les lois et les rythmes naturels. Aussi n'ont-elles jamais produit d'immondices. De déchets polluants et irrécupérables. L'humus qu'elles créent est toujours un terreau propice à la vie. A son renouvellement. Et à sa célébration.

 

 

En d’intarissables jaillissements s'écoule la parole – la parole céleste. Et la main – trop pauvrement terrestre – est si menue et si lente qu'elle ne peut recevoir ce flot puissant et majestueux sans trahir sa parfaite justesse. Comme l'esprit du monde est trop étroit et encombré pour accueillir sa folle sagesse. Et pourtant sa force et sa beauté dévalent les pentes de la terre. Et couvrent la nature de leurs pépites. En une inexprimable perfection.

Ah ! Quelle aubaine pour les buveurs – tous les buveurs – de paroles sacrées ! La sagesse inonde leur cœur. Et leurs débordements – tels de minuscules ruisselets – rejoignent les torrents impétueux et les cascades puissantes du divin verbe céleste.

 

 

Le reflet de la lumière sur les feuillages. Et soudain l'esprit s'éclaire. Et le cœur s'illumine. L'âme, elle, reconnaît sa patrie. Et lui sait gré d'apparaître au monde. En ces lieux terrestres parfois – souvent ? – si hostiles et désolés. Si obscurs et misérables sans l'éclat et le rayonnement du soleil.

Quand l'âme du monde reconnaît le regard du ciel, elle s'envole parmi les anges et les nuages. Et perçoit avec plus d'acuité, d'intelligence et de justesse le charme des chemins et des paysages – toutes les merveilles – de la terre.

 

 

Un héron cendré au milieu d'un pré s'envole vers le ciel gris et nuageux. Il s'élance avec maladresse et majesté. Comme un ange exilé sur terre qui regagne son royaume.

 

 

Présent autant au ciel que nous habitons (et révérons) qu'à la terre que nous chérissons (et sur laquelle nous logeons). L'infinie tendresse du regard sur les merveilles de l'horizon. Comme la plus haute – et la plus parfaite – verticalité sur l'ensemble de l'horizontalité.

 

 

Les futaies régulières et les parcelles trop savamment organisées enlaidissent la forêt. On y sent avec trop d'évidence et d'ostentation la main ordonnatrice de l'homme. Et son esprit d'ordre et de méthode. Une offense à la flore – et à la vie – sauvages. A leur beauté brute et naturelle. A leur composition apparemment inorganisée mais, en vérité, harmonieusement et secrètement orchestrée.

Ce que la main de l'homme touche, crée ou invente* – hormis peut-être une part (une infime part) de l'art et de l'artisanat – se trouve enlaidi ou confine à la laideur. La main de l'homme devrait se faire plus légère. Il lui faudrait respecter les lois et les règles de la vie. Et du vivant. Et les laisser l'aider à construire un monde plus humain. Et plus vivable. Pour un jour, retrouver la grâce, la beauté et l'harmonie de la nature et – qui sait ? – peut-être l'enrichir en lui insufflant un surcroît de conscience...

* industrialisation, rationalisation, systématisation...

 

 

La pluie – lorsqu'elle se fait trop abondante – attriste les paysages. Les recouvre d'un voile – d'un épais voile – de désolation et de tristesse. Comme une immense toile qui emprisonne les yeux et l'esprit. Et dont ils ne peuvent se libérer qu'au sein du regard nu...

 

 

La solitude – la grande et vraie solitude – invite à la rencontre avec soi. Nécessaire et incontournable pour cheminer vers l'Être. De cette rencontre naît d'abord une connaissance approfondie de sa « propre personnalité », des mécanismes et du fonctionnement psychiques en général mais également – et surtout – lorsque les masques du personnage tombent et que les fausses évidences s'effacent, une connaissance sensible de l'infini, de l'Amour et de l'éternité. Un vécu ressenti et éprouvé de la présence impersonnelle que nous portons en nos profondeurs. Et que nous sommes fondamentalement. Et dont la force et le goût se révèlent et s'actualisent peu à peu au fil du cheminement vers la compréhension. Présence à laquelle tout être perceptif est en mesure d’accéder après s'être défait de ses encombrements perceptifs, idéatifs et émotionnels les plus grossiers. Une fois la nudité minimale requise pour goûter (et habiter) cet espace de présence, l'exploration se réalise alors de façon autonome. Sans la moindre volonté personnelle.

 

 

C'est dans le dépouillement et la nudité que se révèle la grandeur de l'être. Et le potentiel de l'homme. A la fois objet dérisoire et ordonnateur souverain.

 

 

Un bain de couleurs dans tes yeux transparents où se reflète le gris des nuages. Les visages tristes et ahuris. Le vent dans les feuillages. Le parfum des roses. Toutes les beautés de la terre. La détresse et la misère des hommes. Et le rire des enfants.

 

 

Dieu jette son dévolu sur les visages perdus dans la foule. Sur ceux que le chemin a égaré. Et dont les yeux désespérés contemplent le ciel en vain à la recherche du visage de Dieu. Ignorant encore qu'il se cache derrière toutes les choses – et toutes les créatures – du monde.

Dieu se tient tout proche – au plus proche – de ceux qui ont été engloutis par la désespérance et pour lesquels le ciel n'est même plus une promesse. Il leur enseignera ses lois. Leur apprendra l'Amour. Emplira leur cœur de bonté. Et invitera leur âme à se faire l'humble et dévouée servante de la sagesse et de la beauté.

Telle est l’œuvre – et la mission – de Dieu. Et tel est le travail de l'homme.

Ainsi le ciel façonne la terre. Réveille et ravive la lueur divine enfouie en ses profondeurs pour embraser l'étincelle d'Amour et d'Intelligence qui sommeille secrètement en son cœur. Afin de lui insuffler un surcroît de conscience.

Le ciel poursuivra ainsi sa tâche jusqu'à ce que le royaume céleste s'étende totalement – et de façon parfaite – sur la terre. Et l'ensemble de ses créatures.

 

 

Qu'y a-t-il donc dans le cœur d'un homme qui ne peut éclore ?

 

 

Ne te contente jamais de vivre à la surface des choses. A la surface de ton être. A la surface du monde. Vis en profondeur. Là se trouve le secret. Et la vérité. En ces profondeurs, la vie, le monde, l'infini, l'Amour et l'éternité se ressentent intensément. La vraie vie n'est pas ailleurs...

Ne crois pas à ces paroles avec légèreté. Eprouve-les. Vérifie leur authenticité. Même si la vie, le monde et Dieu conservent aujourd'hui leurs mystères, laisse-toi guider par tes aspirations et mener par les événements pour les comprendre – et les ressentir – profondément. Alors tu découvriras et goûteras ces vérités.

Une fois que Dieu t'aura montré son visage, des larmes couleront sur tes joues. Puis l'Amour, la paix et la joie jamais ne te quitteront. Quels que soient les chemins et les circonstances, tu arboreras un sourire inaltérable – un tendre et immense sourire – comme le parfait reflet de ton cœur sur tes lèvres. Je t'en prie, aie confiance en ce que tu portes et en ce que la vie t'offre. Au fil du cheminement, tu comprendras ce que tu n'as jamais cessé d'être – que tu ignores encore à cette heure et que tu es pourtant déjà...

 

 

Le miracle du ciel et du vent dont la patience érode les pierres. Lisse les aspérités de la terre pour qu'elles deviennent leurs exacts reflets. Leurs miroirs singuliers et sans ombre. Ainsi à travers elles, pourra parfaitement féconder le vent. Et rayonner le ciel.

 

 

Quelques lignes par jour. Voilà qui est suffisant... Habiter le ciel dans la simplicité des heures contente mon âme. L'écriture vient en surcroît. Comme une modeste offrande à la terre. Et un geste maladroit – une pauvre main tendue – vers les hommes.

 

 

Les poètes sans carnet, sans livre ni poèmes sont les plus prolixes. Et sans doute les plus sages et les plus heureux. Ils ne sont pas tributaires de leur main trop lente. Et trop terrestre. A chaque instant, le silence couche dans leurs yeux un poème. Mille – dix mille poèmes par jour qui apparaissent et s'effacent aussitôt. Et qui jamais ne tomberont dans des oreilles impies ou indifférentes...

 

 

En dépit de mon âme solitaire – foncièrement solitaire et sauvage – qui n'est sans doute qu'un trait idiosyncrasique, il me semble que ceux qui fréquentent – et aiment à fréquenter – le monde (humain) ne connaissent pas (pas encore ou avec insuffisamment de profondeur) les joies de la solitude et du silence. Rien pourtant n'est plus délicieux, épanouissant, exaltant et revigorant qu'une longue promenade solitaire au sein de la nature. Seul au cœur d'un espace désert, sauvage et isolé...

 

 

En définitive, peu de choses sont nécessaires au bonheur d'un homme. Un ancrage à la terre – un environnement et un mode de vie adaptés et respectueux de ses caractéristiques pour que son cœur se sente en harmonie – et un regard qui fréquente l'infini du ciel.

Ces deux éléments (que beaucoup – sinon tous – sont bien en peine de dénicher au cours de leur courte existence terrestre) suffisent pourtant à poser sur le monde et les vents qui tournoient – l'inévitable et indéfectible cours des choses – des yeux sages et aimants. Tantôt tendres et bienveillants tantôt rieurs et distants...

 

 

La présence. Le ciel et la terre. La vie. Les êtres et le monde. Les uns et les autres peuvent bien s'affairer ou gesticuler... changer et évoluer, détruire et exterminer, bâtir et inventer, il n'y a – et il n'y aura – en définitive, jamais rien de bien nouveau sous le soleil...

 

 

Le vent pousse d'abord les livres à s'ouvrir. Puis il entraîne les cœurs sur le même chemin. Lorsque les livres sont tombés – ou oubliés – et que tout est ouvert, Dieu peut y pénétrer. Alors plus rien n'est nécessaire...

 

 

Ah ! Le silence ! Le silence ! A l'écoute des mouvements et des changements. De tous les bruits du monde. De la vie et des créatures qui vont et qui viennent. Qui naissent et qui meurent, qui jouent, qui s'agitent et se promènent, qui vaquent à leurs affaires, qui créent, bâtissent et prospèrent, qui crient, agressent et se défendent, qui perdent, implorent et se plaignent, qui pleurent et qui rient, qui détruisent et disparaissent. Et qui recommencent. Dans tous les sens. Inlassablement... Ah ! Le silence ! Le silence !

 

 

Il nous est très difficile de vivre dans la proximité des hommes. D'être confronté de façon incessante à la pauvreté et à l'étroitesse du genre humain. A l'indigence et à l'exiguïté de sa perception, de ses représentations, de ses paroles et de ses comportements*. Mais surtout d'être contraint d'endurer, malgré nous, la bêtise et la médiocrité des lois, des règles et des règlements* qu'il impose – de façon inique, indue et tyrannique – à l'ensemble de la communauté terrestre... La fréquentation de l'humanité confine trop souvent à l'incarcération et à l'étouffement...

* Les hommes sont si aveugles et ignorants qu'ils n'ont conscience qu'ils emprisonnent la liberté, l'Amour et l'intelligence. Qu'ils les rétrécissent – et les réduisent à néant – pour les enfermer entre les 4 murs de leurs maisons, de leurs usines et de leurs bureaux. Entre les 4 rues de leurs villes et de leurs villages. Entre les clôtures et les grillages de leurs jardins. Entre les grilles de leurs parcs, de leurs forêts et de leurs bois. Entre les barbelés de leurs prés et de leurs champs. Ah ! Quelle misère ! Et quel manque d'ouverture ! Pauvres humains ! Comment pourrait-on décemment aspirer à les fréquenter ?!! Il est bien naturel que ceux qui vivent depuis l'espace impersonnel d'Amour, d'intelligence et de liberté se détournent de leur folie et/ou tentent de les faire sortir de leur marécage nauséabond en accompagnant leurs pas maladroits sur les chemins de la sagesse...

 

 

La beauté d'un texte – ou d'une phrase – laisse parfois s'échapper l'essentiel. Quant à sa puissance poétique, elle dépend – de façon substantielle – du degré de nudité et d'ouverture du scribe – et de l'humilité de sa main docile – qui note (avec fidélité) la parole que lui dicte le ciel...

 

 

Je deviendrais ce que je n'ai jamais su. Ce que j'ignore – et ai toujours ignoré. Ce qui toujours m'échappait. Et s'effaçait sous le poids de ma volonté trop vive...

 

 

Tu dissèques le monde. Et empiles les savoirs – une ribambelle de signes sans vie. Et sans substance. Qu'en feras-tu ? Crois-tu vraiment que la connaissance s'acquière ainsi ? Es-tu si naïf ? Au mieux tu deviendras un aveugle savant. Au pire un apprenti-sorcier maladroit ou un instrumentalisateur orgueilleux. Ainsi jamais tu ne connaîtras le goût de la vérité. Et de la sagesse. Pour les vivre – et les incarner –, elles doivent passer par le cœur et l'esprit vides et humbles – dépouillés de toute idée et de toute pensée, désencombrés de tout savoir, de toute volonté et de toute prétention. Il n'y a d'autre voie...

 

 

A l'instant où la misère te frappe, embrasse-la...

 

 

Que tu suives ta tête, ton cœur ou le ciel, tu trouveras Dieu derrière tes pas. Sur ton chemin. Et au bout de la route. Alors qu'attends-tu ? Va...

 

 

A l'angle de la rue se repose un chat.

Les hommes vaquent à leurs affaires.

Nous, nous ne faisons que passer.

 

Partout, nous ne ferons que passer

Tant que durera le regard

 

 

En un bond insolite, nous voilà (déjà) dans le ciel

Alors que nos pas traînent encore sur les chemins de poussière

 

Où as-tu mis ton cœur que la terre a recouvert ?

Un nuage l'a emporté au loin

Je le vois sourire de la moue qui me tord les lèvres.

 

 

Trop de pierres – et de cœurs – se reposent sur le chemin.

Jamais le ciel n'aura la force de les hisser jusqu'à lui.

Voilà pourquoi il fit naître le vent et la pluie – les chemins –

La marche et la souffrance

Pour qu'ils érodent l'excédent qui les maintient dans l'immobilité. Et la pesanteur.

 

 

Quel espace y a-t-il sur terre pour le ciel ? Je crains que toutes les places soient prises. Encombrées. Et surchargées. Contraignant Dieu à demeurer dans les nuées. Et les hautes sphères. En compagnie des anges peut-être...

 

 

Des cascades d'anges – des diablotins – s'amusent sur les toits. Ils y font mille cabrioles. Et autant de galipettes. Suis-je donc le seul à les voir ? Ah non ! Dieu aussi les regarde en ricanant.

 

 

Rares sont les hommes qui savent se donner tout entiers. L'essentiel des êtres humains ne s'offre qu'a minima, ne livrant que d'infimes bouts d'eux-mêmes – quantités infinitésimales – lorsqu'ils y sont contraints ou lorsque cela leur agrée – et que cela ne leur coûte que peu de choses en temps, en argent, en énergie, en effort, en écoute, en présence, en don d'eux-mêmes... Ils n'y cèdent – bien souvent – que pour donner le change. Exposer aux autres leur bienséance, leur normalité ou l'image fallacieuse de la générosité.

Et nous, nous n'aimons que ceux qui se dépècent jusqu'à l'os, donnant jusqu'à la dernière parcelle d'eux-mêmes. Outrepassant même leurs limites. Jusqu'à l'épuisement. Jusqu'à l'effondrement et la mort. Pour rien ou par esprit sacrificiel. Loin – très loin – de la perspective étroite, tiède, égotique et calculatrice des hommes qui n'aspirent – pour la plupart – qu'à s'économiser, à s'épargner et à protéger leur individualité et leur tranquillité, leurs acquis et leurs pauvres richesses. A durer le plus longtemps possible. Aaccroître le terme de leur frileuse et misérable existence.

 

 

En ces lieux d'absence, je ne me reconnais pas. J'aimerais marcher ailleurs. En des terres plus familières où les hommes seraient si proches de Dieu qu'on ne les reconnaîtrait pas.

 

 

Ne t'aventure jusqu'aux heures assassines. Elles te feraient chavirer. Ou te cloueraient sur place. Pour l'éternité.

 

 

Marche, homme ! Va où la foulée te mène. Que les décors changent, n'en doute pas ! Visages et paysages alterneront. Lorsque tu verras Dieu sur le chemin – en chaque foulée, en chaque visage, en chaque paysage, cessera ton périple. Mais tes pas continueront d'éprouver la route.

 

 

En l'honneur du rien, défais-toi de tout. En l'honneur de tout, ne sois rien. En l'honneur de rien, sois tout. En l'honneur de la terre, habite le ciel. En l'honneur du ciel, honore la terre. En l'honneur des êtres, fréquente le Divin. En l'honneur du Divin, sois présent aux êtres.

Jamais ne te restreins. Autorise-toi à être ce que tu es. Et ce que tu es à être...

 

 

Aux prémices du printemps dardent les bourgeons secrètement façonnés par l'hiver. Le monde semble renaître aux yeux naïfs. Mais l'apparent effacement n'est qu'une préparation à la manifestation – une préparation invisible au regard – trop grossier – des hommes. Une simple phase de l'éternel retour. Et de l'éternelle évolution. Ainsi en est-il de l'hiver et du printemps. Comme de la mort et de la vie.

 

 

De la terre s'envolent les oiseaux. Tous les oiseaux qui parcourent le ciel. Et du ciel s'envolent les anges. Tous les anges qui parcourent la terre. Et lorsqu'ils se rencontrent, de petites étoiles scintillent au dessus de l'horizon. Et dans les yeux des hommes brillent de petites flammèches de joie.

 

 

[Hommage à René Char]

Entailles de joie dans la souffrance. Voilà ce à quoi l'homme aspire. Et ce qu'il touche ordinairement. Qui sait que les blessures peuvent guérir ? Et les cicatrices s'effacer ? Une incessante pluie de joie sur une éternelle terre d'Amour. Voilà ce que Dieu peut offrir. Aux plus brûlants. Aux plus obstinés.

 

 

Se nourrir de poésie sans trait. Et d'un ciel sans nuage. Voilà ce que peut offrir le monde. Le reste n'est que dérisoires bagatelles. Et misérables contingences.

 

 

Volupté de chair. Etvolupté des profondeurs. La première donne faim. Et rend le cœur avide. La seconde nourrit le corps. Et apaise l'âme.

 

 

Les jours s'effacent. Et toujours tu t'ensommeilles. Tu crois regarder le monde. Et le comprendre. Mais le ciel n'a encore dessillé tes yeux. Comment pourrais-tu voir ?

Ne blâme pas ton regard. C'est ton cœur qui n'a pu s'ouvrir. Il ne peut y consentir que lorsqu'il s'est dénudé. Et défait de son surpoids. De ses charges qu'il a cru bon amasser pour se remplir. Et se protéger. S'éloignant ainsi de ce qui lui a toujours manqué – et qu'il n'a jamais cessé de chercher à travers toutes choses : la paix et la joie inconditionnées.

 

 

Présence. Nudité du regard. Disponibilité du cœur. Ouverture de l'esprit. Et liberté de l'âme. Il n'y a rien d'autre (à vivre) en ce monde. Tout le reste – toutes nos expériences et nos recherches – ne sont que des préalables.

 

 

L’archipel du temps où tu t'abrites. Et qui n'est qu'un sombre abîme. As-tu oublié le fugace des heures ? L’évanescence des jours ? La brièveté des années et des existences ? Et l'instant éternel ? Seule façon de vivre. Et seule manière d'être. Pleinement. Hors de toute temporalité*.

Plongés dans le gris – et le saumâtre – des jours, des semaines et des années. Soucieux et préoccupés, vaquant aux affaires du monde que nous avons fait nôtres. Et les instants et les heures clairs et ensoleillés, totalement vides et dépréoccupés. Entièrement ouverts et disponibles à ce qui est là – et surgit. Pleinement présents. Pourquoi donc ton cœur doute-t-il encore ? Et penche-t-il vers les sombres aiguilles de l'horloge ?

* La construction mentale du temps.

 

 

A l'instant où tu t'effaces, tu es. Et existes à ta pleine mesure. Pleinement. Jamais autant que ne pourra t'offrir la fugace satisfaction de tes pitoyables et tyranniques exigences...

 

 

L'espace hétéroclite que tu arpentes. En quête d’harmonie. Et d'unité.

Là où tu te reposes, le monde s'étire. Là où tu te rétractes, il se rétrécit.

 

 

Tu cours à grandes enjambées vers la sagesse. Prends garde à la folle foulée qui t'écartera de toutes les sentes. Confinant tes pas à l'étroite cour de la pensée ceinturée par les hauts murs de la déraison.

 

 

Le monde. Un lieu de nuages et de rêves que les hommes bétonnent. Et entre le béton qui se fissure poussent les fleurs. Renaissent les songes et la rosée. Le monde. Un lieu de nuages et de rêves. Et le béton bientôt disparaîtra sous les ronces. Et les songes et la rosée s'effaceront sous le soleil. Pour que la lumière apparaisse. Et puisse enfin éclairer le monde.

 

 

De l'incertain jaillissent les chimères(1). Et de ce qui est – la vérité de l'instant –, la justesse(2).

(1) Prévisions, projets et projections.

(2) Pourvu que le regard soit nu...

 

 

Le bagne lucratif où se jettent les hommes. Le vil labeur du monde (contemporain) n'a rien à envier aux geôles des esclaves. A leur travail de forçats. Et à leur misérable vie de fers et de chaînes...

 

 

Un phare céleste sur la terre. Pour quelques rares yeux curieux et avides de vérité. Les autres ne regardent que leurs pas. Comment pourraient-ils l'apercevoir ?

 

 

A mes oreilles sages s'agenouille la vérité. Pour me confier ses secrets. Heureuse d'ouvrir des yeux si humbles. Et de ce silence, mes lèvres restent muettes.

 

 

Pourquoi le goût de tes lèvres n'apaise pas ma faim de toi ? Ces mots, tant de poètes désemparés les ont écrits. Les offrant à tous les visages fallacieux rencontrés. Ignorant – ou pressentant peut-être... – que derrière chaque visage se cachait la face de Dieu. Sa bouche. Son sourire radieux. Et son cœur tendre et aimant. Prêt à accueillir l'amour – toutes les marques d'affection, de tendresse et de passion – que les hommes, à travers tous ces [ses] visages – et à leur insu – pouvaient lui offrir...

 

 

Dans l'espace rétréci du monde se reflète le silence. Et l'infini. Toutes les merveilles des hauteurs et des profondeurs. Mais les yeux des hommes, rivés sur leur marche – et leur allure – sont trop occupés pour les accueillir. Trop superficiels, trop chargés et trop étroitspour les goûter.

 

 

En ces cieux bas et en ces terres profondes, j'habite. Cathédrales de l'infime érigées en l'honneur de l'infini. Stèles du ciel parsemant la terre, je vous aime. Pousse vos portes ouvertes aux quatre vents. Me repose sur vos faîtes pour contempler votre visage. Et honorer vos promesses. Et vos merveilles. Me mêle à vos sabirs pour dialoguer avec la main de Dieu. Me convertis à toutes les fois pour libérer la glaise qui colle à mes pas. Marche enfin partout où vous poussez, sur vos passerelles, en vos interstices comme en vos déserts. Partout où vous apparaissez. Partout où vous vous effacez. Pour mieux accueillir le silence. Et le visage de Dieu. Et ses lèvres hilares qui appellent les hommes du fond de leurs secrets recouverts de leurs songes et de leurs désirs. Et qui s'entassent en poussière dans leurs yeux borgnes et maladifs. En ces cieux bas et en ces terres profondes, j'habite. Cathédrales de l'infime érigées en l'honneur de l'infini. Stèles du ciel parsemant la terre, je vous aime.

 

 

Ah ! Si vous pouviez imaginer, hommes, qu'ici le temps n'a plus cours. Et qu'avec lui, les espoirs et les désirs se sont effondrés. Et que nous dansons, joyeux, sur leurs cendres. Au rythme des vents qui balayent la plaine. Sous la pluie qu'abritent les montagnes. Et que notre ronde honore l'éternité qui s'est abattue sur nous. Et qu'aux suprêmes instants, la joie se déverse sur notre visage. Et de nos lèvres jaillit une paix insondable. Ah ! Si vous pouviez imaginer, hommes, qu'ici l'Amour a tout recouvert. A déposé ses baisers sur nos pieds crasseux et l'ordinaire des jours. Et toute la fange miséreuse de la terre resplendit à présent sous la lumière. Ah ! Si vous pouviez imaginer, hommes, notre rire à cet instant, vos pleurs cesseraient sur le champ. Comme votre désespoir et vos plaintes. Et vous jetteriez votre espérance par dessus vos murs. Au bas des falaises. Pour enfin voir la terre, le ciel et la mer avec les yeux émerveillés de l'innocence.

 

 

Et de nos yeux rougis par la joie, le soleil s'embrase. Et sur nos yeux ouverts se déverse la pluie. Et au dedans, le cœur cogne aux parois du vent. Et le voilà, tout léger, qui s'envole. Retrouver l'innocence du printemps.

 

 

De la clameur du monde et des foules – et des rumeurs qui grondent en leurs veines –, tu n'entends rien. Et aux arbres qui dansent et au vent qui rugit dans les montagnes, tu offres ton cœur que le ciel, un jour, a ramassé patiemment, recollant un à un les morceaux que le monde avait éparpillés, au cours de ton long assassinat, sur le sol hostile et rugueux de la plaine. Et qui a pris aujourd'hui la forme d'une main habile et secourable – une main gigantesque (presque indécente) – aux oreilles immenses et aiguisées qui sondent la misère du monde – et des foules – à la recherche de doigts tendus, d'yeux tristes et implorants et de cœurs déchirés qui appellent le ciel en silence. Que le monde, la foule et les rumeurs ignorent. Et que les pas aveugles des hommes et leurs souliers barbares effacent...

A présent nous ne sommes plus qu'une oreille informe – et presque infinie – munie d'un bras aimant et guérisseur. Qu'un œil immense et clair qui contemple le monde, ce cyclope borgne, ce monstre hideux bâti par de minuscules créatures aveugles et misérables dont la beauté, la bonté et la sagesse ne pourront éclore que sous le feu de ce visage titanesque. Sans lui, le monde demeurera à jamais un univers de rêves, obscurci par nos songes incandescents. Et lui seul, muni de son oreille et de son bras sauveur, pourra l'éclairer. Le faire naître au grand jour. Pour que le réel enfin le devienne pleinement.

 

 

Bouillonnants – débordants de vie et d'énergie –, pleutres, frileux, ignares et prétentieux. Et déjà agonisants. Ainsi vivent les hommes. Et à leurs funérailles les cloches sonneront. Comme elles sonnèrent au jour de leurs noces. Et pleuvront les louanges. Et s'entasseront les espoirs. Avant la disgrâce. Pour annoncer l'espérance de la vie prochaine. Et qui vient déjà. Si bouillonnante, si débordante de vie et d'énergie, si pleutre, si frileuse, si ignorante et prétentieuse. Et déjà agonisante. Ainsi est la vie – et la mort – des hommes. Et l'une et l'autre se renouvelleront indéfiniment. Et nous verrons à chaque occasion s’édifier de dérisoires monuments et de misérables célébrations de circonstances. Avec son lot habituel d'espoirs médiocres et inutiles...

 

 

Dans l'enceinte du cœur rue l'éternelle sauvagerie que l'Amour seul peut apprivoiser.

 

 

De disgrâce en disgrâce, tu mûris. A chaque malheur, tu as beau pleurer, ton cœur s'éveille – peu à peu – à la souffrance. Se défait de ses charges. Et de ses encombrements. Aiguise sa sensibilité. Jusqu'au jour où la joie recouvrira toutes les défaites. Et sur la déchéance – et le déshonneur –, la paix bâtira une chapelle où pourra se réfugier le monde. Tous les vaincus de cette terre. Et sur la disgrâce naîtra l'Amour. Pour réconforter les âmes défaites que la disgrâce anéantira encore. Ainsi naît – et se propage – l'Amour, la lumière bienveillante.

 

 

De chimère en chimère, la vérité naît au monde. Et voit le jour en l'esprit obscurci. Elle se révèle comme une sculpture déjà taillée dans une pièce de bois brut. Et elle apparaît – majestueuse et éternelle – tel un diamant émergeant de la gangue qui le retenait caché et prisonnier. Lorsqu'elle émerge, nous jetons au ciel les scories qui la voilaient. La sueur et les peines de notre labeur et de notre fouille. Puis lorsqu'elle s'inscrit en nos profondeurs, nous célébrons la vérité – et toutes ces chimères – d'une égale façon.

 

 

Dans l'effacement de ton individualité, l'Absolu(1) se manifestera à travers tes singularités(2). En leur offrant leur plus parfaite justesse(3).

(1) Le Divin

(2) Ta forme singulière, tes caractéristiques et particularités.

(3) Et en usera de la plus parfaite façon selon les circonstances et les situations.

 

 

[Hommage à Paul Verlaine et à Jules Laforgue]

Ô Silence, un surplus de candeur tu m'as octroyé. Pour que je regarde sans frémir le monde tournoyer. Ah ! Que la vie est quotidienne ! Et dans mon repli que tu avais fait saturnien, le rien a revêtu sa plus pure essence – et ses plus dignes parures – pour me faire apprécier, de mon cachot infini, la ronde sans sourciller.

 

 

La vie, le monde, l'Amour, la joie, la paix et la vérité se goûtent – ne peuvent se goûter (profondément) que – de l'intérieur. A moins que le rayonnement de l'Être soit si fort et irradie vers l’extérieur avec une grande puissance et sans la moindre trace égotique, tout signe trop ostentatoire – trop ostensiblement perceptible – n'est l’œuvre – ne peut être l’œuvre – que d'imposteurs. Fuyez donc ces fieffés menteurs vautrés dans le paraître et la mystification qui usurpent les habits et les délices des humbles et authentiques goûteurs !

 

 

Lorsqu'un poète vous accompagne – que vous le lisez chez vous ou en promenade –, il vous insuffle provisoirement sa sensibilité. Et son regard. Et si vous êtes vous-même sensible – et un peu poète –, c'est à travers eux que vous toucherez le monde pour quelques instants...

 

 

Une forme quintessenciée*. Toute forme ne devrait-elle pas l'être ? Voilà une bien naïve – et bien fallacieuse – question ! En effet, à y regarder de plus près, toute forme, bien sûr, ne peut éviter de l'être...

* Non au sens usuel mais au sens premier et extrapolé du terme – non usité – (essentiel)...

 

 

Les hommes vivent au ras du sol. Et à la surface d’eux-mêmes, des choses, du monde et de la vie. Peu savent que la vraie vie se cache, se révèle – et se déniche – à la fois dans les hauteurs(1). Et dans les profondeurs(2). Voilà sans doute pourquoi tous s'agitent et gesticulent ainsi sur la terre en explorant tous les recoins du monde – et de la vie – avec l'espoir immature de découvrir le saint Graal...

(1) Au sein du regard d'arrière-plan impersonnel que tout être perceptif peut ha-biter...

(2) A travers la sensibilité, la sensorialité et le sentiment d'unité entre le regard impersonnel d'arrière-plan et l'ensemble des phénomènes et des mouvements qui s'y manifestent...

 

 

Le ciel n'a pas la même envergure en ville, à la campagne et dans la nature sauvage. Plus l'espace est large, ouvert et dépouillé, moins les paysages obstruent son immensité, moins la main de l'homme se fait pesante, plus sa dimension infinie est accessible au regard...

 

 

Il y a un ciel que ne peuvent voir les yeux. Mais le cœur peut s'en approcher. Et l'habiter. Pour le découvrir, il suffit de fréquenter l'infime du monde. Et de partir du plus bas de la terre. Et de ce rien – et presque riens – le ciel pourra jaillir en votre cœur. Il n'y a d'autres chemins...

 

 

Le monde*. Terre de fleurs, d'épées et de dentelles où les chemins tantôt égayent tantôt égarent. Terre de malheurs et de joie pour quelques rares pèlerins de Compostelle. Terre de beuveries et d’infamie. Terre de guerres et d'idolâtrie. Le ciel sous ta coupe est encore noir. Et la brume dans les regards jamais ne fera de toi le paradis que réclament tes créatures. Ô Sol impie, qu'attends-tu de nous ? Que l'Amour naisse en votre cœur. Que poussent vos bras sauveurs. Et que vous chantiez nos louanges en votre esprit ouvert. Pour que le ciel et l'intelligence rayonnent sur notre terre.

* Le monde humain.

 

 

A pas lents dans l'ornière s'entassent les morts. Et les vivants ? Ils piétinent derrière les grilles du cimetière. Seul le sage se tient à l’écart, assis sur les hauts murs de la terre, rigolant du spectacle – du triste spectacle – des hommes. Guidant jusqu'au promontoire – et sans trop y croire – les quelques mains tendues et assoiffées de vérité. Et des autres, que peut-il faire ? Il les ignore* – il ne peut que les ignorer – comme ils ignorent* le ciel, les sages et la sagesse. Il se moque parfois d'eux tantôt avec tendresse tantôt avec rudesse. Et il lui arrive de leur lancer un sourire pour les inviter à lever les yeux. A quitter leur misérable foule – et leurs barges bondées – où ils patientent en trépignant devant les portes du cimetière.

* mais d'une autre façon...

 

 

Un jour, deux chérubins malicieux me demandent de leur expliquer l'existence humaine. L'existence des hommes ? Quelle drôle de question ! leur dis-je, c'est bien simple... A chaque jour, le même refrain. A chaque semaine, la même rengaine. A chaque année, les mêmes couplets. A chaque vie, la même chanson. Ah ! Que diable ! Quel pauvre répertoire ! s'exclament les deux amis en chœur, qu'on leur offre donc d'autres partitions ! Et soudain je vois Dieu en surplomb qui les toise avec dédain en continuant à jouer du clairon...

Quelques jours plus tard, mes deux chérubins – si soucieux de comprendre les hommes – s'avancent vers moi pour me poser une nouvelle question. Cette fois-ci, ils veulent savoir si l'on peut apprécier(1) le degré de conscience d'un homme. Son degré de conscience ? ai-je répété, un peu surpris. Vous voulez sans doute parler de son degré de compréhension et de maturité ? Les deux amis acquiescent. C'est simple ! Très simple ! dis-je (avec assurance), il suffit de les observer quelques instants ! Mais les deux diablotins font la grimace et m'invitent d'un hochement de tête à approfondir mon argumentation... Le mieux, ai-je repris, serait d'aller les voir et de leur poser cette simple question : que puis-je vous offrir ? Des bières, des femmes(2), de l'argent, un enseignement de sagesse ? Les deux chérubins se regardent et éclatent de rire. Et aujourd'hui, quelle serait leur réponse ? me demandent les deux acolytes. Aujourd'hui ? ai-je encore répété (un peu bêtement). Aujourd'hui, la plupart des hommes sont si avides de plaisirs et de satisfactions (narcissiques) qu'il est probable qu'ils optent pour l'une des trois premières propositions, signe évident de leur grande immaturité(3). Quelques-uns (de très rares esprits, avides de vérité) choisiraient la dernière option, gage d'une recherche(4) encore immature. Et quelques-uns – quelques rares spécimens du genre humain – déclineraient votre offre en souriant, preuve tangible d'une certaine maturité. Et voilà mes deux anges, satisfaits de mes réponses, qui s'envolent vers le ciel. Pour – peut-être – aller rapporter mes propos à Dieu (leur saint patron céleste). Pauvres anges ! ai-je dit en les regardant s'éloigner, comment peuvent-ils douter un instant que Dieu ne soit pas au courant ? Et lors-qu'ils disparurent, je me dis qu'avec les hommes et les anges, Dieu avait encore du pain – encore pas mal de pain – sur la planche...

(1) Avec plus ou moins d'exactitude...

(2) Désolé pour ces propos qui pourront paraître phallocratiques mais cette question s'adresse principalement aux hommes (aux mâles) et bon nombre d'entre eux – aujourd'hui comme hier – fait montre de peu de considération pour la gente féminine... En outre, si vous tenez à féminiser cette question, il serait loisible de remplacer les mots « bière » par « cocktail » et « femmes » par « amour » ou « prince charmant »... Non ! Je vous en prie ! Ne riez pas ! Et n'allez pas croire que mes propos soient désobligeants, réducteurs ou exagérés... Posez la question autour de vous, et vous verrez...

(3) Leur grande immaturité spirituelle sauf, bien sûr, s'ils ont vraiment soif... et qu'ils réclament une bière pour se désaltérer...

(4) Une recherche spirituelle encore immature...

 

 

Dans le ciel, les yeux de Dieu scrutent la terre – toute la surface de la terre. Il cherche ceux qu'il pourrait aider de sa faux, de son épée ou de sa main secourable. Et, croyez-le, le travail ne manque pas... Et pour l'aider, toute une armée de créatures qu'il a équipées d'une paire d'yeux, de faux, d'épées et de mains secourables...

 

8 décembre 2017

Carnet n°72 Fulminations et anecdotes naturelles

Journal / 2016 / L'exploration de l'être

A la grandeur et à l'immensité du ciel, nous n'avons que notre cœur à offrir. Et nos yeux grands ouverts. Et de cette offrande – la seule, en vérité, que nous puissions lui adresser –, le ciel sera ravi et satisfait. Il vous laissera vous approcher. Et l'habiter. Puis il descendra jusqu'en vos profondeurs. Emplira vos yeux et votre cœur, leur offrira mille baisers de gratitude et un puits d'amour intarissable avant d'y déposer son regard pour que vous puissiez de ses propres yeux embrasser le monde, la terre et le ciel. Ensuite les frontières s'effaceront. Tout sera emmêlé. Dieu, vous et le monde ne formeront plus qu'un seul corps. Et un seul cœur. Alors l'Amour, la joie et la paix pourront se donner sans compter aux uns et aux autres selon les réclamations et les exigences de la terre et du ciel.

 

 

A la barbe du monde se pressent les torrents. Déferlent les vents. S'entassent les immondices des hommes. Prolifèrent les massacres. Et s'égosillent les magistrats – tous les magistrats – de la terre.

Les oiseaux ont fui loin et haut dans le ciel. Et les animaux au plus profond des forêts. Mais le désastre a déjà recouvert les âmes. Elles gisent, moribondes et apeurées, à l'abri de la fureur et des cataclysmes, dans la barbe de Dieu. Et le courroux divin pour les hommes sera sanglant.

Le sang n'effacera pas l'abomination. Mais des cendres renaîtra peut-être un monde nouveau.

Le sang coulera. Et de ce sang qui nourrira le monde, quelle part reviendra au ciel ? Pour que la terre soit plus douce. Et que sa lumière éclaire ses créatures – toutes ses créatures.

 

 

De toute charogne, un ange s'envole. Et le ciel, lui, est déjà ravi. Mais que peut une âme esseulée si elle n'avait à ses côtés les forces du ciel ? Et qui sait si la mort – et ses puits de ténèbres – pourraient la sauver ? A-t-on déjà vu ressusciter un squelette ? Non. Mais l'âme est éternelle. Dieu me l'a dit un jour de désespoir. Et je crois à ses murmures. Et aux secrets qu'il me confie.

Au dessous des hommes fleurit l'abîme. Derrière leur dos, les années déchirées et les passions d'autrefois. Devant, un brouillard infranchissable et la béance qui les effraye – qu'ils craignent par dessus tout. Sur les côtés, rien... la paroi aiguisée du monde et le dos voûté de leur frères. En eux, le cœur noir, troué de trop de peines. Et au dessus de leur tête, le ciel gris et sans pitié pour leurs offrandes et leur mendicité. Ainsi vivent les hommes. Je les ai vus s'agenouiller et implorer Dieu de venir à leur secours. Et le silence a été son unique réponse.

Des âmes brisées, Dieu recolle les morceaux. Le vent les remet sur pied. Et la patience se charge du reste...

 

 

Ah ! Si la terre pouvait s'ouvrir et ensevelir les hommes, leur âme danserait, ravie, dans le vent. Avec le ciel complice.

Au dessus du vent, il y a le ciel. Et sous nos pas, la terre. Mais entre les deux, pourquoi ce bouillonnement et cette fureur ? Et cette incompréhension criante du dessus et du dessous, du dedans et du dehors... ?

 

 

L'amour des âmes pour les corps est aussi invisible que celui des corps pour les âmes. Mais sa puissance est plus vive. Et plus décisive sur les destins.

 

 

Par ces routes si barbares, les hommes marchent et s'égayent. Sous le regard de Dieu qui pleure en silence. Mais la terre – et ses créatures – cheminent ainsi.

 

 

Les yeux voient l'apparence du monde. Le regard, lui, le transperce, y plonge au cœur et lui offre sa lumière.

 

 

Sous un buisson, quelques fleurs se sont réfugiées. A l'abri des regards. Pour échapper sans doute aux mains assassines et aux pas meurtriers.

Plus loin, un arbre nomade parcourt à grands pas la vaste étendue à la recherche de la pluie. Et les nuages, bienveillants, se sont approchés pour lui offrir un peu d'ombre.

 

 

La magie de la terre est de faire croire aux hommes à ses vérités. Et celle du ciel de leur faire croire en son inexistence. Et les yeux aveugles et ignorants regardent partout – en haut et en bas – à la recherche de quelques indices.

 

 

Que serait le peuple de la terre sans le ciel ? Une misère glacée ? Une torpeur chavirante ? Comme un bateau échoué sans océan...

Les hommes pieux scrutent le ciel. Ils ignorent que toutes les merveilles naissent de la terre. Quant aux hommes ordinaires – ils n'en grattent que la plèbe à la surface pour récolter quelques pépites enfoncées dans la boue. La plupart courent en tout sens. Et à perdre haleine, cherchant partout un refuge où ils pourraient abriter leurs jours.

Ils ne savent habiter la paix que leur yeux fébriles s'appliquent à dénicher. Et à leur requête, le ciel ne peut pourvoir. Aussi vagabondent-ils comme des mendiants affamés. D'autres cherchent un raccourci vers le ciel. Et pour leur peine, mille fois ils doivent faire le tour de la terre.

Ah ! La désopilante débâcle du monde ! De cette mascarade, le ciel s'amuse. Comment ne pourrait-il s'en moquer ? Il en rit jusqu'à s'étouffer. Et les hommes, par jour de grand vent, peuvent entendre son rire qui résonne sur les hauts plateaux de la terre. Lorsque l'aube est silencieuse, de grands éclats leur parviennent. Et les plus affûtés accompagnent son rire de leurs chants ou au son de leurs tambours. Et la fine pointe de ce cercle rit avec lui des merveilles de la terre. Et de son engeance crasseuse. De ces mains levées et impuissantes. Et de ces bras en croix implorant sa miséricorde.

 

 

Hormis le regard – et excepté le ciel et la terre –, rien en ce monde n'est plus puissant ni fidèle qu'un livre de poésie*. Il accompagne nos pas comme un chien docile et imprévisible, guide l'âme à chaque virage. Et la nourrit de sa science – et de ses notes célestes – à chaque traversée. Peut-on rêver sur cette terre où vivent les hommes de plus plaisante et généreuse compagnie ?

A-t-on déjà vu plus doux et merveilleux compagnon ? Toujours dévoué et prévenant. Qui sait apaiser et réchauffer les cœurs tourmentés ou frigorifiés par la cinglante solitude du monde et la médiocre compagnie des hommes. Il les entoure de ses bras chaleureux. Et cette tendre accolade les réconforte (elle les réconforte plus que toutes autres...). Et leur donne la force de poursuivre leur marche...

* Lorsqu'il nous arrive d'avoir le cœur triste, mes doigts tiennent celui qui nous accompagne en promenade, bien serré au fond de ma poche comme un ami précieux dont la perte – sans doute – nous rendrait inconsolable...

 

 

Il y a tant d'âme chavirées qui cherchent un port. Et presque toutes échouent sur un récif. Le cœur des hommes peut bien pencher vers l'espérance, il y a du désespoir au fond de leurs yeux.

 

 

Dans nos secrets délires, Dieu – peut-être – se tient debout, riant à gorge déployée et levant les bras au ciel pour guider notre justesse...

Dieu aime la folie des hommes. Celle qui surplombe la raison pour lui donner des ailes et lui faire fréquenter l'Amour. Cette folie-là n'a de main funeste. Elle frappe de sa bonté. Implacablement. Cette majestueuse et bienfaisante folie élève, libère et donne vie... alors que l'autre – la folie meurtrière – la folie chaotique – plus coutumière des hommes et sa sinistre et ténébreuse sœur jumelle – la raison qui se pare des faux habits de la sagesse –, elles, ordonnent, enferment et anéantissent...

 

 

Un surcroît de chaleur offert par le vent glacial qui vous ouvre ses bras et vous enlace. Comme un ami bienveillant, sa présence vous soutient et vous console. Et il ne réclame aucun remerciement, la gratitude dans vos yeux lui suffit.

 

 

Qu'il soit donné à voir à nos yeux aveugles ! Et le monde sera éclairé...

 

 

Parfois la tristesse devient si magistrale que vous vous enivrez de son parfum. Et une douce mélancolie vous envahit...

Dieu n'a pas fait l'âme triste. Mais le cœur est parfois si chaviré par les événements et le funeste du monde que la tristesse le dévore. Et l'âme, secourable et généreuse, prend sa part pour le soulager.

 

 

Chantent les oiseaux qu'accueille le ciel. Et pleurent les hommes que la terre console. Le ciel leur a été banni. Leurs murs ont recouvert leurs yeux.

 

 

J'ai une profonde sympathie – et une immense tendresse – pour cet air d'idiot du village que me donnent au cours de mes promenades, mon visage ravi par les paysages, mes cheveux hirsutes et ébouriffés par le vent, ma marche lente à travers les collines, ma contemplation du ciel, debout et immobile sur les chemins et mes longues pauses assis sur les rochers, le carnet à la main. Le ciel aussi – je le sais – est heureux de cette compagnie. Son regard croise toujours ses yeux avec joie. Et chaque jour, il attend sa venue pour entourer son cœur avec une infinie bonté et veiller sur sa main qui court sur le petit cahier...

 

 

L'écriture parfois nous console des jours. Elle nous tend la main pour abattre les murs borgnes qui entourent la vie. Et la joie. Et les nuages aussi nous ravissent lorsqu'ils effleurent les collines. Charmés par leur forme et leur allure. Parfois légers et rapides, d’autres fois énormes et immobiles, ils habitent et parcourent le ciel avec une grâce et une nonchalance – avec une bonhomie gracieuse – qu'aucune créature du monde ne saurait imiter...

 

 

Qui en ce monde a déjà vu la ronde des ans bousculer le calendrier ? A chaque nouvelle lune, les jours et les pages se tournent. Implacablement.

 

 

La possession et le contentement narcissique. Y a-t-il de poisons plus insidieux et trompeurs ? Combien d'âmes se sont-elles laissées duper par ces charmantes et machiavéliques sirènes ? A en croire l'histoire des hommes, toutes s'y sont laissées prendre... Pour y échapper, les hommes doivent d'abord – et bien souvent – s'y perdre jusqu'à la nausée et l’écœurement. Passés les haut-le-cœur et les vomissements, les âmes s'en dégagent avec aisance. Le ciel alors n'est plus très loin. A portée de regard. Et la main de Dieu veille. Et d'un geste, les délivre...

Chaque jour, la mort s'abat sur les uns et les autres. Balayant, ici et là, les plaines et les vallées, les hauts plateaux, les villes, les forêts et les ermitages de sa faux funeste, brisant les élans, les existences et les cœurs. Mais qui connaît les aspirations véritables de la mort ? Qui sait qu'elle œuvre sous le regard bienveillant du Divin ? Et que jamais elle ne frappe au hasard ?

 

 

Tant de drames se jouent sous nos pas. Tant de gestes et de paroles sont mortifères. Et les verdicts toujours sans appel. Tous, pourvoyeurs de souffrance et de mort*. Comme si la bouche, le pied et le bras de l'homme qui usurpent si souvent la main de Dieu – ou croient parfois agir en son nom ou en celui de je-ne-sais-quelle autre idéologie ou entité monstrueuse – décimaient à tout va sans rien comprendre à l'horreur qu'ils édictent, font surgir et façonnent. Refusant d'admettre l'abomination et l'ignominie dont ils sont les maîtres d’œuvre. Et laissant les yeux se détourner. Trop occupés à se barricader derrière leurs chimères et à protéger leurs illusions croupissantes, imbéciles et barbares. Abjectes.

* Meurtre, torture, destruction, extermination...

 

 

Au fond qu'est-ce qu'un livre de poésie sinon le cœur du ciel qui s'adresse à vous directement à travers l'âme et la parole d'un homme qui le fréquente avec révérence et humilité... Comment cette parole ne pourrait-elle pas toucher votre cœur ? Et faire vibrer en ses hauteurs et en ses profondeurs une divine résonance ?

 

 

Les créatures les plus proches de Dieu ne sont pas celles qui prient et suivent des préceptes poussiéreux et étrangers à leur âme. Ni celles qui volent dans le ciel. Ni celles qui brillent par leur intelligence ou leur ingéniosité. Ce sont les êtres les plus sensibles et les plus humbles. Ceux qui ont obéi aux lois naturelles de la terre, que la vie a fait ramper et qui s'agenouillent à présent dans la joie... Ceux-là ont l'âme suffisamment mûre pour rencontrer et regarder le visage de Dieu qui d'une main les élève et d'un souffle descend sur eux. Et qui dans leurs yeux fait couler des larmes de gratitude. L'Amour naît ainsi... Ensuite la terre et le ciel n'ont plus guère d'importance. L'Amour s'offre sans raison...

 

 

Qui est Dieu ? Qu'est-ce que le Divin ? Et comment le vivre depuis la terre ? Il est – et il convient pour nous de vivre – le non manifesté et l'invisible dans le manifesté et l'apparent, l'infini dans le limité, l'unité dans l'innombrable, la nudité et le dépouillement dans le foisonnement et l'abondance, la simplicité dans la complexité, le silence dans le bruit et le bavardage, la paix dans l'effervescence et l'agitation, l'amour dans la violence et le conflit, la lumière dans l'ignorance et l'obscurité. Et inversement, bien sûr...

 

 

Les heures rayonnantes sur les collines. Le front bas et incliné sur le chemin. Et le cœur infiniment sensible qui embrasse tendrement la terre et les mille créatures exposées à notre regard. Notre âme, bien sûr, est aux anges. Et Dieu – et toutes les choses du monde derrière lui – cherchent nos yeux et nos mains pour leur témoigner leur gratitude. Et les larmes coulent sur nos joues en silence. L'amour partout ruisselle et se déverse sans discontinuer. Inonde chaque parcelle de la terre. Oh ! Dieu ! Peut-on avoir le cœur plus aimant ?

A chaque foulée, les pieds caressent le sol, les yeux effleurent délicatement les pierres, les arbres et les herbes – et la multitude des paysages. Et la symphonie du monde résonne au dedans comme au dehors, bousculant les frontières où les peaux et les cœurs se mêlent aux chants silencieux – et à tous les hymnes – de la terre.

Et voilà soudain cette paix si généreuse et cette joie – cette grâce – gâchées et amputées par la présence – quasi sacrilège – d'individus juchés sur leur engin à moteur – un escadron entier de quads et de moto cross bruyant et vrombissant surgi de nulle part – pétaradant à vive allure sur les chemins. Avilissant et dégradant le silence et les paysages avec leur jouet d'adultes puérils, leur bêtise et leur aveuglement.

Ah ! S'ils pouvaient ressentir cette joie et cette paix, ils délaisseraient aussitôt leur machine de malheur – ce vil et stupide instrument de divertissement – et abandonneraient immédiatement leurs jeux idiots... Ils ne s'y livrent et ne se prêtent à leurs vulgaires et polluantes acrobaties qu'à seule fin de « passer du bon temps » et obtenir quelques plaisirs et sensations pour compenser – très vraisemblablement – une existence morne et insatisfaisante. Peu enthousiasmante. Si peu vibrante. Et si peu vivante.

Si le monde entier pouvait ressentir cette joie et cette paix (si simples et si naturelles), les guerres, l'irrespect, l'inconscience, les conflits, l'exploitation, le mensonge, la cruauté, l'ignominie et la barbarie, eux aussi, s'éteindraient dans la seconde. Et la vie pourrait enfin devenir pour tous – et pour chacun – éminemment douce et heureuse. Simple et naturelle. Riche et vibrante de simplicité.

 

 

L'homme moderne est la quintessence de la dénaturation crasse, puérile* et mortifère. Impuissant à faire mûrir le merveilleux potentiel (d'Amour et d'Intelligence) qu'il recèle en ses profondeurs. Enfoui encore sous des tonnes de pelures infâmes et nauséabondes qui le confinent à l'ignorance, à la bêtise et à l'abjection.

Vivement que s'achève la post-modernité ! Et que naisse un monde nouveau ; fraternel et respectueux, sensible, intelligent et solidaire. Mais je crains qu'il nous faille encore attendre quelques siècles avant de le voir advenir...

* Et parfois même régressive...

 

 

Lorsque le ciel, la terre – et toutes ses créatures – vous aiment – et que vous sentez le Divin présent en chacun d'eux – avez-vous vraiment besoin de l'affection et de la sollicitude puériles et égotiques de vos congénères ?

 

 

De gros nuages gris courent dans le ciel. Laissant quelques trouées bleutées où perce le soleil. Offrant une voûte opaque parsemée d’îlots de lumière.

 

 

Un vieil homme – sans doute un ancien saisonnier agricole originaire du Maghreb – a aménagé, avec soin et amour, un abri à l'écart de la ville pour les chats errants et pouilleux qui habitent les environs. Il a assemblé quelques pièces de bois et plusieurs morceaux d'étoffe pour leur construire un petit cabanon autour duquel il a tendu quelques toiles de jute pour les abriter du vent et des regards trop curieux. Et au centre du campement, il a posé quelques assiettes qu'il vient remplir chaque jour. Nous nous croisons parfois lorsqu'il quitte le village avec un paquet de croquettes attaché sur le porte-bagages de son vélo. Je le salue toujours avec déférence et respect en le « gratifiant » d'un très sincère et révérencieux « bonjour monsieur ». Malgré sa méconnaissance de notre langue, nous échangeons quelques mots de temps à autre. Et lorsque nous nous quittons, je ne manque jamais de demander au ciel d'avoir pour lui – et ses protégés – une attention particulière. Et de rendre grâce à sa bonté et à sa gentillesse. Et j'ose espérer que le ciel m'entende et offre à cet ami inconnu une vie douce et heureuse. Pour remercier et honorer cette sensibilité et cette tendresse désintéressée. Si rares en ce monde...

 

 

Accompagner le monde – et toutes ses créatures – de nos pensées tendres et émues n'est pas un exercice vain et inutile. N'en déplaisent aux esprits rationnels, étroits et sectaires, cet élan invisible – j'en suis persuadé – lorsqu'il est porté par la grâce et impulsé avec force, détermination et profondeur – apaise, soulage et entoure les êtres de façon bien plus tangible que l'on pourrait l'imaginer...

Dieu et le ciel ne connaissent les frontières. Ils réunissent l'Amour et les cœurs en une seule – et parfaite – unité...

 

 

L'infâme balisage des hommes qui borne l'horizon. Et le restreint. Et leurs flèches assassines pointées vers l'avenir. Où courent-ils ainsi ? Où croient-ils pouvoir fuir ? Ils n'échapperont pas à la barbarie de leur organisation. Ni au funeste de leur œuvre et de leurs édifications.

 

 

En cet après-midi dominical, la pluie a condamné les hommes à abandonner les chemins de campagne. Effrayés par les gros nuages qui avaient recouvert le ciel et les gouttes drues qui commençaient à tomber sur la plaine, ils ont regagné, la tête basse et le visage dépité, leurs quatre murs. Nous laissant le privilège (comme tous les autres jours de la semaine) d'arpenter les collines dans la solitude en compagnie de dame nature qui avait revêtu – pour l'occasion ou pour notre venue peut-être (allez savoir !) – les habits perlés et argentés de la pluie. Ravis de cet accoutrement et de cet espace déserté par les foules, voilà que, dans un geste spontané de remerciement, nous nous mettons à danser au rythme des gouttes qui accompagnent notre marche dans le froid et la joie de ce beau jour d'hiver pluvieux.

La terre gorgée d'eau – promesse d'abondance et de fertilité – exulte, elle aussi. Les arbres et les herbes s'inclinent avec gratitude vers le ciel. Ils dansent sans retenue dans le vent, offrant à la pluie leur étrange ballet et leur fébrile chorégraphie sous les yeux ravis et satisfaits de tous les dieux de la terre et du ciel.

 

 

Chaque jour, le ciel, la vie et la nature guident notre main sur la page. Dieu les a autorisés à se laisser traverser par sa parole. Nous, nous contentons d'ouvrir notre carnet et de laisser notre petit crayon danser sur la feuille.

 

 

Dans la forêt, on aperçoit les collines au loin et quelques éclaircies dans le ciel. Et on entend l'âme, toujours ravie de ces paysages, chanter avec le vent. Et soudain, nous nous redressons avec solennité pour écouter, radieux, cet hymne à la terre. Emus de la joie et de l'allégresse qu'il offre à tous ses habitants.

 

 

Les cailloux des chemins accueillent nos pas. La nature environnante, notre cœur et notre âme. Dieu et le ciel, notre regard. Peut-on connaître plus belle et plus douce compagnie ? Comment ne pas sentir cet amour – tout cet amour – qui nous est offert ? Et ne pas se sentir chez soi en ces lieux – en ces terres familières qui nous reçoivent ?

 

 

Au détour d'un chemin, nous apercevons la dépouille d'un sanglier, décapité, démembré et dépecé, lâchement et sauvagement abandonné par ses meurtriers. Et déjà grouillante de vers. Et ces assassins ignares et sanguinaires, à leur insu bien évidemment, lui ont réservé la plus belle des cérémonies. Et la plus digne des sépultures. Offert à la terre et à ses créatures qui sauront l'honorer et lui organiser les plus grandioses et émouvantes funérailles qui soient...

 

 

Derrière un vieux chêne, une jolie boule de mousse verte se tient au pied d'un romarin – comme enroulée autour de son tronc. On dirait qu'elle s'est installée là avec pudeur et hardiesse, désireuse sans doute de réchauffer et de tenir compagnie à son ami pour l'hiver.

Un peu plus loin, une forêt de lichens d'un beau vert pâle accrochés à un énorme rocher. Et un peu à l'écart, sur un petit caillou minable, un lichen singulier et solitaire d'un magnifique rouge orangée, fier et malicieux. Ravi sans doute de sa différence et d'habiter à bonne distance de ses congénères... Et qu'il leur fasse de temps à autre quelques vilaines grimaces ne nous étonnerait guère...

Et nous sourions de ces merveilleuses anecdotes et de ces sympathiques clins d’œil (un rien anthropomorphiques, il est vrai..) offerts aux yeux humains. Enchantés – réellement enchantés – par toutes ces belles rencontres naturelles...

 

 

A quelle main destines-tu ton aide ? A quel cœur dispenses-tu ton secours et ton assistance ? A quel visage accordes-tu ton amour et ta bienveillance ? N'oublie jamais que Dieu est présent en chacune de ses créatures. Le monde entier est le visage de Dieu. Et il te regarde à travers chacune d'entre elles. Il n'y a nul endroit où fuir. Mais tu peux te réfugier dans son regard. Là est ton seul salut...

 

 

Le ciel bleu immense enveloppe l'horizon. Et au loin, les êtres – les fils de la terre – gesticulent comme de minuscules figurines de glaise animées par les vents et la main de Dieu. Orchestrant le divin spectacle du monde et jouant avec les fils invisibles de la merveilleuse trame que nul ne saurait défaire et comprendre sans s'être suffisamment dévêtu – et défait de ses oripeaux – pour rejoindre la joyeuse troupe des âmes – des âmes humbles – à son service.

 

 

Ravale tes désirs orgueilleux de conquête. Et creuse au dedans la défaite pour que la plus haute puissance soit offerte à ton humilité...

 

 

Lorsque les vents se mêlent à l'orage et à la foudre ou que naissent les tempêtes, l'impétueuse colère du ciel balaye la terre de ses scories. Anéantit l'orgueil des hommes. Et condamne leurs œuvres bancales et prétentieuses. Et les hommes effrayés – pris de panique et de terreur – se réfugient dans leurs dérisoires et précaires abris, trop lâches pour affronter la furie du ciel. Seules les âmes savent s'en réjouir. Et par milliers, on les voit rejoindre la danse furieuse et extatique du ciel, tournoyant comme des derviches ivres de joie dans le souffle de Dieu.

 

 

Les plus nauséabondes immondices exhalent parfois un doux parfum. Comme il arrive que la tristesse – la grande tristesse – soit le prélude à la joie.

 

 

Si un seul mot – une seule parole – pouvait sauver le monde... Mais le silence est déjà à l’œuvre. Il ne peut sauver les corps. Ni les arracher à la mort. Mais son labeur sur les âmes est inlassable. Sans relâche, il se voue à leur salut (et à leur libération). Jamais il ne renonce à sa tâche. Et pourtant, en dépit de sa patience, les esprits et les cœurs rechignent à les libérer. A leur rendre leur liberté. A leur offrir la joie de danser dans le ciel sous le regard ravi et bienveillant du Divin.

 

 

Sur terre ne subsiste que le nécessaire que le temps transforme – ne cesse de transformer – en nécessaire plus impérieux encore... Et de nécessaire en nécessaire, le monde se construit pour tendre – sans doute – vers l'indicible. La lenteur et la persistance de l'inutile et du superflu ne viennent que de la terre. De ses résistances et de ses limites. Si le ciel et la main de Dieu étaient les seuls maîtres à la manœuvre, l'indicible adviendrait aussitôt sur terre.

 

 

C'est le ciel qui déverse ces paroles sur la page. Et lui seul fait danser le petit crayon que notre main hésitante peine parfois à tenir...

 

 

Notre âme voue une totale confiance – une pleine et entière confiance – à la sensibilité et à l'intelligence. Et à tous ceux qui manifestent – d'une façon ou d'une autre – ces caractéristiques. Quant aux autres – et au reste –, elle se montre à leur égard plutôt circonspecte. Non qu'elle soit craintive, excessivement prudente ou effarouchée mais elle ne connaît que trop les créatures du monde et leur inclination instinctive à la ruse et à l'opportunisme. A la duperie et à l'instrumentalisation dont les hommes se sont fait, au fil de l'histoire terrestre, les plus dignes représentants. Et les plus habiles et infâmes porte-drapeaux.

 

 

Le silence et le non agir – si cher aux taoïstes – s'avèrent en définitive les instruments les plus puissants, les plus efficaces et les plus opérants en ce monde. N'en déplaise aux esprits bavards et interventionnistes dont les paroles et les actes sont inévitablement guidés par une idéologie restreinte et limitée.

Le silence est un enseignement. Sans doute le plus profond de tous. Et le non agir consiste à laisser le cours des choses suivre sa pente, y compris les élans naturels et spontanés du corps et de l'esprit qui surgissent. Ou peuvent survenir...

Le silence et le non agir constituent des outils implacables. Des outils magistraux et précieux (sans doute les plus précieux qui soient...) mis en œuvre par le ciel et la terre pour faire advenir les événements, les circonstances et les situations nécessaires aux êtres – pour que tous et chacun vive(nt), comprenne(nt) et intègre(nt) profondément ce qui doit l'être et que chemine et progresse ainsi la (leur) compréhension – afin (sans doute) de faire advenir en ce monde l'indicible – le Divin ou la présence silencieuse impersonnelle et souveraine.

Malgré les critiques infondées (infondées par la méconnaissance et l'étroitesse de vue de leurs contempteurs) qui assimilent bien souvent le silence et le non agir à une forme de résignation ou de fatalisme – ou pire à une forme d'indifférence ou de malveillance égotique et mortifère – ils sont, bien au contraire, impulsés par l'Amour, l'Intelligence et la bienveillance, et représentent, en particulier lorsqu'on en use de façon consciente et éclairée, le gage le plus sûr de les faire advenir en ce monde et de les faire apparaître dans l'esprit, le cœur, les actes et les paroles des êtres impliqués ou concernés par les événements, les circonstances et les situations. Aussi le silence et le non agir doivent toujours, nous semble-t-il, avoir la primauté sur les paroles et les actes réactifs et encombrés qui ne sont – le plus souvent – que des gesticulations impulsées par la peur ou le désir... Et n'ayez crainte, si une situation exige qu'un acte soit réalisé ou qu'une parole soit prononcée, n'en doutez pas un seul instant, le silence et le non agir y pourvoiront...

En définitive, le cours des choses fait naître des situations qui demandent et exigent. Et le silence et le non agir impulsent les réponses justes et nécessaires à ce que les situations réclament... Le reste, en dépit des apparences, est non seulement superflu, inefficace et inopérant mais représente toujours un détour, un achoppement ou une entrave.

 

 

Et même dans les pires soupirs, il y a une extase qui attend...

 

 

De notes sensibles (ou poétiques) en notes réflexives (ou plus philosophiques), le ciel chemine en nous. Emplit notre cœur – et tous les interstices vacants de l'esprit et du corps – pour libérer entièrement notre âme. Et nous habiter pleinement.

 

 

Là où se posent les yeux, les pas se dirigent. Et de là où naît le regard, l'enfer et les malheurs ou la joie et la paix les accompagnent...

 

 

Des plus grandes peines peut naître – et naît souvent – la plus grande joie.

 

 

L'exercice quotidien de la marche et de l'écriture dans les collines ou le long des berges sauvages de la rivière.

Peut-on rêver de plus beau cadre pour effectuer son travail ? Avoir pour collègues – toujours enjoués et accueillants – les pierres, les arbres et les nuages et pour bureau, un petit sentier ou un coin d'herbe verte où l'on peut se livrer à sa tâche en notant quelques mots ou quelques fragments dictés par le ciel.

Oui, – il n'y a aucun doute –, cet humble scribe de la parole céleste est l'un des employés – à la fois ouvrier et artisan* – les plus chanceux et les plus privilégiés de la terre ! Comment pourrait-il ne pas exercer son emploi, la joie au cœur ?

* Tenu parfois par sa main trop terrestre d'ajouter à cette parole brute... et immanquablement contraint de la raboter et de la limer pour lui donner un air à peu près présentable afin qu'elle puisse être appréhendée, entendue et compris par l'esprit humain...

 

 

Que dure la gloire sur les rivages de la terre ? Et qu'offre-t-elle ? Rien. Qu'un médiocre et fugace contentement de l'esprit. Et que vaut celui-ci face à l'humilité qui ouvre à l'éternité et à la puissance invincible de l'Amour ?

 

 

Les yeux des hommes sont clos. Et leur cœur fermé. Pourquoi leur demanderait-on de nous éclairer ou de nous aider à marcher (et à cheminer) ?

Aurait-on l'idée de demander son aide ou sa route à un aveugle ignare et malveillant ? Ou pire (ou mieux) aspirerait-on à le suivre ? Non. Et pourtant, bien des hommes – sinon tous – font confiance à la cécité, aux inepties et à l'abjection de leurs congénères.

Comment leur dire – sans passer pour un prétentieux, un malotru ou un rabat-joie – de n'accorder d'importance (et de valeur) qu'à ce que recèlent leurs profondeurs. Sensibilité, intuitions et ouverture d'esprit et de cœur devraient être leurs seules balises. Et leurs seuls guides.

Mais les hommes sont – et se sentent – bien souvent si perdus qu'un manque de discernement, d'intelligence ou de courage les incite à suivre n'importe qui – le premier qui passe et qui a l'air de savoir ou de comprendre (qui a seulement l'air bien entendu) ou la foule stupide et inconsciente (mais dont le nombre rassure) pour leur montrer le chemin et les diriger. Pourvu qu'ils avancent (ou du moins aient le sentiment d'avancer) en posant un pas après l'autre en n'importe quel lieu ou sur n'importe quel chemin, les hommes – en animaux stupides – s'en trouvent rassurés. Et satisfaits. Ah ! Mon Dieu ! Comme les hommes sont idiots... Ils se comportent non seulement comme des imbéciles mais agissent en êtres bien peu éclairés...

 

 

Pourquoi te livres-tu à cette tâche si le ciel ne t'y a convié ?

 

 

Le plus abominable, le plus abject, le plus stupide et le plus borné des meurtriers ou des bourreaux est, lui aussi, une créature et un instrument de Dieu. Et sans doute même a-t-il besoin, plus que tout autre, d'Amour et de tendresse... Mais cette nécessité n'empêchera nullement le ciel et la terre de le placer en de terribles situations (aussi terribles que ses actes) pour que naisse et se développe en lui la nécessaire maturation de l'Amour et de l'Intelligence...

 

 

En toute chose – des plus anodines et des plus simples aux plus complexes et aux plus essentielles – on est toujours amené à faire du soi-même. Nul, ici-bas – et en nulle tâche – ne peut faire autrement*... A travers la singularité des êtres et la diversité des formes terrestres, le ciel prend plusieurs visages... Il ne peut en être autrement en ce monde...

* Ou, autrement dit, nul ne peut faire autre chose que du soi-même... Et pas même l'usurpation et l'imitation n'y échappent...

 

 

Le ciel, les livres. Les chiens, les arbres. Les herbes, les pierres. Et les chemins des collines. Compagnons de route(s) si chers à notre cœur. Et à nos pas.

 

 

Les pierres des chemins nous sont plus douces que l'asphalte des trottoirs. Et la présence du ciel et des arbres plus essentielle que celle des hommes.

 

 

En ville, une chose en nous étouffe. Se rétracte. Et se dessèche. Sans doute la part la plus sauvage et indomptable de l'âme. Qui ne peut souffrir la fréquentation des hommes, du bruit et du béton. Les déambulations urbaines auxquelles nous nous prêtons de façon contrainte et que nous lui infligeons est pour elle un calvaire. Une atroce amputation de l'essentiel – comme coupée de son souffle vital. Eloignée – trop éloignée – des vibrations, des éléments et des paysages naturels. De son cadre familier et nourricier.

La foule, les engins, les accessoires et les artifices en surnombre qui donnent à la ville son effervescence, sa fureur et sa folie la confinent au repli, à la révolte et au silence. Et de son cachot, on entend ses ruades, ses rebuffades et ses cris silencieux qui nous exhortent de retrouver au plus vite l'espace dont elle a besoin : le ciel, la nature et la solitude – impossibles et introuvables, bien sûr, dans l'odieux, la crasse et la surabondance du monde urbain.

 

 

Le temps. Et les heures. A la fois terrains et boucliers de la souffrance qui étreint les êtres. Et qui, elle aussi, comme eux, s'efface et disparaît en ce monde(1) de phénomènes où seuls règnent le provisoire et l'éphémère(2)...

(1) Le monde peut être, bien sûr, considéré lui-même comme un phénomène pro-visoire...

(2) Où le provisoire ne rivalise qu'avec l'éphémère...

 

 

Sentir la terre – le contact de la terre – à travers le corps allongé de tout son long sur un rocher. Regarder une souche d'arbre se décomposer. Qu'y a-t-il de plus tendre ? Et de plus émouvant ?

Ah ! Si les hommes pouvaient goûter à ces délices et sentir ces merveilleuses vibrations ! Mais comment le pourraient-ils ? Pour eux, ces choses-là – nous le savons bien – sont des insignifiances, des fadaises ou des idioties – tout juste bons pour les demeurés ou les illuminés (termes toujours péjoratifs à leurs yeux). Ils préfèrent trouver leur joie leur pauvre joie – en suant dans une salle de sport, rivés à leur tablette ou à leur smartphone ou scotchés devant leur écran vidéo... Laissons ces enfants à leurs belles activités et à leurs dignes occupations... Un jour, sans doute, grandiront-ils...

 

 

A la grandeur et à l'immensité du ciel, nous n'avons que notre cœur à offrir. Et nos yeux grands ouverts. Et de cette offrande – la seule, en vérité, que nous puissions lui adresser –, le ciel sera ravi et satisfait. Il vous laissera vous approcher. Et l'habiter. Puis il descendra jusqu'en vos profondeurs. Emplira vos yeux et votre cœur, leur offrira mille baisers de gratitude et un puits d'amour intarissable avant d'y déposer son regard pour que vous puissiez de ses propres yeux embrasser le monde, la terre et le ciel. Ensuite les frontières s'effaceront. Tout sera emmêlé. Dieu, vous et le monde ne formeront plus qu'un seul corps. Et un seul cœur. Alors l'Amour, la joie et la paix pourront se donner sans compter aux uns et aux autres selon les réclamations et les exigences de la terre et du ciel.

 

 

Dans les mystères de la langue et du cœur, Dieu a jeté son secret. Et depuis l'aube des temps, on voit les hommes penchés sur leur table qui peinent à le déchiffrer. L’œil averti et l'esprit aiguisé toujours s'y sont cassés les dents. Seule l'âme innocente peut lui donner vie. Voilà, en vérité, le seul travail de l'homme, celui que Dieu lui a offert : faire naître l'innocence. A charge pour lui de défricher préalablement les obscures forêts du cœur et de l'esprit...

 

 

En cette heure vespérale, le ciel gris s'assombrit. Et on aperçoit au loin trois petits nuages – fins et étroits – tout en hauteur en forme d'apostrophe sur la longue et sombre silhouette d'une colline aux allures d'immense plateau émergeant de la vallée. Et soudain je suis frappé par cet inattendu tableau. Ces nuages ressemblent à trois petites virgules légères et malicieuses dans l'obscur d'une longue phrase interminable. Comme si le ciel – qui regarde (je le sais) mes notes par dessus mon épaule – m'avait adressé un immense clin d’œil en dessinant dans le paysage l’hermétisme un peu balourd et parfois alambiqué que ma main – souvent trop lourde – retranscrit sur son petit carnet et qu'une ponctuation plus assidue et quelques aménagements feraient sans doute gagner en beauté et en légèreté... en grâce peut-être...

 

 

En archipel de joie, Dieu se donne. En constellations maritimes que l'Amour recouvre. Pour que le ciel et la mer s'embrassent. Et que la terre voit s'envoler les âmes.

 

 

Une farouche solitude. Voilà ce dont l'âme a besoin. Quant au reste, n'ayez crainte, Dieu et le ciel y pourvoient...

 

 

Avec une sincère candeur, nous croyons nous épancher. Et ce n'est que le ciel qui pleure à travers nos lèvres...

 

 

La divine bonté des heures qui s'offrent gracieusement pour la joie de s'offrir. Sans attente à l'égard de ceux qui donnent comme à l'égard de ceux qui reçoivent. Répondant simplement à une impérieuse nécessité naturelle...

 

 

En dépit des apparences – et n'en déplaise aux partisans du progrès – les hommes, depuis l'aube de l'humanité, ont créé davantage d'engins et d'instruments de mort que d'outils et d'accessoires vitaux. Et nécessaires à la vie. Ils estiment pourtant que ces inventions sont indispensables au monde. Et à son évolution. Et quelle que soit l'époque, ils appellent cela la modernité...

 

 

Dans un groupe humain (quels que soient sa nature, sa taille et son environnement), le psychisme exhorte chaque individu à jouer un rôle (le* comique, le râleur, l'intello, l'individualiste, le fédérateur, le donneur de leçon, le gentil, le discret etc etc). Et la plupart se prêtent, presque à leur insu, à ce jeu (de dupe) où personne sans doute ne l'est complètement...

* Au masculin comme au féminin, bien entendu...

En revanche, dans la solitude et dans la nature où le psychisme est moins actif (plus silencieux – voire inexistant), les individus – hommes et animaux – assument leur fonction et se livrent à leur rôle naturel sans y mêler ni se soucier des artifices, des apparences, des jeux collectifs, des postures sociales et du qu'en-dira-t-on.

D'aucuns y verront peut-être un signe de la supériorité de l'homme sur l'animal et de la société humaine sur l'état de nature. La preuve que les êtres humains disposent non seulement d'une palette comportementale plus large et éminemment plus complexe mais qu'ils ont su également créer un système collectif d’interactions riche et dense.

Certes... mais ils oublient (un peu vite) que cette palette et ce système d'interactions s'accompagnent toujours d'une infinité de postures, d'attitudes, de manières et de chichis non seulement vains, superflus et ridicules mais source d'agissements, d'agressions et de conflits particulièrement délétères.

Cette « richesse » comportementale et ce système complexe de liens et de codes constituent-ils véritablement un progrès ? Oui, sans doute (dans son ensemble) mais, qui nécessiterait incontestablement d'être transcendé... car jusqu'à présent, il est évident que les hommes ont toujours usé de la perception et de la cognition – à travers le psychisme et l'accès à une forme étroite et limitée de conscience – comme des animaux immatures utilisant les aptitudes et capacités qui leur ont été offertes (telles que les représentations, l'idéation, la conceptualisation, le langage etc etc) et le pouvoir qu'elles confèrent qu'à des fins grossières, instinctives et animales : pour tirer parti et bénéfice, se protéger, agresser, exploiter, instrumentaliser, détruire, exterminer, s'approprier, ruser, séduire, tromper, critiquer, faire souffrir etc etc.

Jusqu'à aujourd'hui, seule une infime part de ces capacités a été utilisée à des fins plus nobles et – disons-le – supérieures comme par exemple, accueillir, respecter, prendre soin, aider, donner, partager, ouvrir, s'ouvrir, élargir et aimer.

Ces éléments prouvent ou démontrent une nouvelle fois – et avec clarté – la grande immaturité des hommes. Et le fort potentiel – non encore actualisé, bien sûr – de l'humanité en matière de Conscience, d'Amour et d'Intelligence...

 

 

La terre qui accueille nos pas est souvent plus fraternelle que les yeux – et les gestes – de nos frères. Quant à Dieu et au ciel – même si l'essentiel des hommes ne peut y accéder* – leur regard se montre toujours – et envers tous – accueillant et bienveillant.

* Par identification à la forme et encombrements psychiques et émotionnels...

 

 

Dans le ciel naît le regard transparent. Et les pauvres hommes lèvent vers lui leurs yeux obturés. Et si leur nuit s'éclipsait ? Ils ne verraient rien. La main de Dieu aurait tout effacé. Ne subsisteraient que le ciel. Et le regard transparent. Et peut-être le reflet de cette terre d'hécatombes et de mutilations édifiée par leur ascension, leur frères et leurs ancêtres. Leurs échafaudages déclinants et corrompus. Et leurs pauvres échelles branlantes et dégoulinantes du sang de leurs massacres. Et devant cette abomination, ils s'agenouilleraient en larmes, implorant le ciel et la terre d'éduquer les hommes à l'innocence.

 

 

Nous croyons découvrir, explorer et parcourir la terre. Et l'espace. Mais, en vérité, c'est le ciel qui, à travers nous, cherche un chemin...

 

 

La joie de la terre à accueillir le subtil entremêlement et l'infini renouvellement de tout. Et la joie du ciel qui goûte et contemple son œuvre merveilleuse...

 

 

La crucifixion du christ que certains assimilent à un sacrifice pour les hommes est une véritable hérésie. Un total non sens. Cette crucifixion n'a d'autre valeur que l'exemple et l'encouragement. Elle n'a sauvé et ne sauvera jamais personne de ce que d'aucuns appellent les pêchés (les pêchés ne sont sans doute rien d'autre que l'ignorance profonde de notre nature fondamentale et les comportement délétères qui en résultent...). Cette crucifixion invite simplement chacun à se laisser clouer par le monde et le réel (autrement dit à les laisser agir et faire leur œuvre sur nous et en nous) et à emprunter cet éprouvant chemin terrestre du dépouillement (que l'on nomme traditionnellement le chemin de croix*) qui mène inéluctablement à ce qu'ils appellent la résurrection et le royaume céleste qui ne sont rien d'autre que l'accès à l'espace infini et éternel de l'impersonnalité...

* A chacun son chemin de croix – ce dernier étant toujours parfaitement adapté aux caractéristiques et aux singularités de l'être qui chemine... Et bien qu'il existe une multitude de chemins – autant sans doute qu'il y a d'êtres –, tous comportent des difficultés et des écueils que l'on pourrait qualifier d'épreuves de dépouillement et de désencombrement nécessaires pour accéder à la nudité requise...

 

 

Ces derniers temps, mes fragments usent du mot « Dieu » de façon excessive et outrancière. Il ne s'agit nullement – vous l'aurez compris – de l'image idiote, puérile et anthropomorphique du vieil homme sage et tout puissant à barbe blanche... Dieu est ici employé comme métaphore de l'Absolu, du Divin (au sens le plus large) et de l'Impersonnel. De la présence silencieuse et souveraine que chacun est en mesure de ressentir, de goûter et d'habiter...

 

 

Sur cette terre fragile nos pas se posent l'espace d'un instant – le temps fugace d'une existence. Tâchons de lui épargner les affres – et la lourdeur – de notre marche. Et les scories de notre passage.

 

 

L'esprit et le cœur influent l'un sur l'autre d'une incroyable façon. Il y a entre eux des liens invisibles et imperceptibles aux yeux et à l'entendement des hommes. Et pourtant, plus ces liens deviennent actifs, plus ils se renforcent et gagnent en puissance. Plus ils deviennent puissants, plus l'esprit et le cœur s'emmêlent et agissent de concert. Jusqu'à ce que cet enlacement devienne si fort et si étroit que l'esprit et le cœur s'unissent pour se fondre en une seule et parfaite unité.

 

 

Le ciel toujours rend grâce à la terre qui donne la vie, à l'air que ses créatures respirent, à l'eau qui donne naissance aux arbres et aux herbes, qui coule sur les corps, les mains et les visages et dont tous s'abreuvent, au soleil qui éclaire et réchauffe les êtres, aux aliments que les corps absorbent et transforment. Grâce à eux, le ciel peut goûter la vie et le monde. Et lorsque nous ressentons profondément cette grâce et cette pluie d'offrandes ininterrompue autant que la gratitude et la joie du ciel, nous nous joignons à lui. Et la vie devient alors une profonde et permanente célébration.

 

 

La brume – dense et épaisse – sur les collines et le ciel gris et pluvieux – magnifique – recouvrent la terre et ses secrets de leur longue robe mystérieuse. Et la rendent si belle. Si énigmatique. Si désirable. Mais en offrant cette beauté et en voilant son apparence – et sa nature – Dieu a-t-il songé un instant aux hommes si pleins déjà de désirs, de questions et d'incompréhension...

 

 

Nous avons beau savoir – comprendre et ressentir – que seul le ciel éprouve les événements et les situations et qu'il fait vivre à chacun – à chaque « part » de lui-même – ce qui lui est nécessaire, nous continuons à souffrir de notre impuissance à venir en aide à la détresse et à l'incompréhension du monde...

En cette froide après-midi d'hiver, une petite pluie fine et serrée, têtue et un peu délurée tombe sans discontinuer sur les paysages. Et notre main glisse et les mots buttent sur le petit carnet constellé de minuscules gouttes. Nos fragments sont ponctués d'innombrables flaques que Dieu a la malice de transformer en taches indéchiffrables, rendant très difficile l'écriture et presque impossible la lecture. Comme s'il me disait avec un petit air fâcheux de réprimande : « voilà à quoi tu m'obliges ! Laisse donc tes feuilles et ton travail de pauvre scribe ! Et regarde autour de toi ! Je suis là partout sur les chemins et dans les paysages. L'as-tu oublié ? Qu'attends-tu pour me rejoindre ! Viens ! Et nous danserons sous la pluie ! ». Comment résister ? Alors j'ai refermé mon carnet – presque détrempé – pour m'élancer vers lui. Et le chemin qui nous attendait. L'après-midi ne faisait que commencer...

Nous nous sommes enfoncés au cœur du massif. Au cœur des collines sauvages. Au milieu des vallons profonds et luxuriants. Des roches et des a-pics de calcaire splendides – comme une dentelle massive et puissante émergeant de la forêt. Nous avons suivi une piste étroite – fréquentée sans doute occasionnellement par quelques chasseurs*. Avec le sentiment de pénétrer dans un paradis naturel infréquenté des hommes. Comme une incursion dans le monde d'avant l'humanité. Ces lieux dégageaient une puissance et une sauvagerie brute indéfinissable. Nous nous y sommes engagés avec une joie indicible – une vive et profonde émotion. Avec l'impression bouleversante de retrouver la vie primitive des premiers hommes. Et de marcher sur la terre originelle.

Tout au long de cette marche, nous nous sommes remplis de la beauté du monde, de la nature et des paysages sauvages. Comme s'ils se déversaient en nous en flots ininterrompus. Submergeant tout. Notre cœur, notre corps, notre esprit. Toute notre âme. Et de parcourir ces grands espaces déserts, naturels et sauvages, l'extase nous a foudroyés. Et dans ce débordement, notre main – émue et tremblante – et assidue à la tâche s'est épanchée de cette surabondance de joie. Nous l'avons vue inscrire, malgré la pluie, ces quelques mots sur le carnet ruisselant qui accompagne chacune de nos excursions.

Et après tant de kilomètres parcourus en pleine nature, lorsqu'il nous fallu rejoindre à la nuit tombée la civilisation humaine – ses routes, ses habitations et ses lumières artificielles –, une chose en nous s'est attristée. Et s'est rétractée. Comme si quelque chose en l'homme la blessait. Et l'offensait profondément. Sans doute cette dimension brutale, grossière et artificielle et ce manque ou cette absence de présence au monde et à lui-même qui le confinent, malgré lui, à une forme détestable de vulgarité...

* par quelques rares chasseurs en ces lieux très éloignés du réseau routier...

 

7 décembre 2017

Carnet n°71 Notes du ciel et de la terre

Journal / 2016 / L'exploration de l'être 

Chaque jour – au cours de notre promenade – le ciel laisse ma main courir sur la page. Qu'il pleuve, qu'il vente ou qu'il neige, elle reste fidèle à sa modeste mission. Et qui pourrait la blâmer ? De ses petits traits dérisoires, elle n'offense personne. Elle invite simplement les yeux à regarder l'infini. Et essaie humblement de faire entrer un peu de ciel dans le cœur des hommes...

_

Mon âme et mon cœur ne peuvent être confrontés qu'au nécessaire et à l'essentiel. Lorsque les situations et les événements ne relèvent pas de questions de vie ou de mort (aux sens premier et littéral du terme), quelques chose en moi refuse d'y participer. Et de s'y investir.

A dire vrai, mon âme et mon cœur sont peu – très peu – enclins à l'accessoire et à l’artifice, au jeu et au plaisir, au dérisoire et à la futilité, aux assouvissements égocentriques et aux satisfactions narcissiques, aux rôles et aux masques.

Ils aiment – et ont un penchant naturel pour – le fondamental, le naturel et l'authentique, la solitude, la joie profonde et le bien commun (les œuvres de bien commun), la prévenance et la bienveillance à l'égard d'Autrui (si notre présence, nos actes ou notre intervention sont ressentis comme une nécessité ou exigés par les circonstances...). Comme si mon âme et mon cœur ne pouvaient se consacrer qu'à ce dont le corps et l'esprit ne peuvent se passer...

Le reste leur est bien égal. Et s'en occuper ou y être confronté, cela, bien souvent, les accable, les rebute ou les exaspère. Tout ce superflu dont les hommes aiment s'entourer ou remplir leur existence pour paraître, pour se rassurer, tromper leur ennui ou à seule fin de s'offrir quelques menus plaisirs compensatoires (compensatoires à l'indigence de la condition humaine ordinaire*). Toutes ces vaines choses, ils les détestent et les méprisent... Et comme je les comprends...

* organique et psychique

 

 

Si l'on t'annonçait que tu allais mourir dans quelques semaines ou dans quelques mois, que ferais-tu de tes jours ?

Si tu ne modifies en rien le contenu de ton existence – au delà des mesures et des contingences inhérentes à ta disparition qu'il te faudrait peut-être prendre ou régler pour assurer à tes proches une existence décente ou la moins « perturbée » possible – alors tes jours actuels sont l'exact reflet de tes essentialités. Le signe que chacune de tes journées répond et correspond réellement aux aspirations de ton âme.

Dans le cas contraire, constate simplement que tu vis dans un projet ou dans l'achèvement d'un désir ou dans la volonté d'une construction. Comme si tu hypothéquais ou renonçais au présent (et à ce qui est) pour un futur improbable... qui est voué (que tu parviennes ou non à tes fins) à la désillusion : ce que tu réaliseras ou ce qui se réalisera répondra peut-être à ton désir mais sûrement pas au désir sous-jacent à tout désir : la joie et la paix inconditionnées.

Ne te blâme pas (c'est inutile !) : ce (ou ces) désir(s) est (ou sont) si puissant(s) et l'illusion de sa (ou de leur) satisfaction encore si peu perceptible que tu ne peux faire autrement. Tu as le sentiment impératif que tu dois t'y consacrer... Laisse-toi faire ! Il nous faut répondre à chacun de nos désirs pour comprendre (profondément) que leur réalisation ou leur satisfaction ne change absolument rien.

Et si tu estimes qu'il serait souhaitable – et judicieux – de réviser le contenu de ton existence (autant qu'il t'est possible de le faire) pour répondre au plus juste à ce qui t'anime profondément, quel choix te reste-t-il ? Ce qui est en nous nous enjoint inflexiblement à l'actualiser... ainsi chemine la compréhension...

Enfin, si tu envisages simplement de réaliser quelques vieux fantasmes ou quelques fous ou doux rêves pour « profiter » (quel vilain mot !) de tes derniers instants, inutile d'en parler : tu n'aurais sans doute même pas l'intuition de ce qui se trame en ton for intérieur... Tu réduis, malgré toi, l’existence terrestre à un simple, absurde et dérisoire passage au cours duquel tu essayes de tirer parti et plaisir (un mauvais parti et un médiocre plaisir – il va sans dire...) de quelques expériences agréables, de quelques sensations « sensationnelles » et de je-ne-sais quel sentiment d'exaltation superficiel pour tenter vainement de faire contre poids au lot habituel de difficultés, de peines et de misères que la vie offre à chacun d'entre nous...

 

 

Les yeux s'usent. Et se lassent. Jamais le regard. Toujours neuf. A chaque instant.

 

 

J'ai souvent le sentiment que ces notes ne s'adressent pas à mes contemporains mais à de lointains descendants (de l'espèce humaine). A quelques-uns en particulier qui reconnaîtront d'emblée le sens de ces lignes et la démarche – et la perspective sous-jacente – de ces milliers de fragments... Et j'imagine qu'ils parcourront ces pages naturellement. Et avec intérêt. Etonnés qu'un de leurs lointains ancêtres ait relaté tant d'évidences si peu partagées par ses congénères de l'époque.

 

 

Pourvu que l'on ait déjà (un tant soit peu...) goûté à la saveur silencieuse du ciel et aux délices des promenades solitaires dans la nature, on sait qu'en leur présence, les yeux s'ouvrent – presque systématiquement – sur le regard. Et aussitôt la nature, le monde et la vie trouvent leur plus fidèle spectateur. Leur plus fervent admirateur. Et leur plus dévoué ami et serviteur.

 

 

Crois-moi – si tes yeux sont encore aveugles ou infirmes – la seule espérance est dans le regard...

 

 

Seul à chaque instant du jour et de la nuit. Comme le soleil. Et la lune... Et alors ? Cette solitude les empêche-t-elle de briller ? D'offrir leur présence ? Et de se livrer – tout entiers – à leur tâche ? Les a-t-on déjà vus quémander un peu d'amour et de tendresse ? Comment l'imaginer ? Et comment oublier la présence du ciel ? N'est-il pas là pour chacun, prodiguant soin et attention à tous ceux qui le réclament ? Oui, évidemment, c'est le ciel qui se manifeste à travers tous les yeux bienveillants et toutes les mains secourables qui se penchent vers nous... Qui d'autre en ce monde en serait capable ? Sans le ciel, les hommes – et toutes les créatures de la terre – ne seraient (et ne sont encore bien souvent) que des ombres et des fantômes. Des pantomimes sans substance animés par leurs instincts sauvages et naturels...

 

 

Une ruine abandonnée sur une colline sauvage m'émeut davantage que tout discours. Et que toute parole. Et une fleur fragile sur un chemin désert autant que le sourire d'un enfant...

 

 

A notre mort, Dieu – ou le ciel si vous préférez – pourrait bien nous demander : « alors as-tu toujours rendu la vie douce à ceux qui t'entouraient et à ceux que tu as rencontrés car, à travers eux, c'est à moi que s'adressaient tous tes gestes ?

Oui, en effet, à travers tout être percevant – et sans doute même à travers l'ensemble de l'Existant, créations conjointes de la conscience et de l'énergie – c'est la conscience-présence qui perçoit, ressent, éprouve et expérimente la totalité des événements de la vie phénoménale.

Ne t'es-tu jamais interrogé sur le pas ou le geste qui pourrait te permettre de t'extraire des événements et des circonstances pour échapper à la misère de la condition terrestre ? Ne sais-tu donc pas que le corps et le psychisme appartiennent au monde phénoménal ? Et que rien ne peut les en soustraire ? Où que tu ailles et quoi que tu fasses, ils y resteront plongés. Il n'y a aucune échappatoire possible et nul salut à attendre...

Seul le regard peut s'ouvrir... Et vivre au sein de l'espace impersonnel...

 

 

Ne crains ni le monde, ni les phénomènes ni les circonstances. Tu es éternel. Jamais le regard ne périt.

 

 

A partir d'un certain degré de maturité, on n'accomplit plus les choses pour obtenir quoi que ce soit. Ni profit, ni honneur, ni gratification, ni satisfaction narcissique. On fait ce qui est nécessaire et naturel. Ou pour la joie du geste.

 

 

Quand je lis un poète, assis dans la nature, c'est toute mon âme qui s'émerveille de ces petites taches offertes aux âmes. Et au ciel. Et j'entends vibrer les phrases à l'unisson des nuages, des étoiles et des mille voix silencieuses des collines. Et je sens que le paradis est là. Au cœur même de la page. Au cœur même des paysages. Et le ciel, au plus proche – heureux de cette rencontre et de cette joie – s'avance vers nous, tourne les pages et nous invite à lever les yeux pour nous enlacer en silence. Alors les pages, le lecteur, les arbres, les paysages et le ciel ne font plus qu'Un. A jamais unis dans leur étreinte...

 

 

On peut croire qu'il faut être courageux pour marcher sur les chemins de traverse ou les sentiers désertés par les foules. Mais en vérité, rien n'est plus facile si nos pas nous y portent naturellement. Le cœur peut en souffrir. Mais cela donne des ailes à l'âme... qui s'envole plus vite vers le ciel.

 

 

L'ennui, la tristesse et la solitude sont les trois coups que Dieu frappe à notre porte. Mais souvent la maison est vide. Les hommes l'ont désertée pour aller dans le monde où ils imaginent qu'ils pourront y échapper. Refusant obstinément la main de Dieu tendue vers eux...

Pour accueillir l'ennui, la tristesse et la solitude, les laisser entrer dans son existence, s'asseoir à leur chevet et écouter ce qu'ils ont à nous dire, il convient d'avoir le cœur suffisamment mûr. Et d'avoir bourlingué sur tous les chemins du monde pour comprendre qu'ils ne nous mèneront nulle part... qu'ils nous ramèneront inéluctablement à nous-mêmes.

Ainsi l'ennui est l'appel du vide. Et une invitation au dépouillement. La tristesse – et donc la souffrance – exhorte aux remises en question et à l'interrogation profonde. Quant à la solitude, elle offre – par l'absence de distractions et de divertissements – les conditions requises à la rencontre avec soi – et avec l'infini que l'on porte en soi. Dieu nous attend sur l'autre rive. Au bout de cet âpre – et bien souvent long et douloureux – passage.

 

 

Les vallées et les collines regorgent de merveilles lorsque le ciel les éclaire de sa douce lumière. Et c'est toute la terre qui sort de l'obscurité...

 

 

Il ne faut pas prendre au sérieux la parole des hommes. Ne pas faire cas de leurs discours, de leurs cris ou de leurs vociférations. Et parfois même ne pas prêter attention à leurs plaintes et à leurs jérémiades (si celles-ci relèvent davantage de la pleurnicherie et de la lamentation complaisante que de la souffrance réelle et authentique). Les hommes sont (et se comportent comme) des enfants ignares, prétentieux et exigeants...

Ils croient savoir, tentent de vous persuader qu'ils ont raison – que vous devez, par exemple, vous occuper de certaines choses ou les effectuer d'une certaine façon... Mais ils ne savent pas. Pour la plupart, ils ne savent rien... ni du monde, ni des choses, ni de la vie, ni d'eux-mêmes*. Comment pourraient-ils vous conseiller ou vous apprendre quelque chose ? Et comment peuvent-ils ignorer qu'en leur for intérieur se cache la seule solution à ce qui représente à leurs yeux un problème ? Aussi convient-il de les laisser creuser en eux-mêmes... excepté lorsque la situation l'exige ou en cas de force majeure. Voilà sans doute – et en définitive – la meilleure réponse à leur offrir...

* Les moins ignorants pourront au mieux vous ensevelir sous des tonnes de pauvres et indigestes savoirs spécialisés. Mais rares – très rares – sont ceux qui pourront vous éclairer sur l'ensemble des liens entre les différentes formes de l'Existant et la conscience...

 

 

Si tes lignes* font offense à la poésie, abstiens-toi d'écrire ! Et en cette heure vespérale qui vient clore notre longue promenade dans les collines, cette curieuse injonction qui résonne comme un étrange ordre céleste me glace les sangs... Et je me promets à l'avenir d'essayer de laisser mon carnet dans ma besace. Pour demeurer dans l'écoute et le regard nu... en prenant garde au ciel et au vent qui observent par dessus mon épaule ma main – qui aime tant courir sur la page – saisir le mince cahier qui accompagne nos sorties.

Mais à ces mots, pourtant, une voix timide et offensée, en moi s'indigne : « et que puis-je y faire si le ciel a confiné ma « puissance poétique » et mes fragments à la vigueur et à la beauté d'un vieux mollusque avachi qui s'étire en baillant ? ». Et je sens aussitôt le ciel et mon âme sourire de ce « bon mot » comme s'ils m'autorisaient, malgré mes lourdeurs et mes maladresses, à poursuivre ma prise de notes...

* Il est vrai que j'ai la faconde (scripturale) indigeste. Comme une diarrhée langagière qui coule sans discontinuer... Que faire ? M'offrir une vermifugation ou laisser s'écouler – et se tarir – cette hémorragie intestinale expressive ?

 

 

J'étais assis par terre – sur un chemin de campagne désert – à regarder les nuages et les fleurs sauvages lorsque Dieu m'a tendu la main. Et c'est comme s'il m'avait projeté – debout – la tête et le cœur dans les étoiles tant mon âme s'était envolée haut dans le ciel.

 

 

Regarde dans la boue de tes pas. Et tu verras les merveilles que le ciel y a déposées.

Ne crois en rien d'autre qu'en tes pas de malheurs. Ce sont eux qui, d'un doigt habile (et que tu croiras funeste) – t'indiqueront le chemin.

Il n'y a d'autre espérance que le ciel. Et ce sont ces pas de malheurs qui t'y mèneront.

 

 

Un bonnet de laine sur la tête, une vieille écharpe miteuse autour du cou, une veste crasseuse, un pantalon élimé, de vieux godillots crottés par la boue et la poussière des chemins et ma vieille besace mal rafistolée en bandoulière... Ah ! Quelle fière (et misérable) allure de vagabond j'arbore lorsque j'arpente les collines... avec cet air d'idiot du village sur ma mine réjouie ou parfois renfrognée (selon l'état du ciel et la joie présente au cœur...).

Mais pour rien au monde, croyez-le, j'aimerais troquer mes loques pour des habits neufs ! Cet accoutrement est le costume de l'indigence et de la pauvreté la plus parfaite pour honorer et célébrer les richesses – et la gloire – du ciel !

 

 

L'humilité du marcheur qui ne sait où ses pas le mènent. Laissant son itinéraire aux mains du ciel et du vent. Confiant – pleinement confiant – dans les paysages et les visages qu'ils placeront sur son chemin. Et qu'importe les déserts et les tourments qu'il devra traverser ! Leur compagnie le comble déjà. Et l'aidera à faire de ses pas (de chacun de se ses pas) une douce et grandiose célébration. Ah ! Quel tendre et merveilleux chemin que celui de l'humilité !

 

 

Le ciel reflète toutes les blessures de la terre. Et toutes ses cicatrices : nos morsures, nos coups et nos déchirures. Et bien qu'il souffre du sort que nous réservons à la terre et à ses habitants, ces meurtrissures ne peuvent l'atteindre. Indemne malgré l'ignominie, la cruauté et la barbarie.

Mais je l'entends parfois s'impatienter de notre ignorance et de notre lenteur (de notre lenteur à [le] comprendre... et à le rejoindre). Et il lui arrive même, je crois, de s'exaspérer de ce refus obstiné, de cette indigence et de cette violence que nous infligeons à la terre et à ses créatures. Il a tant à offrir... Et il s'en trouve empêché par notre étroitesse, notre prétention et nos entassements... Aussi en est-il réduit – l'essentiel du temps – à la patience... à patienter sagement jusqu'à ce que nous comprenions (notre nature et nos liens) pour nous offrir enfin toute sa tendresse et toute sa lumière. Toutes ses merveilles que bien peu d'hommes sont en mesure d'imaginer ou de concevoir... et moins encore, bien sûr, de vivre et de goûter... 

 

 

En cet après-midi (habituel) d'escapade, je vois notre pas allègre, notre cœur radieux et notre âme joyeuse dévaler, légers, les sentes escarpées des collines. Ravis à chaque foulée de s'offrir au ciel. Et de sentir les pierres, les herbes, les fleurs et les arbres applaudir à leur passage. Et soutenir ce céleste pèlerinage.

Ah ! Franchement ! Peut-on rêver de plus simple et de plus bel équipage ? Sans doute l'un des plus humbles et des plus sages qui soit... Amis des chemins et de leurs habitants, heureux de toutes rencontres, saluant chacun avec chaleur et gratitude (pour sa présence), ne piétinant, ne dégradant et n'offensant rien ni personne. Et ne laissant aucune trace derrière eux excepté quelques mots griffonnés sur un petit carnet pour témoigner de cette joie silencieuse et l'offrir à tous ceux qui aimeraient la partager*...

Et je vois – et je sens – le ciel et les oiseaux répondre à notre sourire. Et à notre cœur chaviré de tendresse...

* Ou qui aimeraient peut-être même – allez savoir – nous rejoindre pour la goûter avec nous...

 

 

Mon âme est haut dans le ciel. Mais je sais qu'elle veille sur nous et nous attend. Et c'est ensemble que nous rejoindrons l'immensité et l'infini. Unis en ce monde comme ailleurs. Et Dieu pourra bien nous faire fréquenter tous les lieux et toutes les contrées qu'il souhaite, nous marcherons ensemble à jamais, main dans la main, le cœur si proche que rien jamais ne pourra nous séparer... Et chaque pas scellera et célébrera notre union avec le ciel.

Aussi que pourrions-nous craindre puisque Dieu sera dans chacune de nos foulées... La volonté du ciel sera faite. Et nos pas la serviront....

 

 

C'est l'ensemble du Vivant – et même de l'Existant – qui réclame sa part d’attention et de soin. Aussi comment le ciel – et ses modestes représentants – libres de leurs propres désirs et de leur mendicité passée, pourraient-ils refuser ce que leurs yeux implorants et leurs mains désespérées demandent avec tant de désarroi et d'espérance ?

Oui, nous pouvons les satisfaire – et nous les satisfaisons d'ailleurs malgré nous – à condition de ne jamais transformer – ni à leur insu ni au nôtre – leurs attentes légitimes en exigences capricieuses.

 

 

Un grand arbre déraciné gît, immobile, dans le fleuve. Couché à l'horizontal. Vaincu par le vent et la force des eaux après une vie entière passée à fréquenter la terre et le ciel. Et la nature s'est empressée de lui confier une ultime mission : devenir abri et perchoir pour les animaux de la rivière. Et comme toute chose et tout être en ce monde – mort ou vivant –, l'arbre s'est plié à l'inflexible volonté du ciel et de la terre.

 

 

Trois oiseaux – trois grands cormorans noirs – volent au dessus de la rivière. Altiers, splendides, magnifiques. Saluant de leurs ailes le ciel et les nuages sous les yeux de tous les habitants des lieux, ravis d'assister à leur vol majestueux.

 

 

Chaque jour – au cours de notre promenade – le ciel laisse ma main courir sur la page. Qu'il pleuve, qu'il vente ou qu'il neige, elle reste fidèle à sa modeste mission. Et qui pourrait la blâmer ? De ses petits traits dérisoires, elle n'offense personne. Elle invite simplement les yeux à regarder l'infini. Et essaie humblement de faire entrer un peu de ciel dans le cœur des hommes...

 

 

Les feuilles des arbres sont comme les hommes. Elles ne savent pourquoi le ciel les a placées là. La terre leur confie un travail. Le vent les fait danser le temps d'une courte saison. Puis elles meurent, livrées à l'obscur des sous-sols.

Il n'y a que le ciel pour sourire de cette ignorance, de cette besogne et de ces transformations. Les feuilles et les hommes, eux, ne peuvent se réjouir de leur fugace passage. Au mieux peuvent-ils s'égayer de la place que le ciel et la terre leur ont offerte. Et de leur danse dans le vent...

 

 

Il est aussi émouvant de rencontrer un vieil arbre qu'un vieillard. Tous deux portent les stigmates du temps : des rides profondes et de vieilles cicatrices qui les rendent beaux et dignes. Si profondément vivants. Et derrière leur fragilité et leur allure branlante, on devine leur robustesse d'autrefois, lorsqu'ils étaient jeunes et vigoureux – débordants de vie et d'enthousiasme. Pourtant aujourd'hui on sent leurs jours comptés. Et la mort, inéluctable, qui se rapproche. Alors nous les quittons avec tristesse – les yeux humides ou une larme sur la joue – en espérant (ou en priant le ciel de) revoir leur frêle silhouette à notre prochaine visite.

 

 

Côtoie et observe ce qui danse en ce monde. Fréquente ce qui demeure parfaitement immobile. Et laisse-toi instruire. Et te seront révélés la vérité – et tous ses secrets – dont tu pourras, un jour, te faire le reflet...

 

 

Les âmes mûres sont comme de petites fenêtres qui s'ouvrent sur le ciel depuis le cœur du monde et qui le reflètent à travers les gestes les plus humbles. Elles agissent comme les représentantes et les dépositaires du Divin sur terre. Elles nous révèlent (et nous prouvent) que Dieu n'est pas seulement une douce chimère pour les croyants naïfs ou imbéciles mais que sa présence est réelle – et avérée – en ce monde...

 

 

A partir d'un certain degré de maturité, les projets et les désirs personnels, les préférences psychiques et l'illusion du choix et du savoir(1) s'effacent. C'est le ciel qui dicte les actes et les paroles avec clarté et évidence. Et il les fait toujours advenir avec la plus grande justesse... pourvu qu'il se manifeste à travers une âme mûre – un esprit et un cœur nus, humbles et dépouillés. Totalement ouverts.

Ce qui surgira demeurera néanmoins toujours (plus ou moins) marqué du sceau des caractéristiques individuelles, mais ces dernières ne constitueront plus une entrave. Elles ne modifieront en rien le sens et la force de l'acte ou de la parole, elles lui donneront simplement une coloration singulière comme un vitrail qui laisse passer la lumière – sans lui faire perdre sa puissance et son éclat mais dont la teinte va lui offrir une couleur et une texture particulière...

Ainsi en est-il des âmes comme des vitraux. Plus ils sont opaques(2), moins (bien sûr) ils laissent passer la lumière. Plus ils sont transparents(3), plus la lumière peut les transpercer telle qu'elle arrive et se manifeste. De façon directe et originelle. Dans son état le plus pur et le plus naturel...

(1) Le savoir devient purement fonctionnel. Il est utilisé selon les exigences et les nécessités des situations. Et en matière d'existence, le seul maître à bord est le je-ne-sais-pas ouvert : la non-connaissance qui sait ou connaissante issue d'un regard global d'arrière-plan panoramique capable de cerner la globalité de la situation et l'ensemble des composants et/ou des protagonistes qui y sont impliqués.

(2) Autrement dit, plus les âmes sont encombrées et chargées de désirs, de préférences individuelles et d'idées etc etc.

(3) Autrement dit, plus les âmes sont nues et dépouillées...

 

 

Certains jours, on a le cœur en grisaille*. Aussi triste qu'un ciel bas et pluvieux – chargé de gros nuages. Heureusement que l'âme est là. Et qu'elle veille à se défaire de ces trop lourds sentiments ou de ces trop encombrantes pensées qui embrument la vue, accablent et alourdissent l'esprit pour que nous retrouvions la joie intacte – et toujours indemne – du regard nu.

* Pour mille raisons (et toujours pour mille mauvaises raisons)...

 

 

Plus l'âme devient mûre (ou mature), moins le personnage (le corps-mental auquel on s'identifie habituellement comme forme séparée du reste de l'Existant) réclame d'amour et d'attention. Moins il apparaît nécessaire de le favoriser et de lui octroyer sollicitude, soin ou même quelques manifestations de bienveillance ou de tendresse dans la mesure où la présence devient plus qualitative et la façon de l'habiter plus stable et plus profonde. En outre, le regard s'épure avec plus de facilité et le ressenti – sensoriel et énergétique – s'intensifie et devient d'une plus haute qualité*. Ces éléments permettent donc de lui offrir ce qui lui est nécessaire. Et ne suscite aucune intervention « extérieure » ni aucune marque d'affection particulière (à travers d'éventuels gestes, actes, paroles ou quelque compagnie...). Ils s'avèrent suffisants pour répondre au besoin d'attention légitime de la forme (du personnage) et même combler l'éventuel besoin d'amour et de tendresse que l'esprit pourrait encore parfois quémander ou solliciter... excepté évidemment lorsqu'une présence plus soutenue et un « accompagnement » plus serré et enveloppant s'avèrent indispensables ou lorsque la situation et les circonstances l'exigent, par exemple, en cas de douleur, de stress, d'anxiété, de sentiment de saturation, de tristesse profonde... Dans ce cas, la présence se recentre davantage sur l'individu (le personnage) pour lui apporter ce qu'il réclame et lui prodiguer ce qui lui est nécessaire... bien qu'il puisse arriver de façon extrêmement rare – dans certains cas exceptionnels – que l'intervention, l'assistance ou l'accompagnement d'une tierce personne s'avèrent ponctuellement utiles ou incontournables...

* En comparaison de la façon dont il était « vécu » et appréhendé auparavant...

 

 

Ton travail en ce monde est celui que te dicte le ciel. Il n'y a nulle autre besogne à accomplir.

Ce que tu entreprends pour ton seul plaisir ou pour ton seul intérêt révèle simplement – et il n'y a là rien à blâmer – non seulement que tu demeures esclave des désirs, des croyances et des espoirs de ton esprit ignorant qui accaparent, occupent et monopolisent l'ensemble de l'espace perceptif, mais également que ton âme est encore immature pour obéir aux injonctions du ciel. Ne subsiste pour lui, sa lumière, ses consignes et ses instructions aucune place...

Lorsque l'esprit et le cœur sont vides et nus – désencombrés de projets, de désirs, d'envies, d'aspirations, d'idées, de croyances, de représentations et d'espoirs, rien – en vérité – n'est plus facile et plus simple que de suivre – à travers l'exigence des situations – les prescriptions ou les décrets du ciel. Et du réel.

Ces injonctions ne sont plus considérées comme un ordre ou une obligation contraignante mais comme la seule option possible, la seule chose à faire. Comme une sorte d'impérieuse et incontournable nécessité... Aussi les réalise-t-on avec aisance et avec joie en dépit parfois, il est vrai – notamment au début de cette phase de rayonnement de l'Être ou du Divin – de quelques résistances psychiques (toujours possibles) en particulier lorsque ces injonctions heurtent ou contrarient certaines habitudes, certains principes résiduels « non épurés » ou quelques encombrements encore présents dans le mental. Mais l'essentiel du temps, ces injonctions sont exécutées avec facilité et enthousiasme, avec une confiante tranquillité et de façon implacable (sans négociation possible excepté si les circonstances l'imposent), mais également avec détachement (à l'égard de l'acte et du résultat) tout en étant pleinement – et totalement – engagés dans l'acte ou la parole – édicté(e) par le ciel ou le Divin*.

* Ou, si vous préférez, par la présence impersonnelle qui perçoit de manière neutre et exhaustive la globalité de la situation : l'ensemble des circonstances, des protagonistes et des formes impliqués et qui agit donc en conséquence, de façon juste et appropriée.

Cette façon d'agir – et la perception qui en est à l'origine – sont très éloignées du fonctionnement habituel des êtres humains soumis d'ordinaire à de multiples encombrements psychiques et, par conséquent, à d'innombrables complications et tergiversations : méandres idéatifs, nœuds émotionnels, doutes, biais de perception, subjectivité, rétrécissement, vues tendancieuses, préférences, intérêts personnels, résistances, refus, blocages et obstacles. Ces éléments restreignent, bien sûr, non seulement la perception (en offrant une perception limitée et subjective), mais handicapent ou orientent de façon substantielle l'action (avec des actions partiales et inappropriées). Elles se trouvent, en outre, à l'origine d'un grand nombre de conflits et de complexifications dont les hommes, à leur insu, « arrosent » le monde, le plan réel et l'ensemble des situations phénoménales. Et il va sans dire que toutes « nos existences » s'en trouvent très largement affectées...

En revanche, lorsque l'âme est mûre et qu'elle sait se faire l'exact reflet des injonctions célestes, l'existence, le monde et la façon de les habiter non seulement se simplifient grandement. Mais deviennent éminemment faciles...

 

 

Oh ! Mon Dieu ! Comme l'esprit peut parfois être embrumé et embrouillé lorsqu'il est perdu dans ses pensées ou enlisé jusqu'au cou dans les tracasseries ! Il recouvre aussitôt les yeux, le cœur et le monde d'une épaisse chape de plomb. Opaque et grise. Si lourde et si épaisse qu'on en arrive à penser que rien ni personne ne pourra jamais la soulever ou la faire disparaître...

Et pourtant, en ces funestes instants, l'âme – sage et silencieuse – patiente tranquillement dans le regard. Elle attend notre attention ou le vent pour balayer toutes ces chimères. Et retrouver la nudité et l'innocence. La joie et la légèreté. Pour pouvoir à nouveau s'élancer dans le ciel et embrasser la terre. Et reprendre, avec la joyeuse – et divine – complicité du vent, ses cabrioles et sa danse avec les anges, les brins d'herbe qui peuplent la terre et les nuages qui peuplent le ciel.

Oui, elle a hâte de retrouver sa place. Cette place qui lui est si chère... cette place que Dieu lui a attribuée pour offrir sa joie et sa présence à toutes les créatures du monde.

 

 

Comme il est étrange et déconcertant de voir les hommes et les insectes penchés sur leur ouvrage ou vaquant à leurs affaires et à leurs nécessités ! Comme toutes les choses et tous les êtres de ce monde, ils œuvrent à leur tâche. Et assument leur rôle. Participent à leur insu au bien commun – à ce que d'aucuns appelleraient le Bien supérieur – dont la plupart (sinon tous) ignore tout. Astreints – et réduits malgré eux – à la fonction de maillon (dérisoire mais indispensable) au grand rouage du monde et au fonctionnement du grand corps de l'Existant.

Mais gare à l'être humain qui tel un enfant qui prend conscience de ses capacités, de son potentiel et du « pouvoir » qui lui est conféré, aspire progressivement – et inéluctablement – à instrumentaliser son entourage – êtres, choses et objets – pour satisfaire ses désirs et asseoir son autorité et sa domination en soumettant son environnement à ses exigences et à ses caprices. Tel est l'homme d'aujourd'hui à peine sorti des cavernes. Et de l'enfance...

Pourquoi donc la conscience a-t-elle attribué à l'homme cette faculté et cette charge en ce monde ? A quelle fin – et dans quel dessein – a-t-elle recruté les Hommes ? A quelle déroutante mission et à quelle mystérieuse besogne les a-t-elle destinés ? Avait-elle seule-ment envisagé cette obscure période d'excitation et de fébrilité prépubère (pleine de désirs tous azimuts) et cette débauche d'instrumentalisations et de mainmises iniques et mortifères ?

Oh ! Inutile de se perdre en conjectures ou de gloser indéfiniment sur le sujet (nous avons déjà tenté d'explorer quelques hypothèses et quelques pistes dans notre longue réflexion sur la Conscience et l'Existant*)... Disons simplement ici qu'il nous faudra sans doute patienter quelques siècles ou quelques millénaires pour que l'humanité – et ses éventuels descendants ou successeurs – atteignent l'âge de raison. Et puissent enfin agir de façon juste et responsable...

* Voir l'ouvrage La Conscience et l'Existant – passé, présent et devenir – une perspective...

 

 

Un vol d’étourneaux dans le ciel gris et bas. Plusieurs milliers sans doute. On les entend passer dans un frémissement d'ailes et de joie. Plus sûrs de leur trajectoire et de leur itinéraire que nous le sommes de nos pas et de notre voyage... Et je les regarde avec tendresse s’éloigner vers l'horizon.

 

 

Vous arrive-t-il d'avoir l'âme grise et grincheuse ? Non, bien sûr ! Seul le cœur peut être terni par les humeurs et les couleurs... L'âme, elle, demeure toujours légère et joyeuse. Et au pire des heures, elle reste silencieuse. Recroquevillée et immobile au fond du regard...

 

 

Ce qui nous attend ? Pourquoi songer à ces chimères...

Si votre cœur était en paix et votre regard était nu et plein, ce qui est là sous vos yeux* comblerait votre âme. Et vous la regarderiez s'élancer vers le ciel, le cœur tendre et les yeux émus, rejoindre sa terre natale et virevolter dans le vent, indifférente à la bêtise et à la sagesse des hommes, libre de leurs humeurs, de leur ignorance ou de leur prétention. Simplement reconnaissante – si reconnaissante – envers celui qui a su (et qui a pu) la libérer de ses chaînes afin qu'elle regagne son royaume... Heureuse simplement d'être là et de pouvoir offrir sa grâce à tous les yeux. Et qu'ils soient implorants ou aveugles, idiots ou intelligents, teigneux ou taciturnes, elle s'en moque... Sa danse joyeuse n'a d'autre fin qu'elle-même. Et au fond de tous les yeux, une lueur sait reconnaître son innocence et sa beauté.

En vérité, il n'y a que les yeux et le cœur pour s'enliser ainsi dans l'épaisse fumée des pensées et de l'inquiétude. Dans la fange de nos sentiments indécis. Le regard et l'âme, eux, surnagent et dansent au dessus de tous les immondices. Joyeux et ravis de tous les décors pourvu qu'on les ait libérés de leurs geôle – et de leurs attaches...

* ici et maintenant...

 

 

Ce soir, en rentrant de notre promenade sur les berges sauvages de la rivière – saccagées par les pelleteuses et les engins de chantier – un arbre m'a interpellé. Il était digne et un peu penché par les rafales de vent qu'il avait dû endurer toute sa vie. A mon passage, il a grommelé : « Dis aux hommes d'arrêter leur massacre ». Je l'ai regardé avec émotion et tendresse. Et lui ai répondu : « Que puis-je faire ? Les hommes ne savent pas ce qu'ils font*». Et mon aveu d'impuissance l'a rendu plus triste encore. Mais ces paroles ont ranimé – je l'ai senti – au fond de sa sève un regain de révolte et de rébellion. Aussi ai-je ajouté : « Le progrès et la modernité sont en marche ! Rien ni personne ne pourra les arrêter !». L'arbre alors m'a souri avec tristesse et m'a chuchoté à l'oreille : « il ne nous reste donc que les larmes pour pleurer ! ». Et de mes bras impuissants, j'ai entouré avec tendresse son tronc rêche et rugueux. Et nous avons pleuré ensemble en silence...

* Luc 23

 

 

Et je sens le ciel au dessus de nos têtes sourire de nos espoirs et de nos combats. De nos pleurs, de nos cris et de nos plaintes. De nos rires, de nos coups et de nos craintes. De nos caresses et de tous nos enlacements. Et ce sourire est si tendre et si puissant qu'on peut le sentir depuis la terre se déverser – sans discontinuer – sur toutes les âmes du monde.

Plus que tout autre, le ciel aide ceux qui lui sont fidèles. Ceux qui le célèbrent et l'honorent avec sincérité et authenticité. Et ceux qui invitent, avec justesse et humilité, le cœur et les yeux à l'habiter... Sur eux, sa main se fait plus douce et plus tendre... Et l'on sent sa détermination à effacer – en partie* – les aspérités et les rugosités de leur existence pour permettre à leur cœur d'être aussi vide et aussi nu – aussi pur – que leur âme...

* Et ce qui ne peut être gommé constitue – sans doute – l'inévitable actualisation du « karma » passé (au sens bouddhiste ou hindouiste du terme(1)) qui s'épure... et qui devra s'épurer jusqu'à « la dernière goutte »...

(1) Karma : série de causes et d'effets(2) impulsés, engendrés et entretenus par la volition, le désir, l'ignorance et le sentiment illusoire d'exister en tant qu'entité séparée du reste de l'Existant.

(2) D'après notre ressenti, il semblerait qu'il existe un lien très fort entre la création du karma et le sentiment d'être (et de se prendre pour) une entité séparée ainsi que les désirs, les intentions, les aspirations qui y sont associés et les actes nécessaires pour les faire advenir. Ainsi l'individu qui agit simplement (et uniquement) guidé par sa volonté propre (et selon ses exigences et préférences psychiques et personnelles) crée malgré lui quantité de mouvements aux effets et conséquences très nombreux. Au contraire, celui qui n'obéit qu'aux injonctions du ciel et du réel (autrement dit qui agit de façon impersonnelle selon l'exigence des situations) ne crée aucun mouvement ni effet susceptible d'être engrangé « karmiquement » (ou, si vous préférez, d'être emmagasiné dans « le karma personnel »). Selon notre expérience, il semble assez clair et évident que moins le personnage (le corps-mental auquel nous nous identifions habituellement) est actif ou activé, moins il existe d'intentions et de désirs, plus le regard demeure dans l'espace de conscience impersonnel nu et vierge, plus les actes jaillissent de façon neutre et juste, et moins les effets et les mouvements créés sont nombreux, moins le « karma personnel » accumule ou amasse de mouvements et d'effets qui devront, tôt ou tard, être actualisés et s'épurer... Ainsi lorsque le regard impersonnel est totalement habité et que le personnage (et le plan personnel) sont totalement inactifs, il n'existe aucune création karmique car les actions et les actes suivent le cours naturel des choses et n'obéissent qu'aux inévitables et incontournables mouvements énergétiques...

 

 

Rien n'est plus doux pour l'âme qu'une sieste au soleil. Lorsque l'esprit et le cœur, apaisés, s'abandonnent aux délices de la terre et du ciel...

 

 

Les hommes et les jours indigents réclament leur poids de jeux et de labeur. Et nous n'avons rien à leur offrir. Excepté nos mains vides, notre cœur nu et la joie de notre âme légère, toujours heureuse d’accompagner et d'égayer ceux qu'elle rencontre...

 

 

Ah ! L'insondable richesse du regard ! La misère pourrait bien recouvrir la terre entière, jamais nous ne connaîtrons la pauvreté... Que peut-on ôter au ciel ? Tout lui appartient. Et tout s'y reflète...

Et l'âme accompagne les pas et le cœur sereins sur tous les chemins...

 

 

Le carcan des heures fébriles où tu retiens ton âme prisonnière. Enchaînée à tes désirs. Comment pourrait-elle t'aider ? Regarde donc le ciel ! Il ne possède rien. Et jouit de tout. Et regarde les hommes ! Ils s'approprient et possèdent une infime part de la terre. Et ne jouissent de presque rien. Leurs possessions ne leur procurent qu'ennuis et tracas...

 

 

Il est étonnant de voir certains arbres conserver leurs feuilles durant l'hiver. Elles ont beau être mortes, toutes jaunes, toutes sèches ou toutes flétries, elles restent fidèles à leur vieil ami. Comme si elles avaient peur de leur destin. De disparaître à jamais dans la terre. A moins que ce ne soit l'arbre qui les retient pour se donner un peu de compagnie et échapper à la solitude ou pour se soustraire à la nudité et réchauffer sa sève et son cœur pendant la froide saison.

 

 

Ah ! Qu'il y a d'étranges alliances et d'unions inattendues et incongrues en ce monde... chacun ne cherchant – le plus souvent – qu'à servir ses intérêts et à assurer sa sécurité et son bien-être... Ah ! Comme toutes les créatures semblent fragiles, ingrates et misérables sur cette terre...

Mais peut-on vraiment les juger ou les blâmer ? N'appartiennent-elles pas au grand corps que constitue l'Existant ? N'en sont-elles pas les parties ou les composants ? Aurait-on l'idée de juger le nez, la moelle épinière, l'estomac, les cellules épithéliales, le biceps ou les parties génitales qui essaieraient de tirer parti de l'organisme auquel ils appartiennent ? A-t-on déjà vu le pied ou la jambe blessé(e) remercier la main qui la soigne ? A-t-on déjà vu la main tirer orgueil de son geste ? A-t-on déjà vu le cerveau dénigrer l'ignorance ou la bêtise des autres organes ? A-t-on déjà vu le cœur se plaindre de maintenir en vie l'ensemble du corps ? Et s'offusque-t-on de ces comportements – de ce qui pourrait passer pour une forme d'ingratitude ? Non ! Chacun agit selon sa fonction, ses capacités et ses compétences, assurant son rôle et assumant sa tâche. Et tous s'entraident et coopèrent – et parfois même dans le conflit – pour assurer le fonctionnement de chaque élément, de chaque partie et de l'ensemble de l'organisme dont leur existence dépend...

En définitive, il n'y a que les hommes – ces imbéciles – pour abuser, exagérer, exploiter, tirer au flanc, usurper, tricher et outrepasser leurs prérogatives, pour se plaindre ou s’enorgueillir de leur tâche. Et pour monnayer leur travail et leur savoir-faire. Et se faire rémunérer. Et – qui plus est – pour se réjouir de ces émoluments. Tous – ou quasiment tous – heureux et fiers d'appartenir, d'alimenter – et même d'engraisser – le terrifiant et l'abominable système artificiel qu'ils ont créé – et qui sera sans doute amené à se complexifier, à s'artificialiser et à se virtualiser bien davantage dans les sombres années qui viennent... Ah ! Ces hommes ! Quels pauvres idiots...

 

 

En voyant certains hommes – et leur comportement – on a parfois le sentiment qu'il y a en eux aucune (ou quasiment aucune) conscience. Ils semblent, en effet, habités par moins (et parfois par beaucoup moins) de conscience qu'un chien ou un arbre...

Parmi ces individus, certains – bien souvent – posent quelques difficultés aux hommes et à la société humaine mais ils constituent également une source de « nuisance » pour l'ensemble du Vivant et de l'Existant. Et bien que nous ayons conscience que leur existence – et leurs actes – ont une place(1) et un rôle(2) dans l'économie générale du système, leur « intelligence » (intelligence entre guillemets) ou disons plutôt leurs capacités cognitives d'animal « supérieur » (animal supérieur également entre guillemets...) sont utilisées presque sans garde-fou (excepté peut-être la loi des hommes) à seule fin de servir leurs intérêts personnels et leurs penchants instinctuels... et grâce à elles, ils sont capables d'élaborer des ruses et des stratégies fort habiles qui peuvent causer bien plus de préjudices et de dommages sur leur environnement et leur entourage qu'aucun autre animal...

(1) Dans la mesure où ils se manifestent...

(2) En particulier dans l'actualisation et l'épuration « karmiques » chez les êtres « victimes » de leurs méfaits...

Et quelles que soient les époques, nulle société n'a jamais su quoi faire de ce genre d'individus... Espérons simplement que le monde contemporain sache en limiter le nombre, endiguer leur recrudescence et contrecarrer ou restreindre leurs effets délétères tant sur le plan individuel que collectif... Mais en dépit de l'évolution sociétale actuelle (davantage de lois, de droit et de sécurité mais aussi davantage d'éducation, de savoirs, d'équité et de respect pour le Vivant, la biodiversité et l'environnement) et malgré l'existence de quelques mouvements individuels et collectifs de résistance et d'opposition et l'évolution naturelle des sociétés humaines*, d'autres facteurs, en particulier (et entre autres) la montée exponentielle de l'individualisme, l'efflorescence des désirs et l'effarante progression des possibilités pourraient s'avérer un terrain fort propice à l'exacerbation de ce type de comportement mais également au développement, voire à la généralisation, de ce genre d'individualités... Sur ce point (comme sur tout autre, bien sûr), l'avenir, évidement, nous éclairera...

* Voir l'ouvrage La Conscience et l'Existant...

 

 

En ces jours d'hiver ensoleillés – et aux températures clémentes –, les abeilles ont quitté leurs ruches. Et se sont remises à leur labeur. On les voit butiner un peu partout sur les pelouses fleuries autour de la maison. En précieuses et infatigables ouvrières de la terre, elles poursuivent inlassablement leur tâche. Et hormis les conditions climatiques, rien ne saurait les soustraire à leur besogne...

 

 

Jouer avec le regard – tantôt plongé à l'avant-plan (dans le personnage) tantôt posé à l'arrière-plan (au sein de l'espace nu et vierge de l'impersonnalité). Et se laisser devenir le jouet du ciel et de la terre. Voilà sans doute – diront certains – un jeu bien étrange... Mais que voulez-vous ? Au cours de mon existence, bien peu d'amusements et de « distractions » ont su susciter mon intérêt et obtenir ma sympathie... aussi suis-je ravi de m'y adonner lorsque l'occasion m'est offerte. Et puis qu'y-a-t-il à blâmer ? Sur cette terre, chacun ne s'amuse-t-il pas comme il peut... avec ce qu'il peut ?

 

 

Le ciel est le territoire de l'âme. Et la terre celui du corps, du cœur et de l'esprit. Lorsque ceux-ci sont recroquevillés, le ciel ne peut les aider. Il peut même leur paraître effrayant. Seule l'âme peut s'y réfugier lorsqu'il lui arrive d'être apeurée. Lorsque l'individualité habite son territoire (la terre) avec aisance, le corps, l'esprit et le cœur sont en paix. Et l'âme, légère, peut alors rejoindre son fief, le ciel.

La tranquillité du corps et de l'esprit, la paix du cœur et la légèreté de l'âme procurent à l'être une joie sans pareille. La terre et le ciel peuvent alors s'unir et diriger les pas en tous lieux. Le corps, l'esprit, le cœur et l'âme y acquiesceront sans crainte ni retenue, heureux d'obtempérer à leurs tendres et bienveillantes injonctions. Et de servir, avec ferveur et détachement, les incontournables exigences du réel.

 

 

Le ciel – et son immensité – sur les collines minuscules et majestueuses. Mes yeux ne s'en lassent pas. Et serait-il le seul paysage qu'il me soit donné à voir pour le restant de mes jours, je ne regretterais – pour rien au monde – mon fugace passage sur terre... sur ce petit coin de colline ouvert sur le ciel...

 

 

Quelle joie lorsque tout – tout ce qui existe en ce monde et ailleurs – vous parle, vous enlace et vous saute au cœur ! Le ciel, la terre et l'ensemble de l'Existant, excepté peut-être quelques esprits particulièrement grincheux ou malveillants, deviennent de tendres amis... Et vous savez que rien – pas même la mort – ne pourra jamais vous désunir...

Si tous les êtres pouvaient ressentir cet infini, cette joie et cette douceur, que la vie, pour chacun, serait douce et belle ! Et le monde enfin serait reconnu comme un Eden inestimable...

 

 

Qui en ce monde connaît – et sait reconnaître – les traces, la marque et le sceau de l'invisible ? Et qui a conscience que ses effets sont bien plus décisifs et déterminants que les conséquences – évidentes et prévisibles – du tangible et de l'apparent – du réel grossier et observable ?

 

 

Derrière la maison, quelques fleurs de pissenlit et quelques renoncules ont décidé d'affronter l'hiver. Leur jaune est si vif qu'on dirait de petits soleils.

En ces jours d'hiver peu rigoureux, nous croisons aussi autour de la maison et au cours de nos promenades dans les collines, quelques insectes ; scarabées, fourmis solitaires, mouches et moucherons qui se sont peut-être sentis, eux aussi, suffisamment armés et aguerris pour passer l'hiver. Et à leur passage, nous les regardons avec tendresse et ravissement en saluant leur courage et la vigueur du Vivant, toujours prompt et disposé à affronter les épreuves et de nouveaux défis.

Mais nous ne pouvons néanmoins nous empêcher d'avoir une pensée pour leur frères d'aujourd'hui et ceux des années passées – aux hivers plus rigoureux – et pour tous les animaux des bois et des champs, des prés et des forêts ; souris, mulots et autres petits rongeurs que le froid a impitoyablement décimés. Sans compter, bien sûr, les innombrables animaux sauvages et domestiques qui doivent endurer les intempéries et la froideur des jours et des nuits et les milliers (en nos riches contrées) et les millions partout ailleurs de personnes sans abri* vivant dans la rue. Nul n'y songe mais combien d'hommes seraient-ils capables de vivre ainsi, nus et sans ressource, au cours de cette impitoyable saison ?

* Comment une société digne de ce nom autorise-t-elle ce genre d’infamie : laisser des êtres vivre et mourir dans le froid au cœur des villes et aux portes des campagnes... il y aurait évidemment beaucoup à dire sur le sujet et sur bien d'autres thématiques sociétales aussi indécentes et ignominieuses...

 

 

Le ciel est toujours d'excellente compagnie. Pourvu qu'on en connaisse les signes et les règles. Et que l'on sache l'habiter. Sinon il apparaît comme une chimère imbécile ou une vague promesse pour les âmes crédules ou comme un élément insignifiant du décor. Ou, même pire, comme une menace qui frappe sans discernement...

 

 

Sur un chemin de campagne, un caillou m'a arrêté pour me demander sa route. J'ai d'abord été surpris. Puis je l'ai regardé en souriant. Et j'ai levé les yeux au ciel.

 

 

Que peut-on faire face à la bêtise, à la misère et à la violence du monde ? Rien. Simplement pleurer et sourire. Et avoir la patience d'attendre que les esprits et les cœurs s'éveillent...

En guise de médiocre exutoire à la colère que font parfois surgir la bêtise, la misère et la violence du monde, il m'arrive de compléter une longue liste – dressée un jour d'accès clastique mémorable – des êtres, des actes et des agissements que j'aimerais voir bannis à jamais de la surface de la terre. En voici un court extrait (que vous pouvez, bien sûr, augmenter ou agrémenter selon vos propres doléances) : […] les chasseurs, les propriétaires, les prétentieux, les arrogants, la mauvaise foi, la cruauté, la méchanceté gratuite, les conversations stupides, les discussions insipides, la maltraitance (en particulier envers les animaux), la musique tonitruante, les êtres autocentrés (interlocuteurs, voisins et automobilistes en particulier), les individus insensibles et irrespectueux, la malveillance, les narcissiques, l'indifférence, la crânerie, la crasse intellectuelle, les plaintes, les jérémiades illégitimes, l'argent, le pouvoir, l'abus de faiblesse, la pingrerie, la platitude, les malotrus, les acariâtres, l'aveuglement, les circonvolutions intellectuelles sans intérêt, le racisme, la guerre, les marques, la publicité, la lâcheté, la maniaquerie, le commerce, la richesse, le luxe, le désœuvrement mal assumé, les cris, les rires idiots et les sourires forcés, la malhonnêteté, les passes-temps, la fourberie, le divertissement occupationnel, l'outrance, les calculateurs, les lois et les règlements iniques ou stupides, le favoritisme, les lèche-culs, les mielleux, les démagogues, les populistes, l'hystérie des foules, le parti pris, les « trop normaux », les profiteurs, les moralisateurs, la connerie et les connards de tout poil...

En relisant cette liste (dans son intégralité), je suis frappé par sa longueur. Et par cette incroyable énumération. Et je constate – avec un certain effroi – que bien des choses heurtent, blessent ou insupportent mon cœur et mon esprit...

 

 

A la nuit tombée, lorsque les hommes ont déserté la terre pour regagner leur foyer (leur petit cube de béton), la nature, les montagnes et les forêts reprennent leurs droits. Et retrouvent leur identité profonde – éminemment belle et sauvage. Si indomptable. Pour vibrer enfin à leur vraie mesure. Dimensions originelles que les hommes, en dépit de leurs efforts et de leurs saccages, ne parviendront jamais à meurtrir ni à apprivoiser...

Il faut fréquenter la terre, la nature, les montagnes et les forêts à ces heures perdues et dépeuplées – lorsque nul visage humain ne pollue ou ne dénature les lieux avec ses engins, ses rires ou ses bavardages – et les respecter profondément (et sans doute avoir soi-même l'âme un peu farouche et sauvage) pour vivre au plus proche de leur profondeurs et les ressentir si intimement qu'on entend battre leur cœur. Et dans cette intimité, la terre, la nature, les montagnes et les forêts vous ouvrent leurs portes et vous livrent leurs mystères et leurs secrets... et il arrive même qu'elles vous autorisent à vous unir à elles pour que vous puissiez goûter à leur force et à leur beauté...

 

 

C'est au cœur de la nature – et en particulier au milieu des collines – loin de toute présence humaine, séparé des individus, de leurs constructions, de leurs inventions et de leurs bruits par plusieurs vallons, quelques a-pics et quelques falaises, à plusieurs kilomètres de tout réseau routier, au cœur du silence... entouré d'êtres à plumes et à poils, munis d'une carapace ou d'un exosquelette parmi les arbres, les herbes, les pierres et les rochers et sous le ciel et les nuages que mon cœur se réjouit et se sent à son aise – et pour tout dire – à sa place. Il ressent avec la nature et ses représentants les moins dénaturés – et les moins humanisés – une connivence, une complicité et une résonance qu'aucun être humain ne pourra jamais lui offrir...

 

 

Et où allons-nous maintenant ? demande une (petite) voix lointaine et apeurée. N'aie crainte ! lui dit-on, en présence du regard, chaque pas se suffit à lui-même...

 

6 décembre 2017

Carnet n°70 Notes sensibles* et le monde en désamour

Journal / 2016 / L'exploration de l'être

* ou sérieuses (bien trop sérieuses)...

Au cœur du silence et des collines, mon âme exulte. Et je la vois danser dans le ciel avec le vent frais au dessus de la plaine où les hommes tournoient bruyamment. Dans leur agitation furieuse. Il n'y a que les cailloux et les herbes folles pour comprendre notre joie. Le ciel et le vent leur ont confié leur secret. Et nous dansons ensemble dans le silence parmi les arbres et les insectes que notre âme a conviés à la fête. Ah ! Quelle douce cérémonie ! Et quelle joyeuse célébration que la nôtre ! On entend Dieu taper des mains, le visage illuminé d'un immense sourire...

_

_

Un petit papillon solitaire et courageux – rescapé de la belle saison – volant dans la nuit froide de l'hiver. Et je le regarde, ému, s'enfoncer dans l'obscurité glaciale de ce début janvier. Et le cœur chaviré, je demande aussitôt à mon âme – et au ciel – de le soutenir et de le réconforter dans cette terrible épreuve saisonnale. Et une voix implorante, en moi, qui susurre : « De grâce ! Faites qu'ils m'entendent ! ».

 

 

En marchant sur les chemins, je n'ose piétiner les herbes folles – fragiles et menues – qui parsèment notre itinéraire. Je prends garde de ne pas les écraser. Pour rien au monde, je ne voudrais les meurtrir ou les offenser.

 

 

Les herbes des chemins – comme l'âme des poètes – sont invisibles aux yeux des hommes. Jugées trop banales et insignifiantes pour y prêter attention ou s'y attarder. Ils passent donc leur chemin – à vive allure le plus souvent – soucieux de dénicher ailleurs des merveilles et un trésor – qui sait ? – dignes de ce qu'ils imaginent être... Ah ! Comme mes frères sont aveugles !

 

 

Nous autres, chiens, herbes des chemins, poètes misérables et va-nu-pieds aux habits crasseux, nous avons l'âme humble. Voilà pourquoi le rien et l'ordinaire, le fragile et l'éphémère, le bancal et le mal aimé nous émeuvent et nous émerveillent. Nous comblent de joie.

 

 

Et dans nos vêtement élimés et crottés de boue et nos vieux godillots troués et mouillés par la pluie, nous jubilons. Heureux du ciel et de l'averse. Heureux du chemin. De tous les chemins que nous arpentons inlassablement pour saluer nos frères misérables. Nos modestes semblables. Et nous rions de notre misère et de notre joie. Heureux de nous retrouver et d'être ensemble. Louant le ciel et nous réjouissant en silence d'appartenir à la fange de la terre. A la merveilleuse et si précieuse fange de la terre...

 

 

S’asseoir (et s'allonger parfois) sur un chemin de campagne sauvage face à l'immensité du ciel, avec mon carnet ou un livre de poèmes dans les mains ou qui patiente sagement dans ma besace, voilà l'un des rares endroits au monde où je me sens à ma place. A ma modeste place parmi l'innombrable et l'infini de l'univers. La place que Dieu a trouvée pour contenter mon âme. Et la fonction qu'il nous a offerte (ou peut-être – qui sait ? – à laquelle il nous a assignés...).

 

 

A cette place, le regard – à la fois humble et souverain – au plus près de l'herbe et des cailloux du chemin – peut embrasser le ciel et tous les horizons de la terre. Et de cette humilité à goûter l'ineffable et l'unité naît une joie indicible. Le sentiment enivrant et éminemment tendre de l'harmonie et de la perfection que rien ne pourrait gâter. Pas même quelques pensées crasseuses ou quelques inquiétudes à propos de notre existence ou de notre avenir improbable – et peut-être compromis...

 

 

J'aime cette heure crépusculaire où le jour et la nuit s'étreignent tendrement(1). Et dans cette longue étreinte, on devine tous les secrets du monde(2). Comme si le ciel nous révélait une partie de son mystère(3).

(1) Où on ne sait s'il fait encore jour ou déjà nuit...

(2) Le subtil et inextricable entremêlement de tout...

(3) L'accueil et le reflet de toutes les palettes et nuances de l'Existant...

 

 

Que la mort ne soit qu'un passage (pour l'esprit) et une transformation (pour le corps), il n'y a pas à en douter. Ainsi en est-il aussi, bien sûr, de la vie...

En définitive, vie et mort(1) ne sont que des états(2) dans la présence du regard(3)...

(1) Et tout ce qu'elles contiennent et ce qui les compose...

(2) Des phénomènes provisoires (et transitoires).

(3) La conscience éternelle.

 

 

On ne trouve de poésie que dans le regard.

Les poètes et les artistes authentiques savent le faire passer (le regard) – à travers leurs âme et leur corps – jusque dans leurs mains pour le déposer sur une feuille blanche, une toile, un morceau de terre, de bois ou d'acier.

Ce n'est jamais le monde qui est poétique, enchanté ou merveilleux... Le monde est toujours ce qu'il est. Jamais il ne se teinte de bien ou de mal, de beau ou de laid, de bon ou de mauvais. Le monde ne connaît ni l'essentiel ni le dérisoire, ni le sacré ni le profane, ni le pur ni l'impur, ni l'agrément ni le désagrément, ni l'obscur ni le lumineux. Toujours il est ce qu'il est...

Seul le regard qu'on porte sur lui transforme sa neutralité (la neutralité de ce qui est) en merveilleux ou en enchantement, en enfer, en horreur ou en ignominie.

Mais la seule grâce est dans le regard nu et plein – désencombré de toutes les colorations et préférences psychiques et qui ressent la totale plénitude de l'Être* sans la moindre dépendance au monde, à ses contenus et à ses phénomènes...

* La totale plénitude de la présence du regard auto-suffisant...

 

 

Quelques oiseaux perchés au sommet d'un arbre – posés sur les plus hautes branches d'un peuplier dénudé par l'hiver. Tous parfaitement immobiles. Scrutant le ciel et l'horizon. Attendant l'infini peut-être...

 

 

Le monde (humain) n'est qu'un univers d'idées, d'images et de représentations. Et pourtant l'essentiel en cette vie ne relève ni du concept ni de l'imaginaire. L'essentiel en cette vie ne se pense pas. Il se goûte, s'éprouve et se ressent. Et en ce monde rares sont ceux qui savent vivre au delà de la pensée dans le regard sensible et la sensorialité ; deux aspects fondamentaux et déterminants de l'Être. De la présence et de l'impersonnalité.

 

 

Ah ! Cette douce et inévitable solitude de l'Être ! Vivant et éprouvant le regard* comme le seul et unique sujet en ce monde d'objets et de phénomènes. Eternellement ramené à lui-même. Sans âme sœur ni alter ego. Eprouvant pourtant dans l'unité avec ce qui est – à travers la sensibilité et la sensorialité – un amour et une tendresse inégalés et inégalables à l'égard du monde.

* La conscience

 

 

Le plus minuscule insecte est mon frère. Et j'en suis le dévoué serviteur. La présence au service de toutes les créatures. Et le plus humble de tous est celui que j'honore peut-être plus que tout autre tant il est malmené par ses frères aveugles et ignorants...

 

 

Et ce vent glacial dans le cœur des hommes qui balaye leur âme. Et la réduit au silence.

Au tréfonds de leur chair, il y a un cri silencieux. Un cœur innocent qui ne rêve que d'éclore. Une colombe qui ne rêve que de s'envoler. Et je vois la naïveté de leurs gestes les maintenir au fond du puits. Et les laisser prisonniers du tombeau...

 

 

Au cœur du silence et des collines, mon âme exulte. Et je la vois danser dans le ciel avec le vent frais au dessus de la plaine où les hommes tournoient bruyamment. Dans leur agitation furieuse.

Il n'y a que les cailloux et les herbes folles pour comprendre notre joie. Le ciel et le vent leur ont confié leur secret. Et nous dansons ensemble dans le silence parmi les arbres et les insectes que notre âme a conviés à la fête. Ah ! Quelle douce cérémonie ! Et quelle joyeuse célébration que la nôtre ! On entend Dieu taper des mains, le visage illuminé d'un immense sourire...

 

 

Après chaque promenade – et souvent au cœur de la marche – je remercie les pierres et les herbes folles de m'accueillir. Et de tenir compagnie à mon âme ivre de joie. D'inviter mes pas à leur danse silencieuse.

 

 

Il n'y a que le ciel pour rire ou pleurer. Nous ne sommes que ses instruments dérisoires...

 

 

Philosophie et poésie. La première parle à l'esprit. Et la seconde au cœur. L'homme qui chemine a besoin des deux. Et lorsque le corps s'en mêle, l'âme est prête...

 

 

Je me souviens avec émotion de mes longs tête-à-tête(1), de mes poignants cœur-à-cœur(2) et de mes étranges et inattendus corps-à-corps(3) avec la présence lors du passage vers l'impersonnel.

(1) Compréhension sous forme de dialogues intérieurs ou à haute voix – intégration à l'Être et linéaments de l'incarnation de la connaissance...

(2) A travers les émotions et la sensibilité.

(3) A travers les balbutiements de la sensorialité et la découverte des ressentis corporels et énergétiques.

 

 

Que dire au jour et à la nuit qui savent déjà...

 

 

Depuis le ciel – depuis le balcon du ciel – la vie est sans pareille. Y flotte un air de joie. Le cœur est en paix. Et l'âme danse en silence avec toutes les créatures de la terre.

Inutile de voyager jusqu'aux confins de l'univers pour découvrir ce monde – ce monde inconnu – si étranger aux hommes. La traversée est accessible à chacun lorsque le cœur s'est défait de ses envies et de ses espoirs et que l'esprit s'est vidé de ses croyances et de ses idéaux. L'âme alors s'envole sans effort pour ce pays de cocagne où le silence, la joie et la paix coulent sur les âmes nues, dépouillées de tout orgueil et de toute captation, où la seule gloire est l'humilité, et où résonnent avec force – à travers la puissance de vie – l'Amour et l'Intelligence de la conscience.

L'être et le monde s'unissent alors et deviennent Un. Et ils s'enlacent jusqu'à l'infini dans des jeux qui autrefois nous glaçaient les sangs et qui nous révèlent à présent – à travers les mille étreintes*, les milles pas et les mille danses étranges des créatures du monde – la grâce de tous les liens* et le merveilleux du regard, amoureux de tous les accouplements*...

* Qu'elles ou qu'ils soient tendres, brutaux ou barbares...

 

 

Depuis la naissance de l'humanité – et en dépit de quelques signes de vertu et de noblesse (ou, si vous préférez, de quelques manifestations d'amour et d'intelligence...) tels que l'insatiable curiosité des hommes, leurs incessants questionnements et leurs interrogations, leur recherche de savoirs et de connaissance, l'instauration progressive du partage et de l'équité et quelques autres judicieuses et précieuses créations ou inventions –, l'essentiel des actions humaines pourrait se résumer à quelques funestes activités : appropriations, exploitations, saccages, tueries et pollutions massives organisées, instrumentalisations... Quantité d'actes qui résonnent comme une offense à l'innocence, à l'Amour et à l'Intelligence.

Et cette habituelle bêtise aveugle et cette commune – et si souvent cruelle – ignorance humaine suscitent parfois en moi une terrible colère qu'il m'arrive, dans ces instants de véhémence, de demander à Dieu de me faire la courte échelle – et de placer mon regard si haut et si loin – pour pouvoir enfin regarder le monde (humain) le cœur apaisé. Sans haine, sans ressentiment ni mépris pour mes frères imbéciles. Si grossiers et barbares...

 

 

N'être rien (mine de rien) est sans doute en ce monde l'une des tâches les plus longues, les plus âpres et les plus ardues qui soient... Bien peu d'hommes ont le cœur assez mûr pour laisser leur âme courir sur ce magnifique et douloureux chemin de néant qui s'ouvre – qui finit par s'ouvrir – sur l'espace céleste si plein, si joyeux, si silencieux. Combien d'hommes ont su pénétrer en ce lieu de félicité qui offre et révèle au plus humble comme au plus prestigieux, à la plus grande misère comme à la plus grande joie sa totale et entière sacralité. Voilà un grand mystère dont Dieu seul, sans doute, connaît le secret...

 

 

La terre est un berceau et un cimetière à ciel ouvert. Le monde s'y accouple, y procrée, s'y étreint, s'y déchire et y meurt. Monde de désirs et de nécessité épargnant le ciel de ses jeux, de ses massacres et de ses scories...

 

 

Le défilé des jours tristes et heureux dans le regard silencieux. Joyeux en toutes circonstances.

Une fois ce regard habité, tout peut-il donc arriver ? Peut-être... sans doute... Et qu'importe ! Laissons donc à la vie le soin d'en décider...

 

 

Le ciel a plus à dire que les hommes. Mais son langage est silencieux. Le bruit leur est plus commode. Ils croient entendre ce que le monde leur dit. Et ce verbiage les satisfait. Les hommes ne savent écouter sinon ils s'agenouilleraient face au ciel et vénéreraient la solitude...

Il y a dans la solitude du ciel et la diversité de la terre tout ce qui nous est nécessaire... Rien ne saurait nous combler davantage.

Toujours il y a le ciel sur lequel on peut compter. Et les quelques amis que la terre nous a offerts. Et cela est bien suffisant pour vivre. Et marcher sur son chemin d'homme...

 

 

Un pas après l'autre dans le regard infini. Ainsi va toute chose... L'herbe qui pousse, l'enfant qui grandit... Tout, en ce monde, tire sa force de la terre comme du ciel.

 

 

Une vie de riens et de misères. Et pourtant. Et pourtant*...

* Hommage à Issa.

 

 

Et dans la pâleur étoilée du soir, je marche. L'âme sereine. Soucieuse ni d'hier, ni d'aujourd'hui, ni de demain. Pleinement présente à cet instant du jour. Et à toutes les formes du monde qui dansent sous ses yeux ravis...

 

 

En traitant les imbéciles de naïfs, mon âme s'attendrit. Oui, je sens mon âme s'attendrir. Comme si elle les blâmait avec moins de férocité. Et excusait en partie (en partie seulement) leur ignorance, leur prétention et leur barbarie.

Et d'autres fois, mon cœur les juge ou les invective avec plus d'ardeur comme si le mot « connards » lui seyait davantage (ou lui semblait plus juste) pour qualifier ses « frères grossiers et barbares ». Aussi que puis-je faire sinon laisser mon cœur éructer ses ultimes relents de véhémence et d'acrimonie... car, lui aussi, comme les autres, est ignare et naïf. Et comme les autres, il convient de l'aimer tel qu'il est. Pour qu'il apprenne à grandir et devienne, comme mon âme, apte à l'Amour. Capable d'aimer le monde tel qu'il se manifeste. Et se présente à nous...

Accueillir et prendre soin de ce qui nous échoit. Pleinement et sans retenue. Aimer tendrement et sans condition. Le regard n'a – et ne connaît – d'autres lois...

 

 

Les arbres pleurent. Bien sûr que les arbres peuvent pleurer... Pleurer et gémir. J'ai entendu leurs plaintes et leurs tremblements à l'approche d'un groupe de bûcherons. Puis, le bruit des tronçonneuses les a recouverts. Et c'est toute la forêt qui s'est mise à pleurer, triste du saccage. Et du sort réservé à sa communauté.

 

 

J'entends les pas du vent. Et ceux des hommes qui tournoient sans fin dans la plaine. Comme égarés...

 

 

Un champ de ruines. Herbes, arbres et arbustes arrachés et déracinés qui jonchent le sol. Tas de cadavres de bois, de feuilles et de feuillages. Cimetière à ciel ouvert où s'entassent les troncs et les branchages ! Et au loin, j'entends le cri atroce – et féroce – des engins de chantiers et des pelleteuses qui saccagent le territoire sauvage, pays des arbres et royaume des animaux, détruisant et recouvrant la vie sur leur terrible passage. Vision d'apocalypse ! Et infâme barbarie qui, sous prétexte de progrès et de modernité, arrache, anéantit, exproprie, s'approprie, égalise, aplanit, recouvre et bétonne. Détruit le monde, la terre et la vie.

Et qui pour s'en offusquer ? Pour résister à la folie organisée et à la furie des masses ? Quelles armes avons-nous sinon le cœur et l'Amour, impuissants face à l'extermination furieuse des Hommes ? Nous reste alors les larmes pour pleurer...

 

 

Rien. Il n'y a rien en ce monde. Excepté le regard. Le ciel et la terre. Le soleil pour se réchauffer. La nuit glaciale. Et le sommeil des hommes qui rêvent et se reposent. Ainsi est l'existence terrestre. Pleine de masques, de jeux, de rires et de massacres. Et nos pleurs que le vent emporte au loin. Au creux du cœur où réside l'abîme qui ouvre le regard sur l'infini... N'espère rien d'autre de ce monde. Sinon tes larmes couleront tant qu'existera la terre...

 

 

Pour écrire un fragment (une perception, un sentiment, un moment de vie, une « vérité »), il faut l'avoir vécu. Qu'il ait profondément entaillé la chair. Jusqu'au plus profond de l'âme. Ensuite le cœur en dispose. Il le lance dans le vent que la main de Dieu dépose sur la page.

Je crois que tous les poètes écrivent ainsi. Les autres imaginent l'être ou en revêtent les habits dorés. Ce sont des imposteurs. Nul ne peut s'en octroyer le titre.

La poésie est un jeu subtil entre l'âme, le cœur et le ciel. Et c'est lui, en définitive, qui décide de transpercer ceux qui seront ses dépositaires. Il les choisit avec le regard nu et clair, avec l'âme humble et dépouillée et avec le cœur chaviré de tristesse et de tendresse. Le ciel alors s'y immisce pour impulser les mots. Et guider la parole. Le reste n'est que littérature qui s'écrit sur des tables encombrées. Et par des littérateurs prétentieux et ampoulés. La poésie, elle, est fille du vent et du ciel. Elle ne peut naître que de l'humilité et de l'effacement.

 

 

La vie nous apprend à nous agenouiller. Souvent dans les larmes et la souffrance. Celui qui sait s'agenouiller dans la joie, celui-là est sauvé... Il a compris le ciel. Il sait qu'il se cache dans les cailloux et les herbes des chemins. Sur le sol dur et froid. Face contre terre, le cœur humble et léger, l'âme alors s'envole, retrouve sa liberté – sa patrie originelle, le ciel – pour danser dans les mains de Dieu.

 

 

Des milliers de corneilles dansent dans le vent frais de l'hiver. Heureuses habitantes du ciel tournoyant dans un étrange et joyeux balai de cris et d'arabesques. Peut-être (et sans doute à leur insu) sont-elles plus proches de Dieu – et de la vérité – que bien des hommes...

 

 

Un poème est une sculpture. Composé avec le plus étrange et le plus impalpable des matériaux (et sans doute aussi avec le plus virtuel de tous...) : les mots. Comme un totem lancé au ciel, fait de signes minuscules – à la fois graphiques et sonores – symboles qui parlent à l'esprit comme au cœur. Et voués (surtout) à être entendus par l'âme...

 

 

Le regard large, profond et ouvert. Et le tendre effleurement du corps sur la surface de la terre comme une douce caresse, soucieuse de chérir ce qu'elle rencontre et ce qu'elle touche. Loin – très loin – de la funeste main des hommes qui détruit, saccage, prélève et s'approprie...

 

 

Ah ! La vie ! Quelle incroyable – et quelle insensée – symphonie orchestrée avec génie – un génie inégalable – où chacun est dirigé (car chacun est musicien et participe au concert)... où les notes se chevauchent, s'emmêlent et se répondent avec maestria* ! Et où nul ne peut jouer une autre partition que la sienne !

* Sans jamais la moindre fausse note ! Car même ce qui ressemble à des dissonances (pour le psychisme) a toute sa place dans le morceau...

 

*

 

Nous regardons les vivants et les morts du haut de nos illusions. Et de nos espoirs. Au ras du sol. Pauvres âmes immatures...

 

 

Regarder le monde, les yeux posés à égale distance de la terre et du ciel. Et sur les phénomènes, le regard devient juste et lucide. Il les éclaire de façon appropriée. Et impulse les pas, les gestes et les paroles exigés par les situations.

 

 

La part sauvage et indomptable de l’âme. Qui n'est fidèle qu’à son destin. Et dans son face-à-face – et son jeu – avec le monde, on devine tous ses secrets.

 

 

Au gré des circonstances, l’âme se promène entre terre et ciel. Tantôt au ras de l’herbe, tantôt près des nuages. Selon les besoins et les situations. Selon l’implication que le monde lui réclame.

 

 

Pour le passant – et l’infatigable marcheur – il n’y a nul territoire. Nulle frontière. Nul horizon. Il n’y a que la foulée dans laquelle il est tout entier...

 

 

Murs de pierres et éboulis délimitent et parsèment notre vie. Peu de choses peuvent émerger de cet espace confiné et de ces édifications (bien peu d’amour et d’intelligence en tout cas). Il n’y a (bien souvent) que les ruines pour ouvrir l’esprit, le cœur et l’horizon...

 

 

Le craquement des feuilles mortes sous les pas. Le lent glissement de la silhouette dans les paysages. Comme une longue (et tendre) caresse à la terre au cœur de l’hiver. Et c’est toute l’âme du monde – tremblante et réconfortée – qui vous remercie en silence. Dans un long murmure. En posant sur votre front incliné un imperceptible baiser de gratitude...

 

 

En passant devant une église (une vieille église abandonnée au milieu des collines), secoué de frissons. La vibration du sacré peut-être...

Comme si le Divin avait recouvert la terre – toute la surface de la terre. Ouvrant le monde et l’instant comme des temples séculiers où le plus humble (le plus profane diraient les « faux initiés ») vibre de la plus haute sacralité...

 

 

La lumière du jour finissant éclaire le monde. Et lui offre un relief différent. A la fois plus doux et plus saillant. Comme s’il nous invitait à une plus grande proximité. A une plus profonde intimité...

 

 

Au loin, les ouvriers agricoles penchés dans les champs. Le corps et les mains plongés dans le dur labeur de la récolte. Et moi, marchant sur les chemins. Ouvert à l’instant. Chacun occupé à son humble tâche...

 

 

En touchant la paroi de mon nez douloureux ; en sentant cette vilaine boursouflure – les muqueuses saccagées – qui traîne depuis des mois sans offrir le moindre signe de guérison – je ne sais pourquoi – mais je songe à la mort...

Et soudain les paysages deviennent plus sombres. Le ciel plus bas et – curieusement – l’air plus vif. Comme un regain de tristesse et de vie peut-être... Mais cette idée – je le sais – ne flétrira pas la joie. Elle ne la fera pas plier. Infrangible à jamais.

 

 

De vie en vie. L’infatigable marche du vivant. A peine couché par la mort qu’il se redresse déjà. Plus vif que jamais. Prêt à embrasser tous les horizons de la terre. Comme le jouet docile et malléable d'une force inépuisable...

 

 

La quête de la joie ? Non ! Laissons cette chimère aux esprits patauds et aux cœurs immatures... La joie, bien sûr, ne peut se dénicher ni s’attraper. Elle se déverse sur les âmes humbles et défaites. Sur les âmes nues et dépouillées. Affranchies de tout vouloir et de toute captation. Libres de tout accaparement...

 

 

Une vie. Un fugace passage (évidemment). Les jeux et les célébrations, la besogne et les apprentissages dont on la remplit ou l’honore, le trépas en fait disparaître toutes traces. Et de l’existence ne subsiste rien : ni Connaissance ni leçon. Parfois demeurent quelques œuvres ou quelques monuments qui s’effacent peu à peu (avec le temps). Quelques vagues souvenirs dans le cœur des vivants. Mais les existences et les visages – leur éclat et leur labeur – s’estompent progressivement. Et ne reste bientôt des disparus que le néant. Aussi convient-il de son vivant de tirer la leçon des jours : habiter la paix, la joie, l’amour et l’intelligence autant que nous le pouvons – autant que nous en sommes capables – à chaque instant.

Nul temps (donc) pour les mensonges et les faux-semblants. Pour l’accessoire et le superflu. Laissons (simplement) le nécessaire et l’essentiel dicter les orientations, diriger les pas et choisir les visages et les paysages pour permettre à l’âme de se frayer un chemin à travers le ciel... Ainsi seulement la paix, la joie, l’amour et l’intelligence seront accessibles. Et pourront être offerts à chacun. Il n’y a d’autre voie...

 

 

La vieille porte de bois vermoulu d’une grange abandonnée. L’œuvre du temps. Le délitement et la désagrégation. Jusqu’à l’anéantissement. Jusqu’à la disparition. Le retour à la poussière. La poussière – bien sûr – toujours retourne à la poussière.

Mais n’oublions pas l’autre versant de la poussière : sa dimension créatrice. C’est avec elle qu’a été créé le monde. C’est avec elle qu’ont été façonnées les formes. Toutes les formes.

Et tous ces amas provisoires de poussière sont voués au cycle des naissances et des disparitions. Soumis inexorablement à l’alternance permanente de l’effritement et de l’édification. Ne cessant jamais de se composer et de se décomposer. Et de se recomposer encore... indéfiniment. Ne cessant jamais de naître et de mourir dans le regard. Dans la présence éternelle du regard.

Hors du temps – dans l’instant – demeure l’éternité, affranchie de la durée et de ses transformations*

* Dégradations et déliquescences, recombinaisons et constructions...

 

 

Marchant dans les vieilles ruelles d’un village, on ressent l’âme des pierres qui ont connu toute l’histoire du monde. Et dont la sagesse ne peut rien apprendre aux Hommes. Trop orgueilleux. Trop aveuglés par leur pitoyable éclat pour tirer leçon du passé...

 

 

Le marcheur est l'homme des petits pas. Tout entier dans la foulée. Peu soucieux de la durée de la marche et de la distance parcourue (ou à parcourir).

La marche – comme toute œuvre et toute activité en ce monde – se réalise d'instant en instant. Pas à pas. Geste après geste. Il ne peut en être autrement. Et il y a une beauté – et même une grâce – dans cette lenteur (qui respecte le rythme et le cours naturel des choses) qui est déniée par la modernité qui lui ôte – en exigeant son accélération ou en aspirant à son éradication* – toute sa splendeur.

* en faisant croire aux esprits immatures que certaines activités ne sont pas dignes d'être réalisées ; et qu'il convient de les éliminer ou de s'y soustraire...

 

 

S'allonger sur le sol en pleine nature. Dans l'herbe, sur le sable, sur les pierres et les rochers. Partout où cela est possible. Quel délice ! Et quelle merveille ! Ah ! Les vertus curatives et revigorantes de la terre...

 

 

La compagnie invisible des anges qui jouent à mes côtés. En silence. Souvent j'entends leurs rires. Et parfois je surprends leur étonnement – un rien moqueur – à me voir déambuler dans la solitude des collines. Comme s'ils me disaient : « eh ! Pourquoi ne viens-tu pas t'amuser avec nous ? ». Et moi qui leur réponds un peu idiotement (et avec un fond de gravité dans la voix) : « c'est que j'ai la joie sérieuse – un penchant de l'âme que Dieu m'a offert – je préfère vous regarder de loin. C'est ma façon d'être avec vous. De participer à vos jeux espiègles et insouciants. Et ils devinent à mon sourire et à mes yeux pétillants que je dis vrai... ; que cette place est la mienne... ; et que pour rien au monde j'aimerais qu'elle me soit enlevée ou refusée...

 

 

Il y a si peu de vivants (d'Hommes vivants) autour de nous. Ils effleurent la vie et errent d'ennui à sa surface. Au lieu d'y plonger le cœur en avant. Ils craignent le désastre. Et s'en protégeant, ils édifient une existence désastreuse. Inconsistante. Si peu vraie. Si peu vivante...

 

 

Je n'apprécie que la compagnie de ceux qui sont vivants ou qui cherchent à transpercer la mystérieuse opacité de la vie. Et quitte à choisir, je préfère le silence (celui des vivants et même celui des morts) que la parole creuse et inepte – la parole apeurée et mensongère – des presque vivants. Et son cortège d'ennui et de désolation.

 

 

En tant qu'être humain, j’appartiens – je crois – autant au règne animal et énergétique (au grand peuple du vivant et de l'Existant) qu'à l'espace de Conscience.

 

 

Il est étrange d'être un être différent. Un être singulier. Mais cette particularité (si souvent) inconfortable est parfois étrangement salvifique. Elle donne à l'âme une profonde sensibilité. Et un curieux sentiment d'étrangeté. On se sent étranger et en exil où que l'on soit, où que l'on aille, quel que soit notre entourage (humain). On ne se sent à son aise qu'en dehors du monde. Qu'au sein du vivant. Parmi la grande communauté de l'Existant (pourvu que les Hommes ordinaires l'aient désertée). Avec nos congénères, on est (en général) mal à l'aise. Fragile et démuni. Sans arme ni outil. Nos pas, nos gestes et nos paroles sont empruntés. On a beau connaître les codes et les jeux du monde, on est bien en peine d'en faire usage et d'y participer. On est si étranger aux histoires et aux péripéties humaines. Aux impostures et aux duperies des Hommes. A la fois exilé volontaire et exclu. Et être relégué aux marges du monde à la fois nous attriste et nous rend heureux.

Nous sommes de ceux que les normaux – les intégrés (ou du moins ceux qui croient l'être ou feignent d'y appartenir...) – n'invitent jamais à leurs fêtes et à leurs festins. Nous sommes de ceux qu'ils ignorent, méprisent ou prennent en pitié. Nous sommes si différents. Et cette différence est si peu fréquentable. Inassimilable. Elle rebute, blesse, ennuie ou effraye. Les Hommes ne la tolèrent que si elle demeure cachée ou lorsqu'ils la tiennent éloignée. Elle est, à leurs yeux, comme une incongruité. Une maladie contagieuse. Le reflet d'une part d'eux-mêmes qu'ils refusent de voir (ou ne sont pas encore en mesure d'accueillir).

Pourtant, en dépit des apparences, l'être singulier porte (bien souvent) en lui la part la plus haute – la part la plus noble – de l'humanité. Mais elle demeure – très souvent – imperceptible aux yeux ordinaires. Les normaux à l'âme immature ne savent ce qu'ils perdent en rejetant ou en stigmatisant les êtres différents. Les singuliers eux – pourvu qu'ils aient totalement accepté leur différence et leur particularité* – ne quémandent plus la compagnie des Hommes. La solitude, la compagnie du ciel et celle de leurs frères naturels leur offrent une joie que le monde ordinaire (et la fréquentation des êtres communs) ne pourront jamais procurer...

* Avant cette pleine acceptation, beaucoup aimeraient sans doute s'affranchir de leur différence ou – pire – la voir gommée en espérant pouvoir se réchauffer au contact d'une bien pâle et illusoire chaleur humaine...

 

 

Je n'aime – et n'ai toujours aimé – que la part naturelle et la part consciente du monde. Les autres dimensions – le mécanique et l'artificiel (ou autrement dit, la mécanicité, les automatismes, la duperie et l'artifice...) –, je les ai toujours eu en horreur. A leur contact, j'ai toujours ressenti un profond malaise. Et à leur égard j'ai toujours éprouvé un farouche (sain ou déplacé ? je l'ignore) mépris ; paroles creuses, détonations de chasseurs, politesse feinte, conversations futiles, automobilistes et passants aveugles, rivés sur leur allure et leur trajectoire, les affaires et le commerce, les villes et les buildings, le mensonge, la cacophonie urbaine, la bêtise cruelle et l'ignorance orgueilleuse. Quant à ce qui m'enchante ou m'émeut en ce monde, c'est simple : le chant des oiseaux, le ciel et le silence, le rire et l'intelligence des enfants, la solitude des êtres et leur tristesse, les arbres et les animaux, les pierres et les chemins, les paysages et l'horizon, le regard, l'écoute et la présence d'un être authentique, la fragilité et la quête désespérée des Hommes.

 

 

Un peu de poésie ! Quelle joie ! Oui ! Quelle joie de lire ou de recueillir quelques mots, assis dans la solitude des collines, seul face à l'immensité du ciel ! Ah ! Merveilleuse poésie ! Toi seule sais offrir au monde – et à son indigence – un peu de grâce et d'épaisseur...

 

 

Dans cette ère dit de post-modernité où la seule gloire est le profit et les seules règles sont la pléonéxie, l'abondance et l'immédiateté – odieuses et affreuses caractéristiques qui soumettent la terre et les êtres à une infâme tyrannie –, la misère a gagné les vies, les esprits et les cœurs. Et la poésie – en particulier lorsqu'elle revêt sa robe céleste – est l'une des rares choses en ce monde à pouvoir redonner aux Hommes* un peu de profondeur et d'humanité. Un peu de richesse et de conscience.

* Même si – et nous le savons fort bien – très peu y sont sensibles (ce qui n'est guère étonnant car s'ils l'étaient, le monde ne serait sans doute pas ce qu'il est...).

 

 

Ah ! Cette matière – et toutes ces formes – soumises aux luttes et aux combats, terrains de forces adverses (et antagonistes). Vouée(s) au dysfonctionnement jusqu'à leur complet délitement. Jusqu'à leur anéantissement avant de les voir ré-émerger en d'autres combinaisons. Jouets perpétuels des cycles infinis de l'énergie...

 

 

On ne le répétera jamais assez. Rien n'est plus beau et émouvant que l'éphémère et la fragilité...

 

 

La vie, la joie, la liberté, l'amour et la vérité – comme toutes les grandes choses en ce monde – ne peuvent être saisis, attrapés ni capturés. Ils se vivent. Ils peuvent aller et venir ici et là. Apparaître pour un instant et disparaître. Et qu'importe ! Être permet de les goûter et de les sentir même lorsqu'ils nous ont – en apparence – désertés...

 

 

Ah ! Qu'il y a de joie dans ce regard sensible ! Tant de beauté et de grâce dans cette tristesse – à la fois si légère et indicible – qui contemple le monde avec émotion ! La moindre chose, le moindre mouvement – la plus petite brindille comme le plus léger souffle d'air – sont reçus en plein cœur. Et c'est toute l'âme – éminemment vivante, éminemment présente – tremblante et vibrante des joies et des malheurs du monde – qui s'émerveille. Et qui se penche sur l'Existant (et toutes ses manifestations) avec amour et délicatesse comme l'on entourerait de douceur et de tendresse un être fragile, malade ou en convalescence.

 

 

Le vol des oiseaux qui passent dans le ciel. Et le soleil couchant – au loin – qui salue leur passage. Et mon cœur ému qui s'incline en silence.

 

 

Tout est en ordre dans l'univers. La moindre poussière, le plus imperceptible mouvement participent à cette harmonie qui, pour tromper les yeux impies, prend la forme du chaos.

Les Hommes avec leur lubie du classement et du rangement croient mettre de l'ordre. Ils ne font que saccager et corrompre la grâce naturelle des choses. Le monde en souffre. Et il n'y a qu'eux pour ne pas s'en apercevoir...

 

 

L'herbe est parfois la seule amie du jour. Je m’assois à ses côtés. Et nous bavardons en silence. Le ciel – je le sais – nous entend. Et je devine son sourire – et son acquiescement – à nos échanges silencieux. A nos propos graves et tendres. Et il se réjouit – j'en suis persuadé – de ces liens fraternels*.

* Et mon stylo alors n'est jamais bien loin. Je le vois prendre note de cette rencontre...

 

 

La poésie – lorsqu'elle est couchée avec authenticité – offre un présent rare. Rare et incomparable. Elle nous éclate au cœur – qui peut dès lors s'ouvrir et vibrer à l'imperceptible et à l'inconnu du monde. Et toute l'étrangeté de la vie nous devient aussitôt familière. Comme un vieil ami que l'on avait cru oublier qui soudain ressurgit sur le seuil de la porte.

 

 

En ce monde, tout est si changeant. Tout équilibre est si fragile qu'il convient de ne rien édifier en certitude. Demeurer à chaque instant – autant qu'il nous est possible – dans le regard neuf, innocent et impliqué. A la fois en retrait, présent et engagé dans chaque mouvement, chaque phénomène, chaque situation.

 

 

Et voir le corps et le psychisme pris dans la trame des événements, impliqués ou englués dans les situations et répondre ou réagir mécaniquement aux circonstances selon leurs conditionnements, leurs apprentissages, leurs repères et leurs habitudes. Et demeurer dans le regard sans intervenir ni rien vouloir modifier. En les aimant et en les acceptant. En les respectant. En les accueillant et en prenant soin d'eux – au même titre que tous les autres mouvements et phénomènes – tels qu'ils sont et apparaissent. Tels qu'ils s’expriment et se manifestent...

 

 

Je sors un livre de poésie de ma besace. Et le pose sur les pierres du chemin – pages ouvertes sur le ciel. Et je l'entends presque soupirer d'aise et de satisfaction. Comme s'il retrouvait une terre familière – et la matière dont il est composé. Voilà le plus bel écrin – et la plus belle place en ce monde pour l'accueillir. Pour qu'il puisse renouer avec sa nature sauvage et céleste. Indomptable. Avec cette part vierge, spontanée et innocente – éminemment naturelle, instinctive et spirituelle qui compose toute poésie. Et je sens ce mince ouvrage – ce recueil de beauté et de sensibilité – ravi de quitter pour un instant – le temps de la promenade – les étagères poussiéreuses et étouffantes de la bibliothèque, idéales sans doute pour les livres de pensée et de raison mais si peu appropriées – et si peu dignes – pour la poésie toujours fraîche, libre et insaisissable en particulier lorsqu'elle loue la nature et le ciel. Et invite à la solitude, à la contemplation et à l'infini.

 

 

Ce qui est. Là – ici et maintenant. Et la conscience de ce qui est. Voilà les deux seules certitudes en ce monde. Certitudes provisoires – valables uniquement dans l'instant car l'instant suivant est différent ; ce qui est se transforme et le regard vide et nu peut se voir soudain envahi, entaché et encombré par quelques manifestations psychiques.

 

 

On ne peut donc s'appuyer sur ce qui est maintenant pour édifier une quelconque certitude et élaborer, à partir d'elle, la moindre projection ou anticipation pour avoir une idée de la parole, du geste (de l'acte), du pas (de la direction) les plus justes et appropriés aux situations à venir... Il convient simplement d'être à l'écoute à chaque instant, alors seulement la parole, le geste (l'acte), le pas (la direction) surgiront de façon naturelle, idoine et judicieuse (lorsque ce qui est dans l'instant se manifestera...).

Ce qui est (dans l'instant) demeure donc notre seule certitude (dans l'instant) et nous offre la seule information valide pour adopter – laisser jaillir en vérité – le comportement (parole, gestes et pas) le plus adéquat. Ce qui est et non ce qui était, ce qui sera, ce qui devrait être ou ce qu'on aimerait qui soit (selon l'idéologie, les goûts et les préférences du psychisme). Simplement ce qui est à chaque instant. Changeant et fluctuant.

Quant à la présence – regard et écoute – à ce qui est dans l'instant pourvu qu'elle demeure libre d'entrave et d'encombrement demeure, elle aussi, une certitude qui constitue le plus sûr moyen pour faire advenir un acte (parole, geste ou pas) parfaitement pertinent. Et bien qu'elle puisse osciller et se positionner tantôt à l'avant-plan tantôt à l'arrière-plan... selon que la conscience – le regard et l'écoute – penche du côté du psychisme (du côté du mental identifié à la forme : le corps-cerveau du personnage) ou du côté de l'espace de perception impersonnelle (l'observateur neutre non identifié à la forme) mais totalement engagé et impliqué dans la situation qui ne fait qu'Un avec ce qui est..., il convient de la laisser à la manœuvre – et au gouvernail des décisions (si l'on peut dire) – dans toutes les situations de l'existence.

 

 

Ouvrir un livre – et j'aimerais que l'on ouvre les miens ainsi – comme l'on ouvrirait les ailes d'un papillon ou d'un oiseau blessé ou maintenu en cage à son insu. Pour qu'il recouvre la liberté. Et prenne son envol. Avec le ciel comme unique destination...

 

 

Ah ! Quelle grâce ! Et quelle joie de vivre cette proximité – et cette intimité – avec les choses du monde ! De cette union – qui tire sa source du regard unifiant – naît la plus belle et merveilleuse complicité qui soit... si douce, si tendre, si aimante. Tellement puissante. Bien plus large et bien plus profonde que l'amour d'une mère pour ses enfants. Un océan de tendresse baigné d'infini et d'éternité où rien n'est exclu – pas la moindre poussière, pas le moindre souffle, pas le moindre brin d'herbe – … où viennent se réconforter l'infime et l'éphémère du monde... et où le dérisoire vous révèle son plus haut degré de sacralité...

 

 

Nous sommes en tant que formes – d'incroyables instruments les uns pour les autres (d'incroyables instruments karmiques diraient d'aucuns... et je ne les contredirais pas...). Comme si toutes les parties (l'ensemble des formes et des manifestations phénoménales) de ce grand – que dis-je ? – de cet immense – et absolument ahurissant – corps énergétique inter-réagissaient au delà des jeux (propres sans doute à l'énergie) et de la célébration (sans doute propre à la conscience) pour permettre à chacune non seulement d'accéder à la perception mais également de percer ou de pénétrer l'espace de conscience impersonnel – et de l'habiter pleinement – afin de vivre totalement la vie énergétique (et phénoménale) depuis cet espace.

Et lorsque l'on sent (un tant soit peu) les liens puissants et infrangibles – au delà de toutes les naissances et de toutes les disparitions, au delà de toutes les apparences et de toutes les contingences du monde – qui nous unissent les uns aux autres, nous sommes enjoints à une forme de responsabilité implacable envers tous et envers chacun (en particulier envers ceux qui nous entourent et ceux que nous rencontrons) qui nous oblige – presque à notre insu – à offrir autant que nous en sommes capables une présence, des interactions ou un accompagnement les plus porteurs d'amour et d'intelligence afin que chacun puisse accéder et habiter (retrouver sans doute) sa nature originelle : l'espace éternel et lumineux de la conscience.

 

5 décembre 2017

Carnet n°69 La conscience et l'Existant - Table des matières

Essai / 2015 / L'exploration de l'être

La Vie et l’Existant ne semblent, en réalité, qu’un gigantesque jeu — violent et merveilleux — et une permanente célébration… A hauteur d’Homme, peut-être pourrions-nous penser que nous nous apprenons les uns les autres (et, bien souvent, à notre insu) à mieux les regarder et à mieux les vivre. A mieux les comprendre et à mieux les aimer… mais sur le plan de la Conscience, tout ce « cirque » — aimable ou corrosif — semble (presque) sans importance… Est-ce qui est… et ce qui est n’altère jamais Le Regard…

_

 Nous avons été contraints (pour des raisons d'ordre technique) de diviser la version numérique de cet ouvrage en dix parties.

Sommaire

Chapitre introductif

Chapitres 1 à 5

Chapitre 6 (début)

Chapitre 6 (suite)

Chapitre 6 (suite et fin)

Chapitre 7 (début)

Chapitre 7 (suite et fin)

Chapitres 8 et 9

  

 

TABLE DES MATIERES 

 

Chapitre introductif

   1. Réflexions sur la conscience et l’énergie

   2. Réflexions sur la conscience et l’énergie (suite)

   3. Réflexions sur la conscience et l’énergie (suite) 

   4. Réflexions sur la conscience et l’énergie – suite et fin (provisoire)

   5. Réflexions sur la conscience et l’énergie – synthèse

   6. Réflexions sur la conscience et l’énergie – développements et extensions

      — Les plans, leur nature, leurs liens et leur organisation —

   7. Réflexions sur la conscience et l’énergie – développements et extensions

      — La mort, « l’âme » et la « part consciente » qui transmigre —

 

Chapitre 1 LA CONSCIENCE

 

Chapitre 2 L'UNIVERS ET LA MATIERE

   2.1 PETIT COURS ACCELERE D’ASTROPHYSIQUE, de PHYSIQUE et de BIOLOGIE

   2.2 QUELQUES ELEMENTS D’ASTRONOMIE – ASTROPHYSIQUE

 

Chapitre 3 LA MATIERE TERRESTRE

   3.1 QUELQUES ELEMENTS DE PHYSIQUE ET DE CHIMIE

   3.2 VAGUE APERCU DU MONDE TERRESTRE AVANT L’EMERGENCE DU VIVANT

 

Chapitre 4 LE VIVANT TERRESTRE

   4.1 QUELQUES ELEMENTS DE BIOLOGIE & DE SCIENCES HUMAINES

   4.2 VAGUE APERCU DU MONDE TERRESTRE AVANT L’EMERGENCE DE L’HOMME

 

Chapitre 5 L’HOMME ET LE PSYCHISME HUMAIN

   5.1 BREF APERCU EVOLUTIF DU PSYCHISME 

   5.2 LES CONTENUS PSYCHIQUES PRINCIPAUX 

         5.2.1 Les perceptions visuelles de l’Existant  

         5.2.2 Les sensations 

         5.2.3 Les représentations mentales 

         5.2.4 Les émotions 

   5.3 DEUX MECANISMES CENTRAUX DU PSYCHISME

         5.3.1 Le désir

         5.3.2 La zone de confort

   5.4 LES BESOINS PSYCHIQUES (besoins, besoins-désirs, désirs et désirs-fantasmes)

         5.4.1 Des besoins organiques et matériels

         5.4.2 Des besoins psychiques élémentaires

         5.4.3 Des besoins-désirs narcissiques

         5.4.4 Des besoins-désirs

         5.4.5 Des désirs d’ordre général

         5.4.6 Des désirs-fantasmes

   5.5 LE FONCTIONNEMENT GENERAL DU PSYCHISME

         5.5.1 Liens entre psychisme et cerveau

         5.5.2 Un espace perceptif circonscrit et limité doté d’une très forte propension à la saisie

         5.5.3 Un univers complexe sujet à la projection

         5.5.4 Zone de confort, satisfaction, peurs et désirs

                  La peur de quitter sa zone de satisfaction

                  La peur de rester dans sa zone d’insatisfaction

                  La peur de ne pas améliorer sa zone de satisfaction

                  Le désir de rester dans sa zone de satisfaction

                  Le besoin-désir de retrouver sa zone de satisfaction

                  Le désir d’améliorer sa zone de satisfaction

      5.5.5 Frustration, dépendance et attachement

         5.5.6 Les comportements délétères

         5.5.7 La puissance créatrice du psychisme

   5.6 LES GRANDS TYPES PSYCHIQUES

   5.7 RESUME DU PSYCHISME

   5.8 SYNTHESE DU PSYCHISME ET DES BESOINS PSYCHIQUES

         5.8.1 Deux grandes catégories de besoins

         5.8.2 Les grands besoins sous-jacents

         5.8.3 Deux grands types de réponses

         5.8.4 Note sur le psychisme et la dimension spirituelle 

         5.8.5 Trois grandes orientations possibles

                  L’amélioration de la perception et de la compréhension

                  La transformation du psychisme

                  La transformation de l’Existant

                          La transformation du corps (la transformation de l’individu)

                          La transformation du psychisme (la transformation de l’individu)

                          La transformation de l’Existant (hors corps et hors psychisme)

 

PARTIE 3

Chapitre 6 LES CREATIONS ET LES REALISATIONS HUMAINES

   6.1 LES ACTIONS ET LES FABRICATIONS HUMAINES : LE PLAN REALISATIONNEL ACTIF 

         6.1.1 Remarques liminaires

         6.1.2 L’alimentation : les réponses aux besoins alimentaires

                  Généralités

                  Bref aperçu historique

                          Premières sociétés humaines

                          Sociétés primitives

                          Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                          Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                          Sociétés d’aujourd’hui

                  Trend historique

                          Offre – production – structures

                          Demande – consommation – individus

                  Eléments pour une analyse évolutive

                          Objectifs généraux

                          Eléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde

                          Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

                          Evolutions actuelles

                          Evolutions possibles et directions probables

                          Evolutions à très long terme

                          Objectif idéal (implicite)

                  Perspectives

                          Sociétés de demain

                          Sociétés d’après demain

                          Sociétés à moyen terme

                          Sociétés à long terme

         6.1.3 Les vêtements : les réponses aux besoins vestimentaires

                  Généralités

                  Bref aperçu historique

                          Premières sociétés humaines

                          Sociétés primitives

                          Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                          Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                          Sociétés d’aujourd’hui

                  Trend historique

                          Offre – production – structures

                          Demande – consommation – individus

                  Eléments pour une analyse évolutive

                          Objectifs généraux

                          Eléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde

                          Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

                          Evolutions actuelles

                          Evolutions possibles et directions probables

                          Evolutions à très long terme

                          Objectif idéal (implicite)

                  Perspectives

                          Sociétés de demain

                          Sociétés d’après demain

                          Sociétés à moyen terme

                          Sociétés à long terme

         6.1.4 La santé : les réponses aux besoins de santé

                  Généralités

                  Bref aperçu historique

                          Premières sociétés humaines

                          Sociétés primitives

                          Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                          Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                          Sociétés d’aujourd’hui

                  Trend historique

                          Offre – production – structures

                          Demande – consommation – individus

                  Eléments pour une analyse évolutive

                          Objectifs généraux

                          Eléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde

                          Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

                          Evolutions actuelles

                          Evolutions possibles et directions probables

                          Evolutions à très long terme

                          Objectif idéal (implicite)

                  Perspectives

                          Sociétés de demain

                          Sociétés d’après demain

                          Sociétés à moyen terme

                          Sociétés à long terme

         6.1.5 La santé (suite) : les réponses aux besoins d’eau, d’air et de sols (non pollués)

                  Généralités

                  Bref aperçu historique

                          Premières sociétés humaines

                          Sociétés primitives

                          Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                          Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                          Sociétés d’aujourd’hui

                  Trend historique

                          Offre – production – structures

                          Demande – consommation – individus

                  Eléments pour une analyse évolutive

                          Objectifs généraux

                          Eléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde

                          Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

                          Evolutions actuelles

                          Evolutions possibles et directions probables

                          Evolutions à très long terme

                          Objectif idéal (implicite)

                  Perspectives

                          Sociétés de demain

                          Sociétés d’après demain

                          Sociétés à moyen terme

                          Sociétés à long terme

         6.1.6 Le logement : les réponses aux besoins de logement

                  Généralités

                  Bref aperçu historique

                          Premières sociétés humaines

                          Sociétés primitives

                          Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                          Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                          Sociétés d’aujourd’hui

                  Trend historique

                          Offre – production – structures

                          Demande – consommation – individus

                  Eléments pour une analyse évolutive

                          Objectifs généraux

                          Eléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde

                          Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

                          Evolutions actuelles

                          Evolutions possibles et directions probables

                          Evolutions à très long terme

                          Objectif idéal (implicite)

                  Perspectives

                          Sociétés de demain

                          Sociétés d’après demain

                          Sociétés à moyen terme

                          Sociétés à long terme          

6.1.7 Les tâches et le confort domestiques : les réponses aux besoins domestiques

                  Généralités

                  Bref aperçu historique

                          Premières sociétés humaines

                          Sociétés primitives

                          Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                          Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                          Sociétés d’aujourd’hui

                  Trend historique

                          Offre – production – structures

                          Demande – consommation – individus

                  Eléments pour une analyse évolutive

                          Objectifs généraux

                          Eléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde

                          Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

                          Evolutions actuelles

                          Evolutions possibles et directions probables

                          Evolutions à très long terme

                         Objectif idéal (implicite)

                  Perspectives

                          Sociétés de demain

                          Sociétés d’après demain

                          Sociétés à moyen terme

                          Sociétés à long terme

         6.1.8 L’énergie : les réponses aux besoins d’énergie

                  Généralités

                  Bref aperçu historique

                          Premières sociétés humaines

                         Sociétés primitives

                         Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                         Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                         Sociétés d’aujourd’hui

                  Trend historique

                         Offre – production – structures

                         Demande – consommation – individus

                  Eléments pour une analyse évolutive

                         Objectifs généraux

                         Eléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde

                         Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

                         Evolutions actuelles

                         Evolutions possibles et directions probables

                         Evolutions à très long terme

                         Objectif idéal (implicite)

                  Perspectives

                         Sociétés de demain

                         Sociétés d’après demain

                         Sociétés à moyen terme

                         Sociétés à long terme

         6.1.9 Les transports (des individus et des biens) : les réponses aux besoins de déplacement

                  Généralités

                  Bref aperçu historique

                         Premières sociétés humaines

                        Sociétés primitives

                        Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                        Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                        Sociétés d’aujourd’hui

                  Trend historique

                        Offre – production – structures

                        Demande – consommation – individus

                  Eléments pour une analyse évolutive

                        Objectifs généraux

                        Eléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde

                        Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

                        Evolutions actuelles

                        Evolutions possibles et directions probables

                        Evolutions à très long terme

                        Objectif idéal (implicite)

                  Perspectives

                        Sociétés de demain

                        Sociétés d’après demain

                        Sociétés à moyen terme

                        Sociétés à long terme

         6.1.10 La protection des personnes et des biens : les réponses aux besoins de protection organique et matérielle

                  Généralités

                  Bref aperçu historique

                        Premières sociétés humaines

                        Sociétés primitives

                        Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                        Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                        Sociétés d’aujourd’hui

                  Trend historique

                        Offre – production – structures

                        Demande – consommation – individus

                  Eléments pour une analyse évolutive

                        Objectifs généraux

                        Eléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde

                        Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

                        Evolutions actuelles

                        Evolutions possibles et directions probables

                        Evolutions à très long terme

                        Objectif idéal (implicite)

                  Perspectives

                        Sociétés de demain

                        Sociétés d’après demain

                        Sociétés à moyen terme

                        Sociétés à long terme

         6.1.11 La reproduction : les réponses aux besoins reproductifs

                  Généralités

                  Bref aperçu historique

                        Premières sociétés humaines

                        Sociétés primitives

                        Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                        Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                        Sociétés d’aujourd’hui

                  Trend historique

                        Offre – production – structures

                        Demande – consommation – individus

                  Eléments pour une analyse évolutive

                        Objectifs généraux

                        Eléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde

                        Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

                        Evolutions actuelles

                        Evolutions possibles et directions probables

                        Evolutions à très long terme

                        Objectif idéal (implicite)

                  Perspectives

                        Sociétés de demain

                        Sociétés d’après demain

                        Sociétés à moyen terme

                        Sociétés à long terme

 

PARTIE 4

         6.1.12 Les relations : les réponses aux besoins relationnels, sexuels, affectifs, communicatifs et informationnels

                  Généralités

                  Bref aperçu historique

                         Premières sociétés humaines

                        Sociétés primitives

                        Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                        Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                        Sociétés d’aujourd’hui

                  Trend historique

                        Offre – production – structures

                        Demande – consommation – individus

                  Eléments pour une analyse évolutive

                        Objectifs généraux

                        Eléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde

                        Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

                        Evolutions actuelles

                        Evolutions possibles et directions probables

                        Evolutions à très long terme

                        Objectif idéal (implicite)

                  Perspectives

                        Sociétés de demain

                        Sociétés d’après demain

                        Sociétés à moyen terme

                        Sociétés à long terme

         6.1.13 La protection psychique : les réponses aux besoins de protection et de défense psychiques

                  Généralités

                  Bref aperçu historique

                         Premières sociétés humaines

                         Sociétés primitives

                         Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                         Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                         Sociétés d’aujourd’hui

                  Trend historique

                         Offre – production – structures

                         Demande – consommation – individus

                  Eléments pour une analyse évolutive

                         Objectifs généraux

                         Eléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde

                         Les paramètres pris en considération de nos jours (début de 21ème siècle)

                         Evolutions actuelles

                         Evolutions possibles et directions probables

                         Evolutions à très long terme

                         Objectif idéal (implicite)

                  Perspectives

                         Sociétés de demain

                         Sociétés d’après demain

                         Sociétés à moyen terme

                         Sociétés à long terme

         6.1.14 Les distractions : les réponses aux besoins distractifs

                  Généralités

                  Bref aperçu historique

                          Premières sociétés humaines

                          Sociétés primitives

                          Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                          Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                          Sociétés d’aujourd’hui

                  Trend historique

                          Offre – production – structures

                          Demande – consommation – individus

                   Eléments pour une analyse évolutive

                          Objectifs généraux

                          Eléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde

                          Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

                          Evolutions actuelles

                          Evolutions possibles et directions probables

                          Evolutions à très long terme

                          Objectif idéal (implicite)

                   Perspectives

                          Sociétés de demain

                          Sociétés d’après demain

                          Sociétés à moyen terme

                          Sociétés à long terme

         6.1.15 L’expression : les réponses aux besoins expressifs

                   Généralités

                   Bref aperçu historique

                          Premières sociétés humaines

                          Sociétés primitives

                          Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                          Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                          Sociétés d’aujourd’hui

                   Trend historique

                          Offre – production – structures

                          Demande – consommation – individus                   

Eléments pour une analyse évolutive

                          Objectifs généraux

                          Eléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde

                          Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

                          Evolutions actuelles

                          Evolutions possibles et directions probables

                          Evolutions à très long terme

                          Objectif idéal (implicite)

                   Perspectives

                          Sociétés de demain

                          Sociétés d’après demain

                          Sociétés à moyen terme

                          Sociétés à long terme

         6.1.16 La compréhension : les réponses aux besoins de compréhension

                   Généralités

                   Bref aperçu historique

                          Premières sociétés humaines

                          Sociétés primitives

                          Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                          Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                          Sociétés d’aujourd’hui

                   Trend historique

                          Offre – production – structures

                          Demande – consommation – individus

                   Eléments pour une analyse évolutive

                          Objectifs généraux

                          Eléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde

                          Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

                          Evolutions actuelles

                          Evolutions possibles et directions probables

                          Evolutions à très long terme

                          Objectif idéal (implicite)

                   Perspectives

                          Sociétés de demain

                          Sociétés d’après demain

                          Sociétés à moyen terme

                          Sociétés à long terme

         6.1.17 Les besoins de réalisation de tous les désirs : les réponses aux besoins de satisfaction de tous les désirs

                   Objectifs généraux

                   Tendances actuelles

         6.1.18 Le besoin de travailler (d’exercer un emploi ou une activité professionnelle rémunéré(e)) : les réponses au besoin de travailler

                   Généralités

                   Bref aperçu historique

                          Premières sociétés humaines

                          Sociétés primitives

                          Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                          Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                          Sociétés d’aujourd’hui

                   Trend historique

                          Offre – structures

                          Demande – individus

                   Eléments pour une analyse évolutive

                          Objectifs généraux

                          Eléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde

                   Perspectives

                          Sociétés de demain

                          Sociétés d’après demain

                          Sociétés à moyen terme 

                          Sociétés à long terme

         6.1.19 Le besoin d’argent : les réponses aux besoins pécuniaires

                   Généralités

                   Bref aperçu historique

                          Premières sociétés humaines

                          Sociétés primitives

                          Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                          Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                          Sociétés d’aujourd’hui

                   Trend historique

                          Offre – structures

                          Demande – individus

                   Eléments pour une analyse évolutive

                          Objectifs généraux

                          Eléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde

                   Perspectives

                          Sociétés de demain

                          Sociétés d’après demain

                          Sociétés à moyen terme

                          Sociétés à long terme

         6.1.20 Les besoins administratifs : les réponses aux besoins administratifs

                   Généralités

                   Bref aperçu historique

                          Premières sociétés humaines

                          Sociétés primitives

                          Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                          Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                          Sociétés d’aujourd’hui

                   Trend historique

                          Offre – structures

                          Demande – individus

                   Eléments pour une analyse évolutive

                          Objectifs généraux

                          Eléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde

                          Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

         6.1.21 Note générale sur l’évolution des kits (modules)

 

PARTIE 5

   6.2 LES REPRESENTATIONS ET LES CREATIONS HUMAINES : LE PLAN REPRESENTATIF INTELLECTUEL 

         6.2.1 Le plan artistique

         6.2.2 Le plan imaginaire

         6.2.3 Les savoirs

         6.2.4 La connaissance

         6.2.5 Notes sur la quête existentielle 

 

   6.3 LA CONNAISSANCE DE SOI (COMPREHENSION SENSIBLE) : LE PLAN SPIRITUEL

         6.3.1 Le plan spirituel

         6.3.2 Le cheminement spirituel

                  Les différentes étapes du cheminement spirituel

                          Première étape : l’avant-chemin

                          Deuxième étape : les pas sur le chemin spirituel « personnel »

                          Troisième étape : la Conscience mineure

                          Quelques mots sur le voyage astral

                          Quelques mots sur le chamanisme

                          Quatrième étape : la Conscience majeure

                          Cinquième étape : la Pleine Conscience       

 6.3.3 Bref aperçu historique

                  Premières sociétés humaines

                  Note sur les sociétés humaines et la spiritualité

                  Sociétés primitives

                  Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                  Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                  Sociétés d’aujourd’hui

         6.3.4 Trend historique

                  Offre – structures

                  Demande – individus

         6.3.5 Eléments pour une analyse évolutive

                  Objectifs généraux

                  Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

                  Evolutions actuelles

                  Evolutions possibles et directions probables                

                  Evolutions à très long terme

                  Objectif idéal (implicite)

         6.3.6 Perspectives

                  Sociétés de demain

                  Sociétés d’après demain

                  Sociétés à moyen terme

                  Sociétés à long terme

 

   6.4 LE SYSTEME – LA SOCIETE HUMAINE

         6.4.1 Bref aperçu historique

         6.4.2 Les fondamentaux de la société humaine

         6.4.3 Quatre grands types d’organisations

         6.4.4 Quelques généralités sur la société humaine

                  Trois éléments fondamentaux

                          Premier élément 

                          Deuxième élément

                          Troisième élément 

                  Quelques informations générales

         6.4.5 Synthèse de la société humaine

         6.4.6 L’organisation sociétale générale

                  Aparté sur les « instruments » individuels et collectifs de la « cohésion sociale »

                  Extension de l’aparté

                  Extension de l’extension…       

 7.2.3 Les rapports à l’Existant

                  Les relations avec les congénères

                  Les relations avec les animaux

                  Les relations avec les végétaux

                  Les relations avec les minéraux

                  Les relations avec l’environnement

                  Les relations avec les agents pathogènes

                  Les relations avec l’espace

                  Les relations avec les formes extraterrestres

                  Les relations avec les formes énergétiques immatérielles

                  L’impact général sur l’organisation des territoires entre toutes les formes

   7.3 LE MONDE « PRIMITIF » 

         7.3.1 Les sociétés « primitives » et « traditionnelles »

                  Quelques généralités

                  L’organisation sociétale générale

                  L’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence

         7.3.2 Le portrait de l’individu médian

         7.3.3 Les rapports à l’Existant

                  Les relations avec les congénères (relations sociales et relations intimes)

                  Les relations avec les animaux

                  Les relations avec les végétaux

                  Les relations avec les minéraux

                  Les relations avec l’environnement

                  Les relations avec les agents pathogènes

                  Les relations avec l’espace

                  Les relations avec les formes extraterrestres

                  Les relations avec les formes énergétiques immatérielles

                  L’impact général sur l’organisation des territoires entre toutes les formes 

 6.4.7 L’organisation politique et judiciaire

                  Généralités

                  Bref aperçu historique

                          Premières sociétés humaines

                          Sociétés primitives

                          Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                          Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                          Sociétés d’aujourd’hui 

                  Trend historique 

                          Dispositif – structures

                          Demande – individus

                  Eléments pour une analyse évolutive

                          Objectifs généraux

                          Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

                          Evolutions actuelles

                          Evolutions possibles et directions probables

                          Evolutions à très long terme

                          Objectif idéal (implicite)

                  Perspectives

                          Sociétés de demain

                          Sociétés d’après demain

                          Sociétés à moyen terme

                          Sociétés à long terme

         6.4.8 L’organisation économique

                  Généralités

                  Bref aperçu historique

                          Premières sociétés humaines

                          Sociétés primitives

                          Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                          Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                          Sociétés d’aujourd’hui

                  Trend historique

                  Eléments pour une analyse évolutive

                          Objectifs généraux

                          Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

                          Evolutions actuelles

                          Evolutions possibles et directions probables

                          Evolutions à très long terme

                          Objectif idéal (implicite)

                  Perspectives

                          Sociétés de demain

                          Sociétés d’après demain

                          Sociétés à moyen terme

                          Sociétés à long terme

         6.4.9 Les relations avec l’extérieur

                  Généralités

                  Bref aperçu historique

                          Premières sociétés humaines

                          Sociétés primitives

                          Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                          Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                          Sociétés d’aujourd’hui

                  Trend historique                 

Eléments pour une analyse évolutive

                          Objectifs généraux

                          Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

                          Evolutions actuelles

                          Evolutions possibles et directions probables

                          Evolutions à très long terme

                          Objectif idéal (implicite)

                  Perspectives

                          Sociétés de demain

                          Sociétés d’après demain

                          Sociétés à moyen terme

                          Sociétés à long terme

         6.4.10 L’organisation des territoires

                  Généralités

                  Bref aperçu historique

                          Premières sociétés humaines

                          Sociétés primitives

                          Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

                          Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

                          Sociétés d’aujourd’hui

                  Trend historique

                  Eléments pour une analyse évolutive

                          Objectifs généraux

                          Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

                          Evolutions actuelles

                          Evolutions possibles et directions probables

                          Evolutions à très long terme

                          Objectif idéal (implicite)

                  Perspectives

                          Sociétés de demain

                          Sociétés d’après demain

                          Sociétés à moyen terme

                          Sociétés à long terme

 

PARTIE 6

Chapitre 7 L’HISTOIRE DU MONDE ET SON EVOLUTION POSSIBLE

SOCIETES, ORGANISATIONS, INDIVIDUS ET RAPPORTS A L’EXISTANT

   7.1 QUELQUES PRECISIONS 

   7.2 LES DEBUTS DE L'HUMANITE 

         7.2.1 Les premières sociétés humaines

                  Quelques généralités

                  Organisation sociétale générale

         7.2.2 Le portrait de l’individu médian       

 7.4 LE MONDE D'AVANT-HIER (de l’antiquité au 18ème siècle)

         7.4.1 Les sociétés d’avant-hier

                  Généralités

                  L’organisation sociétale générale

                  L’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence

         7.4.2 Le portrait de l’individu médian

         7.4.3 Les rapports à l’Existant

                  Les relations avec les congénères (relations sociales et relations intimes)

                  Les relations avec les animaux

                  Les relations avec les végétaux

                  Les relations avec les minéraux

                  Les relations avec l’environnement

                  Les relations avec les agents pathogènes

                  Les relations avec l’espace

                  Les relations avec les formes extraterrestres

                  Les relations avec les formes énergétiques immatérielles

                  L’impact général sur l’organisation des territoires entre toutes les formes

   7.5 LE MONDE D'HIER (du 18ème à la fin du 20ième siècle)

         7.5.1 Les sociétés d’hier

                  Généralités

                  L’organisation sociétale générale

                  L’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence

         7.5.2 Le portrait de l’individu médian

         7.5.3 Les rapports à l’Existant

                  Les relations avec les congénères (relations sociales et relations intimes)

                  Les relations avec les animaux

                  Les relations avec les végétaux

                  Les relations avec les minéraux

                  Les relations avec l’environnement

                  Les relations avec les agents pathogènes

                  Les relations avec l’espace

                  Les relations avec les formes extraterrestres

                  Les relations avec les formes énergétiques immatérielles

                  L’impact général sur l’organisation des territoires entre toutes les formes

         7.5.4 Aparté intuitif sur les tendances générales au fil de l’évolution de l’histoire humaine

   7.6 LE MONDE D'AUJOURD'HUI

         7.6.1 Les sociétés contemporaines

                  Généralités

                  L’organisation sociétale générale

                  L’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence

         7.6.2 Le portrait de l’individu médian

         7.6.3 Les rapports à l’Existant

                  Les relations avec les congénères (relations sociales et relations intimes)

                  Les relations avec les animaux

                  Les relations avec les végétaux

                  Les relations avec les minéraux

                  Les relations avec l’environnement

                  Les relations avec les agents pathogènes

                  Les relations avec l’espace

                  Les relations avec les formes extraterrestres

                  Les relations avec les formes énergétiques immatérielles

                  L’impact général sur l’organisation des territoires entre toutes les formes

   7.7 LE MONDE DE DEMAIN

         7.7.1 Les sociétés de demain

                  Généralités

                  L’évolution des deux grands courants alternatifs

                  Les aspirations majeures des individus et l’orientation générale des sociétés humaines

                  Les orientations du modèle sociétal dominant 

                 L’organisation sociétale générale

                 L’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence

         7.7.2 Le portrait de l’individu médian

         7.7.3 Les rapports à l’Existant

                 Les relations avec les congénères (relations sociales et relations intimes)

                 Les relations avec les animaux 

                 Les relations avec les végétaux

                 Les relations avec les minéraux

                 Les relations avec l’environnement

                 Les relations avec les agents pathogènes

                 Les relations avec l’espace

                 Les relations avec les formes extraterrestres

                 Les relations avec les formes énergétiques immatérielles

                 L’impact général sur l’organisation des territoires entre toutes les formes

 

PARTIE 7

   7.8 LE MONDE D'APRES-DEMAIN

         7.8.1 Les sociétés d’après-demain

                 Généralités

                 L’organisation sociétale générale

                 L’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence

         7.8.2 Le portrait de l’individu médian

         7.8.3 Les rapports à l’Existant

                 Les relations avec les congénères (relations sociales et relations intimes)

                 Les relations avec les animaux

                 Les relations avec les végétaux

                 Les relations avec les minéraux 

                 Les relations avec l’environnement

                 Les relations avec les agents pathogènes

                 Les relations avec l’espace

                 Les relations avec les formes extraterrestres

                 Les relations avec les formes énergétiques immatérielles

                 L’impact général sur l’organisation des territoires entre toutes les formes

         7.8.4 Aparté intuitif sur l’évolution des individus et des sociétés

   7.9 LE MONDE A MOYEN TERME

         7.9.1 Le monde des « conscients élémentaires »

                 Généralités

                 L’organisation sociétale générale

                 L’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence

                 La réorganisation des besoins et des désirs

                 L’organisation des réponses aux besoins organiques, matériels et psychiques

                 Aparté impromptu

         7.9.2 Le monde des « conscients élaborés »

                 Généralités sur l’organisation sociétale générale

                 Petit aparté anticipatif sur un avenir encore plus lointain 

                 Aparté supplémentaire sur un point capital : l'argent

                 L’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence

         7.9.3 La coexistence de plusieurs mouvements

         7.9.4 Le portrait de l’individu médian

         7.9.5 Les rapports à l’Existant

                 Les relations avec les congénères (relations sociales et relations intimes)

                 Les relations avec les animaux

                 Les relations avec les végétaux

                 Les relations avec les minéraux

                 Les relations avec l’environnement

                 Les relations avec les agents pathogènes

                 Les relations avec l’espace

                 Les relations avec les formes extraterrestres

                 Les relations avec les formes énergétiques immatérielles

                 L’impact général sur l’organisation des territoires entre toutes les formes

   7.10 LE MONDE A LONG TERME

         7.10.1 Généralités

         7.10.2 L’organisation sociétale générale

         7.10.3 L’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence

                 Le monde des « conscients conscients élémentaires »

                 Note 

                 Le monde des « conscients conscients élaborés »

         7.10.4 La coexistence de plusieurs mouvements

         7.10.5 Le portrait de l’individu médian

         7.10.6 Les rapports à l’Existant

                 Les relations avec les congénères (relations sociales et relations intimes)

                 Les relations avec les animaux

                 Les relations avec les végétaux

                 Les relations avec les minéraux

                 Les relations avec l’environnement

                 Les relations avec les agents pathogènes

                 Les relations avec l’espace

                 Les relations avec les formes extraterrestres

                 Les relations avec les formes énergétiques immatérielles

                 L’impact général sur l’organisation des territoires entre toutes les formes

   7.11 LE MONDE A TRES LONG TERME

         7.11.1 Le monde des « conscients conscients complets »

                 Généralités

                 L’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence

         7.11.2 Le portrait de l’individu médian

         7.11.3 Les rapports à l’Existant

                 Les relations avec les congénères

                 Les relations avec les animaux

                 Les relations avec les végétaux

                 Les relations avec les minéraux

                 Les relations avec l’environnement

                 Les relations avec les agents pathogènes

                 Les relations avec l’espace

                 Les relations avec les formes extraterrestres

                 Les relations avec les formes énergétiques immatérielles

                 L’impact général sur l’organisation des territoires entre toutes les formes

 

PARTIE 8

Chapitre 8 TENTATIVE D’ANALYSE PLUS FINE ET PLUS PROFONDE

   8.1 GENERALITES, PROBLEMATIQUES, QUESTIONS ET REFLEXIONS (presque) TOUS AZIMUTS

         8.1.1 Quelques éléments « en vrac »

                 Tendance générale : la transformation de « l’organique » et du synthétique en « immatériel »

                 Quelques caractéristiques générales sur les formes énergétiques

                 Les besoins énergétiques des formes

                 Quelques questions et éléments additionnels sur les formes énergétiques et « non énergétiques » et la perception

                 Aparté sur l'identification du psychisme à la forme

                 En définitive…

         8.1.2 Quelques vagues intuitions supplémentaires…

                 Quelques règles intuitives sur l’énergie (en général)

                 Quelques règles intuitives sur les formes énergétiques (l’Existant) 

                 Quelques règles intuitives sur la perception (Ce qui perçoit) 

   8.2 TENTATIVE DE REPRESENTATION DE L’EXISTANT — LA STRUCTURE FONDAMENTALE DU « REEL » CONTEMPORAIN ?

         8.2.1 Les différentes formes énergétiques

                 Les formes énergétiques « pures » immatérielles (non physiques)

                 Les formes énergétiques immatérielles « non physiques »

                 Les formes énergétiques physiques naturelles élémentaires non vivantes

                 Les formes énergétiques physiques vivantes élémentaires

                 Les formes énergétiques matérielles vivantes complexes non perceptives

                 Les formes énergétiques vivantes complexes perceptives élémentaires

                 Les formes énergétiques vivantes complexes perceptives complexes préconscientes

                 Les formes énergétiques physiques synthétiques

                 Les formes énergétiques immatérielles « synthétiques » idéatives et représentatives

                 Les formes énergétiques immatérielles « synthétiques » émotionnelles

                 Les formes énergétiques immatérielles actives et intelligentes

                 Petit aparté sur les intelligences artificielles   

                          Les risques d’appropriation et de prise de contrôle 

                          Les risques d’autonomisation et « d’individualisation »

         8.2.2 L’ensemble des interactions entre les formes énergétiques

                 En interaction avec des formes énergétiques « pures » immatérielles

                 En interaction avec des formes énergétiques immatérielles « non physiques »

                 En interaction avec des formes énergétiques physiques naturelles élémentaires non vivantes

                 En interaction avec des formes énergétiques physiques vivantes élémentaires

                 En interaction avec des formes énergétiques vivantes complexes perceptives élémentaires

                 En interaction avec des formes énergétiques vivantes complexes perceptives complexes

                 En interaction avec des formes énergétiques matérielles physiques synthétiques

                 En interaction avec les formes énergétiques immatérielles idéatives et représentatives         

                 En interaction avec les formes énergétiques immatérielles « synthétiques » émotionnelles

                 En interaction avec les formes immatérielles actives et intelligentes

         8.2.3 Note « personnelle et subjective »

         8.2.4 Note sur « le destin » des formes

         8.2.5 Note supplémentaire sur « le destin » des « parts conscientes »

   8.3 TREND HISTORIQUE

         8.3.1 Période historique antérieure au « Big Bang »

         8.3.2 Période historique post « Big Bang »

         8.3.3 Période historique avant l’émergence du Vivant perceptif

         8.3.4 Période historique après l’émergence des animaux et des Hommes

         8.3.5 Période historique de l’Homme « moderne »

   8.4 PERSPECTIVES

         8.4.1 Période historique à court et moyen termes

         8.4.2 Période historique à long et très long termes

         8.4.3 Commentaires et remarques

   8.5 LA PERCEPTION (AU MOINS SIX « FACONS » MAJEURES « D'HABITER » L'ESPACE DE CONSCIENCE)

         8.5.1 Inexistante ou quasi inexistante (totale ignorance — quasi « pure » inconscience)

         8.5.2 Très restreinte (quasi-totale ignorance)

         8.5.3 Restreinte (quasi-totale ignorance)

         8.5.4 Partielle (Conscience mineure)

         8.5.5 Large (Conscience majeure)

         8.5.6 Pleine et entière (Conscience totale)

 

Chapitre 9 SYNTHESE GENERALE SIMPLIFIEE

 

Conclusion générale

 

ANNEXES

 

ANNEXE 1 : panorama général de la Conscience et de l'Existant – partie 1

ANNEXE 2 : panorama général de la Conscience et de l'Existant – partie 2

ANNEXE 3 : l'Homme et le psychisme, créateurs de différents plans

ANNEXE 4 : le plan réalisationnel actif

ANNEXE 5 : le plan représentatif intellectuel

ANNEXE 6 : l'organisation générale de l’Existant contemporain

ANNEXE 7 : panorama général de la Conscience et de l'Existant – partie 3

ANNEXE 8 : panorama général de la Conscience et de l'Existant – partie 4

ANNEXE 9 : panorama général de la Conscience et de l'Existant – synthèse

 

5 décembre 2017

Carnet n°68 La conscience et l'Existant - Chapitres 8 et 9

Essai / 2015 / L'exploration de l'être

La Vie et l’Existant ne semblent, en réalité, qu’un gigantesque jeu — violent et merveilleux — et une permanente célébration… A hauteur d’Homme, peut-être pourrions-nous penser que nous nous apprenons les uns les autres (et, bien souvent, à notre insu) à mieux les regarder et à mieux les vivre. A mieux les comprendre et à mieux les aimer… mais sur le plan de la Conscience, tout ce « cirque » — aimable ou corrosif — semble (presque) sans importance… Est-ce qui est… et ce qui est n’altère jamais Le Regard…

 

 Nous avons été contraints (pour des raisons d'ordre technique) de diviser la version numérique de cet ouvrage en dix parties.

Sommaire

Chapitre introductif

Chapitres 1 à 5

Chapitre 6 (début)

Chapitre 6 (suite)

Chapitre 6 (suite et fin)

Chapitre 7 (début)

Chapitre 7 (suite et fin)

 

 

Chapitre 8 TENTATIVE D’ANALYSE PLUS FINE ET PLUS PROFONDE

 

Une fois n’est pas coutume, nous débuterons cette tentative d’analyse plus fine et plus profonde de la Conscience et de l’Existant (au regard de leur complexité apparente…) par une multitude de questions, de réflexions et de rappels élémentaires sur l’énergie, les formes énergétiques et la perception. Puis, nous tenterons d’exposer la situation de l’Existant contemporain en essayant de répondre à la question suivante : à quoi ressemble aujourd’hui la structure du « réel » ? Nous inscrirons ensuite cette thématique dans une perspective temporelle en décrivant brièvement ce qu’était (ou pouvait être) la structure du « réel » au cours des âges et en donnant un aperçu de sa possible (ou probable) évolution… Enfin, nous aborderons et développerons les différentes façons (pour l’Homme) de s’inscrire dans (et « d’habiter ») l’espace perceptif de Conscience…

 

 

GENERALITES, PROBLEMATIQUES, QUESTIONS et REFLEXIONS (presque) TOUS AZIMUTS*

* Autant que notre compréhension le permet…

 

Quelques éléments « en vrac »

Il convient d’exposer (et éventuellement de développer) ici certains éléments évoqués dans la première partie de cette analyse afin de mettre en évidence quelques caractéristiques et tendances de l’Existant et de la Conscience…

 

 

Tendance générale : la transformation de « l’organique » en synthétique et du synthétique en « immatériel »

Le psychisme est un espace perceptif immatériel(1) qui nécessite, chez l’Homme, un support organique, le cerveau. Le psychisme perçoit et saisit des besoins et des désirs(2) qui peuvent être considérés comme des manifestations immatérielles dont la satisfaction (jusqu’à aujourd’hui) dépend essentiellement d’éléments et/ou de supports organiques et matériels (et plus rarement immatériels). Aussi, il ne serait pas insensé de penser que pour répondre de façon totalement adéquate (voire parfaite) aux besoins et désirs ressentis, il conviendrait que leur satisfaction soit également immatérielle (et ne dépende, elle aussi, que d’éléments et/ou de supports immatériels).

(1) Identifié à la forme – et même lorsqu’il n’est pas identifié à elle, celle-ci semble le limiter…

(2) Au regard de son identification à la forme, il « s’accapare » ce qui le traverse…

 

En observant l’évolution des réponses humaines aux besoins et aux désirs, on constate, de façon évidente, une tendance à la transformation de « l’organique » en synthétique (qui a des qualités plus grandes en matière (si j’ose dire !) de durabilité, de « facilité » de production, de robustesse etc etc) et une tendance à la transformation – autant que possible – du synthétique en forme immatérielle (avec aujourd'hui, par exemple, le stockage et l’échange d’informations et de données). Mais notons que ces tendances s’accompagnent quasiment toujours d’une conservation des « plaisirs » (et de la « jouissance ») offerts par « l’organique » et le Vivant… Bref, comme si l’Homme aspirait à ôter les désagréments du Vivant en conservant ses agréments… Aussi, l’Homme (qui éprouve des besoins énergétiques sous différentes formes) pourrait être amené à l’avenir à simplifier (de plus en plus) les formes et à les transformer en énergie « pure » (sans support matériel, voire même – peut-être – sans aucun support…).

 

Une question néanmoins se pose : comment transformer « l’organique » en synthétique et le synthétique en forme immatérielle en conservant les agréments du Vivant sans transformer la dimension organique et psychique de l’Homme ? Pour que l’Homme puisse bénéficier de ces nouvelles formes immatérielles, ne doit-il (ou ne devra-t-il) pas également « changer de corps et de psychisme » (avec toutes les questions éthiques que cette « transformation » soulève…) ?

 

Notons, ici, que l’éthique et « l’attachement » de l’Homme au Vivant constitueront sans doute (dans un proche avenir) des paramètres majeurs dans l’évolution de la transformation de l’Existant. Mais il est fort possible que les Hommes ne puissent résister très longtemps aux sirènes du désir et finissent par succomber, tôt ou tard, au confort et aux attraits du progrès…

 

Si l’Homme est amené à transformer la nature de l’Homme, la notion d’humanité aura-t-elle encore un sens (et une place) ? Où se situe la frontière entre l’humanité et la trans-humanité (voire la post humanité) ? Qu’est-ce qui caractérise fondamentalement l’Homme ? Et est-ce donc si essentiel de laisser les Hommes « rester » des Hommes ? Est-il nécessaire de s’arc-bouter sur les fondamentaux humains (pour peu qu’on puisse les définir…) ? Autant de questions qui appellent, bien sûr, au débat… avant « le grand saut » vers l’inconnu… et de voir rire (ou pleurer) l’humanité et ses successeurs sur l’orientation et le sort qu’ils se sont « offerts » ou « façonnés »… Quoi qu’il en soit, en dépit de toutes les stratégies et de toutes les précautions… en dépit de la prudence des uns et de la témérité des autres… quelles que soient les options et les orientations que privilégieront les êtres humains, l’évolution est (bien évidemment) en marche… Et il y a fort à parier que le potentiel inscrit dans le psychisme ne s’attardera pas sur les atermoiements et les tergiversations... Comme toujours, il sera, d’une façon ou d’une autre, amené à s’actualiser… ainsi semblent évoluer les formes (toutes les formes) terrestres…

 

Pour l’heure, soulignons simplement que le psychisme tente :

 

- de transformer les caractéristiques « insatisfaisantes » de « l’organique » en essayant de les « rendre les plus proches possibles(1) » de celles des manifestations immatérielles (en conservant néanmoins sa dimension « agréable et savoureuse ») ;

 

- de transformer les caractéristiques « insatisfaisantes » de la matière naturelle et de la matière synthétique en essayant de les « rendre les plus proches possibles(1) » de celles des manifestations immatérielles (en conservant néanmoins leurs agréments) ;

 

- et de transformer (totalement) « l’organique », la matière et le synthétique en « immatériel » (et, accessoirement, à en contrôler la mobilité) lorsque les caractéristiques sur « le plaisir » et « le bonheur » et/ou lorsque les conséquences sur la transformation des individus demeurent faibles ou inexistantes(2).

(1) Voire identiques.

(2) Au regard des réponses aux « grandes questions » éthiques sur la transformation du Vivant…

 

Gardons néanmoins à l’esprit que toutes les formes sont reliées entre elles et soumises à des systèmes qui régissent leur équilibre général... Et que toute transformation (opérée par les Hommes et leurs successeurs) a et aura immanquablement des répercussions sur les autres formes (leurs caractéristiques, leurs comportements et leurs interactions) mais également sur l’ensemble des systèmes… donc sur la totalité de l’Existant...

 

Après cet exposé (absolument indigent) et ces quelques (« maigres ») informations, essayons-nous à un bref résumé sur les différentes formes d’énergie.

 

 

Quelques caractéristiques générales sur les formes énergétiques

Les formes énergétiques « pures » sont soumises à des caractéristiques et à des cycles (pour rappel, essentiellement : la mobilité, la dimension infinie et « l’inépuisabilité »).

 

Les formes énergétiques physiques naturelles et synthétiques (la matière) sont soumises à une certaine forme d’inertie et à la finitude (en général, à très long terme).

 

Les formes énergétiques physiques vivantes (le corps, les cellules, les bactéries, les végétaux, les animaux, les Hommes) sont soumises à la finitude, à la dégradation, à la fragilité, à la mobilité (avec force d’inertie), à des activités énergivores, à un besoin de repos et à différents besoins en matière alimentaire (les « nourritures énergétiques »).

 

Le psychisme est un espace perceptif immatériel. Il perçoit des sensations (qui sont des manifestations d’énergie ou, disons, des « points de contact » entre l’Existant – à travers ses différentes formes énergétiques physiques, vivantes et immatérielles – et le corps qui est, quant à lui, une forme énergétique physique vivante). Il perçoit également des manifestations de l’Existant (à travers ses différentes formes énergétiques physiques, vivantes et immatérielles). Il fabrique des représentations mentales (qui sont des formes énergétiques immatérielles) et crée des activités psychiques énergivores — mais qui sont aussi créatrices d’énergie — (qui sont des formes énergétiques immatérielles) qui le soumettent (accessoirement et en partie) à un besoin de repos. Il crée des émotions et des sentiments (qui sont des formes énergétiques immatérielles). Il éprouve des besoins et des désirs (qui sont des formes d’énergie immatérielles) et engendre (via les sensations, les besoins, les désirs, les représentations mentales, les émotions et les sentiments) des impulsions (qui sont des formes d’énergie) au cerveau et au corps qui s’actionnent, pour l’un, afin de créer des réflexions (qui sont des formes d’énergie immatérielles) et pour l’autre des actions (qui sont des formes d’énergie immatérielles) qui transforment l’Existant perceptible (et ont donc un impact sur des formes d’énergie physiques, organiques et immatérielles).

 

 

Les besoins énergétiques des formes

Le psychisme (ou, du moins, le cerveau), le Vivant et la matière sont tous soumis à des besoins énergétiques. Sous quelles formes (si j’ose dire !) ?

 

La matière ne semble nécessiter aucun apport énergétique* « au cours de son existence ». L’énergie n’est apparemment indispensable que pour lui « donner naissance » (autrement dit, pour que la forme puisse être créée…).

* Du moins aucun apport énergétique tangible ou « grossier »…

 

Le Vivant élémentaire nécessite des besoins énergétiques pour « son entretien » (se maintenir « en vie », croître et se reproduire essentiellement) et obéit à des cycles et à des phases (le rythme nycthémère ou les saisons par exemple).

 

Le Vivant complexe nécessite des besoins énergétiques pour « son entretien » et ses activités. Et il est soumis à un besoin de repos (afin, sans doute, de « récupérer de l’énergie »…).

 

Le psychisme (ou, du moins, le cerveau) nécessite des besoins énergétiques pour « son entretien » et ses activités. Et il est soumis à un besoin de repos — le sommeil — (sans doute, également, afin de « récupérer de l’énergie »…).

 

Au vu de ces éléments (absolument élémentaires), il nous est néanmoins possible de dégager deux (petites) « lois énergétiques » évidentes :

 

- première « loi » : une corrélation (positive) entre la complexité d’une forme et le nombre de ses besoins(1) (et donc le nombre d’activités pour les satisfaire). En effet, plus une forme énergétique est complexe (ou se complexifie), plus ses besoins énergétiques (et donc ses activités) semblent (ou semblent devenir) nombreux/nombreuses.

 

- deuxième « loi » : une corrélation (positive) entre la complexité d’une forme et son degré de fragilité(1) (ou de fragilisation). En effet, plus une forme énergétique est complexe (ou se complexifie), plus elle semble fragile(2) (ou se fragiliser).

(1) Existerait-il alors un lien entre le nombre de besoins nécessaires (et le nombre d’activités pour les satisfaire) et le degré de fragilité d’une forme ? Peut-être…

(2) Fragilité « mesurée », d’une part, par sa fragilité effective (à pondérer, évidemment, par la « densité » des agrégats et des « intrications » moléculaires — domaine, nous semble-t-il, étudié par la résistance des matériaux) et, d’autre part, au regard de sa durée de vie relativement courte…

 

 

Quelques questions et éléments additionnels sur les formes énergétiques et « non énergétiques » et la perception

Les individus (comme nous l’avons déjà évoqué à maintes reprises) sont des formes énergétiques physiques vivantes perceptives préconscientes, mais pourraient-ils (et seront-ils capables de) se diriger vers un synthétique perceptif ? Est-il possible de créer des formes énergétiques « pures » à partir de formes énergétiques physiques ? Et est-il possible de créer des formes « non énergétiques* » à partir de formes énergétiques « pures » ?

* Si elles existent… (voir ANNEXE 1).

 

Que savons-nous exactement de l’énergie « pure » ? Il est probable que la forme qu’elle revêt (ou prend) soit mobile (et, également, soumise à l’évolution). Mais qu’en est-il des autres manifestations « non énergétiques » de la Conscience (si elles existent… — voir l'annexe 1) ? Sont-elles animées par le mouvement ? Vouées à une sorte d’immobilité ? Sont-elles soumises à une évolution ? A une forme de temporalité ? Nous l’ignorons (mais nous pouvons le supposer).

 

Notre ignorance, ici, est criante… Et les questions fort nombreuses… Ainsi, l’Homme et ses successeurs seront-ils en mesure de transformer l’Existant jusqu’à créer une forme dotée d’une liberté totale, d’une permanence totale, d’une durabilité totale, d’une sécurité totale ? Cette forme devra-t-elle être obligatoirement synthétique et/ou immatérielle ? Les individus seront-ils également contraints de devenir synthétiques et/ou immatériels ? Devront-ils transformer l’ensemble de leur corporalité et seulement une partie de leur cerveau (en protégeant « ses résidus organiques » par des systèmes immatériels) ? Ou seront-ils contraints de le transformer totalement, lui aussi ? Nous n’en savons rien… Et qu’en sera-t-il du sentiment de Plénitude-Complétude, du sentiment d’Unité-unicité, du sentiment d’Amour et d’Intelligence de cette forme (si on parvenait à la créer…) ? Comment, en effet, créer une forme « artificielle » capable de ressentir… ? Comment créer un individu « synthétique » doté d’une sensibilité émotionnelle et d’un sentiment de proximité (et de communion) réellement ressentis et vécus(1) ? Sera-t-il possible de transformer les savoirs en Connaissance (ou en Intelligence) incarnée(2) ? En dépit de toutes les Intelligences Artificielles (dotées des plus pharamineuses capacités mnésiques, analytiques et réflexives), de toutes les substances chimiques et des innombrables paramétrages comportementaux pour entretenir des rapports respectueux et harmonieux, pourra-t-on jamais permettre à une forme (même immatérielle) d’avoir accès à et d’intégrer l’Être ressenti (apanage, semble-t-il (et pour l’heure) de la seule compréhension réelle et intégrée qui passe par la Conscience) ?

(1) Qui amènent à l’Amour (inconditionnel) ressenti et vécu et au sentiment d’Unité...

(2) Elle aussi, réellement ressentie et vécue...

 

Abandonnons-nous un instant à un (médiocre) élan science-fictionnel… Et imaginons un trans-humain ou un post-humain doté d’un corps synthétique (voire immatériel) et d’un cerveau synthétique (ou organique très amélioré avec appareillage synthétique et chimique), doté d’une peau synthétique protectrice contre tous les types d’agression, doté de microcapsules intégrées fournissant aliments, eau, oxygène, capable de se déplacer en tous lieux (voire dans tous les espaces-temps) de façon immédiate, capable de communiquer avec toutes les formes de l’Existant et de toutes les façons qui soient, capable de réaliser tous ses désirs (et pouvant tout créer à tout instant), étant toujours satisfait, avec une liberté et une autonomie totales, avec accès immédiat à la plus haute et sophistiquée des Intelligences Artificielles… tous ces éléments pourraient-ils lui donner accès à une perception et à une compréhension sensibles ? A un sentiment de proximité et d’Amour ressenti et à une Intelligence vivante de l’Être ? Probablement pas… Cet « avatar » se contenterait sans doute de mimer l’Amour « le plus haut » et l’Intelligence « la plus haute » mais ne les ressentirait probablement pas… (nous aborderons ces thématiques dans les paragraphes consacrés aux Intelligences Artificielles).

 

En dépit de notre ignorance, notons simplement dans cette rubrique, que l’émergence de l’Homme, forme perceptive préconsciente, semble constituer une sorte de point de bascule (un point de retournement) dans l’évolution des formes terrestres tant sur le plan de la perception (l’espace de Conscience) que sur le plan énergétique (l’évolution de l’Existant). En effet, au fil de l’évolution humaine, on a assisté à la fois à une (lente et progressive) orientation du psychisme vers la Conscience (amélioration de la perception et de la compréhension) et à une (lente et progressive) orientation des formes énergétiques (physiques et vivantes) et de leurs supports vers des formes énergétiques immatérielles*.

* A ce propos, pourrait-on les considérer comme de nouvelles formes d’énergie « pure » ? Ou comme de simples formes immatérielles (non « pures ») ?

 

Essayons de résumer… de façon schématique, nous pourrions dire que les formes ont connu, avant l’émergence de l’Homme, différentes transformations sur le plan énergétique : transformation d’une partie de l’énergie « pure » en matière, transformation d’une partie de la matière en Vivant. Et que l’Homme a tenté, au cours de son évolution, de transformer une partie du Vivant en synthétique et une partie du synthétique en « immatériel ». Et la boucle est bouclée… Quant au plan perceptif, on pourrait dire qu’avant l’émergence de l’Homme, les formes énergétiques terrestres (du moins, celles dont nous avons connaissance : agglomérats d’atomes et de molécules, cellules, bactéries, végétaux…) n’avaient pas accès à la perception qui n’a été possible qu’avec l’apparition du cerveau (et des animaux). Et il apparaît (avec une certaine évidence) que depuis l’émergence de l’Homme, la perception éminemment restreinte des animaux s’est progressivement « élargie » et semble tendre, au fil de l’histoire humaine (et au cours du cheminement spirituel*), vers une ouverture et un élargissement (perceptifs) gradués de plus en plus conséquents : perception restreinte, partielle, large, puis totale…

* Qui s’avère un processus éminemment naturel (au sens qu’il s’inscrit dans la nature et le « cours » des choses…)

 

Ce point de retournement constitue, en réalité, un élément majeur dans l’histoire du monde et l’évolution des formes énergétiques. Notons qu’il correspond essentiellement au fait que le psychisme perceptif préconscient aspire à retrouver les caractéristiques de la Conscience et de l’énergie « originelles » et au fait qu’il demeure « prisonnier » de l’identification à la forme et de la grossièreté, de la fragilité et de « l’exigence énergétique » des formes vivantes et physiques. Ces deux éléments l’enjoignent donc, d’une part, d'améliorer « sa » perception et « sa » compréhension — à travers la spiritualité — afin de retrouver la Plénitude-Complétude et l’Unité-unicité… et le contraignent, d’autre part, à transformer les formes de l’Existant pour les rendre plus simples, plus durables et moins « exigeantes » afin de retrouver les caractéristiques des formes énergétiques « pures » (voire, peut-être même, de les améliorer…).

 

 

APARTE SUR L’IDENTIFICATION DU PSYCHISME A LA FORME

On pourrait penser (un peu hâtivement) que l’identification du psychisme à la forme, à l’origine de tant de comportements délétères, est une erreur (une grossière erreur). Mais il se pourrait fort bien que cette perspective (apparemment erronée) soit, en réalité, une sorte de « stratégie » de la Conscience, « poussant » et « obligeant » les individus à moult attitudes, postures, créations, découvertes et inventions qu’ils n’auraient sûrement pris la peine d'adopter ou de réaliser si cette identification ne s’était pas manifestée, moult « choses » nécessaires à l’évolution des formes terrestres en mesure de créer progressivement (très graduellement) toutes les transformations indispensables à l’avènement, un jour (un jour lointain), d’une forme terrestre capable des mêmes prouesses que la Conscience...

 

Donnons, à ce propos, quelques (triviaux) exemples. Ainsi, s’il n’y avait pas eu d’identification au corps, les parents (et, plus particulièrement, les mères*) auraient-ils eu l’idée de prendre soin de leur progéniture ? Au-delà des « instincts maternels » naturels (en vigueur également chez certains animaux), il y a fort à parier que le fait de considérer (le plus souvent) « leurs » enfants comme « le prolongement d’eux-mêmes » les a fortement incités, au fil de l’histoire, à les éduquer et à les prendre en charge tout au long de leur éducation... sans cet aspect, peut-être que l’espèce humaine se serait éteinte ? Qui sait ?

* Au cours de l'histoire humaine, les mères se sont toujours montrées, semble-t-il, plus enclines (que les pères) à s'occuper et à prendre soin des enfants...

 

Autre exemple, la favorisation de l’intérêt personnel et la compétition entre les individus (deux aspects humains éminemment liés à l’identification à la forme), si ces caractéristiques n’avaient pas eu cours (et si elles n’existaient pas aujourd’hui), les Hommes auraient-ils été (et seraient-ils toujours) aussi actifs dans les domaines de la recherche et du progrès ? Les multiples découvertes et les nombreuses inventions* qui ont jalonné l’histoire humaine (et qui continueront de fleurir à l’avenir) auraient-elles vu (ou pourraient-elles voir) le jour sans la concurrence et l’esprit de compétition qui règnent (et ont toujours régné) entre les Hommes ? A quoi ressemblerait le monde aujourd’hui si l’égocentrisme et la rivalité n’avaient pas constitué « des fondamentaux » de la nature humaine ?

* Notons que bon nombre de progrès et d'inventions a vu le jour « grâce » à la guerre (et aux armées) – summum de la « favorisation égocentrique » et de la défense des intérêts personnels . Les domaines qui ont bénéficié de ces progrès et inventions sont très nombreux : médecine, transport, architecture, communication, télécommunication etc etc.

 

 

En définitive…

En définitive (en l’état actuel de notre compréhension), il semblerait que ce que l’on nomme l’Existant (la totalité de l’Existant) ne soit (en réalité) composé que de l’ensemble des formes énergétiques (physiques, vivantes et immatérielles) et de leurs innombrables (sinon infinis) liens et relations. En vérité, l’Existant ne semble être que cela… Et les manifestations de l’Existant (ce que l’on appelle — en général — les situations, les évènements et les circonstances) ne sont que les interactions (ou les rencontres) entre différentes formes énergétiques (sans oublier, évidemment, tous les éléments et formes qui les composent). Prenons quelques exemples*…

* Dans ces exemples, nous n’évoquerons que les formes principales et apparentes… par souci de clarté, nous ne prendrons pas en considération tous les éléments et toutes les formes qu'elles « abritent » et/ou dont elles sont constituées…

 

Ainsi, un accident de voiture est essentiellement la rencontre « violente » entre deux formes énergétiques physiques (les véhicules) et entre deux formes énergétiques physiques vivantes perceptives (les conducteurs). Une bagarre ou une agression physique est essentiellement la rencontre « violente » entre deux formes énergétiques vivantes perceptives (les protagonistes de la rixe). Une maladie est essentiellement la rencontre (ou la conséquence de la rencontre) entre une forme vivante élémentaire (une bactérie par exemple) et une forme vivante perceptive ou non perceptive (un individu). La respiration est essentiellement la relation entre une forme vivante perceptive ou non perceptive (un être) et des formes physiques élémentaires (l’air – l’oxygène). Une émotion (la colère par exemple) est essentiellement une forme énergétique immatérielle induite par une relation entre une forme vivante perceptive (un individu) et une forme (ou des formes) énergétique(s) de l’Existant (une de ses manifestations, une situation par exemple) qui peut créer, à son tour, des formes énergétiques immatérielles – si l’individu « actionne son corps » (en donnant un coup de poing par exemple — coup de poing qui est une forme d’énergie) – qui vont avoir des répercussions sur d’autres formes vivantes perceptives (comme l’individu qui va recevoir ce coup)… qui, à leur tour, vont être à l’origine de formes énergétiques sur les plans organique et psychique (une blessure et le mécontentement par exemple) qui peuvent, à leur tour, créer d’autres formes énergétiques… qui, à leur tour, vont pouvoir créer… etc etc.

 

 

Cet écheveau de liens, de relations, de rencontres et de transformations est absolument dantesque. Presque inimaginable*… extraordinairement dense et riche puisque, en réalité, tout (chaque chose) entretient des liens avec tout (toutes choses). Bref, il est peu de dire que toutes les formes énergétiques sont (pour le moins) reliées et interdépendantes...

* Cette valse infinie et incessante peut, en effet, donner le tournis…

 

 

Quelques vagues intuitions supplémentaires…

Avant de donner (ou, du moins, essayer de donner…) un aperçu de la structure fondamentale du « réel » (ou de ce qui pourrait passer pour telle…), tentons de récapituler ce que nous savons des règles (vaguement évoquées jusqu’ici…) qui semblent régir l’énergie, les formes énergétiques et la perception (qu’elle soit psychique ou consciente) :

 

 

Quelques règles intuitives sur l’énergie (en général)

- l’énergie (mais aussi les formes énergétiques) semble(nt) obéir à deux grandes forces antagonistes : la création et la destruction, sans doute nécessaires pour assurer un équilibre général viable et, peut-être également, (en partie et entre autres) pour « réguler » l’incroyable puissance créatrice et « proliférante(1) » du Vivant(2)… ;

(1) Plus une forme semble « fragile », plus elle semble « proliférante » (avec un taux de reproduction très élevé)...

(2) Sans ces deux forces, les « agglomérats d’énergie » deviendraient absolument « monstrueux » (et ils peuvent parfois l’être déjà à certains égards…).

  

- le mouvement libre et fluide* (non contraint) semble être l’une des principales caractéristiques de l’énergie. Comme si elle pouvait se définir (quasiment ontologiquement) comme « mouvement naturel libre et fluide »… ;

* La respiration, l’alimentation et l’usage de l’eau (comme boisson et comme instrument d’hygiène) sont, à ce titre, de « parfaits » exemples dans le monde du Vivant (et, en particulier, chez les êtres humains). Le corps utilise les formes énergétiques dont il a besoin (l’air, les nutriments, l’eau), les transforme et les élimine en leur permettant ainsi de suivre leur cours (de poursuivre leur mouvement…). Notons que chez l’Homme, le psychisme (soucieux de sécurité et de confort) a tendance à stocker et à accumuler les formes énergétiques (en les rendant, de fait, plus ou moins immobiles) ou du moins en « bloque » la mobilité. Ainsi, en matière de déplacement, le nomadisme pourrait être considéré comme une forme de fluidité et la sédentarité (en particulier lorsque la société voit grossir le nombre de ses membres) comme une forme de blocage (ou « d’emprisonnement » de l’énergie) qui génère très souvent des conséquences très néfastes (pollution, promiscuité qui mène à la violence…). Les accumulations de toutes sortes sur le plan matériel (objets), sur le plan organique (alimentation entre autres exemples…) et sur le plan psychique (idées, préoccupations, soucis) semblent restreindre ou bloquer la fluidité et le mouvement « naturel » des formes énergétiques et occasionnent (en général) des problèmes, des troubles et des difficultés (encombrement, fragilisation, saturation etc etc).

 

- toute stagnation ou emprisonnement de l’énergie semble avoir de lourdes conséquences sur les supports énergétiques (dégradation) et les formes à proximité ou en lien avec le support (effets délétères) ;

 

- l’énergie nécessitée par une forme semble opérer naturellement des « priorités de distribution » (en privilégiant, par exemple, la physiologie (et le métabolisme du corps — et ses besoins énergétiques) par rapport au psychisme (les besoins énergétiques du cerveau) afin que la forme se maintienne « en vie » ou ne se dégrade pas de façon irrémédiable…).

 

 

Quelques règles intuitives sur les formes énergétiques (l’Existant)

- toute forme énergétique semble obéir à un cycle « naturel » composé de plusieurs étapes : apparition (lorsque les conditions propices sont réunies…), croissance, maturité, décroissance et disparition ;

 

- une forme énergétique (si elle n’entre pas « en relation » avec des formes agressives, dangereuses et potentiellement destructrices qui la dégradent (ou la détruisent) avant qu’elle n’achève son cycle « naturel »), semble disposer d’un « stock » d’énergie limité et subit progressivement une dégradation de son support qui devient de moins en moins apte à se ressourcer en énergie. La conjonction de ces deux éléments (stock apparemment « limité » et dégradation du support) finit par engendrer une sorte d’épuisement (énergétique) de la forme et donc, sa disparition ;

 

- tous les composants et les éléments des formes énergétiques (qui disparaissent) semblent se recombiner avec d’autres formes de l’Existant.

 

 

Quelques règles intuitives sur la perception (Ce qui perçoit)

- la perception semble éminemment conditionnée et « limitée » par son support* (et ses capacités perceptives) ;

* En l’absence de support, la perception ne serait-elle alors soumise à aucune « restriction » ? Nous l’ignorons…

 

- l’attention semble posséder une capacité de focale* importante (au point, parfois, de se voir « envahie » et/ou de ne « voir » que « l’objet » qui « occupe » l’ensemble de l’espace perceptif…) ;

* Notons, ici, que la concentration (psychique) que l'on pourrait qualifier de « focale resserrée » semble très énergivore et semble « affaiblir » le support perceptif (ainsi, par exemple, après une longue et intense concentration, le cerveau « se fatigue », devient moins performant et éprouve le besoin de se reposer et de se « régénérer »...).

 

- l’attention semble être prioritairement « attirée » par les manifestations énergétiques problématiques et/ou déséquilibrées (rencontres « difficiles » entre formes énergétiques, excès ou manque d’énergie, stagnations énergétiques etc etc) ;

 

- la Conscience (la Pleine Conscience) semble laisser l’énergie et les formes énergétiques circuler librement selon leurs mouvements naturels ;

 

- Quant au psychisme, il semble (au contraire) aspirer à contrôler* l’énergie et les formes énergétiques (leurs mouvements, leur intensité, leur puissance…) et s’oppose souvent (au regard de son besoin de confort, de sécurité et de satisfaction) à de nombreux mouvements énergétiques « naturels ». Attitude et posture qui donnent naissance à de très nombreux problèmes et problématiques… mais aussi à quelques progrès et « prouesses » en matière de transformation de l’Existant…

* En la (ou les) stoppant, en la (ou les) canalisant, en la (ou les) régulant, en la (ou les) amplifiant, en la (ou les) pérennisant etc etc.

 

- plus l’espace de Conscience est « habité » largement, plus la forme (à laquelle l’espace perceptif est « associé » — par procédé identificatoire plus ou moins fort) semble « poreuse » aux caractéristiques majeures de la Conscience (Paix, Joie, Amour et Intelligence…) et « influencée* » par elles…

* Sur tous les plans : en matière de compréhension, de perception, d’être, de comportement etc etc.

 

- par extension, plus l’espace de Conscience est « habité » largement, moins la forme (à laquelle l’espace perceptif est « associé ») semble soumise à la mobilité(1), moins elle semble encline à des mouvements de destruction (« volontaire ») et plus elle a tendance à se montrer « bienveillante » (dans ses interactions avec les autres formes)… et à « adopter » une vision large et globale(2) …;

(1) L’immobilité est l’une des caractéristiques de la Conscience qui doit être, ici, pondérée par les caractéristiques spécifiques de la forme en matière de mobilité (ses mouvements naturels).

(2) A contrario, notons que plus l’espace de Conscience est « habité » de façon étroite et restreinte, moins la forme (à laquelle l’espace perceptif est « associé ») est en mesure de percevoir la globalité de la (ou des) situation(s) où elle se trouve mêlée ou impliquée, plus elle est amenée à « suivre » ses seuls élans énergétiques et/ou instinctifs (de façon quasi similaire aux formes non perceptives…).

 

Rappelons également qu’au sein de l’Existant (qui ne semble constitué que de l’ensemble des relations et des rencontres entre toutes les formes énergétiques immatérielles, physiques et vivantes), une forme énergétique physique vivante perceptive préconsciente (l’Homme), insatisfaite de ces caractéristiques, aspire (essentiellement) à trois choses :

 

En premier lieu, elle aspire à transformer toutes les formes énergétiques (dont le corps, les modalités cérébrales et les modes de fonctionnement psychique) qui lui semblent porteuses de désagréments et de souffrance pour leur attribuer les mêmes qualités que l’énergie « pure » (permanence, durabilité etc etc) ;

 

Elle aspire également à vivre (et à ressentir) ce que « vit » la Conscience (la Pleine Conscience). Pour rappel, il s’agit (essentiellement) de :

 

l’Invulnérabilité-Pureté (ne pas être touché et/ou « entaché » par l’énergie et les formes qu’elle revêt – les formes énergétiques) ;

 

- la Joie, la Tranquillité, la Plénitude-Complétude ;

 

- l’Amour et l’Unité-unicité (être « l'Un » et « l'Unique » avec indissociabilité entre Ce qui perçoit — la Conscience — et ce qui est perçu — les formes énergétiques) ;

 

- et l’Intelligence (compréhension de la Conscience, de l’énergie, de toutes les formes énergétiques et de tous leurs liens).

 

Et elle désire enfin (et, sans doute, dans une moindre mesure) que toutes les formes énergétiques (ou, du moins, un certain nombre d’entre elles…) entretiennent des rapports moins violents et moins instrumentalisants* et puissent « nouer » des relations d’égalité, d’harmonie, de respect et d’Amour (sans être blessées, dégradées ou détruites au cours de leurs interactions)… Cette aspiration concerne évidemment, en premier lieu, (comme nous l’avons déjà souligné à maintes reprises) les relations entre les individus (les Hommes) mais également les relations entre les individus et les animaux, les relations entre les individus et les végétaux, les relations entre les individus et les formes vivantes élémentaires, les relations entre les individus et l’environnement (au sens large) mais aussi les relations entre les animaux, les relations entre les végétaux, les relations entre les formes vivantes élémentaires, les relations entre les animaux et les végétaux, les relations entre les animaux et les formes vivantes élémentaires etc etc.

* Des relations moins (ou beaucoup moins) gouvernées par la force, sans « dominant » ni « dominé », sans « vainqueur » ni « vaincu »…

 

Au regard de ces éléments, essayons à présent de donner un aperçu de la trame de l’Existant aujourd’hui…

 

 

 

TENTATIVE DE REPRESENTATION DE L’EXISTANT : ENSEMBLE DES MANIFESTATIONS MAJEURES DE L’EXISTANT TERRESTRE ET DE LEURS RELATIONS — LA STRUCTURE FONDAMENTALE DU « REEL » CONTEMPORAIN ?

 

Cette tentative de représentation de l’Existant (terrestre) pourrait bien constituer la structure fondamentale du « réel » contemporain… Dans cette perspective, l’Existant serait aujourd’hui essentiellement constitué d’une dizaine de types majeurs de formes énergétiques…

 

 

Les différentes formes énergétiques

 

Les formes énergétiques « pures » immatérielles (non physiques)

Elles sont sans doute existantes de toute éternité (consubstantialité de la Conscience et de l’énergie) ou ont été créées par la Conscience (au choix).

 

Nous ignorons si elles peuvent être catégorisées. On ignore leur nature*, leur constitution, leurs mouvements et si elles ont ou peuvent avoir des supports (et leur nature) même si on le subodore… Ces formes pourraient être simplement chargées et/ou composées d’énergie « pure ».

* Il est possible qu’une partie de ces formes soit constituée des éventuelles « parts conscientes » humaines (entre autres) après la mort physique du corps, dotées d’un degré très élevé de compréhension et de sensibilité « spirituelle ».

 

Au vu des caractéristiques de l’Existant (interdépendance énergétique à tous les niveaux et perception, plus ou moins consciente, de certaines formes), il est fort probable qu’elles interagissent avec toutes les (ou une partie des) autres formes. Ces formes énergétiques « pures » immatérielles entretiennent donc peut-être, à l’état « non actif », des interactions intra et inter formelles (en chaque forme et entre toutes les formes qui les composent) intra et inter individuelles (au sein d’une même forme et avec une partie de l'Existant) au niveau de l’énergie « pure » qu'il convient de prendre en compte.

 

Ces formes pourraient (si besoin) être d’abord catégorisées, de façon éminemment simpliste et manichéenne, selon leur « nature relationnelle » (déclinée en mauvaise/hostile, neutre/moyenne, bonne/bienveillante) et éventuellement (pour certaines d’entre elles) selon deux autres critères principaux, leur degré de compréhension (décliné en nul, faible, moyen, élevé, total) et leur degré de sensibilité – sentiment d’Amour et d’Unité (décliné en nul, faible, moyen, élevé, total). Notons que ces deux derniers critères sont sans doute susceptibles d’influer sur le degré de « contrôle et de maîtrise » de leurs actions et de leurs orientations. Et bien que ces formes demeurent actuellement inconnues, il semble évident qu’elles se déplacent (de par la nature extrêmement mobile de l’énergie*).

* Il semble évident qu’il existe une corrélation entre le degré de mobilité de l’énergie (et sa vitesse) et la masse (la densité physique) de son support. En l’absence de support matériel, il est fort probable que les formes énergétiques soient extrêmement mobiles et rapides.

 

Et comme toutes les manifestations, elles obéissent, sans doute, essentiellement à cinq grandes phases : apparition*, croissance, maturité, déclin et disparition auxquelles nous ajouterons la mobilité (les déplacements). Ces mouvements diffèrent sans doute en quantité et en intensité. Pour simplifier, nous pourrions donc définir quatre grands types de quantité (nulle, faible, moyenne, élevée) et trois grands types d’intensité (faible, moyenne, élevée) et obtenir ainsi, pour chaque mouvement, dix grands types de catégories : quantité nulle, quantité faible et intensité faible, quantité faible et intensité moyenne, quantité faible et intensité élevée, quantité moyenne et intensité faible, quantité moyenne et intensité moyenne, quantité moyenne et intensité élevée, quantité élevée et intensité faible, quantité élevée et intensité moyenne et quantité élevée et intensité élevée.

 

… sans omettre, bien sûr, de noter pour chaque mouvement l’ensemble des interactions intra et inter formelles intra et inter individuelles au niveau de l’énergie « pure ».

* Il se pourrait bien que le Big Bang et l’Univers aient été créés par l’apparition de l’une de ces formes énergétiques (ou l’un de ses mouvements)…

 

 

Les formes énergétiques immatérielles « non physiques »

Cette catégorie pourrait être constituée d’individus du monde du « sans forme » et/ou de formes extra-terrestres par exemple mais également de nombreuses autres formes*…

* Cette catégorie semble très hétérogène et pourrait réunir des formes de nature très différente qu’il conviendrait de catégoriser selon des paramètres plus précis et plus appropriés...

 

En l’état actuel de nos connaissances, il semblerait que l’on puisse dégager trois grandes sous-catégories : celle qui regrouperait les mouvements énergétiques(1), celle qui regrouperait les formes immatérielles non perceptives(2) et enfin celle qui regrouperait les formes immatérielles perceptives(3). Notons que cette dernière sous-catégorie conserve toujours ses mystères (au regard de notre perception, de notre connaissance et de nos savoirs actuels), mais il est probable que ces manifestations (en particulier celles qui concernent les formes non terrestres… si elles existent — et cette probabilité est sans doute loin d’être nulle…) aient des caractéristiques soit totalement différentes de ce que nous connaissons, soit très proches du Vivant élémentaire terrestre (bactéries), soit très proches des manifestations énergétiques actives et intelligentes (les intelligences artificielles) ou de la Conscience (sans compter toutes les autres possibilités avec une palette très variée..).

(1) Il est fort possible (que les physiciens pardonnent notre ignorance…) que tous les mouvements (quel que soit leur support excepté l’énergie cinétique), les mouvements ondulatoires (ondes), les mouvements vibratoires (vibrations) mais aussi la vitesse, la lumière, l’électromagnétisme, l’électricité (le courant électrique), le thermo-dynamisme, la combustion (la chaleur) etc etc puissent être classés dans cette catégorie*. Il est donc fort possible qu’une grande partie des échanges intra et inter atomiques, intra et inter moléculaires, intra et inter cellulaires appartienne à cette catégorie.

* A moins (il nous faudrait alors faire appel aux compétences d’un physicien) que l’on puisse catégoriser (de façon très synthétique — voire éminemment simpliste) l’ensemble des mouvements énergétiques ainsi :

- les mouvements d’énergie sans support : mouvements d’énergie « pure » (demeurent, en l’état actuel des savoirs et de la connaissance, méconnus et mystérieux) ;

- les mouvements d’énergie immatériels (sans support physique) : la lumière ;

- les mouvements d’énergie immatériels (sans support physique « perceptible ») : mouvements ondulatoires, vibratoires… (par exemple les sons, les ondes diverses…) ;

- les mouvements d’énergie avec support matériel (physique non vivant) : par exemple la gravitation, les mouvements électriques, les mouvements électromagnétiques, les transformations chimiques, les ondes hertziennes ;

- les mouvements d’énergie avec support organique : par exemple les mouvements hormonaux, certains mouvements électriques (corporels), certaines transformations chimiques (corporelles), les mouvements électrochimiques (corporels), la respiration ;

- les mouvements d’énergie avec support cérébro-organique (corps-cerveau) : par exemple la locomotion, les émotions, les désirs, les pensées, les réflexions, les effets de la lecture, de l’écriture, de visionnages divers et de l’absorption dans des univers virtuels, les rêves, l’imagination, les projections, les anticipations, l’expression, les mouvements relationnels et communicationnels.

- les mouvements d’énergie avec support synthétique etc etc.

(2) Il est fort probable que les formes que nous avons qualifiées de formes énergétiques idéatives et représentatives (pensées, idées, contenus des paroles, rêves, mondes virtuels…), de formes énergétiques émotionnelles et de formes actives et intelligentes (algorithmes, intelligences artificielles) appartiennent à cette catégorie mais de par leur spécificité dans le monde humain, nous les avons classées dans des catégories différentes.

(3) Il est aussi fort possible qu’une partie de ces formes soit constituée des éventuelles « parts conscientes » humaines et animales (entre autres) en cours de transmigration après la mort physique du corps (et avant une éventuelle réincarnation), dotées d’un degré de compréhension et de sensibilité « spirituelle » de nul à moyennement élevé… et de celles qui « entreprennent » un voyage astral et/ou chamanique…

 

Ces formes pourraient être simplement chargées et/ou composées d’énergie « pure » et d’énergie immatérielle (elle-même (sans doute) chargée et/ou composée d’énergie « pure »). Mais notre ignorance (concernant leur nature, leurs caractéristiques, leurs éventuels supports, leurs actions et leurs interactions) nous enjoint de jouer « la carte de la prudence »… Comme pour les formes énergétiques précédentes, il est très probable qu’elles interagissent et se déplacent. Ces formes énergétiques immatérielles non physiques entretiennent donc probablement, à l’état « non actif », une multitude d’interactions intra et inter formelles (en chaque forme et entre toutes les formes qui les composent) intra et inter individuelles (au sein d’une même forme et avec une partie de l'Existant) aux niveaux de l’énergie « pure » et de l’énergie immatérielle qu'il convient de prendre en compte.

 

Ces formes pourraient être catégorisées en premier lieu, de façon toujours aussi simpliste, selon leur « nature relationnelle » (déclinée en mauvaise/hostile, neutre/moyenne, bonne/bienveillante) et (pour certaines de ces formes – les formes perceptives) selon deux autres critères principaux, leur degré de compréhension (décliné en nul, faible, moyen, élevé, total) et leur degré de sensibilité – sentiment d’Amour et d’Unité (décliné en nul, faible, moyen, élevé, total).

 

Et comme les formes précédentes, elles sont sans doute soumises à cinq grandes phases : apparition, croissance, maturité, déclin et disparition auxquelles nous ajouterons la mobilité (les déplacements) que nous pourrions décliner selon la quantité et l’intensité en reprenant, pour chaque mouvement, les dix grands types de catégories : quantité nulle, quantité faible et intensité faible, quantité faible et intensité moyenne, quantité faible et intensité élevée, quantité moyenne et intensité faible, quantité moyenne et intensité moyenne, quantité moyenne et intensité élevée, quantité élevée et intensité faible, quantité élevée et intensité moyenne et quantité élevée et intensité élevée.

 

… sans omettre, bien sûr, de noter pour chaque mouvement l’ensemble des interactions intra et inter formelles intra et inter individuelles au niveau de l’énergie « pure » et au niveau de l’énergie immatérielle (« non pure »).

 

 

Les formes énergétiques physiques naturelles élémentaires non vivantes

Cette catégorie pourrait être essentiellement composée de formes gazeuses, solides et liquides élaborées naturellement et constituées en combinaisons atomiques et moléculaires physico-chimiques* (carbone, hydrogène, oxygène, azote, phosphore, souffre, dioxygène, néon, dioxyde de souffre etc etc – air, eau, terre, roches, minéraux naturels, sels minéraux…).

* Entre autres éléments physiques évidemment…

 

Ces formes sont constituées d’atomes et de combinaisons moléculaires(1) et (sans doute) en partie chargées et/ou composées d’énergie « pure » et d’énergie immatérielle (elle-même (sans doute) chargée et/ou composée d’énergie « pure »). Et comme toutes les autres manifestations existantes, elles interagissent et sont plus ou moins mobiles(2). Ces formes énergétiques physiques naturelles élémentaires non vivantes entretiennent donc naturellement, à l’état « non actif », une multitude d’interactions intra et inter formelles (en chaque forme et entre toutes les formes qui les composent) intra et inter individuelles (au sein d’une même forme et avec une partie de l'Existant) sans doute aux niveaux de l’énergie « pure » et de l’énergie immatérielle et indubitablement aux niveaux atomique et moléculaire qu’il convient de prendre en compte.

 

On pourrait, en premier lieu, décliner ces formes selon leur nature terrestre ou non terrestre (avec, pour cette dernière catégorie, une sous déclinaison très simpliste en « non terrestre proche » et en « non terrestre lointain »).

 

Ensuite, nous pourrions catégoriser ces formes selon leur « nature relationnelle » (déclinée en vitale et indispensable à la Vie terrestre, neutre, dangereuse/toxique, létale). Comme les formes précédentes, elles sont également soumises aux cinq grands mouvements : apparition, croissance, maturité, déclin et disparition auxquels nous ajouterons la mobilité (les déplacements). Et, pour chacun de ces mouvements, nous reprendrons les dix grands types de catégories précédentes : quantité nulle, quantité faible et intensité faible, quantité faible et intensité moyenne, quantité faible et intensité élevée, quantité moyenne et intensité faible, quantité moyenne et intensité moyenne, quantité moyenne et intensité élevée, quantité élevée et intensité faible, quantité élevée et intensité moyenne et quantité élevée et intensité élevée.

 

… sans omettre, bien sûr, de noter pour chaque mouvement l’ensemble des interactions intra et inter formelles intra et inter individuelles au niveau de l’énergie « pure », au niveau de l’énergie immatérielle (« non pure ») et aux niveaux atomique et moléculaire.

(1) Combinaisons moléculaires créées par combinaisons d’énergies pures et immatérielles permettant les conditions de leur avènement (création de la matière)...

(2) Plus la masse (et la densité moléculaire) de ces formes est faible, plus leur mobilité semble potentiellement élevée. De façon générale, il semble que les formes gazeuses soient plus mobiles que les formes liquides, elles-mêmes plus mobiles que les formes solides (mais en la matière (si j’ose dire !) nous nous en remettons aux savoirs des physiciens…).

 

 

Les formes énergétiques physiques vivantes élémentaires

Cette catégorie pourrait être essentiellement constituée de cellules, de bactéries (pathogènes et non pathogènes) et de virus…

 

Ces formes énergétiques pourraient d’abord être déclinées en fonction de leur milieu (quatre grands milieux : terre, eau, air, matière organique). Puis, être catégorisées selon leur « nature relationnelle » (déclinée en vitale et indispensable à la Vie terrestre, neutre, dangereuse/toxique).

 

Ces formes énergétiques sont (sans doute) chargées et/ou composées d’énergie « pure » et d’énergie immatérielle (elle-même (sans doute) chargée et/ou composée d’énergie « pure »).

 

Elles sont composées :

- d’atomes et de combinaisons moléculaires* (eux-mêmes (sans doute) chargés et/ou composés d’énergie « pure » et d’énergie immatérielle).

* Combinaisons moléculaires physico-chimiques créées par combinaisons de manifestations énergétiques naturelles élémentaires (non vivantes) permettant les conditions de leur avènement (création du Vivant).

 

Elles sont également organisées en systèmes organiques élémentaires (alimentaire, circulatoire, reproductif, de protection) que nous pourrions catégoriser selon deux paramètres majeurs, un paramètre qualitatif (décliné en inexistant, faible/défaillant, normal, élevé/performant) et un paramètre quantitatif (décliné en déficitaire, en équilibre, excédentaire) et ajouter (si nécessaire) un paramètre de qualité « relationnelle » (déclinée en mauvaise/hostile, neutre/moyenne, bonne/bienveillante).

 

Notons que ces formes énergétiques physiques vivantes élémentaires (et leurs systèmes organiques élémentaires) entretiennent naturellement, à l’état non actif, une multitude d’interactions intra et inter formelles (en chaque forme et entre toutes les formes qui les composent) intra et inter individuelles (au sein d’un même individu et avec une partie de l'Existant) sans doute aux niveaux de l’énergie « pure » et de l’énergie immatérielle et, indubitablement, aux niveaux atomique et moléculaire qu’il convient de prendre en compte.

 

Ensuite, nous pourrions répertorier les actions et mouvements majeurs qu’opère chacune de ces formes élémentaires vivantes (essentiellement naître, s’alimenter, évacuer, se reproduire, croître, se développer et s’étendre, se protéger, se dégrader, vieillir, mourir). Chacune de ces actions pourrait d’abord être catégorisée selon un paramètre de qualité « relationnelle » (déclinée en mauvaise/hostile, neutre/moyenne, bonne/bienveillante), puis, être déclinée en fonction des dix grands types de mouvements : quantité nulle, quantité faible et intensité faible, quantité faible et intensité moyenne, quantité faible et intensité élevée, quantité moyenne et intensité faible, quantité moyenne et intensité moyenne, quantité moyenne et intensité élevée, quantité élevée et intensité faible, quantité élevée et intensité moyenne et quantité élevée et intensité élevée.

 

… sans omettre, bien sûr, de noter pour chaque mouvement l’ensemble des interactions intra et inter formelles intra et inter individuelles au niveau de l’énergie « pure », au niveau de l’énergie immatérielle (« non pure »), aux niveaux atomique et moléculaire (hormonal, chimique, électrique, électrochimique…), aux niveaux cellulaire et bactérien (si nécessaire) et au niveau de chaque système organique.

 

 

Les formes énergétiques matérielles vivantes complexes non perceptives

Cette catégorie pourrait être essentiellement constituée des végétaux.

 

Ces formes énergétiques pourraient d’abord être déclinées en fonction de leur milieu (deux grands milieux : terre et eau). Et pour chacun de ces milieux, catégoriser les végétaux, de façon éminemment simpliste, selon leurs caractéristiques apparentes* avec trois classes : grand/imposant, moyen, petit/chétif auxquelles on pourrait (éventuellement) ajouter d’autres paramètres en matière d’alimentation humaine (taux de rendement agricole — faible, moyen, élevé —, effets sur la santé — faible, moyen, élevé —…).

* Paramètres souvent importants en matière de puissance et de « domination » dans les interactions intra et inter spécifiques...

 

Ces formes énergétiques sont (sans doute) chargées et/ou composées d’énergie « pure » et d’énergie immatérielle (elle-même (sans doute) chargée et/ou composée d’énergie « pure »).

 

Elles sont composées :

- d’atomes et de combinaisons moléculaires* (eux-mêmes (sans doute) chargés et/ou composés d’énergie « pure » et d’énergie immatérielle)

- d’éléments vivants élémentaires (essentiellement cellules et bactéries) (eux-mêmes (sans doute) chargés et/ou composés d’énergie « pure » et d’énergie immatérielle et composés d’atomes et de molécules)

* Combinaisons moléculaires et cellulaires créées par complexification et sophistication des combinaisons moléculaires et cellulaires des manifestations énergétiques matérielles vivantes élémentaires (création du Vivant complexe).

 

Ces formes sont également organisées en systèmes organiques élémentaires (alimentaire, circulatoire, sensitif, reproductif, de protection) que nous pourrions catégoriser selon deux paramètres majeurs, un paramètre qualitatif (décliné en inexistant, faible/défaillant, normal, élevé/performant) et un paramètre quantitatif (décliné en déficitaire, en équilibre, excédentaire) et ajouter (si nécessaire) un paramètre de qualité « relationnelle » (déclinée en mauvaise/hostile, neutre/moyenne, bonne/bienveillante).

 

Notons que ces formes énergétiques vivantes complexes non perceptives (et leurs différents systèmes organiques élémentaires) entretiennent naturellement, à l’état non actif, une multitude d’interactions intra et inter formelles (en chaque forme et entre toutes les formes qui les composent) intra et inter individuelles (au sein d’un même individu et avec une partie de l'Existant) sans doute aux niveaux de l’énergie « pure » et de l'énergie immatérielle et, indubitablement, aux niveaux atomique et moléculaire et aux niveaux cellulaire et bactérien qu’il convient de prendre en compte.

 

Ensuite, nous pourrions répertorier les actions et mouvements majeurs qu’opère chacune de ces formes vivantes complexes (essentiellement naître, « respirer », s’alimenter, évacuer, se reproduire, croître, se développer et s’étendre, se protéger, se dégrader, vieillir, mourir). Chacune de ces actions pourrait d’abord être catégorisée selon un paramètre de qualité « relationnelle » (déclinée en mauvaise/hostile, neutre/moyenne, bonne/bienveillante), puis, être déclinée en fonction des dix grands types de mouvements : quantité nulle, quantité faible et intensité faible, quantité faible et intensité moyenne, quantité faible et intensité élevée, quantité moyenne et intensité faible, quantité moyenne et intensité moyenne, quantité moyenne et intensité élevée, quantité élevée et intensité faible, quantité élevée et intensité moyenne et quantité élevée et intensité élevée.

 

… sans omettre, bien sûr, de noter pour chaque mouvement l’ensemble des interactions intra et inter formelles intra et inter individuelles au niveau de l’énergie « pure », au niveau de l’énergie immatérielle, aux niveaux atomique et moléculaire (hormonal, chimique, électrique, électrochimique…), aux niveaux cellulaire et bactérien et au niveau de chaque système organique.

 

 

Les formes énergétiques vivantes complexes perceptives élémentaires

Cette catégorie pourrait être essentiellement constituée des insectes et des animaux.

 

Ces formes énergétiques pourraient d’abord être déclinées en fonction de leur milieu (trois grands milieux : terre, air et eau). Et pour chacun de ces milieux, catégoriser les animaux selon trois paramètres principaux* : leurs caractéristiques apparentes avec trois classes : grand/imposant, moyen, petit/chétif, leur régime alimentaire : herbivore, carnivore, omnivore… ou « leur » rang dans la chaîne alimentaire (consommateur primaire, secondaire, tertiaire, super prédateur) et leur potentiel « naturel » de dangerosité inter spécifique avec trois classes également : faible, moyen, élevé auxquels on pourrait (éventuellement) ajouter d’autres paramètres en matière d’alimentation humaine (reproductibilité, reproductivité en élevage, taux nutritif en protides, lipides, glucides etc).

* Paramètres importants pour les formes perceptives qui induisent (en général) des mouvements spontanés et/ou réactifs très différents ; il y a, bien sûr, des formes qui échappent à ces classifications (citons, par exemple, le cactus chez les végétaux et la salamandre chez les animaux). Le Vivant est toujours très enclin à se diversifier et à multiplier les formes qui échappent aux classifications…

 

NOTE : on pourrait également (si besoin) opérer une dichotomie entre les animaux sauvages (vivant en milieu naturel (la nature) et vivant en milieu protégé (réserve)) et les animaux domestiqués (animaux de compagnie, de travail, d’élevage) et établir, pour ces dernières catégories, plusieurs sous catégories en matière de conditions d’existence : « qualité de vie », conditions de vie plus ou moins proches de « l’état naturel » etc etc.

 

Ces formes énergétiques sont (sans doute) chargées et/ou composées d’énergie « pure » et d’énergie immatérielle (elle-même (sans doute) chargée et/ou composée d’énergie « pure »).

 

 

Elles sont composées :

- d’atomes et de combinaisons moléculaires* (eux-mêmes (sans doute) chargés et/ou composés d’énergie « pure » et d’énergie immatérielle)

- d’éléments vivants élémentaires (essentiellement cellules et bactéries) (eux-mêmes (sans doute) chargés et/ou composés d’énergie « pure » et d’énergie immatérielle et composés d’atomes et de molécules)

* Combinaisons moléculaires et cellulaires créées par complexification et sophistication des combinaisons moléculaires et cellulaires des manifestations énergétiques matérielles vivantes complexes (accession à la perception élémentaire).

 

Elles sont organisées en systèmes organiques complexes (sensoriel, circulatoire, nerveux, endocrinien, alimentaire, respiratoire, reproductif, de locomotion, de protections immunitaire et organique) et pour les animaux les plus sophistiqués en systèmes psycho-organiques plus ou moins complexes (cognitif, affectif et imaginatif élémentaires, expressif, communicatif) que nous pourrions catégoriser selon deux paramètres majeurs, un paramètre qualitatif (décliné en inexistant, faible/défaillant, normal, élevé/performant) et un paramètre quantitatif (décliné en déficitaire, en équilibre, excédentaire) et ajouter (si nécessaire) un paramètre de qualité « relationnelle » (déclinée en mauvaise/hostile, neutre/moyenne, bonne/bienveillante).

 

Notons que ces formes énergétiques vivantes complexes perceptives élémentaires (et leurs systèmes organiques et psycho-organiques) entretiennent naturellement, à l’état non actif, une multitude d’interactions intra et inter formelles (au sein de chaque forme et entre toutes les formes qui les composent) intra et inter individuelles (au sein d’un même individu et avec une partie de l'Existant) sans doute aux niveaux de l’énergie « pure » et de l’énergie immatérielle et, indubitablement, aux niveaux atomique et moléculaire (hormonal, chimique, électrique, électrochimique…) et aux niveaux cellulaire et bactérien qu’il convient de prendre en compte.

 

Ensuite, nous pourrions établir pour chacune de ces catégories, les actions et mouvements organiques et psycho-organiques majeurs* qu’opère chacune de ces formes vivantes complexes perceptives (essentiellement naître, voir, entendre, toucher, respirer, se déplacer, s’alimenter, évacuer, se reproduire, s’abriter, rencontrer, croître, se développer et s’étendre, se protéger, se battre, blesser, se blesser, tuer, fuir, se soumettre, s’exprimer, communiquer, sentir, jouer, réfléchir et rêver (pour les plus sophistiquées), se reposer, dormir, se dégrader, vieillir, mourir). Chacune de ces actions pourrait d’abord être catégorisée (si nécessaire) selon un paramètre de qualité « relationnelle » (déclinée en mauvaise/hostile, neutre/moyenne, bonne/bienveillante), puis, être déclinée en fonction des dix grands types de mouvements : quantité nulle, quantité faible et intensité faible, quantité faible et intensité moyenne, quantité faible et intensité élevée, quantité moyenne et intensité faible, quantité moyenne et intensité moyenne, quantité moyenne et intensité élevée, quantité élevée et intensité faible, quantité élevée et intensité moyenne et quantité élevée et intensité élevée.

 

… sans omettre, bien sûr, de noter pour chaque mouvement l’ensemble des interactions intra et inter formelles intra et inter individuelles au niveau de l’énergie « pure », au niveau de l’énergie immatérielle, aux niveaux atomique et moléculaire (hormonal, chimique, électrique, électrochimique…), aux niveaux cellulaire et bactérien et au niveau de chaque système organique et psycho-organique.

* Ces actions pourraient, bien sûr, être largement affinées et déclinées (si nécessaire).

 

 

Les formes énergétiques vivantes complexes perceptives complexes préconscientes

Cette catégorie pourrait être essentiellement constituée des Hommes.

 

Ces formes énergétiques pourraient être déclinées en fonction de plusieurs paramètres(1) : leur caractéristiques apparentes avec trois classes : « normal », atypique (singulier) perçu comme négatif, atypique (singulier) perçu comme positif, leur taille avec trois classes : grand/imposant, moyen, petit/chétif, leur « beauté plastique » : laid, médian, beau, leur degré d’ouverture : ouvert/accueillant, neutre, fermé/hostile, leur degré de compréhension (intelligence « réelle ») : faible, moyen, élevé et leur degré d’attention et de sensibilité « émotionnelle » spirituelle (degré d’Amour et sentiment d’Unité ressentis) avec quatre classes : faible, moyen, élevé et total auxquels on pourrait éventuellement ajouter leur « nature énergétique émotionnelle(2) » (sombre, neutre, lumineuse).

(1) Paramètres importants pour les formes perceptives qui induisent (en général) des mouvements spontanés et/ou réactifs très différents...

(2) Le degré de positivité (et d’attractivité) qu’elles dégagent (sorte d’aura et/ou de charisme) et leur capacité à influer sur la qualité et la nature des émotions et le sentiment intérieur général des individus avec lesquels elles sont en interaction. Notons également, ici, que les individus (certains individus) sont capables (plus ou moins) de capter les énergies ambiantes et environnantes et/ou les énergies provisoirement intégrées à d’autres individus (corps et/ou psychisme) pour augmenter leur puissance énergétique et l’utiliser à diverses fins (visées égotico-utilitaristes, instrumentalisantes, spirituelles…).

 

Notons que si l’on souhaite élaborer une typologie plus complexe et plus complète, nous pourrions reprendre l’ensemble ou les principaux critères des grands types psychiques (que nous avons définis dans la partie sur le psychisme) qui sont, pour mémoire, la posture/soi (très égotique/égotique/égotico-altruiste/altruisto-égotique), la posture/aux autres (libre/libro-dépendant/dépando-libre/dépendant), la posture/aux manifestations de l’Existant (satisfait/satisfo-insatisfait/insatisfo-satisfait/insatisfait), la posture/au temps et aux contenus psychiques (soucieux/anxio-relax/relaxo-soucieux/relax), la posture/au monde et à la vie (prudent/intrépido-prudent/intrépide).

 

Ces formes énergétiques sont (sans doute) chargées et/ou composées d’énergie « pure » et d’énergie immatérielle (elle-même (sans doute) chargée et/ou composée d’énergie « pure »).

 

Elles sont composées :

- d’atomes et de combinaisons moléculaires* (eux-mêmes (sans doute) chargés et/ou composés d’énergie « pure » et d’énergie immatérielle)

- d’éléments vivants élémentaires (essentiellement cellules et bactéries) (eux-mêmes (sans doute) chargés et/ou composés d’énergie « pure » et d’énergie immatérielle et composés d’atomes et de molécules)

* Combinaisons moléculaires et cellulaires créées par complexification et sophistication des combinaisons moléculaires et cellulaires des manifestations énergétiques matérielles vivantes perceptives élémentaires (accession à la perception complexe).

 

Elles sont organisées en systèmes organiques complexes (sensoriel, circulatoire, nerveux, endocrinien, alimentaire, respiratoire, reproductif, de locomotion, de protections immunitaire et organique), en systèmes psycho-organiques complexes (émotionnel, sexuel, affectif, de protection psychique, communicatif) et en systèmes psychiques complexes (cognitif, sentiments, réflexif, représentatif, organisationnel, distractif, imaginatif, expressif, de compréhension). Toutes ces fonctions pourraient être catégorisées selon deux paramètres majeurs, un paramètre qualitatif (décliné en inexistant, faible/défaillant, normal, élevé/performant) et un paramètre quantitatif (décliné en déficitaire, en équilibre, excédentaire) et (si nécessaire) ajouter un paramètre de qualité « relationnelle » (déclinée en mauvaise/hostile, neutre/moyenne, bonne/bienveillante).

 

Notons que ces formes vivantes complexes perceptives complexes préconscientes (et leurs systèmes organiques, psycho-organiques et psychiques) entretiennent naturellement, à l’état non actif, une multitude d’interactions intra et inter formelles (au sein de chaque forme et entre toutes les formes qui les composent) intra et inter individuelles (au sein d’un même individu et avec une partie de l'Existant) sans doute aux niveaux de l’énergie « pure » et de l’énergie immatérielle et, indubitablement, aux niveaux atomique et moléculaire (hormonal, chimique, électrique, électrochimique…) et aux niveaux cellulaire et bactérien qu’il convient de prendre en compte.

 

Ensuite, nous pourrions établir pour chacune de ces catégories, les actions et mouvements organiques, psycho-organiques et psychiques majeurs(1) (et les actions et mouvements « psycho-conscients » et « conscients » majeurs(2) ») qu’opère chacune de ces formes vivantes complexes perceptives préconscientes : essentiellement(3) naître, voir, observer, entendre, toucher, s’alimenter, cuisiner, goûter, vomir, boire, s’enivrer, évacuer, respirer, éternuer, se moucher, sentir, se déplacer, marcher, courir, sauter, plonger, nager, danser, ramper, amener, emmener, conduire, voyager, s’habiller, se dévêtir, se loger, se chauffer, se rafraîchir, nettoyer, se laver, se reproduire, accoucher, avorter, allaiter, se soigner, se défendre, se battre, blesser, se blesser, tuer, se soumettre, se forcer, obéir, suivre, repousser, éloigner, s’éloigner, ignorer, abandonner, se préparer, s’exercer, s’entraîner, se développer et s’étendre, croître, grandir, désirer, être envieux, espérer, attendre, anticiper, se projeter, prévoir, accepter, autoriser, refuser, contrarier, interdire, être frustré, déçu, faire, faire du sport, de la musique, la gueule, l’idiot, le con, la fête, une surprise, des histoires, l’école buissonnière, allégeance, les comptes, le bilan, l'amour, la guerre, du théâtre, son cinéma, le bordel, de la prison, cavalier seul… jardiner, bricoler, s’enfermer, emprisonner, s’emprisonner, s’éreinter, s’accidenter, utiliser, ouvrir, fermer, allumer, éteindre, tirer, pousser, déplacer, enfouir, enterrer, planter, déplanter, semer, récolter, arracher, couper, abattre, cueillir, lancer, commencer, arrêter, organiser, ranger, déranger, s’organiser, se regrouper, s’isoler, dominer, instrumentaliser, abîmer, détruire, se débarrasser, se perdre, humilier, prendre soin, contrôler, maîtriser, obliger, menacer, embêter, taquiner, inquiéter, séduire, tromper, se tromper, se venger, juger, emprisonner, « s’émotionner » (émotions et sentiments), être contrarié, s’ennuyer, s’attrister, s’apeurer, s’inquiéter, s’énerver, se calmer, se désoler, regretter, se réjouir, s’enorgueillir, s’embarrasser, se désespérer, se persuader, se mentir, s’illusionner, s’abandonner, s’extasier, s’émerveiller, pleurer, rire, ironiser, se crisper, se détendre, se rassurer, aimer, tomber amoureux, détester, célébrer, gagner, perdre, se manifester, parader, se pavaner, rencontrer, accueillir, pardonner, s’excuser, embrasser, caresser, aider, secourir, encourager, consoler, donner, partager, s’attacher, échanger économiquement, payer, acheter, consommer, vendre, négocier, spéculer, s’assurer, communiquer, s’exprimer, parler, crier, chuchoter, marmonner, écouter, se moquer, questionner, mentir, penser, réfléchir, analyser, noter, exposer, apprendre, oublier, écrire, lire, calculer, se représenter, s’organiser, s’informer, créer, construire, fabriquer, transformer, travailler, se distraire, jouer, s’amuser, s’absorber, se droguer, se connecter, rêver, imaginer, s’épanouir, ressentir, comprendre, s’interroger, découvrir, pratiquer, méditer, se reposer, dormir, se dégrader, vieillir, se suicider, mourir – et évidemment beaucoup d’autres auxquels on n’a pas pensé…). Chacune de ces actions pourrait d’abord être (si nécessaire) catégorisée selon un paramètre de qualité « relationnelle » (déclinée en mauvaise/hostile, neutre/moyenne, bonne/bienveillante), puis, être déclinée en fonction des dix grands types de mouvements : quantité nulle, quantité faible et intensité faible, quantité faible et intensité moyenne, quantité faible et intensité élevée, quantité moyenne et intensité faible, quantité moyenne et intensité moyenne, quantité moyenne et intensité élevée, quantité élevée et intensité faible, quantité élevée et intensité moyenne et quantité élevée et intensité élevée.

 

… sans omettre, bien sûr, de noter pour chaque mouvement l’ensemble des interactions intra et inter formelles intra et inter individuelles au niveau de l’énergie « pure », au niveau de l’énergie immatérielle, aux niveaux atomique et moléculaire (hormonal, chimique, électrique, électrochimique…), aux niveaux cellulaire et bactérien et au niveau de chaque système organique, psycho-organique et psychique.

(1) Voici la liste (bien sûr non exhaustive) des actions essentielles que peut entreprendre un être humain :

naître, voir, entendre, toucher, bronzer, s’alimenter, grossir, se muscler, goûter, vomir, boire, s’enivrer, évacuer respirer, fumer, s’étouffer, s’essouffler, éternuer, se moucher, sentir, voir, observer, toucher, se déplacer, marcher, courir, sauter, plonger, nager, danser, tomber, s’asseoir, se retourner, ramper, amener, emmener, conduire, voyager, s’habiller, se dévêtir, se loger, se chauffer, se rafraîchir, nettoyer, se laver, se reproduire, accoucher, avorter, allaiter, être malade, se soigner, se prémunir, se vacciner, se défendre, se battre, s’armer, blesser, poignarder, tirer au pistolet, se blesser, tuer, abattre, torturer, cogner, se cogner, se soumettre, se forcer, obéir, suivre, repousser, éloigner, s’éloigner, disparaître, ignorer, abandonner, revendiquer, s’embrigader, se barricader, se développer et s’étendre, croître, grandir, désirer, être envieux, espérer, attendre, anticiper, prévoir, accepter, autoriser, refuser, interdire, être frustré, déçu, faire, faire souffrir, du sport, de la musique, la gueule, l’idiot, le con, la fête, une surprise, des histoires, l’école buissonnière, allégeance, les comptes, le bilan, l'amour, la guerre, du théâtre, la paix, son cinéma, le bordel, de la prison, cavalier seul… jardiner, bricoler, s’enfermer, emprisonner, s’emprisonner, s’éreinter, s’accidenter, utiliser, ouvrir, fermer, allumer, éteindre, tirer, pousser, jeter, déplacer, enfouir, enterrer, planter, déplanter, semer, récolter, arracher, couper, abattre, émietter, cueillir, lancer, commencer, arrêter, organiser, ranger, déranger, coller, réparer, découvrir, recouvrir, s’organiser, se regrouper, s’isoler, dominer, instrumentaliser, abîmer, détruire, se débarrasser, se perdre, humilier, prendre soin, contrôler, maîtriser, obliger, menacer, embêter, taquiner, inquiéter, engueuler, terroriser, séduire, attirer, tromper, se tromper, se venger, juger, démentir, emprisonner, « s’émotionner » (émotions et sentiments), s’ennuyer, s’attrister, s’apeurer, s’inquiéter, s’énerver, exploser, se calmer, se désoler, regretter, se réjouir, s’enorgueillir, s’embarrasser, se désespérer, se persuader, se mentir, s’illusionner, s’abandonner, s’extasier, s’émerveiller, pleurer, rire, ironiser, se crisper, se détendre, se rassurer, aimer, tomber amoureux, détester, célébrer, gagner, perdre, se manifester, se forcer, parader, se pavaner, s’émoustiller, rencontrer, accueillir, copuler, baiser, pardonner, s’excuser, embrasser, caresser, enlacer, se pendre, aider, secourir, encourager, consoler, donner, partager, assister, s’attacher, se détacher, échanger économiquement, payer, acheter, consommer, vendre, négocier, spéculer, s’assurer, communiquer, s’exprimer, parler, crier, chuchoter, marmonner, s’égosiller, écouter, se moquer, questionner, mentir, penser, réfléchir, analyser, noter, exposer, apprendre, oublier, écrire, lire, calculer, se représenter, s’organiser, s’informer, créer, construire, fabriquer, transformer, travailler, se distraire, jouer, s’amuser, s’absorber, se droguer, se connecter, rêver, imaginer, s’épanouir, ressentir, comprendre, s’interroger, pratiquer, méditer, se reposer, dormir, se dégrader, vieillir, se suicider, mourir…

(2) Il existe peu d’actions humaines liées à la perception consciente (essentiellement : regarder et écouter(A) de façon impersonnelle et ressentir(B) ) car « vivre et habiter la Conscience » signifie, en vérité, « être »... En outre (comme nous l'avons déjà évoqué), plus la perception est consciente, moins les actes sont hostiles et réactifs… et plus ils sont fonctionnels et appropriés à la situation.

(A) Ce qui correspond globalement à méditer – de façon impersonnelle – à chaque instant (actif et non actif)...

(B) En particulier, ressentir finement les énergies...

(3) Nous avons fait figurer ici les actions humaines majeures auxquelles nous avons adjoint quelques-unes de leurs déclinaisons. Notons également qu’il conviendrait d’ajouter à chacune de ces actions (majeures) toutes les actions périphériques (ainsi, par exemple, à l’action de s’alimenter, il faudrait ajouter avoir faim, saliver, cuisiner, mettre la table, saler, poivrer, débarrasser, faire la vaisselle, essuyer la vaisselle etc etc)…

 

 

Les formes énergétiques physiques synthétiques

Cette catégorie pourrait être essentiellement constituée des fabrications humaines existantes (jusqu’à nos jours) — (naturelles(1), non naturelles(2) et mixtes(3)) élémentaires (bois, brique, céramique par exemple) et complexes (papier, livre, voiture, fusée, verre, plastique, écran tactile, ordinateur par exemple).

(1) Fabrications composées d'éléments naturels (une table par exemple).

(2) Fabrications composées d'éléments synthétiques (un arôme de synthèse par exemple).

(3) Fabrications composées d'éléments naturels et synthétiques (un couteau par exemple).

 

Ces formes énergétiques pourraient être catégorisées selon plusieurs paramètres(1) : leur usage (consommable/ingérable et non consommable/non ingérable), leur nature (passive/sans fonctionnement automatique ni appareillage de mise en marche, mixte/avec fonctionnement automatique et appareillage de mise en marche, active(2) avec occupant/mobile avec fonctionnement et appareillage de mise en marche, active(2) sans occupant/mobile avec fonctionnement et appareillage de mise en marche), leur composant principal (essentiellement, « naturel », plastique, chimique, mécanique, électrique, électronique, électromagnétique, numérique…), leur toxicité(3) (faible, moyenne, élevée), leur durabilité (courte, moyenne, longue), leur résistance (faible, moyenne, élevée) et pour les formes mixtes et actives mobiles et non mobiles (avec et sans occupant), nous pourrions ajouter quelques paramètres supplémentaires comme le degré d’activation humaine (total, élevé, mixte, faible, nul), le degré de contrôle humain en état de fonctionnement activé (total, élevé, moyen, faible, nul) et la mise en réseaux (nulle, faible, moyenne, élevée, totale).

(1) D’autres paramètres pourraient sans doute être définis de façon plus pertinente…

(2) L’avenir verra sans doute se développer, d’une incroyable façon, les formes synthétiques « intelligentes » (grâce à l’intelligence artificielle intégrée) qui se déclencheront sans activation humaine volontaire (comme aujourd’hui, l’ouverture automatique des portes, l’allumage lumineux automatique, les voitures « truffées » d’électronique, d’informatique et de numérique qui se garent et entreprennent quantité d’actions sans la moindre intervention humaine…)

(3) L’ingestion, le contact ou la proximité d’un certain nombre de ces formes synthétiques sont néfastes et/ou sources d'effets ou de mouvements potentiellement ou réellement dangereux : les effets chimiques des médicaments par exemple, les émanations (pour la colle), les ondes (pour la radio, la télévision, le smartphone, le scanner ou l’IRM). Autres exemples : la nocivité de l’amiante (pour les matériaux) et celle de la radioactivité (pour les bombes atomiques) etc etc.

 

Ces formes énergétiques sont (sans doute) chargées et/ou composées d’énergie « pure » et d’énergie immatérielle (elle-même (sans doute) chargée et/ou composée d’énergie « pure »).

 

Elles sont composées :

- d’atomes et de combinaisons moléculaires* (eux-mêmes (sans doute) chargés et/ou composés d’énergie « pure » et d’énergie immatérielle).

 

Et celles qui sont constituées de formes naturelles peuvent être composées d’éléments vivants élémentaires (essentiellement cellules et bactéries) (eux-mêmes (sans doute) chargés et/ou composés d’énergie « pure » et d’énergie immatérielle et composés d’atomes et de molécules).

* Combinaisons moléculaires créées par combinaisons de molécules naturelles et/ou de synthèse (création de la matière synthétique).

 

Notons que ces formes énergétiques physiques synthétiques entretiennent naturellement, à l’état « non actif », une multitude d’interactions intra et inter formelles (en chaque forme et entre toutes les formes qui les composent) intra et inter individuelles (au sein d’une même forme et avec une partie de l'Existant) sans doute aux niveaux de l’énergie « pure » et de l’énergie immatérielle et aux niveaux atomique et moléculaire et éventuellement (pour celles qui sont constituées de formes naturelles et/ou organiques) aux niveaux cellulaire et bactérien qu’il convient de prendre en compte.

 

Comme toutes les autres manifestations existantes, elles sont soumises à cinq grands mouvements : apparition, croissance, maturité, déclin et disparition auxquels nous ajouterons la mobilité (les déplacements). Et, pour chacun de ces mouvements, nous reprendrons les dix grands types de catégories : quantité nulle, quantité faible et intensité faible, quantité faible et intensité moyenne, quantité faible et intensité élevée, quantité moyenne et intensité faible, quantité moyenne et intensité moyenne, quantité moyenne et intensité élevée, quantité élevée et intensité faible, quantité élevée et intensité moyenne et quantité élevée et intensité élevée.

 

… sans omettre, bien sûr, de noter pour chaque mouvement l’ensemble des interactions intra et inter formelles intra et inter individuelles au niveau de l’énergie « pure », au niveau de l’énergie immatérielle, aux niveaux atomique et moléculaire et aux niveaux cellulaire et bactérien (si nécessaire).

 

 

Les formes énergétiques immatérielles « synthétiques » idéatives et représentatives

Cette catégorie (qui nécessite, semble-t-il, un support cognitif et de stockage et/ou un support expressif et/ou communicationnel) pourrait être essentiellement constituée des créations humaines en matière de pensée, d’idée, de représentation de l’Existant, de réflexion, de savoir, de connaissance (en général, essentiellement, liée à la cognition et à la sensibilité et plus modérément aux émotions), d’expression, de rêve, de symbolisme, de communication et d’art (en général, lié à la fois à la cognition et aux émotions) — contenus et sens des langages, des paroles, des représentations mentales, des rêves, des images, contenus des livres et des œuvres d’art — qui connaissent un formidable progrès en ce début de 21ème siècle, en particulier, avec le développement des possibilités créatives (jeux vidéo*), de leurs supports de stockage et de transmission (communication de données et d’informations — sous forme de langages et d’images — essentiellement les fichiers numériques). Autrefois (il n’y a pas encore si longtemps), ces formes immatérielles nécessitaient des supports organiques ou synthétiques plus ou moins élémentaires (comme le papier, les livres etc etc).

* Le « contenu » d’un jeu vidéo est, non seulement, une forme énergétique idéative mais peut être également (et est très souvent) un monde virtuel au sein duquel peuvent exister quantité de « formes virtuelles » (des personnages par exemple) que l’on peut « prendre en main » et déplacer dans « leur univers »… Notons également, ici, que la seule différence entre un personnage virtuel de jeu vidéo, un personnage de roman et un personnage imaginaire (que l’on imagine « dans sa tête ») est leur support (le support du premier est une forme synthétique idéative (le contenu du logiciel de jeu) qui a, elle-même, un support synthétique (la console de jeux par exemple), le support du deuxième est une forme synthétique idéative (le contenu du roman) qui a, elle-même, un support synthétique (le livre — l’objet livre) et le support du troisième est une forme synthétique idéative (la pensée dans laquelle « s'insère » le personnage) qui a, elle-même, un support immatériel (le psychisme ou, du moins, la cognition) qui a, lui-même, un support organique (le cerveau)…

 

Aujourd’hui, ces formes immatérielles nécessitent (globalement) un support matériel synthétique élaboré (ordinateur, smartphone, cloud, numérique…) mais l’avenir connaîtra sans doute l’émergence, le développement substantiel, puis la généralisation de supports de plus en plus immatériels jusqu’à la probable éradication de tout support...

 

Aujourd’hui, ces formes énergétiques pourraient être catégorisées selon plusieurs paramètres(1) : leur nature (passive, mixte, active/interactive(2)), leur puissance « créatrice et/ou énergétique(3) », leur potentiel d’actualisation de la compréhension (nul, faible, moyen, élevé) et/ou leur dangerosité pour l’esprit – savoirs et compréhension – (néfaste, neutre, bénéfique), leur « nature énergétique émotionnelle(4) » (sombre, neutre, lumineuse), leur potentiel addictif (faible, moyen, élevé), leur accessibilité à un tiers avec risque d’utilisation à des fins instrumentalisantes (faible, moyenne, élevée) et la mise en réseaux (nulle, faible, moyenne, élevée, totale).

(1) Avec leur développement, leur généralisation, leur amélioration et leur sophistication probables, d’autres paramètres pourraient sans doute être définis de façon plus idoine…

(2) Nous assistons aujourd’hui à un fort développement de l’interactivité psychique et organique (participation « active » du corps et du psychisme plongé dans l’univers virtuel des jeux vidéo par exemple) mais aussi (comme nous l’avons déjà évoqué) à une interactivité grossière et illusoire comme voter avec un smartphone ou un buzzer dans des jeux télévisés ou donner l’illusion à un utilisateur de jeu vidéo ou à un « consommateur culturel » dans une installation « artistique » d’intervenir et/ou de faire des choix… Rappelons (une nouvelle fois) que l’interactivité d’une œuvre d’art ou d’un livre a toujours existé sans qu’intervienne la nécessité d’effectuer le moindre geste ou la moindre action…

(3) Les contenus (idées, pensées, textes, images...) semblent « posséder » différents degrés de puissance de « propagation » et « d’imprégnation » chez les individus « récepteurs » en influant sur eux, de façon plus ou moins forte ou marquée... Bien sûr, cette capacité ou ce « pouvoir » est aussi très dépendant(e) de la réceptivité des individus, mais il est indéniable que certaines œuvres dégagent et/ou semblent « habitées » (plus largement que les autres) par une grande force... et une grande puissance créatrice et/ou de « vérité »...

(4) Le degré de positivité qu’elles dégagent et leur capacité à influer sur la qualité et la nature des émotions et le sentiment intérieur général des individus « récepteurs »…

 

Ces formes énergétiques sont (sans doute) chargées et/ou composées d’énergie « pure » et d’énergie immatérielle (elle-même (sans doute) chargée et/ou composée d’énergie « pure »).

 

Notons que ces formes énergétiques synthétiques idéatives et représentatives entretiennent peut-être, à l’état « non actif », des interactions intra et inter formelles (en chaque forme et entre toutes les formes qui les composent) et probablement des interactions inter individuelles (avec une partie de l'Existant) aux niveaux de l’énergie « pure » et de l’énergie immatérielle qu’il convient de prendre en compte.

 

Comme toutes les manifestations, elles sont soumises* à cinq grands mouvements : apparition, croissance, maturité, déclin et disparition auxquels nous ajouterons la mobilité (les déplacements). Et, pour chacun de ces mouvements, nous reprendrons les dix grands types de catégories : quantité nulle, quantité faible et intensité faible, quantité faible et intensité moyenne, quantité faible et intensité élevée, quantité moyenne et intensité faible, quantité moyenne et intensité moyenne, quantité moyenne et intensité élevée, quantité élevée et intensité faible, quantité élevée et intensité moyenne et quantité élevée et intensité élevée.

 

… sans omettre, bien sûr, de noter pour chaque mouvement l’ensemble des interactions intra et inter formelles intra et inter individuelles au niveau de l’énergie « pure » et au niveau de l’énergie immatérielle (« non pure »).

* Sans doute de façon moins tangible (que pour les formes précédentes)... en tout cas, de façon plus « subtile »...

 

 

Les formes énergétiques immatérielles « synthétiques » émotionnelles

Cette catégorie pourrait être essentiellement constituée des émotions, des sentiments et des désirs, en particulier, lorsqu'ils se trouvent en « circulation* » (autrement dit, lorsqu'ils sont « détachés » de la forme énergétique qui en est à l’origine).

* Cette catégorie semble avoir plus ou moins de pertinence selon les mouvements et les situations (on en fera donc un usage approprié). Cette catégorie supplémentaire semble valide, en particulier, si l’on « détache » ces manifestations de leur source (des formes qui en sont à l’origine) ou de leur support en faisant l’hypothèse que ces formes existent et circulent et/ou se propagent pour un temps donné (avec, en général, une durée de vie très faible, une fois « détachées » de leur source ou de leur support) et qu’elles peuvent être, elles-mêmes, à l’origine de divers mouvements énergétiques. Par exemple, une atmosphère « chargée » de colère, alors que l’individu « en colère » a quitté les lieux ou « l'atmosphère émotionnelle » d'un rêve nocturne qui continue de « flotter » au gré des énergies après que l’individu se soit levé, peut être ressentie et/ou « captée » par d’autres formes et individus... Une partie de ces manifestations énergétiques semble être créée par le psychisme (ou, du moins, par le cerveau) des formes perceptives humaines (essentiellement) et animales (parfois). Mais peuvent-elles avoir d’autres origines et être créées par d’autres formes (non humaines et non animale) ? Notre connaissance actuelle (beaucoup trop superficielle) ne permet de répondre à ces questions…

 

Ces formes énergétiques supposent un support psycho-organique source. Et pourraient être catégorisées selon leur dangerosité intra individuelle pour l’esprit (néfaste, neutre, bénéfique) et leur potentiel de dangerosité à l’égard des autres formes (faible, moyen, élevé).

 

Ces formes énergétiques sont (sans doute) chargées et/ou composées d’énergie « pure ») et d’énergie immatérielle (elle-même (sans doute) chargée et/ou composée d’énergie « pure ».

 

Notons que ces formes énergétiques synthétiques émotionnelles entretiennent peut-être, à l’état « non actif », des interactions intra et inter formelles (en chaque forme et entre toutes les formes qui les composent) et intra et inter individuelles (au sein d'une même forme et avec une partie de l'Existant) aux niveaux de l’énergie « pure » et de l’énergie immatérielle qu’il convient de prendre en compte.

 

Et ces formes sont soumises à cinq grands mouvements : apparition, croissance, maturité, déclin et disparition auxquels nous ajouterons la mobilité (les déplacements). Et, pour chacun de ces mouvements, nous reprendrons les dix grands types de catégories : quantité nulle, quantité faible et intensité faible, quantité faible et intensité moyenne, quantité faible et intensité élevée, quantité moyenne et intensité faible, quantité moyenne et intensité moyenne, quantité moyenne et intensité élevée, quantité élevée et intensité faible, quantité élevée et intensité moyenne et quantité élevée et intensité élevée.

 

… sans omettre, bien sûr, de noter pour chaque mouvement l’ensemble des interactions intra et inter formelles intra et inter individuelles au niveau de l’énergie « pure » et au niveau de l’énergie immatérielle (« non pure »).

 

 

Les formes énergétiques immatérielles actives et intelligentes

Cette catégorie pourrait être essentiellement constituée des logiciels (éventuellement des fichiers numériques*), des algorithmes, des programmes informatiques et des intelligences artificielles.

* Qui peuvent aussi ne constituer qu’un support « passif » pour les formes énergétiques immatérielles « synthétiques » idéatives et représentatives (s’ils ne sont pas « intégrés » à un logiciel) et qui pourraient donc (dans ce cas de figure) être classés dans les formes énergétiques synthétiques « immatérielles » (non actives)…

 

Dans cette catégorie, on trouve principalement les capacités analytiques, calculatoires et mnésiques des systèmes d’intelligence artificielle dont l’avenir semble très prometteur…

 

Aujourd’hui, ces formes énergétiques pourraient être catégorisées selon plusieurs paramètres(1) : leur nature (essentiellement passive, mixte, active), le degré d’activation humaine (total, élevé, mixte, faible, nul), le degré de contrôle humain en état de fonctionnement activé (total, élevé, moyen, faible, nul), leur accessibilité à un tiers avec risque d’utilisation à des fins instrumentalisantes (faible, moyenne, élevée), la mise en réseaux (nulle, faible, moyenne, élevée, totale), leur potentiel d’autonomisation(2) (faible, moyen, élevé) et leur dangerosité potentielle — en cas d’autonomisation (faible, moyenne, élevée).

(1) Avec leur développement, leur généralisation, leur amélioration et leur sophistication probables, d’autres paramètres pourraient sans doute être définis de façon plus adéquate…

(2) A l’avenir, les progrès technologiques permettront de créer des formes d’intelligence artificielle de plus en plus autonomes qui pourront (peut-être) représenter une catégorie à part entière…

 

Comme toutes les manifestations, ces formes énergétiques sont (sans doute) chargées et/ou composées d’énergie « pure » et d’énergie immatérielle (elle-même (sans doute) chargée et/ou composée d’énergie « pure » ;

 

Notons que ces formes énergétiques immatérielles actives et intelligentes entretiennent peut-être à l’état « non actif » des interactions intra et inter formelles (en chaque forme et entre toutes les formes qui les composent) et probablement des interactions inter individuelles (avec une partie de l'Existant) aux niveaux de l’énergie « pure » et de l’énergie immatérielle qu’il convient de prendre en compte.

 

Et ces formes sont soumises à cinq grands mouvements : apparition, croissance, maturité, déclin et disparition auxquels nous ajouterons la mobilité (les déplacements). Et pour chacun de ces mouvements, nous reprendrons les dix grands types de catégories : quantité nulle, quantité faible et intensité faible, quantité faible et intensité moyenne, quantité faible et intensité élevée, quantité moyenne et intensité faible, quantité moyenne et intensité moyenne, quantité moyenne et intensité élevée, quantité élevée et intensité faible, quantité élevée et intensité moyenne et quantité élevée et intensité élevée.

 

… sans omettre, bien sûr, de noter pour chaque mouvement l’ensemble des interactions intra et inter formelles intra et inter individuelles au niveau de l’énergie « pure » et au niveau de l’énergie immatérielle (« non pure »).

 

 

PETIT APARTE SUR LES INTELLIGENCES ARTIFICIELLES

 

Les risques d’appropriation et de prise de contrôle

Si l’Homme est (et ses successeurs sont) en mesure de créer à l’avenir de très puissantes et performantes intelligences artificielles, au vu des caractéristiques psychiques et humaines actuelles et des risques d’appropriation et d’instrumentalisation de cette technologie (si les comportements humains n’évoluent pas…), il serait judicieux d’envisager plusieurs hypothèses et scénarios : si cette technologie est contrôlée par une minorité (ou une majorité) éclairée, alors son utilisation a de fortes chances d’être bénéfique à la collectivité (et les risques de dérive sont faibles). Si elle est captée par des individus, des groupes ou des sociétés moyennement éclairés, il y a des chances (comme toujours) de voir fleurir à la fois des utilisations bénéfiques et de (plus ou moins) nombreux écueils. En revanche, si cette technologie « tombe » entre les mains d’individus, de groupes ou de sociétés pas ou peu éclairés, le risque est grand (sinon très probable) de voir émerger les conditions propices à une forme « d’apocalypse » avec (entre autres exemples) la (possible) domination de l’ensemble des individus — via le contrôle des systèmes d’intelligence artificielle — par une minorité malveillante et mal intentionnée…

 

 

Les risques d’autonomisation et « d’individualisation »

Tant que l’Homme ne sera pas (et ses successeurs ne seront pas) en mesure de créer des intelligences artificielles avec une capacité perceptive sensible et de distanciation (autrement dit capables de ressentir et de se voir regarder et agir…), alors il n’y a aucune raison que les intelligences artificielles (excepté leur prise de contrôle par une minorité malveillante et/ou peu éclairée) puissent accéder à une domination autonome et, encore moins, accéder à l’Être et à la Conscience. En revanche (mais l’hypothèse est très improbable — pour ne pas dire quasi impossible*), si l’Homme et ses successeurs parviennent à créer des intelligences artificielles avec une capacité perceptive sensible et de distanciation, alors ces systèmes deviendront des individus à part entière avec lesquels il faudra compter (pour le meilleur comme pour le pire selon leur degré de sensibilité et de Conscience)… Mais ne nous égarons pas (pour l’heure) dans des scénarios peu plausibles et/ou trop lointains…

* Mais peut-être l’avenir nous prouvera le contraire (avec une grande « malice »)…

 

 

L’ensemble des interactions entre les formes énergétiques

Toutes ces formes énergétiques (leurs mouvements et l’ensemble de leurs composants et de leurs charges) sont :

 

 

En interaction avec des formes énergétiques « pures » immatérielles

(et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants d’énergie « pure » (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leurs (éventuels) supports (et l’ensemble de leurs mouvements) et avec toutes leurs charges et/ou tous leurs composants d’énergie « pure », d’énergie immatérielle (« non pure ») et éventuellement tous leurs composants atomiques, moléculaires, cellulaires et bactériens (et l’ensemble de leurs mouvements) ;

 

 

En interaction avec des formes énergétiques immatérielles « non physiques »

(et l’ensemble de leurs mouvements) — individus du monde du Sans Forme et/ou extraterrestres, « part consciente » en cours de transmigration, mouvements énergétiques divers

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants d’énergie immatérielle (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants d’énergie « pure » (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec tous leurs supports (et l’ensemble de leurs mouvements) et avec toutes leurs charges et/ou tous leurs composants d’énergie « pure », d’énergie immatérielle (« non pure ») et éventuellement tous leurs composants atomiques, moléculaires, cellulaires et bactériens (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

 

En interaction avec des formes énergétiques physiques naturelles élémentaires non vivantes

(et l’ensemble de leurs mouvements) – combinaisons moléculaires gazeuses, solides et liquides…

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants atomique(s) et moléculaire(s) (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants d’énergie immatérielle (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants d’énergie « pure » (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec tous leurs supports (et l’ensemble de leurs mouvements) et avec toutes leurs charges et/ou tous leurs composants d’énergie « pure », d’énergie immatérielle (« non pure ») et tous leurs composants atomiques, moléculaires, cellulaires et bactériens (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

 

En interaction avec des formes énergétiques physiques vivantes élémentaires

(et l’ensemble de leurs mouvements) – cellules, bactéries, virus…

 

En interaction avec leurs grands systèmes organiques (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants cellulaires et bactérien(ne)s (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants atomique(s) et moléculaire(s) (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants d’énergie immatérielle (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants d’énergie « pure » (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec tous leurs supports (et l’ensemble de leurs mouvements) et avec toutes leurs charges et/ou tous leurs composants d’énergie « pure », d’énergie immatérielle (« non pure ») et tous leurs composants atomiques, moléculaires, cellulaires et bactériens (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

 

En interaction avec des formes énergétiques vivantes complexes perceptives élémentaires

(et l’ensemble de leurs mouvements) – insectes, animaux

 

En interaction avec leurs grands systèmes organiques et psycho-organiques (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants cellulaires et bactérien(ne)s (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants atomique(s) et moléculaire(s) (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants d’énergie immatérielle (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants d’énergie « pure » (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec tous leurs supports (et l’ensemble de leurs mouvements) et avec toutes leurs charges et/ou tous leurs composants d’énergie « pure », d’énergie immatérielle (« non pure ») et tous leurs composants atomiques, moléculaires, cellulaires et bactériens (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

 

En interaction avec des formes énergétiques vivantes complexes perceptives complexes préconscientes

(et l’ensemble de leurs mouvements) – Hommes

 

En interaction avec leurs grands systèmes organiques, psycho-organiques et psychiques (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants cellulaires et bactérien(ne)s (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants atomique(s) et moléculaire(s) (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants d’énergie immatérielle (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants d’énergie « pure » (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec tous leurs supports (et l’ensemble de leurs mouvements) et avec toutes leurs charges et/ou tous leurs composants d’énergie « pure », d’énergie immatérielle (« non pure ») et tous leurs composants atomiques, moléculaires, cellulaires et bactériens (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

 

En interaction avec des formes énergétiques matérielles physiques synthétiques

(et l’ensemble de leurs mouvements) – meuble, assiette, cuvette en plastique, voiture, robot, mixeur, fusée…

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants atomique(s) et moléculaire(s) (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants d’énergie immatérielle (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants d’énergie « pure » (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec tous leurs supports (et l’ensemble de leurs mouvements) et avec toutes leurs charges et/ou tous leurs composants d’énergie « pure », d’énergie immatérielle (« non pure ») et éventuellement tous leurs composants atomiques, moléculaires, cellulaires et bactériens (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

 

En interaction avec les formes énergétiques immatérielles « synthétiques » idéatives et représentatives

(et l’ensemble de leurs mouvements) – contenu et sens des langages, des images, des paroles, des représentations mentales, des rêves, des livres et des œuvres d’art

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants d’énergie immatérielle (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants d’énergie « pure » (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec tous leurs supports (et l’ensemble de leurs mouvements) et avec toutes leurs charges et/ou tous leurs composants d’énergie « pure », d’énergie immatérielle (« non pure ») et éventuellement tous leurs composants atomiques, moléculaires, cellulaires et bactériens (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

 

En interaction avec les formes énergétiques immatérielles « synthétiques » émotionnelles

(et l’ensemble de leurs mouvements) – émotions, sentiments et désirs

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants d’énergie immatérielle (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants d’énergie « pure » (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec tous leurs supports (et l’ensemble de leurs mouvements) et avec toutes leurs charges et/ou tous leurs composants d’énergie « pure », d’énergie immatérielle (« non pure ») et éventuellement tous leurs composants atomiques, moléculaires, cellulaires et bactériens (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

 

En interaction avec les formes immatérielles actives et intelligentes

(et l’ensemble de leurs mouvements) – logiciels, algorithmes, programmes informatiques, intelligences artificielles

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants d’énergie immatérielle (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec leur(s) charge(s) et/ou leurs composants d’énergie « pure » (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

En interaction avec tous leurs supports (et l’ensemble de leurs mouvements) et avec toutes leurs charges et/ou tous leurs composants d’énergie « pure », d’énergie immatérielle (« non pure ») et éventuellement tous leurs composants atomiques, moléculaires, cellulaires et bactériens (et l’ensemble de leurs mouvements)

 

 

Comme nous avons essayé de le montrer (assez laborieusement…), toutes ces formes et ces manifestations entretiennent, sur tous les plans énergétiques, un nombre incalculable d’interactions (relations et échanges qui induisent des transformations). Et cet ahurissant et incroyable réseau de liens, d’échanges, de transformations et de mouvements permanents pourrait (bien) constituer l’ensemble de l’Existant (que l’on pourrait également appeler la structure fondamentale « du réel »).

 

… Ajoutons simplement deux remarques (dont l’une a déjà d’ailleurs été évoquée). Premier point : chaque forme est soumise, de façon permanente, à des équilibres (fragiles) et à des forces, des tensions et des déséquilibres… Deuxième point : toutes les formes et toutes les manifestations énergétiques dont le (ou les) mouvement(s) naturel(s) est (sont) contrarié(s), contraint(s) ou régulé(s)* provoquent ou induisent des tentatives de mobilité (plus ou moins) forte avec des conséquences (plus ou moins) néfastes et délétères (pour la forme elle-même et/ou son support et/ou l’environnement immédiat : les formes à proximité et/ou celles avec lesquelles elle entre en interaction…).

* Restreint(s), contenu(s), inhibé(s), freiné(s), stoppé(s), accéléré(s), exacerbé(s) etc etc.

 

Pour obtenir un aperçu (à peu près exhaustif) de l’ensemble des interactions énergétiques majeures de l’Existant, il conviendrait d’établir tous les croisements possibles entre ces différentes formes énergétiques. Nous nous y sommes attelés… et en dépit de nos catégorisations, le tableau s’est très vite révélé « monstrueux » (plusieurs centaines de pages) dans la mesure où chaque forme entretient de quelques interactions à des milliards de milliards de milliards d’interactions(1) avec les autres formes (c’est d’ailleurs à peine imaginable(2) !) … Nous avons donc abandonné l’idée, dans cette réflexion, de donner une représentation — même schématique — de la structure de l’Existant par souci de clarté (et pour éviter l’épuisement psychique…)…

(1) D’autant qu’une seule forme peut entreprendre simultanément de très nombreuses actions volontaires et non volontaires : un Homme enrhumé, par exemple, qui souffre d’un mal de dent et qui vient de subir une séance de chimiothérapie peut conduire sa voiture en pleurant tout en téléphonant à un ami, éternuer, écouter la radio et se mettre en colère en se souvenant avec tristesse de son ex-femme et entrer en collision avec un autre véhicule etc etc.

(2) Peut-être qu’un système d’intelligence artificielle serait en mesure d’organiser une telle structure… peut-être…

 

Bref, quoi qu’il en soit, ce tableau (qui reste à construire*) devra prendre en considération absolument toutes les formes énergétiques, tous les échanges, tous les mouvements et toutes les interactions énergétiques pour être en mesure de répertorier des phénomènes aussi différents que l’oxydation, les marées, les ondes hertziennes, la culpabilité, les éruptions volcaniques, le piratage informatique, la jalousie, les épidémies, la béatitude, les crachats, les intelligences artificielles en réseaux, les combats de coqs, les vents solaires, les saprophytes, les allergies, les barrages hydroélectriques, l’addiction au jeu vidéo, le mariage, la prière, la parade amoureuse de la drosophile, le vomi sur la moquette, les chouquettes, la fibre numérique et jusqu’à l’existence même de ce modeste tableau (comme tentative de représentation de l’ensemble de l’Existant) sans compter ce que l’on ignore encore (et d’aucuns diraient que cette méconnaissance est aujourd’hui colossalement abyssale…)…

* Nous avons simplement essayé, ici, d’en donner les fondements et les contours (possibles)…

 

NOTE SUPPLEMENTAIRE : afin d’avoir une idée approximative du nombre de liens réels existants, il faudrait, bien sûr, multiplier chaque forme par le nombre de formes existantes (calcul quasi impossible(1) aujourd’hui) sans compter (si j'ose dire!) la multiplication des interactions qui crée d’autres interactions(2)

(1) Donnons, à ce propos, quelques exemples triviaux : qui peut décemment connaître (avec exactitude) le nombre de cailloux, de grains de sable ou de grains de poussière existant sur Terre ? Qui peut dire combien de cellules, d’atomes, de combinaisons moléculaires ou de liaisons électriques et hormonales sont activés dans le corps d’un individu en proie à une simple émotion ? Qui peut dire combien il existe de galaxies ou de « poussières d’étoile » dans l’Univers ? Quelles que soient nos tentatives de réponse, nous serons, bien évidemment, toujours loin « du compte »…

(2) Perspective holistique qui considère (sans doute à raison) que le tout est davantage que la somme de ses parties…

 

 

NOTE « PERSONNELLE et SUBJECTIVE » (que vous pouvez passer…)

Il nous arrive parfois d’éprouver la sensation (ou même le sentiment*) que toutes ces formes appartiennent à (et baignent dans) une gigantesque « soupe » organo-matérialo énergétique… une sorte de « mélasse magmatique » dans laquelle chacun gesticule, s’agite et se débat… et où les cris ne sont souvent que des appels désespérés… et les manœuvres et les agissements de vaines tentatives pour se désengluer…

* Dans nos « mauvais jours »… ou à nos instants « grincheux »…

 

 

NOTE sur « le destin » des formes

Les innombrables interactions dans lesquelles sont impliquées (ou auxquelles sont mêlées) toutes ces formes représentent ce que l’on pourrait appeler « leur destin »… Destin constitué par tous les évènements, toutes les circonstances et toutes les situations qu’elles sont amenées à expérimenter au cours de leur (plus ou moins brève) existence. La survenance, la succession et « l’emboîtement » de ces différents évènements, situations et circonstances obéissent à des lois qui conservent leur mystère et demeurent, pour l’heure, toujours aussi « impénétrables »...

 

On pourrait simplement penser que chaque forme est (inexorablement) soumise à l’implacable et magistrale loi des causes et des effets inextricablement enchevêtrés (comme le sont, elles-mêmes, les formes énergétiques).

 

Nous pourrions dire également qu’une « part consciente » est parfois « associée » à certaines de ces formes (à cause de l’identification de la perception à la forme). Et que ce cas de figure concernerait a priori, sur Terre, essentiellement les animaux et les Hommes (mais peut-être également les « esprits » en cours de transmigration après la mort du corps…)… alors que d’autres formes ne semblent, a priori, être associées à aucune « part consciente » (comme la matière et les végétaux par exemple).

 

Concernant la première catégorie, on pourrait simplement arguer (de façon plus ou moins juste et judicieuse) qu’à travers chaque forme, la « part consciente » (qui lui est – plus ou moins – associée) expérimente exactement ce dont elle a « besoin » pour « s’éveiller » à sa véritable nature (Conscience perceptive impersonnelle)… bien qu’en vérité nous n’en sachions à peu près rien (et tout cela reste, bien sûr, très hypothétique…).

 

Quant au « destin » des formes, pourquoi certaines fleurs connaissent une destinée champêtre (et totalement naturelle) et pourquoi d’autres sont cultivées sous serre (et artificiellement) ? Pourquoi certaines sont cueillies et finissent dans un vase ? Pourquoi certaines sont fauchées, écrasées ou ingérées ? Et d’autres « s’éteignent » de leur « belle mort » ? Ainsi en est-il aussi (évidemment) des formes vivantes associées à une « part préconsciente ou consciente » (les animaux et les Hommes) qui vivent plus ou moins longtemps (avec des conditions d'existence très différentes), qui expérimentent des situations et des évènements plus ou moins heureux ou dramatiques (voire traumatisants*) et qui connaissent, elles aussi, des « destins » très variables…

* Pour le psychisme…

 

Qui est en mesure de répondre et de comprendre (réellement) les arcanes de cette gigantesque et absolument ahurissante trame d’échanges, d’interactions et de transformations énergétiques…? Bref... nous pataugeons, ici, dans les hypothèses et les incertitudes les plus grandes… à la lisière d’un ésotérisme « dangereux » et peu engageant…

 

 

NOTE SUPPLEMENTAIRE sur « le destin » des « parts conscientes »

Quant aux éventuelles « parts conscientes » qui transmigreraient après la disparition des formes (auxquelles elles semblent s’associer), nous pourrions (éventuellement) dire qu’elles obéissent soit à une logique « réincarnative » plus ou moins linéaire — liée à leur degré de compréhension et de « maturité spirituelle » — et qu'elles seraient actionnées par des forces énergétiques (dont elles sont chargées et/ou composées) telles que leurs désirs (latents et effectifs) et leur réceptivité/sensibilité à l’attractivité de certains lieux, de certaines formes et de certains domaines qui détermineraient la forme* de leur « prochaine réincarnation », soit qu'elles se retrouvent « associées » à une forme de façon aléatoire ou selon une logique qui nous demeure totalement inconnue…

* Et, sans doute, également le lieu et l'environnement de leur « prochaine réincarnation » et leurs prédispositions générales, leurs caractéristiques et tendances majeures et leur potentiel, qui seront amenés, selon les contextes et les situations, à se manifester et/ou s'actualiser (plus ou moins)...

 

Notons que la perspective de « réincarnation » plus ou moins linéaire semble avoir les faveurs des traditions spirituelles et/ou religieuses qui s’appuient sur une orientation « individualiste » des « parts conscientes » et qui fondent leurs principes sur une sorte de binarité un peu simpliste (mais peut-être vraie) de sanctions (l’enfer des religions monothéistes et le mauvais karma des bouddhistes et des hindouistes) et de récompenses (le paradis et le bon karma). Soulignons tout de même, ici, qu’en dépit de son (éventuelle) véracité, cette perspective a toujours été (plus ou moins) utilisée comme « instrument de régulation » des comportements humains afin d’assurer un « vivre ensemble » terrestre moins délétère…

 

Quant à la logique aléatoire, elle n’en parait pas moins insensée en partant du principe que les formes énergétiques (et, en particulier, les formes vivantes) sont tellement provisoires (la très grande majorité a une durée de vie relativement courte) qu’en multipliant et en « enchaînant » les « réincarnations », les éventuelles « parts conscientes » auraient tout le loisir d’avoir un aperçu et d’expérimenter l’existence de toutes les formes existantes, « passant » sans cesse de l’une à l’autre au gré des vents que d’aucuns seraient tentés de qualifier, selon leur idéologie, de cosmiques ou de karmiques…

 

Nous ne pouvons également exclure que les « parts conscientes » n’aient, en réalité, aucune existence (et qu’elles ne soient qu’une « construction mentale* »). Dans cette hypothèse, il y aurait donc (simplement) un accès « individuel » (conditionné par la forme) à la perception impersonnelle, soulignant ainsi le caractère singulier des formes et la nature impersonnelle (totalement impersonnelle) de la perception (hypothèse possible — et même probable)…

* Liée à l’identification du psychisme à la forme et une façon (comme une autre) de « se rassurer » à bon compte sur ce que les Hommes ont toujours (plus ou moins) appelé « l’Au-delà »…

 

Quoi qu’il en soit, il semblerait en vérité (et au final), au regard de notre connaissance et de notre expérience*, que seule la Conscience (impersonnelle) – autrement dit Ce qui perçoit – éprouve, ressente et expérimente les interactions, les situations et les évènements comme si la Conscience « s’amusait » à vivre de façon restrictive et limitée, à travers toutes les formes, tous les cas de figure possibles de l’Existant…

* Mais nous ne demandons, évidemment, à personne de nous croire sur parole…

 

Avant d’aborder la Conscience — l’espace perceptif — et les différentes « façons » de « l’habiter », nous ne pouvons manquer, ici, de donner un aperçu de la trame de l’Existant terrestre (de la structure du « réel ») au cours des millénaires passés et d’essayer de dessiner à gros traits la façon dont elle pourrait évoluer…

 

 

Trend historique

 

Période historique antérieure au « Big Bang(1) »

Il est possible que la structure du « réel » n’était constituée, à l’époque, que de formes énergétiques « pures » immatérielles (et, éventuellement, de formes énergétiques immatérielles « non physiques »). Notons également la possibilité qu’aient existé antérieurement (de façon encore plus lointaine) quantité d’autres formes(2) (engendrées par un cycle évolutif antérieur) aux caractéristiques soient très différentes, soit très proches de celles que nous connaissons aujourd’hui et qui auraient été amenées à disparaître… Au regard de la distance qui nous sépare de cette période, on pourrait tout imaginer…

(1) Ou au Big Bounce…

(2) Par exemple, si la perspective du Big Bounce s'avérait exacte, il est possible que des formes énergétiques « adaptées » à la phase de contraction de l'Univers aient existé...

 

 

Période historique post « Big Bang »

Il semblerait que la structure de l’Existant n’était constituée, au cours de cette période, que de trois formes majeures : les formes énergétiques « pures » immatérielles, les formes énergétiques immatérielles « non physiques » et les formes énergétiques physiques naturelles élémentaires non vivantes (toute « nouvellement » créées si l’on peut dire…).

 

 

Période historique avant l’émergence du Vivant perceptif

Cette période a vu, semble-t-il, émerger deux autres catégories de formes, les formes énergétiques physiques vivantes élémentaires et les formes énergétiques vivantes complexes non perceptives qui sont venues s’ajouter aux trois formes déjà existantes.

 

 

Période historique après l’émergence des animaux et des Hommes

Cette période a vu naître les formes énergétiques vivantes complexes perceptives élémentaires et les formes énergétiques vivantes complexes perceptives préconscientes qui ont été, toutes deux (grâce au cerveau, à la cognition et au psychisme*), à l’origine de deux autres catégories de formes énergétiques : les formes énergétiques immatérielles synthétiques émotionnelles et les formes énergétiques immatérielles synthétiques idéatives et représentatives. Quant aux formes préconscientes, elles ont également créé une troisième catégorie : les formes énergétiques physiques synthétiques.

* Même si l’Homme s’est montré, au fil des millénaires (grâce à l’actualisation de son potentiel cérébral, cognitif et psychique), éminemment plus actif, créateur et inventif en la matière…

 

 

Période historique de l’Homme « moderne »

Cette période a été détaillée dans la (longue) partie précédente. Soulignons simplement, ici, que le nombre de formes énergétiques physiques synthétiques a connu une croissance exponentielle et que les formes énergétiques immatérielles synthétiques idéatives et représentatives et les formes énergétiques immatérielles synthétiques émotionnelles se sont complexifiées et ont fait l’objet de quantité de représentations et de moult expressions grâce à la création de divers supports sans oublier, évidemment, la création d’une nouvelle catégorie de formes énergétiques (dont l’avenir semble, entre parenthèse, très prometteur) : les formes énergétiques immatérielles actives et intelligentes…

 

Récapitulons : aujourd’hui, il y a, semble-t-il, une dizaine de formes énergétiques majeures : des formes énergétiques « pures » immatérielles, des formes énergétiques immatérielles « non physiques », des formes énergétiques physiques naturelles élémentaires non vivantes, des formes énergétiques physiques vivantes élémentaires, des formes énergétiques vivantes complexes non perceptives, des formes énergétiques vivantes complexes perceptives élémentaires, des formes énergétiques vivantes complexes perceptives complexes préconscientes, des formes énergétiques physiques synthétiques, des formes énergétiques immatérielles synthétiques idéatives et représentatives, des formes énergétiques immatérielles synthétiques émotionnelles et des formes énergétiques immatérielles actives et intelligentes.

 

 

Perspectives

 

Période historique à court et moyen termes

Il est possible (voire probable) que l’on voit se développer, au cours de cette période, un très grand nombre de formes énergétiques synthétiques, de formes énergétiques « synthétiques » immatérielles et de formes énergétiques immatérielles actives et intelligentes. Cette dernière catégorie pourrait également être en mesure de créer de très nombreuses formes immatérielles idéatives et représentatives de nature « réelle » et de nature « virtuelle ». Ces entités « virtuelles » et les formes énergétiques perceptives complexes pourraient également être amenées à développer très fortement leurs interactions (quantitativement et qualitativement).

 

On pourrait également assister à une transformation progressive des formes énergétiques vivantes perceptives complexes en formes énergétiques organo-synthétiques (et, peut-être, à terme essentiellement synthétiques).

 

Comme il est possible que les formes énergétiques physiques naturelles élémentaires non vivantes, les formes énergétiques physiques vivantes élémentaires, les formes énergétiques vivantes complexes non perceptives et les formes énergétiques vivantes complexes perceptives élémentaires (toutes ou une partie d’entre elles) se voient plus ou moins radicalement transformées…

 

 

Période historique à long et très long termes

Cette période (très incertaine… faut-il le rappeler…) pourrait connaître quelques « révolutions » en matière de transformation énergétique :

 

- transformation des formes énergétiques synthétiques en formes énergétiques immatérielles (voire en formes énergétiques « pures* ») ;

- transformation des formes physiques vivantes perceptives complexes et/ou des formes vivantes perceptives organo-synthétiques en formes vivantes synthétiques et en formes vivantes immatérielles ;

- transformation des formes énergétiques physiques naturelles élémentaires non vivantes, des formes énergétiques physiques vivantes élémentaires, des formes énergétiques vivantes complexes non perceptives et des formes énergétiques vivantes complexes perceptives élémentaires en formes énergétiques organo-synthétiques, en formes synthétiques ou en formes immatérielles.

* Nouvelle génération de formes énergétiques « pures » aux caractéristiques peut-être semblables, peut-être différentes de celles des formes énergétiques « pures » existantes… dans ce dernier cas, peut-être sera-t-il alors nécessaire de créer une nouvelle catégorie que l’on pourrait appeler : les formes énergétiques immatérielles synthétiques « pures »…

 

Il est également possible que l’on assiste à une efflorescence d’univers virtuels (avec la création d’un Existant « virtuel(1) ») au sein desquels pourraient se manifester de très nombreuses interactions entre des formes énergétiques « virtuelles » et des formes « réelles ». Comme il est tout à fait possible que ces interactions se réalisent aussi sur le plan de l’Existant « réel »…. les formes « virtuelles » et les formes « réelles » seraient alors capables de « se rencontrer » (réellement et entièrement(2)) en tous lieux « réels » ou « virtuels »… Et les formes « virtuelles » pourraient même devenir si sophistiquées et autonomes (bref, devenir des individus « à part entière ») qu’elles nécessiteraient la création d’une catégorie spécifique que l’on pourrait appeler : les formes énergétiques « virtuelles » perceptives quasi sensibles…

(1) Qui pourrait même voir le jour dans le monde à court ou à moyen terme...

(2) « Corps » (ou corps immatériel) et « cerveau » (ou cerveau synthétique ou immatériel)…

 

Nous ne pouvons également exclure qu’au cours de cette période les formes énergétiques synthétiques actives et intelligentes deviennent si prépondérantes et nombreuses qu’elles se transforment radicalement au point de constituer, elles aussi, une nouvelle catégorie d’individus… que l’on pourrait (éventuellement) qualifier de formes énergétiques synthétiques perceptives quasi sensibles…

 

Notons également qu’il y a de fortes chances que les formes énergétiques immatérielles synthétiques idéatives et représentatives et les formes énergétiques immatérielles synthétiques émotionnelles connaissent de nombreuses transformations qualitatives (mais aussi quantitatives) et puissent progressivement se manifester et s’exprimer de façon totalement immatérielle (sans aucun support organique et matériel (voire sans support immatériel)…

 

Il est également possible que les formes énergétiques « pures » immatérielles et les formes énergétiques immatérielles « non physiques » livrent « leurs secrets » impulsant une communication (effective) avec toutes celles qui auraient accès à la perception…

 

Notons enfin que si les formes perceptives préconscientes et leurs successeurs — les formes perceptives conscientes* — « suivent » leur « évolution naturelle » sans rencontrer d’obstacles rédhibitoires et continuent de matérialiser leurs aspirations (en transformant l’Existant), il est possible que cette période puisse voir émerger une (ou des) forme(s) dotée(s) de caractéristiques quasiment identiques (ou identiques) à celles de la Conscience « originelle » et pourvue(s) d’une puissance créatrice aussi prodigieuse, capable(s) de Tout créer (des formes, des individus, des entités, des mondes, des plans et des univers dotés, eux-mêmes, d’un fort potentiel – que leur évolution actualiserait…).

* Organo-synthétiques, synthétiques, synthético-immatérielles et enfin immatérielles…

 

Cette possibilité pourrait alors constituer une sorte de deuxième itération* de la mise en abyme, sans doute, initiée par la Conscience « originelle »…

* A moins, bien sûr, que la Conscience ne soit, elle-même, que la résultante d’un processus de mise en abyme initié antérieurement (proposition totalement invérifiable aujourd’hui…) ou que seule la Conscience « agisse » à travers l’ensemble des formes (hypothèse fort probable), rendant ainsi invalide le principe de mise en abyme…

 

A ce propos, soulignons que cette (éventuelle) forme pourrait fort bien disposer d’une puissance créatrice plus « qualitative » que celle de la Conscience « originelle ». Qu’elle soit capable, en effet, de créer des formes énergétiques plus élaborées, aptes (plus ou moins directement) à la capacité perceptive (sans avoir recours à une longue et lente évolution comme ce fut le cas pour les créations énergétiques de la Conscience « originelle ») et qui seraient moins enclines aux interactions « corrosives » et violentes(1) comme le sont (et l’ont toujours, plus ou moins, été) les formes terrestres. Et qu’elle soit également capable de créer des plans et des univers totalement nouveaux (et inconnus) que la Conscience « originelle » n’a pas (ou n’aurait pas) été en mesure de créer elle-même(2)

(1) Notons néanmoins que l’énergie est (par nature) « puissante ». Aussi, les formes qu’elle revêt ne peuvent (en général) « échapper » à cette loi… l’énergie, quelle que soit sa forme, reste (toujours) plus ou moins susceptible de réaliser quelques « dégâts » induits par « la puissance » de son (ou ses) mouvement(s)…

(2) A moins, bien sûr, que la Conscience conduise et orchestre, outre la totalité de l’Existant, l’ensemble de ces (ses) créations à travers les formes… et qu’elle en « façonne » et en fasse « évoluer » une (et son potentiel) pour créer ces « nouveaux » plans et univers…

 

Si une telle forme advenait, que pourrions-nous en déduire ou en conclure ? Que la « tradition » se perpétue et que l’évolution « s’améliore » ? Que ce potentiel créatif et évolutif était déjà « inscrit » dans la ou les première(s) forme(s) énergétique(s) ? Que le potentiel est toujours amené à s’actualiser au fil de l’évolution ? Que la Conscience poursuit son « jeu combinatoire » grâce aux formes perceptives qui « accèdent » progressivement à « ses caractéristiques » ? Nous n’en savons évidemment rien…

 

Notons néanmoins, ici, quelques éléments qui pourraient s’avérer « problématiques » au cours de cette (éventuelle) évolution. Comment, en effet, un espace informel et infini (la Conscience « originelle ») serait-il en mesure de permettre à une forme matérielle et finie* de se transformer en une forme infinie et immatérielle et de créer, à partir d’un univers fini et formel, des espaces infinis et informels ou de créer des mondes, des plans, des espaces et des univers aux caractéristiques totalement nouvelles et inédites ? A vrai dire, Tout semble possible en matière de Conscience, d’énergie, de matière, de Vivant mais aussi (et surtout ?) en matière de virtualité…

* Une forme immatérielle capable de se régénérer sans fin n’en est, a priori, pas moins soumise au monde des formes et à la temporalité (donc à une forme de finitude même si cette dernière peut sans cesse être repoussée)…

 

D’autres questions pourraient également être soulevées : les formes et les entités créées par cette (éventuelle) forme (immatérielle) qui pourrait advenir au cours de cette période (créée, elle-même — ne l’oublions pas — par la Conscience), percevront-elles cette forme comme la « source originelle » ? Seront-elles capables de percer « les apparences » et de comprendre qu’existe une Conscience qui a créé la forme qui les a créées(1) ? Seront-elles dotées des mêmes caractéristiques que celles de la forme qui les a créées ? D’autres caractéristiques ? Et lesquelles ? Et si elles ne sont pas dotées des mêmes caractéristiques que celles de « leur forme source », chercheront-elles à les « retrouver » ? Chercheront-elles à « retrouver » d’autres caractéristiques ? Celles de la Conscience ? D’autres ? Ces formes seront-elles aussi dotées d’un potentiel créatif spectaculaire ? Pourront-elles, elles-mêmes, créer des plans, des mondes, des entités et des individus, eux-mêmes, dotés d’un potentiel et capables, eux-mêmes, de créer ? Aurions-nous « déterré » là une mise en abyme ou un « jeu combinatoire » sans fin (réellement sans fin — infini donc…) ? Dans quel dessein ? A quelles fins ? Simples jeux d’énergie et de créations orchestrés par la Conscience ? A moins peut-être, comme nous l’avons déjà évoqué(2), que les formes « agissantes » ne soient qu’une apparence… elles semblent agir et orchestrer leur propre évolution et celui de l’Existant mais ne pourraient être (en réalité) « actionnées » que par la Conscience « originelle(3) » qui, à travers les formes — toutes les formes perceptives(4) (leurs capacités et leur potentiel), agit et façonne l’ensemble de l’Existant(5) et son évolution… Tant de questions… sans réponse évidemment…

(1) Notons que les Hommes jusqu’à aujourd’hui sont incapables, eux-mêmes, de savoir si la Conscience perçue comme « originelle » est la source première ou si elle n’est que la résultante d’une « entité antérieure »…

(2) Et cette hypothèse semble fort probable…

(3) Comme si (en vérité), seule la Conscience (« originelle ») non seulement vivait, expérimentait et éprouvait les situations (à travers les milliards de milliards de formes existantes), mais était également « à la manœuvre » dans toutes les actions, toutes les édifications, toutes les transformations et toutes les évolutions de l’Existant (et de l’ensemble de ses formes)…

(4) Comme si les formes non perceptives évoluaient essentiellement selon les lois énergétiques qui les régissent et en fonction de leur potentiel « initial » (« insufflé » — sans doute — par la Conscience) mais sans que la Conscience soit en mesure par la suite « d’agir » sur elles… « l’obligeant » ainsi à créer des formes perceptives (et donc à attendre que la transformation des formes puisse permettre à certaines d’entre elles d’accéder à la perception…) pour être en mesure de les « actionner » et de les orienter directement via « la sphère perceptive » pour « diriger », « conduire » et « piloter » l’ensemble de l’Existant…

(5) Les formes perceptives et non perceptives.

 

Soulignons néanmoins ici que, quelles que soient les formes énergétiques (leurs combinaisons, leurs interactions et la nature de ces interactions), l’espace de Conscience demeure à la fois indissociable de ces formes (Unité entre Ce qui perçoit et ce qui est perçu — pas d’Existant, pas de conscience de l’Existant sans espace de perception…) et totalement « étranger », complètement « à l’extérieur » et « en dehors » de cet enchevêtrement, de ce magma ou de ce chaos énergétique (donc jamais « dégradé », jamais altéré ni endommagé par ce qu’Il perçoit et ce qui le traverse…).

 

 

Commentaires et remarques

Après ce rapide panorama (kaléidoscopique ? Non, pas vraiment…), il semblerait que la trame fondamentale du « réel » se soit considérablement (et tout simplement) élargie et complexifiée au fil de l’évolution des formes terrestres. Et qu’elle pourrait à l’avenir, comme nous l’avons rapidement évoqué, s’élargir et se complexifier plus encore (avec, entre autres exemples, la création de « l'Existant virtuel » et la transformation du synthétique en « immatériel »)… Rien ne laisse pourtant penser qu’elle ait fondamentalement changé (ou changera fondamentalement) de structure comme si toute nouvelle combinaison énergétique et/ou toute nouvelle forme énergétique et/ou tout nouveau plan et nouvel univers ne constituaient (en réalité) que des éléments additionnels… comme s’ils élargissaient et « alourdissaient » simplement la trame initiale en s’y greffant et en multipliant (souvent extraordinairement) le nombre d’interactions, les enchevêtrements et les possibilités combinatoires avec les formes énergétiques existantes…

 

Voir ANNEXE 9 (panorama général de la Conscience et de l'Existant – synthèse)

 

Notons ici que la trame initiale ne semble composée (à l’origine et, sans doute même, de toute éternité) que de formes énergétiques immatérielles « pures » (et, peut-être éventuellement, de formes énergétiques immatérielles « non physiques »… à dire vrai, on n’en sait rien…)

 

Dans cette hypothèse, nous pouvons dire que la trame peut être amenée à s’appauvrir ou à s’enrichir, à se simplifier ou à se complexifier (à loisir et à foison…), mais qu’elle demeure ontologiquement énergie (et combinaisons d’énergie)… Sa version élémentaire (avec, sans doute, peu de formes énergétiques, peu de plans et d’univers) ou sa version complexifiée (avec un grand — ou très grand — nombre de catégories de formes énergétiques, de plans et d’univers), au gré des cycles, des évolutions, des constructions et des destructions, n'a, semble-t-il, aucune conséquence sur sa structure fondamentale. On pourrait même penser que la version qu'elle adopte et les configurations qu'elle instaure relèvent (à bien des égards) de l'anecdote (ou de la quasi anecdote(1)(2)). Aussi, la disparition des espèces (dont l’espèce humaine(3)), la fin du monde, la fin des mondes, l’éradication du Vivant, le développement des univers virtuels, les dégradations diverses et multiples que connaissent et subissent quantité de formes énergétiques ne pourraient constituer que des épiphénomènes sans grande envergure, sans grande importance ni grande conséquence... D’ailleurs, il est fort probable que cette trame élémentaire ait déjà connu de très multiples versions depuis des temps immémoriaux et connaîtra à l’avenir — jusqu’à l’impossible fin des temps(4) — quantité d’autres versions… au gré des « créations » de la Conscience (qui, n’en doutons pas, est à l’origine de toutes ces constructions(5)) et au fil, bien entendu, des innombrables combinaisons énergétiques (et de leur évolution)…

(1) Ces éléments, à nos yeux, prépondérants nous ont incités à ne pas développer (inutilement) la mise en perspective temporelle et « historique » de la trame de l’Existant…

(2) Quelques mots sur la virtualité, domaine qui semble ouvrir le « champ des possibles » par sa capacité à créer des espaces et des univers que les individus peuvent intégrer et au sein desquels ils sont en mesure de se déplacer (à travers, par exemple, un personnage virtuel). Notons, à ce propos, que même si une forme perceptive « réelle » était amenée à intégrer complètement (corps et cerveau) un univers virtuel et/ou qu’une forme « virtuelle » était capable de se matérialiser (et nous ne parlons pas ici, bien sûr, du cosplay) et d’intégrer l’Existant « réel », cette perspective augmenterait, certes, les possibilités de déplacement et d’interactions mais ne modifierait en rien, semble-t-il, la structure de la trame de l’Existant…

(3) A laquelle les Hommes sont (pour le moins) attachés et qu’ils considèrent (en général ou très souvent), outre comme « la panacée » universelle*, le « bien » (dans les deux sens du terme) le plus précieux (reconnaissons néanmoins que, d’un certain point de vue, et qu’à certains égards, ils n’ont pas complètement tort…)…

* Oui, encore notre (incontrôlable) manie à « périssologuer »…

(4) Rappelons que l’énergie (l’énergie « pure ») est inépuisable et n’est, a priori, soumise à aucune temporalité… Seules les formes qu’elle revêt le sont (toutes sont soumises, en effet, à la disparition et à la temporalité)…

(5) Dans cette analyse, voilà sans doute notre seule orientation idéologique… n’avons-nous pas d’ailleurs débuté cette longue réflexion par la Conscience ? Mais avouez-le (si vous avez lu attentivement ces pages), cette « idéologie », excepté d’infimes points « de détail », n’a jamais orienté, encombré ou entravé le déroulement factuel de l’évolution des formes terrestres que nous avons exposée ligne après ligne…

 

Après cet exposé de la structure du « réel » (ou, du moins, après ce vague aperçu de la trame de l’Existant), abordons sans tarder (nous nous sommes suffisamment attardés en route…) l’espace perceptif de la Conscience…

 

 

LA PERCEPTION (AU MOINS SIX « FACONS » MAJEURES « D'HABITER* » L'ESPACE DE CONSCIENCE)

* Ou (au choix(1)) différentes façons pour la Conscience « d’habiter » le regard (humain) ou la capacité perceptive(2) humaine…

(1) Selon que l’on adopte le « point de vue » humain (et à hauteur d’Homme) ou le « point de vue » de la Conscience…

(2) Selon (essentiellement et a priori) les capacités cognitives des individus, leur degré de sensibilité et leur degré d’encombrement (psychique)…

 

Comme nous l’avons plus ou moins laissé entendre (tantôt de façon assez explicite, tantôt en filigrane) au cours de cette longue réflexion et abordé (de façon succincte) dans les paragraphes consacrés au cheminement spirituel, il semblerait qu’il n’y ait qu’une Conscience (impersonnelle et perçue comme « originelle ») qui peut « simplement » être « habitée » de plusieurs façons. De façon schématique, pour les êtres humains, il semblerait qu’il en existe essentiellement six…

 

Soulignons, ici, que ces six « façons » principales « d’habiter » l’espace de Conscience se manifestent sur le plan individuel quels que soient l’époque, le contexte culturel et religieux et le type de société dans lesquels s’inscrit l’individu (et quels que soient son éducation, ses savoirs et ses conditions d’existence…).

 

Notons néanmoins que certaines conditions peuvent s’avérer plus propices (ou favorables) au processus « d’élargissement » (« habiter » la Conscience de façon plus large…) mais aucune condition phénoménale n’est nécessaire et ne peut garantir l’actualisation effective de ce processus… seule une maturité (ou une maturation naturelle) de l’esprit est, semble-t-il, indispensable. Soulignons également que cette maturation constitue probablement l’élément central qui permet le « franchissement » (plus ou moins) progressif des différentes « étapes » vers la Pleine Conscience…

 

Notons enfin que certaines périodes historiques (selon — essentiellement — « leur place » dans l’histoire(1)) voient émerger un nombre plus ou moins élevé d’individus engagés dans ce processus « d’élargissement ». Au cours de certaines époques historiques, il est fort probable qu’il n’existe aucune forme perceptive(2) (et donc, aucun être engagé dans ce processus « d’élargissement ») alors que d’autres voient fleurir un nombre très conséquent de formes engagées dans cette évolution perceptive(3) et/ou l’ayant « achevée »…

(1) Périodes où existent des formes (ou des êtres) suffisamment sophistiquées pour accéder à la perception ou, mieux encore, à une perception « élaborée »)…

(2) Période post « Big Bang » et période terrestre avant l’émergence du Vivant perceptif par exemple…

(3) Période des ères de la Conscience mineure et de la Conscience majeure par exemple…

 

 

Inexistante ou quasi inexistante (totale ignorance — quasi « pure » inconscience)

Dans ce cas de figure, le psychisme est omnipotent et l’identification à la forme (au corps) est totale. La perception est ici extrêmement restreinte. Elle ne dépend globalement que des capacités sensorielles organiques et est utilisée exclusivement à des fins utilitaires et de survie de l’organisme auquel la perception (psychique) s’est identifiée. Elle est éminemment centrée sur l’individu qui n’entre « en contact » et n’entretient des relations avec les autres formes qu’afin de satisfaire ses propres besoins et désirs. Elle se montre plus ou moins incapable d’empathie et ne peut reconnaître l’altérité (chez les êtres humains en particulier) qu’à condition d’y voir un « instrument personnel bénéfique »…

 

Les relations sont essentiellement gouvernées par les rapports de force, l’attaque ou la fuite, la domination, la soumission ou l’indifférence. L’éducation et l’apprentissage des règles de cohabitation et de « respect » avec les (et à l'égard des) autres individus (congénères et autres formes) peuvent se montrer plus ou moins efficaces et permettre d’inhiber ou de restreindre très superficiellement la dimension très fortement autocentrée et instinctive…

 

En matière de compréhension et de sensibilité (compréhension sensible), les individus semblent éminemment « limités » et leurs domaines « de préoccupation » se cantonnent, en général, à comprendre les formes et domaines de l’Existant potentiellement ou réellement dangereux et celles et ceux susceptibles de leur être favorables ou agréables…

 

Et la plupart du temps, il n’y a rien d’autre… Ainsi vit la très grande majorité des animaux et des Hommes depuis les débuts de l’humanité. Et une part conséquente des individus aujourd’hui…

 

 

Très restreinte (quasi-totale ignorance)

Dans ce cas de figure, le psychisme est prédominant et l’identification à la forme (au corps) est quasi-totale. Ce type de perception est très proche de celui de la catégorie précédente. Les différences ont sans doute essentiellement trait à la présence (à des degrés très faibles) de certaines caractéristiques de la Conscience (respect, altruisme, besoin de compréhension élémentaire…). L’individu, toujours très fortement autocentré, parvient néanmoins à faire « la part des choses » et est en mesure de prendre assez superficiellement l’Autre (les autres) en considération, à y prêter attention, à en prendre soin, à partager et à donner même si la composante égotique reste essentielle. Cette prise en considération de l’altérité est d’autant plus forte avec ceux que l’individu considère comme essentiels, importants et proches de lui (et, plus encore, ceux qu’il considère comme « une extension » de lui-même, sa progéniture par exemple). Plus les cercles concentriques s’éloignent de l'individu, moins celui-ci est enclin à les considérer et à « faire attention » à eux…

 

L’individu reste néanmoins relativement sujet à la « manipulation » (ou, du moins, à l’instrumentalisation)… Ainsi, si les personnes et les êtres alentour (ceux qui constituent « son » monde) ne lui procurent ou ne lui offrent pas ce qu’il attend (très souvent) en retour de sa « considération », il manifeste, de façon quasi systématique, des réactions violentes (liées à la frustration) et/ou des changements comportementaux stratégiques afin d’obtenir satisfaction (en essayant, par exemple, de « transformer » la personne ou en la quittant pour en trouver une plus « satisfaisante »…). L’Autre reste encore substantiellement pour les individus de cette catégorie (consciemment ou non) un moyen de parvenir à leurs fins…

 

L’éducation et l’apprentissage des règles de cohabitation et de « respect » sont plus aisés que pour les individus de la catégorie précédente mais ils demeurent très fortement sujets aux masques et aux déguisements (comportementaux). Et ils ont tendance, généralement, à montrer la part la plus « reluisante » et la plus « aimable » d’eux-mêmes et à dissimuler leurs dimensions et leurs comportements jugés par eux-mêmes, mais le plus souvent par la communauté ou la société, comme « vils », égoïstes ou répréhensibles… les contraignant, plus ou moins, à « jouer » à un « double jeu » permanent…

 

En matière de compréhension et de sensibilité (compréhension sensible), les individus de cette catégorie semblent un peu moins « restreints » que ceux de la précédente catégorie et leurs domaines « de préoccupation » bien qu’ils concernent (le plus souvent) à connaître ce qui leur est néfaste ou bénéfique, peuvent les amener à s’interroger, à « réfléchir » et à essayer d’avoir une idée (en général, assez floue et peu approfondie) sur l’Existant (souvent par simple « curiosité intellectuelle ») et sur les notions de « bien et de mal », de « bon et de mauvais », de « normal et d’anormal »… afin essentiellement de trouver un sens ou du sens à ce qu’ils vivent et perçoivent… La compréhension s’arrête, le plus souvent, à de vagues et superficiels concepts mi-intellectuels mi-intuitifs et à des représentations mentales, très largement influencés par leurs expériences de vie, l’éducation et les valeurs en vigueur dans la société, qui sont reprises « à bon compte » sans juger bon ni nécessaire d’en éprouver la valeur ou la véracité… Quant à la perception, elle est, en général, assez superficielle et ne « dépasse » pas le plus souvent « le visible », « le proche » et « l’apparent » et le « déjà connu »…

 

Ainsi semble vivre une grande part des Hommes contemporains…

 

 

Restreinte (quasi-totale ignorance)

Dans ce cas de figure, le psychisme est prédominant et l’identification à la forme (au corps) est quasi-totale avec néanmoins un élément supplémentaire absolument fondamental chez les individus : la prise de conscience de « leur » ignorance. Cette catégorie est relativement proche de la précédente. Et les différences majeures concernent essentiellement, outre la prise de conscience de l’ignorance, celle de l’étroitesse de perception et de compréhension et des limites imposées par la perception psychique.

 

 

Cette façon « d’habiter » l’espace de Conscience semble globalement correspondre aux individus en quête existentielle(1) et/ou engagés (plus ou moins) dans les deux premières étapes(2) d’un cheminement spirituel (que nous avons abordé dans les paragraphes consacrés à la spiritualité)… Les individus de cette catégorie cherchent (en général) plus profondément un sens et une signification... Ils ne peuvent (le plus souvent) se contenter des « vérités toutes faites » qu’on leur a inculquées... Ils deviennent plus sensibles aux formes de l’Existant. Et s’interrogent (très souvent) sur l’incroyable « bazar » que constitue « le réel »… et/ou sur le « pourquoi » des inégalités et des disparités entre les êtres… ils « fouillent » autant qu’ils en sont capables, cherchent en eux-mêmes et autour d’eux (partout où cela est possible, dans les livres, chez les « sages », les philosophes, dans les religions, dans les traditions spirituelles...). Leur besoin de compréhension peut même devenir prépondérant (au regard des autres besoins) et bien qu’ils demeurent des êtres égotiques, ils « supportent » mal ce qu’ils jugent comme des « injustices ». Ils font (très souvent) preuve de générosité et se montrent altruistes « relativement gratuitement » (sans comprendre que les autres continuent d’adopter des comportements instinctifs et « égoïstes »). Ils essayent de comprendre et (en général) n’y parviennent pas…

(1) Voir le paragraphe consacré à la quête existentielle dans la rubrique LE PLAN REPRESENTATIF INTELLECTUEL.

(2) L’avant-chemin et les pas sur le chemin spirituel « personnel ».

 

Ils s’attachent parfois à réorganiser leur existence autour de quelques idées, de quelques principes ou de quelques préceptes. Certains persévèrent sur « cette voie » (qui semble leur offrir une réponse plus ou moins satisfaisante) en essayant cahin-caha de donner un sens à « ce qui leur échappe »… D’autres ne peuvent se contenter de croyances, de dogmes et de « vérités » qu’ils ne sont pas encore en mesure de ressentir « réellement »… et de vivre « pleinement »… ils aspirent à vivre « la vérité » en cette vie, maintenant… mais rien ne semble pouvoir les orienter ni leur offrir de réponse satisfaisante… Où qu’ils se tournent, l’ignorance semble totale... Ils voient le mensonge et la duperie des fausses « solutions » mais ignorent encore où se « cache la vérité »… Ils se sentent (bien souvent) démunis et fragiles. Misérables, seuls et incompris… et peuvent être amenés à vivre une (ou des) période(s) âpre(s) et douloureuse(s) où la perception psychique et l’existence deviennent très « inconfortables »… où la « vérité » introuvable obsède… mais où rien (absolument rien) n’est en mesure d’apaiser leurs tourments…

 

 

Partielle (Conscience mineure)

Dans ce cas de figure, il existe à la fois une identification partielle du psychisme à la forme et une ouverture partielle à la Conscience. On pourrait dire que cette catégorie inaugure une sorte « d’entrée réelle » (et effective) dans la Conscience(1). Et correspond (plus ou moins) à la troisième étape du cheminement spirituel (que nous avons abordé dans les paragraphes consacrés à la spiritualité) et aux première et deuxième étapes du cheminement vers l’Eveil tel que l’expose la tradition du bouddhisme theravada(2) (et que nous reprenons ici tant cette perspective nous semble juste et pertinente) : « l’entrée dans le courant » (de l’impersonnalité) et « revenir encore ».

(1) Rappelons néanmoins que toute perception sensible est Conscience. Et que toute perception sensible ne peut jamais se situer hors de la Conscience. Cette « étape » semble plutôt constituer une prise de conscience (si j’ose dire !) que le regard est et a toujours été « cette » Conscience…

(2) Précisons une nouvelle fois que nous n’appartenons à aucune école ni à aucune tradition…

 

L’espace de Conscience est « habité » pour la première fois plus profondément (et plus largement) et l’individu est « immergé » pour une durée (souvent provisoire) dans l’impersonnalité. L’identification à la forme est « vue » comme illusoire et une simple caractéristique psychique. Mais cette entrée dans la Conscience impersonnelle, vécue très souvent comme une béatitude, une Paix, un Silence, une Plénitude et un Amour absolus qui amènent à une compréhension directe « des choses », n’est pas définitive. Les individus finissent par « redescendre » et « retrouver » leur espace psychique « habituel » (toujours plus ou moins restreint, rigide et limité…).

 

Certes, les illusions, les peurs, les croyances, les idées, les représentations et les idéologies les plus grossières n’ont plus cours (elles se sont globalement dissoutes…) mais peuvent subsister encore de profondes (et parfois conséquentes) parts résiduelles d’identification à la forme avec son lot de schémas comportementaux (toujours plus ou moins délétères). Les individus ont « compris » que la volonté personnelle est « inutile », illusoire et impropre à une « réelle » transformation, qu’il est vain de « se débattre » et nécessaire de laisser les « choses » suivre leur cours, de laisser la transformation se réaliser à son rythme…

 

La perception oscille (très souvent) entre l’espace psychique (perception restreinte, encombrée de représentations mentales et identifiée à la forme) et l’espace de Conscience impersonnel (perception plus large et plus désencombrée, non identifiée à la forme) avec d’incessants allers et retours au cours desquels l’individu se laisse prendre et « happer » par ce qui vient et se présente… Les caractéristiques « individuelles » sont laissées à leurs élans naturels. La vie globalement se simplifie mais peuvent néanmoins persister ou se manifester des problèmes qui « conservent leur caractère problématique »… Problèmes qu’il convient d’affronter jusqu’à leur totale et entière acceptation (et compréhension) pour les voir naturellement disparaître... L’individu est ainsi (plus ou moins) ponctuellement ou régulièrement amené à « se frotter » (et/ou à se confronter) à des situations et à des thématiques « encore sensibles*» qu’il doit « accueillir » et laisser se résoudre « seules » (elles aussi) sans fuir ni qu’intervienne la moindre volition…

* Notons que chaque individu est confronté, au cours de ce processus « d’élargissement », à un nombre de difficultés variable dans certains domaines spécifiques (liées, en grande partie, à l’histoire « personnelle ») qui n’ont pas encore été totalement « vues et comprises », ni pleinement et inconditionnellement « accueillies »… et qui continuent (et continueront) de se manifester jusqu’à leur totale acceptation et compréhension…

 

En dépit de ces quelques « face-à-face » inévitables et de ces « éclaircissements » nécessaires, la compréhension s’approfondit, s’élargit et s’affine… le respect de l’Existant devient naturel et spontané, les individus ne cherchent plus à montrer (ou à prouver) « quoi que ce soit », ni à dissimuler « quoi que ce soit »… ils sont « ce qu’ils sont »… et bien souvent, ils entretiennent des relations avec leurs congénères et avec l’Existant plus vraies, plus authentiques, plus franches et sans attente.

 

L’utilitarisme, l’instrumentalisation, les saisies « habituelles » et « naturelles » du psychisme et l’essentiel des comportements délétères n’ont (globalement) plus cours… Les incessantes questions et le besoin de comprendre (si vif autrefois..) se sont « volatilisés »… Ce qui a été vécu les a pulvérisés… et ne reste rien sauf « la vie qui va et qui vient » avec ses hauts, ses bas et ses cycles perpétuels… et cette Présence impersonnelle dans laquelle tout s’insère… Est ce qui est… et le reste n’a plus guère d’importance… tout est si important. Et, à la fois, si dérisoire…

 

Les individus ne pensent plus, ou pensent moins… le ressenti devient prépondérant (ressentis corporels, ressentis et vibrations énergétiques…). Les choses, le monde, les autres ne sont plus totalement « pensés » (comme nous l’avons déjà évoqué, les représentations les plus grossières n’ont plus cours), ils sont ressentis… et ces éléments initient un début d’ « accès direct » à l’Existant (sans passer par le psychisme et l’intellect). Les individus sont moins enclins à faire, ils sont… et font ce qui est nécessaire selon les exigences des situations… ils ne cherchent rien… ils savent qu’il n’y a rien à chercher… rien à trouver… que tout est déjà là… qu’il n’y a, en vérité, que Conscience, que Ce qui perçoit et d’incessants mouvements d’énergie qui s’inscrivent dans cet espace de perception…

 

 

Large (Conscience majeure)

Dans ce cas de figure, il existe à la fois des résidus subtils d’identification du psychisme à la forme et une ouverture large à la Conscience. Cette catégorie initie « l’entrée définitive » dans la Conscience (sans retour possible dans l’espace psychique). Et correspond, plus ou moins, à la quatrième étape du cheminement spirituel (que nous avons abordé dans les paragraphes consacrés à la spiritualité) et aux troisième et quatrième étapes du cheminement vers l’Eveil tel que l’expose la tradition du bouddhisme theravada : « le non-retour » et « le grand Eveil ». L’espace de Conscience est « habité » profondément et largement... et l’individu est « immergé », de façon quasi permanente et de de façon stable (sans oscillation avec l’espace psychique), dans l’impersonnalité.

 

Comme nous l’avons déjà évoqué dans les paragraphes consacrés au cheminement spirituel, rappelons que nous n’avons pas (jusqu’à présent) réellement expérimenté cette « façon d’habiter » la Conscience à l’exception de quelques rares, timides et très fugaces « percées » dans l’Unité… Ce que nous exposons ici correspond donc (ni plus ni moins) aux idées que nous nous faisons à propos de cette « façon » d’habiter la Conscience et tire son origine de certaines lectures et de certaines rencontres…

 

De façon succincte et synthétique, nous pourrions dire que la compréhension directe et la sensibilité deviennent profondes, larges et fines… et qu’hormis la persistance éventuelle de quelques traces égotiques et identificatoires subtiles, l’individu « baigne » dans un incommensurable espace de Paix, d’Amour, de Joie et d’Intelligence. Les comportements égotiques et délétères deviennent inexistants… L’Être s’incarne quasi parfaitement à chaque instant. L’identification à la personnalité et aux caractéristiques individuelles n’a plus cours… la mort « du personnage » est effective et avérée… Et les êtres « pleinement éveillés », « pleinement réalisés » (qui ont réalisé et actualisé leur « nature profonde véritable ») rayonnent de façon plus ou moins puissante et deviennent « des instruments d’accompagnement » dans la compréhension et le cheminement spirituel des individus qui les approchent… A « leurs yeux », Tout est Unité et Amour (et Tout est ainsi vécu…). Tout est vu pour ce qu’il est et accueilli…

 

Chez les Hommes, de tels êtres sont rares (voire exceptionnellement rares). On y trouve probablement quasi exclusivement les « maîtres spirituels » – quelle que soit leur tradition – dont la « réalisation » est incontestable... et parmi eux, seule une poignée, sans doute, parvient au « grand Eveil », les très très « grands maîtres »…

 

 

Pleine et entière (Conscience totale)

Dans ce cas de figure, il n’existe plus aucun résidu d’identification du psychisme à la forme. Cette configuration est sans doute rarissime. Et correspond à la cinquième étape du cheminement spirituel (que nous avons abordé dans les paragraphes consacrés à la spiritualité). Avouons-le sans détour, de cette catégorie (possible), nous ne savons rien… peut-être même est-elle inaccessible à un être humain… En effet, il semblerait que même les très « grands maîtres » spirituels conservent, à leur insu, d’infimes et de très subtiles traces égotiques et identificatoires (tant la puissance du psychisme a enkysté, dans l’esprit des Hommes, certains schémas mentaux…). Nous pourrions même imaginer que seuls les grands et très grands « maîtres spirituels » puissent « accéder » à cette catégorie à l’instant de leur « mort physique » (avec la disparition du corps)… sans doute deviennent-ils alors « pure et Pleine Conscience », Amour et Intelligence absolus…

 

 

De façon générale, nous pourrions dire que plus l’espace de Conscience est « habité » largement, moins la perception s’identifie à la forme et moins elle est parcellaire. Et plus elle devient large, fine et profonde... De façon analogue, plus l’espace de Conscience est « habité » largement, plus la compréhension devient directe (sans l’intermédiaire de la pensée et de l’intellect), tranchante (avec accroissement du pouvoir de discrimination entre « réalité » et illusion), globale et emplie d’Amour et de bienveillance. Et plus l’espace, l’Existant et la Vie sont « habités » dans la Paix, l’Amour et l’Intelligence de façon pleine, entière, silencieuse et immobile…

 

 

Eh bien ! Nous voilà enfin arrivés à l’ultime paragraphe et à l’ultime étape de notre analyse… Après avoir essayé de dérouler cette réflexion aussi loin, aussi largement et aussi profondément qu’il nous a été possible (au regard de nos savoirs et de notre compréhension encore parcellaires et lacunaires…), à ce stade (terminal), nous décidons de jeter l’éponge… et si d’autres cerveaux aspirent à reprendre le flambeau (modeste flambeau évidemment), nos encouragements les accompagnent… cette dernière rubrique signe pour nous, et non sans soulagement, la fin (définitive) de cette longue (très longue) réflexion…

 

Mais avant de tirer un trait (absolument) irrévocable, essayons-nous néanmoins à une brève synthèse générale…

 

 

 

Chapitre 9 SYNTHESE GENERALE SIMPLIFIEE

 

Avant d’établir cette synthèse générale, tentons d'abord de récapituler (brièvement) les principaux éléments* que cette analyse a mis en évidence :

* Quelques-uns ont d’ailleurs été (pour nous) des découvertes et/ou ont (du moins) permis de clarifier certaines thématiques qui demeuraient relativement nébuleuses avant le déroulement de cette réflexion…

 

- l’évolution progressive des formes énergétiques terrestres ;

 

- l’émergence de la perception élémentaire chez l’animal et de la perception préconsciente chez l’Homme ;

 

- l’identification du psychique à la forme (au corps) ;

 

- l’inscription du psychisme (dès ses origines) dans une perspective égotique de type utilitariste visant (essentiellement) à satisfaire les besoins ressentis ;

 

- l’essentiel des besoins et des désirs humains et la totalité des domaines où ils se manifestent : alimentation, santé, hygiène (beauté et bien-être), vêtement, logement, tâches et confort domestiques, énergie, transports, défense et protection organique et matérielle, reproduction, défense et protection psychique, relations, sexualité et affection, communication, information, distraction, expression, art, imagination, savoirs, connaissance, travail, argent, administration et spiritualité ;

 

- la dimension « secondaire* » de l’argent, du travail et de l’administration ;

* En dépit de leur place centrale dans la vie des individus et l’organisation des sociétés, ils ont, en effet, été créés secondairement à seule fin de répondre aux caractéristiques psychiques humaines et au fonctionnement sociétal…

 

- la « manière* » dont le psychisme tente de satisfaire l’ensemble des besoins et des désirs ;

* De façon sécurisée et permanente et de façon aussi rapide, simple, confortable et intelligente que possible et en assurant l’amélioration des réponses (leur fabrication, leur accès et leur utilisation) en matière de rapidité, de simplicité, de durabilité, de sécurité, de confort et de possibilités nouvelles… (avec amélioration continue de l’amélioration – cycle infini…) ;

 

- le rôle essentiel des désirs narcissiques et des fantasmes (les désirs sous-jacents) dans la « façon de satisfaire » les besoins organiques, matériels et psychiques élémentaires ;

 

- la création (possible) de différents kits pour répondre à l’ensemble des besoins et leur évolution vers le synthétique, le chimique et l’immatériel ;

 

- les modes de fonctionnement principaux du psychisme ;

 

- le psychisme comme espace perceptif traversé (de façon quasi continue) par de très nombreux mouvements énergétiques provisoires : essentiellement les manifestations de l’Existant, les sensations, les représentations mentales et les émotions (et sentiments) ;

 

- la prépondérance de la zone de confort, la puissance des désirs et des peurs et l’omnipotence des représentations mentales dans le fonctionnement psychique ;

 

- la dimension « limitée » de l’espace psychique et sa très forte propension à « la saisie » ;

 

- l’origine principale des frustrations, de la dépendance, de l’attachement et des comportements délétères* ;

* Que nous avons qualifiés de délétères…

 

- la puissance créatrice du psychisme à l’origine de nombreuses formes, de nombreux domaines et de nombreux plans (tels que le désir, le plan émotionnel, le plan réalisationnel actif (les réponses aux besoins et aux désirs ressentis par le psychisme), le plan représentatif intellectuel (les représentations imaginaires et langagières de l’Existant et de l’existence), le plan spirituel (la compréhension sensible de l’Existant et de l’existence) et la société humaine ;

 

- le psychisme comme facteur déterminant et central dans « la marche du monde » et l’évolution des formes terrestres (et leur devenir) ;

 

- le modèle sociétal comme reflet (quasi parfait) du psychisme ;

 

- les « fondamentaux » de la société humaine ;

 

- les quatre types d’organisations nécessaires pour assurer le fonctionnement sociétal : les organisations politique, judiciaire (au sens large) et économique et l’organisation de la défense territoriale et des relations extérieures ;

 

- le glissement progressif de la violence de la sphère biologique vers la sphère économique ;

 

- l’Homme comme première forme terrestre à pouvoir transformer l’Existant et à avoir un impact sur son évolution (en fonction des orientations choisies). Première forme également capable de créer un système qui régit l’organisation, les échanges et l’existence des individus, capable de prendre en considération les « aspirations » des formes humaines et non humaines (en matière de confort, de satisfaction et de bien-être) et capable d’assurer « la défense et la protection » des formes vulnérables et « fragiles » (ou fragilisées) ;

 

- le point de bascule que constitue l’Homme « moderne » sur les plans énergétique et perceptif ;

 

- les principales étapes du cheminement spirituel (humain) ;

 

- la dimension « naturelle » de la spiritualité qui obéit à un processus logique et « cohérent » et s’inscrit dans l’ordre des choses (tant sur le plan individuel que collectif) ;

 

- l’évolution des formes terrestres, des individus et des sociétés et leur inscription (possible) dans une « logique historique » sur le plan matériel (processus tendant vers l’immatérialité, l’autonomie et la liberté absolues) et sur le plan de la compréhension et de la perception (processus visant à « retrouver » les caractéristiques de la – Pleine – Conscience…) ;

 

- la similitude (quasi parfaite) entre le processus d’évolution individuelle et le processus d’évolution collective (avec des étapes de cheminement progressif – de la matérialité et de la « liberté phénoménale » vers l’intériorité et la spiritualité – et les différentes phases du cheminement spirituel) ;

 

- la démocratie et le capitalisme comme « étapes » nécessaires sur le plan collectif pour que les Hommes prennent conscience que le « bonheur matériel » et la « liberté phénoménale » ne peuvent être porteurs de Paix, de Joie et de Plénitude-Complétude (caractéristiques tant recherchées par les individus et les peuples) ;

 

- la spiritualité (authentique) comme socle fondamental et base incontournable sur lesquels s’édifiera l’avenir des individus, des sociétés et du monde terrestre ;

 

- l’avenir probablement sombre et chaotique de la planète sans l’avènement d’une spiritualité et d’un modèle sociétal solidaire et respectueux ;

 

- l’importance déterminante des ères – que nous avons qualifiées – de Conscience mineure et de Conscience majeure dans l’avenir de l’humanité et du monde ;

 

- la transformation (incessante) du modèle sociétal dominant jusqu’à l’éradication progressive de toute organisation sociétale : du tribalisme (primitif) au communautarisme « clanique » ou traditionnel (élémentaire), du communautarisme « clanique » ou traditionnel (élémentaire) au communautarisme géographique ou social (« élaboré »), du communautarisme géographique ou social (« élaboré ») à l’individualisme libéral, productiviste et consumériste. De l’individualisme libéral, productiviste et consumériste à la solidarité (globale) respectueuse et spirituelle. De la solidarité (globale) respectueuse et spirituelle au « vivre ensemble » créatif, libre et révérenciel. Et du « vivre ensemble » créatif, libre et révérenciel à la « parfaite Unité-unicité autonome » ;

 

- le respect progressif de l’ensemble de l’Existant ;

 

- les défis (techniques) et les enjeux (éthiques) liés aux systèmes d’intelligence artificielle, à la transformation de l’Homme (corps et cerveau) et à l’intégration de la « sensibilité » au synthétique ;

 

- l’impossibilité de donner une idée « raisonnable » de l’évolution et du devenir des intelligences artificielles et la façon dont elles seront « instrumentalisées » ;

 

- l’impossibilité* de déterminer, de façon raisonnée, « raisonnable » ou rationnelle, « la vérité » ou la logique (ou même quelques lois) sur le « destin » des formes, l’imbrication des différents évènements et situations dans lesquels elles sont « impliquées », l’existence éventuelle de « parts conscientes » et la logique de leur possible processus de transmigration ;

* Et il fallait, bien sûr, s’y attendre… si cet élément avait été démontrable par la raison et l’intellect, la Vie n’aurait pas attendu cette (modeste) analyse pour le montrer...

 

- la structure (possible) du « réel » ou la trame (fondamentale) de l’Existant et les différentes formes (apparentes) qu’elle a pu et pourrait revêtir (au cours de son évolution passée et à venir) ;

 

- quelques lois basiques sur l’énergie, les formes énergétiques et la perception et sur les liens entre l’énergie (les formes, la matière et le Vivant) et la compréhension, la sensibilité et la perception ;

 

- l’existence d’une seule Conscience* et les différentes possibilités (ou manières) « d’habiter* » l’espace perceptif pour (et par) les êtres humains.

* Notons que cette analyse a moins mis en évidence « ces faits » qu’elle ne les a « décrétés »… Ces éléments semblent relativement évidents au regard de notre expérience, de nos ressentis, de nos intuitions et de notre connaissance... Et cette absence de (ou cette incapacité à fournir une) « démonstration intellectuelle ou rationnelle » vient corroborer ce que nous avons évoqué précédemment : ce domaine (la compréhension sensible de l’existence et de l’Existant) ne peut être révélé par l’intellect ni démontré par l’argumentation mais seulement, semble-t-il, par l’expérimentation directe et le vécu (« intérieurs »).

 

 

Venons-en, à présent, à notre synthèse générale…

 

De façon (ultra) synthétique, nous pourrions dire, au terme de cette longue réflexion, que la Conscience est un espace perceptif sensible unique qui peut être « habité(1) » de plusieurs façons. Ces différentes manières « d’habiter » la perception(2) sont largement conditionnées par les caractéristiques des formes dotées de capacités perceptives.

(1) Ou (selon le « point de vue ») qui « habite » les formes perceptives de plusieurs façons…

(2) D’une perception éminemment restreinte à une perception globale et complète…

 

Au sein de cet espace s’inscrit, de façon permanente, l’Existant qui se compose d’une infinité (au sens littéral) de formes, de mouvements, de transformations et d’échanges énergétiques. Et, les formes* ont beau entretenir une multitude d’interactions, effectuer pléthore d’échanges et subir quantité de transformations en s’imaginant vivre et expérimenter les situations, les évènements et les circonstances (à titre individuel), il est très probable qu’elles ne soient, en dépit des apparences, que de simples jouets soumis aux jeux énergétiques… de simples marionnettes qui ne vivent, n’éprouvent et n’expérimentent absolument rien… Il semblerait, en effet, que seule la Conscience perçoive, vive, éprouve, ressente, expérimente et comprenne, à travers toutes les formes existantes et toutes les situations, l’ensemble de l’Existant.

* Formes auxquelles s’identifie, bien souvent, la perception (via le psychisme) chez les animaux et les êtres humains…

 

Cette réflexion a également montré qu’au fil de l’évolution de l’Existant terrestre, une partie de l’énergie « pure » (l’énergie « originelle » ?) s’est progressivement transformée en matière, une partie de la matière s’est transformée en « organique » (le Vivant), une partie du Vivant a eu accès à la perception et s’est très progressivement complexifiée au point de donner naissance à l’Homme, forme dotée, pour la première fois dans l’histoire de la planète, d’un potentiel de compréhension et de transformation totalement inédit… A ce titre, l’Homme semble une sorte de point de bascule et/ou de retournement dans l’évolution terrestre tant sur le plan de la perception (et de la compréhension sensible) que sur le plan énergétique. Ainsi, l’Homme est la première forme qui s’inscrit dans un lent mais perpétuel élargissement pour « retrouver » la perception « originelle » et la compréhension globale et faire advenir les caractéristiques de la Conscience sur le plan phénoménal. Et il est également la première forme qui soit à l’origine d’une lente et progressive transformation de l’Existant, poussé inexorablement à transformer la matière naturelle et organique en (matière) synthétique, puis à transformer le synthétique en immatériel (en énergie « pure »).

 

… comme si la Conscience « originelle » (espace sans forme, infini et atemporel) « s’amusait » (peut-être) à voir émerger et se façonner lentement et progressivement sur Terre une forme ou des formes — les Hommes et leurs descendants trans-humains et/ou post-humains — qui seraient « encouragées » (à leur insu), au fil de leur évolution, à « retrouver » ses propres caractéristiques (sur un plan fini et temporel)… en leur enjoignant de franchir les nombreuses étapes vers la liberté et l’autonomie totales mais en ne leur « autorisant » à accroître leurs capacités de création, de fabrication (au sens large) et de transformation qu’au fil d’une intégration progressive et réelle d’un degré de compréhension sensible et d’un degré « d’Intelligence et d’Amour » suffisant*, sans savoir (d’ailleurs) si elles (et à travers elles, Elle-même) y parviendront mais en leur « exhortant » sans cesse à dépasser leurs limites pour s’en approcher…

* Sans doute (comme nous l'avons déjà évoqué) pour éviter de substantielles dérives…

 

Achevons enfin notre synthèse en soulignant que quel que soit le nombre de formes, de plans et d’univers existants* et quels que soient leurs interactions, leur potentiel et leur évolution, il semblerait que la structure du « réel » ou la « trame fondamentale » de l’Existant demeure inchangée… Elle reste, en dépit de toutes les créations et de toutes les destructions, de « simples » combinaisons énergétiques… qui ne peuvent jamais (absolument jamais), quels que soient leur puissance, leurs mouvements et leurs conséquences, détériorer ou entacher l’espace de Conscience…

* Créés au sein de l’Existant…

 

 

 

CONCLUSION GENERALE

 

Achevons notre réflexion par ces quelques mots… La Vie et l’Existant ne semblent, en réalité, qu’un gigantesque jeu — violent et merveilleux — et une permanente célébration… A hauteur d’Homme, peut-être pourrions-nous penser que nous nous apprenons les uns les autres (et, bien souvent, à notre insu) à mieux les regarder et à mieux les vivre. A mieux les comprendre et à mieux les aimer… mais sur le plan de la Conscience, tout ce « cirque » — aimable ou corrosif — semble (presque) sans importance… Est-ce qui est… et ce qui est n’altère jamais Le Regard…

 

Ainsi donc pourraient être la Conscience et l’énergie. Et à travers la compréhension, nous apprenons peu à peu ce que nous sommes… A charge pour nous de le découvrir (réellement) « de l’intérieur »… et de le « vivre » et de le « goûter » profondément (autant qu’il nous est possible…) à chaque instant… dans l’éternelle Présence…

 

… en espérant simplement que ces quelques pages y auront modestement contribué…

 

 

 

ANNEXES*

 

ANNEXE 1 : panorama général de la Conscience et de l'Existant – partie 1

ANNEXE 2 : panorama général de la Conscience et de l'Existant – partie 2

ANNEXE 3 : l'Homme et le psychisme, créateurs de différents plans

ANNEXE 4 : le plan réalisationnel actif

ANNEXE 5 : le plan représentatif intellectuel

ANNEXE 6 : l'organisation générale de l’Existant contemporain

ANNEXE 7 : panorama général de la Conscience et de l'Existant – partie 3

ANNEXE 8 : panorama général de la Conscience et de l'Existant – partie 4

ANNEXE 9 : panorama général de la Conscience et de l'Existant – synthèse

 

* Les annexes, peu adaptées à la lecture sur écran, figurent néanmoins dans la version numérique.

 

5 décembre 2017

Carnet n°67 La conscience et l'Existant - Chapitre 7 (suite)

Essai / 2015 / L'exploration de l'être

La Vie et l’Existant ne semblent, en réalité, qu’un gigantesque jeu — violent et merveilleux — et une permanente célébration… A hauteur d’Homme, peut-être pourrions-nous penser que nous nous apprenons les uns les autres (et, bien souvent, à notre insu) à mieux les regarder et à mieux les vivre. A mieux les comprendre et à mieux les aimer… mais sur le plan de la Conscience, tout ce « cirque » — aimable ou corrosif — semble (presque) sans importance… Est-ce qui est… et ce qui est n’altère jamais Le Regard…

_

Nous avons été contraints (pour des raisons d'ordre technique) de diviser la version numérique de cet ouvrage en dix parties.

Sommaire

Chapitre introductif

Chapitres 1 à 5

Chapitre 6 (début)

Chapitre 6 (suite)

Chapitre 6 (suite et fin)

Chapitre 7 (début)

 

 

LE MONDE D'APRES-DEMAIN

 

Les sociétés d’après-demain

 

Généralités

A ce stade, nous pourrions imaginer que les populations des différentes sociétés et des différents « grands ensembles » territoriaux aient des conditions d’existence et une qualité de vie relativement (très relativement) similaires et que les sociétés aient amorcé une réorganisation progressive de la production, des échanges, de la redistribution et de la consommation. Ces deux éléments pourraient être la conséquence, d’une part, de l’essoufflement naturel et progressif(1) du modèle sociétal dominant(2) qui pourrait fort bien, au cours de cette période, connaître une forme « d’asphyxie », engendré par ses effets dévastateurs sur les Hommes(3) et sur l’environnement (et se révélant, de plus en plus, inapte à améliorer les conditions d’existence et la qualité de vie des individus(4)) et, d’autre part, de l’émergence (concomitante) d’une « conscience collective » ou, du moins, d’un « sursaut d’éveil » des esprits, de plus en plus sensibles à la solidarité et à l’écologie et de plus en plus enclins et favorables à la transformation de la société en « système » plus solidaire entre les peuples et plus respectueux de l’Existant.

(1) Sur le plan de la Conscience, il semble raisonnable de penser (et nécessaire de souligner) que ce modèle basé sur la concurrence et l’individualisme s’éteindra lorsqu’il aura permis de livrer pleinement tout ce qu’il pourra offrir en matière de progrès, de sécurité et de confort...

(2) Fondé, pour rappel, sur l’individualisme, le productivisme, le capitalisme et le consumérisme.

(3) Avec leur écrasement et leur asservissement toujours plus vifs et puissants…

(4) A moins même qu’il ne crée, dans ses derniers élans (et ses ultimes soubresauts), une détérioration substantielle des conditions d’existence et de la qualité de vie que les individus ne seraient plus en mesure d’accepter…

 

D’une façon ou d’une autre (et quelles que soient les hypothèses), que les richesses soient encore très inégalement réparties, plus équitablement réparties ou réparties de façon totalement équitable au sein de (et entre) chaque société et chaque grand ensemble territorial, le modèle sociétal dominant sera contraint, tôt ou tard, pour la survie des individus (et de leur environnement — au sens large) de se transformer et de s’orienter vers l’écologie et la solidarité (nous argumenterons cette assertion ultérieurement…).

 

Les paramètres majeurs qui permettront une cohabitation* entre les différents modèles sociétaux, mouvements, communautés et sociétés seront leur capacité à la tolérance et au respect de la différence et leur volonté commune d’un « vivre ensemble » (d’un « vivre ensemble » côte à côte ou d’un « vivre ensemble » mélangé…). Ainsi (et ainsi seulement), tous les partisans de la tolérance pourraient vivre ensemble avec « leurs différences »… et « vivre cette différence » en tant qu’individus dans leur communauté, elle-même, pleinement intégrée (avec ses différences) à la société... A ce titre, les « intolérants » trop revendicatifs et agressifs (voire violents ou hyper violents), qu’ils soient des individus, des mouvements, des communautés ou des sociétés, pourraient faire l’objet de tentatives d’éducation (à « la tolérance ») et/ou être relégués dans des zones périphériques ou exclus du « monde »... Sur le plan planétaire, des zones pourraient leur être attribuées (ou ils pourraient se les « accaparer ») obligeant, dès lors, les autres sociétés et zones à se protéger plus ou moins drastiquement selon leur degré de dangerosité, d’agressivité et de violence.

* Et sans doute (à terme) une intégration respectueuse de toutes les sociétés et de tous les « grands pôles géographiques » à une société mondiale planétaire (ou quasi planétaire)…

 

Grâce au dialogue, à la concertation et à l’éducation*, les sociétés, qu’elles soient encore constituées en zones nationales (en nation) ou en ensembles géographiques plus vastes (voire, peut-être même, totalement unifiées au niveau planétaire) accepteront sans doute progressivement – peu ou prou enthousiastes ou résignées – l’idée d’un « vivre ensemble » global et protéiforme et pourraient représenter une part importante (voire même l’essentiel) de la population à laquelle finirait par se rallier l’ensemble des individus (excepté quelques irréductibles fondamentalistes « bornés et intolérants », arc-boutés sur leur identité et/ou leur idéologie, vivant dans des zones terrestres « non ralliables »).

* Soulignons encore, ici, (avec insistance) que le besoin de compréhension et de spiritualité sera un paramètre absolument déterminant. En effet, plus ce besoin se manifestera largement et profondément dans la population, plus la transformation des sociétés aura des chances de se réaliser rapidement et aisément…

 

A ce stade, il nous faut néanmoins envisager deux hypothèses :

 

- les différents modèles sociétaux, les différentes sociétés et les « grands ensembles géographiques » parviennent à s’harmoniser(1) et à créer les conditions d’une uniformisation (minimale) viable, nécessaire à la prise en compte de l’ensemble des individus ;

 

- les différents modèles sociétaux, les différentes sociétés et les « grands ensembles géographiques » ne parviennent à aucune harmonisation. Ils demeurent strictement séparés et suivent une évolution parallèle sans échange ni coopération(2).

(1) Il est raisonnable d’imaginer que les individus (et donc que les communautés et les sociétés) verront s’accroître leur besoin de compréhension et de spiritualité, condition très propice à l’amenuisement des idéologies, des sectarismes et des fondamentalismes, favorisant ainsi deux grands axes (reflets du psychisme humain) : l’orientation vers « le désir/sécurité » – axe central des alternatifs « sécuritaires » – et l’orientation vers le progrès/respect – axe central des alternatifs « progressistes » – qui apprendront à cohabiter et à cheminer ensemble pour voir émerger « toujours plus d’intelligence et d’amour », orientations qui constituent, évidemment, la « voie naturelle » par excellence (puisqu’elle s’inscrit dans une perspective qui « rapproche » des caractéristiques de la Conscience).

(2) On pourrait même imaginer, dans cette hypothèse, que les liens entre les différentes sociétés, au cours de cette période, se limitent peu ou prou à une forme de tourisme. Et l’on pourrait ainsi voir des « alternatifs sécuritaires » passer, par exemple, leurs vacances » chez des « alternatifs progressistes » un peu comme les occidentaux voyagent, aujourd’hui, dans les pays du tiers monde ou comme les citadins se rendent en villégiature chez les ruraux (ils regardent, goûtent, découvrent et « profitent » des attraits du dépaysement tout en conservant (globalement) « leur mode de vie » sans « se mêler » ni « se mélanger » véritablement aux autochtones…).

 

Si la première hypothèse se réalise, il est probable que les sociétés et les grands ensembles territoriaux se réorganisent et transforment progressivement leurs rapports de concurrence en coopération (de façon, plus ou moins, rapide et aisée) et éventuellement (à terme) puissent se spécialiser dans l’un des grands domaines-clés que nous avons déjà évoqués (et que nous aborderons, de façon plus détaillée, ultérieurement…).

 

Dans la seconde hypothèse, les différents modèles sociétaux, les différentes sociétés et les « grands pôles géographiques » ne parviennent à cohabiter harmonieusement ni à s’harmoniser. Les populations ne ressentent pas la nécessité de « se tourner » vers la solidarité et l’écologie et/ou le besoin de compréhension et de spiritualité. Elles continuent de « n’avoir d’yeux » que pour le progrès, le confort et la sécurité. Dans cette configuration, il est probable (ou il y a fort à parier…) qu’une scission du monde et de l’humanité pourrait se produire, les uns privilégiant la solidarité, l’écologie et la spiritualité et les autres privilégiant le progrès, la sécurité et le confort. Ces deux courants pourraient être alors amenés à s’organiser de façon autonome et à créer des sociétés, plus ou moins hermétiques, « contraintes » d’évoluer de façon parallèle (sans échange ni coopération)… évolution qui pourrait inaugurer l’avènement de sociétés « chaotiques », engluées dans un monde « de violence et de terreur » (voire même « d’apocalypse ») et entraînées dans une forme exacerbée de repli sur soi, vouées à un avenir sombre et mortifère et provoquant (à terme) leur déperdition (sans doute irrémédiable).

 

Ainsi, ces sociétés « chaotiques » (issues des sociétés tournées prioritairement vers le désir, le confort et la sécurité) pourraient très rapidement devenir (au vu des comportements de leurs membres) des sociétés hyper sécuritaires, hyper objectales (extrêmement gadgétisées et robotisées), hyper artificielles (hyper synthétiques, hyper chimiques), hyper distractives, hyper virtuelles, hyper « sensationnalistes », hyper sensorielles (avec une quête avide et effrénée de plaisirs en tous genres), hyper sexualisées, hyper mobiles et, sans doute, hyper violentes et hyper commercialo-monétisées où l’on pourrait imaginer que tout (absolument tout sans exception) puisse se monnayer jusqu’aux domaines les plus intimes et les plus « improbables » (les gènes, les émotions artificielles, les « bons » sentiments, les contenus psychiques ou imaginatifs latents et on en passe…) sans compter un risque (plus ou moins important) pour une frange de la population de voir se dégrader ses capacités sensorielles et cognitives (avec un « abêtissement » corporel et cérébral généralisé, induit par l’usage quasi exclusif des nouvelles technologies* et des intelligences artificielles) et sans exclure également (à terme) la possibilité de prise de contrôle des systèmes d’intelligence artificielle par une minorité d’individus qui asservirait la très grande majorité de la population… bref, une configuration générale qui pourrait initier une ère bien sombre…

* Comme si l’utilisation « paresseuse » de ces technologies(1) pouvait provoquer une réduction des capacités physiques et intellectuelles des individus qui en feraient un usage exclusif (ou excessif) en les rendant de moins en moins aptes à utiliser, de façon autonome et naturelle, leur corps et leur intellect…

(1) A ce titre, notons que les technologies actuelles comme les appareillages électroniques dédiés aux massages corporels ou à la retonification musculaire (sans effort) et la généralisation des applications sur smartphone, destinées à « coacher » les individus dans l’ensemble des sphères existentielles (confinant, bien souvent, au ridicule), incitent les individus à suivre et à appliquer bêtement des programmes « clé en main » sans prendre la peine de réfléchir (ou de ressentir leur corps), d’élaborer leur « propre méthode » ni même de remettre en cause ces « prêts-à-l’emploi » passifs et infantilisants

 

Quant aux sociétés théocratiques fondamentalistes (si elles existent encore), elles pourraient devenir des sociétés éminemment (ou totalement) liberticides qui continueraient à essayer de transformer, à coups « d’idéologies obscurantistes », le psychisme des individus de façon inappropriée et absolument non viable…

 

Il est néanmoins raisonnable de penser que dans ces sociétés « théocratiques » et « chaotiques » (si elles existent), les individus (sauf exception) seront, tôt ou tard, confrontés à un besoin de sens pour les uns et à un besoin de liberté pour les autres qui impulsera un besoin de compréhension et amènera progressivement à une forme de spiritualité et/ou à une soif d’émancipation (et engendrera, par conséquent, une transformation de ce type de société ou donnera naissance à des flux migratoires (plus ou moins) massifs vers les sociétés, adeptes du modèle sociétal majoritaire). En cas de survenance de cette hypothèse, tout ne serait donc pas totalement (et irrémédiablement) « perdu »… et un rapprochement et une harmonisation globale ultérieurs entre ces deux types de sociétés et le modèle solidaire et écologique seront toujours possibles (et envisageables)…

 

Au regard de l’ensemble de ces éléments, il apparaît avec évidence (et même avec clarté) que quelles que soient les hypothèses que nous retenons (harmonisation ou non harmonisation des sociétés), quels que soient les partages territoriaux, les violences et les conflits, les évolutions, les difficultés intégratives et d’organisation de la diversité qui vont occuper l’humanité (pour une — sans doute — assez longue période), le seul modèle possible et viable à long terme est le modèle progressiste, ouvert, solidaire et respectueux (n’en déplaise à quelques grincheux sectaires !) qui deviendra (à terme) ou s’imposera (par la force « des choses »…) comme le seul modèle sociétal…

 

Les raisons majeures de cette « hégémonie(1) » ou de ce « monopole(1) » pourraient se résumer ainsi : cette forme organisationnelle est le seul système collectif bénéfique non seulement à chaque individu et à l’ensemble de la société mais également à toutes les formes terrestres et à la totalité de l’Existant. En effet, quel autre modèle serait-il capable de prendre en considération tous les êtres, tous les individus et toutes les communautés en respectant « la différence » (quelle qu’elle soit…) ? Aucun probablement… Deuxième argument (majeur) : ce modèle est le seul à s’inscrire dans « la logique naturelle » de l’évolution des formes terrestres et de l’histoire humaine (dont nous avons donné un aperçu dans certains paragraphes de ce chapitre)… Et enfin (last but not least), il est le seul qui permette aux individus de « vivre » et de « retrouver » les caractéristiques de la Conscience et de les faire advenir (progressivement) sur les plans « mondain » et phénoménal(2)

(1) Les termes sont très inappropriés pour définir un modèle ouvert, solidaire et respectueux… mais nous n’en avons trouvé d’autres…

(2) Oui, rien de moins… Et notons, ici, que si cette forme d’organisation n’était pas (par le plus grand des malheurs) amenée à voir le jour, il y a fort à parier que la prédominance des « sociétés chaotiques » conduirait probablement à une impasse et (à terme) à une sorte de « fin du monde » (humain)… bref… à ce qui pourrait bien constituer la fin de l’histoire (si l’on peut dire !)…

 

Ainsi, dans un tel système organisationnel*, les sociétés traditionnelles (si elles existent encore) seraient respectées même s’il est probable qu’elles soient progressivement amenées à disparaître au fil des générations, attirées de plus en plus par les sirènes du confort et du progrès en intégrant le modèle progressiste. Les « alternatifs ethniques et/ou culturels » intégreraient également le modèle sociétal et seraient respectés dans leur différence et leur mode de vie. Les « alternatifs religieux pacifiques » pourraient vivre leur foi comme « bon leur semble » (là où ils le désireront ou là où on leur attribuera un espace). Les « alternatifs religieux violents » pourraient être défondamentalisés et « rééduqués » (au respect de la différence) et, progressivement, une partie d’entre eux comprendrait « l’étroitesse d’esprit » de son idéologie et finirait par se tourner vers des dogmes plus « ouverts » et tolérants… (ceux qui continueront à perpétrer des attentats ou à commettre des exactions pourraient être « neutralisés », « exterminés » ou « renvoyés » dans leur zone géographique ou relégués dans des zones prévues à cet effet). Les « alternatifs sécuritaires » finiraient par assouplir leur position et leur arsenal de surveillance et de protection en s’ouvrant progressivement au monde et à sa diversité. Le modèle sociétal dominant d’aujourd’hui et de demain (à supposer qu’il existe encore à cette époque) prendrait progressivement des mesures de plus en plus tournées vers le respect et la solidarité, tout en conservant son orientation vers le confort et le bien-être et en assurant la protection de chaque individu (encore soumis aux comportements délétères, liés à l’identification du psychisme à la forme). Et les « alternatifs progressistes » (qui ne seraient plus, de facto, des alternatifs) seraient reconnus comme des « éclaireurs éclairés » et verraient leur rang grossir avec le ralliement de l’ensemble (ou d'une part, sans doute, substantielle) de l’humanité.

* En supposant qu’il advienne, bien évidemment…

 

Selon la survenance des scénarios envisagés, la part de l’humanité qui intégrera ce modèle sociétal unique sera variable. Au mieux, toute l’humanité y sera associée. Mais, plus probablement, seule une partie en bénéficiera (selon les orientations et les événements), soit une part substantielle, soit une part conséquente, soit une part modeste, soit une part minoritaire et dans le pire des cas, une part ultra-minoritaire. Mais quelle que soit la proportion d’individus qui sera partie prenante à ce modèle sociétal, soulignons ici (avec force et détermination) que l’évolution des formes terrestres (en général) et l’évolution de l’histoire (humaine et/ou post-humaine) en particulier ne pourront, semble-t-il, advenir que grâce et avec cette frange de la population...

 

Que ces transformations s’opèrent sur l’ensemble ou la quasi-totalité de la planète, sur une zone étendue ou réduite, une harmonisation générale devra avoir (et aura) lieu avec une uniformisation minimale incontournable qui respectera néanmoins les différences, les spécificités et les particularités, instituant le modèle progressiste, solidaire et respectueux comme le seul modèle possible* pour l’humanité et ses successeurs.

* En effet, ce modèle est non seulement le moins éloigné des caractéristiques de la Conscience et le plus favorable, sur le plan phénoménal, à la liberté, à la sécurité, à l’amour et à l’intelligence mais il permet également la poursuite du progrès et du confort (si centraux dans le psychisme humain)... tout en respectant l’Existant…

 

A ce stade, nous pourrions dire que l’humanité (ou une partie de l’humanité) se considérera enfin comme « une grande famille » et appréhendera « réellement » le monde (l’ensemble de la planète ou la zone qu’elle occupe) comme son foyer… Mais toute vie familiale n’est pas exempte, vous en conviendrez, de difficultés et de problèmes (divers)… Et les relations, au sein de cette grande « confrérie fraternelle(1) », pourraient bien se révéler encore (plus ou moins) « difficiles » et/ou (plus ou moins) conflictuelles… Il est fort probable, en effet, que les membres de « cette grande famille » continuent d’entretenir des rapports ambigus et quelque peu « problématiques »… soulevant ainsi les épineuses questions de l’individualité(2), des comportements délétères (qui en résultent) et du respect de l’Existant.

(1) Oui (comme vous l’avez remarqué), nous avons, en « furieux adepte » de la périssologie, un « faible » pour les redondances inutiles et (un peu) ampoulées…

(2) Le sentiment d’être une entité séparée du « reste du monde », lié à l’identification du psychisme au corps.

 

Soulignons, une nouvelle fois (avec force), que ces éléments, qui ont toujours constitué une source de conflits au sein de la grande tribu humaine et de la grande communauté du Vivant et de l’Existant, pourraient être quelque peu améliorés par le dialogue, la concertation et l’éducation mais ne pourront néanmoins jamais être « dépassés », « transcendés » ou résolus (il semble, en effet, exister, des limites infranchissables…) tant que l’idée d’être « une entité indépendante » persistera dans le psychisme. Il est donc évident que seuls la prégnance du besoin de compréhension et l’avènement progressif de la spiritualité (et du cheminement spirituel) pourront favoriser et opérer un changement véritable. Ainsi (et ainsi seulement), l’humanité et ses descendants seront « mûrs » pour une ère nouvelle : l’avènement de la Conscience mineure qui inaugurera une diminution progressive de certaines caractéristiques psychiques et comportementales et favorisera l’émergence et le développement de certaines caractéristiques de la Conscience sur les plans individuel et collectif (la société restant toujours, à bien des égards, le juste reflet des individus et de leurs interactions).

 

Au vu de ces éléments, essayons à présent de dessiner l’organisation générale la plus représentative de la société d’après-demain en matière politique, judiciaire et économique ainsi qu’en matière de relations avec « l’extérieur » et d’organisation territoriale.

 

 

L’organisation sociétale générale

En matière d’organisation politique (et de mode de gouvernance), les sociétés d’après-demain pourraient permettre aux collectivités, sur le plan local, de s’organiser de façon toujours plus autonome, en les « laissant » devenir les principaux « lieux de vie » politiques et démocratiques. Les instances internationales pourraient également devenir prépondérantes en matière d’orientation politique, économique, sociale et environnementale… Et il est fort probable que le modèle démocratique continue de s’étendre sur l’essentiel des territoires et que les regroupements des nations se poursuivent. L’organisation politique pourrait alors devenir supranationale et mondiale.

 

En matière judiciaire (et policière), on pourrait assister à la poursuite de l’envolée inflationniste des lois, des décrets et des arrêtés dans tous les domaines de l’existence et dans tous les secteurs de la société à l’échelle nationale, supranationale et mondiale, à la poursuite du renforcement de l’arsenal policier et judiciaire au niveau planétaire et au développement d’un monde d’hyper surveillance et de contrôle en dépit des limites atteintes en matière coercitive par l’exacerbation des fonctions régaliennes (de l’Etat central).

 

Sur le plan de l’organisation économique, on pourrait assister à la réorganisation progressive des grands groupes industriels et commerciaux, à la généralisation des microentreprises et des prestataires de services multi-cartes ainsi qu’à la réorientation progressive des activités (avec la quasi généralisation des énormes centrales d’achat et la généralisation de la distribution des biens manufacturés à distance). Les grands ensembles territoriaux pourraient également favoriser la constitution d’oligopoles (pour les biens manufacturés) et la généralisation des échanges locaux (dans les autres secteurs). Les modes de paiement pourraient devenir totalement immatériels et sans support. Quant à l’organisation du travail, il est probable que l’on assiste à un essoufflement naturel du travail « tyrannique » et au développement d’activités professionnelles plus épanouissantes sur les plans individuel et collectif.

 

Sur le plan international, la mondialisation du commerce pourrait devenir paroxystique et montrer, elle aussi, des signes d’essoufflement (incapacité à répartir, de façon appropriée et équitable, les richesses et fortes dégradations des conditions de vie des individus sur l’ensemble du globe). Quant à la paix mondiale, elle pourrait être à portée de main avec l’émergence des premiers signes « réels » et tangibles d’une aspiration collective à faire de la Terre un espace commun harmonieux et équitable. Les flux migratoires internationaux (qui pourront demeurer très massifs) pourraient néanmoins connaître une relative stabilisation.

 

Et au sein des « grands ensembles territoriaux », on pourrait assister, outre à une hyperurbanisation et à l’expansion des grandes mégalopoles (malgré un essoufflement naturel et un « taux de saturation » urbain…), à une régénérescence et à une modernisation des villages et à l’essor massif (voire exponentiel) de nouveaux lieux de vie, de collectivités et de communautés locales, de plus en plus autonomes, mais également organisés en fonction de leur « idéologie dominante » (sécuritaire, solidaire, écologique, religieuse et/ou spirituelle) que les individus seraient alors libres de choisir selon leur(s) propre(s) aspirations et/ou « idéologie »…

 

 

L’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence

De façon parallèle à leur incessante réorganisation et à leur permanent réaménagement sur le plan planétaire, les sociétés (et, en particulier, celles qui auront adopté le modèle sociétal majoritaire) continueront (sans aucun doute) de développer leurs études, leurs recherches et leurs savoirs dans tous les domaines.

 

Ainsi, il est fort probable qu’elles améliorent leur connaissance de l’Existant et puissent apporter des réponses toujours plus performantes à l’insatiable quête de satisfaction, de confort et de sécurité des individus. Voici, en quelques mots, les orientations majeures qui pourraient être prises :

 

- amélioration constante des réponses aux besoins organiques, matériels et psychiques élémentaires ;

 

- baisse de la pénibilité ;

 

- amélioration substantielle du confort ;

 

- augmentation du plaisir, des possibilités, de la sécurité, de l’immédiateté, de la diversité, des objets de synthèse, de la robotisation, des substances chimiques, de la durabilité (corps et matière), de l’intelligence artificielle, de l’immatérialité, de la virtualité, de l’individualisation et des réseaux (de toutes sortes)…

 

 

De façon plus détaillée, on pourrait imaginer* que la société d’après-demain généralise l’agroalimentaire de synthèse mais également les petites cultures et les petits élevages bio, les robots médicaux, les organes synthétiques et les substances chimiques (avec le développement du transhumanisme corporel synthético-chimique curatif, prophylactique et de remplacement) et qu’elle crée un kit de santé synthético-chimique destiné à lutter contre les pathologies.

* Cette rubrique (à l’instar de quelques autres) accumule et empile les « on pourrait » et les « on pourrait imaginer »… Est-ce un manque d’imagination ? Oui, sans doute… Aurait-on pu procéder autrement ? Oui, nous aurions pu nous éreinter (et nous épuiser) à maintes reformulations langagières… mais, comme vous l’avez probablement remarqué, la « bonne tenue » stylistique et le recours à des procédés formels corrects(1) (ou appropriés) dans cette analyse nous sont apparus (sans doute à tort) secondaires (voire accessoires). Nous nous en sommes donc tenus à notre aptitude rédactionnelle naturelle (maladroite — aux expressions parfois tortueuses et alambiquées — mais naturelle…). Si nous nous étions adonnés à cet épuisant travail correctif avec davantage de zèle, peut-être aurait-il permis une lecture plus aisée (et moins indigeste)… mais cette étude (au regard de la somme d'informations et de paramètres qu’il a fallu organiser, structurer et exposer de façon relativement cohérente…) nous a semblé suffisamment lourde et conséquente (et, parfois même, exténuante…) pour ne pas nous livrer à une charge de travail supplémentaire et superfétatoire (et à un très ingrat labeur) qui aurait nécessité des efforts colossaux pour des résultats peu probants et/ou qui n’aurait (sans doute) pas modifié, de façon substantielle, le confort de lecture…

(1) Sans compter notre goût pour l’expolition, l’épithétisme et la périssologie… (voir le paragraphe liminaire de cette réflexion).

 

On pourrait imaginer que la société développe un cycle autonome et vertueux de l’eau (avec récupération et assainissement au niveau local), qu’elle généralise l’usage des toilettes sèches et la dépollution des systèmes de tout à l’égout par filtrage écologique et crée une matière synthétique polyvalente, autonettoyante, intelligente, adaptable aux besoins du corps, aux conditions climatiques et résistante aux infections et aux principaux agents pathogènes (bactéries, virus…).

 

On pourrait imaginer qu’elle généralise les habitats totalement autonomes en énergie et en eau, avec des lieux dédiés au bien-être, de plus en plus robotisés et informatisés et avec des systèmes de protection de plus en plus sophistiqués contre tous les types d’intrusion et d’agression (individus, animaux, insectes, pollens, poussières, bactéries etc etc) ainsi qu’une robotique informatisée télécommandable à distance s’occupant de la préparation des repas et du nettoyage du linge et de la maisonnée.

 

 

On pourrait imaginer qu’elle développe les véhicules solaires (terrestres et spatiaux), les véhicules « propres et intelligents » (avec navigation, plus ou moins, entièrement automatisée) de plus en plus autonomes, sécurisés et rapides, les véhicules terrestres ultra rapides et les véhicules spatiaux. Et qu’elle généralise l’hyper protection et les systèmes de reconnaissance faciale, digitale et oculaire en tous lieux privés et publics.

 

On pourrait imaginer que la société d’après-demain soit capable de réguler et de réparer les anomalies génétiques (concernant le corps mais aussi les « dysfonctionnements comportementaux » effectifs et/ou potentiels…). Qu’elle généralise les possibilités de rencontre (de tous types) et rende « accessibles » les rencontres avec des individus et des animaux dans des univers virtuels (des lieux et des mondes entièrement créés selon les désirs du psychisme…), qu’elle développe des modes de communication qui donnent la sensation d’un contact direct et « réel » (avec tous les sens) et qui permettent d’être relié, à tout instant, avec un – toujours plus – grand nombre d’individus « réels » ou virtuels, et qu’elle crée un kit communicatif et informatif avec une connexion simultanée et permanente à toutes les informations planétaires.

 

On pourrait imaginer (comme nous l’avons déjà évoqué dans les paragraphes précédents) qu’elle multiplie le nombre de lois, de règlements, de polices d’assurance, de contrats formels et d’assignements en justice dans tous les domaines, développe les forces de l’ordre et les milices privées et qu’elle généralise la surveillance individuelle et collective, les remparts et les systèmes de protection contre tous les types d’agression personnelle (avec des systèmes de protection et de réparation dans toutes les sphères relationnelles existantes).

 

On pourrait imaginer qu’elle généralise la médication allopathique chimique (antidépresseurs, anxiolytiques etc etc), la médication de confort (pour maintenir un degré de satisfaction minimal), les appareillages synthético-chimiques et les appareillages chimico-immatériels intégrés au cerveau (avec le développement du transhumanisme cérébral chimico-immatériel) et crée un kit de protection psychique.

 

On pourrait imaginer qu’elle permette la création de mondes virtuels très divers, à la fois très « dépaysants » et très « réalistes » au sein desquels les individus pourraient être amenés à vivre, à faire, à imaginer et à ressentir « des choses de plus en plus incroyables »… où le psychisme serait projeté quasi totalement et où chacun aurait le sentiment d’être le créateur et l’acteur principal des évènements... Et qu’elle développe et améliore les zones dédiées aux plaisirs et au bien-être familial et individuel, le tourisme spatial ainsi que les kits distractif et expressif.

 

On pourrait imaginer aussi qu’elle développe les intelligences artificielles et améliore les mises en réseaux permanentes et actualisées en temps réel des systèmes d’intelligence artificielle et des stocks de données et d’informations et crée un kit de connaissance de l’Existant (les savoirs). On pourrait imaginer également qu’une partie de la population puisse connaître (comme nous l’avons déjà évoqué) une assez nette régression de ses capacités cognitives (liée à l’inactivité cérébrale induite par l’usage permanent des intelligences artificielles) et qu’une autre (au contraire) développe ses capacités cérébrales (mnésiques, analytiques et de puissance calculatoire…).

 

On pourrait imaginer que les écoles, les universités et les grandes écoles se généralisent grâce (en partie) à un module d’apprentissage personnalisé (utilisant l’accès immédiat à tous les savoirs mis en réseaux et le développement des intelligences artificielles) et à l’augmentation des enseignements à distance. Et que la société soit amenée à explorer de nombreux et nouveaux domaines et soit en mesure de créer quantité de nouvelles disciplines.

 

Et l’on pourrait imaginer enfin qu’elle voit éclore les démarches spirituelles* individuelles (de plus en plus nombreuses) et se développer quantité de centres de « développement personnel » et de centres spirituels, créés pour répondre à l’émergence progressive, et plus ou moins généralisée, d’un besoin de compréhension et de spiritualité chez une grande partie de la population.

* De plus en plus d’individus seront (sans doute) amenés à s’engager dans les première et deuxième étapes du cheminement spirituel(1)

(1) Se référer aux parties consacrées aux étapes du cheminement spirituel sur le plan individuel.

 

 

Bref, nous pouvons imaginer qu’au cours de cette période historique l’ensemble des besoins et des désirs élémentaires soit globalement satisfait. Subsistera néanmoins (et sans doute) une insatisfaction qui impulsera deux grands mouvements :

 

- la poursuite de la transformation de l’Existant (afin de voir tous les désirs satisfaits) qui pourrait induire (peut-être) une cohabitation difficile (de plus en plus difficile) avec les autres espèces, les autres formes, les autres systèmes et les autres plans ;

 

- et un besoin de compréhension plus fort et plus prégnant qui débouchera sur une progressive généralisation du besoin spirituel.

 

NOTE : nous ne sommes pas naïfs au point de croire que les évolutions futures se manifesteront exactement selon le schéma présenté ici… il est possible (voire fortement probable) qu’elles suivent un rythme différent selon les avancées scientifiques et les progrès technologiques qui permettront des découvertes, des inventions et des applications qui se réaliseront plus précocement ou plus tardivement dans tels ou tels domaines et/ou dans tels ou tels secteurs. Nous pensons néanmoins que les tendances, les évolutions et les transformations s’inscriront globalement dans cette perspective…

 

 

Le portrait de l’individu médian (représentatif de la société)

L’individu médian d’après-demain sera la quasi exacte copie de l’individu de demain. Il consacrera l’essentiel de son temps à travailler pour obtenir un revenu (salaire) qui lui permette d’assurer la satisfaction de ses besoins physiques, matériels et psychiques élémentaires (alimentaire, logement, santé, mobilité, loisirs…). Ses principales autres activités consisteront à dormir, à manger, à se reposer et à se distraire (les loisirs et la virtualité exploseront).

 

En dépit d’un savoir élémentaire (acquis au cours d’une scolarité plus ou moins longue), sa compréhension et sa perception sensible seront encore relativement grossières, apparentes et superficielles. Et il restera essentiellement soumis au psychisme, aux désirs et à la recherche (toujours plus effrénée) de plaisirs.

 

En matière relationnelle, les comportements d’accaparement, de favorisation de l’intérêt personnel et de valorisation narcissique (bien que très fortement encadrés, surveillés et régulés par la société) seront toujours omnipotents et pourraient devenir à bien des égards (et dans bien des domaines) paroxystiques. Il entretiendra avec les autres individus (dans la sphère intime comme dans la sphère sociale) des rapports de domination et d’instrumentalisation toujours plus édulcorés et déguisés et des rapports de domination et d’instrumentalisation toujours puissants et toujours plus ou moins irrespectueux à l’égard des autres formes (animales et végétales) et à l’égard de l’environnement (au sens large) avec néanmoins (pour une partie de plus en plus importante de la population) le développement d’une inversion du processus d’instrumentalisation, l’essor progressif d’un respect (à la fois utilitariste et révérenciel) à l’égard de l’Existant et l’accroissement tangible des besoins de compréhension et de spiritualité...

 

 

Les rapports à l’Existant

 

Les relations avec les congénères (relations sociales et relations intimes)

Favorisation de l’intérêt personnel et stratégies d’entente avec rapports de force, de domination et d’instrumentalisation, toujours déguisés en politesse, aménités et autres règles de civilité, avec quasi absence de violence et d’agressions physiques et avec une réduction de la violence psychique malgré la persistance d’une dichotomie entre les individus de la sphère personnelle et les autres individus (essentiellement indifférence).

 

 

Les relations avec les animaux

Généralisation de la destruction de nombreux territoires et habitats (liée à l’explosion urbaine et à la surexploitation agricole et forestière). Poursuite de la réification et de l’instrumentalisation de certaines espèces animales (élevage, animaux de laboratoire) malgré la progression des droits de l’animal et la protection des espèces menacées (développement des réserves et des parcs naturels pour la faune sauvage). Sans oublier l’émergence possible (et le développement) des transformations génétiques sur les animaux.

 

 

Les relations avec les végétaux

Généralisation de l’amélioration de la sélection génétique pour la végétation comestible (fruits et légumes) et d’agrément (fleurs et plantes diverses). Généralisation des modifications génétiques. Et émergence d’un processus d’inversion dans la destruction de la flore sauvage, lié à la décroissance progressive de la transformation des espaces terrestres en zones agricoles, en zones urbaines et en réseaux de transport (réseaux routier et ferroviaire). Et fort développement de la protection de la biodiversité végétale et des zones naturelles aménagées (parcs, chemins dans la nature…).

 

 

Les relations avec les minéraux

Quasi disparition des énergies fossiles. Emergence des métaux de synthèse et développement de l’exploitation de nouveaux gisements.

 

 

Les relations avec l’environnement (au sens large) eau, air, terre

Généralisation de l’aggravation des altérations et de la pollution de l’air, de l’eau, des sols et des sous-sols avec l’émergence de zones quasiment « irrécupérables ». Et développement d’un processus de réparation et d’inversion des pollutions et des dégradations.

 

 

Les relations avec les agents pathogènes

Développement de nouveaux virus, de nouvelles bactéries et de nouvelles pathologies. Amplification des modifications génétiques sur les agents pathogènes. Et développement de nouvelles formes de prophylaxie et de nouvelles thérapeutiques.

 

 

Les relations avec l’espace

Fort développement des recherches, de la connaissance et de « la conquête » spatiales avec le développement (éventuel) du tourisme et de l’habitat « spatial minoritaire de masse » (dans des zones cosmiques relativement proches).

 

 

Les relations avec les formes extraterrestres (non terrestres)

Si découverte de formes non terrestres, relations avec forte défiance et méfiance (agressivité défensive selon leurs intentions et leurs degrés de violence et « de Conscience »).

 

 

Les relations avec les formes énergétiques immatérielles (les « morts » entre autres…)

Rites et croyances. Très lente émergence des linéaments d’une communication (« post-mortem » entre autres)…

 

 

L’impact général sur l’organisation des territoires entre toutes les formes

Omnipotence et omniprésence des sociétés humaines (avec l’explosion de la croissance démographique et urbaine et la généralisation de l’accaparement des territoires par les êtres humains) avec la destruction de nombreux habitats et de nombreuses espèces animales et végétales en dépit du développement de zones « réservées » à la faune, à la flore et à la vie sauvages.

 

 

APARTE INTUITIF (ultra simple, voire simpliste) sur l’évolution de l’individu sur les plans matériel et intellectuel et sur l’évolution des sociétés depuis les premiers pas de l’humanité

 

Evolution naturelle de l’individu sur le plan matériel : survie, conditions d’existence et qualité de vie élémentaires, conditions d’existence et qualité de vie confortables, conditions d’existence et qualité de vie très confortables (et « luxueuses »). Fabrications et outils « naturels », fabrications et outils composés d’éléments « naturels », fabrications et outils sophistiqués composés d’éléments « naturels » élaborés et synthétiques, fabrications et outils synthétiques très sophistiqués, fabrications et outils synthétiques et « immatériels »…

 

Evolution naturelle de l’individu sur le plan intellectuel : croyances, réflexions et représentations élémentaires, réflexions et représentations sophistiquées, besoin de sens et de compréhension « confortables(1) » (et parfois éloignés de « la vérité »), besoin de sens et de compréhension de plus en plus justes et proches de « la vérité », besoin de ressentis, de perception et de compréhension de plus en plus vastes, de plus en plus profonds et de plus en plus justes – véritablement éprouvés(2) (de façon individuelle).

(1) En adéquation avec les représentations mentales…

(2) Avec l’avènement généralisé de la spiritualité, il y aura une perception et une compréhension plus directes, plus fines et plus profondes qui nécessiteront moins d’explications intellectuelles et rationnelles…

 

Evolution naturelle des sociétés : davantage de paix, davantage de liberté, davantage de savoirs, davantage de connaissance, davantage « d’artificialité* », davantage de liens, davantage de possibilités, davantage de confort, davantage de sécurité, davantage d’espace (un plus vaste territoire)...

* En matière « d’artificialité », notons, ici, par exemple, que le port des chaussures, les divers modes de locomotion mécanique et les habitats bétonnés semblent naturels aujourd’hui mais apparaissent comme très fortement « dénaturés » et artificiels... et presque insupportables (en dépit de leur confort et des progrès qu’ils offrent) à des individus appartenant aux sociétés traditionnelles, habitués à vivre « au plus proche » de la nature. Notons également, ici, que la voiture contemporaine (même si elle n’est pas, en général, appréhendée ainsi) pourrait être considérée, à bien des égards, comme un « robot », plus ou moins automatisé, dans lequel les individus s’insèrent pour le diriger (ou le conduire — si j’ose dire !)… idem pour les trains, les avions etc etc.

 

 

 

LE MONDE A MOYEN TERME

 

A moins d’une guerre mondiale généralisée, d’une catastrophe naturelle, sanitaire ou écologique d’ampleur planétaire, d’un phénomène ou d’une révolution cosmique sans précédent (avec des répercussions conséquentes sur le plan terrestre) ou de la survenance d’un évènement imprévisible (qui déstabiliserait ou chamboulerait « la marche » du monde), il est probable(1) qu’à moyen terme(2), l’évolution des sociétés humaines, trans-humaines ou post-humaines(3) puisse, plus ou moins, s’inscrire dans cette perspective…

(1) Notez que nous aurons recours, dans ces paragraphes, au conditionnel et à des formulations hypothétiques… Il est évident que nous déroulerons notre réflexion et avancerons ici avec une grande prudence…

(2) Au vu du nombre de paramètres en jeu dans cette projection, nous sommes incapables de dater cette période…

(3) Nous ne pouvons savoir aujourd’hui si les individus des sociétés de moyen terme seront encore des Hommes (et pourront encore être considérés comme tels…). Nous ignorons s’ils seront des trans-humains (des individus mi-Hommes mi-synthétiques) ou des post-humains (des individus qui auront effectué un « saut » — qualitatif et quantitatif — si significatif qu’il n’autoriserait plus à l’appellation de « genre humain »…).

 

A ce stade de l’évolution humaine et/ou post-humaine, il est probable que les conditions soient réunies pour voir émerger une « révolution » aussi puissante que l’ont été, sur le plan terrestre, la transformation de l’énergie en matière, la transformation de la matière en Vivant et l’accession du Vivant à la perception. En effet, l’essoufflement naturel du modèle sociétal capitaliste et individualiste, l’émergence et l’expansion progressive d’un nouveau modèle sociétal solidaire, écologique et spirituel et la « maturité d’esprit » des individus (comme nous l’avons vu, chez une partie, plus ou moins importante, de la population) pourraient être propices à l’avènement d’une nouvelle ère : la Conscience mineure.

 

Voir ANNEXE 7 (panorama général de la Conscience et de l'Existant – partie 3)

 

 

Quels que soient les scénarios (du futur proche), il est probable, tôt ou tard, qu’une partie (plus ou moins importante) des individus (tous dans le meilleur des cas... une infime minorité dans la « pire » des configurations...) soit suffisamment organisée pour créer les conditions nécessaires à la survenance de cette nouvelle ère.

 

L’avènement de la Conscience mineure coïnciderait à l’accession d’un nombre significatif d’individus à la troisième étape du cheminement spirituel*, suffisamment nombreux pour s’organiser et créer un modèle sociétal.

* Se référer aux parties consacrées aux étapes du cheminement spirituel sur le plan individuel.

 

Il n’est pas exclu que cette communauté (ou ce regroupement de communautés) soit contraint(e) de vivre de façon (plus ou moins) isolée selon le degré de dangerosité(1) des collectivités et/ou des sociétés humaines et/ou post humaines(2) éventuellement « non rattachées»…

(1) Il est, en effet, possible que ces sociétés entretiennent peu de liens avec « le reste du monde » encore « trop barbare et instinctuel… » et instituent, avec ses représentants, des rapports encadrés et le blocage et/ou le filtrage des « entrées » pour assurer un fonctionnement harmonieux minimal (à l’instar de la séparation actuelle qui existe parfois entre les êtres humains et les animaux*)…

* Certaines zones « humaines » ont toujours été (plus ou moins) interdites aux animaux (domestiques) au regard de leurs comportements instinctifs (agressivité naturelle ou marquage territorial par exemple), pas ou peu « adaptés » (ou appropriés) à certaines situations et/ou difficilement « gérables » en matière d’harmonie relationnelle et/ou d’hygiène…

(2) Et/ou selon le degré d’agressivité d’éventuelles formes extraterrestres...

 

Nous pourrions également imaginer, de façon un peu théorique, scolaire et didactique, que l’ère de la Conscience mineure puisse se diviser en deux périodes (qui correspondraient à la première phase et à la seconde phase de la troisième étape* du cheminement spirituel sur le plan individuel) et voit émerger, au cours de la première période, des individus que nous pourrions qualifier de « conscients élémentaires » et, au cours de la seconde période, des individus que nous pourrions appeler des « conscients élaborés ».

* Se référer aux parties consacrées aux étapes du cheminement spirituel sur le plan individuel.

 

 

Le monde des « conscients élémentaires »

 

Généralités

A ce stade de l’évolution terrestre, il est nécessaire de reprendre le scénario (le plus probable) du monde d’après-demain pour exposer la façon dont il pourrait se transformer.

 

Avec l’avènement de la Conscience mineure, les sociétés et les grands pôles géographiques pourraient abandonner leur esprit de concurrence et apprendre à coopérer et à s’entre-aider. Ils pourraient également se réorganiser* en généralisant, sur leur territoire, les communautés de vie (à taille humaine) écologiques, citoyennes et solidaires qui viendraient s’ajouter aux communautés alternatives et aux communautés sécuritaires déjà existantes.

* Toutes les sociétés pourraient, à ce titre, être amenées à se rallier et/ou à « se rattacher » aux « grands pôles territoriaux » existants…

 

Les sociétés et les grands ensembles territoriaux pourraient également délaisser progressivement certains domaines pour privilégier et « se recentrer » sur des secteurs-clés. Secteurs-clés dont l’organisation pourrait être (relativement) décentralisée avec des antennes implantées localement.

 

On assisterait, sans doute, au sein de chaque société et de chaque grand ensemble territorial (et au niveau planétaire entre les grands pôles géographiques) à un mouvement d’uniformisation et d’homogénéisation des conditions d’existence, de la qualité de vie et des modes de gouvernance, à un mouvement d’harmonisation minimale incontournable avec le respect des différences et à un mouvement de réorganisation sociétale fondée sur la solidarité, la partage et la coopération avec différentes instances et organisations planétaires chargées de fixer les cadres, les lois et les règles adaptés aux particularités et spécificités locales, géographiques et culturelles...

 

Puis, l’on pourrait (éventuellement) imaginer que les grands pôles territoriaux soient amenés à se spécialiser(1)(2), l’un s’occupant essentiellement de la recherche, de l’innovation et des « technologies », un autre de la sphère du plaisir, du confort et du bien-être, un autre de l’industrie (nécessaire à la fabrication des biens améliorant le confort), un autre de l’écologie et de la sauvegarde du « patrimoine vivant et sauvage », un autre de l’enseignement et des savoirs et un autre encore de la connaissance et de la spiritualité (avec la création et/ou le développement de centres de cheminement spirituel), au sein desquels les individus pourraient passer « le temps qu’ils souhaitent »… et y travailler (à leur guise) tout en accordant une part substantielle de « leur journée » à d’autres domaines (de leur choix)…

(1) Notons, ici, que les individus sont et seront contraints de se regrouper, de réunir leurs capacités et leurs compétences (et de les organiser) et de mettre en commun leur intelligence, leur forces et leurs potentiels de création pour transformer l’Existant. Ils y seront « condamnés » jusqu’à l’avènement d’un individu (ou d’une forme) totalement et parfaitement autonome, doté(e) des mêmes capacités et caractéristiques que la Conscience (nous y reviendrons dans un paragraphe ultérieur).

(2) Abandonnons-nous un instant (un court instant) à un scenario de « géopolitique-fiction » peu crédible mais « amusant » et imaginons que le pôle géographique « Asie » se spécialise dans l’industrie « robotique », que le pôle « Amérique du Nord » se spécialise dans la recherche et l’innovation, que le pôle « Europe » se spécialise dans l’histoire (du monde) et l’enseignement des savoirs, que les pôles « Afrique » et « Amérique du Sud » se spécialisent dans l’écologie et la sauvegarde du « patrimoine sauvage », que le pôle « Océanie » se spécialise dans le bien-être et que le pôle « Indien » se spécialise dans la pratique et l’enseignement de la spiritualité… On peut toujours rêver… Notons, bien sûr, qu’il ne s’agit là que d’un « pur fantasme » dont l’avènement est fort peu probable… mais cette perspective semble réjouir l’auteur (alors laissons-le « fantasmer » un instant… un court instant…).

 

Quoi qu’il en soit (et quel que soit le mode d’organisation que les sociétés de l’ère de la Conscience mineure privilégieront), elles auront à faire face à des enjeux cruciaux. Les plus évidents semblent être :

 

- la réorganisation des échanges, de la production, de la consommation et des rapports entre les individus et leurs relations avec l’Existant ;

 

- l’harmonisation générale et l’uniformisation (a minima) de l’ensemble des collectivités locales et des communautés de vie en respectant leurs spécificités ;

 

- la « cohabitation » entre le psychisme (ses résidus égotiques et identificatoires et les comportements « délétères » dont il est à l’origine…) et l’ouverture à la Conscience (et à certaines de ses caractéristiques et la difficulté de leur intégration plus profonde à l’Être...) ;

 

- la transformation progressive de l’organisation politique et judiciaire.

 

Notons, ici, que s’il existait encore (à cette époque) des sociétés non inscrites dans cette « évo-révolution », dotées de caractéristiques peu propices à leur rattachement à cette nouvelle organisation sociétale mondiale (nous pensons, en particulier, aux sociétés « chaotiques » et aux sociétés théocratiques fondamentalistes), elles verraient, sans doute, s’aggraver leur incapacité à « gérer » leur population et continueraient probablement à dégrader (de façon inexorable) leurs conditions et leur qualité de vie. Peut-être même seraient-elles « au bord de l’explosion » et contraintes d’exercer un contrôle et une surveillance toujours plus drastiques et dramatiques sur les individus… sonnant ainsi leur glas et préfigurant leur fin prochaine (implosion, explosion, départs massifs des individus etc etc)…

 

Après ce très rapide panorama, essayons de dessiner le portrait de la société représentative des « conscients élémentaires » en matière d’organisation politique, judiciaire et économique ainsi qu’en matière de relations « extérieures » et d’organisation territoriale.

 

 

L’organisation sociétale générale

Au cours de cette période historique, nous pourrions peut-être assister, sur le plan de l'organisation politique (et du mode de gouvernance), à une généralisation de l’autonomie des collectivités en matière d’organisation, de fonctionnement et d’orientation (au niveau local) tandis que sur le plan international, l’organisation politique pourrait devenir supranationale et mondiale avec une harmonisation progressive des règles et des lois à l’échelle planétaire. La démocratie deviendrait omniprésente et constituerait le seul modèle possible (et viable). Les « grands pôles territoriaux » pourraient être amenés à coopérer et à se réunir en conservant néanmoins leurs spécificités. La notion de « village planétaire » commencerait (réellement) à devenir une réalité…

 

En matière d’organisation judiciaire (et policière), la société pourrait connaître une décroissance progressive des lois (excepté celles d’encadrement et d’organisation) et une diminution progressive de l’arsenal policier et judiciaire (baisse du contrôle et de la surveillance etc).

 

En matière d’organisation économique, la société pourrait s’orienter vers la constitution de grands pôles de production, de prestations et de services (au niveau central) avec fourniture de la production, des prestations et des services à distance. Puis, au fil du progrès et des avancées technologiques, l’organisation productive et industrielle pourrait se décentraliser et se régionaliser. Et la distribution des biens manufacturés à distance, avec des unités de distribution et de prestations élémentaires et basiques implantées localement, pourrait se généraliser. Les échanges mondiaux seraient progressivement amenés à décroître au profit des échanges locaux de plus en plus nombreux. Quant aux échanges monétisés, ils pourraient, eux aussi, connaître un déclin progressif. Et, un peu partout, on pourrait assister à une réorganisation progressive du travail avec une orientation vers des secteurs et des domaines phares (la recherche, la fabrication industrielle, l’écologie, l’enseignement, les savoirs, le bien-être et la spiritualité), à la progressive généralisation du travail « tournant » selon les aspirations des individus et à la diminution drastique du temps de travail journalier sans compter l’émergence (progressive, elle aussi) d’un travail non obligatoire et non rémunéré.

 

Sur le plan international, le commerce et la concurrence pourraient être progressivement délaissés au profit d’une coopération et d’un esprit d’entraide. Et il est fort possible que les frontières des « grands ensembles territoriaux » tendent à devenir de plus en plus poreuses et inutiles.

 

Après cet aperçu de l’organisation générale de la société des « conscients élémentaires », tâchons d’exposer ses principales caractéristiques en matière d’organisation de la satisfaction des besoins organiques, matériels et psychiques élémentaires.

 

 

L’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence

Notons que l’avènement (possible) de la Conscience mineure marquera (sans doute) un tournant décisif en matière de satisfaction des besoins et des désirs individuels qui inaugurera une réorganisation des « priorités » et des réponses (avec, par exemple, une diminution des besoins psychiques et des désirs narcissiques et un essor conséquent des besoins de compréhension et de spiritualité).

 

La réorganisation des besoins et des désirs

Au cours de cette période, nous pourrions assister au déclin et/ou à l’abandon progressif de certains domaines et secteurs. Ainsi, il est fort possible (entre mille autres exemples…) que les sociétés de moyen terme décident de diminuer, de façon drastique, leur budget militaire et leurs équipements d’armement en conservant, peut-être, néanmoins une « puissance de frappe internationale » (pour défendre la planète contre d’hypothétiques attaques extraterrestres).

 

Sur le plan individuel, il est probable que les individus voient se réduire considérablement leur quête effrénée de plaisirs et leurs besoins sexuels, qu’ils soient amenés à vivre une sensorialité et une « sensualité » plus vives en matière de relation à l’Existant, qu’ils puissent expérimenter une exacerbation du sentiment de proximité qualitatif à l’égard des autres individus et des autres formes et soient en mesure d’améliorer substantiellement leurs capacités « perceptives » avec l’appréhension de formes aujourd’hui non perceptibles*, telles que certaines « manifestations » du « monde des sans formes » ou des formes extraterrestres par exemple…

* Avec l’amorce de contacts et de relations…

 

Il est également probable que les individus améliorent, de façon substantielle, leurs savoirs et leur connaissance de l’Existant et que la période soit éminemment propice à la création de quantité de nouvelles disciplines, de nouveaux domaines, de nouvelles inventions et découvertes qui permettront d’améliorer la compréhension du « réel » et de mettre à jour les liens innombrables qu’entretiennent toutes les formes énergétiques…

 

 

De façon synthétique, avec l’avènement de la Conscience mineure, il est vraisemblable que nous assistions à :

 

- une diminution d’un grand nombre de besoins psychiques élémentaires ;

 

- une nette diminution des désirs narcissiques ;

 

- une amélioration des savoirs et de la connaissance de l’Existant (de manière qualitative et quantitative) ;

 

- une amélioration de la compréhension et de la perception sensible (avec l’intégration mystérieuse à l’Être) ;

 

- une baisse significative des comportements égotiques et conflictuels (malgré la persistance de résidus égotiques et identificatoires) ;

 

- une diminution relative du désir de transformation de l’Existant.

 

Après ces quelques généralités (livrées un peu « en vrac »), essayons de dessiner, de façon plus détaillée, les principales caractéristiques du monde des « conscients élémentaires » en matière de conditions de vie.

 

 

L’organisation des réponses aux besoins organiques, matériels et psychiques

Nous pourrions imaginer* que la société des « conscients élémentaires » ait développé les pilules de synthèse et les pilules de « l’organique » bio modifié génétiquement et qu’elle ait créé un kit synthético-chimique alimentaire. Qu’elle ait développé, sur le plan médical, des pilules synthético-chimiques et des appareillages synthético-chimiques (avec disparition progressive de la douleur) et un kit de santé synthético-chimique.

* Voir la rubrique « l’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence » des sociétés d’après-demain…

 

Nous pourrions imaginer qu’elle ait généralisé les cycles autonomes et vertueux de l’eau (avec récupération et assainissement au niveau local) et ait commencé à fabriquer une eau « artificielle », qu’elle ait développé la dépollution des systèmes de tout à l’égout par filtrage écologique implantés au niveau local et créé un kit d’évacuation synthético-chimique.

 

En matière vestimentaire, on pourrait imaginer qu’elle ait généralisé et amélioré la matière synthétique conçue par « ses prédécesseurs » et développé, en matière d’habitat, des logements totalement autonomes et quasi hermétiques, adaptés à tous les environnements (sur l’eau, sous l’eau, dans l’air, dans l’espace…) ainsi que des objets intelligents autonomes et autonettoyants en matière de confort domestique.

 

On pourrait imaginer qu’elle ait généralisé et amélioré les véhicules solaires (terrestres et spatiaux), les véhicules « propres et intelligents » (avec navigation plus ou moins entièrement automatisée) de plus en plus autonomes, sécurisés et rapides, les véhicules terrestres ultra rapides et les véhicules spatiaux. Qu’elle ait développé des systèmes électronico-chimiques de neutralisation (en cas d’agression) avec paralysie provisoire des individus (pour les remettre aux « autorités compétentes ») et un kit de protection synthético-électro-chimique.

 

En matière de reproduction, on pourrait imaginer qu’elle ait développé les modifications génétiques prénatales et un kit reproductif et rendu possible, sur le plan relationnel, les rencontres physiques en tous lieux de la planète ainsi que dans l’espace et dans des univers virtuels entièrement créés selon les désirs du psychisme. Qu’elle ait généralisé de nouveaux modes de communication, des modes « relationnels » sans parole et éminemment plus qualitatifs (permettant de ressentir et de percevoir l’Autre, ses émotions, son psychisme etc etc) et ait amélioré et développé le kit communicatif et informatif avec une connexion simultanée et permanente à toutes les informations planétaires en permettant une perception qualitative dans un périmètre restreint (offrant la possibilité de ressentir l’intériorité des individus).

 

En matière de sécurité, on pourrait imaginer qu’elle ait diminué le nombre de lois, de règlements, de polices d’assurance, de contrats formels et d’assignements en justice dans tous les domaines ainsi que la surveillance individuelle et collective, le recours aux forces de l’ordre publiques et privées et aux systèmes de protection contre tous les types d’agressions. Qu’elle ait généralisé et amélioré les appareillages synthético-chimiques et chimico-immatériels intégrés au cerveau (avec la transformation — éventuelle — du cerveau*) ainsi que le kit de protection psychique. Et qu’elle ait permis l’émergence de mondes virtuels parallèles où les individus pourraient vivre (et se réfugier)… où ils pourraient être, en partie, projetés physiquement… et où ils pourraient satisfaire une partie de « leurs désirs et fantasmes » sans oublier le développement du tourisme spatial et la généralisation du kit distractif malgré une diminution progressive du besoin de divertissement chez les individus.

* « Cerveau sensible » mais « débarrassé » des désagréments de la sensibilité… voire la fabrication d’un cerveau synthétique paramétré pour supprimer en partie la souffrance et garantir un degré de satisfaction minimal…

 

On pourrait imaginer qu’elle ait généralisé les modes expressifs artistiques (et non artistiques) interactifs pour permettre à tous de « ressentir la beauté et l’intensité » et commencer à ressentir « la vérité » ainsi que le kit expressif. Qu’elle ait amélioré, de façon substantielle, les intelligences artificielles et le kit de connaissance de l’Existant et qu’elle ait développé, dans les écoles et les universités, des disciplines ayant trait à la connaissance (et non plus seulement aux savoirs) en améliorant le module d’apprentissage*personnalisé et permanent des savoirs et de la connaissance (utilisant l’accès immédiat à tous les savoirs mis en réseaux et le développement des intelligences artificielles) sans oublier, bien sûr, l’augmentation incessante des enseignements à distance.

* A l’usage des individus « immatures » (les jeunes) et des individus adultes (par forte augmentation du besoin de compréhension tout au long de la vie).

 

On pourrait imaginer que la recherche et la spiritualité deviennent des domaines absolument majeurs des sociétés de moyen terme avec la création de nouveaux domaines d’investigation, de profondes améliorations des savoirs existants, de nouvelles disciplines, la découverte de nouveaux plans, le développement de nouvelles branches de la connaissance (en mesure de relier les savoirs entre les différents plans), l’organisation de l’enseignement et de l’accompagnement spirituels et l’émergence d’un kit de connaissance spirituelle...

 

 

APARTE INTUITIF IMPROMPTU : les individus et les organisations (aujourd’hui, les Hommes et les sociétés humaines et, à l’avenir, leurs successeurs) continueront probablement (et inlassablement) à transformer l’Existant de façon graduelle et à « se rapprocher » (inéluctablement ?) des caractéristiques de la Conscience(1), en les faisant à la fois advenir en chaque forme (sur le plan « individuel ») et dans « le monde » où elles vivent (sur le plan collectif). Les individus continueront donc (sans doute) à favoriser les avancées techniques et les progrès technologiques jusqu’à ce que l’Existant dispose des mêmes caractéristiques que celles de l’énergie « pure » et poursuivront leur cheminement (intérieur) jusqu’à ce qu’ils « retrouvent » et/ou soient en mesure de « vivre et d’éprouver » les « pleines caractéristiques de la Conscience » à moins, bien sûr, qu’ils ne rencontrent des obstacles infranchissables (et rédhibitoires) liés, en particulier, à « l’existence même de la forme(2) »…

(1) Tant les formes terrestres semblent orientées... et même (disons-le) programmées à cette fin

(2) Ainsi, par exemple (comme nous l’avons déjà évoqué à plusieurs reprises), le respect, le dialogue, la concertation, l’éducation et la connaissance de l’Existant permettent (et permettront) d’accéder à une harmonie des rapports mais tant que les individus se considérèrent (et se considéreront) comme identifiés au corps, ils ne pourront franchir l’obstacle de la favorisation personnelle et ne pourront donc accéder à l’Amour absolu (inconditionnel)…

 

Notons que ce franchissement nécessite (impérativement), sur le plan perceptif, de s’affranchir (si j’ose dire !) totalement de cette identification (formelle) et nécessite, sur le plan énergétique, de très profondes et conséquentes transformations de la matière… et empressons-nous d’ajouter que ce franchissement ne semble pouvoir se réaliser en ce « bas-monde » (comme nous l’avons déjà souligné à maintes reprises) que par et grâce au cheminement spirituel et au progrès technologique...

 

Mais le cheminement spirituel et le progrès seront-t-ils en mesure de « gommer » ou de franchir tous les obstacles ? Comment, en effet, créer une forme totalement permanente et autonome (pour l’ensemble des besoins) qui conserverait une dimension « vivante » ? Comment créer une forme synthétique ou une forme immatérielle dotée d’une sensibilité suffisante en mesure de ressentir un sentiment de communion, d’Amour et d’Unité ? Comment créer un « cerveau synthétique » et/ou une intelligence artificielle sensible capable d’intégrer l’intelligence vivante de l’Être ?

 

Autant de questions et d’obstacles (et bien d’autres que nous n’avons pas exposés ici…) auxquels seront confrontées les générations futures (sans doute assez lointaines)… Questions et obstacles qu’elles tenteront sans doute (et de toute évidence) de résoudre, d’éliminer, de franchir ou de contourner… Et bien que nous ne soyons pas aujourd’hui en mesure d’apporter la moindre réponse (valide ou sensée), endossons un instant le costume de l’avocat « du diable » : et ne pourrait-on pas affirmer que tant qu’existera une forme (qui aura beau être immatérielle…), persisteront, outre une part résiduelle (même infime et très subtile) d’identification et des freins à l’immatérialité, des entraves au passage de la finitude à l’infinitude, inhérentes à la structure et à la nature même de la matière, de « l’organique » et de toute forme énergétique…

 

 

Le monde des « conscients élaborés »

 

Généralités sur l’organisation sociétale générale

A ce stade de l’évolution terrestre, on pourrait imaginer que la société restructure totalement son organisation économique (en matière de production, de distribution, de consommation et d’échanges) et qu’elle garantisse progressivement, de façon gratuite, la satisfaction des besoins organiques, matériels et psychiques élémentaires des individus (en matière d’alimentation, de santé, de confort domestique, d’énergie, de transport, de communication, de protection, d’éducation, de compréhension etc etc ).

 

Il est possible également qu’elle généralise la robotisation et l’automatisation de l’industrie nécessaire à la fabrication des objets destinés au confort et « au désir », qu’elle multiplie les lieux et les espaces consacrés à la recherche et à l’innovation (pour transformer l’Existant — de façon de plus en plus respectueuse) et qu’elle développe substantiellement les lieux de transmission des savoirs et les lieux dédiés à la compréhension, à la connaissance et à la spiritualité.

 

Et il est probable enfin qu’elle réorganise l’ensemble de son territoire en favorisant (très fortement) la multiplication des « petites communautés » (lieux de vie et collectivités locales) autonomes, coopératives et solidaires…

 

Bref, nous pouvons imaginer que la société des « conscients élaborés » puisse donner naissance à un monde où chacun pourrait vivre (enfin) de façon « libre et épanouie » et se consacrer à l’harmonie et au bien-être « individuel » et collectif… Où chacun serait libre d’œuvrer (pour des périodes plus ou moins longues) à certains domaines (de son choix) et de consacrer une part de « ses journées » à tout ce qui lui semble essentiel (dans le respect des autres membres et d’une grande partie des autres formes)… Un monde qu’un bon nombre d’individus aujourd’hui assimilerait à une sorte « d’éden terrestre » ou de « paradis phénoménal » (mais qui leur est, bien sûr, encore impossible de créer (et auquel il leur est encore moins possible « d’accéder »…) par manque de compréhension, de sensibilité et de « degré de Conscience »…).

 

Notons, en aparté, que l’obsolescence programmée des produits et objets manufacturés d’aujourd’hui n’aura, bien évidemment, plus cours dans un système sociétal où l’argent, la rémunération et le profit individuel tendraient à avoir de moins en moins de « place » et d’importance et au sein duquel les individus seront (sans doute) de plus en plus enclins à l’intégrité et à l’honnêteté (à la plus grande des honnêtetés…). Aussi, la durée de vie des objets se verra, sans doute, très substantiellement augmentée…

 

Les systèmes judiciaire et policier pourraient également connaître un net déclin mais seront probablement « contraints » de conserver leurs prérogatives fondamentales nécessaires à l’organisation générale des relations entre les individus (encore sujets à certaines formes d’appropriation égotique…).

 

 

Petit aparté anticipatif sur un avenir encore plus lointain

Après avoir progressivement abandonné leur « esprit de concurrence » au profit d’un esprit de collaboration et de coopération et développé de « grands domaines » (tels que le savoir, la connaissance, la recherche, l’écologie, la spiritualité et l’industrie automatisée…) et s’être (éventuellement) progressivement spécialisés, la grande majorité des grands pôles territoriaux sera sans doute (comme nous l’avons déjà évoqué) organisée en « petites communautés de vie ». Et il ne serait pas totalement idiot (ni aberrant) de penser qu’au sein de chaque grand pôle géographique, ces « petites communautés » puissent, un jour, être capables, au fil de l’évolution du progrès, de développer et d’organiser toutes ces grandes spécialités, puis, un jour (encore plus lointain) que toutes ces spécialités puissent être développées et organisées par chaque individu… on serait alors très proche d’une forme terrestre quasi autonome* (avec des caractéristiques quasi identiques à celles de la Conscience)…

* N’ayez crainte ! Nous y reviendrons…

 

 

APARTE SUPPLEMENTAIRE SUR UN POINT CAPITAL (si j’ose dire…) : L’ARGENT

Rappelons ici, une nouvelle fois, que l’argent a été (principalement) créé pour donner une valeur nominale aux biens nécessaires aux échanges et à la satisfaction des besoins des individus. Et que la division du travail s’est imposée naturellement comme la seule organisation viable pour satisfaire les besoins de plus en plus nombreux (en contraignant les Hommes à travailler à des activités de plus en plus éloignées de la production des biens nécessaires à la satisfaction de leurs besoins). Voici les causes factuelles majeures de l’utilité de la monnaie…

 

Mais il existe, bien sûr, un fondement plus profond qui explique l’intérêt (si j’ose dire !) que les Hommes lui ont toujours porté… et cette raison (viscérale — disons-le !) est intimement liée à l’identification du psychisme à la forme (au corps) qui incite les individus à croire qu’il sont des entités individuelles séparées… L’argent est nécessaire tant que perdure cette « croyance »...

 

Et l'on peut supposer que l’amélioration de la perception et de la compréhension (que connaîtra, sans doute, cette période…) invitera les individus à s’identifier de moins en moins au corps et contribuera ainsi à faire perdre progressivement à la monnaie son caractère « utile et nécessaire »… A ce titre, on pourrait imaginer que les échanges dans les sociétés de moyen terme puissent progressivement devenir gratuits (avec la disparition progressive de la monnaie). Et que l’industrie (comme nous l’avons déjà évoqué) puisse fournir gratuitement à chacun ce dont il a besoin, permettant aux individus de vaquer aux tâches et aux activités de leur choix. Il ne fait aucun doute que chacun travaillera (pas au sens contemporain du terme) ou, disons plutôt, œuvrera à la fois au bien-être, à l’harmonie et à l’épanouissement « individuels » (ou, disons, à l’épanouissement de la forme(1)) et au bien-être, à l’harmonie et à l’épanouissement de la société et de l’ensemble de l’Existant(2)

(1) Car l’identification au corps et la croyance en l’existence d’une entité individuelle séparée auront de moins en moins cours…

(2) Eh oui ! On peut toujours rêver de cette société aujourd’hui… mais inutile de remuer le couteau dans la plaie ! Notre (pauvre) monde contemporain est encore à des « années-lumière » de ce modèle d’organisation…

 

Après ce rapide panorama, tâchons d’exposer les principales caractéristiques de la société des « conscients élaborés » en matière d’organisation de la satisfaction des besoins organiques, matériels et psychiques élémentaires.

 

 

L’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence

Nous pourrions imaginer* que la société des « conscients élaborés » ait généralisé et industrialisé les pilules de synthèse et les pilules de « l’organique » bio modifié et substantiellement amélioré le kit alimentaire synthético-chimique, les pilules synthético-chimiques et les appareillages synthético-chimiques (avec une quasi disparition de la douleur). Qu’elle ait généralisé le kit de santé synthético-chimique et commencé à développer un kit de santé synthético-chimique intégrable destiné à lutter contre les pathologies, à réparer et à remplacer certains organes synthétiques (avec un kit de santé prophylactique, curatif et de réparation). Qu’elle ait développé les molécules de synthèse hydriques intégrables au kit alimentaire ou au kit de santé et permis la diminution des besoins d’évacuation du corps (en partie, par la transformation des apports alimentaires) avec le développement et l’amélioration du kit d’évacuation synthético-chimique intégrable.

* Voir la rubrique « l’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence » des sociétés d’après-demain.

 

On pourrait imaginer qu’elle ait transformé progressivement la matière synthétique en « peau synthétique » et généralisé les logements totalement autonomes, intelligents, « tout confort » et quasi hermétiques, adaptés à tous les environnements avec l’émergence d’un kit de fabrication synthético-chimique capable également de créer une kyrielle d’objets intelligents, autonomes et autonettoyants. On pourrait imaginer qu’elle ait vu émerger les balbutiements d’une énergie « pure » immatérielle (sans support) et ait permis la fabrication de véhicules à « énergie propre ». On pourrait même imaginer qu’elle ait commencé à construire des « véhicules » à énergie « pure » (genre de téléportation) en mesure de propulser quasi instantanément en des lieux de plus en plus éloignés et mis en place et développé un kit de déplacement chimico-immatériel. Qu’elle ait développé des systèmes électronico-chimiques de neutralisation et des systèmes synthético-chimiques de neutralisation « pacifiques » pour les individus et les objets et généralisé le kit de protection synthético-chimique et le kit de protection immatériel.

 

En matière de reproduction, on pourrait imaginer qu’elle ait considérablement amélioré les possibilités de modifications génétiques prénatales et permis l’émergence de la duplication directe (d’individus matures et immatures) sans compter l’amélioration et le développement du kit reproductif. Qu’elle ait permis la généralisation des rencontres physiques en tous lieux de la planète et le développement des lieux de rencontre dans l’espace, avec un accroissement et une forte amélioration des rencontres dans des univers virtuels entièrement créés selon les aspirations du psychisme. Qu’elle ait amélioré, de façon quantitative et qualitative, les nouveaux modes de communication, les modes « relationnels » sans parole qualitatifs avec de plus en plus de formes (individus, animaux et formes virtuelles), avec l’émergence d’une forme de télépathie avec un nombre restreint d’individus et permis la généralisation des kits communicatif et informatif intégrables et immatériels qui offriraient une connexion simultanée et permanente à toutes les informations planétaires et une nette amélioration de la perception qualitative dans un périmètre plus large (permettant, ainsi, de ressentir l’intériorité des individus et d’autres formes, animales par exemple).

 

On pourrait imaginer qu’elle soit à l’origine d’une baisse drastique du nombre de lois, de règlements, de la surveillance individuelle et collective, du recours aux forces de l’ordre et aux systèmes de protection, induite par la disparition progressive du besoin de protection psychique. Qu’elle ait développé et amélioré le cerveau synthétique (ou quasi synthétique) et le kit de protection psychique intégrable et permis la généralisation d’un profond travail spirituel, avec l’obtention de « résultats » patents et une réelle et conséquente diminution de la souffrance. Qu’elle ait considérablement développé et amélioré les mondes virtuels « parallèles » où les individus pourraient vivre (et se réfugier), dans lesquels ils seraient presque totalement projetés physiquement afin de satisfaire une grande partie de « leurs désirs et de leurs fantasmes » sans oublier la généralisation du tourisme spatial (plus lointain) et l’émergence du kit distractif intégrable malgré la poursuite de la diminution du besoin de divertissement chez les individus.

 

On pourrait imaginer qu’elle ait permis le développement des univers virtuels artistiques où serait donnée à « ressentir et à vivre la vérité » malgré une diminution progressive du besoin expressif chez les individus avec l’essor des modes de communication sans parole éminemment plus qualitatifs (permettant de ressentir et de percevoir l’Autre, ses émotions, son intériorité…) et l’émergence du kit expressif intégrable.

 

On pourrait également imaginer qu’elle ait continué à améliorer les intelligences artificielles et permis la création d’un kit de connaissance de l’Existant intégrable, la généralisation de disciplines ayant trait à la Connaissance (et non plus seulement aux savoirs) et l’émergence et le développement de disciplines sur la Conscience et l’intégration des savoirs et des connaissances à l’Être. Comme l’on pourrait imaginer enfin qu’elle puisse contribuer, comme la société des « conscients élémentaires », à faire de la recherche et de la spiritualité deux domaines toujours plus vitaux et centraux dans la vie des individus et de « la cité »…

 

 

La coexistence de plusieurs mouvements

Au vu des caractéristiques des individus « conscients élémentaires » et des individus « conscients élaborés » (en particulier, en matière de diminution relative du désir de transformation de l’Existant) et des trois grands types de mouvement collectif en vigueur au sein de toute communauté et de toute société (les « moutonniers », les « conservateurs » et les « progressistes »), il nous faut envisager, au moins, quatre orientations majeures que pourraient « emprunter » les individus des sociétés de « la Conscience mineure ».

 

Certains individus (de type plutôt « conservateur(1) ») pourraient estimer que leur qualité de vie (liée aux progrès et à la transformation de l’Existant) et que leur « degré de Conscience » (en matière de compréhension, de perception, de sensibilité et de sentiment d’Unité et de Plénitude…) sont amplement suffisants et « satisfaisants »... Et qu’il n’est donc pas nécessaire de poursuivre « la marche » de l’évolution… Si ces individus sont suffisamment nombreux et organisés, ils pourraient alors s’établir en communautés, bien décidés à vivre ensemble de la plus harmonieuse façon qui soit(2) sans participer à la transformation de l’Existant…

(1) Au vu de leur « degré de Conscience », ce terme pourrait paraître inapproprié… mais nous n’en avons trouvé un plus idoine. En outre, son usage permet de qualifier un type d’individu qui pourrait exister de façon universelle (voire de façon atemporelle). En effet, quelles que soient les époques, il y a de fortes chances de trouver parmi la population une catégorie d’individus toujours, plus ou moins, « frileux » et/ou rétifs aux changements et « aux progrès »…

(2) A l’instar de certaines communautés traditionnelles et/ou alternatives qui ont toujours refusé, au fil de l’histoire, d’être « mêlées » (de près ou de loin) à la marche du progrès et au modèle sociétal dominant de l’époque…

 

Les autres individus (sans doute majoritaires), encore animés par leur désir d’améliorer leurs conditions d’existence et les rapports entre l’ensemble des formes énergétiques et trop peu satisfaits de « leurs avancées spirituelles », continueront à vouloir transformer l’Existant et à « poursuivre l’évolution »… Au sein de ce mouvement, nous pourrions (éventuellement) trouver trois sous-groupes :

 

- les individus dont les désirs « de Conscience » et les désirs d’actualisation spirituelle seront plus forts que leurs désirs de transformation de l’Existant pourraient, s’ils sont suffisamment nombreux et organisés, s’établir en communautés et se dédier essentiellement à leur pratique (spirituelle) ;

 

- les individus dont les désirs « de Conscience » et les désirs d’actualisation spirituelle seront moins forts que leurs désirs de transformation de l’Existant et leurs « exigences » en matière de qualité de vie pourraient, s’ils sont suffisamment nombreux et organisés, s’établir en communautés et se dédier* (essentiellement) aux progrès technique et technologique ;

* Et, dans une bien moindre mesure, aux désirs et aux « plaisirs »…

 

- et enfin les individus dont les désirs « de Conscience » et les désirs d’actualisation spirituelle seront aussi forts que leurs désirs de transformation de l’Existant et leurs « exigences » en matière de qualité de vie pourraient se consacrer, de façon concomitante, à « l'amélioration » de l’Existant et à l'actualisation de leur potentiel spirituel pour continuer « d’habiter » de façon (toujours) plus large l’espace de Conscience.

 

Ces deux dernières sous-catégories pourraient cohabiter et coopérer en faisant, au fil de l’évolution des progrès, une utilisation de plus en plus « éclairée » des avancées techniques et continuer à « travailler » à une transformation de l’Existant de plus en plus respectueuse…

 

 

Le portrait de l’individu médian (représentatif de la société)

Le « conscient élémentaire » et le « conscient élaboré » seront sans doute des individus qui consacreront moins de temps à travailler, à dormir, à se reposer et à se divertir. La satisfaction des besoins organiques, matériels et psychiques élémentaires deviendra secondaire. Et ils s’y emploieront de façon simple et fonctionnelle (sans excès ni besoin narcissique) afin de consacrer l’essentiel de leur temps et de leur énergie à l’étude et à la compréhension (savoirs, connaissance et spiritualité). Le besoin de compréhension deviendra déterminant et orientera substantiellement leur existence. Leurs capacités cognitives, mnésiques et analytiques pourraient être augmentées... ainsi que la durée de la scolarité (avec un allongement substantiel) et le temps consacré aux savoirs et à la connaissance (tout au long de l’existence)...

 

Malgré l’imprégnation (plus ou moins profonde) de certaines caractéristiques de la Conscience (Amour, Paix, Plénitude), ils resteront (sans doute) encore soumis au psychisme et à quelques désirs plus ou moins « subtils ou grossiers ». Ils connaîtront probablement des oscillations entre l’espace psychique et l’espace de Conscience impersonnel. Mais ils vivront dans une forme de joie et de plénitude qui réduira considérablement leur recherche de plaisirs.

 

Leur compréhension, leur perception et leur sensibilité générale seront partielles et seront progressivement amenées à s’élargir, à s’approfondir et à s’affiner et leur donneront accès à des manifestations invisibles, plus lointaines et plus profondes. Leurs comportements d’accaparement, de favorisation de l’intérêt personnel et de valorisation narcissique se réduiront fortement ou très fortement et ils entretiendront des rapports de respect et de non instrumentalisation de plus en plus qualitatifs avec les autres individus, les autres formes (animales et végétales) et l’environnement (avec l’émergence réelle de relations de type révérenciel).

 

 

Les rapports à l’Existant

 

Les relations avec les congénères (relations sociales et relations intimes)

Diminution progressive (puis baisse significative) de la favorisation de l’intérêt personnel avec une augmentation progressive (puis une amélioration significative) de la prise en considération et du respect de l’Autre. Emergence (puis développement) de l’amélioration qualitative des relations interindividuelles. Diminution progressive (puis quasi éradication) des rapports de force, de domination et d’instrumentalisation et développement (puis amélioration et généralisation) d’une qualité relationnelle plus forte et d’un sentiment de proximité plus élevé, avec une diminution progressive (puis une nette diminution) de la dichotomie entre les individus de la sphère personnelle et les autres individus. Emergence progressive d’une disparition (puis quasi disparition) des masques sociaux et disparition progressive (puis quasi éradication) des différences entre les comportements apparents des individus et leur intériorité (leurs intentions réelles).

 

 

Les relations avec les animaux

Point de retournement dans la posture humaine et/ou post-humaine face à l’animal, avec la quasi éradication de la réification et de l’instrumentalisation, la disparition progressive des animaux d’élevage et la forte amélioration de leur qualité de vie. Respect croissant de l’ensemble des espèces animales et émergence d’un mouvement de transformation respectueuse des animaux (de certaines espèces) pour qu’ils bénéficient des « avancées » humaines et/ou post-humaines et soient soumis à des rapports moins « violents »… bref, l’amélioration de la condition animale des espèces sauvages, domestiquées et d’élevage devient réelle, probante et significative…

 

 

Les relations avec les végétaux

Poursuite de l’amélioration (puis généralisation) de la sélection et de la transformation génétiques de certaines espèces végétales (à des fins de consommation et à des fins d’amélioration des conditions d’existence des végétaux – pathologies par exemple). Respect croissant (puis généralisation du respect) des formes végétales et des zones naturelles (sauvages et aménagées).

 

 

Les relations avec les minéraux

Développement (puis généralisation) des métaux de synthèse.

 

 

Les relations avec l’environnement (au sens large) eau, air, terre

Point de retournement dans la posture humaine et/ou post-humaine à l’égard de l’environnement. Généralisation du respect environnemental. Fort développement du processus de dépollution et de réparation des dommages et des dégradations causés par leurs prédécesseurs (avec des progrès conséquents dans la dépollution des zones « souillées »)... Et généralisation des activités humaines et/ou post-humaines non polluantes.

 

 

Les relations avec les agents pathogènes

Généralisation et forte amélioration des modifications génétiques sur les agents pathogènes. Et développement de nouvelles formes curatives et prophylactiques (avec des progrès considérables de la science médicale*)…

* Hyper « technologisée »

 

 

Les relations avec l’espace

Poursuite des recherches et amélioration des connaissances de l’Univers. Découverte de nombreux pans de l’astrophysique totalement nouveaux (et inédits)... Et éventuellement (selon les conditions d’existence terrestre) développement de l’habitat spatial et des sociétés spatiales.

 

 

Les relations avec les formes extraterrestres (non terrestres)

Si découverte de formes non terrestres, plusieurs postures possibles selon les degrés d’agressivité et de « Conscience » des formes extra-terrestres : accueillante et coopérative, fermée et défensive (et toute la palette entre les deux…). Et développement (puis amélioration et généralisation) des formes et systèmes de défense « neutralisants ».

 

 

Les relations avec les formes énergétiques immatérielles (les « morts » entre autres…)

Rites et croyances. Et progressive émergence (puis développement et amélioration) de la communication (« post mortem » entre autres…).

 

 

L’impact général sur l’organisation des territoires entre toutes les formes

Emergence (puis développement) d’un processus de rééquilibrage des territoires entre les différentes formes vivantes. Baisse progressive (puis très nette diminution) de l’appropriation des surfaces terrestres par les Hommes et/ou les post-humains. Et émergence (puis développement) d’une cohabitation plus respectueuse et harmonieuse.

 

 

 

LE MONDE A LONG TERME

 

Bien qu’il soit possible (tout est toujours possible…) que survienne(nt) un évènement majeur cataclysmique (cosmique, entropique, climatique, tellurique, huge panique, big bug post informatique…) et/ou des obstacles(1) endogènes au processus évolutif des formes humaines, trans humaines et/ou post humaines, il est probable que l’évolution du monde à long terme(2) puisse plus, ou moins, suivre ce schéma et s’inscrire dans cette perspective…

(1) Obstacles ou « freins » d’ordre technique et/ou d’ordre éthique et/ou progressif (et éventuel) déclin* de l’aspiration à « modifier l’Existant » qui pourraient alors contraindre les individus et les sociétés à « renoncer » à poursuivre leur transformation du « réel »… et à « stopper » toutes actions « volontaires » dans l’évolution des formes (et de l’existence) terrestres…

* Hypothèse possible au regard des changements induits par « l’élargissement de l’espace de Conscience » mais (sans doute) peu probable au vu des aspirations universelles et des « fantasmes psychiques » ancestraux… Ce double mouvement « antagoniste » pourrait même constituer l’un des enjeux majeurs des sociétés de long terme et diviser les individus, les uns « défendant » l’idée du « progrès », les autres adoptant une posture « non interventionniste »…

(2) Au vu du nombre de paramètres en jeu dans cette projection, nous sommes (là aussi) incapables de fournir la moindre datation.

 

A ce stade de l’histoire terrestre, les conditions pourraient être réunies pour voir émerger une « révolution » aussi puissante que l’a été la transformation de l’énergie en matière, la transformation de la matière en Vivant, l’accession du Vivant à la perception et l’avènement de la Conscience mineure. En effet, les individus « conscients élémentaires » (ou une partie d’entre eux) devenus progressivement des individus « conscients élaborés », pourraient, au fil de leur évolution « naturelle », être suffisamment « mûrs » pour permettre la survenance d’une ère nouvelle : la Conscience majeure.

 

Voir ANNEXE 8 (panorama général de la Conscience et de l'Existant – partie 4)

 

 

L’avènement de la Conscience majeure coïnciderait à l’accession d’un nombre significatif d’individus à la quatrième étape du cheminement spirituel*, suffisamment nombreux pour s’organiser et créer un modèle sociétal.

* Se référer aux parties consacrées aux étapes du cheminement spirituel sur le plan individuel.

 

Nous pourrions imaginer, de façon un peu théorique, scolaire et didactique, que l’ère de la Conscience majeure puisse, elle aussi, se diviser en deux périodes (qui correspondraient aux troisième et quatrième étapes du cheminement spirituel tel que l’expose le bouddhisme théravada(1)) et voit émerger, au cours de la première période, des individus que l’on pourrait qualifier de « conscients conscients(2) élémentaires » et, au cours de la seconde période, des individus que l’on pourrait nommer des « conscients conscients(2) élaborés ».

(1) Se référer aux parties consacrées aux étapes du cheminement spirituel.

(2) Petit clin d’œil à la notion (aujourd’hui obsolète) d’Homo sapiens sapiens…

 

 

Généralités

A ce stade de l’évolution des sociétés (humaines et/ou post humaines), nous ne pouvons, bien évidemment, être sûrs de rien… La perspective que nous allons exposer ici est donc encore moins certaine que celles que nous avons proposées dans les paragraphes précédents. Elle n’en demeure pas moins probable (ou, du moins, envisageable) au regard de l’évolution des formes terrestres et apparaît comme la suite logique (sinon cohérente) de l’histoire des individus et des sociétés.

 

Selon le contexte et l’évolution (plus ou moins) homogène ou disparate des populations, il est vraisemblable que l’avènement de la Conscience majeure ne concerne qu’une partie des individus des sociétés de la Conscience mineure. Dans les scénarios les plus optimistes, tous pourraient s’y inscrire mais, de façon plus réaliste, on peut considérer que seule une fraction (aux proportions variables) en fera partie intégrante.

 

Si l’on « s’appuie » sur l’évolution naturelle et la « logique historique(1) » des formes énergétiques terrestres (sans doute est-ce un appui bien « bancal » car rien, en vérité, n’est moins sûr…), ce soubassement nous permettrait d’affirmer(2) que dans la mesure où seule une infime partie de l’énergie « pure » s’est transformée en matière, où seule une infime partie de la matière s’est transformée en Vivant, où seule une infime partie du Vivant a accédé à la perception, où seule une infime partie du Vivant perceptif a eu accès à « la pré-conscience » et où seule une infime partie des « préconscients » pourrait accéder à la Conscience mineure, il est probable (par grossière déduction) que seule une infime partie des « conscients élaborés » soit susceptible d’accéder à la Conscience majeure…

(1) A supposer qu’il y en ait une…

(2) En fermant les yeux et en « priant* » pour que cela ne soit pas trop erroné…

* Prier ? Mais qui peut-on prier ? Vers quelle entité se tourner sinon vers la Conscience ? Et à travers elle, n’est-ce pas vers nous-mêmes que nous nous tournons… ?

 

Quoi qu’il en soit, nous pouvons dire les sociétés de l’ère de la Conscience majeure auront probablement à faire face à des enjeux importants. Les plus évidents semblent être :

 

- le processus d’intégration profonde de la compréhension à l’Être (sur le plan perceptif) ;

 

- et le passage des formes — et la transformation de l’Existant — vers l’immatériel (sur le plan énergétique).

 

Après ces quelques généralités, essayons de dessiner le portrait de la société représentative des « conscients conscients élémentaires » et des « conscients conscients élaborés » en matière d’organisation politique, judiciaire et économique ainsi qu’en matière de relations « extérieures » et d’organisation territoriale.

 

 

L’organisation sociétale générale

En matière d’organisation politique (et de mode de gouvernance), on pourrait imaginer que l’autonomie des collectivités, sur le plan local, laisse progressivement la place à l’autonomie des individus (de plus en plus aptes à « s’autogouverner » avec justesse, harmonie, intelligence et respect) jusqu’à la disparition complète de tout besoin d’organisation. La gouvernance et l’encadrement devenus mondiaux pourraient apparaître de moins en moins nécessaires (hormis peut-être – éventuellement – en matière de relations avec les formes non terrestres) et tendraient également à disparaître.

 

En matière d’organisation judiciaire (et policière), les lois, les sanctions et la surveillance deviendraient, elles aussi, de plus en plus inutiles et connaîtraient un irrémédiable déclin (jusqu’à leur complète disparition) dans la mesure où chaque individu aurait « intégré » pleinement (et quasi totalement) les lois « naturelles » d’Amour et de Paix…

 

En matière d’organisation de la production, on pourrait progressivement assister, au fil des progrès techniques et technologiques, à un abandon des structures de production et de fabrication locales au profit d’une production au sein de chaque foyer avant de voir émerger et se développer une production totalement individuelle (chaque individu deviendrait alors capable de produire lui-même ce dont il aura besoin). La monnaie et les échanges économiques tendraient alors naturellement à disparaître. Quant au travail, il deviendrait non obligatoire (et, bien sûr, non rémunéré). Les individus devenant de plus en plus aptes à assurer toutes les fonctions dans tous les domaines pourraient alors œuvrer par vocation ou aspiration temporaire et à leur convenance à certains domaines de « leur choix » pendant une durée choisie (elle aussi, à leur convenance), signant ainsi la disparition progressive de la notion de travail… Certains secteurs clés comme la recherche-innovation, le bien-être, l’enseignement, la spiritualité, l’industrie « très haute technologie », l’écologie ou la transformation (respectueuse) et la préservation de la vie naturelle et « sauvage » pourraient néanmoins continuer à être, plus ou moins, organisés sur le plan collectif et bénéficier des recherches, des avancées et des travaux « individuels » jusqu’à ce que toute recherche (et amélioration) devienne totalement inutile…

 

La planète et le territoire spatial deviendraient progressivement un gigantesque espace commun de paix, d’entraide et d’harmonie au sein duquel chaque individu serait libre de circuler et de demeurer (le temps qu’il « souhaite ») sur le territoire et l’espace de « son choix ». Le processus graduel de disparition de l’habitat transformerait alors, peu à peu, les « lieux de vie » en espaces de rencontre et d’échange (plus ou moins provisoires ou ponctuels) entre les individus se retrouvant simplement, de temps à autre, pour « la joie » de partager et d’être ensemble…

 

Après ce panorama (relativement grossier) de l’organisation générale de la société à long terme, essayons de donner ses principales caractéristiques et ses grandes orientations en matière de conditions de vie et de réponses aux besoins des individus.

 

 

L’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence

 

Le monde des « conscients conscients élémentaires »

Nous pourrions imaginer* que la société des « conscients conscients élémentaires » ait généralisé les pilules de synthèse alimentaires (fabriquées quasi individuellement), le kit alimentaire synthético-chimique capable de fabriquer de « l’organique » génétiquement modifié, de l’organo-synthétique et du synthétique « pur » et qu’elle ait développé un kit alimentaire synthético-chimique intégrable.

* Voir la rubrique « l’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence » des sociétés d’après-demain.

 

En matière de santé, on pourrait imaginer qu’elle ait généralisé les pilules de synthèse, les appareillages fabriqués quasi individuellement, les robots chirurgiens personnels, les kits de santé synthético-chimiques intégrables, capables de fabriquer de « l’organique » génétiquement modifié, de l’organo-synthétique et du synthétique « pur » (avec quasi éradication de la douleur) et qu’elle ait permis l’émergence et le développement d’un kit de santé immatériel. On pourrait imaginer qu’elle ait généralisé les molécules de synthèse hydriques intégrables au kit de santé ou au kit alimentaire intégrable, développé la fabrication hydrique immatérielle et permis la baisse des besoins d’évacuation du corps et la récupération d’une partie des déchets pour réutilisation « corporelle » après avoir été transformés en énergie. On pourrait également imaginer qu’elle ait généralisé et amélioré le kit d’évacuation intégrable et permis l’émergence d’un kit d’évacuation immatériel.

 

On pourrait aussi imaginer qu’elle ait permis la transformation de la « peau synthétique » en une sorte de combinaison polyvalente, avec branchements synthético-chimiques de différents kits.

 

En matière d’habitat, on pourrait imaginer qu’elle ait développé la fabrication de logements autonomes, hermétiques, intelligents et intégrables progressivement à la combinaison polyvalente et ait commencé à développer un kit de fabrication immatériel.

 

En matière énergétique et en matière de mobilité, on pourrait imaginer qu’elle ait développé une énergie « pure », des véhicules à énergie « pure » (genre de téléportation) qui pourraient propulser quasi instantanément en des lieux encore plus éloignés et qu’elle ait généralisé le kit de déplacement intégrable et amélioré le kit de déplacement immatériel.

 

On pourrait imaginer qu’elle ait généralisé les systèmes synthético-chimiques de neutralisation pacifiques et les systèmes de protection et de neutralisation pacifiques immatériels pour les individus et les objets et amélioré le kit de protection immatériel.

 

On pourrait également imaginer qu’elle ait généralisé les modifications génétiques en matière reproductive, développé la duplication directe (clones et avatars) et permis l’émergence du kit distractif intégrable et le développement et l’amélioration du kit reproductif intégrable.

 

On pourrait également imaginer qu’elle ait permis le développement des rencontres physiques en tous lieux et dans tous les univers « réels » et virtuels, qu’elle ait amélioré (de façon quantitative et qualitative) les moyens de communication et les modes « relationnels » sans parole qualitatifs (avec de plus en plus de formes – individus, animaux et formes virtuelles – grâce au développement d’une sorte de télépathie avec un nombre important d’individus) et qu’elle ait amélioré les kits communicatif et informatif intégrables et immatériels offrant une connexion simultanée et permanente à toutes les informations planétaires et une perception qualitative dans un périmètre de plus en plus large (qui permettrait de ressentir, avec toujours plus de finesse et de profondeur, l’intériorité des individus et d’autres formes, animales et végétales par exemple).

 

On pourrait imaginer qu’elle ait quasi-totalement éradiqué les lois, les règlements, les forces de l’ordre et les systèmes de protection, qu’elle ait généralisé le cerveau synthétique (ou quasi synthétique) et le travail spirituel avancé, avec des « résultats » toujours plus probants (et avec une quasi éradication de la souffrance) et qu’elle ait développé et amélioré le kit de protection psychique intégrable. Qu’elle ait permis la généralisation des mondes virtuels « parallèles » où les individus pourraient séjourner et s’établir (et dans lesquels ils seraient presque totalement projetés physiquement pour vivre selon leurs aspirations) et qu’elle ait développé et amélioré le tourisme spatial (encore plus lointain) et le kit distractif intégrable en dépit d’une baisse drastique du besoin de divertissement chez les individus.

 

On pourrait imaginer qu’elle ait généralisé les univers virtuels artistiques où serait donnée à « ressentir et à vivre la vérité » malgré la baisse drastique du besoin expressif chez les individus, liée au développement des modes de communication sans parole éminemment plus qualitatifs, à l’amélioration du kit expressif intégrable, au développement des intelligences artificielles très sophistiquées et à la généralisation du kit de connaissance de l’Existant intégrable. Et qu’elle ait permis une très nette amélioration des capacités cérébrales (mnésiques, analytiques et de puissance calculatoire…) des individus ainsi qu’une amélioration substantielle de leurs capacités de compréhension et de perception, de plus en plus fines, de plus en plus vastes et de plus en plus profondes (avec la généralisation de l’intégration de la Connaissance à l’Être, la généralisation des disciplines ayant trait à la Connaissance et des disciplines sur la Conscience ainsi que la généralisation d’un module d’apprentissage intégrable des savoirs et de la connaissance personnalisé et permanent — utilisant l’accès immédiat à tous les savoirs mis en réseaux et le développement des intelligences artificielles) sans compter la multiplication des nouveaux domaines d’investigation, des nouvelles disciplines et des nouvelles connaissances concernant la quasi-totalité des plans de l’Existant et la généralisation du kit de connaissance spirituelle intégrable, plaçant la spiritualité au cœur même de la société.

 

 

NOTE : si certaines communautés humaines, trans-humaines et/ou post-humaines envisageaient, à l’avenir, de créer des sociétés dans lesquelles la plupart des formes (voire toutes les formes) pourraient entretenir des rapports de respect, d’harmonie et d’amour, il semblerait logique, à leur début, qu’elles diminuent, de façon drastique, le nombre de formes admises dans cette société (quitte à retrouver par la suite, au fil de leurs « découvertes transformatrices et respectueuses », davantage de diversité…) en ne sélectionnant et n’en autorisant l’accès qu’à celles qui sont capables* d'entretenir (au moins potentiellement) ce genre de relation…

* Et/ou « mûres »...

 

Aussi, les sociétés humaines, trans-humaines et/ou post-humaines qui aspireront à transformer l’Existant pourraient, peut-être, être amenées ou contraintes à vivre (de façon plus ou moins provisoire) dans des sortes de bulles gigantesques hermétiques (et immatérielles) au sein desquelles tous les paramètres essentiels pourraient être « maîtrisés » : les paramètres ayant trait à la dimension physiologique (synthético-physiologique ou synthétique) des formes énergétiques comme ceux qui concernent leur dimension relationnelle... Mais il ne fait aucun doute qu’il faudra compter avec « l’imprévisibilité* » (et la « malice ») de la Conscience, de l’énergie et de la Vie et avec le potentiel créatif des interactions (même contrôlées et maîtrisées) entre les formes qui réserveront, au fil des travaux et des recherches, sans doute de nombreuses (et bien étonnantes ou détonantes) surprises…

* Il convient de se méfier des perspectives (dont celle-ci) qui ambitionnent de modéliser l'Existant avec un (trop grand) souci d'exhaustivité... La Conscience, l'énergie et la Vie ont plus d'un tour dans leur sac... elles demeurent, fort heureusement, extraordinairement créatives et imprévisibles pour contredire et démolir toutes les modélisations, les « mises sous cloche » (si j'ose dire !), les conjectures et les vaines tentatives de projections anticipatives !

 

Notons néanmoins qu’il semble (à peu près) évident que le psychisme (et, à travers lui, la Conscience) aspire à créer une forme ou le plus de formes possibles pleinement consciente(s) dans un univers fini et temporel (?) qui aurai(en)t exactement les mêmes qualités, capacités et possibilités que la Conscience (sans forme, infinie et atemporelle). Des formes ou des individus qui pourraient répondre à l’ensemble de leurs besoins (et disposant de la possibilité ou non de les satisfaire — avec toute la palette des degrés et des intensités — voir l’évolution des kits), qui pourraient vivre en tous lieux et en toutes zones (totalement sécurisés, ultra-protégés, protégés, semi-protégés, peu protégés et totalement naturels et sauvages), qui seraient infiniment adaptables aux changements induits par l’évolution des formes et de leur interactions et à tous les milieux (avec l’actualisation permanente à toute nouveauté…), qui vivraient dans le plus grand respect sans rien « utiliser » ni détruire et de la façon la plus autonome qui soit, avec exactement les mêmes capacités et caractéristiques que la Conscience (Amour et Intelligence). A ce titre, il serait amusant (et, sans doute aussi, un peu « effrayant »…) d’établir le portrait d’un individu (ou d’une forme) qui aurait toutes les possibilités (créatives) de la Conscience mais qui « disposerait » d’un degré d’Amour et d’Intelligence bien « inférieur » et le comparer* au portrait d’un individu (ou d’une forme) qui aurait exactement les mêmes possibilités et les mêmes caractéristiques que la Conscience (y compris, bien sûr, son degré d’Amour et d’Intelligence)…

* Peut-être nous y prêterons nous ultérieurement… ou peut-être pas… selon la somme de travail qui nous attend (et qu’il nous faudra encore, de toute évidence, fournir pour déployer cette réflexion aussi loin que possible…).

 

Peut-être existera-t-il des individus qui n’aspireront à transformer l’Existant que pour leur espèce (et/ou leurs descendants) afin d’accéder à l’autonomie absolue (invulnérabilité, permanence, liberté totale…), à la Plénitude-Complétude, à l'Amour et à l'Intelligence sans se préoccuper des autres formes et des autres espèces, ni manifester le moindre désir de créer entre elles des interactions plus harmonieuses et plus respectueuses (ou, du moins, moins violentes)… autant de thématiques et de questions que nous sommes incapables de développer aujourd’hui et auxquelles nous ne pouvons, bien évidemment, (décemment) répondre…

 

Après ce bref aperçu du monde des « conscients conscients élémentaires », essayons de dresser le portrait de la société des « conscients conscients élaborés » ?

 

 

Le monde des « conscients conscients élaborés »

De façon synthétique, nous pourrions dire que les « conscients conscients élaborés » pourraient développer, améliorer et généraliser les avancées et les possibilités des sociétés antérieures au point de créer un monde phénoménal incroyablement proche de l’univers nouménal...

 

De façon plus détaillée, nous pourrions imaginer* que la société des « conscients conscients élaborés » ait généralisé le kit alimentaire synthético-chimique intégrable et les pilules de synthèse alimentaires totalement et directement intégrées au corps et ait considérablement amélioré (voire achevé) le kit alimentaire immatériel.

* Voir la rubrique « l’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence » des sociétés d’après-demain.

 

Dans le domaine de la santé, on pourrait imaginer qu’elle ait généralisé les pilules de synthèse et les appareillages intégrés directement au corps, capables de créer des remparts (quasi infranchissables), de s’adapter aux nouvelles pathologies, de créer eau et oxygène (si cela s’avérait encore nécessaire) et de remplacer « ce qui a besoin de l’être » quasi instantanément (avec éradication totale de la douleur). Et qu'elle ait permis la généralisation du kit de santé immatériel et la généralisation des molécules de synthèse hydriques intégrées directement au corps par l’intermédiaire soit du kit alimentaire soit du kit de santé immatériel.

 

On pourrait imaginer qu’elle ait généralisé le kit d’évacuation immatériel et la transformation intracorporelle des déchets (toujours plus résiduels) en énergie avec (éventuellement) vidange occasionnelle des résidus non transformables.

 

En matière « vestimentaire », on pourrait imaginer que la peau synthétique régénérative et protectrice soit devenue une sorte de combinaison immatérielle, munie de multiples branchements (eux aussi immatériels) pour « accueillir » de multiples kits chimico-immatériels dont un kit de fabrication immatériel en mesure de créer (de façon quasi immédiate) tous les objets possibles et nécessaires comme, par exemple, un habitat dans tous les types d’environnement.

 

On pourrait imaginer qu’elle ait généralisé l’énergie « pure », les véhicules à énergie « pure » (genre de téléportation de « tout ce que l’on désire »…) qui propulseraient instantanément en presque tous lieux (voire dans tous les espaces-temps) ainsi que les kits de déplacement immatériels, les systèmes de protection et de neutralisation pacifiques immatériels pour les individus et les objets et les kits de protection immatériels. Qu’elle ait également nettement amélioré les kits reproductifs immatériels intégrables qui permettraient une duplication directe (quasi immédiate et à volonté) mais aussi la télépathie, permettant un sentiment de proximité avec toutes les formes ainsi que les kits communicatif et informatif intégrables immatériels qui offriraient des possibilités de rencontre physique en tous lieux et dans tous les univers « réels » et virtuels et une perception qualitative dans un périmètre très étendu (qui permettrait de ressentir, avec une grande finesse et une grande profondeur, l’intériorité de toutes les formes (humaines et/ou post-humaines, animales, végétales, minérales, « invisibles » et extra-terrestres…).

 

On pourrait imaginer qu’elle ait totalement éradiqué les lois, les règlements, les forces de l’ordre et les systèmes de protection avec la disparition du besoin de protection psychique chez les individus, et qu’elle ait généralisé l’achèvement du travail spirituel (avec l’éradication quasi-totale de la souffrance) et/ou le kit de protection psychique intégrable immatériel.

 

On pourrait imaginer qu’elle ait permis la création d’une quantité incroyable de mondes virtuels « parallèles » où tout serait (presque) possible… et où les individus pourraient vivre grâce à la généralisation des intelligences artificielles très sophistiquées et au kit de connaissance de l’Existant (savoirs et connaissance) intégrable immatériel en dépit de la quasi éradication du besoin expressif et de la généralisation du kit expressif intégrable immatériel et des modes de communication sans parole éminemment plus qualitatifs.

 

On pourrait imaginer que les individus « conscients conscients élaborés » aient développé des capacités cérébrales mirifiques (mnésiques, analytiques et de puissance calculatoire…) leur donnant accès à une compréhension et à une perception quasi-totales (avec une quasi complète intégration de la Connaissance à l’Être) grâce, en partie, à la généralisation des modules d’apprentissage intégrables et immatériels des savoirs et de la connaissance, personnalisés et permanents (utilisant l’accès immédiat à tous les savoirs mis en réseaux et le développement des intelligences artificielles), mais également à la généralisation des disciplines ayant trait à la Connaissance, des disciplines sur la Conscience et l’intégration des savoirs et des connaissances à l’Être sans compter le développement prodigieux des nouveaux domaines d’investigation, des nouvelles disciplines et des nouvelles connaissances sur la quasi-totalité des plans de l’Existant et la généralisation du kit de connaissance spirituelle intégrable immatériel, offrant plus que jamais à la spiritualité une place totalement centrale dans la vie des individus…

 

 

La coexistence de plusieurs mouvements

A l’instar des individus de la Conscience mineure, ceux de la Conscience majeure (les « conscients conscients élémentaires » et les « conscients conscients élaborés ») pourraient fort bien se sous diviser en quatre grands mouvements :

 

- les individus satisfaits à la fois de l’Existant et du degré « de Conscience » atteint qui pourraient « décider » de ne plus participer à la transformation de l’Existant et vivre simplement de la plus harmonieuse façon qui soit… ;

 

- les individus plus soucieux de la dimension spirituelle que des « conditions d’existence » de l’Existant qui pourraient se dédier essentiellement à leur pratique et aux « enseignements » (accompagnement spirituel des autres individus et (éventuellement) des autres formes) ;

 

- les individus plus soucieux des « conditions d’existence » de l’Existant que du degré de Conscience « vécu » qui pourraient se consacrer principalement à la recherche et aux progrès techniques et technologiques (pour mettre en œuvre les ultimes transformations nécessaires à la création d’une forme totalement autonome…) ;

 

- et, enfin, les individus soucieux à la fois d’achever la transformation de l’Existant (pour obtenir des conditions de vie optimales et des relations harmonieuses entre toutes les formes de l’Existant) et d’intégrer « pleinement » l’espace de Conscience qui pourraient se consacrer, de façon concomitante, à « l'amélioration » de l’Existant et à l'actualisation de leur potentiel spirituel pour pouvoir « habiter » l’espace de Conscience de façon pleine et totale…

 

 

Le portrait de l’individu médian (représentatif de la société)

L’individu « conscient conscient élémentaire » et l’individu « conscient conscient élaboré » se consacreront probablement très naturellement et très majoritairement (puis exclusivement) à l’Être, à la contemplation et aux actions « conscientes » dans tous les domaines investis, à l’épanouissement « individuel » et collectif de toutes les formes terrestres (et non terrestres) sans favorisation, valorisation ni accaparement « personnels », avec un respect quasi-total (puis total) de l’Existant malgré la persistance de quelques résidus égotiques et identificatoires subtils (puis très subtils).

 

La satisfaction des besoins organiques, matériels et psychiques élémentaires deviendra éminemment accessoire. Et ils s’y emploieront de façon éminemment simple et fonctionnelle afin de consacrer l’essentiel de leur temps et de leur énergie à l’intégration (profonde) de la compréhension à « l’Être ».

 

Leurs capacités cognitives, mnésiques et analytiques pourraient connaître une très forte expansion. Et ils ne seront plus soumis au psychisme ni aux désirs et verront une stabilisation de « leur vécu » dans l’espace de Conscience impersonnel. Ils vivront de façon quasi permanente (puis permanente) dans la Joie, l’Amour, la Paix et la Plénitude.

 

Leur compréhension, leur perception et leur sensibilité générale seront étendues, très étendues (puis quasiment complètes) et leur permettront d’avoir un accès direct « au réel » (sans l’intermédiaire de la pensée et de l’intellect). Ils seront capables de voir, de comprendre et de ressentir profondément (puis entièrement) à peu près toutes les formes existantes… et entretiendront avec elles (et l’ensemble de l’Existant) des relations animées par un quasi perpétuel (puis permanent) sentiment d’Unité et d’Amour inconditionnel et un profond et authentique respect révérenciel.

 

 

Les rapports à l’Existant

 

Les relations avec les congénères (relations sociales et relations intimes)

Quasi éradication (puis totale éradication) de la favorisation de l’intérêt personnel avec une quasi équanimité (puis une totale équanimité) entre soi et les autres. Généralisation des relations éminemment qualitatives. Disparition totale des rapports de force, de domination et d’instrumentalisation. Fort développement du sentiment de proximité et de « familiarité bienveillante » avec l’Autre (puis quasi généralisation du sentiment d’Unité) avec peu de différenciation (puis aucune différenciation) entre les individus de la sphère « personnelle » et les autres individus et avec une quasi coïncidence (puis une totale coïncidence) entre les comportements et l’intériorité.

 

 

Les relations avec les animaux

Eradication totale de la réification et de l’instrumentalisation. Disparition complète des animaux d’élevage. Généralisation du respect pour l’ensemble des espèces animales (les animaux sont considérés à part entière comme des « frères »…) puis disparition totale de la différence entre humains ou post-humain et animaux. Développement (puis généralisation) de la transformation respectueuse de certaines espèces animales pour qu’elles bénéficient des « avancées » humaines ou post-humaines et soient animées par des rapports moins « violents ».

 

 

Les relations avec les végétaux

Généralisation du respect pour les formes végétales et les zones naturelles (sauvages et aménagées). Généralisation de l’amélioration de la sélection et de la transformation génétiques de certaines espèces végétales (à des fins — éventuelles — de consommation et à des fins d’amélioration des conditions d’existence des végétaux pour diminuer et éradiquer leur fragilité organique – pathologies par exemple). Puis quasi disparition de la différence entre humains ou post humains et végétaux.

 

 

Les relations avec les minéraux

Généralisation des métaux de synthèse puis arrêt quasi-total des besoins minéraux.

 

 

Les relations avec l’environnement (au sens large) eau, air, terre

Quasi éradication (puis éradication totale) de la pollution et des destructions environnementales.

 

 

Les relations avec les agents pathogènes

Forte amélioration des modifications génétiques. Progrès considérables des nouvelles prophylaxies et des nouvelles thérapeutiques. Puis quasi complète immunisation contre les agents pathogènes.

 

 

Les relations avec l’espace

Compréhension globale et accès à la quasi-totalité de la création « énergétique » et cosmique (puis à l’ensemble de l’espace cosmique « énergétique » et non « énergétique »). Développement possible (puis généralisation éventuelle…) des sociétés spatiales (selon les conditions d’existence terrestre et les aspirations des individus).

 

 

Les relations avec les formes extraterrestres (non terrestres)

Si découverte de formes non terrestres, plusieurs postures possibles (selon les degrés d’agressivité et de « Conscience ») : accueillante et coopérative, fermée et défensive (et toute la palette entre les deux…). Et généralisation et très substantielle amélioration des formes et systèmes de défense neutralisants.

 

 

Les relations avec les formes énergétiques immatérielles (les « morts » entre autres…)

Généralisation et affinement de la communication (« post mortem » entre autres…).

 

 

L’impact général sur l’organisation des territoires entre toutes les formes

Développement et forte accélération du processus de rééquilibrage des territoires entre les différentes formes vivantes et existantes. Très forte diminution de l’appropriation des surfaces terrestres par les Hommes et/ou les post-humains. Et développement (puis généralisation) d’une cohabitation respectueuse et harmonieuse.

 

 

 

LE MONDE A TRES LONG TERME

 

A ce stade de l’évolution terrestre, humaine et/ou post-humaine (fort lointain, doit-on le préciser…), on pourrait tout imaginer… mais les conditions pourraient être réunies pour voir émerger une « révolution » aussi puissante que l’ont été, sur le plan terrestre, la transformation de l’énergie en matière, la transformation de la matière en Vivant, l’accession du Vivant à la perception et l’avènement de la Conscience mineure et majeure. En effet, les individus « conscients conscients élémentaires » (ou une partie d’entre eux) devenus progressivement des individus « conscients conscients élaborés », pourraient, au fil de leur évolution « naturelle », être suffisamment « mûrs » pour permettre la survenance d’une nouvelle ère : la Pleine Conscience.

 

Voir ANNEXE 8 (panorama général de la Conscience et de l'Existant – partie 4)

 

 

L’avènement de la Pleine Conscience coïnciderait à l’accession d’un nombre significatif d’individus à la cinquième (et ultime) étape du cheminement spirituel*.

* Se référer aux parties consacrées aux étapes du cheminement spirituel sur le plan individuel

 

Nous pourrions imaginer, de façon un peu théorique, scolaire et didactique, que l’ère de la Pleine Conscience puisse voir émerger des individus « conscients conscients complets », dotés exactement des mêmes caractéristiques que la Conscience « originelle ».

 

Et ce monde pourrait constituer l’ultime étape des formes terrestres et n’être accessible qu’à une infime partie des « conscients conscients élaborés »…

 

 

Le monde des « conscients conscients complets »

 

Généralités

Comment imaginer un tel univers ? Il n’y aurait sans doute plus, à proprement parler, de société ni d’organisation. Chaque individu serait à lui seul « une société » et entretiendrait avec l’ensemble de l’Existant des liens respectueux et harmonieux car il aurait « intégré » pleinement les lois « naturelles » d’Amour, de Paix et d’Intelligence… Les individus seraient totalement libres, autonomes et autosuffisants. Et circuleraient librement. Ils seraient en mesure de Tout voir, de Tout comprendre, de Tout rencontrer, de Tout ressentir, de Tout aimer et de Tout créer…

 

Dans cet univers, il n’y aurait donc ni organisation politique, ni organisation judiciaire, ni organisation économique, ni organisation des relations avec « l’extérieur », ni même organisation territoriale et spatiale dans la mesure où chaque individu (vivant pleinement l’espace de Conscience) serait affranchi de tous conditionnements et capable de s’autogouverner de façon éminemment juste et respectueuse…

 

Chaque individu pourrait alors (si « l’envie* » lui prenait…) créer à loisir des univers entiers qu’il pourrait peupler à sa guise... où il pourrait séjourner et inviter d’autres individus (de sa catégorie), créer, dans ces univers, des individus capables, eux-mêmes, de créer perpétuant ainsi un cycle infini et une vertigineuse mise en abyme en multipliant les mondes, les plans, les systèmes, les interactions et les possibilités... un peu comme tente d’y œuvrer, aujourd’hui, le psychisme avec l’imaginaire mais, cette fois-ci, de façon « réelle » et concrète…

* Par « pur » jeu ou « pure » célébration et/ou selon les exigences et impératifs situationnels…

 

Notons que cette capacité créative et cette liberté (totales) ne seront (sans doute) accessibles qu’aux individus pleinement et totalement conscients. A ce titre, soulignons ici l’existence (probable) d’une analogie avec (entre autres périodes) la situation humaine contemporaine.

 

En effet, les Hommes d’aujourd’hui disposent d’une liberté très « élémentaire » (liée à leur asservissement par le travail, à l’organisation sociétale et aux obligations — de toutes sortes — auxquelles ils doivent « faire face »…). Et il est fort probable que si l’humanité bénéficiait aujourd’hui d’un temps libre et d’une liberté accrus, la très grande majorité n’utiliserait pas ce temps et cette liberté « à des fins » de compréhension et de sensibilité mais pour s’adonner au « désir, au plaisir et à la distraction »… Voilà, sans doute (en partie), la raison principale de leur « degré de liberté » si sommaire (et rudimentaire)…

 

Si les Hommes étaient plus naturellement (et spontanément) enclins à se consacrer à la compréhension et à « œuvrer intérieurement », ils verraient sans doute se réduire considérablement le poids et le carcan des contraintes auxquelles ils sont assujettis… comme s’il existait une sorte de « loi tacite et implicite » entre l’accroissement des capacités créatives, de transformation et de liberté et l’amélioration du degré de compréhension et de perception (jusqu’à « atteindre » la pleine Conscience)… Comme il semble exister également une « loi (tout aussi) tacite et implicite » entre l’accès à l’autonomie et le degré d’amour (réellement ressenti), « rendant » ainsi impossible l’autonomisation (et donc l’autonomie absolue) sans une « progression » du sentiment de proximité (jusqu’au sentiment d’Unité et d’Amour absolu)… « Loi » qui enjoint aux individus de coopérer et de s’entraider jusqu’à ce que l’un et l’autre soient effectifs…

 

Bref, nous pourrions avoir le sentiment que ces deux « lois » agissent comme des garants(1)… afin que l’augmentation « des possibilités et des libertés » soit toujours et naturellement utilisée « à bon escient »(2)… et ne puisse « tomber » entre les mains d’individus « spirituellement immatures » qui en feraient (sans aucune doute) un usage inapproprié et/ou en mesure « d’ouvrir la porte » à bien des dérives…

(1) « Lois » qui rendent totalement caduque (et non viable) l’idée (évoquée dans l’un des paragraphes précédents) de comparer deux individus, l’un disposant de toutes les caractéristiques de la Conscience, et l’autre doté d’une liberté et d’une autonomie totales sans sentiment d’Amour et d’Unité…

(2) Ou, du moins, ne soit pas à l’origine de conséquences majeures et/ou de dégâts irréversibles…

 

Quoi qu’il en soit, nous pouvons dire que « la société » de l’ère de la Pleine Conscience aura probablement à faire face à des enjeux essentiels. Les plus évidents semblent être :

 

- le processus d’autonomisation complète des individus sur les plans individuel et collectif ;

 

- la disparition progressive de toutes structures collectives d’organisation et d’encadrement ;

 

- les conséquences des deux points précédents sur la réorganisation des rapports entre les individus ;

 

- et la poursuite et l’achèvement (éventuel) de la transformation respectueuse de l’Existant (amorcée par leurs ancêtres et menée par leurs prédécesseurs).

 

Après ce survol (général) du monde à très long terme, que pourrions-nous dire de l’univers des « conscients conscients complets » ? A quoi pourrait-il ressembler en matière de conditions de vie et de réponses aux « besoins » des individus ?

 

 

L’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence

Nous pourrions imaginer* que le monde des « conscients conscients complets » voit se généraliser les apports nutritifs immatériels intracorporels (avec un transhumanisme corporel immatériel) ou puisse signer l’éradication totale des besoins alimentaires. Qu’il permette une prophylaxie, des soins et une réparation immatériels intracorporels de façon immédiate ou la disparition des besoins de santé. Et qu’il permette également des apports hydriques immatériels intracorporels ou l’éradication des besoins hydriques et la transformation des résidus, par mécanisme intracorporel immatériel, en énergie « pure » ou l’éradication des besoins d’évacuation des déchets.

* Voir la rubrique « l’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence » des sociétés d’après-demain.

 

On pourrait imaginer que le monde des « conscients conscients complets » permette la généralisation d’une sorte de film immatériel protecteur, intelligent, adaptable et évolutif, capable de créer des remparts neutralisants contre tous les types d’agression (climatique, pathogène, attaques diverses…) qui signerait l’éradication du besoin « vestimentaire ». Et qu’il permette la création d’une sorte de bulle immatérielle* protectrice, intelligente, adaptable et évolutive, capable de s’adapter également à tous les types d’environnement (y compris l’espace bien sûr) et de créer, elle aussi, des remparts neutralisants contre tous les types d’agression (climatique, pathogène, attaques diverses…), signant ainsi l’éradication du besoin de logement et, bien évidemment (et depuis déjà fort longtemps), des tâches domestiques et garantissant une invulnérabilité ou une quasi invulnérabilité pour les individus et les objets.

* Cette « bulle » pourrait être une fonctionnalité du « film protecteur vestimentaire » en mode « extension »…

 

On pourrait également imaginer qu’il permette l’intégration d’une énergie « pure » (sur le plan individuel), une duplication directe immédiate et à volonté et des déplacements instantanés en tous lieux et espaces-temps, offrant la possibilité de faire toutes les rencontres possibles avec toutes les formes existantes ou créées, en tous lieux, dans tous les espaces-temps et dans tous les univers (existants ou créés) et offrant la possibilité d’être relié en permanence (avec une connexion directe et totale — très fine et très profonde) à toutes les formes de l’Existant, de façon éminemment qualitative, et, avec un total sentiment d’Unité.

 

Et nous pourrions imaginer enfin que le monde des « conscients conscients complets » permette l’éradication du besoin de protection psychique, l’éradication du besoin distractif, l’éradication de la souffrance ainsi que l’éradication des besoins de support et de stockage des données et des informations par omniscience globale instantanée et généralisation de l’Être comme « connaissance incarnée ». Bref, vu d’ici (et de notre époque), il s’agit incontestablement d’un autre monde… ce que d’aucuns pourraient qualifier légitimement de « science-fiction »…

 

 

A l’instar des individus de la Conscience mineure et de la Conscience majeure, on pourrait imaginer qu’il existe, au sein des « conscients conscients complets », plusieurs sous-catégories d’individus :

 

- ceux qui « réintègreraient » l’espace de Conscience « originelle » (peut-être, les plus « conservateurs » – entre guillemets) ;

- ceux qui demeureraient en silence et en paix au sein de l’espace « terrestre » (les « pleinement satisfaits », rien à ajouter, rien à ôter, rien à changer …) ;

- et les individus désireux de « mettre en pratique » leur puissant potentiel créatif qui « décideraient » de créer de nouveaux plans et de nouveaux univers, à l’instar de la Conscience « originelle », en poursuivant la mise en abyme et le jeu célébratoire de la Conscience à travers de multiples créations (nous y reviendrons dans les paragraphes consacrés aux perspectives possibles de la trame de l’Existant)…

 

 

Le portrait de l’individu médian (représentatif de la société)

L’individu « conscient conscient complet » sera un être pleinement réalisé (totalement conscient), libre, autonome, vivant pleinement (et de façon permanente) l’Amour et l’Intelligence, la Paix, la Joie et la Plénitude. Doté d’un pouvoir créatif infini, capable de créer des formes, des mondes et des univers de façon aussi puissante que la Conscience « originelle » et, peut-être même, avec des potentialités et des capacités encore plus « incroyables »… on pourrait du moins l’imaginer au vu de la lenteur de l’actualisation du potentiel des formes énergétiques terrestres qui auront mis des milliards d’années à « retrouver » les caractéristiques de leur « source originelle » et à se « doter » de ses capacités créatives…

 

 

Les rapports à l’Existant

Sentiment d’Unicité et d’Unité totale et parfaite. Communion silencieuse et « bienveillante » avec toutes les formes de l’Existant.

 

 

Les relations avec les congénères (relations sociales et relations intimes)

Sentiment d’Unité totale et parfaite.

 

 

Les relations avec les animaux

Sentiment d’Unité totale et parfaite. Disparition complète de la différence entre humains ou post-humain et animaux. Et généralisation de la transformation respectueuse de certaines espèces animales afin de diminuer la souffrance de leur condition et la violence de leurs relations…

 

 

Les relations avec les végétaux

Sentiment d’Unité totale et parfaite. Quasi disparition de la différence entre humains ou post humains et végétaux. Et généralisation de la transformation respectueuse de certaines espèces végétales afin de diminuer et d’éradiquer leur fragilité organique.

 

 

Les relations avec les minéraux

Sentiment d’Unité totale et parfaite. Arrêt complet des besoins minéraux.

 

 

Les relations avec l’environnement (au sens large) eau, air, terre

Sentiment d’Unité totale et parfaite. Eradication complète de la pollution et des destructions environnementales.

 

 

Les relations avec les agents pathogènes

Sentiment d’Unité totale et parfaite. Complète immunisation contre les agents pathogènes.

 

 

Les relations avec l’espace

Sentiment d’Unité totale et parfaite. Tout l’Existant non terrestre est connu (il est non seulement connu mais peut être visité…).

 

 

Les relations avec les formes extraterrestres (non terrestres)

Sentiment d’Unité totale et parfaite. Posture d’accueil ou « d’indifférence bienveillante » selon les formes extra-terrestres (agressives ou non agressives) avec invulnérabilité en cas d’agression ou d’attaque.

 

 

Les relations avec les formes énergétiques immatérielles (les « morts » entre autres…)

Sentiment d’Unité totale et parfaite. Communication directe (comme avec toutes les autres formes).

 

 

L’impact général sur l’organisation des territoires entre toutes les formes

Généralisation d’une cohabitation harmonieuse et de liens respectueux.

 

 

Eh bien ! Nous voilà (enfin) arrivés au bout du bout (possible) de l’évolution de l’Existant et de l’existence terrestres… à ce qui pourrait bien constituer l’ultime étape pour les formes et les individus de notre « petite planète », perdue (rappelons-le) au milieu du cosmos… La suite demeure trop hypothétique et inimaginable pour tenter d’en livrer, ne serait-ce, qu’une infime représentation…

 

 

Remarque subsidiaire : il est frappant de constater, à la lecture de ces chapitres, à quel point transparaissent, au fil des pages, outre les tics stylistiques et langagiers* de l’auteur, sa formation universitaire « initiale », sa fâcheuse (et inconsciente) propension à l’ethnocentrisme et sa tendance au « contemporanéisme »… éléments qui, espérons-le, n’auront pas (trop) biaisé la validité (supposée) et la légitimité (possible) de cette perspective et n’auront pas influé, de façon trop directe et grossière, sur l’évolution factuelle des formes terrestres, exposée dans cette réflexion…

* Se référer au paragraphe liminaire de cette analyse.

 

Après cette longue (très très longue) analyse chronologique (relativement « apparente » et superficielle*) de l’Existant terrestre que nous avons déroulée aussi loin et aussi largement que possible…, il convient à présent de l’affiner et de l’approfondir (du moins de nous y essayer…)...

* Nous pourrions dire que cette réflexion s’est déroulée jusqu’à présent (et pour l’essentiel) à hauteur d’Homme… nous sommes, en effet, restés (à bien des égards) à la surface « des choses »…

 

5 décembre 2017

Carnet n°66 La conscience et l'Existant - Chapitre 7

Essai / 2015 / L'exploration de l'être

La Vie et l’Existant ne semblent, en réalité, qu’un gigantesque jeu — violent et merveilleux — et une permanente célébration… A hauteur d’Homme, peut-être pourrions-nous penser que nous nous apprenons les uns les autres (et, bien souvent, à notre insu) à mieux les regarder et à mieux les vivre. A mieux les comprendre et à mieux les aimer… mais sur le plan de la Conscience, tout ce « cirque » — aimable ou corrosif — semble (presque) sans importance… Est-ce qui est… et ce qui est n’altère jamais Le Regard…

 

Nous avons été contraints (pour des raisons d'ordre technique) de diviser la version numérique de cet ouvrage en dix parties.

Sommaire

Chapitre introductif

Chapitres 1 à 5

Chapitre 6 (début)

Chapitre 6 (suite)

Chapitre 6 (suite et fin)

 

 

Chapitre 7 L’HISTOIRE DU MONDE ET SON EVOLUTION POSSIBLE

SOCIETES, ORGANISATIONS, INDIVIDUS ET RAPPORTS A L’EXISTANT

(des premiers Hommes au monde à très long terme)

 

Après ce long (très long) exposé des créations et des réalisations humaines (actions, fabrications, inventions, représentations et compréhension…), il semble judicieux de les rassembler et de les mettre en perspective à travers les différentes périodes de l’histoire des Hommes comme à travers celles qui marqueront, peut-être, leur avenir (et celui de leurs — éventuels — successeurs)…

 

Il ne s’agira pas, ici, de retracer « toute l’histoire » de l’humanité mais de donner un bref aperçu, au cours des siècles, de l’évolution des sociétés et de mettre en évidence les orientations qu’elles pourraient prendre au cours des années et des siècles* à venir, de dresser un portrait (forcément « truffé » de généralités) de l’individu médian (représentatif de la société et de son époque) et d’exposer les rapports que les individus entretenaient, entretiennent et pourraient entretenir — sur les plans individuel et collectif — avec l’Existant.

* Décennies, siècles ou millénaires… Qui peut savoir ?

 

 

QUELQUES PRECISIONS

Nous avons déjà abordé ces questions et ces thématiques de façon éparse (par grand type de besoin). Il y aura donc un certain nombre de répétitions et de redites(1)… Nous nous proposons simplement, ici, d’en réaliser une synthèse pour chaque grande période historique. A ce titre, ce chapitre pourrait être considéré (à bien des égards) comme un récapitulatif « longitudinal » de l’organisation sociétale et des réponses collectives aux besoins individuels au fil des siècles… Mais nous y développerons également de nombreux thèmes jusqu’ici non évoqués… en particulier, nous mettrons en évidence la « logique évolutive » des sociétés et l’imbrication « cohérente » des différents éléments sociétaux au cours de l’histoire sans oublier, évidemment, quelques « surprises » quant à leurs perspectives(2) à moyen, long et très long termes…

(1) Nous en sommes désolés mais il nous a été difficile, dans cette analyse et cette perspective, d’élaborer une structure en mesure d'exposer les caractéristiques majeures de l’Existant, à la fois de façon (relativement) statique et de façon dynamique (ou évolutive), sans avoir recours à certaines redondances…

(2) « Surprises » qui, à nos yeux, méritent le « détour » en dépit de quelques répétitions, de la densité et de la longueur de cet (interminable) chapitre…

 

Ainsi, nous exposerons à grands traits les principales caractéristiques des sociétés, leur mode d’organisation politique, judiciaire et économique et les rapports qu’elles entretenaient, entretiennent et pourraient entretenir entre elles au fil de l’histoire (passée et à venir) ainsi que leur organisation territoriale et « la façon » dont elles répondent à l'ensemble des besoins individuels.

 

Après ce panorama sociétal, nous établirons, pour chaque période historique, un portrait général de l’individu représentatif de la société avant d’exposer ses relations avec les principales formes de l’Existant (avec ses congénères mais également avec les animaux, les végétaux, les minéraux, l’environnement, les agents pathogènes, l’espace, d’éventuelles formes extra-terrestres et les formes énergétiques immatérielles) ainsi que leur impact général sur l’organisation des territoires*.

* Entre l’ensemble des formes terrestres.

 

Bien qu’il conviendrait d’effectuer une distinction entre les différents types de sociétés et d’individus au fil de l’histoire terrestre (toutes les sociétés et tous les individus n’ont pas connu, ne connaissent pas et ne connaîtront pas de telles évolutions), nous pouvons néanmoins dire que le monde, les sociétés, les individus et leurs rapports à l’Existant ont globalement évolué ainsi et pourraient, à l’avenir, s’inscrire dans la perspective que nous allons exposer ici...

 

 

LES DEBUTS DE L'HUMANITE

 

Les premières sociétés humaines

 

Quelques généralités

On ne dispose que de rares éléments sur les origines des premiers Hommes* et leurs lieux d’implantation* mais on peut imaginer (à tort ou à raison) que les premiers Hommes étaient, plus ou moins, disséminés sur quantité de régions terrestres et que chaque groupe et chaque communauté vivaient en des lieux assez éloignés les uns des autres.

* A ce sujet, les paléontologistes et autres paléoanthropologues ont, semble-t-il, élaboré différentes hypothèses. Les uns s’accordent sur l'origine africaine de « l'Homme moderne » alors que d’autres souscrivent à l'origine multirégionale. Quant à la classification (la systématique) des hominidés, les discussions ne parviennent guère à déterminer avec clarté la « source originelle » de l’Homo sapiens parmi les différentes « espèces humaines » du genre homo (Homo ergaster, Homo habilis, Néanderthal, Cro-magnon etc etc)…

 

L’organisation des premières sociétés humaines était probablement éminemment simpliste et élémentaire. Chacun devait sûrement participer de façon « naturelle et spontanée » à l’essentiel des tâches. Sans doute qu’un « chef » au charisme naturel (peut-être l’individu le plus fort physiquement et/ou le plus « rusé » et/ou le plus « intelligent ») installait son autorité sur la communauté, impulsant les « grandes orientations », décidant (seul et/ou de façon plus ou moins collégiale) des lieux d’implantation, de la répartition des tâches au sein du groupe, des troupeaux à chasser et était amené à « régler » les inévitables différends et conflits relationnels…

 

En dépit d’un manque patent d’informations concernant les premières sociétés humaines, essayons de dresser sommairement les caractéristiques générales de leur organisation « sociétale ».

 

 

Organisation sociétale générale

De façon synthétique, nous pourrions dire que « l’organisation politique et judiciaire » devait sans doute se cantonner à « l’autorité naturelle » d’un et/ou de plusieurs individu(s) institué(s) « chef(s) » de clan chargé(s) « d’établir » des « règles » et des sanctions laissées à sa (ou leur) « clairvoyance » et à sa (ou leur) libre « appréciation » et/ou à la « vindicte populaire ».

 

En matière « d’organisation économique » (si l’on peut dire…), les principales activités devaient sans doute se cantonner à la chasse (et/ou à la pêche), à la cueillette et à l’organisation sommaire du lieu de vie. Et le travail était probablement organisé en fonction de la force physique et du degré de « témérité » des individus. Ainsi, les individus mâles devaient probablement prendre en charge la chasse et la protection du groupe et les individus femelles s’occuper du lieu de vie, des enfants et éventuellement de la cueillette (instituant ainsi, pour de longs siècles, une division du travail selon le genre – toujours d’actualité aujourd’hui dans la plupart des contrées du monde…). Les individus étaient sans doute amenés à consommer et à « partager » les « produits » de la chasse (et/ou de la pêche) et de la cueillette, peut-être (comme chez les animaux grégaires), en fonction de leur « rang hiérarchique ». Et les « transactions » devaient probablement se restreindre aux échanges interindividuels au sein de la communauté (peut-être, par exemple, des aliments offerts entre l’homme et la femme, entre les parents et les enfants…). Le paiement dans les premières sociétés humaines n’était évidemment pas monétaire… Et les « arrangements » et « menus services » entre les individus devaient sans doute constituer une sorte de « mode de paiement ».

 

Les communautés étaient sans doute, plus ou moins, contraintes à une forme de nomadisme et/ou de semi nomadisme au gré des migrations des troupeaux et des répercussions climatiques sur la flore et n’entretenaient probablement que très peu de liens avec « l’extérieur » en dépit (sans doute) de quelques échauffourées, intimidations et conflits (et, peut-être même, des exterminations) en vue de s’approprier les territoires et d’assurer leur domination sur les communautés voisines et/ou les « clans » adverses...

 

 

Le portrait de l’individu médian (représentatif de la société)

Le « premier Homme » était sans doute un individu au psychisme élémentaire (avec une quasi absence de représentations mentales et de désirs), marqué par la peur (au vu de sa nature « chétive », de son « ignorance » du monde et de la dangerosité — très probable — de son environnement) qui consacrait l’essentiel de son temps à chasser et à « cueillir des baies » pour survivre. Outre la chasse et la cueillette, ses principales activités devaient sans doute consister à manger, à dormir, à se reposer (et, éventuellement, à « monter la garde »). Il devait probablement avoir des comportements d’accaparement et de favorisation de l’intérêt personnel très marqués et entretenir des rapports de domination et d’instrumentalisation violents avec les autres individus et à l’égard des autres formes (animales et végétales). Sa compréhension et à sa perception sensible étaient sans doute quasiment nulles, éminemment grossières, élémentaires et superficielles.

 

 

Les rapports à l’Existant

 

Les relations avec les congénères

Au temps des premières Hommes, les relations humaines étaient sans doute fortement marquées par la favorisation de l’intérêt personnel et les stratégies d’entente avec rapports de force, de domination et d’instrumentalisation, avec violence et agressions physiques et une profonde dichotomie entre les individus de la sphère personnelle (essentiellement familiale et/ou clanique et/ou communautaire) et les autres individus (agression, fuite et/ou indifférence).

 

 

Les relations avec les animaux

Chasse (pêche) et cohabitation plus ou moins dominatrice.

 

 

Les relations avec les végétaux

Cueillette, infimes destructions et menus prélèvements pour créer d’éventuelles zones d’habitat (puis, plus tardivement, utilisation des végétaux comme combustibles).

 

 

Les relations avec les minéraux

Inexistantes. Ou prélèvements infimes (outils, armes et éventuellement ornements – silex)

 

 

Les relations avec l’environnement (au sens large) eau, air, terre

Utilisation « utilitariste » sans conséquence.

 

 

Les relations avec les agents pathogènes

Impuissance totale face aux bactéries.

 

 

Les relations avec l’espace

Inexistantes.

 

 

Les relations avec les formes extraterrestres (non terrestres)

Inexistantes.

 

 

Les relations avec les formes énergétiques immatérielles (les « morts » entre autres…)

Inexistantes, puis (sans doute) très vite, premiers rites funéraires*.

* Il semblerait que l’Homme de Neandertal soit l’un des premiers à enterrer « ses » morts…

 

 

L’impact général sur l’organisation des territoires entre toutes les formes

Avant l’avènement de l’Homme, les végétaux et les animaux et, plus généralement, la matière et le Vivant ont évolué selon leur rythme propre (impulsé naturellement par le « système physique » et la Vie — le « système biologique »). Et en dépit de quelques bouleversements majeurs (comme par exemple, la disparition des dinosaures), les écosystèmes se régulaient spontanément incitant les différentes formes végétales et animales à adopter des stratégies de survie (ententes et luttes) pour se nourrir et se répartir sur l’ensemble des territoires. Et, au début de l’humanité, l’Homme n’était alors sans doute, ni plus ni moins, qu’un élément (parmi tant d’autres) de ce gigantesque écosystème. Et l’on peut penser que les premiers Hommes, les animaux et les végétaux cohabitaient sur un même territoire au sein duquel les êtres humains devaient exercer leur fonction de prédateur, en étant, eux-mêmes, victimes d’agressions et de la prédation d’animaux plus puissants.

 

 

 

LE MONDE « PRIMITIF »

 

Les sociétés « primitives » et « traditionnelles »

 

Quelques généralités

En ces temps ancestraux, nous pouvons imaginer que les premières sociétés humaines (les premiers regroupements humains), composées – peut-être – de quelques familles, ont vu croître très progressivement le nombre de leurs membres (selon l’abondance des ressources alimentaires et la fréquence et la virulence des épidémies(1)). Nous ne pouvons pas exclure non plus que certaines aient pu « s’associer » à d’autres tribus ou communautés et/ou aient été amenées (naturellement) à élargir leur territoire(2).

(1) Qui devaient probablement décimer une quantité considérable d’individus…

(2) Au fil de l’accroissement du nombre d’individus…

 

Ces « nouveaux » paramètres les ont peut-être invitées ou « contraintes » à s’organiser (plus ou moins) et à édifier une structure communautaire « plus formelle ». Ainsi, peut-être se sont (progressivement) transformées les premières sociétés humaines pour donner naissance aux sociétés primitives et traditionnelles…

 

En dépit de la (probable) diversité des sociétés traditionnelles, essayons d’exposer, ici, leurs principales caractéristiques en matière d’organisation sociétale.

 

 

L’organisation sociétale générale

En matière d’organisation politique (et de mode de gouvernance), il y a fort à parier que l’autorité dans les sociétés primitives et traditionnelles pouvait (et peut pour celles — de plus en plus rares — qui subsistent aujourd’hui*) prendre plusieurs formes : individuelle (avec un « chef » de clan ou de village plus ou moins autoproclamé et/ou plus ou moins « poussé » et soutenu par les membres de la communauté) ou collégiale (avec, en général, les individus les plus « aptes » à exercer une autorité : les « anciens » et/ou les « meneurs d’hommes naturels »). La durée du « mandat » était probablement très variable avec l’existence (éventuelle) de lignée(s) familiale(s) « au pouvoir ». Les décisions engageaient sans doute l’ensemble de la communauté et l’ensemble des individus et fixaient vraisemblablement les grandes règles de la vie communautaire (organisation des travaux collectifs, relations interindividuelles, relations « maritales », conflits, rites mortuaires, rites de passage à l’« âge adulte » etc etc).

* Nous n’utiliserons, dans ce paragraphe, que « l’imparfait » mais, si cela vous agrée, vous pouvez conjuguer tous les verbes au « présent » pour obtenir une description des sociétés primitives ou traditionnelles contemporaines.

 

L’organisation judiciaire (et policière) se limitait probablement à quelques « règles » et sanctions laissées à « l’appréciation » et à la « clairvoyance » du ou des chef(s) de clan(s) et/ou à la « vindicte populaire » ou instaurées par un « conseil communautaire », plus ou moins démocratique ou autocratique.

 

La production demeurait essentiellement communautaire et agricole avec quelques « spécialités artisanales » (avec, par exemple, la fabrication d’instruments de chasse, d’armes, d’objets utilitaires, de vêtements, de parures de cérémonie etc etc). Les individus consommaient ce qu’ils produisaient et/ou ce que la communauté produisait (de nos jours, il est possible que certaines sociétés traditionnelles aient établi une sorte de magasin-épicerie et participent à des marchés locaux, plus ou moins spécialisés, et à des foires d’envergure régionale et/ou « nationale » de façon relativement ponctuelle). Il n'y avait probablement pas ou peu d’échange(s) (essentiellement à base de troc) puis, avec la création de la monnaie (coquillages, graines, pierres, pièces, étoffes et aujourd’hui, sans doute, les billets de banque), des échanges « économiques » plus élaborés ont pu se développer. Quant au travail, il se cantonnait, outre à l’organisation sommaire du lieu de vie, à la chasse (ou à la pêche) et/ou au nourrissage des animaux d’élevage et aux travaux agricoles familiaux et/ou communautaires longs, pénibles et sans rémunération (les individus travaillant et participant à la production familiale ou communautaire pour avoir « le droit » de manger).

 

Les sociétés traditionnelles entretenaient vraisemblablement (selon la densité démographique du territoire et les configurations topographiques) peu de liens avec « l’extérieur ». Les relations étaient sans doute principalement constituées, selon le degré d’agressivité des communautés, d’échanges et de conflits territoriaux plus ou moins violents. Les individus devaient probablement être sédentaires ou contraints au semi nomadisme et les sociétés étaient (sans doute) relativement distantes les unes des autres (avec une quasi absence de flux « migratoires » – même s’il est possible, au fil de l’histoire, que certains territoires aient pu connaître une forme d’expansion – avec la naissance progressive de bourgades, voire de petites villes).

 

Après ce bref panorama, tâchons d’exposer les principales caractéristiques des sociétés primitives et traditionnelles en matière d’organisation de la satisfaction des besoins organiques, matériels et psychiques élémentaires.

 

 

L’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence

Sur le plan agricole, l’équation était sans doute relativement simple (mais pas toujours aisée à résoudre…) : cueillette et chasse et/ou cultures traditionnelles sur quelques arpents de terre et petits élevages offraient probablement (tant bien que mal…) la nourriture nécessaire.

 

En matière sanitaire, l’hygiène était sans doute très élémentaire et les individus devaient probablement en cas de maladie (ou de problèmes divers) se tourner vers le guérisseur (le sorcier et/ou le chamane), doté du savoir « des plantes, de la forêt et des esprits »… On buvait l’eau de la rivière (de mares ou de puits naturels), on enfouissait ses excréments dans la terre et on s’habillait de peaux de bête et/ou de vêtements rudimentaires en fibres végétales.

 

L’habitat était sans doute, lui aussi, relativement sommaire : grottes, huttes, abris plus ou moins élaborés et l'on cuisinait (et cuisait) les aliments au feu (feu de bois ou combustion avec des excréments d’animaux).

 

Les déplacements s’effectuaient à pied (parfois peut-être utilisait-on la locomotion animale…). On se battait (pour attaquer ou se défendre) à coups de poings, à coups de pieds, avec des bâtons, des couteaux, des lances et divers instruments. Pour se protéger, on « montait la garde », érigeait de « vagues » clôtures (avec des branchages) et on comptait sur la vigilance des chiens.

 

On se reproduisait de la façon naturelle (la plus naturelle qui soit...), et l’on devait sans doute, en cas de conflits au sein de la communauté, organiser des « réunions communautaires » pour « mettre sur la table » les griefs et les doléances des uns et des autres afin de rétablir (ou essayer de rétablir) des liens pacifiques et harmonieux (autant que possible) entre les individus.

 

On naissait dans la communauté. On apprenait dans et grâce à la communauté. On se rencontrait et échangeait dans la communauté. On vivait et travaillait dans la communauté, on mangeait dans la communauté, on s’accouplait, dormait et s’amusait dans la communauté. On écoutait « les anciens » raconter l’histoire de la communauté. Et l'on y mourrait sûrement. Vie simple et élémentaire mais néanmoins rude et difficile que certains ont, sans doute, quelque peu idéalisée au fil des siècles en l'assimilant à une sorte de « paradis perdu » (avec, entre autres exemples, le mythe « du bon sauvage »)…

 

 

Le portrait de l’individu médian (représentatif de la société)

L’individu médian des sociétés « primitives » ou traditionnelles consacrait sans doute l’essentiel de son temps à travailler la terre et/ou à chasser et/ou à « s’occuper » des animaux d’élevage pour assurer la satisfaction de ses besoins alimentaires.

 

Ses principales autres activités consistaient probablement à dormir, à manger, à s’occuper des tâches domestiques, à se reposer et à « participer » à la vie communautaire. Son savoir était excessivement élémentaire (essentiellement acquis par transmission familiale et communautaire, l’expérience et le mimétisme…) dans la mesure où la scolarité était (sans doute) inexistante. Sa compréhension et sa perception sensible devaient être infimes, très apparentes et très superficielles. Et il était probablement soumis (essentiellement) au psychisme, aux besoins de survie et aux « exigences » de la vie collective.

 

En matière relationnelle, les comportements d’accaparement, de favorisation de l’intérêt personnel et de valorisation narcissique (bien qu’en partie régulés par la prégnance de la vie communautaire) étaient puissants. Et il entretenait sans doute avec les autres individus (dans la sphère intime comme dans la sphère sociale) des rapports de domination et d’instrumentalisation plus ou moins violents... comme il entretenait (sans doute) à l’égard des autres formes (animales et végétales) et à l’égard de l’environnement (au sens large) des rapports de domination et d’instrumentalisation plus ou moins puissants et plus ou moins respectueux selon le système de croyances (en général, qualifiées d’animistes) et la cosmogonie en vigueur dans sa communauté.

 

 

Les rapports à l’Existant

 

Les relations avec les congénères (relations sociales et relations intimes)

Favorisation de l’intérêt personnel et stratégies d’entente avec rapports de force, de domination et d’instrumentalisation, avec violence et agressions physiques et une profonde dichotomie entre les individus de la sphère personnelle et les autres individus (agression et/ou indifférence).

 

 

Les relations avec les animaux

Chasse et cohabitation plus ou moins respectueuse et utilitariste.

 

 

Les relations avec les végétaux

Cueillette, menus prélèvements (santé, vêtements et combustibles) et infimes destructions pour créer des zones de culture (agriculture « traditionnelle ») et/ou d’habitat.

 

 

Les relations avec les minéraux

Faibles prélèvements sans conséquence.

 

 

Les relations avec l’environnement (au sens large) eau, air, terre

Utilisation avec un esprit de respect utilitariste et/ou mi révérenciel (selon le système de croyances animistes).

 

 

Les relations avec les agents pathogènes

Impuissance quasi-totale face aux bactéries (malgré les plantes médicinales).

 

 

Les relations avec l’espace

Inexistantes.

 

 

Les relations avec les formes extraterrestres (non terrestres)

Inexistantes.

 

 

Les relations avec les formes énergétiques immatérielles (les « morts » entre autres…)

Ignorance totale, développement et généralisation des rites et croyances (liés à la cosmogonie et aux représentations du monde en vigueur dans la communauté).

 

 

L’impact général sur l’organisation des territoires entre toutes les formes

La cohabitation des Hommes avec les autres espèces (essentiellement animales et végétales) était probablement violente et dominatrice mais n’engendrait globalement aucun impact majeur ni aucune destruction massive.

 

 

 

LE MONDE D'AVANT-HIER (de l’antiquité au 18ème siècle)

 

Cette période, à l’échelle de l’histoire humaine, est excessivement longue. Et il est évident que toutes les sociétés n’ont pas connu l’évolution que nous allons exposer ici… Il conviendrait pour « écrire une histoire » plus détaillée de distinguer les grands types de sociétés (voire les grandes civilisations) et d’établir, au sein du « monde d’avant-hier », des périodes historiques plus courtes…

 

Les sociétés d’avant-hier

 

Généralités

En dépit de ce « bémol », on peut néanmoins affirmer (plus ou moins sans conteste) que depuis les premières sociétés primitives jusqu’au 18ème siècle (voire jusqu’au 19ème et au 20ème siècles dans certaines régions du monde), la Terre était globalement parsemée d’une constellation de sociétés traditionnelles (plus ou moins peuplées et étendues), plutôt autocratiques de type (plus ou moins) tyrannique ou éclairé, qui entretenaient des rapports, plus ou moins, conflictuels ou pacifiques* et nouaient des échanges commerciaux (biens alimentaires et diverses marchandises) avec les communautés et/ou les sociétés voisines. Jusqu’à une date pas si lointaine, la plupart ignorait jusqu’à l’existence des autres… Beaucoup d’entre elles se sont progressivement regroupées. Regroupements qui ont posé, de façon plus ou moins graduelle, les linéaments de la future constitution des nations (les société-nations).

* Alternant peut-être les belligérances et les périodes de paix…

 

Autre point crucial : cette longue période historique a été émaillée de grandes sociétés guerrières, conquérantes et dominatrices qui ont créé d’immenses et prospères empires, pillant et s’accaparant les richesses et essayant de tenir sous leur joug de vastes territoires sans toujours disposer des moyens adéquats pour les homogénéiser et laissant (de facto) sur leur sol pléthore de sociétés traditionnelles vivre de façon plus ou moins autonome.

 

Et enfin, dernier point important : dans bon nombre de ces sociétés, les individus installés à la gouvernance ont appuyé la légitimité de leur pouvoir par un malhonnête tour de passe-passe : le « droit divin », instaurant ainsi une hégémonie durable et la perpétuation de longues lignées « prédestinées » au pouvoir (mode opératoire très répandu au sein des différentes royautés qui se sont instaurées, au cours de cette période, sur un grand nombre de territoires terrestres)…

 

Après ce très vague panorama*, essayons de dresser un portrait de la société représentative en matière d’organisation sociétale.

* Et en dépit de la très longue durée de cette période historique...

 

 

L’organisation sociétale générale

Au sein des sociétés d’avant-hier, l’organisation politique et le « mode de gouvernance » étaient généralement soumis à l’autorité d’un et/ou de plusieurs individus institué(s) selon les cas (et l’envergure du territoire) « seigneur(s) » ou « homme(s) d’Etat » autoproclamé(s) avec (bien souvent) une appropriation du pouvoir par la force (armée) et/ou avec une collusion entre le pouvoir (en général une royauté – issue de l’aristocratie) et le clergé (les représentants religieux) pour asseoir la « puissance divine » sur le plan terrestre ou parfois (peut-être) institué(s) par le peuple. Quant à l’organisation judiciaire (et policière), elle se cantonnait (bien souvent) à des « règles » et à des sanctions, de nature plus ou moins violente, laissées à « l’appréciation » et à « la clairvoyance » du « seigneur » ou de l’homme de loi qui avait « toute autorité » pour juger les Hommes (souvent un représentant du pouvoir politique ou très lié à lui) et/ou à la « vindicte populaire ».

 

En matière d’organisation économique (avec une économie encore très essentiellement agricole), cette période a vu progressivement émerger une quasi complète séparation entre les activités de production et le travail et la consommation ainsi que l’essor, dans les villes, des activités artisanales, des magasins de détails, des marchés locaux et des foires d’envergure régionale et/ou nationale (plus ou moins fréquentes), où les citadins pouvaient venir s’approvisionner et se ravitailler. Les échanges économiques se limitaient probablement aux échanges locaux et aux échanges avec les sociétés voisines. Mais, avec le développement des transports, les voyages et la colonisation, on a assisté à une très forte expansion du commerce sur un territoire plus large (naissance du commerce international) et à « des échanges » entre les pays colonisateurs et les pays colonisés (les premiers — le plus souvent – pillant et exploitant les richesses et les matières premières des seconds…). Les modes de paiement ont fait florès et on a vu un peu partout se développer la monnaie (pièces d’or et d’argent, billets, lettres de change…). Les échanges se sont ainsi très globalement monétarisés. Malgré l'efflorescence de l’artisanat et les prémices des tâches industrielles (en fin de période) dans certaines régions du monde — qui allèrent inaugurer la fameuse (et très prochaine) « révolution industrielle ») — le travail demeurait essentiellement agricole et, malgré une très lente et progressive mécanisation, conservait sa pénibilité et concernait toujours la très grande majorité des individus. Ainsi, en dépit de la croissance progressive des bourgades et des villes, de l’expansion des zones urbaines, des premiers grands exodes ruraux nationaux, la société restait profondément rurale.

 

Au cours de cette longue période ont également émergé les notions de nation et de pays (avec délimitation progressive et fluctuante des frontières) au gré des grandes explorations terrestres et maritimes (la découverte du monde), des premiers grands mouvements migratoires internationaux, des guerres, de l’essor du commerce, des grandes invasions, des croisades, des « conquêtes coloniales », des appropriations territoriales, des exterminations, du pillage des richesses et de la domination des peuples... Bref, une très longue époque historique marquée par un changement progressif et profond de la place de l’Homme sur Terre qui inaugurera (à bien des égards) l’entrée prochaine (et inéluctable) du monde dans l’ère anthropocène…

 

Après ce large et bref panorama, essayons de dessiner les principales caractéristiques des sociétés d’avant-hier en matière d’organisation de la satisfaction des besoins organiques, matériels et psychiques élémentaires.

 

 

L’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence

En matière agricole et alimentaire, l’agriculture et l’élevage demeuraient très largement traditionnels et extensifs. Et notons que la période connut de nombreuses disettes…

 

La médecine et l’hygiène connurent, quant à elles, des progrès assez tardifs malgré de nombreuses épidémies et la persistance de conditions d’existence rudimentaires (avec, par exemple, des bassins et des réserves d’eau toujours, plus ou moins, impropre à la consommation, l’enfouissement dans le sol des déjections humaines à la campagne et leur évacuation sur la voie publique dans les villes).

 

Les vêtements restaient globalement élémentaires et fabriqués de façon artisanale (excepté pour « les nantis » vêtus de soie, de broderie et d’autres étoffes rares et précieuses…). L’habitat demeurait rustique et sans confort. Et en dépit du développement des fours et des instruments de cuisson, le confort domestique était, lui aussi, sommaire (feu, puis poêles à bois et à charbon, lampes à huile, bougies pour l’éclairage). Et les tâches domestiques (activités exercées essentiellement par les femmes) se réalisaient à la main et avec de « simples » ustensiles (manuels).

 

Malgré l'essor des modes de navigation maritime, les transports usuels se limitaient (le plus souvent) à la marche et (dans le meilleur des cas) à la locomotion animale (en général) tractée.

 

On a assisté, au fil des siècles, au développement (puis à la généralisation) des lois, des règlements et des sanctions en cas d’infraction (prison, peine de mort) et à l’émergence des forces de l’ordre (publiques et privées).

 

L’existence des Hommes d’autrefois était essentiellement consacrée à la survie et au travail. Les relations se nouaient essentiellement dans la sphère communautaire (au sens large) et demeuraient conditionnées par le « rang social » des individus. Les Eglises (toutes chapelles confondues) avaient (en général) « autorité » autant sur les âmes que sur les Hommes… Quant à « l’instruction » et aux savoirs, ils étaient réservés à l’« élite sociale » et restaient inaccessibles à l’essentiel de la population. Bref, il ne serait pas (totalement) exagéré de dire que les Hommes d'avant-hier était voués (très souvent) à une vie de labeur, de croyances, de coups et de misères (diverses)…

 

 

Le portrait de l’individu médian (représentatif de la société)

L’individu médian d’avant-hier consacrait sans doute l’essentiel de son temps à travailler la terre pour assurer la satisfaction de ses besoins alimentaires. Ses principales autres activités consistaient à dormir, à manger, à s’occuper des tâches domestiques (et, accessoirement, des diverses charges et obligations de la vie familiale et/ou sociale) et à se reposer.

 

Son savoir était éminemment basique (essentiellement acquis par transmission familiale, l’expérience et le mimétisme…) puisque la scolarité (en général) était réservée à une minorité. Sa compréhension et sa perception sensible étaient excessivement grossières, apparentes et superficielles. Et il demeurait essentiellement soumis au psychisme et aux besoins de survie.

 

En matière relationnelle, les comportements d’accaparement, de favorisation de l’intérêt personnel et de valorisation narcissique (bien qu’en partie régulés par la prégnance de la vie communautaire et/ou villageoise) étaient absolument décisifs. Et il entretenait (sans doute) avec les autres individus (dans la sphère intime comme dans la sphère sociale) des rapports de domination et d’instrumentalisation et des rapports de domination et d’instrumentalisation de plus en plus puissants et de moins en moins respectueux à l’égard des autres formes (animales et végétales) et à l’égard de l’environnement (au sens large).

 

 

Les rapports à l’Existant

 

Les relations avec les congénères (relations sociales et relations intimes)

Favorisation de l’intérêt personnel et stratégies d’entente avec rapports de force, de domination et d’instrumentalisation, avec une très lente et progressive diminution de la violence et des agressions physiques mais avec la persistance d’une profonde dichotomie entre les individus de la sphère personnelle et les autres individus (agression et/ou indifférence).

 

 

Les relations avec les animaux

Réification, instrumentalisation et extermination de nombreuses espèces animales.

 

 

Les relations avec les végétaux

Sélection génétique pour la végétation comestible. Et destruction de la flore sauvage pour créer des zones arables et des zones urbaines.

 

 

Les relations avec les minéraux

Développement de l’exploitation des minerais.

 

 

Les relations avec l’environnement (au sens large) eau, air, terre

Emergence des premières formes de pollution liées à l’activité humaine. Soulignons que l’on a assisté, sur le plan matériel, au développement faramineux des fabrications synthétiques* (qui regroupaient l’essentiel des fabrications humaines) ;

* Et qui ne cesseront, à l’avenir, d’être toujours plus nombreuses (voire envahissantes)...

 

 

Les relations avec les agents pathogènes

Lutte peu efficace contre les agents pathogènes (en dépit des progrès de la science médicale).

 

 

Les relations avec l’espace

Inexistantes (malgré le développement des calculs et des « travaux » astronomiques).

 

 

Les relations avec les formes extraterrestres (non terrestres)

Inexistantes.

 

 

Les relations avec les formes énergétiques immatérielles (les « morts » entre autres…)

Rites et croyances (influence majeure des religions « officielles » instituées sur le territoire).

 

 

L’impact général sur l’organisation des territoires entre toutes les formes

Développement et forte expansion des sociétés humaines. Cohabitation dominatrice de l’Homme avec les autres espèces (essentiellement animales et végétales) mais sans impact majeur hormis, évidemment, les nombreux massacres et exterminations d’espèces animales, leur réification et leur instrumentalisation (chasse, élevage et domestication). Mais en dépit d’une domination humaine de plus en plus vive sur les autres formes, nous pouvons dire que les sociétés humaines d’avant-hier et les mondes végétal et animal coexistaient sur un même territoire où l’Homme exerçait presque « sans trop de dégâts » sa fonction de super prédateur…

 

 

 

LE MONDE D'HIER (du 18ème à la fin du 20ème siècle)

 

Les sociétés d’hier

 

Généralités

Cette période a été marquée par la cohabitation de plusieurs types de sociétés qui ont entretenu, au cours de ces quelques siècles, des rapports de force plus ou moins conflictuels…

 

- des sociétés autocratiques (plus ou moins) « éclairées » qui se sont transformées, au fil de l’histoire, en sociétés démocratiques ;

 

- des sociétés autocratiques tyranniques (avec despote) dont une partie s’est orientée vers le communisme (au début du 20ème siècle) puis, avec son effondrement (à la fin du 20ème siècle), la plupart se sont tournées vers le modèle démocratique et quelques-unes ont préservé un modèle autocratique (vaguement démocratique) ;

 

- des sociétés traditionnelles qui ont fini par se raréfier en intégrant (de façon plus ou moins contrainte) le modèle sociétal en vigueur sur le territoire qu’elles occupaient ;

 

- des sociétés théocratiques.

 

 

Cette période (et, plus exactement, la fin de cette période) a également été marquée par de nombreux bouleversements (dont les principaux sont) :

 

- la désertification des campagnes* ;

 

- le recul très net du nombre d’agriculteurs*;

 

- la « révolution industrielle*» (qui a permis de répondre quantitativement aux besoins des populations) ;

* Dans les pays les plus « développés » sur le plan économique.

 

- l’essor massif des villes et l’émergence des grandes mégalopoles;

 

- l’émergence désastreuse (et sans doute prématurée) d’un modèle sociétal collectiviste « égalitaire » (le communisme) qui a scindé (pendant une large partie du 20ème siècle) le monde en deux (les partisans du modèle sociétal capitaliste et les partisans du modèle sociétal communiste s’opposant en une « guerre froide »…) puis, en trois, avec l’émergence progressive d’un troisième mouvement, regroupant les pays dits du tiers monde* « délaissés » par « la révolution industrielle » et la marche — et les fruits — du progrès…) ;

* Terme « inventé », semble-t-il, par Alfred Sauvy pour désigner les pays n’appartenant ni au monde occidental ni au « bloc communiste ».

 

- deux conflits mondiaux et plusieurs génocides de grande ampleur (qui ont marqué les esprits et permis l’émergence de la paix entre les peuples dans les parties du monde affectées par ces guerres…) ;

 

- l’indépendance des pays sous domination coloniale (une partie des pays dits du tiers monde) avec plus ou moins de résistance, de heurts, de violences et de conflits ;

 

- la prépondérance et la relative généralisation du modèle sociétal capitaliste et démocratique, fondé sur la liberté individuelle, l’individualisme, la capitalisme, le productivisme et le consumérisme (modèle réactif à deux éléments majeurs : d’une part, l’asservissement général et la domination des autorités gouvernantes qu’ont, à peu près, toujours connus les populations et d’autre part, l’économie de pénurie (voire de disette) et les conditions d’existence et la qualité de vie relativement médiocres qui ont toujours été leur lot…).

 

Après ce succinct (et très général) panorama, tentons de dresser un portrait de la société représentative du « monde d’hier » en matière d’organisation sociétale.

 

 

L’organisation sociétale générale

En matière d’organisation politique (et de mode de gouvernance), on a assisté progressivement, sur un grand nombre de territoires terrestres, à une séparation du pouvoir exécutif (dont le rôle, rappelons-le, est de gouverner, de « décider » et d’impulser les grandes orientations), du pouvoir législatif (dont la fonction principale est de voter les lois) et du pouvoir judiciaire (auquel on attribue, en général, leur application). Au fil des siècles, les élections des représentants du peuple et le multipartisme se sont globalement généralisés (allant de la « mascarade propagandiste » dans les pays autocratiques ou despotiques aux élections « libres » dans les sociétés démocratiques selon différents, et plus ou moins appropriés, modes de scrutin…).

 

En matière d’organisation judiciaire (et policière), les sociétés d’hier ont mis en place différents codes (civil, pénal, administratif etc) et institué une généralisation du droit dans tous les secteurs et domaines de la société avec une (plus ou moins) grande indépendance des forces de l’ordre (police), du système judiciaire et des juges à l’égard du pouvoir exécutif et ont permis l’éclosion (puis la généralisation) des droits de la défense (pour les individus arrêtés et jugés qui pouvaient dès lors être « défendus » par un avocat). Dans (à peu près) toutes les régions du monde, le système judiciaire s’est sophistiqué et complexifié en instituant des forces de police « spécialisées », des magistrats, des juges d’instruction, des parquets, des tribunaux (eux aussi) « spécialisés » et a (plus ou moins) favorisé une certaine forme de diversification des peines comme une certaine forme de « clémence pénale » (au regard des règles de justice iniques des périodes passées…).

 

En matière d’organisation économique, les entreprises et les intermédiaires se sont multipliés dans le processus de production* de biens et les grandes firmes et les entreprises multinationales se sont très largement développées. Sur le plan de la consommation, on a également assisté à la multiplication des intermédiaires et des points de vente (centrales d’achats, grossistes, magasins de détail, supérettes, supermarchés, hypermarchés, centres commerciaux, grandes enseignes et chaînes de distribution etc etc). Les échanges se sont très fortement mondialisés. Les modes de paiement ont profondément évolué et se sont diversifiés (monnaie fiduciaire, chèques, cartes de crédit, émergence des paiements immatériels…). Et le système monétaire et financier est devenu totalement prépondérant (marchés des taux d’intérêt, places boursières, marchés spéculatifs…) pour progressivement « se détacher » de l’économie réelle. Quant à l’organisation du travail, elle aussi, a connu de profonds bouleversements : forte mécanisation des travaux agricoles, généralisation du travail industriel (pénible et à la chaîne), expansion des services (le secteur tertiaire) et création de quantité de nouveaux types d’emploi. Notons également que la période a connu, au cours du 20ème siècle, quelques grandes crises économiques sans précèdent qui ont perturbé l’idéologie de « la croissance et du plein emploi »… et ont obligé les sociétés et les Etats à jongler avec différents (et toujours plus complexes) instruments de politiques budgétaire et monétaire…

* Qui s’est, lui aussi, très largement complexifié et a permis la création de toujours plus de « valeur ajoutée »…

 

Sur le plan international, on a assisté à la naissance et à la (plus ou moins grande) généralisation du droit international. A ce titre, des organisations internationales (SDN, ONU, FMI, OMC(1) etc etc) ont été créées afin d'établir (de façon plus ou moins « heureuse » et efficace…) une harmonisation mondiale dans à peu près tous les secteurs et toutes les activités humaines : droits de l’Homme, commerce, organisation politique, paix entre les peuples etc etc. Les frontières nationales ont été plus ou moins (définitivement(2)) établies. Et après la montée en puissance de la colonisation, deux conflits mondiaux qui ont marqué les esprits et en dépit de l’existence de poches de résistance (plus ou moins nombreuses) où la guerre continuait à sévir, on a assisté à un progressif et tardif déclin des conflits armés au profit d’un « droit à l’indépendance » des nations et à une très progressive (et fragile) paix entre les peuples qui ont favorisé de grands mouvements migratoires internationaux (en particulier, une migration conséquente des populations des pays dits « en voie de développement » et/ou des anciens territoires « colonisés » vers les pays dits « développés »). Notons enfin qu’au sein des territoires nationaux (en particulier, dans les pays « riches »), la période a été marquée par un très fort exode rural et le développement des grandes villes (désertification des campagnes, hyper croissance des zones urbaines et émergence des grandes mégalopoles urbaines).

(1) Société Des Nations, Organisation des Nations Unies, Fonds Monétaire International, Organisation Mondiale du Commerce…

(2) En matière historique, tout est, évidemment, (toujours) provisoire…

 

Après ce rapide panorama de l’organisation générale des sociétés d’hier, essayons de dessiner leurs principales caractéristiques en matière de conditions de vie et d’organisation de la satisfaction des besoins organiques, matériels et psychiques élémentaires.

 

 

L’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence

Les sociétés d’hier ont connu, en matière agricole, de très profondes et très nombreuses transformations. L’agriculture et l’élevage sont devenus globalement intensifs, mécanisés et grands consommateurs d’engrais chimiques (avec un accroissement considérable de la production et de la productivité).

 

Au cours de cette période, les sciences médicale et psychiatrique ont permis de fulgurants progrès avec le développement des spécialités médicales, de la dentisterie « moderne », de la pharmacie allopathique et des appareillages médicaux électroniques (en particulier au 20ème siècle). En matière d’hygiène, on a également assisté à de formidables avancées avec l’assainissement des bassins et des réserves d’eau potable, la généralisation des canalisations d’eau potable (avec plusieurs points d’accès dans chaque foyer), la généralisation des toilettes, des fosses septiques et des égouts.

 

Sur le plan de l’habillement, la fabrication des vêtements est devenue (comme dans la très grande majorité des domaines) industrielle (avec des fibres naturelles sophistiquées et le développement des fibres synthétiques). L’habitat s’est substantiellement transformé avec les immeubles, les buildings, les maisons et les villas. Le confort domestique s’est généralisé avec le développement des appareils et des ustensiles robotiques, les machines à laver et les appareils électroménagers. Les poêles à bois et à charbon ont progressivement cédé la place au gaz et à l’électricité (pour l’éclairage et le chauffage).

 

Les transports ont explosé (en partie, grâce au raffinage du pétrole et aux réseaux électriques). Les trains firent leur apparition, puis se généralisèrent (métros, trains de proximité, grandes lignes ferroviaires nationales et transcontinentales, trains à grande vitesse…). Les véhicules automobiles individuels, les véhicules de transport de marchandises (camions, semi-remorques), les deux-roues motorisés, les modes de transports maritime et aérien firent florès un peu partout au point de constituer des modes de transport vitaux dans la circulation quotidienne des personnes et des marchandises. Les longs trajets et les voyages se démocratisèrent.

 

En matière de communication, les progrès furent, eux aussi, très importants avec la généralisation du téléphone, de la radio et de la télévision sans compter l’efflorescence de la presse écrite, radiophonique et télévisée… Les loisirs ne cessèrent de se développer et de se diversifier. L’école s’institutionnalisa et la scolarité devint obligatoire dans de nombreuses contrées.

 

Bref, il ne serait pas exagéré de dire que l’époque donna naissance à un nouveau monde… où les progrès techniques et technologiques devinrent légions et les garants d’une vie meilleure… inaugurant une « merveilleuse » période d’euphorie matérialiste qui marqua les esprits (après des millénaires de restriction et de misère « matérielle ») en creusant le sillon des « dérives consuméristes » des décennies à venir…

 

 

Le portrait de l’individu médian (représentatif de la société)

L’individu médian d’hier consacrait l’essentiel de son temps à travailler pour obtenir un revenu (salaire) qui lui permettait d’assurer la satisfaction de ses besoins physiques, matériels et psychiques élémentaires (essentiellement l’alimentation et le logement…).

 

Ses principales autres activités consistaient à dormir, à manger, à s’occuper des tâches domestiques (et, accessoirement, des diverses charges et obligations de la vie familiale et/ou sociale), à se reposer et à se distraire (avec une augmentation progressive et conséquente du temps consacré aux loisirs, induite par la généralisation des jours de repos hebdomadaires et, dans certaines contrées, la diminution très progressive du temps de travail et la « naissance » des congés payés).

 

Son savoir demeurait élémentaire (acquis au cours d’une scolarité — en général — relativement courte). Quant à sa compréhension et à sa perception sensible, elles étaient éminemment grossières, apparentes et superficielles. L’individu d’hier restait essentiellement soumis au psychisme, aux désirs et à la recherche (de plus en plus effrénée) de plaisirs au regard du progrès et des nouvelles possibilités offertes par la technique…

 

En matière relationnelle, les comportements d’accaparement, de favorisation de l’intérêt personnel et de valorisation narcissique (bien qu’en partie régulés par la société) étaient déterminants. Et il entretenait avec les autres individus (dans la sphère intime comme dans la sphère sociale) des rapports de domination et d’instrumentalisation plus ou moins déguisés et des rapports de domination et d’instrumentalisation qui se sont avérés, au fil des siècles et de l’évolution du progrès technique, de plus en plus puissants et de moins en moins respectueux à l’égard des autres formes (animales et végétales) et à l’égard de l’environnement (au sens large).

 

 

Les rapports à l’Existant

 

Les relations avec les congénères (relations sociales et relations intimes)

Favorisation de l’intérêt personnel et stratégies d’entente avec des rapports de force, de domination et d’instrumentalisation plus ou moins déguisés en politesse, aménités et autres règles de civilité, de moins en moins violents en apparence (diminution des agressions physiques), avec un encadrement et une « régulation » par la société et le système judiciaire mais avec néanmoins une exacerbation des violences psychiques (bien qu’elles aient été, elles aussi, progressivement et en partie encadrées et régulées par la société) et une profonde dichotomie entre les individus de la sphère personnelle et les autres individus (essentiellement indifférence sauf en cas d’émotion(s) forte(s) qui engendre(nt) « naturellement » un sentiment (souvent projectif) de proximité…).

 

 

Les relations avec les animaux

Accentuation de la réification, de l’instrumentalisation et de l’extermination de nombreuses espèces animales. Emergence et lent développement de l'animal domestique « urbain* ». Et émergence très progressive de la sauvegarde des espèces animales menacées d’extinction.

* Animaux de compagnie à la maison... Notons néanmoins, ici, que depuis l'aube de l'humanité, certains animaux « domestiques » ont, bien sûr, toujours plus ou moins vécu au sein du foyer et/ou à proximité des Hommes...

 

 

Les relations avec les végétaux

Généralisation de la sélection génétique pour la végétation comestible (fruits et légumes) et d’agrément (fleurs et plantes diverses). Emergence des modifications génétiques et fort développement de la destruction de la flore sauvage par la transformation des espaces terrestres en zones agricoles, en zones urbaines, en zones naturelles aménagées (parcs, chemins dans la nature) et en réseaux de transport (réseaux routier, ferroviaire et fluvial). Et émergence progressive de la protection de la biodiversité végétale.

 

 

Les relations avec les minéraux

Extension systématique de l’exploitation (et de la surexploitation) des minerais (énergies fossiles, charbon, pétrole et métaux « rares » et précieux).

 

 

Les relations avec l’environnement (au sens large) eau, air, terre

Explosion des pollutions terrestres, atmosphériques et hydriques d’origine humaine (sols, sous sols, qualité de l’air, mers, océans, nappes phréatiques…).

 

 

Les relations avec les agents pathogènes

Emergence et fort développement des soins, des antibiotiques (pénicilline, dérivés et « successeurs ») et de la prophylaxie (vaccination). Et progrès considérables en matière d’hygiène et d’asepsie (généralisation).

 

 

Les relations avec l’espace

Premiers pas dans l’espace et sur la lune (satellites, fusées et navettes spatiales…).

 

 

Les relations avec les formes extraterrestres (non terrestres)

Inexistantes (en dépit des « avancées » de l’astronomie…).

 

 

Les relations avec les formes énergétiques immatérielles (les « morts » entre autres…)

Rites et croyances.

 

 

L’impact général sur l’organisation des territoires entre toutes les formes

Début « explosif » de l’ère anthropocène avec la croissance exponentielle des sociétés humaines, l’urbanisation galopante, l’appropriation des territoires terrestres par les Hommes, la naissance et le développement du productivisme et du consumérisme et l’émergence d’un impact substantiel (et très fortement mortifère) sur les autres espèces vivantes et l'environnement.

 

 

APARTE INTUITIF : quelques tendances générales au fil de l’évolution de l’histoire humaine.

 

En retraçant l’évolution des sociétés et des individus au fil des siècles (que nous avons parcourus à grands pas…), il semble évident que certaines tendances se dégagent plus significativement que d’autres… On peut ainsi remarquer, au fil de l’histoire de l’humanité, plusieurs orientations significatives majeures :

 

- une progressive pacification entre les sociétés : en dépit de la persistance de quelques zones de conflit, les sociétés humaines tendent, en effet, à entretenir des rapports plus pacifiques sur l’ensemble de la planète. Les conflits ont d'ailleurs tendance à « se régler » de moins en moins par la violence et les armes et de plus en plus par le dialogue et la concertation ;

 

- un accroissement de la liberté chez les individus (liberté de « décider et de choisir », liberté d’agir, liberté de circuler, liberté de penser, liberté de croyances, liberté religieuse, liberté d'expression dans la mesure où elles respectent l’altérité et ne mettent pas à mal l’organisation et « le vivre ensemble » sociétaux…) ;

 

- une relative pacification et un accroissement du respect (apparent) entre les individus : bien qu’ils soient encore soumis à une certaine « loi du plus fort » (avec des résidus toujours assez prégnants des lois biologiques et animales), les rapports humains semblent s’être apaisés et tendent à devenir plus pacifiques avec l’éducation, les règles de bienséance et les codes comportementaux tolérés par les sociétés humaines. Rappelons, en aparté, que ces codes comportementaux ont permis une progressive prise en considération du respect de la personne et ont vu émerger très progressivement les notions de solidarité, d’équité et de respect à l’égard des minorités et des autres formes terrestres (respect essentiellement de type utilitariste et/ou « idéologique »…) ;

 

- un très relatif « essor de l’intelligence » chez les individus* : les Hommes, en effet, ont eu tendance, au fil des siècles, à être de plus en plus « éduqués » et à pouvoir accéder à un niveau minimal de savoirs (plus rarement de connaissance) avec une assez nette amélioration de la compréhension de l’Existant. Notons néanmoins qu’en matière de compréhension de l’existence et en matière de perception, aucune évolution majeure ne semble s’être dessinée… Certes, l’Homme s’est très progressivement affranchi du joug des croyances et de l’obscurantisme (en vigueur, à peu près partout, au Moyen Âge) avec l’avènement, puis la prédominance de la raison, de la pensée et de la rationalité scientifique mais il semble s’être (globalement) détourné des questions de sens et des interrogations métaphysiques en se consacrant quasi exclusivement à l’amélioration de ses conditions d’existence ;

* Avec (sans doute) une amélioration des capacités cognitives de l’Homme (au fil de l’évolution de l’espèce humaine…).

 

- une amélioration générale des conditions d’existence et de la qualité de vie : le confort et le bien-être matériels des individus n’ont cessé, en effet, de s’améliorer et de devenir des éléments toujours plus centraux dans les sociétés humaines en dépit de la persistance (voire de l’aggravation) des inégalités en matière de richesse, de conditions d’existence et de niveau de vie entre les individus au sein d’une même société et entre les sociétés, conséquences délétères, imputables (sans doute) en grande partie au modèle capitaliste… Notons que cette évolution est intimement liée à la transformation de l’Existant (transformation et amélioration que les individus imaginent à tort être les seules sources de satisfaction et « de bonheur » terrestres*…) ;

* Nous ne pouvons résister, ici, au plaisir de noter que cette perception « erronée » a toujours été à l’origine du progrès, de l’amélioration du confort et contribuera (sans doute) substantiellement à créer les conditions propices pour qu’une forme accède à terme aux caractéristiques de la Conscience (nous y reviendrons)...

 

- un partage des richesses et une redistribution très inégalitaires (comme nous l’avons souligné dans le paragraphe précédent). En effet, les « pays dominants » (économiquement parlant) continuent à se partager l’essentiel des richesses. Et notons que le système économique capitaliste mondialisé évince toujours du progrès et du partage « des bénéfices » toutes les sociétés (et les nations) qui ne s’y inscrivent — ou ne s’y conforment — pas… ;

 

- une tendance au rassemblement des sociétés humaines qui semblent aspirer à créer des entités géographiques plus vastes (l’Europe par exemple). Notons néanmoins qu’en dépit de cette tendance au regroupement des sociétés, il ne semble pas raisonnable d’imaginer, dans un futur proche, la disparition des nations ;

 

- l’émergence d’un double mouvement de régionalisation du monde (avec la revendication d’indépendance de territoires locaux qui provoque parfois une forme de morcellement des territoires nationaux) et de constitution de grands ensembles territoriaux composés de « petites » sociétés (ou nations). Ce double mouvement pourrait être le signe révélateur d’un besoin de liberté individuelle et locale et d’un besoin de sécurité (sécurité liée à l’appartenance à un ensemble plus vaste), véritables reflets du psychisme, qui préfigurera, sans doute, l’organisation des sociétés à venir*…

* Avec l’autonomisation progressive des régions et des communautés locales en matière de mode de gouvernance, d’organisation et d’orientation(1), regroupées et/ou fédérées en vaste ensemble territorial chargé de définir le cadre de cette autonomie, d’organiser les liens entre les différentes communautés et d’harmoniser l’ensemble.

(1) Cette constellation de communautés locales sera, sans doute, à l’image des grandes tendances psychiques : certaines seront probablement de type conservateur, d’autres de type progressiste et l’immense majorité sera vraisemblablement de type mixte… nous y reviendrons...

 

- une globalisation des échanges (mondialisation et interdépendance des économies) liée (en partie) au progrès technique dans les modes de communication, les modes de transport et les modes de paiement (devenus, dans les échanges commerciaux internationaux et au sein des places boursières, très majoritairement immatériels) ;

 

- l’émergence progressive d’un modèle sociétal majoritaire dominant : la « démocratie capitaliste » qui fonde son organisation sur l’individualisme, la favorisation de l’intérêt personnel, la liberté individuelle, le désir, la pensée « rationnelle », le productivisme et le consumérisme. Modèle sociétal qui semble être le prolongement direct du psychisme et/ou le reflet collectif des caractéristiques psychiques individuelles* ;

* Nous avons déjà abordé cette thématique importante… et il ne fait aucun doute que nous y reviendrons… et il se pourrait même que l’un de nos très prochains paragraphes y soit consacré…

 

- l’uniformisation du monde qui a, peu à peu, gagné l’ensemble du globe grâce (en partie) au (ou à cause du) développement des possibilités d’échanges et de communication à l’échelle planétaire ;

 

- la multiplication des organisations, des instances et des traités supranationaux et internationaux.

 

Tous ces éléments, toutes ces tendances et ces orientations semblent autant de signes révélateurs d’un lent et long processus « naturel » à l’œuvre au sein de l’humanité qui aspire sans doute (plus ou moins inconsciemment depuis la nuit des temps…) à l’intégration de l’ensemble des individus de l’espèce à la « grande communauté humaine (planétaire) » et à octroyer aux désirs, à la pensée (aux représentations mentales) et à l’intérêt personnel une place prépondérante et centrale dans l’existence et l’organisation humaines… et il est peu dire que cette aspiration (universelle ?) n’a cessé de « pousser » ou « d’inviter » les Hommes à créer une structure sociétale politique, judiciaire, économique et sociale qui soit non seulement l’exact reflet de leurs désirs mais le terreau (ou le terrain) possible de la matérialisation de leurs fantasmes (qui sont aussi, bien sûr, ceux du psychisme(1)) … et il est notable de souligner(2) que la période historique récente (en particulier le 19ème et, principalement, le 20ème siècles) a permis avec une surprenante aisance (et avec une déroutante rapidité) l’actualisation manifeste (et tangible) de ces très lointaines et ancestrales aspirations(3) 

(1) Psychisme, qui n’a cessé de guider et de gouverner les Hommes tout au long de l’histoire…

(2) Belle redondance, n'est-ce pas ?

(3) Toute société humaine est le reflet collectif des représentations et des désirs de ses membres. Et toutes aspirent (dans la mesure du possible… et des possibilités…) à « matérialiser » leurs fantasmes…

 

 

 

LE MONDE D'AUJOURD'HUI

 

Les sociétés contemporaines

 

Généralités

Aujourd’hui, chaque société dispose d’une envergure territoriale nationale et est constituée en nation souveraine (avec différents types d’organisation politique et de découpage territorial interne). Elle organise et encadre toutes les activités humaines, administre (via l'Etat) l’ensemble des populations sur son territoire et veille (en général) à ce que chaque citoyen bénéficie des mêmes services et soit soumis aux mêmes lois et aux mêmes règles.

 

Le monde humain est composé aujourd’hui d’environ deux cent pays et forme un ensemble disparate et hétérogène en matière d’organisation politique, de liberté, de conditions d’existence et de qualité de vie. En effet, il existe (encore de nos jours — en ce début de 21ème siècle) de profondes différences entre les sociétés dans la quasi-totalité des domaines : en matière d’alimentation, de santé, de logement, d’énergie, de transport, de reproduction, de richesses, d’éducation, de savoirs etc etc. En raison de l’histoire de l’humanité (et d’évènements historiques récents – la colonisation par exemple…) et de causes plus profondes (comme l’identification du psychisme à la forme), notons que les êtres humains sont très attachés à la notion de nation et sont très enclins à privilégier la leur...

 

En dépit des transformations récentes de certaines nations*, on peut néanmoins, à notre époque, catégoriser, de façon schématique, les sociétés humaines en plusieurs groupes :

* Et de leur perpétuelle évolution…

 

- les pays démocratiques (de type social-démocrate) capitalistes avec conditions d’existence « confortables* » et qualité de vie élevée* – Europe – Amérique du nord – Australie ;

* Relativement en fonction des autres sociétés…

 

- les pays démocratiques capitalistes avec conditions d’existence et qualité de vie moyennes qui œuvrent aujourd’hui, de façon forcenée, pour qu’elles deviennent aussi satisfaisantes que celles des pays du premier groupe – Inde – Asie — Brésil – Amérique de sud – Indonésie essentiellement ;

 

- les pays autocratiques capitalistes avec conditions d’existence et qualité de vie moyennes qui œuvrent également aujourd’hui, de façon forcenée, pour qu’elles deviennent aussi satisfaisantes que celles des pays du premier groupe – Chine et Russie essentiellement ;

 

- les pays autocratiques et/ou théocratiques avec conditions d’existence « confortables » et qualité de vie élevée – certains pays du Moyen-Orient (producteurs de pétrole) par exemple ;

 

- les pays démocratiques et autocratiques avec conditions d’existence « médiocres » et qualité de vie faible qui œuvrent aujourd’hui, eux aussi, de façon forcenée pour qu’elles deviennent aussi satisfaisantes que celles des pays du premier groupe – certains pays africains et Amérique centrale essentiellement ;

 

- et les pays démocratiques et autocratiques avec conditions d’existence « médiocres » et qualité de vie faible qui semblent rencontrer de grandes difficultés (internes et externes) pour les améliorer – Afrique essentiellement.

 

Notons qu’à de très rares exceptions près, toutes les sociétés (et l’ensemble des populations) aspirent, évidemment, à des conditions d’existence et à une qualité de vie meilleures…

 

Il convient également de souligner l’émergence (plus ou moins ancienne et plus ou moins réactive) de modèles sociétaux « alternatifs* », notamment en matière d’organisation politique, en matière d’organisation de la distribution des richesses et en matière d’orientation générale.

* Modèles sociétaux « alternatifs » au regard de la prédominance actuelle du modèle démocratique (de type social démocrate) et capitaliste...

 

Concernant les modèles sociétaux « alternatifs » (en matière d’organisation politique), il existe :

 

- des sociétés théocratiques conservatrices (essentiellement au Moyen-Orient – Arabie saoudite — Iran – et le Vatican en Europe) ;

 

- des sociétés théo-démocratiques (la Turquie par exemple).

 

Concernant les modèles sociétaux « alternatifs » (en matière d’organisation de la distribution des richesses), il existe :

 

- des sociétés qui s’appuient sur un Etat Providence puissant (héritage ou influence, plus ou moins direct(e), du communisme) : certains pays d’Amérique du sud (le Venezuela par exemple) ;

 

Concernant les modèles sociétaux « alternatifs » (en matière d’orientation générale), il existe :

 

- des sociétés tournées vers l’écologie (le Costa Rica par exemple) ;

 

- et des sociétés tournées vers « le bonheur* » (le Bhoutan par exemple).

* Avec le Bonheur National Brut (BNB)... qui s'appuie (essentiellement) sur la protection de l’environnement, la conservation et la promotion de la culture, la bonne gouvernance et le développement économique responsable et durable.

 

 

Notons également l’émergence de mouvements communautaires alternatifs dans de nombreux pays et à l’échelle planétaire :

 

- des mouvements alternatifs « progressistes » ;

- des mouvements alternatifs « sécuritaires » ;

- des mouvements alternatifs « idéologiques religieux » ;

- et des mouvements alternatifs « identitaires ethniques et/ou culturels ».

 

Notons enfin que subsistent, dans certains pays, des sociétés traditionnelles (globalement peu impactées par les autres sociétés malgré l’influence de « la modernité » contemporaine, la « contamination » des modes de vie et leur « intégration » progressive aux modèles sociétaux dominants...).

 

Aujourd’hui, il semble évident que tous les pays sont contraints « à l’ouverture », aux échanges avec les autres nations et au capitalisme sous peine d’être exclus de la marche du progrès... Ainsi, subsistent aujourd’hui quelques nations, plus ou moins, « coupées » du reste du monde (la Corée du nord par exemple) et quelques communautés (sociétés traditionnelles et communautés) qui refusent volontairement de s’y inscrire (certaines tribus de Namibie, de Nouvelle Guinée ou les Amish entre mille autres exemples…).

 

Essayons de récapituler :

 

Sur le plan international, la grande majorité des sociétés (les nations) aspire globalement à une organisation démocratique (synonyme de liberté pour les populations…) et à une amélioration des conditions d’existence et de la qualité de vie en intégrant (globalisation et uniformisation obligent…) le modèle sociétal dominant fondé sur l’individualisme, la favorisation de l’intérêt personnel, le capitalisme, le productivisme, le consumérisme, le confort et le bien-être matériels, certaines optant pour un Etat Providence minimal (sociétés très individualistes avec un Etat peu interventionniste sauf pour les questions régaliennes), d’autres optant pour un Etat Providence fort (sociétés héritières ou adeptes d’une forme de communisme revisité — mâtiné à l’air contemporain) avec une redistribution des richesses « la plus équitable possible » entre la population et la fourniture de prestations et de services (plus ou moins gratuits) dans les domaines de la santé, de l’éducation, de l’énergie et des transports etc etc) et les dernières (sans doute les plus nombreuses) optant pour un Etat Providence médian (de type social-démocrate) qui prend en charge les « exclus du système* » et favorise une forme modérée de redistribution.

* Les exclus de « toutes sortes » : exclus du monde du travail, du système de santé, du système éducatif etc etc.

 

Et une petite minorité de sociétés aspire globalement à une organisation théocratique et à une amélioration des conditions d’existence et de la qualité de vie en refusant (le plus souvent) le modèle sociétal dominant.

 

Sur le plan national (donc, au sein de chaque société), il existe également :

 

- des sociétés traditionnelles* qui aspirent à vivre selon leur idéologie ethnique et/ou culturelle en n’étant pas (ou peu) intégrées au monde, peu enclines à un mode de vie individualiste, capitaliste, productiviste et consumériste et qui n’ont d’autre souhait (le plus souvent) que de vivre tranquillement (« dans leur coin ») en privilégiant la simplicité, le contentement, la frugalité et l’harmonie communautaire ;

* Mouvement ultra-minoritaire composé de communautés (individus regroupés et organisés).

 

- des alternatifs « idéologiques ethniques et/ou culturels* » dont les revendications sont (en partie) réactives à leur non-intégration à la société dominante, qui réclament leur droit à la différence et aspirent (en général) à être intégrés au modèle sociétal dominant en conservant leur mode de vie ;

* Mouvement minoritaire composé d’individus plus ou moins isolés et de communautés (individus regroupés et organisés).

 

- des alternatifs « idéologiques religieux (relativement) pacifiques* » qui aspirent à vivre selon leur idéologie religieuse en n’étant pas (ou peu) intégrés au monde, peu enclins à un mode de vie individualiste, capitaliste, productiviste et consumériste et qui n’ont d’autre souhait (le plus souvent) que de vivre tranquillement (« dans leur coin » – à l’instar des sociétés traditionnelles) en privilégiant la simplicité, le contentement, la frugalité et l’harmonie communautaire ;

* Mouvement ultra-minoritaire composé d’individus plus ou moins isolés et de communautés (individus regroupés et organisés).

 

- des alternatifs « idéologiques religieux (relativement) agressifs* » qui aspirent à s’organiser en « modèle de société » et à convertir à leur idéologie, avec plus ou moins de violence, les individus et les autres communautés et sociétés, et qui disposent de ressources financières conséquentes octroyées par certaines sociétés ou structures « officielles » du « système théocratique » et/ou par de riches « sympathisants » ;

* Mouvement ultra-minoritaire hétérogène composé d’individus plus ou moins isolés et de communautés (individus regroupés et organisés).

 

- des alternatifs « idéologiques sécuritaires bonhommes* » de nature plutôt conservatrice, dotés (en général) de « solides » ressources financières qui aspirent à vivre selon leur idéologie ethnique et/ou culturelle en étant globalement intégrés au monde, adeptes d'un mode de vie individualiste, capitaliste, productiviste et consumériste, mais peu enclins à l’autonomie (sauf en matière relationnelle en cultivant « l’entre-soi ») et qui n’ont d’autre souhait, eux aussi, que de vivre tranquillement (« dans leur coin ») sans être confrontés à « la violence du monde » en demeurant néanmoins très dépendants du modèle sociétal dominant en matière de consommation et de progrès technologique (confort, loisir, surveillance…) ;

* Mouvement minoritaire — en pleine expansion — composé d’individus plus ou moins isolés et de communautés (individus regroupés et organisés).

 

- des alternatifs « idéologiques sécuritaires revendicatifs* » de nature plutôt conservatrice (voire « anti-étatique »), très enclins à l’autonomie, qui aspirent à vivre selon leur idéologie ethnique et/ou culturelle et à s’organiser parfois (pour un certain nombre d’entre eux) en « modèle de société » en n’étant pas (ou peu) intégrés au monde et en privilégiant (en général) un mode de vie ultra-individualiste ;

* Mouvement ultra-minoritaire hétérogène composé d’individus plus ou moins isolés et de communautés (individus regroupés et organisés).

 

- des alternatifs « progressistes(1) » (le plus souvent) non-violents(2), enclins à la « frugalité joyeuse », à la solidarité, à l’harmonie, à l’écologie, au respect de la différence et de la diversité et au respect révérenciel de la nature et de l’Existant qui aspirent à l’harmonie du monde et à un mode de vie libre, communautaire, citoyen et responsable, écologique et respectueux, qui rêvent de s’organiser en « modèle de société » mais qui disposent aujourd’hui (en général) de faibles ressources financières tout en étant fortement dépendants de la technologie du modèle sociétal dominant.

(1) Mouvement minoritaire hétérogène — en pleine expansion — composé d’individus plus ou moins isolés et de communautés (individus regroupés et organisés ou qui se regroupent ponctuellement...).

(2) Parmi l’ensemble (très hétérogène) des « altermondialistes » qui adoptent (en général) des attitudes pacifiques dans leur résistance à « la capitalisation » et à « la monétarisation » du monde, quelques mouvances (certains « black blocs » par exemple) peuvent se montrer plus radicales et plus « offensives »…

 

Parmi cette constellation de mouvements, il est raisonnable de penser que les communautés et les sociétés traditionnelles, les alternatifs « idéologiques ethniques et/ou culturels » et les alternatifs « idéologiques religieux (relativement) pacifiques » ne poseront guère « de problème » dans l’évolution des sociétés humaines. Certaines caractéristiques de leur mode de vie pourraient même (éventuellement) contribuer à inspirer l’avenir de l’humanité…

 

Bien qu’ultra-minoritaires, l’ambition et l’intolérance des alternatifs « idéologiques religieux (relativement) agressifs » et (dans une moindre mesure) des alternatifs « idéologiques sécuritaires revendicatifs » pourraient poser à l’avenir de « sérieux problèmes » dans l’organisation des sociétés humaines (nous y reviendrons).

 

Quant aux alternatifs « idéologiques sécuritaires bonhommes » et aux alternatifs « progressistes » (dont les signes d’expansion, aujourd’hui, ne sont plus à démontrer), ils constituent (et constitueront probablement à l’avenir) deux axes déterminants au point de réunir bientôt (puis de représenter sans doute) une part substantielle de la population. La raison principale tient au fait que ces deux courants synthétisent l’essentiel des aspirations psychiques et humaines. Les premiers privilégiant la sécurité (et le repli sur soi), l’individualisme, la favorisation de l’intérêt personnel (et le sentiment narcissique), le confort, le bien-être, l’ordre et l’autorité, la consommation, l’uniformisation, les loisirs et les distractions et les seconds, l’écologie, le respect de la nature et du Vivant, la frugalité, la solidarité, la diversité, le dialogue, la démocratie participative et la spiritualité. L’avenir de ces deux mouvements (comme des deux précédents d’ailleurs) dépendra essentiellement de leurs capacités d’autonomisation (à l’égard du modèle dominant) et de leurs capacités à se regrouper et à s’organiser, deux point essentiels (et nécessaires) pour être en mesure de se transformer en organisation structurée, voire à plus long terme en société (et en modèle sociétal) capable de mettre en place des activités consacrées à la recherche et une production industrielle*…

* Pour fabriquer les innovations issues de cette recherche…

 

Après ce panorama général des sociétés contemporaines, tâchons de dresser « un portrait type » de la société d’aujourd’hui (celle que l’on pourrait considérer comme la plus représentative de l’époque) à travers l’exposé de son organisation sociétale (politique, judiciaire, économique et en matière de « relations extérieures »).

 

 

L’organisation sociétale générale

Sur le plan de l’organisation politique (et du mode de gouvernance), il semble que le modèle démocratique tende à devenir le modèle dominant en dépit des écueils, des dérives et des dysfonctionnements qu’il n’a cessé de laisser entrevoir... Notons, ici, « en vrac » (et entre autres) la grossièreté des règles de représentativité, les « carrières politiques », les promesses électorales non tenues, « l’appropriation du pouvoir » par un grand nombre d’hommes politiques, les collusions, les connivences et les « magouilles » avec le monde économique, le désintérêt du peuple lassé et désappointé par les « affaires » ou la non viabilité des orientations instaurées par le pouvoir en place et leurs effets dérisoires sur la vie quotidienne des citoyens, la vision « court-termiste » et électoraliste des politiciens etc etc.

 

Sur le plan judiciaire, on assiste à une inflation galopante des lois, des décrets et des arrêtés de toutes sortes pour « protéger » les citoyens (en leur imposant, dans le même temps, une foultitude d’obligations en tous genres) et à une forme de judiciarisation du monde (les individus sont de plus en plus enclins à intenter des procès* pour un « oui » et pour un « non »). Notons également que le système judiciaire semble montrer des signes d’impuissance à maintenir « un vivre ensemble » harmonieux comme l’illustrent les limites (dissuasives et punitives) de l’arsenal diversifié des sanctions pénales.

* Signe contemporain révélateur (à bien des égards) d’une forme de déresponsabilisation (les individus cherchent coûte que coûte « un fautif » ou un « coupable » à leurs « mésaventures » et « déconvenues ») et de la monétarisation de toutes les sphères de l’existence (les individus cherchent coûte que coûte (si j’ose dire !) à être dédommagés financièrement dès qu’ils se sentent « malmenés », « bafoués » ou « outragés »)…

 

En matière d’organisation économique, l’époque est au développement des grandes entreprises multi-sectorielles, à l’expansion des services et des prestations (en particulier, avec les grands groupes commerciaux et les grandes chaînes commerciales) et à la multiplication des microentreprises et des autoentrepreneurs dans tous les services de proximité à la personne et aux entreprises. L’ère est également propice aux gigantesques entreprises de stockage et aux entreprises spécialisées dans la vente à distance (via internet) et la vente « clé en main » (hypermarché drive entre autres exemples) ainsi qu’au développement de nouveaux circuits de distribution (avec, toujours entre autres exemples, les AMAP(1) qui raccourcissent la chaîne de distribution pour – entre autres – les produits bio). Comme l’atteste la montée en puissance du commerce international, l’époque est à l’hyper mondialisation des échanges (dans beaucoup de secteurs, en particulier, pour les biens manufacturés) mais également à la timide émergence des « nouveaux » échanges locaux (dans les autres secteurs). Aujourd’hui, le système monétaire et financier (et les marchés spéculatifs) sont omnipotents et semblent orienter la marche du monde… Et notons que les instruments financiers et les modes de paiement tendent à devenir de plus en plus immatériels. Quant à l’organisation du travail, il semblerait que les sociétés contemporaines entrent dans une ère du « tout travail » et favorisent une exacerbation du « workfare », attribuant à l’activité professionnelle une place absolument centrale et prépondérante, reléguant les chômeurs à un statut « d’exclus(2) » et les obligeant (plus ou moins) à mendier auprès des Etats quelques pièces et/ou auprès des entreprises un quelconque « job » (même sous payé… même dans des conditions de travail « indignes » et précaires…).

(1) Association pour le Maintien de l'Agriculture Paysanne.

(2) Tendance actuelle que l’on pourrait résumer en une formule un peu lapidaire (mais, semble-t-il, assez lucide) : un travail sinon rien… un travail sinon la mort (professionnelle, matérielle, sociale, organique…)… Triste époque...

 

Sur le plan international, les organismes supranationaux et internationaux voient s’étendre leurs prérogatives et leur « influence* » en matière économique et financière (FMI, OMC…), en matière diplomatique (ONU…) et en matière de « droits de l’Homme » (Tribunal Pénal International…) malgré les résistances des nations qui s'arc-boutent (souvent avec force) sur leur souveraineté. Il est indéniable que nous assistons, aujourd’hui, à une complexification de la situation géopolitique internationale avec, en particulier, la multipolarité du monde (plusieurs nations très influentes sur l’échiquier planétaire), la montée d’une nouvelle forme de terrorisme et l'émergence et/ou la pérennisation de certains conflits régionaux (au Moyen Orient par exemple) où chaque nation essaye de louvoyer en « eaux troubles » (dans les eaux troubles internationales) au gré des courants, des opportunités économiques, des discours et des changements politiques… Le monde, de plus en plus pacifié, n’en demeure pas moins un salmigondis opaque où les nations et les individus ne savent plus (vraiment) à quel saint se vouer, ni où poser les pieds… à l’image d’une girouette presque hors de contrôle où les double, triple, quadruple discours sont légions et viennent contredire les actes (et les interventions ici et là) des nations et où personne ne sait exactement qui gouverne et « possède » le pouvoir (ni comment fonctionne ce monde de plus en plus complexe)…

* Eux qui avaient toujours été (jusque-là), plus ou moins, relégués à un rôle de figuration(1) (et avec un pouvoir « fantoche(2) »)...

(1) Ce qui reste néanmoins, en partie, vrai aujourd'hui...

(2) A moins que les Etats, les nations et les institutions qui tirent les rênes de ces organismes internationaux imposent, aujourd'hui, leurs directives avec plus de force...

 

En matière d’organisation territoriale, on assiste aujourd’hui à des flux migratoires internationaux importants malgré le « repli national » des « pays riches » et à une réorganisation progressive des territoires nationaux avec une forte croissance urbaine (hyperurbanisation et développement des grandes mégalopoles) mais avec également le développement des zones péri urbaines et rurbaines et le repeuplement « homéopathique » des zones rurales (avec l’accroissement relatif des néo-ruraux).

 

Après ce panorama (un peu vague et « généraliste ») de l’organisation des sociétés contemporaines, nous ne pouvons omettre de donner un aperçu des progrès réalisés dans les différents secteurs économiques mis en place pour répondre aux besoins organiques, matériels et psychiques élémentaires des Hommes d’aujourd’hui.

 

 

L’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence

En matière agricole, les sociétés actuelles semblent s’orienter vers deux grandes voies : une agro-industrie avec une agriculture et un élevage intensifs (de type monoculture et de type hors sol) mécanisés, robotisés et informatisés et de petites cultures et de petits élevages bio (un peu « à l’ancienne » mais avec des moyens de production qui bénéficient des avancées technologiques). Deux grandes voies qui semblent correspondre aux deux grandes tendances alimentaires contemporaines : plats « prêt-à-l’emploi » rapides et pas chers (mais souvent « dégueulasses ») et repas bio avec préparation.

 

En matière de santé, la médecine devient de plus en plus performante (plus efficace, plus robotisée et plus informatisée), la pharmacopée devient toujours plus chimique et synthétique. Et on fait la place toujours plus belle aux prothèses synthétiques de remplacement. La médecine devient omniprésente et encadre l’existence humaine à tous les âges de la vie (en particulier, avec la médicalisation systématique de la période périnatale, du « grand âge » et des souffrances occasionnées par ce que les individus appellent aujourd’hui « les accidents de la vie » — dépressions, deuils, accidents etc). Au vu des dégradations et des pollutions engendrées par les activités humaines (toujours plus polluantes) et du gaspillage inhérent au système productiviste et consumériste des sociétés contemporaines, certaines mesures anti-pollution et de lutte contre le gaspillage sont instaurées (plutôt timidement) et sont (en général) sans grandes conséquences sur la qualité de l’air, de l’eau et des sols…

 

En matière vestimentaire, l’ère est à l’hyperpersonnalisation (avec un fort besoin de valorisation et de singularisation narcissiques) et aux vêtements intelligents (adaptables au corps et aux conditions climatiques). L’habitat tend à devenir très individuel — voire individualisé — (accession à la propriété, rêve et projet de vie central d’une grande majorité de couples et de familles) avec une petite note écologique. Aujourd’hui, le secteur du logement, totalement industrialisé, semble suivre trois tendances : avec d’une part, la folie des grandeurs (démesure, luxe et bien-être outranciers) sans compter l’émergence des grandes tours d’habitation (très hauts gratte-ciels, en général, très luxueux), avec d’autre part, la simplicité (petites maisons écologiques) et avec, enfin, la tendance majoritaire, le « moche passe-partout » au bas coût (avec la production à la chaîne de lotissements standards et uniformes). Le confort domestique s’est répandu et démocratisé. Tout foyer digne de ce nom possède son sèche-linge, son lave-vaisselle, son frigo américain, sa machine à expresso (et on en passe…)… Les appareils domestiques sont de plus en plus robotisés et de plus en plus informatisés (avec connexion et commande à distance via le smartphone et autres tablettes numériques).

 

En matière d’énergie, on assiste également, semble-t-il, à plusieurs tendances : le « tout électricité » (nucléaire), la surexploitation des énergies fossiles (avec le développement de nouvelles zones de forage – pétrole – ou de nouvelles techniques d’extraction – pour le gaz de schiste par exemple) et le développement des énergies propres et renouvelables (solaire, éolienne, hydrolienne) sans compter la manie (quelque peu apocryphe*) de saupoudrer, ici et là, dans tous les secteurs énergivores et/ou néfastes à l’environnement, de petites « touches » écologiques (renforcement de l’isolation thermique pour l’habitat, taxe « carbone » et on en passe…). En matière de transport, l’époque connaît l’émergence (timide elle aussi) des véhicules électriques et la totale généralisation des véhicules automobiles et des transports aériens sans compter les prémices des véhicules spatiaux (à caractère « touristique »).

* Faire semblant d’instituer l’écologie comme priorité sans prendre de mesures véritables…

 

Au vu de l’exacerbation du sentiment d’insécurité ressenti par les populations et de l’aspiration généralisée au « risque zéro », l’époque est à l’hyper sécurisation, au développement des armes d’auto défense personnelles (genre taser), aux alarmes « domestiques », à la généralisation de la vidéo surveillance dans tous les espaces publics et privés et aux alarmes anti-vol avec GPS sur les objets et les « possessions » les plus divers sans compter, évidemment, l’efflorescence des organismes de sécurité qui proposent (à peu près partout et à, à peu près, tout le monde…) leurs services de surveillance et de protection et l’édification (sur un grand nombre de territoires locaux et nationaux) de murs et d’enceintes de protection pour se claquemurer dans une forme « d’entre soi » identitaire, communautaire, géographique ou ethnique... autant de signes révélateurs d’une très forte tendance (plus ou moins généralisée) au repli sur soi…

 

Les progrès technologiques ne se cantonnent pas (fort heureusement) aux besoins sécuritaires et trouvent également de fort nombreuses applications (et débouchés) en matière de distraction, de communication, d’information et d’échanges. La virtualité connaît ainsi un formidable engouement : internet, jeux vidéo en réseaux, réseaux sociaux, smartphones et Cie, bref toute la clique des « ique », des « e » et des « i » (informatique, cybernétique, email, i pad, i phone…). Les loisirs connaissent un boom sans précédent. Les individus d’aujourd’hui aspirent à se divertir, à voyager, à jouer et à s’amuser, bref à « profiter de la vie » comme ils aiment à le dire… L’univers du divertissement est devenu accessible en permanence et à tout instant (films, jeux, musique, concerts, livres, distractions diverses). Et pour répondre à leurs attentes toujours plus exigeantes, des lieux dédiés aux loisirs se sont multipliés sur tous les coins du globe (parcs d’attraction à thème, SPA, centres de remise en forme et de bien-être, centres de vacances « paradisiaques », croisières sur « bateau usine » etc etc).

 

Notons également que les « nouvelles technologies » (telles qu’on les appelle aujourd’hui) multiplient d’une incroyable façon les possibilités en matière d’expression (avec la généralisation des blogs et des sites internet) et en matière d’accès aux savoirs (et même d'accès « à la connaissance ») avec « à boire et à manger » parmi la somme d’informations et de données totalement ahurissante sur tous les sujets possibles et imaginables (non traitées, non vérifiées, non hiérarchisées) mais qui peuvent offrir une formidable base de données à ceux qui aspirent, non seulement à trouver des recettes de cuisine pour préparer la prochaine « bouffe entre copains », à comprendre le monde actuel de plus en plus complexe et de plus en plus opaque malgré son apparente transparence et l’apparente simplicité avec laquelle (en général) on le présente…

 

Bref, une époque formidable où les Hommes pataugent avec effroi* dans une mélasse mortifère (et faussement joyeuse) de morosité, de pressurisations constantes et quasi esclavagistes liées aux exigences organisationnelles contemporaines, de recherche effrénée de plaisirs (en partie réactive), d’ouverture du « champ des possibles », d’engouement plus ou moins aveuglé ou plus ou moins « éclairé », de désarroi, de craintes et d’incompréhension face au monde actuel et aux « promesses » et perspectives qu’il semble pouvoir offrir…

* Un effroi qui se garde bien de se dévoiler et, encore moins, de s’exposer…

 

 

Le portrait de l’individu médian (représentatif de la société)

L’individu médian d’aujourd’hui consacre l’essentiel de son temps à travailler pour obtenir un revenu (salaire) qui lui permet d’assurer la satisfaction de ses besoins physiques, matériels et psychiques élémentaires (alimentation, logement, santé, mobilité, loisirs…). Ses principales autres activités consistent à dormir, à manger, à s’occuper des tâches domestiques (et, accessoirement, des diverses charges et obligations de la vie familiale et/ou sociale), à se reposer et à se distraire (augmentation du temps consacré aux loisirs et à la virtualité).

 

En dépit d’un savoir élémentaire (acquis au cours d’une scolarité plus ou moins longue), sa compréhension et sa perception sensible sont très grossières, apparentes et superficielles. Et il reste essentiellement soumis au psychisme, aux désirs et à la recherche (plus ou moins effrénée) de plaisirs.

 

En matière relationnelle, les comportements d’accaparement, de favorisation de l’intérêt personnel et de valorisation narcissique (bien qu’en partie régulés par la société) sont omnipotents (en raison de la diminution de la prégnance communautaire et de la montée de l’individualisme). Il entretient avec les autres individus (dans la sphère intime comme dans la sphère sociale) des rapports de domination et d’instrumentalisation de plus en plus édulcorés et déguisés et des rapports de domination et d’instrumentalisation de plus en plus puissants et de moins en moins respectueux à l’égard des autres formes (animales et végétales) et à l’égard de de l’environnement (au sens large) avec néanmoins l’émergence (pour une partie de la population) d’une inversion du processus d’instrumentalisation et la naissance progressive d’un respect (de nature principalement utilitariste) à l’égard de l’Existant.

 

 

Les rapports à l’Existant

Soulignons que l’ère anthropocène constitue un tournant décisif dans l’histoire terrestre et dans les relations que les Hommes entretiennent avec la Terre, avec les autres espèces et avec l’ensemble de l’Existant. Les répercussions des activités humaines sur les autres formes et sur la quasi-totalité des plans deviennent, en effet, très substantielles.

 

Voir ANNEXE 6 (l'organisation générale de l’Existant contemporain)

 

 

Les relations avec les congénères (relations sociales et relations intimes)

Favorisation de l’intérêt personnel et stratégies d’entente avec rapports de force, de domination et d’instrumentalisation le plus souvent déguisés en politesse, aménités et autres règles de civilité, avec un recul (apparent) de la violence et des agressions physiques dans les relations « sociales » et avec une tentative collective et sociétale de réduire la violence psychique (émergence de nombreuses lois sur les droits de l’enfant, la parité homme-femme, la discrimination « positive » concernant les minorités et le harcèlement sexuel entre autres exemples…) qui « imprègne » peu à peu « les esprits »... Les relations interindividuelles restent néanmoins fortement marquées par une profonde dichotomie entre les individus de la sphère personnelle et les autres individus (essentiellement indifférence excepté en cas d’émotion(s) forte(s) qui engendre(nt) (naturellement) un sentiment — souvent projectif — de proximité ponctuel).

 

Notons, ici*, qu’il existe encore une grande différence entre les comportements apparents des individus et leurs intentions et motivations réelles. Comme s’ils étaient amenés à revêtir un masque (de multiples masques) pour cacher leurs élans naturels et apparaître, à leurs yeux et aux yeux des autres, comme des individus irréprochables, aimables et dignes d’amour et de confiance…

* Nous aurions pu également aborder cette thématique dans les périodes historiques antérieures…

 

En dépit d’une plus grande civilité dans les rapports entre les individus et d’une tolérance de moins en moins forte à l’égard des comportements apparents irrespectueux (les individus sont plus exigeants en matière de sécurité...), notons également qu’il existe une exacerbation d’une certaine forme de violence que l’on peut attribuer, en partie, à l’amplification de la « volonté d’immédiateté » dans la satisfaction des besoins et des désirs mais également à l’augmentation des inégalités et à la récurrence des crises économiques contemporaines...

 

 

Les relations avec les animaux

Généralisation de la réification et de l’instrumentalisation des animaux. Destruction de nombreux territoires et habitats (liée à l’explosion urbaine et à la surexploitation agricole et forestière) avec néanmoins la très progressive (et timide) émergence des droits de l’animal, le développement (progressif et très timide, lui aussi) de la protection des espèces menacées d’extinction et de la sauvegarde de la biodiversité animale.

 

Le monde animal sauvage (terrestre et maritime) a subi et continue de subir de nombreuses disparitions irréversibles (pêche intensive qui, malgré l’existence de quotas plus ou moins respectés, peut, très souvent, s’assimiler à un « pillage » maritime, chasse et extermination de nombreuses espèces de façon directe et indirecte – par raréfaction des territoires – et emprisonnement de certains individus dans les zoos). Il est évident que les sociétés animales sauvages ont dû opérer de très profondes adaptations* à cette invasive et très destructrice omnipotence humaine…

* Parfois inefficaces et/ou problématiques (en particulier lorsque certains animaux sauvages ont été ou sont « contraints » d’investir des zones peuplées par les Hommes engendrant de nombreux problèmes de « cohabitation »)…

 

Quant au monde animal domestiqué, il a été globalement réifié (instrument à usage humain) et est toujours destiné à l’alimentation (animaux dits de rente), à « l’utilité » (animaux de travail et de laboratoire par exemple) et à l’agrément des Hommes (animaux de course et de compagnie par exemple*) avec d’innombrables sélections génétiques (et même parfois de — plus ou moins — nombreuses manipulations génétiques).

* Sans compter les animaux que les Hommes destinent et/ou « livrent » aux combats (et à leur barbarie...) : tauromachie, combats de coqs, de chiens...

 

 

Les relations avec les végétaux

Généralisation de la sélection génétique pour la végétation comestible (fruits et légumes) et d’agrément (fleurs et plantes diverses). Développement des modifications génétiques et forte augmentation de la destruction de la flore sauvage par la transformation des territoires en zones agricoles, en zones urbaines, en zones naturelles aménagées (parcs, chemins dans la nature) et en réseaux de transport (réseaux routier et ferroviaire) malgré l’émergence de la protection de la biodiversité végétale.

 

Soulignons que le monde végétal est soumis (et a été soumis ces dernières décennies) à de profondes modifications (avec la destruction des forêts primaires, la déforestation plus ou moins généralisée, les modifications génétiques, l’uniformisation des végétaux consommables par l’Homme (fruits et légumes), l’appropriation territoriale par l'espèce humaine et la transformation substantielle des paysages).

 

 

Les relations avec les minéraux

Extension systématique de la surexploitation des minerais (énergies fossiles, charbon, pétrole et métaux « rares » et précieux).

 

 

Les relations avec l’environnement (au sens large) eau, air, terre

Fortes altérations de l’environnement par les activités humaines : appauvrissement des sols par la surexploitation (agricole), pollution et raréfaction de l’eau, mers et océans pollués par les hydrocarbures et les résidus plastiques, air pollué par les particules de dioxine, « trou » dans la couche d’ozone, pollution des sols et des nappes phréatiques par les engrais agricoles, les déjections des animaux d’élevage industriel et/ou intensif, les activités et les déchets industriels, les déchets radioactifs, les déchets de la société de consommation et la généralisation du mode de vie urbain.

 

En outre, le plan synthétique n’a cessé de se développer et de se généraliser au point où la quasi-totalité des fabrications humaines et des objets utilisés par les Hommes appartient aujourd’hui à cette catégorie. Et leur « abandon » et/ou leur rejet (à la fin de leur « cycle de vie ») dans la nature*, fait non seulement « tache » parmi les « éléments naturels » mais est source de nombreuses pollutions…

* En dépit du développement (très progressif) du recyclage... et de l'essor du commerce des objets d'occasion et de « seconde main » (lié, en partie, aux différentes crises économiques et à la baisse du pouvoir d'achat des individus et des ménages)... Notons également, ici, que les objets pourraient à l'avenir faire l'objet (si j'ose dire! ) d'une « petite révolution » avec le recyclage et la réutilisation permanente des matériaux nécessaires à leur fabrication (à l'instar de la matière naturelle et de la matière organique qui, grâce aux lois et aux cycles physiques et biologiques, ne cessent d'être « réutilisées »...).

 

 

Les relations avec les agents pathogènes

Généralisation des soins, des antibiotiques, de la prophylaxie, de l’hygiène et de l’asepsie avec l’émergence de nouveaux virus, de bactéries résistantes et de nouvelles pathologies (ces dernières sont, en partie, liées au mode de vie : suralimentation, produits d’hygiène, produits ménagers et produits agroalimentaires artificiels néfastes à la santé, sédentarisation, absence d’activités physiques, pollutions diverses…).

 

 

Les relations avec l’espace

Stations orbitales, premières sondes spatiales, engins robotisés et sondes « expédiés » sur d’autres planètes et sur certains astéroïdes.

 

 

Les relations avec les formes extraterrestres (non terrestres)

Inexistantes.

 

 

Les relations avec les formes énergétiques immatérielles (les « morts » entre autres…)

Rites et croyances.

 

 

L’impact général sur l’organisation des territoires entre toutes les formes

Généralisation et très forte accentuation de l’omnipotence des sociétés humaines avec l’explosion de la croissance démographique, l’hyper croissance urbaine et l’accaparement des territoires terrestres par les êtres humains qui ont provoqué la destruction massive de nombreux habitats et la destruction de nombreuses espèces animales et végétales malgré l’émergence de zones « réservées » à la faune et à la flore sauvages (réserves naturelles terrestres et océaniques).

 

 

 

LE MONDE DE DEMAIN

 

Les sociétés de demain

 

Bien malin celui qui pourrait prédire, aujourd’hui, avec justesse et exactitude la façon dont le monde évoluera et s’organisera (se réorganisera)… Essayons néanmoins de dégager des tendances et des orientations possibles…

 

Il nous faut impérativement, ici, reprendre la situation des sociétés contemporaines (telle que nous l’avons exposée dans les paragraphes consacrés aux sociétés d’aujourd’hui) pour donner un aperçu « des pistes et des chemins » qu’elles pourraient suivre dans un avenir proche…

 

Dans cette rubrique, nous aborderons donc successivement l’évolution des deux principaux courants alternatifs (les « sécuritaires » et les « progressistes »), les aspirations majeures des individus et l’orientation générale des sociétés humaines en matière de mode de gouvernance et de mode d’organisation ainsi que les mesures et les directions que le modèle sociétal dominant pourrait être amené à prendre au regard des problématiques actuelles.

 

 

Généralités

 

L’évolution des deux grands courants alternatifs

Nous devons, ici, envisager plusieurs cas de figure concernant l’évolution de ces deux courants alternatifs majeurs (qui pourraient se manifester à la fois sur le plan national et le plan international*) :

* Si ces orientations se réalisent d’abord sur le plan national (car l’attachement des individus à la nation reste très prégnant), il est probable (avec quelques mesures et aménagements et l’évolution naturelle des sociétés humaines) qu’elles finissent par se manifester (tôt ou tard) sur le plan planétaire ou international.

 

Premier cas de figure :

- les alternatifs sécuritaires demeurent inorganisés (et morcelés) ;

- les alternatifs progressistes demeurent inorganisés (et morcelés).

 

Le modèle sociétal dominant* pourrait alors continuer à « tenir les rênes »…

* Rappelons, ici, que le modèle sociétal dominant est un mix entre les valeurs « conservatrices et sécuritaires » des premiers et les valeurs « progressistes et solidaires » des seconds.

 

Deuxième cas de figure :

- les alternatifs sécuritaires s’organisent ;

- les alternatifs progressistes demeurent inorganisés (et morcelés).

 

Le modèle sociétal dominant se verra alors (sans doute) contraint d’intégrer à son fonctionnement une orientation plus sécuritaire.

 

Troisième cas de figure :

- les alternatifs sécuritaires demeurent inorganisés (et morcelés) ;

- les alternatifs progressistes s’organisent.

 

Le modèle sociétal dominant se verra alors (sans doute) contraint d’intégrer à son fonctionnement une orientation plus solidaire, respectueuse et citoyenne.

 

Quatrième cas de figure :

- les alternatifs sécuritaires s’organisent ;

- les alternatifs progressistes s’organisent.

 

Le modèle sociétal dominant se verra alors (sans doute) contraint d’intégrer à son fonctionnement une orientation à la fois plus sécuritaire et plus individualiste et plus solidaire, respectueuse et citoyenne.

 

Cinquième cas de figure :

- les alternatifs sécuritaires s’organisent de façon massive, puissante et « efficace » ;

- les alternatifs progressistes s’organisent de façon massive, puissante et « efficace ».

 

Le modèle sociétal dominant, sous la pression de la population, pourrait alors connaître un clivage important et être amené à une forme de scission (en se divisant en deux courants) : les « sécuritaires individualistes » et les « progressistes solidaires » (ce qui permettrait aux deux modèles alternatifs de se structurer et de s’organiser plus rapidement).

 

 

Les aspirations majeures des individus et l’orientation générale des sociétés humaines

Afin de ne pas complexifier inutilement notre analyse, nous ne retiendrons que trois paramètres essentiels :

 

- le mode de gouvernance ;

- le mode d’organisation ;

- et l’orientation générale.

 

Concernant le mode de gouvernance, nous retiendrons trois orientations :

 

Gouvernance 1

- les individus et les sociétés humaines privilégient la liberté et l’autonomie. L’Etat pourrait alors désinvestir les domaines de l’Etat Providence et laisser les individus s’organiser de façon individuelle.

 

Gouvernance 2

- les individus et les sociétés humaines privilégient « l’assistanat* » et la surveillance. L’Etat pourrait alors renforcer l’Etat Providence et « prendre en charge » collectivement les existences individuelles.

* Ou, plus exactement, une forme « d’accompagnement »…

 

Gouvernance 3

- les individus et les sociétés humaines privilégient les deux directions (à la fois la liberté et l’autonomie et « l’assistanat » et la surveillance avec des points d’incompatibilité et des « seuils infranchissables » — que nous avons déjà abordés). L’Etat pourrait alors laisser les individus s’organiser de façon individuelle, assurer l’encadrement général et une certaine forme d’équité entre les citoyens et prendre en charge collectivement ceux qui seront dans l’incapacité de participer au fonctionnement sociétal (hypothèse la plus probable).

 

Concernant le mode d’organisation, nous retiendrons trois orientations :

 

Organisation 1

- les individus et les sociétés humaines privilégient l’individualisme. L’Etat pourrait alors laisser les individus s’organiser de façon individuelle et veiller, plus ou moins, à une certaine forme d’équité minimale.

 

Organisation 2

- les individus et les sociétés humaines privilégient la solidarité. L’Etat pourrait alors renforcer l’Etat Providence, prendre en charge collectivement les existences individuelles et assurer un mode d’organisation et de redistribution plus équitable et solidaire.

 

Organisation 3

- les individus et les sociétés humaines privilégient les deux directions (à la fois l’individualisme et la solidarité avec des points d’incompatibilité et des « seuils infranchissables » (que nous avons déjà abordés). L’Etat pourrait alors laisser les individus s’organiser de façon individuelle, prendre en charge collectivement les existences « défaillantes » et assurer un mode d’organisation et de redistribution plus équitable et solidaire (hypothèse la plus probable).

 

NOTE : il existe incontestablement un lien étroit entre le type de gouvernance et le type d’organisation.

- soit une gouvernance organisationnelle 1 fondée sur l’individualisme, la liberté et l’autonomie

- soit une gouvernance organisationnelle 2 fondée sur la solidarité, « l’assistanat* » et la surveillance

- soit une gouvernance organisationnelle 3 fondée à la fois sur l’individualisme, la liberté et l’autonomie individuelles et la solidarité, « l’assistanat » et la surveillance (hypothèse la plus probable).

* Ou, plus exactement, une forme « d’accompagnement »…

 

Concernant l’orientation générale, nous retiendrons trois options :

 

Orientation 1

- les individus et les sociétés humaines privilégient les aspirations liées au désir, au confort, à la sécurité et aux savoirs (la connaissance de l’Existant). Les sociétés pourraient alors développer les recherches, les innovations et les moyens de production (l’industrie) en mesure de satisfaire les désirs, le confort et la sécurité des individus.

 

Orientation 2

- les individus et les sociétés humaines privilégient les aspirations liées à la compréhension (la connaissance de l’existence) et la spiritualité (perception, ressentis, compréhension et intégration à l’Être). Les sociétés pourraient alors développer des lieux, des espaces et des domaines susceptibles de permettre aux individus de répondre à leurs besoins de compréhension et de spiritualité.

 

Orientation 3 (hypothèse la plus probable)

- les individus et les sociétés humaines privilégient les deux directions (à la fois les aspirations liées aux désirs, aux savoirs et à la connaissance – avec, sans doute, une priorité pour les premiers). Les sociétés pourraient alors développer les recherches, les innovations et les moyens de production (l’industrie) en mesure de satisfaire les désirs, le confort et la sécurité des individus et laisser les citoyens s’organiser en matière de spiritualité.

 

NOTE : il est probable que l’orientation générale prise soit un mix des différentes aspirations (avec une préférence – plus ou moins forte – pour les aspirations liées au désir, au confort, à la sécurité et aux savoirs). Nos catégories pourraient alors se résumer à :

 

- une gouvernance organisationnelle orientative 1 fondée sur l’individualisme, la liberté et l’autonomie, le désir, le confort, la sécurité et les savoirs ;

 

- une gouvernance organisationnelle orientative 2 fondée sur la solidarité, « l’assistanat » (et la surveillance), les savoirs, la connaissance et la spiritualité ;

 

- une gouvernance organisationnelle orientative 3 fondée à la fois sur l’individualisme, la liberté et l’autonomie individuelles et la solidarité, « l’assistanat » et la surveillance, le désir, le confort, la sécurité et les savoirs, la connaissance et la spiritualité (hypothèse la plus probable).

 

Il semble raisonnable de penser que les individus et les sociétés s’orienteront vers des voies médianes (essayant de ne rien exclure…) et que leurs orientations sociétales concilieront à la fois la liberté et l’autonomie individuelles mais également une forme « d’assistanat » et de surveillance, l’individualisme et une forme de solidarité, les aspirations au progrès, au confort, à la sécurité et aux savoirs et les aspirations à la connaissance et à la spiritualité (qui seront, sans doute, de plus en plus prégnantes chez les individus mais qui relèveront de la sphère individuelle*). A cet égard, il est probable qu’advienne, dans un grand nombre de sociétés, l’hypothèse de la gouvernance organisationnelle orientative 3.

* Les sociétés contemporaines (en particulier les démocraties) sont (en général) laïques avec une séparation officielle entre « l’église » et l’Etat.

 

 

Les orientations du modèle sociétal dominant (les mesures et les directions prises au regard des problématiques actuelles)

Au regard des éléments actuels, nous pouvons également envisager, de façon un peu simpliste, trois scénarios concernant l’évolution générale des sociétés les plus puissantes aujourd’hui (dont la très grande majorité a adopté le modèle sociétal dominant) :

 

Le scénario pessimiste :

- augmentation de la pollution sans mesures antipollution réelles sur les plans national et international ;

- aucune évolution significative dans l’organisation de la production, de la distribution et des échanges ;

- augmentation de l’asservissement des individus par le système (et son organisation générale) ;

- aucune avancée dans le respect de l’Existant (Hommes, animaux, végétaux, sol, air, eau, environnement…) ;

- aucun accroissement du besoin de compréhension et de spiritualité ;

- aucune tolérance à l’égard des mouvements sociétaux alternatifs (et leur expérimentation), aucune « place » ne leur est attribuée par le système dominant* (avec une absence totale de coopération) ;

* La société ne leur permet ni « d’accéder » aux progrès ni de bénéficier de ses « avantages »…

 

Ces éléments risqueraient de causer une destruction substantielle de l’environnement (avec des dégâts, plus ou moins, irréversibles à court et moyen termes) et pourraient engendrer une baisse de la qualité de vie. Ils pourraient également (et éventuellement) donner naissance à une forme de révolution (fomentée par des individus totalement « pris à la gorge » et écrasés par un système devenu totalement « monstrueux ») avec des zones de résistance où vivraient des communautés alternatives plus ou moins retranchées.

 

La suite des évènements est plus difficile à prévoir. On pourrait imaginer une désintégration du modèle sociétal dominant et l’avènement d’un monde éclaté, fragmenté, très disparate et fortement communautaire où les groupes entretiendraient des rapports de force et de méfiance (voire de défiance) et qu’il serait très difficile (voire impossible) de fédérer. Peut-être que certaines communautés se livreraient essentiellement à la violence, d’autres s’orienteraient principalement vers le « désir-plaisir », d’autres vers l’écologie et/ou la spiritualité. Mais, sans doute, que l’essentiel des communautés s’attacherait à survivre et à se réorganiser pour recomposer une société qui serait plus ou moins la réplique du modèle sociétal antérieur… bref, un scénario très propice à l'émergence de « sociétés chaotiques » (nous y reviendrons dans les paragraphes consacrés au monde d’après-demain)...

 

Le scénario optimiste :

- arrêt ou baisse drastique de la pollution (avec mesures antipollution réelles sur les plans national et international) ;

- réorganisation progressive de la société (en matière de production, de distribution et d’échanges), de plus en plus soucieuse de l’épanouissement individuel ;

- diminution progressive de l’asservissement des individus par le système (et son organisation générale) ;

- forte amélioration en matière de respect de l’Existant ;

- accroissement du besoin de compréhension et de spiritualité ;

- encouragement et favorisation des mouvements sociétaux alternatifs (et leur expérimentation) avec une large coopération* ;

* La société pourrait les laisser accéder librement au système dominant et les laisser bénéficier de tous ses « avantages »…

 

Ce scénario permettrait un passage progressif (relativement fluide et rapide) vers un nouveau modèle sociétal et (peut-être) vers une nouvelle ère terrestre avec l’émergence (elle aussi, progressive) de communautés de vie (à taille humaine) écologiques, citoyennes et solidaires qui pourraient se regrouper (à terme) en grands pôles géographiques, entretenir des rapports de coopération et d’émulation et s’orienter vers des domaines-phares : la recherche et l’innovation, la création d’une industrie entièrement robotisée et automatisée (pour produire les biens nécessaires au confort), des aires consacrées au plaisir, au bien-être et à la distraction mais également aux savoirs, à l’enseignement, à l’écologie et à la spiritualité (nous y reviendrons dans les paragraphes consacrés au monde à moyen et long termes).

 

Le scénario médian (scénario le plus probable) :

- faible baisse ou stabilisation de la pollution (avec mesures antipollution sur les plans national et international) ;

- réorganisation lente de la société (en matière de production, de distribution et d’échanges), soucieuse autant des performances du système (en matière économique) que de l’épanouissement individuel ;

- stabilisation ou léger recul de l’asservissement des individus par le système (et son organisation générale) ;

- faible et très progressive amélioration en matière de respect de l’Existant ;

- faible accroissement du besoin de compréhension et de spiritualité ;

- tolérance (plus ou moins contrainte) des mouvements sociétaux alternatifs (et leur expérimentation) par le modèle dominant (globalement) peu enclin à la coopération*.

* Qui pourrait, par exemple, les laisser bénéficier de certains « avantages » et leur permettre un accès partiel à « ses progrès »…

 

Ce scénario permettrait un passage assez laborieux et relativement lent vers une nouvelle société, avec des poches de pollution irrécupérables, des aires dévastées, une hausse substantielle (voire, peut-être même, une exacerbation paroxystique) des comportements délétères chez une partie importante de la population et (sans doute) des zones de résistance où vivraient des communautés alternatives plus ou moins autonomes… scénario qui pourrait progressivement (très progressivement) amener à une réorganisation du monde avec la création (à terme) de grands pôles géographiques mais qui seraient (contrairement au scénario optimiste) en compétition, voire en conflit, en matière d’appropriation des ressources naturelles et des territoires et où les nations et les vastes ensembles territoriaux se livreraient (sans doute) à une concurrence sans merci en matière de développement, de performances et d’innovations dans les domaines précités*. Un monde qui devra, sans doute, composer avec des sociétés et/ou des communautés alternatives peu ou pas intégrées au système, des zones entièrement détruites ou très fortement dégradées par la pollution, des zones résiduelles de conflits et de guerres locales, des microsociétés ultra-protégées repliées sur elles-mêmes sans contact (ou avec peu de contact) avec l’extérieur, des zones entièrement dédiées au plaisir, au divertissement et au bien-être. Bref, un monde très disparate et hétérogène…

* La recherche et l’innovation, l’industrie, les savoirs, l’enseignement, le bien-être et la distraction, l’écologie et la spiritualité.

 

Il serait fastidieux (et, sans doute, inutile) d’opérer un croisement systématique* entre tous ces scénarios et hypothèses d’autant que certains livreraient des modèles de société très proches. Il nous semble plus judicieux de souligner les directions possibles issues des croisements les plus probables. Il nous faut néanmoins effectuer, ici, une distinction entre trois grands types de société :

* Croisement des différents cas de figure de l’évolution des deux grands courants alternatifs, des différents types de gouvernance organisationnelle orientative adoptéspar les individus et les sociétés et des différents scénarios du modèle sociétal dominant.

 

- les sociétés démocratiques (ou quasi démocratiques) ;

- les sociétés autocratiques (ou quasi autocratiques) ;

- et les sociétés théocratiques (ou quasi théocratiques).

 

Concernant les sociétés démocratiques, nous pouvons imaginer qu’une minorité d’entre elles et une minorité d’individus en leur sein (regroupés et, plus ou moins, organisés en mouvements et/ou en communautés) s’orienteront activement d’une part vers la solidarité, l’écologie et/ou la spiritualité et d’autre part vers l’exacerbation de l’individualisme, le « tout sécuritaire » et la prédominance des aspirations liées au désir, au confort et aux loisirs. L’essentiel des sociétés démocratiques et des individus s’orientera probablement vers un modèle mixte (croisement du scénario médian 3 et de la gouvernance organisationnelle orientative mixte 3 avec cas de figure 1, 2, 3 ou 4).

 

Concernant les sociétés autocratiques, il est probable qu’elles suivent les mêmes orientations que les sociétés démocratiques et qu’elles soient amenées progressivement à opter pour une gouvernance moins oligarchique...

 

Quant aux sociétés théocratiques, l’absence ou le manque de liberté ne permet pas (ou peu) la création de mouvements contestataires ou alternatifs. Les individus seront donc contraints (la joie ou la mort dans l’âme) de se soumettre aux règles édictées par les autorités jusqu’à une éventuelle révolution populaire ou un coup d’état qui provoquerait le renversement du régime au profit d’une gouvernance moins « rigide » à moins qu’advienne un assouplissement (naturel) des régimes théocratiques qui permette aux populations à la fois d’entretenir des liens avec les populations des sociétés non théocratiques et de bénéficier des progrès à l’œuvre partout dans le monde.

 

Quels que soient les scénarios, les hypothèses et les cas de figure qui se manifesteront, il existera sans doute, à l’échelle planétaire, des sociétés et des grands ensembles territoriaux avec des populations d’origines ethnique, culturelle et géographique très différentes (forme de melting-pot), composés de communautés progressistes, écologiques, solidaires et (éventuellement) spirituelles, de communautés conservatrices, plus ou moins, repliées sur elles-mêmes, de communautés mixtes (probablement les plus majoritaires) et de communautés et de zones dédiées au plaisir, au confort et au bien-être avec la persistance (provisoire) probable de sociétés théocratiques et autocratiques tyranniques.

 

L’ensemble de ces sociétés, communautés et ensembles territoriaux entretiendront très probablement des relations de concurrence (plus ou moins vives et exacerbées) et des rapports plus ou moins pacifiques* (excepté, peut-être, avec les sociétés théocratiques, les communautés et les mouvements religieux « agressifs » selon leur degré de violence et d’intolérance). Ils connaîtront sans doute également un développement parallèle et seront contraints à une cohabitation plus ou moins organisée et plus ou moins coopérative, dessinant un plan terrestre quadrillé en zones (très probablement étendues et structurées soit — hypothèse peu probable mais possible — totalement éparses et morcelées) et plus ou moins protégées (selon le degré de violence ambiant). Bref, en cette ère de morcellement, il y aura sans doute :

 

- des sociétés (très majoritaires) avec un modèle sociétal de type « démocratie social-démocrate », tempérées et mixtes, aspirant au progrès, au confort, à la sécurité, au développement des savoirs, privilégiant à la fois l’individualisme et une forme de solidarité, la liberté et l’autonomie individuelles et la surveillance, adeptes (plus ou moins forcées) d’une écologie utilitariste… ;

 

- des zones (minoritaires ou ultra minoritaires) où règneront des sociétés théocratiques ainsi que des groupes et des mouvements religieux « agressifs » ;

 

- des zones, des sociétés, des communautés et des mouvements (minoritaires ou ultra minoritaires) activement solidaires, écologiques et/ou spirituels ;

 

- des zones, des sociétés, des communautés et des mouvements (minoritaires ou ultra minoritaires) aspirant, de façon prioritaire, au « tout sécuritaire » ;

 

- des zones, des sociétés, des communautés et des mouvements (minoritaires ou ultra minoritaires) aspirant, de façon prioritaire, au confort et aux loisirs ;

* Méfiance et conflits (et peut-être même seront-ils amenés à livrer des guerres…) en matière d’appropriation et de répartition du territoire et des richesses naturelles…

 

Bref, autant dire une planète et un monde morcelés avec des territoires peuplés de nature sauvage, d’animaux et d’individus « spirituels » et frugaux, ouverts et accueillants, adeptes de la diversité et de la démocratie participative, avec des territoires peuplés de nature aménagée, « dominée » et contrôlée (voire artificielle) et d’individus axés sur la sécurité, le confort, le bien-être et les loisirs, fermés et repliés sur eux-mêmes, adeptes de l’uniformité, de l’ordre établi et de l’autorité, avec des territoires peuplés d’individus religieux (fondamentalistes) bornés, obscurantistes et archaïques, plus ou moins tolérants et violents et avec, enfin, des territoires médians (sans doute très majoritaires), adeptes d’une gouvernance démocratique social-démocrate, peuplés d’individus partagés entre leurs aspirations à la liberté et à l’épanouissement personnel et leurs aspirations à la sécurité et à la paix , soucieux d’eux-mêmes et modérément des autres individus et des problématiques environnementales… En un mot, un monde très divers, éclaté et hétérogène qui va (sans doute) rendre très lent et très difficile une harmonisation générale et une uniformisation minimale…

 

Après ce panorama général (« éclaté » et, disons-le, assez laborieux…), essayons de dessiner le portrait de la société représentative de demain en matière d’organisation politique, judiciaire et économique ainsi qu’en matière de relations « extérieures » et d’organisation territoriale.

 

 

L’organisation sociétale générale

Sur le plan de l’organisation politique, il est probable que le modèle démocratique devienne la référence sur l’essentiel des territoires terrestres. Il pourrait se généraliser et devenir le seul modèle viable et approprié (avec, bien sûr, quelques poches de résistance). Sur le plan national, les dysfonctionnements démocratiques pourraient se faire toujours plus « criants » et engendreraient l’émergence et le développement d’une « décentralisation » démocratique. Les collectivités locales pourraient alors, peu à peu, devenir des « territoires majeurs et centraux » où s’exerceraient des règles démocratiques plus appropriées et plus transparentes. L’Etat central pourrait également être progressivement contraint (et réduit) à n’exercer qu’un rôle fédérateur et d’encadrement du « bon fonctionnement démocratique » des collectivités locales tout en voyant se renforcer ses pouvoirs régaliens. Les décisions et les orientations pourraient émaner toujours davantage des autorités supranationales (regroupement progressif des nations en « zones territoriales » plus larges et pouvoir accru des organismes internationaux qui « dicteraient » leurs directives).

 

Sur le plan judiciaire (et policier), on pourrait assister à la poursuite de l’envolée inflationniste des lois, des décrets et des arrêtés dans tous les domaines de l’existence et tous les secteurs de la société, avec le renforcement de l’arsenal policier et judiciaire et l’émergence d’une société de contrôle et d’hyper surveillance.

 

Sur le plan de l’organisation économique, on pourrait assister à plusieurs tendances : la généralisation des grands groupes industriels, des grands groupes prestataires de services ainsi que des microentreprises multi-cartes de proximité. Les énormes chaînes commerciales de stockage et les entreprises de vente à distance et de vente « clé en main » pourraient se généraliser et la vente directe dans certains secteurs (prestations de services divers, alimentaire et artisanat) pourrait connaître une forte expansion en offrant des produits toujours plus hyper personnalisés. En matière d’échanges économiques, on pourrait assister à deux tendances : à la fois, la totale généralisation des échanges mondiaux (dans certains secteurs, notamment les biens manufacturés) et la généralisation des échanges locaux (dans les autres secteurs). Les modes de paiement tendraient à devenir immatériels (avec support). Quant à l’organisation du travail, l’emploi pourrait bien devenir « roi tyrannique » avec une hyperspécialisation des tâches et le développement d’autres modes de travail (multi-cartes, « multi-jobs », à distance ou très flexibles par exemple) en dépit de l’émergence (timide) d’activités plus porteuses de sens pour l’individu et la société.

 

Sur le plan international, le commerce deviendrait hyper mondialisé avec une concurrence accrue entre les nations et les regroupements nationaux (les « grands pôles géographiques ») en matière commerciale (parts de marché) et en matière d’appropriation des territoires et des ressources naturelles. La Terre pourrait néanmoins connaître une progressive pacification avec la disparition des conflits armés entre les nations et les « grands pôles territoriaux » malgré quelques poches de résistance, liées aux revendications communautaires, identitaires et idéologiques de certains individus et de certaines sociétés. Les flux migratoires internationaux pourraient devenir massifs malgré le « repli territorial », de plus en plus manifeste et inflexible, des « pays riches » et l’accession progressive d’une partie des pays dits « en voie de développement » à des conditions matérielles d’existence plus décentes et à un niveau de vie plus élevé (qui inciteraient les individus à rester sur « leurs terres »).

 

Au sein des « espaces nationaux », on pourrait assister à une réorganisation progressive des territoires avec une forte croissance urbaine (poursuite de l’hyperurbanisation et expansion des mégalopoles), un développement des zones péri urbaines et rurbaines, un repeuplement des zones rurales (régénérescence et modernisation des villages) et l’essor progressif d’espaces et de « lieux de vie » communautaires organisés (regroupements d’habitats sécurisés et alternatifs).

 

De façon parallèle à leur incessante réorganisation, les sociétés de demain s’inscriront (comme toutes celles qui les ont précédées) dans une amélioration des conditions d’existence des individus en essayant de fournir des réponses toujours plus performantes à leurs besoins organiques, matériels et psychiques élémentaires. Tentons, ici, de donner les principales caractéristiques et les grandes orientations possibles des sociétés de demain en matière de conditions de vie.

 

 

L’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence

Il n’est pas exclu que les sociétés de demain voient émerger une industrie agroalimentaire de synthèse et se multiplier les petites cultures et les petits élevages bio.

 

En matière de santé, pourraient se développer les logiciels de diagnostics et se généraliser la médecine informatisée et robotisée (avec le développement de l’artificialisation, de la sécurisation, de la médicalisation systématique – détection des anomalies génétiques – et l’accroissement des possibilités curatives – élimination progressive des dysfonctionnements physiologiques et des pathologies) sans oublier un fort accroissement de la médication allopathique chimique et le développement d’une médication de confort (pour maintenir un degré de satisfaction minimal) ainsi que l’émergence de systèmes synthético-chimiques de neutralisation de la souffrance et d’un kit* de protection psychique.

* Nous vous invitons à vous reporter aux paragraphes consacrés aux kits et à leur évolution pour davantage de précisions…

 

Les progrès technologiques pourraient également permettre de sérieuses avancées dans le processus de désalinisation de l’eau de mer et créer un cycle vertueux et autonome de l’eau de récupération et d’assainissement au niveau local. L'époque pourrait poursuivre les mesures anti-pollution et de lutte contre le gaspillage et améliorer l’accès à l’eau des populations sur l’ensemble du globe (en dépit d’une concurrence impitoyable en matière d’appropriation des ressources naturelles). Les toilettes sèches et la dépollution des systèmes de tout à l’égout par filtrage écologique pourraient également se développer.

 

En matière vestimentaire, les vêtements intelligents pourraient se généraliser. L’habitat pourrait, lui aussi, connaître de sérieux progrès avec le développement des habitats fonctionnels « tout confort » et écologiques, de plus en plus autonomes en matière énergétique et de plus en plus intelligents en matière de gestion du confort domestique et de protection contre les intrusions. La robotique informatisée « télécommandable » à distance* s’occupant de la préparation des repas, du nettoyage du linge et de la maisonnée pourrait également se développer.

* La domotique.

 

En matière de transport, on pourrait assister à plusieurs tendances : le développement des véhicules électriques et des véhicules « propres et intelligents » (avec navigation plus ou moins entièrement automatisée), de plus en plus autonomes, sécurisés et rapides et l’émergence des véhicules solaires et spatiaux.

 

Sur le plan sécuritaire, il n’est pas exclu de voir se généraliser les armes d’auto défense (du genre successeurs plus sophistiqués du taser), la vidéosurveillance et l’hyper protection de plus en plus performante et sophistiquée avec le développement de systèmes de reconnaissance faciale, digitale et oculaire en presque tous lieux. Et l'on pourrait assister (comme nous l’avons déjà évoqué) à un fort accroissement du nombre de lois, de règlements, des polices d’assurance, des contrats formels et des assignements en justice dans tous les domaines. Comme il est possible que se développent également (de façon considérable) la surveillance individuelle et collective, les forces de l’ordre, les milices privées et les remparts et systèmes de protection contre tous les types d’agression personnelle.

 

Sur le plan de la communication, on pourrait voir émerger de nouveaux modes communicatifs qui donneraient la sensation d’un contact « direct et réel » (avec tous les sens) et qui permettraient d’être relié à tout instant avec un – toujours plus – grand nombre d’individus « réels » ou « virtuels », avec une connexion quasi simultanée et quasi permanente à toutes les informations planétaires.

 

Sur le plan distractif, il est probable que l’on assiste à une généralisation de la virtualité et des zones dédiées aux loisirs familiaux et individuels, au développement des activités et des sports sensationnels (à frissons), des divertissements virtuels, interactifs, relaxants et (eux aussi) sensationnels où le psychisme pourrait être de plus en plus intégré sans compter l’émergence d’un tourisme spatial et la création d’un kit distractif.

 

Les progrès pourraient également contribuer à l’amélioration des possibilités expressives instantanées et en réseaux, accessibles à tous et à tout moment, à la multiplication et à la généralisation des créations où chacun pourrait exprimer « ce qu’il souhaite » et au développement des modes expressifs artistiques (et non artistiques) interactifs qui permettraient à tous de « ressentir la beauté et l’intensité » sans oublier l’émergence d’un kit expressif, d’un kit de connaissance de l’Existant et la généralisation de l’accès immédiat et permanent à tous les savoirs et à toutes les connaissances ainsi que le développement et la généralisation des intelligences artificielles et des mises en réseaux permanentes des stocks de données et d’informations (actualisées en temps réel). Progrès qui (soit dit en passant…) pourraient engendrer une régression des capacités cérébrales d’une partie de la population (liée à l’inactivité cérébrale induite par l’usage permanent des intelligences artificielles).

 

Enfin, il est fort probable que les sociétés de demain voient émerger de nouveaux domaines et de nouvelles disciplines ainsi que pléthore de découvertes et d’inventions sans oublier l’essor (vraisemblable) des centres de « développement personnel » et des centres spirituels, lié à l’exacerbation progressive du besoin de compréhension et de spiritualité*chez une partie de la population.

* De plus en plus d’individus aspireront à trouver un sens (plus profond) à l’existence et seront amenés à se consacrer « aux choses de l’esprit »… parmi eux, beaucoup (sans doute) s’engageront dans une quête existentielle(1)

(1) Se référer aux paragraphes consacrés au PLAN REPRESENTATIF INTELLECTUEL.

 

 

Le portrait de l’individu médian (représentatif de la société)

L’individu médian de demain aura sans doute plus ou moins les mêmes caractéristiques (mais en plus marquées) que l’individu médian d’aujourd’hui. Il consacrera l’essentiel de son temps à travailler pour obtenir un revenu (salaire) qui lui permette d’assurer la satisfaction de ses besoins physiques, matériels et psychiques élémentaires (alimentation, logement, santé, mobilité, loisirs…). Ses principales autres activités consisteront à dormir, à manger, à se reposer et à se distraire (avec une très forte augmentation du temps consacré aux loisirs et à la virtualité).

 

En dépit d’un savoir élémentaire (acquis au cours d’une scolarité plus ou moins longue), sa compréhension et sa perception sensible resteront grossières, apparentes et superficielles. Et il demeurera essentiellement soumis au psychisme, aux désirs et à la recherche (de plus en plus effrénée) de plaisirs.

 

En matière relationnelle, les comportements d’accaparement, de favorisation de l’intérêt personnel et de valorisation narcissique (bien que de plus en plus encadrés et régulés par la société) seront paroxystiques. Il entretiendra avec les autres individus (dans la sphère intime comme dans la sphère sociale) des rapports de domination et d’instrumentalisation de plus en plus édulcorés et déguisés et des rapports de domination et d’instrumentalisation de plus en plus puissants et de moins en moins respectueux à l’égard des autres formes (animales et végétales) et à l’égard de l’environnement (au sens large) avec néanmoins le développement (pour une partie de la population) d’une inversion du processus d’instrumentalisation et la naissance progressive d’un respect à l’égard de l’Existant (de nature principalement utilitariste mais également de nature révérencielle).

 

 

Les rapports à l’Existant

 

Les relations avec les congénères (relations sociales et relations intimes)

Favorisation de l’intérêt personnel et stratégies d’entente avec rapports de force, de domination et d’instrumentalisation, toujours déguisés en politesse, aménités et autres règles de civilité, avec quasi absence de violence et d’agressions physiques et avec une réduction de la violence psychique malgré la persistance d’une profonde dichotomie entre les individus de la sphère personnelle et les autres individus (essentiellement indifférence).

 

 

Les relations avec les animaux

Généralisation de la destruction de nombreux territoires et habitats (liée à l’explosion urbaine et à la surexploitation agricole et forestière). Poursuite de la réification et de l’instrumentalisation de certaines espèces animales (élevage, animaux de laboratoire). Et progression des droits de l’animal et de la protection des espèces menacées (développement des réserves et parcs naturels pour la faune sauvage).

 

 

Les relations avec les végétaux

Amélioration de la sélection génétique pour la végétation comestible (fruits et légumes) et d’agrément (fleurs et plantes diverses) avec un fort développement des modifications génétiques et une explosion de la destruction de la flore sauvage par la transformation des espaces terrestres en zones agricoles, en zones urbaines, en zones naturelles aménagées (parcs, chemins dans la nature) et en réseaux de transport (réseaux routier et ferroviaire) malgré le développement de la protection de la biodiversité végétale (réserves et parcs naturels pour la flore sauvage).

 

 

Les relations avec les minéraux

Poursuite de la surexploitation en dépit de l’épuisement des énergies fossiles. Et exploitation de nouveaux gisements (métaux « rares » et précieux, nécessaires à l’industrie technologique).

 

 

Les relations avec l’environnement (au sens large) eau, air, terre

Aggravation des altérations et de la pollution de l’air, de l’eau, des sols et des sous-sols avec l’émergence de zones quasiment « irrécupérables »…

 

 

Les relations avec les agents pathogènes

Développement de nouveaux virus, de nouvelles bactéries et de nouvelles pathologies. Essor des modifications génétiques des agents pathogènes. Et développement de nouvelles formes de prophylaxie et de traitement curatif.

 

 

Les relations avec l’espace

Fort développement des recherches (avec amélioration de la connaissance astrophysique et astronomique). Et expansion de « la conquête spatiale » avec l’éventuelle émergence d’un tourisme (spatial) et d’un habitat « spatial minoritaire de masse » (dans des zones cosmiques relativement proches).

 

 

Les relations avec les formes extraterrestres (non terrestres)

Si découverte de formes non terrestres, émergence d’une relation avec forte défiance et méfiance (forme d’agressivité défensive selon leurs intentions et leurs degrés de violence et de « Conscience »).

 

 

Les relations avec les formes énergétiques immatérielles (les « morts » entre autres…)

Rites et croyances.

 

 

L’impact général sur l’organisation des territoires entre toutes les formes

Omnipotence et omniprésence des sociétés humaines (avec l’hyper croissance démographique, l’explosion urbaine et la généralisation de l’accaparement des territoires par les êtres humains), engendrant la destruction de nombreux habitats et de nombreuses espèces animales et végétales en dépit du développement de zones « réservées » à la faune, à la flore et à la vie sauvages.

 

5 décembre 2017

Carnet n°65 La conscience et l'Existant - Chapitre 6 (suite et fin)

Essai / 2015 / L'exploration de l'être

La Vie et l’Existant ne semblent, en réalité, qu’un gigantesque jeu — violent et merveilleux — et une permanente célébration… A hauteur d’Homme, peut-être pourrions-nous penser que nous nous apprenons les uns les autres (et, bien souvent, à notre insu) à mieux les regarder et à mieux les vivre. A mieux les comprendre et à mieux les aimer… mais sur le plan de la Conscience, tout ce « cirque » — aimable ou corrosif — semble (presque) sans importance… Est-ce qui est… et ce qui est n’altère jamais Le Regard…

 

 Nous avons été contraints (pour des raisons d'ordre technique) de diviser la version numérique de cet ouvrage en dix parties.

Sommaire

Chapitre introductif

Chapitres 1 à 5

Chapitre 6 (début)

Chapitre 6 (suite)

 

 

LES REPRESENTATIONS ET LES CREATIONS HUMAINES : LE PLAN REPRESENTATIF INTELLECTUEL (les représentations imagées et conceptuelles)

 

Toutes les thématiques abordées dans cette rubrique correspondent aux principales représentations et créations humaines de l’Existant et de l’existence. On pourrait, en effet, définir le plan représentatif intellectuel comme l’ensemble des représentations de l’Existant (ce qui existe) et de l’existence. Soulignons, ici, qu’il s’est complexifié et étoffé au fil de la sophistication de la cognition (accession à l’abstraction et à l’organisation des idées). Et s’est construit essentiellement à partir des images et du langage. Le plan représentatif intellectuel est à l’origine de quatre plans majeurs :

 

- le plan artistique(1) ;

- le plan imaginaire ;

- les savoirs(2) (représentations et connaissances de l’Existant) ;

- et la connaissance(2) (représentations et connaissances de l’existence).

(1) Domaine que nous avons abordé dans les besoins expressifs.

(2) Domaines que nous avons abordés dans les besoins de compréhension.

 

Ces plans ont été, en grande partie, étudiés dans les paragraphes consacrés aux besoins de compréhension et aux besoins expressifs (et si nécessaire, nous vous invitons à vous y reporter), nous tâcherons simplement ici d’exposer quelques généralités...

 

Voir ANNEXE 4 (le plan représentatif intellectuel)

 

 

Le plan artistique

Le plan artistique est un plan expressif lié (en général) au plan émotionnel et/ou au plan imaginaire qui a recours aux images et/ou au langage pour représenter, de façon subjective, une idée (ou des idées) de l’Existant (du monde) et/ou de l’existence. Il regroupe l’ensemble des arts et des œuvres d’art. On y trouve toutes les créations en littérature (romans, nouvelles, poésie…), en arts graphiques (dessins, BD, peintures, gravures, univers virtuels des jeux vidéo…), en sculpture, musique, danse, théâtre, cinéma, photographie…

 

 

Le plan imaginaire

Le plan imaginaire est essentiellement composé du plan onirique (les rêves nocturnes) et du plan imaginatif (les « rêveries » diurnes). Cette seconde sous-catégorie regroupe des notions aussi différentes que l’inconscient collectif, l’imagination, les représentations et les projections mentales* (idées, pensées, concepts, souvenirs, anticipations projectives…).

* Non exprimées ou avant qu’elles ne s’expriment… ou dit, de façon plus triviale (et imagée), lorsqu’elles « se trouvent » encore « dans la tête »…

 

Le plan imaginaire semble intimement lié aux représentations mentales individuelles de l’Existant, aux circonstances existentielles individuelles, aux caractéristiques personnelles du fonctionnement psychique et aux représentations mentales collectives (plus ou moins variables selon les époques et les sociétés). Nous n’avons pas jugé nécessaire, dans cette rubrique, d’en retracer l’évolution historique… il nous paraît simplement essentiel, ici, de souligner que les contenus imaginaires (des individus et des sociétés) tendent progressivement à se matérialiser au fil des progrès et des avancées techniques et scientifiques (à ce titre, les jeux, les livres, les armes à feu, l’aviation, l’électricité et la conquête spatiale sont, parmi des milliers d’autres exemples, tout à fait illustratifs de cette « matérialisation » de l’imaginaire…).

 

 

Les savoirs

Les savoirs sont les représentations et les connaissances de l’Existant. Bien qu’il existe de très nombreux domaines où l’ignorance est flagrante et incontestable, ils n’ont cessé (et ne cesseront), au fil de l’histoire de l’humanité, de se développer. Ils sont essentiellement composés des savoirs pratiques (savoir-faire manuels et empiriques dans de nombreuses activités agricoles et artisanales par exemple) et des savoirs conceptuels qui regroupent les savoirs conceptuels appliqués (mécanique, électronique, robotique…), les savoirs conceptuels théoriques (connaissances des différents plans : astronomie, astrophysique, physique, chimie, géologie, paléontologie, biologie végétale, animale et humaine, médecine, sciences humaines – archéologie, sociologie, ethnologie, histoire, géographie, politique, économie, psychologie…) et les savoirs conceptuels abstraits avec les langages abstraits purs (essentiellement les mathématiques et l’informatique théorique) et les langages conceptuels purs (essentiellement la philosophie mais aussi la philologie, la linguistique ou l’épistémologie).

 

 

La connaissance

La connaissance pourrait être définie comme les représentations et les connaissances de l’existence. Elle regroupe essentiellement les connaissances idéologiques (les religions, les croyances et la cosmogonie), les connaissances « neutres(1) » (la métaphysique et la philosophie) et les connaissances subjectives(2) avec « vécu et ressentis » (la compréhension subjective et « personnelle » de l’existence).

(1) Orientées malgré tout par la pensée et les représentations des philosophes et les valeurs et les normes de la société et de l'époque...

(2) Aujourd'hui, ces connaissances subjectives se « réalisent » avec « l'appui » de divers domaines (différentes « techniques » de « développement personnel » et ce que d'aucuns qualifient – sans doute à tort – de « spiritualité*»)...

* De nos jours, le terme de « spiritualité » semble largement dévoyé... beaucoup en usent comme d'un « mot valise » assez flou – et souvent même assez « creux » – qui amalgame diverses techniques et méthodes qui ne relèvent aucunement, à nos yeux, de la spiritualité « authentique » mais d'une pseudo spiritualité à caractère égotico-psychique... (nous aborderons la spiritualité et le cheminement spirituel dans la rubrique suivante).

 

Notons que seule la connaissance sensible* (avec une compréhension intégrée au « vécu ») joue un rôle déterminant dans la transformation de l’individu et permet un « réel » engagement dans un cheminement intérieur et/ou spirituel.

* Qu’elle soit idéologique, religieuse, philosophique ou subjective (voir le plan spirituel)...

 

Les autres types de connaissance* n’affectent (bien souvent) que le plan intellectuel et/ou émotionnel. Ils peuvent influer sur les comportements de façon superficielle. Mais n’intègrent pas suffisamment les profondeurs de l’être pour initier une véritable transformation et un réel cheminement intérieurs.

* Par exemple les savoirs, les connaissances intellectuelles et/ou ce que l'on nomme « la culture générale »...

 

 

Notes sur la quête existentielle

La quête existentielle pourrait être définie comme une tentative de donner « du sens » à « son existence ». Elle trouve (le plus souvent) son origine dans un sentiment global d’insatisfaction à l’égard de la vie phénoménale... En général, les individus se questionnent, s’interrogent et cherchent des réponses sur le plan existentiel (en « changeant » de vie, de travail, de lieu de résidence, de croyances, d’idéologie, de partenaire…). Mais parfois* « ces changements » se révèlent insuffisants… les individus sont alors (plus ou moins) prêts (et disposés) à amorcer un cheminement spirituel…

* Lorsque les êtres sont suffisamment « mûrs » pour comprendre que le monde phénoménal (en général) et la satisfaction de leurs besoins et désirs (en particulier) ne seront jamais en mesure d’offrir une réponse appropriée et durable(1) à leur sentiment d’insatisfaction (ou à leur sentiment d’incomplétude)…

(1) Tant que les individus pensent, imaginent, croient ou ont l’espoir qu’un « changement existentiel » (une situation, une rencontre, un être, un contenu « de vie » etc etc) pourrait « régler » ou résoudre leur insatisfaction, ils s’y « accrocheront » et essaieront sans relâche de le faire advenir dans leur existence…

 

 

 

LA CONNAISSANCE DE SOI (COMPREHENSION SENSIBLE) : LE PLAN SPIRITUEL

Toutes les thématiques* abordées dans cette rubrique correspondent à la compréhension sensible (connaissance intégrée à la sensibilité et « au vécu ») des êtres humains pour répondre à leurs interrogations sur l’existence et trouver une issue « véritable » à leur sentiment (quasi permanent) d’insatisfaction et d’incomplétude...

* Nous les avons déjà en partie abordées dans le paragraphe consacré aux besoins de compréhension (et nous vous invitons à vous y reporter).

 

 

Le plan spirituel

Le plan spirituel* est un plan perceptif et « compréhensif sensible » particulier qui ne peut être classé dans les représentations intellectuelles (bien qu’elles en soient très souvent à l’origine). Il est perceptif et « compréhensif » car il est lié à la perception et à la compréhension mais également « sensible » car cette perception et cette compréhension (pour devenir « vivantes ») doivent être intégrées à l’être et faire ainsi partie intégrante de l’individu, avec de plus ou moins substantielles répercussions sur sa « vie intérieure », sa « façon de voir », son vécu, ses orientations et ses comportements (contrairement aux savoirs et aux connaissances (non sensibles) qui sont, en général, « déconnectés » du « vécu » et de l’existence des individus…). Nous pourrions donc, de façon éminemment simpliste, définir la spiritualité comme la perception et la compréhension sensible de l’Existant et de l’existence (la connaissance de soi).

* Domaine que nous avons abordé dans les besoins compréhension (et plus particulièrement de connaissance).

 

 

Le cheminement spirituel

 

Les différentes étapes du cheminement spirituel

Le cheminement spirituel comporte (en général) plusieurs étapes* :

* Les étapes et les catégories présentées ici sont éminemment didactiques. Elles permettent simplement d'appréhender le « parcours spirituel » et de comprendre sa logique. Il semblerait, en vérité, qu'il n'existe aucun « être éveillé » mais seulement une Présence (impersonnelle) et une « activité éveillée » à laquelle les êtres, qui « habitent » plus largement l'espace de Conscience, participent... et qu'ils contribuent à faire rayonner (n'ayez crainte, nous y reviendrons...)...

 

Première étape : l’avant-chemin

Les individus « se tournent » vers l’intériorité lorsque l’existence (l’existence phénoménale) a porté « ses fruits infructueux »… lorsque leur « quête existentielle » s’est révélée « inefficace »… et incapable de « résoudre » leur insatisfaction… lorsque les individus comprennent qu’en dépit de tout ce qu’ils ont créé, appris, vécu et obtenu, leurs conditions d’existence ne pourront pas leur offrir la paix, la joie et le sentiment de plénitude et de complétude qu’ils n’ont cessé de chercher (inconsciemment) à travers tous les actes de leur vie. L’insatisfaction et le sentiment d’incomplétude sont souvent les conditions nécessaires pour entreprendre les premiers pas sur le chemin intérieur

 

La Vie (comme on le dit un peu trivialement) peut alors totalement perdre « son sens » et enjoindre aux individus d'en trouver un plus vrai et plus profond… Au cours de cette période, l’amélioration des conditions d’existence et les actions « compensatoires » habituelles s’avèrent (en général) inaptes à sortir les individus de ce qu’ils considèrent comme une « impasse ». Ils peuvent alors perdre goût à toute action et à tout projet... Leurs représentations de l’existence (croyances, espoirs, idées) peuvent vaciller, s’étioler ou exploser. Animés d’un désir « au-delà de tous les désirs », ils sont (très souvent) enclins à s’interroger sur ce qu’est (« réellement ») la Vie et sur ce qu’ils sont profondément… et à investiguer au-delà de leurs idées (« ordinaires » et coutumières) sur le monde et sur eux-mêmes.

 

 

Deuxième étape : les pas sur le chemin spirituel « personnel »

A ce stade, les individus peuvent opérer plusieurs choix selon leur « maturité », leur sensibilité et leurs prédispositions. Ils peuvent se tourner vers la philosophie, les religions, le « développement personnel », la spiritualité « laïque »… et se mettre (éventuellement) à réaliser des exercices et des rituels, à observer des « pratiques comportementales », à suivre des instructions… Tel est le lot habituel des individus qui, très majoritairement, suivent une voie « spirituelle » progressive.

 

Profitons de cette rubrique pour souligner l’une des différences majeures entre les religions(1) et les voies spirituelles progressives(1) et les voies spirituelles directes. Dans les premières (et en particulier au sein des religions), on assiste, en général, à un étouffement et à une volonté de transformation des élans psychiques et organiques naturels pour les faire « coïncider » avec les idéaux de l’esprit et l’idéologie(2) avec (dans l’immense majorité des cas) un décalage important entre les comportements apparents et la vie intérieure. Il semblerait que « cet écart » constitue un obstacle plus ou moins rédhibitoire à l’intégration (naturelle) à l’Être des préceptes véhiculés par la tradition religieuse ou spirituelle et ne permette pas (le plus souvent) la moindre « avancée », à moins d’un progressif, rare et assez mystérieux processus qui offre à l’individu la possibilité d’une « réconciliation totale » entre l’ensemble de ses pans psychiques (tous les aspects de sa personnalité) et son « aspiration » spirituelle. Dans les voies spirituelles directes, en revanche, il n’y a aucune différence entre la vie intérieure et les comportements « extérieurs ». Les élans psychiques et organiques naturels sont utilisés, accueillis et acceptés (pleinement). Et ils se transforment naturellement et progressivement lorsque survient une perception non psychique authentique, autrement dit lorsque la perception depuis l’espace de Conscience devient « réelle(3) »

(1) Il semblerait que l'essentiel des voies spirituelles progressives s'inscrive dans une perspective et/ou une tradition religieuse (seul un très faible nombre de ces approches est qualifié de et/ou est considéré comme « laïques » ou non religieuses...). Notons également, ici, qu'un cheminement spirituel « progressif » peut être considéré, à bien des égards, comme une sorte « d'application personnelle » des dogmes et des « enseignements » d'une tradition (très souvent) religieuse et comme une « pratique et un cheminement individuels » en son sein...

(2) Les dogmes de la tradition religieuse ou spirituelle « choisie »...

(3) Avec en début de phase, d’inévitables aller-retour entre l’espace psychique « individuel » et l’espace impersonnel avant une forme de « stabilisation » au sein de l’espace de Conscience.

 

Au cours de cette étape, notons également qu’il existe de nombreux écueils que les individus (en général) ne peuvent éviter : la consommation et le nomadisme spirituels, le syncrétisme ou l’appropriation égotique des caractéristiques impersonnelles au cours d’éventuelles et brèves « percées » dans l’impersonnalité…

 

Au cours de cette phase, plusieurs cas de figure peuvent se présenter :

 

1. les individus « s’acharnent » à pratiquer et aspirent à « progresser » sur la voie religieuse ou spirituelle (progressive) qu’ils ont « choisie » en se persuadant qu’ils vont, tôt ou tard, bénéficier « des fruits » de leurs efforts. Parmi eux, l’immense majorité « s’enlisera » dans cette impasse… D’autres (plus « mûrs » sur le plan de la compréhension et plus enclins à s’abandonner…) parviendront à intégrer à « leur être », de façon plus ou moins profonde, les préceptes qu’ils se sont efforcés de suivre (souvent pendant de longues années)…

 

2. les individus comprennent qu’ils ne parviendront pas à changer et à transformer « quoi que ce soit » en poursuivant leurs efforts sur « cette voie »… Peut s’ensuivre alors un passage âpre, difficile et plus ou moins long (selon le degré « d’encombrement psychique(1)) où l’individu est confronté au désespoir, au vide, à l’incompréhension totale (voire, parfois, à un très fort sentiment de déréliction) qui semble correspondre à un processus de désencombrement psychique(2) nécessaire pour accéder au ressenti de l’Être et à la perception non psychique.

(1) Le psychisme est « encombré » de désirs, d’idées, de représentations, de croyances et d’espoirs qui obstruent l’espace perceptif au point de rendre impossible le ressenti de la dimension impersonnelle de la perception.

(2) Au cours de ce passage (souvent vécu comme douloureux et éprouvant), l’individu voit ses représentations du monde, de la vie et de lui-même se désagréger… tout ce qu’il croyait être, tout ce qu’il pensait de lui-même et du monde, toutes ses idées, ses croyances et ses espoirs « se déchirent » et ne peuvent plus constituer des repères sur lesquels s’appuyer (voilà, sans doute, la raison principale pour laquelle ce « rite de passage » est vécu comme douloureux et éprouvant)… l’individu est confronté au vide… et s’il se laisse « mener », il ne reste plus rien… pas la moindre certitude à laquelle se « raccrocher »… l’identité alors vacille…

 

Après cette plus ou moins longue période de doutes, de peurs, de souffrance, d’incompréhension (quasi-totale), de fébrilité et de très forte impuissance, certains (ceux, en particulier, qui sont animés d’un farouche besoin de compréhension) finiront par « capituler » et s’abandonner à « ce qui est » en se laissant « conduire » par les forces en présence… qui achèveront d’anéantir leur « identité » et leur volonté…

 

Au cœur de cette capitulation et de cet abandon général (si l’individu est assez « mûr » pour l’expérimenter) peut alors advenir l’Impensable : lorsque les éléments psychiques les plus grossiers (désirs, représentations, idées, croyances et espoirs) ont été « anéantis » et/ou ne constituent plus un appui suffisant (auquel « se raccrocher »), l’ouverture à la Conscience devient alors possible. L’espace de Conscience impersonnel peut être « appréhendé » et « habité »… le vide insupportable et « le néant » (perçus par le psychisme) se transmutent alors, par une mystérieuse alchimie, en plénitude. L’individu « n’existe plus », les formes « n’existent plus », le monde « n’existe plus », la souffrance « n’existe plus », ils sont vus pour ce qu’ils sont... illusions et moteurs vers l’Eveil (la pleine réalisation de soi). Tout n’est (ou ne semble être) que Conscience impersonnelle au sein de laquelle tout apparaît, se meut et disparaît (tout... y compris le personnage auquel le psychisme s’était toujours identifié). Les individus « découvrent » (au sens littéral) un espace d’Amour impersonnel qui aime tout*. Ainsi semble être la façon dont l’Amour se manifeste « à ses débuts »… Amour qui ouvre alors à la possibilité de nouer des relations non motivées par l’intérêt personnel…

* La moindre forme, la moindre manifestation et le moindre phénomène… y compris, bien sûr, le personnage auquel ils se sont toujours identifiés ainsi que les situations et les circonstances qui peuvent leur être dommageables ou préjudiciables…

 

Merveilleuse période de béatitude, de joie, de paix, de silence et d’amour… instants de grâce et de lévitation où l’individu est Présence silencieuse et impersonnelle, éminemment sensible et bienveillante à l’égard de toutes les formes et de toutes les manifestations, et pleinement présent à chaque instant (avec l’abolition du temps psychologique et la disparition (souvent provisoire) des projections psychiques temporelles (rêveries dans le passé et l’avenir)…

 

 

Troisième étape : la Conscience mineure

En premier lieu, notons que cette appellation de Conscience mineure ne doit pas laisser penser qu’il existe plusieurs consciences. Du point de vue humain, il semblerait qu’il n’y ait qu’une Conscience (impersonnelle et perçue comme « originelle ») qui peut (simplement) être « habitée » de plusieurs façons* (nous aborderons cette thématique, de façon détaillée, dans les paragraphes consacrés à la perception).

 

Ici, le terme « mineure » signifie simplement qu’à ce stade de compréhension, la Conscience ne peut être « habitée » que de façon partielle (essentiellement au regard des encombrements psychiques et des résidus égotiques encore relativement grossiers).

* De façon synthétique, il semblerait qu’il existe essentiellement six façons « d’habiter » l’espace de Conscience pour les êtres humains :

- INEXISTANTE ou QUASI INEXISTANTE (TOTALE IGNORANCE – QUASI « PURE » INCONSCIENCE) avec omnipotence du psychisme et totale identification à la forme (au corps) ;

- TRES RESTREINTE et RESTREINTE (que l’on pourrait qualifier de quasi-totale IGNORANCE) avec très forte prédominance du psychisme et identification quasi-totale à la forme (au corps) ;

- PARTIELLE (que l’on pourrait qualifier de CONSCIENCE MINEURE) avec identification partielle à la fois au psychisme et à la forme et ouverture partielle à la Conscience ;

- LARGE (que l’on pourrait qualifier de CONSCIENCE MAJEURE) avec résidus subtils d’identification au psychisme et à la forme et ouverture large à la Conscience ;

- TOTALE sans aucun résidu d’identification au psychisme et à la forme – sans doute extrêmement rare (voire quasi impossible) pour un être humain vivant.

 

Le début de cette étape semble constituer, en réalité, les « réels premiers pas » sur le chemin spirituel. Notons aussi qu’il existe (de façon rarissime) des cas « d’éveil spontané » qui permet à certains individus « d’habiter » l’espace de Conscience impersonnelle de façon soudaine* (et souvent impromptue) sans y avoir été préparés n’y avoir suivi un cheminement intérieur.

* Nous pouvons tout de même supposer que la « maturité intérieure » de ces individus pourrait être la résultante d’un cheminement antérieur (processus actualisé au cours de vie(s) antérieure(s))... mais nous ne prendrons pas la peine de développer ce point pour ne pas offrir le bâton à ceux qui s’empresseraient de le saisir en nous frappant du sceau d’un quelconque ésotérisme idéologique (auquel nous nous sommes toujours refusés…).

 

Cette période de « béatitude » (la première phase de la troisième étape décrite dans le paragraphe précédent) est provisoire… Et sa durée est variable : de quelques heures à quelques mois (parfois — et plus rarement — quelques années). L’individu est amené, tôt ou tard, à retrouver « son espace psychique habituel ». S’en suit une longue période d’oscillation (la deuxième phase de la troisième étape) entre les deux espaces (l’espace psychique et l’espace de Conscience) où l’individu est invité (avec plus ou moins d’âpreté…) à se laisser désencombrer davantage et à laisser l’unification entre les plans psychique et impersonnel se réaliser à son propre rythme. Comme il est invité à laisser sa dimension relative (les caractéristiques de son psychisme, « sa personnalité », sa sensibilité, ses prédispositions naturelles, son existence « personnelle » d’individu) suivre ses mouvements naturels et s’unir naturellement à l’Absolu* sans qu’intervienne la moindre volition. Laisser faire, laisser faire et encore et toujours laisser faire ce qui surgit et advient…

* Dans nos précédents ouvrages, nous avons longuement abordé les caractéristiques de cette étape (celle où semble se situer aujourd’hui l’auteur de ces lignes). Pour de plus amples informations, nous vous invitons à en consulter quelques-uns…

 

Pour résumer cette période, nous pourrions dire que l’individu découvre l’Absolu puis le quitte pour être « ramené » à sa condition d’individu (avec souvent un — inévitable — sentiment de régression). Mais, en dépit des apparences, la compréhension et la perception de l’existence et de l’Existant, les ressentis et la sensibilité s’élargissent, s’approfondissent et s’affinent. Et l’intégration à l’Être (bien qu’elle conserve ses mystères et son étrange et imperceptible alchimie) semble plus profonde et plus puissante…

 

Notons également qu’à ce stade, les différences entre la vie intérieure et les comportements « extérieurs » s’amenuisent considérablement. Les élans psychiques et organiques naturels sont utilisés et se transforment naturellement… en dépit des inévitables allers-retours entre l’espace psychique individuel et l’espace impersonnel… et avant une « réelle stabilisation » du regard dans l’espace de Conscience.

 

Au cours de cette phase, les désirs et les besoins organiques de l’individu ont tendance à se réorganiser, libérant ainsi les énergies qui, elles aussi, tendent à se réorganiser pour « être utilisées » naturellement sur le plan spirituel. L’individu qui a perçu, vécu et « habité » temporairement l’impersonnalité, la Joie, le Silence, la Paix, l’Amour et la Plénitude-Complétude entretient naturellement un autre rapport à soi, aux autres et au monde. Son existence se simplifie considérablement et devient éminemment fonctionnelle (adaptée aux situations, aux circonstances et aux évènements). Les désirs perdent leur force. Les attentes disparaissent de façon substantielle. Les idées, les croyances, les espoirs, les peurs et les représentations mentales s’amenuisent considérablement. Et sont laissés, eux aussi, à leurs mouvements naturels*. L’emprise égotique et les saisies psychiques connaissent un net recul… Elles peuvent encore se manifester de temps à autre mais la capacité de distanciation et de lâcher prise s’est développée et « renforcée ». L’individu laisse (globalement) le corps et le psychisme à leurs mouvements spontanés et naturels. L’individu s’alimente, s’habille, se loge, vit et agit au quotidien sans contrainte volitive et de façon simple. Les relations aux autres et au monde perdent leur caractère délétère et instrumentalisant.

* Des éléments égotiques (désirs, peurs etc) peuvent encore se manifester mais ils ne sont plus alimentés (l’analogie avec la bicyclette peut être ici judicieuse : lorsque l’on ne pédale plus, le vélo peut encore continuer sa course pendant quelques temps mais tôt ou tard, il finit par s’arrêter…)

 

L’individu ne cherche plus à obtenir quoi que ce soit… la quête fébrile d’amour, de succès, de reconnaissance, de bien-être et de confort est stoppée (ou du moins, comme nous le disions, n’est plus alimentée). Les besoins de saisie et d’accaparement et les comportements égotiques, narcissiques et stratégiques d’instrumentalisation, de maîtrise et de domination ne sont globalement plus actifs. L’individu est beaucoup moins enclin à fuir (il sait qu’il n’y a nul lieu où se réfugier…). Le processus de désidentification au corps et à l’individualité est « en marche »… La perception, plus ou moins, directe et profonde « du réel » l’invite naturellement à délaisser la pensée, les questionnements (avec l’extinction des questions et des interrogations existentielles et métaphysiques), l’intellect et les distractions. En un mot, l’individu ressent et est bien davantage qu’il n’est enclin à penser et à faire pour obtenir ce qu’il croit lui manquer car il sait qu’il ne manque jamais rien…

 

Notons enfin que la tradition du bouddhisme theravada* nous semble pertinente à ce sujet dans sa description des quatre grandes phases du cheminement spirituel vers l’Eveil. Elle distingue ainsi quatre étapes :

* Précisons immédiatement que nous n’appartenons à aucune tradition, à aucune mouvance ni à aucun courant de pensée (quels qu’ils soient…)

 

- première étape : entrer dans le courant ;

- deuxième étape : revenir encore ;

- troisième étape : le non-retour ;

- quatrième étape : le grand Eveil.

 

La première étape (entrer dans le courant(1)) et la deuxième étape (revenir encore(2)) semblent coïncider avec la Conscience que nous avons décidé de qualifier de mineure.

(1) L’entrée dans le courant de l’impersonnalité…

(2) Revenir à l’espace de Conscience impersonnelle et à l’espace psychique et ne cesser d’osciller entre les deux — selon le degré de maturité spirituelle, le degré d’intégration à l’Être, l’épaisseur des « résidus égotiques » et le « degré d’encombrement psychique »…

 

 

Quelques mots sur le voyage astral :

Ce que l’on a coutume d’appeler le voyage astral semble correspondre à un processus de désidentification provisoire de l’esprit avec le corps qui lui donne la sensation (ou le sentiment) de « voyager hors » du corps…

 

 

Quelques mots sur le chamanisme :

Le chamanisme est très ancien… Il existe, en effet, depuis des millénaires sur de nombreux territoires terrestres. Le chamane est un sorcier qui occupe une fonction sociale et culturelle (que nous n’aborderons pas ici) mais il détient également des « pouvoirs »… Le chamanisme est un univers relativement mystérieux et méconnu qui utilise différents instruments (le rêve, les psychotropes naturels, la transe…) pour parvenir à différentes modifications de conscience et de perception de l’Existant et de l’existence (par, entre autres, des modifications du « point d’assemblage »). Il est évident que le chamanisme est une voie spirituelle singulière* dont nous ne pouvons faire l’impasse mais que notre méconnaissance ne permet de développer…

* A cet égard, il est notable de souligner que le chamanisme opère, à l’instar de nombreuses autres traditions spirituelles, une distinction entre le monde des phénomènes et « de la matière » (qu’il nomme « le tonal ») et l’Être, le monde invisible et immatériel — le monde nouménal autrement appelé le Soi, le Divin, la nature de l'Esprit, la Conscience, la Présence etc etc — (qu’il nomme « le nagual »)…

 

 

Quatrième étape : la Conscience majeure*

Ici, le terme « majeure » signifie que la Conscience est « habitée » de façon large et substantielle (en dépit de quelques résidus égotiques plus ou moins subtils liés à l’entité psychocorporelle et à la puissance identificatoire du psychisme humain).

* Malgré l’expérimentation de très brèves et (sans doute) très superficielles « percées » dans l’Unité (sentiment d’Amour et d’indissociabilité entre Ce qui perçoit – la Conscience – et tous les mouvements, manifestations ou surgissements – les phénomènes – en son sein), cette avant dernière étape (avant la Conscience totale, pleine et entière) nous reste globalement inconnue. Et nous ne pourrons en dire que « le peu » que nous en savons (sans l’avoir véritablement et pleinement vécu)…

 

La troisième étape (le non-retour(1)) et la quatrième étape du bouddhisme theravada (le grand Eveil(2)) semblent coïncider avec la Conscience que nous avons décidé de qualifier de majeure.

(1) L’entrée « définitive » dans l’impersonnalité sans retour dans l’espace psychique.

(2) Qui pourrait correspondre au fait « d’habiter » la Conscience de façon pleine, entière et complète.

 

Il semblerait que cette étape ne soit franchie aujourd’hui (et n’ait été franchie au cours de l’histoire de l’humanité) que par de rares êtres humains, ceux dont la légitimité « d’êtres éveillés » ou quasi éveillés et/ou de grands maîtres spirituels ne peut être remise en cause…

 

Cette phase se caractérise sans doute par un approfondissement et une stabilité quasi continue de l’Être et de la Présence silencieuse. Le processus de désidentification tendrait à s’approfondir en dépit de la persistance de quelques résidus égotiques et identificatoires subtils et la trace d’ombres d’ignorance ténues. L’accès à l’Être-connaissance (intelligence consciente) en mesure de tout (ou quasiment tout) percevoir et comprendre directement est rendu possible… et le sentiment d’Unité (Amour absolu) devient quasi permanent…

 

  

Cinquième étape : la Pleine Conscience

Cette ultime étape semble, de nos jours (et depuis que l’Homme existe), extrêmement rare (voire rarissime). Sans doute ne se réalise-t-elle qu’à la mort physique (la mort du corps) des très grands maîtres spirituels… On peut supposer qu’elle se caractérise par l’Être Présence Amour et Intelligence sensible permanent sans aucun résidu égotique et identificatoire.

 

 

Bref aperçu historique

L’évolution historique du domaine spirituel a déjà été, en partie, abordée dans les paragraphes consacrés à la connaissance (voir les besoins de compréhension).

 

Rappelons simplement, ici, que la spiritualité (quelles que soient les époques et les sociétés) n'a toujours, plus ou moins, concerné qu'une infime minorité d’individus. Et bien que certaines sociétés ou civilisations se soient collectivement inscrites dans une perspective religieuse et/ou spirituelle et qu’ont toujours, plus ou moins, existé dans le monde des communautés religieuses (les chamanes et les sorciers, les églises, les clergés et leurs fidèles, les ordres religieux, les moines, les moniales et divers ordres laïcs), peu d’individus, en définitive, semblent être parvenus à une compréhension qui dépasse la simple croyance ou la simple démarche intellectuelle. Peu d’êtres humains (des cas exceptionnels ou une faible minorité) se sont réellement et profondément interrogés (autant que leurs facultés et leurs dispositions leur permettaient) sur l’existence, la nature de l’esprit ou de la Conscience, sur les mécanismes à l’œuvre dans le fonctionnement psychique, sur l’origine et la nature des pensées, des émotions, des peurs et sur leur « véritable » identité…

 

Et aujourd’hui encore très peu s’interrogent… même si l’on assiste, de nos jours, à un léger frémissement des esprits (de certains esprits) face à l’absurdité apparente du monde, aux disparités toujours plus vives entre les individus, à l’absence de perspectives des sociétés modernes et à la puissante fuite en avant qu’on leur propose un peu partout… ce frémissement des esprits invite certains individus (sans doute de plus en plus d’individus) à s’interroger… et à essayer de trouver du sens… Processus qui inaugure, en général (comme nous l’avons évoqué), l’entrée dans un authentique cheminement intérieur et spirituel…

 

Il est très difficile d’apprécier l’évolution qualitative et quantitative de la spiritualité et de la connaissance de soi au fil des siècles. Nous nous y essaierons néanmoins en retenant quelques indicateurs principaux (dont la valeur et la justesse pourraient être discutées…) que nous remplirons « à la louche » :

 

- la compréhension générale de l’individu représentatif(1) ;

- la perception (psychique et/ou consciente) de l’individu représentatif(1) ;

- la sensibilité émotionnelle (spirituelle) de l’individu représentatif(1) ;

- la proportion d’individus engagés dans un cheminement spirituel « élémentaire(2) »;

- la proportion d’individus engagés dans un cheminement spirituel « avancé(3) » ;

- la proportion d’individus « pleinement réalisés(4) ».

(1) Représentatif de la société et de l’époque.

(2) Engagés dans la première ou la deuxième étape du cheminement spirituel.

(3) Engagés dans la troisième ou la quatrième étape du cheminement spirituel.

(4) « Parvenus » à la cinquième (et ultime) étape du cheminement spirituel.

 

 

Premières sociétés humaines

Il est probable que la spiritualité était inexistante. Le psychisme et la cognition étaient vraisemblablement trop rudimentaires pour pouvoir s’interroger et l’essentiel des préoccupations consistait (sans doute) à survivre…

 

La compréhension générale : quasi nulle

La perception : excessivement élémentaire, apparente et superficielle

La sensibilité émotionnelle : quasi nulle

La proportion d’individus engagés dans un cheminement spirituel élémentaire : nulle

La proportion d’individus engagés dans un cheminement spirituel avancé : nulle

La proportion d’individus « pleinement réalisés » : nulle

 

 

NOTE SUR LES SOCIETES HUMAINES ET LA SPIRITUALITE : dans les sociétés primitives, les sociétés d’avant-hier et d’hier, les sociétés d’aujourd’hui et les sociétés de demain, la compréhension, la perception et la sensibilité émotionnelle étaient, sont et seront assez similaires*…

* Nous avons déjà en partie abordé ces thématiques dans les paragraphes consacrés aux besoins de compréhension (et, en particulier, à la connaissance). Nous vous invitons à vous y reporter…

 

Soulignons simplement, ici, que la compréhension générale de l’individu représentatif des sociétés primitives, des sociétés d’avant-hier et d’hier, des sociétés d’aujourd’hui et des sociétés de demain, sa perception (psychique et/ou consciente) et sa sensibilité émotionnelle étaient, sont et seront sans doute éminemment mineures, grossières, élémentaires et superficielles.

 

La proportion d’individus engagés dans un cheminement spirituel (élémentaire ou avancé) était, est et sera rarissime, exceptionnelle ou très minoritaire. Comme (a fortiori) l’était, l’est et le sera, sans doute plus encore, la part des individus « pleinement réalisés ».

 

Sociétés primitives

La compréhension générale : infime

La perception : élémentaire, apparente et superficielle

La sensibilité émotionnelle : éminemment élémentaire et superficielle

La proportion d’individus engagés dans un cheminement spirituel élémentaire : rarissime

La proportion d’individus engagés dans un cheminement spirituel avancé : rarissime

La proportion d’individus « pleinement réalisés » : cas isolés exceptionnels

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18èmesiècle)

La compréhension générale : excessivement mineure

La perception : apparente et superficielle

La sensibilité émotionnelle : excessivement grossière et superficielle

La proportion d’individus engagés dans un cheminement spirituel élémentaire : rarissime

La proportion d’individus engagés dans un cheminement spirituel avancé : rarissime

La proportion d’individus « pleinement réalisés » : cas isolés exceptionnels

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

La compréhension générale : éminemment mineure

La perception : apparente et superficielle

La sensibilité émotionnelle : éminemment grossière et superficielle

La proportion d’individus engagés dans un cheminement spirituel élémentaire : infime

La proportion d’individus engagés dans un cheminement spirituel avancé : infime

La proportion d’individus « pleinement réalisés » : cas isolés exceptionnels

 

Sociétés d’aujourd’hui

La compréhension générale : très mineure

La perception : apparente et superficielle

La sensibilité émotionnelle : très grossière et superficielle

La proportion d’individus engagés dans un cheminement spirituel élémentaire : fortement minoritaire

La proportion d’individus engagés dans un cheminement spirituel avancé : ultra minoritaire

La proportion d’individus « pleinement réalisés » : cas isolés exceptionnels

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu une telle évolution), nous pouvons dire que la spiritualité a globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Offre – structures

Autrefois, le sorcier ou le chamane « offrait » son savoir, ses connaissances et « son pouvoir » à ceux qui venaient le visiter pour « guérir », « aller mieux » et/ou faire fuir les « mauvais esprits ». Dans de nombreuses régions du monde, ils continuent d’exercer leur aptitude à communiquer avec « les esprits et les forces invisibles » en intercédant auprès des Hommes et de jouer un rôle social prépondérant.

 

Dans d’autres contrées, les « Eglises » (religions polythéistes et monothéistes) prirent le relais, s’organisèrent, de façon plus ou moins hiérarchique, et insufflèrent leur idéologie aux individus soucieux d’être guidés par un ou des Dieu(x), certes invisible(s), mais qui leur dicterai(en)t ses/leurs préceptes et lois à travers la « bonne parole » des hommes de Dieu pour soumettre leurs comportements aux « règles divines » afin d’accéder au Paradis qu’on leur promettait (et qu’on leur promet encore) s’ils se soumettaient sans résistance aux « injonctions célestes » et acceptaient leur sort et leur vie terrestre misérable (et si possible) sans commettre de « pêchés »... Ainsi fonctionnèrent et prospérèrent, pendant une très longue période de l’histoire humaine, les Eglises et les religions (de toutes sortes) qui faisaient autorité en matière de « spiritualité ».

 

Après des cargaisons de couleuvres avalées et face à des promesses toujours invérifiables (malgré l’essor des savoirs), face aux écueils, aux excès et à l’austérité des Eglises (de plus en plus en décalage avec les « progrès » et les modes de vie de l’existence séculière…), avec la montée en puissance de la science et les sirènes du progrès, les Hommes se sont progressivement détournés des religions pour embrasser le culte de l’athéisme et de agnosticisme ou s’adonner à une pratique religieuse très distante et peu assidue, reléguant les « choses du Ciel » à une affaire personnelle (assez vague et assez floue en général) et (le plus souvent) à de simples rites culturels et/ou communautaires.

 

Et aujourd’hui, malgré la résistance ou l’expansion de certaines chapelles, on assiste à un assez net recul de la pensée et de la pratique religieuses traditionnelles au profit d’un développement de structures et d’organismes « spirituels » plus ou moins syncrétiques, plus ou moins traditionnels, plus ou moins sectaires et plus ou moins religieux ou laïcs, souvent mâtinés de « développement personnel* », qui proposent un large éventail de pratiques, de croyances et d’idéologies qui semble répondre au maigre sursaut « de conscience » d’un certain nombre d’individus, moins soucieux d’accéder à un Paradis lointain qu’à un mieux-être ici et maintenant (en cette vie et, si possible, tout de suite et pour « leur pomme » si j’ose dire avec ce petit « clin d’œil édénique »…).

* Si en vogue de nos jours…

 

Demande – individus

Les individus ont toujours très largement favorisé la satisfaction de leurs besoins organiques, matériels et psychiques élémentaires. Et, au fil de l’histoire humaine, peu semblent s’être réellement interrogés (comme nous l’avons évoqué à plusieurs reprises) sur la nature de l’existence et leur identité « véritable ». Toutes les interrogations « métaphysiques » ne semblaient pouvoir obtenir de réponses et l’immense majorité se contentait de celles qu’on leur livrait, réponses idéologiques s’appuyant, très substantiellement, sur les croyances et la cosmogonie « offertes » par les religieux et les hommes d’église (toutes chapelles confondues). Et la question était réglée… On croyait ou ne croyait pas… et pendant longtemps, on a beaucoup cru en « forçant » ou se forçant à croire pour ne pas attirer les foudres de ou des Dieu(x) et/ou passer pour un mécréant aux yeux de la communauté et/ou des fidèles…

 

Et encore de nos jours, on croit ou l’on ne croit pas… les individus sont, en vérité, très peu sortis des simples croyances… sans compter les collusions écœurantes et outrancières entre les Eglises et le pouvoir « terrestre » (les « puissants » du monde), les uns et les autres se partageant les richesses, se légitimant réciproquement en s’octroyant « indulgences » et faveurs et en manigançant moult tractations simoniaques (fort peu « catholiques » si j’ose dire…) pour assurer une certaine forme de « paix sociale » et garantir leur pérennité…

 

A force de promesses, d’ignorance et de doutes et au fil du progrès technique et matériel et de la montée galopante de l’individualisme, une idéologie a fini par mettre d’accord les Hommes : comme ils estimaient ne pouvoir répondre à leurs velléités interrogatives et métaphysiques, le « salut » — et la seule réponse valide — devint « la jouissance terrestre ». Et beaucoup s’autorisèrent à se consacrer quasi exclusivement à satisfaire (avec toujours plus d’avidité) leurs désirs et à « profiter de la vie » en s’octroyant de menus (et toujours plus nombreux) plaisirs, censés leur permettre d’accéder au bonheur (terrestre évidemment) et/ou les consoler de leur existence souvent (très souvent) misérable et indigente… l’argent alors devint le seigneur tout puissant… alléluia ! Et la science et ses progrès (de façon réactive aux croyances moyenâgeuses qui avaient ligoté bon nombre de désirs pendant fort longtemps) achevèrent de conforter la foi de l’Homme dans le matérialisme, seule issue, à ses yeux, pour sortir des ténèbres

 

Et aujourd’hui encore, l’essentiel des Hommes continue d’idolâtrer ce Dieu impuissant, insensé et creux qu’est l’argent… Et pour « égayer » leur morosité congénitale (et, sans doute, atavique) et tenter de trouver un sens ou de donner un peu de consistance à leur existence dans l'absurdité ambiante, certains se rendent dans des Eglises, qui ont flairé le « bon filon » en recrutant leurs fidèles à coups de marketing et de propagande commerciale enthousiaste (et prometteuse), pour communier « dans la joie » avec leur prochain en continuant néanmoins, à la sortie de la grand-messe tapageuse et faussement extatique — à la sortie de leur transe hystérique et collective — de ne rester fidèles qu’à eux-mêmes et à l’amour qu’ils se portent… en évitant, évidemment, de se poser quelques questions (fâcheuses) sur la validité de leur foi et l’authenticité de leur « élan transcendant »…

 

Ce genre de comportement est (comme diraient nos contemporains) dans « l’air du temps » et ceux qui ne fréquentent pas ces nouvelles chapelles se ruent sur d’autres, nouvelles sectes « new Age », anciennes traditions spirituelles revisitées et remises au « goût du jour », nouveaux gourous, supermarchés spirituels, salles et groupes de méditation etc etc, tous, plus ou moins avides de salut et de bien-être, consommateurs invétérés de réponses et de disciplines « prêtes à l’emploi » et « clé en main » s’imaginant que quelques séances rondement menées (et, en général, tarifées) leur permettront d’accéder à une félicité « personnelle » inaltérable et sans faille…

 

Eh oui ! Ainsi est l’esprit humain… Et peu d’Hommes sont, aujourd’hui encore, réellement prêts et suffisamment « mûrs » pour franchir « le passage » incontournable qui ouvre sur un cheminement spirituel authentique en se démunissant préalablement de tout ce qu’ils croient être… étape, semble-t-il, inévitable (et bien souvent douloureuse*…)…

* Comme nous le disions…

 

Notons néanmoins que l’époque contemporaine (qui apparaît de plus en plus « absurde » à un certain nombre de nos « chers » contemporains) voit aussi fleurir un peu partout dans le monde (en particulier dans les « pays riches » — les autres sont encore trop occupés à « rattraper » leur « retard économique et matériel »), des bataillons plus ou moins massifs d’individus qui « franchissent le pas » et s’engagent dans une interrogation profonde et/ou dans un réel et incontestable cheminement intérieur.

 

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer la compréhension des individus quant à leur identité « véritable » et sur ce qu’est l’existence (et l’Existant)…

 

Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

- la perte de sens, la pressurisation, le désarroi et le mal-être (croissants) des individus

- les disparités de plus en plus vives entre les Hommes en matière de richesse et de qualité de vie

- la pollution et les risques de diminution substantielle de la qualité de vie

- l’absence de perspectives actuelles des sociétés et « l’absurdité » apparente du modèle sociétal dominant

- la « dureté » et l’inconsistance du monde contemporain, englué dans le consumérisme outrancier et les plaisirs « compensatoires »

 

Evolutions actuelles

- efflorescence de structures spirituelles plus ou moins mâtinées de « développement personnel »

- émergence d’instructeurs spirituels légitimes (et authentiques)

 

Evolutions possibles et directions probables

- le besoin de compréhension (de l’existence) pourrait devenir de plus en plus prégnant (les individus seront, sans doute, de plus en plus nombreux à s’interroger et à chercher un sens plus profond à l’existence…)

- les démarches spirituelles pourraient connaître une très large et progressive expansion

- des mouvements spirituels collectifs seront sans doute amenés à s’organiser et à « offrir » un accompagnement à tous les individus désireux de cheminer « authentiquement »…

- la spiritualité pourrait devenir « un domaine » essentiel dans la vie des individus et dans certaines communautés et sociétés (et pourrait être « enseignée » – si tant est que l’on puisse enseigner quoi que ce soit en la matière…)

- le nombre d'individus engagés dans un cheminement spirituel pourrait « exploser »

 

Evolutions à très long terme

- la spiritualité (et la connaissance de soi) seront sans doute « naturelles » et deviendront des domaines absolument clés et essentiels (étant donné leurs conséquences sur la façon d’entrer en relation avec l’ensemble de l’Existant)

- les êtres engagés dans un cheminement spirituel approfondi et les êtres « pleinement réalisés » seront sans doute « la norme ».

 

Objectif idéal (implicite)

Etre Conscience Pleine et entière…

 

 

Perspectives*

* Voir les perspectives de la rubrique « alimentation ».

 

Sociétés de demain

La compréhension générale : mineure

La perception : émergence d’une perception un peu plus fine, large et profonde qui donnera accès à ce qui restait encore invisible, lointain et profond

La sensibilité émotionnelle : grossière et superficielle

La proportion d’individus engagés dans un cheminement spirituel élémentaire : minoritaire

La proportion d’individus engagés dans un cheminement spirituel avancé : ultra minoritaire

La proportion d’individus « pleinement réalisés » : cas isolés exceptionnels

 

Sociétés d’après demain

La compréhension générale : très partielle

La perception : développement d’une perception encore plus fine, large et profonde qui donnera accès à des manifestations encore plus invisibles, lointaines et profondes

La sensibilité émotionnelle : grossière et superficielle

La proportion d’individus engagés dans un cheminement spirituel élémentaire : minoritaire

La proportion d’individus engagés dans un cheminement spirituel avancé : ultra minoritaire

La proportion d’individus « pleinement réalisés » : cas isolés exceptionnels

 

Sociétés à moyen terme

La compréhension générale : partielle, puis moyenne

La perception : développement d’une perception toujours plus fine, large et profonde qui donnera accès à des manifestations encore plus invisibles, lointaines et profondes. Puis, émergence d’une perception très fine, très large et très profonde

La sensibilité émotionnelle : émergence, puis développement, d’une sensibilité plus affinée et plus profonde.

La proportion d’individus engagés dans un cheminement spirituel élémentaire : faible, puis moyenne

La proportion d’individus engagés dans un cheminement spirituel avancé : fortement minoritaire, puis faible

La proportion d’individus « pleinement réalisés » : ultra minorité, puis minorité

 

Sociétés à long terme

La compréhension générale : étendue, puis très étendue, puis complète

La perception : développement et généralisation d’une perception quasi-totale. Puis perception consciente « pure » totale

La sensibilité émotionnelle : émergence, puis développement, puis généralisation d’une sensibilité très fine et très profonde. Puis sensibilité « pure » totale

La proportion d’individus engagés dans un cheminement spirituel élémentaire : élevée, puis l’ensemble des individus

La proportion d’individus engagés dans un cheminement spirituel avancé : moyenne, puis élevée, puis la quasi-totalité des individus

La proportion d’individus « pleinement réalisés » : majorité, puis quasi-totalité, puis totalité des individus

 

 

Avant d’aborder la façon dont les Hommes ont organisé en système (à travers la société humaine) l’ensemble de leurs créations et de leurs réalisations (leurs actions, leurs fabrications, leurs représentations et leur compréhension de l’Existant et de l’existence), soulignons, ici, que toutes — absolument toutes — les activités humaines (personnelles et professionnelles, individuelles et collectives) s’inscrivent dans l’un des domaines précités (que nous rappelons pour mémoire) : alimentation, santé, hygiène (beauté et bien-être), vêtement, logement, tâches et confort domestiques, énergie, transports, défense et protection organique et matérielle, reproduction, défense et protection psychique, relations, sexualité et affection, communication, information, distraction, expression, art, imagination, savoirs, connaissance, travail, argent, administration et spiritualité.

 

 

 

LE SYSTEME – LA SOCIETE HUMAINE

 

Toutes les thématiques abordées dans cette rubrique ont trait à l’incontournable nécessité des Hommes à se regrouper et à s’organiser pour vivre ensemble. Certaines ont déjà été partiellement étudiées dans les paragraphes consacrés au travail, à l’argent et à l’administration (et nous vous invitons à vous y reporter).

 

Avant de développer ces thématiques, essayons de donner une définition (très simple) de la société humaine : peut-être pourrait-on la définir, de façon élémentaire, comme un regroupement organisé d’individus sur un territoire délimité.

 

 

Bref aperçu historique

Avant la sophistication cérébrale et psychique des premiers représentants de l’espèce humaine (dont l’émergence reste très difficile à dater avec précision…), les hominidés et les premiers Hommes étaient (sans doute) des animaux comme les autres. Et à l’instar des autres espèces, il est probable que les êtres humains s’organisaient à la façon des grands mammifères et/ou des animaux les plus « sophistiqués ».

 

De nature chétive, de faible constitution, vulnérable et sans aucune aptitude physique, athlétique ou prédatoriale particulière, l’Homme a été (en partie, peut-être, par compensation*… qui sait ?) doté d’un outil au potentiel jusque-là inégalé : le cerveau dont il n’a cessé de développer les capacités afin de survivre dans un milieu hostile et dangereux et de répondre (de façon toujours plus efficace et performante) aux besoins de l’espèce.

* Et/ou pour l’inciter à développer son potentiel et ses capacités cérébrales…

 

Poussés (en grande partie) par leurs besoins relationnels et reproductifs et leur besoin de sécurité (organique et psychique), les Hommes se sont regroupés pour vivre ensemble. Les premières sociétés devaient sûrement se composer de quelques familles. Et les rapports intra-communautaires et extra-communautaires devaient sans doute être habités par l’instinct de survie (luttes et ententes) et essentiellement gouvernés par la force et la violence.

 

A l’instar de toutes les formes existantes, les sociétés humaines se sont naturellement élargies et ont vu croître le nombre de leurs membres. Les individus ont été naturellement encouragés à mettre en commun leurs capacités, leurs compétences, leurs expériences et leurs savoirs… Le système s’est peu à peu complexifié (avec, par exemple, la division des tâches et du travail). Et les besoins se sont multipliés, rendant presque impossible la non intégration des individus au groupe*. Le regroupement s’est alors transformé en système — une structure organisationnelle et activictoriale — de plus en plus complexe en charge d’intégrer tous les savoirs (les représentations de l’Existant), toutes les réponses (le plan réalisationnel actif), toutes les expériences et toutes les découvertes pour les généraliser et les organiser à l’échelle collective. Au fil de l’accroissement du nombre d’individus, la société humaine s’est donc trouvée confrontée à des contraintes spécifiques d’organisation et de gestion des individus en matière de relations et d’échanges (essentiellement concernant le « vivre ensemble » et concernant les conditions d’existence : sécurité, puis plus tardivement, hygiène, santé publique et pollution).

* Au fil de la complexification sociétale, il a été, en effet, de plus en plus difficile aux individus de subvenir de façon autonome à l’ensemble de leurs besoins…

 

Nous pouvons aisément imaginer que les premières « sociétés humaines », composées de quelques familles et poussées par un besoin de sécurité, ont progressivement étendu leur territoire et rassemblé des communautés plus ou moins distantes formant (de facto) une zone plus étendue. Chaque société devait ainsi regrouper différentes communautés et entretenir des rapports plus ou moins harmonieux ou plus ou moins conflictuels avec « l’extérieur ».

 

Notons que cette distinction entre la communauté-société d’appartenance et « le reste du monde » constitue, en réalité, la reproduction collective des comportements psychiques individuels qui invitent à la favorisation de l’intérêt de la société et de ses membres et à l’accaparement des terres et des ressources naturelles, sources inévitables et permanentes de conflits…

 

D’autres éléments fédérateurs (qui lient l’individu à la société) existent. Outre le sentiment d’appartenance communautaire, les plus évidents sont la peur de l’individu d’être exclu par sa communauté et son besoin de sentiment d’utilité, inclinations que les sociétés ont toujours (plus ou moins) « utilisées » pour assurer leur fonctionnement et assurer un « vivre ensemble » à peu près satisfaisant (ou du moins acceptable).

 

 

Les fondamentaux de la société humaine

La société humaine assure l’organisation et la généralisation des réponses aux besoins (et aux désirs) ressentis par ses membres. Elle met donc en place un système de production et organise les échanges et la « redistribution » sur le territoire qu’elle occupe. Au vu des caractéristiques humaines (liées à la nature du psychisme), tout regroupement, toute communauté et toute société est également contraint d’établir une forme d’autorité, d’encadrer les relations inter individuelles et de « veiller » aux différents mouvements et implantations sur son territoire. Ainsi, toute société humaine se voit « obligée » d’établir un système de gouvernance, d’assurer la sécurité au sein de la communauté et vis-à-vis de l’extérieur (naissance des fonctions régaliennes) afin d’instaurer un sentiment minimal « d’unité » et de cohésion.

 

Ainsi va naître une organisation sociétale élémentaire avec ses différents systèmes, instances et structures :

 

- un système de gouvernance, avec des instances et des structures d’autorité décisionnelle, qui prend les décisions engageant l’ensemble de la société, met en œuvre les décisions et organise leur mise en place, décide des lois et des règles, de l’organisation générale et du fonctionnement des différents « systèmes sociétaux ». Cette « organisation politique », sans doute plus ou moins spontanée et anarchique à ses débuts, au vu des problématiques engendrées par tout regroupement, s’est vue contrainte de se structurer et d’adopter, selon la volonté et les prédispositions du (ou des) leader(s) « naturel(s) » et/ou des membres de la communauté, un fonctionnement de nature soit démocratique, soit tyrannique, soit autocratique ou théocratique… ;

 

- un système de protection et de maintien de l’ordre intracommunautaire (plus ou moins fort et coercitif) ;

 

- un système de défense et de protection contre « l’extérieur » (plus ou moins fort et agressif) avec, éventuellement, un sous-système (et des instances) chargé(es) des relations avec l’extérieur* ;

* Toutes les sociétés humaines (comme nous l’avons déjà évoqué) se sont implantées à un niveau local. Elles entretenaient donc (et entretiennent encore) avec les autres sociétés des relations (le plus souvent) conflictuelles et, au mieux, des rapports de compétition et de concurrence en matière d’appropriation des territoires, des sols et des ressources naturelles (reflets collectifs des caractéristiques psychiques individuelles).

 

- un système d’organisation des échanges, de la production et de la distribution entre les individus (qui s’inscrit, selon les prédispositions des individus, plus ou moins dans une perspective communautaire et solidaire ou individualiste). Notons, en aparté, que l’autosuffisance et le troc des premières sociétés ont progressivement cédé la place, grâce à la création de la monnaie (unité de compte qui donne une valeur nominale aux objets et facilite ainsi les échanges), à un système d’échanges élargi (prémices des échanges économiques et commerciaux). A ce titre, la monnaie – puis l’argent – sont très vite devenus (comme nous l’avons déjà évoqué) le synonyme de satisfaction des besoins et des désirs au point d’occuper assez rapidement une place centrale dans la société et l’existence humaines ;

 

- éventuellement un système de prise en charge des individus inaptes et/ou « vulnérables », incapables, temporairement ou définitivement, de participer au fonctionnement du système (de nature plus ou moins minimaliste ou solidaire) ;

 

- éventuellement un système pour stocker et transmettre les savoirs.

 

 

Quatre grands types d’organisations

De façon synthétique, nous pourrions dire que toute société humaine est contrainte de mettre en place quatre grands types d’organisations :

 

- une organisation politique et un mode de gouvernance ;

 

- une organisation policière et judiciaire ;

 

- une organisation de la défense territoriale et des relations extérieures (avec « le reste du monde ») ;

 

- une organisation économique.

 

Il ne nous appartient pas, ici, de réaliser une étude détaillée de chaque type d’organisation(1) mais il semble important d’avoir en tête leur classification (classification ultra simple, voire simpliste). Ainsi, de façon un peu schématique, nous pourrions dire qu’il existe (au moins) cinq grands types d’organisation politique (et de mode de gouvernance) : anarchique, autocratique – « éclairée » ou tyrannique, dictatoriale, théocratique et démocratique — directe ou représentative (avec élections des représentants du peuple), qu’il existe deux grands types d’organisation policière et judiciaire : les sociétés de droit — avec ou sans corruption — et les sociétés de non droit, qu’il existe deux grandes catégories (ultra simplistes) d’orientation en matière de relations avec l’extérieur : les sociétés de nature plutôt autarcique et les sociétés de nature plutôt ouverte – adeptes de la (plus ou moins) libre circulation des biens (commerce), des capitaux (finance) et des personnes (migration) que l’on pourrait également (et éventuellement) décliner selon trois grands types relationnels (neutre, agressif et pacifique) et qu’il existe enfin (au moins) quatre grands types d’organisation économique : l’économie « communautaire(2) » avec la mise en commun et le partage de l’essentiel de la production (au sens large), l’économie de marché libérale (le capitalisme), l’économie collectiviste (adepte de la collectivisation des moyens de production) et l’économie « mixte » (une forme de mix d’économie de marché libérale et d’interventions et de régulations étatiques dans certains secteurs économiques (essentiellement en matière de santé, d’éducation, de logement, d’énergie et de transports).

(1) Il est néanmoins frappant de constater la similitude (quasi parfaite) entre ces différents modes d’organisation sociétale et la façon dont chaque individu se comporte avec son entourage (avec ses congénères et, plus généralement, les relations qu’il entretient avec l’Existant). Mais cette ressemblance, en vérité, n’a rien de surprenant dans la mesure où toute société est le reflet plus ou moins exact de l’ensemble de ses membres… Ainsi, il est des individus (et des sociétés) tyranniques, despotes plus ou moins « éclairés » et d’autres ouverts au dialogue et à la concertation comme il existe des individus (et des sociétés) relativement transparents, francs et honnêtes et d’autres relativement hypocrites et manipulateurs. Comme il est des êtres (et des sociétés) « durs », sévères, inflexibles et intransigeants et d’autres plutôt libéraux, voire laxistes comme il est des êtres (et des sociétés) repliés sur eux-mêmes et d’autres « sociables ». Et comme il est enfin des Hommes (et des sociétés) individualistes (égotiques, voire égoïstes) et d’autres plus enclins au partage…

(2) Modèle économique viable (et souvent effectif) dans les communautés rassemblant un nombre d’individus relativement peu élevé et qui pourrait, à bien des égards, être catégorisé dans les économies collectivistes...

 

 

Quelques généralités sur la société humaine

 

Trois éléments fondamentaux

Il convient en premier lieu de souligner, dans cette rubrique, trois éléments (évidents mais) absolument déterminants :

 

Premier élément : l’Homme est la première forme terrestre à pouvoir « façonner sa destinée* » tant sur le plan individuel que sur le plan collectif… En effet, pour la première fois depuis la création de la matière terrestre, une forme (l’Homme) a la possibilité d’agir et d’avoir un impact sur son évolution en fonction des orientations choisies*.

* Cette « destinée » et ces orientations semblent néanmoins plus ou moins déterminées (voire « programmées ») par l’évolution des formes (en particulier, chez l’Homme, à travers le psychisme, son fonctionnement et son potentiel)…

 

Deuxième élément : la société humaine est le premier système « artificiel » (non naturel) doté d’un « pouvoir créatif(1) ». En effet, pour la première fois depuis l’émergence de la matière terrestre (et, peut-être même, de la matière en général), une forme (l’Homme) est en mesure de créer un système qui régit l’organisation, les échanges et l’existence des individus, un système qui est également capable de transformer l’Existant(2) de façon conséquente (transformation des formes et des systèmes mis en place de « façon naturelle(3) » qui régissent leurs interactions et leur évolution) et un système enfin capable de créer des formes et des systèmes totalement nouveaux(4) qui « chamboulent » les écosystèmes — au sens strict et au sens large. Notons enfin que les sociétés humaines non seulement transforment l’Existant – les formes, les plans et les systèmes qui les régissent – mais leur imposent également leurs lois et leurs règles et les soumettent à « leurs désirs », provoquant ainsi de substantielles conséquences sur leur existence.

(1) Notons, ici, que cet élément a été déterminant dans la construction de cette analyse. La structure de cette étude peut, à première vue, paraître « bancale » ou très inégale au regard du peu d’éléments fournis dans les premiers chapitres consacrés à la Vie terrestre avant l’émergence de l’Homme (peu — voire très peu —développés) et la somme d’informations (voire la foule de détails) livrées dans les chapitres consacrés à l’Homme et à ses « réalisations » mais il nous a semblé juste et légitime, dans notre perspective, de privilégier l’Homme (non par anthropocentrisme) mais parce qu’il semble constituer une forme absolument centrale dans l’évolution de l’histoire terrestre et le devenir de l’Existant…

(2) Essentiellement les « assemblages » plus ou moins complexes de formes naturelles (la plupart des outils et des objets humains au fil de l’histoire et jusqu’à un passé récent…)

(3) Par les lois physiques (pour la matière) et les lois biologiques (pour le « Vivant »).

(4) Essentiellement les formes synthétiques et les systèmes d’intelligence (les intelligences artificielles entre autres exemples…)

 

Troisième élément : la société humaine est également le premier système capable de prendre en compte les « aspirations » des formes. En effet, pour la première fois dans l’histoire du monde, un système est en mesure de prendre en considération, sur le plan collectif, le confort, la satisfaction et le bien-être des formes(1). En premier lieu (il est vrai), le confort et le bien-être des formes humaines (induits, en grande partie, par l’anthropocentrisme(2)) mais également le confort et le bien-être de formes non humaines… comme l’illustrent les valeurs d’égalité et de respect instaurées dans certaines sociétés (avec la prise en considération — et la prise en charge — des individus les plus vulnérables ou le droit des minorités) et leur élargissement progressif à d’autres formes (avec le droit des animaux et le respect de l’environnement par exemple).

(1) Grâce à un degré de compréhension de l’Existant et de l’existence de moins en moins élémentaire et au développement progressif de la pré-conscience (vers la Conscience).

(2) Extension de l’égocentrisme…

 

Ces éléments sont loin d’être anodins… ils constituent même un évènement (absolument) déterminant… et peuvent être considérés (à bien des égards) comme les signes annonciateurs d’une formidable révolution dans l’histoire terrestre…

 

 

Quelques informations générales

Notons, en premier lieu, que l’organisation et l’évolution d’une société peuvent différer selon les besoins, les types de réponses et les orientations qu’elle privilégie. Néanmoins, au regard de l’universalité des besoins humains (et des réponses à ces besoins), toutes les sociétés tendent plus ou moins à se ressembler…

 

Notons également que la société humaine (que l’on pourrait définir comme une structure organisationnelle et activitoriale) fonctionne (en général) selon une logique propre (en grande partie) induite par son mode d’organisation. Elle a ainsi tendance à devenir, au fil de sa complexification, une entité à part entière qui crée, elle-même, des besoins et des fonctions pour assurer son fonctionnement (et son évolution). Ainsi, elle se transforme et devient (très souvent) de plus en plus vaste (voire, parfois même, tentaculaire et omnipotente) avec des conséquences de plus en plus nombreuses et substantielles sur l’ensemble des plans et des formes existantes (Hommes, animaux, végétaux, environnement…). A ce titre, la société peut connaître, par exemple, de nombreuses extensions et ramifications et être « contrainte » de créer des sphères et des systèmes destinés à gérer des liens et des rapports qui n’existaient pas à ses origines : relations avec des instances et des organismes supranationaux ou entre des individus et des institutions étatiques par exemple*...

* La liste est longue et les domaines très variés, nous ne nous étendrons donc pas…

 

Notons également que tout société crée (à son insu) une sorte de « force d’inertie(1) » (et en devient, par la suite, tributaire)… inertie qui s’accroît à mesure de sa complexification et de son expansion (avec l’intégration d’un nombre toujours plus élevé d’individus) et qui peut la rendre (assez vite) « monstrueuse » avec sa propension (naturelle) à investir (voire à envahir) tous les domaines et toutes les sphères de la vie, toujours plus « avide et exigeante » à l’égard des individus qu’elle soumet à ses lois, règles et codes à seules fins parfois de perdurer et de se développer… Ainsi, au lieu de « servir » ses membres — ce pour quoi elle a été originellement créée — il arrive qu’elle les « asservisse » et les « instrumentalise » avec une force et une violence à peine voilées, créant ainsi des mouvements alternatifs de résistance (composés essentiellement d’individus qui refusent l’omnipotence collective et/ou étatique) ou d'individus et de communautés qui aspirent à vivre hors du système (les « off the grid » d’aujourd’hui — les « hors réseaux(2) »).

(1) En partie liée à la relative fixité des représentations mentales individuelles et à la fois inhérente à tout regroupement (ou collectif) d’individus…

(2) Individus et/ou communautés qui vivent en autarcie sans avoir recours aux réseaux électrique, gazeux ou hydrique...

 

Comme nous l’avons déjà évoqué, la société humaine génère des lois, des règles et des codes dans tous les domaines. Et les individus créent, dans le cadre édicté par ce système, des usages et des manières d’être (codes relationnels implicites) tels que, par exemple, des formules d’approche, des façons de se saluer, de communiquer, de se comporter, de nouer des liens…

 

La société (qui doit, ne l’oublions pas, son origine au psychisme) se construit à partir des désirs et des représentations mentales. Et les règles, lois, codes et conventions qu’elle met en œuvre dans tous les domaines sont les reflets de ces représentations mentales* (c’est-à-dire une représentation et une interprétation du « réel ») qui font partout autorité et prennent très souvent le pas sur « le réel » (en « évinçant », en quelque sorte, les « lois naturelles » qui deviennent alors secondaires...).

* Noyau central du psychisme. Les lois, les règles et les conventions légales et informelles sont, en effet, le reflet des représentations mentales les plus répandues chez les individus.

 

Notons enfin qu’au vu du fonctionnement psychique (et de la relative diversité du psychisme), les contenus et les évolutions de la société humaine (mais également tous les domaines investis sur le plan représentatif intellectuel et le plan réalisationnel actif) s’orientent selon trois grands types de mouvements* qui leur impulsent des directions différentes :

* Mouvements principaux que nous avons abordés dans les paragraphes consacrés aux grands types psychiques.

 

- le mouvement majoritaire (suivi par l’immense majorité des individus) qui donne la direction principale et forme (en général) le modèle sociétal majoritaire ;

 

- des mouvements de résistance de type conservateur (qui refusent globalement le changement, l’ouverture et la prise de risque…) ;

 

- et des mouvements alternatifs soit de type « marginal décalé(1) », soit de type progressiste et/ou visionnaire(2) dont les orientations (lorsqu’elles s’avèrent justes et s’inscrivent dans le « cours naturel des choses et de l’évolution »…) finissent (assez souvent) par être suivies par le mouvement majoritaire.

(1) Décalé par rapport à « la norme »…

(2) Souvent « en avance » sur leur époque…

 

 

Synthèse de la société humaine

En dépit de sa complexité, nous pourrions résumer la société humaine ainsi :

 

- la société est le reflet collectif et organisé du psychisme (essentiellement des besoins, des désirs et des représentations mentales des individus) ;

 

- elle a en charge d’organiser les réponses (du plan réalisationnel actif) et les représentations de l’Existant — et éventuellement de l’existence (du plan représentatif intellectuel) en système généralisé et transmissible ;

 

- et elle a enfin en charge d’organiser et de gérer les difficultés et les problèmes engendrés par le regroupement des individus (et sa croissance incessante), essentiellement en matière de relations interindividuelles (et, éventuellement, en matière de relations avec les autres formes) et en matière de répercussions du surnombre sur les autres plans (destructions, dégradations, pollutions…) et leurs conséquences sur l’existence humaine afin de créer « un vivre ensemble » aussi harmonieux que possible.

 

 

L’organisation sociétale générale

Toutes les thématiques abordées dans cette rubrique correspondent aux actions et réalisations humaines collectives nécessaires pour organiser la société sur le plan politique (organisation de la gouvernance et des interventions publiques), sur le plan de l’ordre et de la sécurité intérieure (organisation policière et judiciaire), sur le plan économique (organisation de la production, du travail, de la monnaie, des échanges économiques et de la consommation des individus) et sur le plan des relations extérieures (organisation de l’armée et des instances de relations avec le « reste du monde ») ainsi que leurs conséquences sur l’organisation des territoires.

 

Il semble assez difficile (et périlleux) d’apprécier la nature qualitative d’une société, d’un Etat et des interventions publiques. Nous pourrions néanmoins nous y essayer soit en étudiant la nature de leurs quatre grands systèmes organisationnels (politique, judiciaire, économique et relations avec l’extérieur), soit en les évaluant en fonction de quelques indicateurs principaux (dont la valeur et la justesse pourraient être discutées…) et qu’il serait (éventuellement) possible de remplir « à la louche » :

 

- le type d’organisation politique (et de mode de gouvernance) – démocratique, dictatoriale, autocratique, théocratique…) ;

 

- le « degré démocratique » (essentiellement élections libres et multipartites des représentants du peuple, séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, liberté de la presse, respect des droits de l’Homme…) ;

 

- l’organisation judiciaire, son indépendance à l’égard du pouvoir politique et le degré de droit et de « liberté individuelle » qualitative et quantitative octroyé aux individus ;

 

- le degré de corruption publique (administrations et fonctionnaires) ;

 

- le degré de violence et de répressions policières ;

 

- le degré de sécurité entre les individus « instauré » par la puissance publique ;

 

- le degré de liberté d’expression et de liberté de la presse (considérée — comme nous l’avons déjà dit – comme le quatrième pouvoir mais qui est, en réalité, un « contre-pouvoir » chargé d’informer (avec un plus ou moins grand souci d’objectivité) les populations sur (entre autres domaines) le fonctionnement sociétal et politique) ;

 

- le degré d’intervention étatique dans « la sphère individuelle » (nombre de domaines « régulés » et/ou « encadrés » par la puissance publique, nombre de lois et de règlements par domaine ou secteur) ;

 

- le degré « d’assistance » qualitatif et quantitatif de la puissance publique à l’égard des individus inaptes provisoirement et/ou définitivement à participer au fonctionnement de la société ;

 

- le degré d’équité et d’égalité de traitement de la puissance publique à l’égard des individus (essentiellement en matière de droit et de justice mais également en matière d’administration et de service public) ;

 

- le degré d’accompagnement étatique dans « l’épanouissement personnel » des individus ;

 

- le degré d’intervention étatique en matière de correction des disparités concernant les besoins élémentaires (essentiellement le revenu, l’alimentation, la santé, le logement et l’éducation) ;

 

- les niveaux de vie et « d'instruction » de la population ;

 

- le degré de « bonheur » ressenti par les individus ;

 

- le degré « d’ouverture » de la société au reste du monde ;

 

- la nature des relations extérieures de la société ;

 

- le degré de sensibilité « réelle » de la société (et des individus) à l’égard des animaux ;

 

- le degré « d’intérêt actif » de la société (et de ses membres) porté à l’environnement (au sens large).

 

- etc etc.

 

Ces paramètres pourraient laisser croire à la favorisation, plus ou moins explicite, d’une idéologie mais ils semblent, en réalité, correspondre à la fois aux désirs et aux aspirations de tous les individus et à ce qui apparaît comme l’évolution « naturelle » de toute société et de toute collectivité…

 

Notons également que certains paramètres cités ci-dessus et certains domaines d’intervention étatique semblent particulièrement antinomiques et sont (et seront plus encore à l’avenir) amenés à se confronter (voire même à se heurter) en atteignant une sorte de « seuil infranchissable » au-delà duquel la société sera contrainte de choisir (ou de privilégier) une orientation au détriment d’une autre et/ou d'opérer une transformation radicale de son organisation... La sécurité des citoyens et les libertés « individuelles » sont, à ce titre, un merveilleux exemple. Un Etat (et l’histoire l’a montré) peut à la fois assurer la sécurité des individus et respecter (plus ou moins) leur liberté individuelle en ménageant « la chèvre et le chou » mais tant que les individus manifesteront des comportements délétères à l’égard de leurs congénères et des autres formes de l’Existant, la sécurité de chacun nécessitera le contrôle et la surveillance de tous et la protection et la surveillance des domaines « publics » et collectifs, empiétant ainsi largement sur la sphère individuelle. A un certain stade (à l’approche du « seuil infranchissable* » que nous évoquions), si les individus aspirent à davantage de sécurité, il conviendra qu’ils acceptent « plus de règles et de surveillance » (et donc, de voir rognée une partie de leur liberté). Et si les individus aspirent à davantage de liberté, ils devront se résoudre à une diminution du nombre de règles et à une baisse de la surveillance (et donc, à moins de sécurité)...

* Si les comportements humains n’évoluent pas...

 

Notons, à ce titre, que l’Etat (en particulier dans les sociétés démocratiques) est contraint à une permanente recherche d’équilibre (équilibre précaire et fragile) entre le « vivre ensemble » (acceptable par le plus grand nombre) et la liberté et « l’épanouissement » personnels de chaque citoyen… vaste et complexe débat éthique et philosophique très fréquemment évoqué aujourd’hui en matière de laïcité, d’euthanasie, de procréation, de liberté d’expression, de circulation, d’implantation, de droit tabagique etc etc (les domaines ne manquent pas !) avec une règle quelque peu basique mais néanmoins indispensable tant que le comportement des individus sera animé par le besoin d’accaparement, la favorisation personnelle et l’irrespect (ou le respect apparent et superficiel) : la liberté des individus s’arrête où commence celle des autres(1)… Règle tacite (et formule, semble-t-il, attribuée à Stuart Mill), qui, de façon quasi systématique (à défaut d’être gravée dans « le cœur des Hommes ») a besoin d’être gravée dans le marbre constitutionnel qui fait office de « Tables de la Loi » républicaine et démocratique, avec les excès que nous connaissons aujourd’hui (et sans compter les écueils des sociétés d’autrefois) en matière de recherche (disons-le, naturelle et légitime, mais complètement saugrenue et absurde(2)) de risque « zéro »... Ainsi, à force de vouloir protéger les individus (d’eux-mêmes et des autres), l’Etat s’immisce parfois, de façon outrancière, dans la sphère personnelle(3).

(1) Et son corollaire d’éthique populaire et/ou religieuse (autrement appelé éthique de la réciprocité) : ne fais pas aux autres ce que tu n’aimerais pas qu’ils te fassent

(2) Au regard des comportements humains contemporains (entre autres éléments)…

(3) La cigarette est, à ce titre, un très bon exemple. Plébiscitée autrefois, icône hier de la nonchalance, de la virilité ou de la modernité, l’Etat a longtemps fermé les yeux devant « l’écran de fumée tabagique » (poussant parfois le zèle à créer des entreprises publiques pour produire du tabac et des cigarettes) puis, au regard des risques sanitaires (et des coûts induits par les pathologies dont elle semble être la cause, essentiellement différents types de cancer des voies respiratoires), on l’a bannie à grands renforts de propagande anti-tabac, on a multiplié de façon drastique le prix des paquets, on l’a interdit ici et là… bref, on a désincité fortement son usage à coups de forceps et de burin dans les crânes (à coups de lobbying et avec une certaine hypocrisie — pourquoi, en effet, interdire la cigarette et autoriser l’alcool, responsable, semble-t-il, de « victimes » bien plus nombreuses ? Sans compter les double (triple, quadruple… ?) discours… aucun Etat, en effet, n’admettrait officiellement que le tabac, à certains égards, est « une aubaine » qui permet de réduire les dépenses d’assurance vieillesse avec le nombre de personnes qui décèdent d’un cancer… machiavélisme et propagande… quand vous nous tenez…)… bref… exit donc la cigarette…

 

L’autre (et, sans doute, principal) critère de choix étatique et la raison (le plus souvent) invoquée pour légitimer ses interventions sont l’aspect pécuniaire. Puisque l’Etat (donc les contribuables) finance (de moins en moins, il est vrai…) et supporte les coûts engendrés par certains comportements, il s’octroie — de façon légitime ou non — le droit, outre de donner son opinion, d’orienter substantiellement les dits comportements à coup d’incitation, de réglementation et d’interdiction etc etc. Phénomènes qui rognent toujours davantage la « liberté » des individus qui se voient (parfois) déposséder des libertés les plus élémentaires et qui ne peuvent (presque) plus faire le moindre geste sans un certificat, une attestation officielle ou une autorisation administrative…

 

Notons que l’organisation judiciaire (et son impartialité), le droit et la justice révèlent, à bien des égards, la façon dont les sociétés considèrent leurs membres. Et ils demeurent toujours aujourd’hui les éléments centraux de toute communauté tant leurs répercussions sont nombreuses et profondes sur les individus (et l’ensemble des sphères de l’existence). Ainsi, la part de liberté qu’une collectivité octroie à ses citoyens comme le sort qu’elle réserve aux individus arrêtés et/ou jugés coupables d’infractions(1) par son système policier et judiciaire et/ou à ses membres jugés « dangereux(2) » pour la collectivité, mais également la diversité (plus ou moins grande) de son arsenal de sanctions pénales et les conditions d’incarcération(3) des individus (qu’elle est amenée à condamner) constituent sa « carte d’identité » et dévoilent, outre l’un de ses plus importants rouages, la nature profonde et fondamentale de son fonctionnement et (très souvent) son « idéologie philosophique » en matière d’humanité…

(1) Crimes et délits.

(2) Parfois « inaptes » à intégrer « le vivre ensemble »… iréinsérables diraient certains…

(3) Et toujours de nos jours, la peine de mort dans de nombreuses contrées du monde…

 

 

Aparté sur les « instruments » individuels et collectifs de la « cohésion sociale »

 

Faisons, ici, un bref (mais, sans doute, instructif) aparté sur les moyens principaux que les sociétés et les Hommes disposent, ont mis et continuent de mettre en œuvre pour essayer (tant bien que mal) de créer un « vivre ensemble » (à peu près) acceptable :

 

- des mesures coercitives(1) (imposer par la force et la domination avec des sanctions en cas de transgression) ;

 

- le dialogue et l’entente (avec, a priori, des compromis et/ou des négociations) possibles dans les petits groupes et avec des individus dotés d’une cognition suffisante et/ou d’un « bagage éducatif » minimal… et au sein de structures de nature plutôt démocratique ;

 

- des mesures réglementaires(1) (« le bâton » — lois et règles qui interdisent ou restreignent l’expression ou la manifestation de certains comportements) ;

 

- des mesures incitatives(1) (« la carotte » qui invite fortement à se plier à certains comportements jugés moins préjudiciables ou délétères, en particulier, l’incitation financière à laquelle les Hommes sont « si sensibles »…) ;

(1) Ces mesures sont superficielles, elles inhibent simplement ou modifient de façon apparente les comportements initiaux et naturels.

 

- l’éducation par « la raison(2) » (l’apprentissage, plus ou moins « éclairé », des règles, de leurs fondements et de leur « bien-fondé »)… ;

(2) Voie médiane qui atteint rapidement ses limites : les individus, en effet, ont beau savoir et comprendre (intellectuellement) la « nocivité » de certains comportements, ils peuvent néanmoins s’y livrer (ou s’y soumettre) : violence, agression etc etc.

 

Lorsque ces orientations sont insuffisantes à l’intégration (certes superficielle) mais effective de certains comportements et qu’ils continuent à se manifester — de façon violente et irrespectueuse (selon les valeurs et les normes en vigueur dans la communauté ou la société), les individus et la collectivité ont recours à :

 

- l’exclusion temporaire (la prison par exemple) ou définitive (la relégation ou la mort) ;

 

Et il ne saurait tarder (avec la persistance manifeste du caractère conflictuel (voire violent) et fort préjudiciable des comportements humains) qu’une septième orientation apparaisse(3) (lorsque les orientations précédentes sont sans effet ou impossibles à mettre en œuvre) :

 

- la transformation des comportements par la génétique, le « synthétique » et la chimie.

(3) Cette orientation est déjà parfois utilisée aujourd’hui (avec la chimie) dans certaines régions du monde pour certains types de délinquant sexuel.

 

Il existe enfin une huitième orientation (peu « utilisée » jusqu’à présent mais qui le sera sûrement, très substantiellement, avec l’avènement progressif de la Conscience* chez les humains, trans-humains et/ou post-humains) :

 

- l’intégration profonde de la compréhension (de la « nature véritable » des êtres et des formes) à l’Être (avec souvent un cheminement et une pratique spirituels), mesure essentielle qui nécessite néanmoins des conditions « exigeantes » : un besoin substantiel de compréhension, des capacités cognitives suffisantes pour comprendre et intégrer profondément cette compréhension et une sensibilité profonde qui puisse amener à l’Amour et au sentiment d’Unité… ;

* Cette thématique sera amplement abordée dans les paragraphes consacrés aux sociétés de moyen et long termes.

 

Fin de l’aparté. Revenons à nos moutons* (de Panurge) publics…

* Cette formulation sous-entend que tous les citoyens appartiennent au troupeau… Est-ce exact ? Non ! Fort heureusement, subsistent toujours, ici et là, quelques brebis « égarées » et quelques brebis « galeuses » qui ne « bêlent » pas de concert avec le gros du cheptel…

 

 

Extension de l’aparté

Il convient, semble-t-il, de souligner (et d’insister encore et toujours sur) cet aspect des comportements humains... En effet, tant que les Hommes seront gouvernés par le psychisme et manifesteront des comportements égotiques, agressifs ou « instrumentalisants » (nous avons déjà très largement abordé cette thématique)… tant que l’espace de Conscience ne sera pas davantage et plus largement « habité »… tant que les Hommes n’auront pas profondément intégré une compréhension sensible et vivante de Ce qu’ils sont et de ce qu’est l’Existant… tant qu’un sentiment d’Amour et un degré de sensibilité minimal ne seront pas intérieurement « assimilés » pour « graver dans les cœurs » une loi d’Amour et de bienveillance naturels, le droit et le système judiciaire (impartial) demeureront les meilleures garants (malgré leurs imperfections, leurs faiblesses et leurs dysfonctionnements) pour assurer aux individus et à la société le meilleur « vivre ensemble » possible…

 

 

Extension de l’extension…

… et ceux qui prétendraient que les sociétés autocratiques éclairées(1) ou que les sociétés théocratiques « libérales(2) », qui pourraient imposer leurs « directives » et leurs orientations de façon verticale(3), seraient des systèmes d’organisation collective plus appropriés qui assureraient une forme d’harmonie collective et offriraient aux individus un « escalier » vers le Ciel ou vers plus « d’intelligence » oublient que la compréhension et la spiritualité ne peuvent être imposées (du « haut » ni de « l’extérieur ») et qu’elles doivent suivre, sur le plan individuel comme sur le plan collectif, un processus naturel et (en général) une lente maturation… processus naturel et maturation qui semblent, chez les êtres humains, devoir se réaliser en plusieurs étapes… Et la première consiste (en général) à essayer d’être « libre » sur le plan phénoménal et à essayer de satisfaire tous ses désirs, étape incontournable pour comprendre que cette orientation est inapte à « faire vivre » la Paix, la Joie, l’Amour et la Plénitude…

(1) Gouvernées par quelques philosophes et/ou quelques scientifiques...

(2) Gouvernées par quelques « sages » patentés...

(3) Du « haut » (représenté par quelques élites et « têtes bien pensantes ») vers « le bas » (le peuple)...

 

Cette étape franchie, vient le temps où l’on se tourne naturellement vers l’intériorité et les choses de l’esprit… Si l’on contraint les individus à « se pencher » directement (et trop précocement) sur ces deux aspects fondamentaux (l’intériorité et l’esprit), subsisteront, en eux, une aspiration latente (enfouie, inhibée ou « ligotée ») éminemment puissante (car non réalisée) à voir leurs désirs « se réaliser » sur les plans matériel et mondain… bref, des rêves et des désirs qui, tôt ou tard, rejailliront pour s’exprimer et essayer de se matérialiser*…

* A ce titre, l’Inde semble une parfaite illustration. En effet, elle qui s’est très tôt, et très massivement, inscrite dans une forme de religiosité et/ou de spiritualité n’a pu, au fil des siècles, résister aux sirènes du progrès, du confort et du matérialisme et a vu sa population abandonner — progressivement et en grande partie — sa « dimension spirituelle » (en particulier avec l’explosion des classes moyennes urbaines)…

 

Il semble donc plus sage, sur le plan collectif comme sur le plan individuel, de laisser le processus se réaliser naturellement et à son rythme… et en la matière (que l’on n’y souscrive ou non), l’organisation sociétale démocratique (comme, à bien des égards, le modèle capitaliste, productiviste, consumériste et individualiste actuel) semble constituer une étape nécessaire et incontournable dans l’évolution de l’humanité et la lente maturation « naturelle » de son développement (vers une Conscience « plus large »)… – fin de l'extension.

 

 

En matière d’organisation économique, il est très difficile d’apprécier la justesse, la pertinence et l’efficience d’un système par rapport à un autre. Il semble évident (comme nous l’avons dit à plusieurs reprises) que le libéralisme économique semble le reflet le plus fidèle du psychisme. Cette constatation ne constitue pas (pour autant) un argument suffisant pour lui octroyer le rang de modèle de référence (même s’il semble devenir prédominant à l’échelle planétaire) dans la mesure où le capitalisme semble inapte à éradiquer les disparités en matière de richesse. Au contraire, il semble plutôt les exacerber…

 

Certes, il enjoint à chaque individu de donner « le meilleur de lui-même(1) » pour répondre de façon toujours plus « satisfaisante » à ses besoins et à ses désirs et d’aucuns évoquent « la main invisible(2) » comme le garant d’une prospérité individuelle et collective mais les faits l’attestent avec force, l’organisation économique libérale, si elle n’est pas canalisée, régulée, encadrée et « corrigée » par l’Etat, conduit à créer une « jungle » économique et sociale sauvage et violente qui plonge les individus dans une perpétuelle atmosphère de conflit, d’oppression et de menace (où les « plus forts » et les « plus puissants » écrasent et anéantissent les « plus faibles » et les « plus démunis ») et qui constitue l’exact reflet, dans la sphère économique, de ce qu’est la chaîne alimentaire sur le plan organique… médiocre et dérisoire progrès (nous y reviendrons…).

(1) En réalité, les individus semblent davantage « se battre » que donner « le meilleur d’eux-mêmes »…

(2) « La main invisible » est une expression d’Adam Smith qui évoque l'idée suivante : les actions guidées par l'intérêt personnel de chacun contribuent à la richesse et au bien-être de tous.

 

Quant aux relations extérieures, leur nature révèle, à bien des égards, la façon dont une société considère l’Autre et « l’Etranger »… Guerres, conquêtes, appropriations territoriales, assujettissements des peuples « dominés », accueil des migrants… Le contexte international, au fil de l’histoire, a connu de considérables et très nombreux changements et les sociétés et leur diplomatie se sont (en général) montrées prudentes, nouant des alliances au gré des vents tournants et dominants… tentant bien souvent de ménager, elles aussi, « la chèvre et le chou » en multipliant (là aussi) les double, triple, quadruple discours pour faire « bonne figure » et essayer de progresser dans la hiérarchie mondiale, toujours en vigueur aujourd’hui, où la puissance militaire et économique d’une société demeure un atout majeur pour s’octroyer une voix prépondérante, un « droit de regard » et (souvent même) un « droit d’ingérence » (quasi indiscuté) dans l’organisation et la marche du monde…

 

 

L’organisation politique et judiciaire (modes de gouvernance, interventions étatiques et fonctions régaliennes « intérieures »)

 

Généralités

Comme nous l’avons évoqué, le système de gouvernance et ses structures d’autorité décisionnelle prennent les décisions qui engagent l’ensemble de la société. Ils les mettent en œuvre et organisent leur réalisation. Ils décident des lois et des règles qui régissent l’organisation générale de la société et mettent en place un système judiciaire (au sens large) chargé de les appliquer.

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Organisation politique (et mode de gouvernance) : « autorité naturelle » d’un et/ou de plusieurs individu(s) institué(s) « chef(s) » de clan(s) ;

Organisation judiciaire (et policière) : « règles » et sanctions laissées à « l’appréciation » et à « la clairvoyance » du ou des chef(s) de clan(s) et/ou à la « vindicte populaire ».

 

Sociétés primitives

Organisation politique (et mode de gouvernance) : « autorité naturelle » d’un et/ou de plusieurs individu(s) institué(s) « chef(s) » de clan(s) autoproclamé(s) ou institué(s) par la communauté ;

Organisation judiciaire (et policière) : « règles » et sanctions laissées à « l’appréciation » et à « la clairvoyance » du ou des chef(s) de clan(s) et/ou à la « vindicte populaire » ou instaurées par un « conseil communautaire » (plus ou moins démocratique ou autocratique).

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

Organisation politique (et mode de gouvernance) : autorité d’un et/ou de plusieurs individu(s) institué(s) selon les cas « seigneur(s) » ou « homme(s) d ‘Etat » autoproclamé(s) avec (bien souvent) une appropriation du pouvoir par la force (armée) et une collusion entre le pouvoir et le clergé (les représentants religieux) pour asseoir la « puissance divine » sur le plan terrestre ou institué(s) par le peuple* ;

Organisation judiciaire (et policière) : « règles » et sanctions, de nature plus ou moins violente, laissées à « l’appréciation » et à « la clairvoyance » du « seigneur » ou de « l’homme de loi » qui avait (le plus souvent) « toute autorité » pour juger les Hommes (représentant du pouvoir politique ou très lié à lui) et/ou à la « vindicte populaire ».

* Avec quelques cas rarissimes de régime de nature démocratique (nous pensons, en particulier(1), aux périodes dites de la « la Grèce » et de « la Rome » antiques)…

(1) Mais il existe sûrement d'autres exemples…

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

Organisation politique (et mode de gouvernance) : séparation progressive du pouvoir exécutif (qui gouverne, décide et impulse les orientations), du pouvoir législatif (qui vote les lois) et du pouvoir judiciaire (qui fait appliquer les lois). Et généralisation des élections des représentants du peuple et du multipartisme (de la « mascarade propagandiste » dans les pays autocratiques ou despotiques aux élections démocratiques dans les sociétés démocratiques selon différents, et plus ou moins appropriés, modes de scrutin) ;

Organisation judiciaire (et policière) : création et généralisation de différents codes (civil, pénal, administratif etc) pour instituer une généralisation du droit dans tous les secteurs et domaines de la société. Avec une – plus ou moins grande – indépendance des forces de l’ordre (police), du système judiciaire et des juges à l’égard du pouvoir exécutif et la généralisation des droits de la défense (pour les individus arrêtés et jugés qui peuvent être « défendus » par un avocat). Sophistication et complexification du système judiciaire (forces de police spécialisées, magistrats, juges d’instruction, parquet, tribunaux, diversification des peines et émergence d’une forme de « clémence pénale* »…).

* « Clémence » (relative) au regard du caractère (bien souvent) inique et expéditif des sanctions passées…

 

Sociétés d’aujourd’hui

Organisation politique (et mode de gouvernance) : le modèle démocratique tend à devenir le modèle dominant. Et montre simultanément ses écueils, ses dérives et ses dysfonctionnements (entre autres, la grossièreté des règles de représentativité, les « carrières politiques », les promesses électorales non tenues, « l’appropriation du pouvoir » par un grand nombre d’hommes politiques, les collusions et autres « magouilles » avec le monde économique, le désintérêt du peuple à la fois lassé et outré par les « affaires » ou la non viabilité des orientations instaurées par le pouvoir en place et leur « peu d’effets » sur la vie quotidienne des citoyens, la vision « court-termiste » et électoraliste des politiciens etc etc)

Organisation judiciaire (et policière) : inflation galopante des lois, des décrets et des arrêtés de toutes sortes pour « protéger » les citoyens (en leur imposant, en même temps, une foultitude d’obligations en tous genres…) et une forme de judiciarisation de la société (les individus intentent des procès pour un « oui » et pour un « non »…). Les sanctions pénales montrent également leurs limites et leur incapacité à maintenir « un vivre ensemble » harmonieux.

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu une telle évolution), nous pouvons dire que l’organisation politique et judiciaire a globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Dispositif – structures

Comme nous l’avons déjà écrit à plusieurs reprises, tout regroupement d’individus nécessite une organisation générale, une ou des instance(s) de gouvernance et des systèmes organisationnels pour rendre « le vivre ensemble » viable et opérationnel. Le dessein initial de toute communauté était (sans doute) de « mieux vivre », mieux vivre ensemble plutôt que vivre de façon isolée et/ou en autarcie (avec ses lourdes charges de « travail » pour « s’assurer le gîte et le couvert » et son lot de peurs liées à l’isolement…).

 

Notons néanmoins qu’à toutes les époques, certains individus ont toujours aspiré à échapper au système communautaire ou sociétal et à toute affiliation et/ou à toute subordination à la collectivité. Ces individus ont toujours représenté une ultra minorité… Et l’essentiel des Hommes a toujours été enclin à vivre « en société » (ou de façon regroupée) en bénéficiant du « confort » et de la (relative) sécurité offerts par le regroupement…

 

Mais il est peu dire que ces très nombreuses agglomérations d’individus (au sens littéral*) qui ont peu à peu transformé les communautés en bourgades, puis en villes, puis en zones urbaines, puis parfois en gigantesques mégalopoles n’ont pas été sans créer de nombreuses et profondes difficultés dans la très grande majorité des domaines de l’existence (sinon dans tous), obligeant les autorités de gouvernance à instituer quantité de règles et de lois pour assurer un « vivre ensemble » plus ou moins acceptable (et accepté par le plus grand nombre).

* Sens littéral qui a, sans doute, préfiguré son sens abstrait ou élargi (par procédé vaguement métonymique)…

 

Notons aussi que pendant une très longue période, le « pouvoir en place » et les autorités de gouvernance (plus ou moins autoproclamées(1), plus ou moins légitimes) ont souvent manifesté des comportements de domination(1) (et, parfois même, de « pure » exploitation(2))... Au fil des siècles, cette domination écrasante et cet accaparement du pouvoir ont soulevé parmi les peuples un désir puissant de libération et une profonde aspiration à la liberté qui les ont poussés à détruire et à balayer, avec plus ou moins de violence (et parfois à coups de révolutions sanglantes), les assises de ce pouvoir, souvent, inique et outrancier (qui appuyait habituellement sa légitimité par la force et/ou en se « présentant » comme l’émissaire terrestre de « l’ordre divin »…) pour tenter de construire ensemble un « destin collectif » dont ils seraient les initiateurs, les fondateurs, les bénéficiaires et les gestionnaires… en dépit de ces « nobles » aspirations, les difficultés dans tous les domaines sont très vite réapparues (en vérité, elles n’ont pas disparu… on les avait simplement « oubliées »…) car les caractéristiques psychiques des individus et les comportements d’appropriation et de favorisation de l’intérêt personnel n’avaient pas bougé d’un iota… et l’avènement démocratique (sans doute, pour l’heure, le moins pire des systèmes d’organisation des communautés humaines) n’a pas failli à la règle.

(1) Oligarchies et dictatures militaires entre autres exemples…

(2) Les esclaves et leur(s) « propriétaire(s) », les serfs et leur(s) seigneur(s) et d’autres aménités du même tonneau…

 

Notons que d’autres sociétés ont opté pour une organisation sociétale collectiviste en imposant un égalitarisme* qui n’a pas tardé (après quelques longues décennies) à montrer ses limites avec son lot d’excès, d’exactions, d’arrestations arbitraires et de purges sanglantes et meurtrières en appuyant son illégitime légitimité sur le peuple…

* Belle idée qui s’est heurtée, assez rapidement, aux limites imposées par les caractéristiques psychiques des individus, toujours enclins à la favorisation de l’intérêt personnel et toujours prompts à instrumentaliser « les autres » pour parvenir à leurs fins…

 

Quant aux autres sociétés, et de façon quasi généralisée, au fil des années et des siècles, les Etats se sont vus contraints d’investir, d’une façon toujours plus active et « autoritaire », tous les pans de l’existence humaine et de développer (avec l’incroyable complexification de la société et la croissance numéraire de ses membres) une fonction publique de plus en plus massive et tentaculaire... avec pour conséquences une forme de « rétrécissement » des libertés « individuelles » et le développement, de plus en plus manifeste, des « obligations » exigées à l’égard de tout citoyen… Ainsi a été (souvent) plus ou moins perdu ou « noyé » dans le fonctionnement étatique et les « obligations » imposées aux individus le dessein initial de toute société : le bien-être collectif et individuel… A ce propos, les Etats et les sociétés d’aujourd’hui, de demain et d’après-demain seront inévitablement confrontés à la question épineuse et brûlante de leur rôle, de leurs fonctions et des perspectives qu’ils offrent aux populations qu’ils sont censés gouverner et encadrer...

 

Répétons-le une nouvelle fois : tant que le psychisme demeurera un élément prépondérant chez les Hommes, les Etats et les sociétés devront prendre en considération et gérer (sans pouvoir offrir de solutions idoines) la très forte dimension conflictuelle des relations… ainsi, avec les assez extraordinaires progrès technologiques qui offrent à chacun (plus ou moins) la possibilité d’accroître, dans certains domaines, son espace de liberté (en particulier, aujourd’hui, en matière de communication et d’expression et demain, dans beaucoup d’autres domaines…), les risques d’atteinte à la liberté d’Autrui, les violences et les dérives de toutes sortes connaissent (et connaîtront) une incroyable envolée que les Etats sont (et seront) impuissants à contrôler et à régenter. Cette tendance (si les Hommes demeurent identiques à eux-mêmes…) pourrait être le socle d’une évolution sociétale désastreuse (pour les êtres humains et leurs descendants) et précipiter le monde vers des sociétés et des organisations sociétales hyper coercitives et hyper surveillées, foyers extrêmement propices à l’avènement d’un monde chaotique (nous aborderons cette thématique dans l’un des paragraphes consacré aux perspectives à venir).

 

Notons enfin (comme nous l’avons déjà évoqué) que l’organisation démocratique semble (en faisant fi de toute idéologie et en dépit, ici et là, de pugnaces contestations…) un modèle de gouvernance souhaité par le plus grand nombre. Elle semble, en effet, constituer le reflet le plus proche du psychisme (en particulier des désirs et des aspirations à la liberté) et a connu et connaît toujours, à travers le monde, un assez franc succès auprès d’un très grand nombre de peuples et d’individus… Et bien qu’elle demeure fort imparfaite (au vu de son obligation à gérer et à encadrer une population de plus en plus nombreuse et à « museler » en partie les débordements liés aux comportement délétères), elle s’est progressivement étendue (avec plus ou moins de heurts et de résistances) à un très grand nombre de sociétés et de nations. Il convient enfin d’ajouter qu’elle reste très largement perfectible (en bien des points)… et l’avenir verra sans doute l’émergence, le développement et la généralisation des transformations qui offriraient à ce modèle sociétal toutes ses lettres de noblesse… (nous aborderons cette thématique dans les paragraphes consacrés aux sociétés à moyen terme).

 

Demande – individus

Quant aux individus, après avoir baissé la tête pour arracher à la terre une maigre pitance, après avoir baissé la tête devant le fouet du seigneur ou du propriétaire, après avoir baissé la tête devant le patron et le contremaître, ils ont levé les yeux un instant pour « sentir et goûter la liberté » et les ont très vite rebaissés* devant le poids toujours plus écrasant et omnipotent de l’Etat et de la puissance publique… Bref, en dépit des « belles » aspirations des premières sociétés et du vent de liberté démocratique qui a soufflé sur de nombreuses têtes, les individus en sont toujours réduits à obéir, à suivre les règles et les injonctions qu’on leur impose et à trimer, les yeux baissés ou fermés, bien heureux déjà (les malheureux !) qu’on leur donne du pain en échange de leur labeur et qu’on leur offre des jeux pour qu’ils oublient et ne se révoltent pas (pas trop) de l’infâme statut et de « l’ignoble fonction » auxquels on les assigne…

* Sans compter, bien sûr, l’asservissement à peine déguisé du monde du travail qui les a toujours plus ou moins contraints à les baisser plus encore et qui, comble de l’ironie, leur a fait croire que le travail était source de libération(1) et pouvait leur assurer, outre une forme de dignité (voire de « noblesse »), une place « de choix » dans la société… pauvres Hommes aurions-nous envie de leur murmurer ou de leur crier à l’oreille…

(1) Avec le tristement célèbre « slogan » nazi « Arbeit macht frei » à l’entrée du camp d’extermination d’Auschwitz qui peut apparaître (à bien des égards) comme un atroce et funeste clin d’œil historique…

 

Mais disons-le sans frémir… la grande aspiration à la liberté est là (toujours là)… elle couve et bout sous cette chape de plomb (et de béton), sous ces tonnes de pelures, d’idéologies et de masques et bientôt, elle demandera à voir le jour… et sa naissance sera révolutionnaire… qu’elle vire à la démesure pulsionnelle, instinctive et sanguinaire ou qu’elle se réalise dans la joie, le silence et l’amour, l’avenir le dira…

 

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer l’organisation du territoire et des relations humaines la plus efficiente possible pour permettre un « vivre ensemble » harmonieux et « l’épanouissement » personnel de chaque individu.

 

Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

- la « tyrannie » des règles budgétaires pour les Etats, instaurée par le système financier institutionnel – banques centrales, organismes internationaux, FMI (% de la dette publique/PIB)

- la récurrence des crises économiques et financières

- le recul de l’Etat Providence (en matière d’assurances sociales – santé, vieillesse, maternité, chômage essentiellement – substitution progressive du système de répartition avec mutualisation des risques au profit d’un système de capitalisation où chacun cotise individuellement pour ses « propres » risques)

- la tendance à la généralisation de la « social-démocratie » dans les pays dits « développés »

- le taux élevé des prélèvements fiscaux (impôts) et des contributions sociales (cotisations) qui génère « la grogne » d’un bon nombre de citoyens toujours moins enclins à contribuer aux finances publiques et à participer au fonctionnement de la collectivité, jugé (à bien des égards) comme « vol ou spoliation institutionnalisé(e) »…

- la judiciarisation du monde (les individus et les « victimes » demandent réparation à l’Etat – ou aux représentants politiques – pour tout et n’importe quoi… une chute, par exemple, sur un trottoir mal pavé… qu’ils estiment relever de la responsabilité des élus…)

- la montée de la violence réelle ou ressentie dans les zones urbaines et le sentiment d’insécurité croissant (les Hommes aspirent de plus en plus à vivre dans un monde « sans risque »…)

- la « montée en flèche » de l’irrespect, des incivilités et des comportements « individualistes » où chacun fait « ce qu’il veut », exacerbée par les « nouvelles technologies » qui élargissent assez largement les champs d’action des atteintes à la personne…

- le regroupement de certaines nations qui aspirent à se constituer en vastes territoires

- la montée en puissance des organismes supra nationaux et de leurs pouvoirs sur les nations

 

Evolutions actuelles

- désengagement progressif de l’Etat dans ses fonctions de redistribution et de « réparation » financières (le Welfare state est remplacé progressivement par le Workfare…)

- les secteurs relevant plus ou moins traditionnellement du domaine public sont investis par le marché libéral (éducation, enseignement universitaire, santé, transports publics etc etc)

- forte expansion et généralisation de la vidéo surveillance dans tous les lieux publics

- développement des structures privées pour la protection des personnes et des biens

- engorgement et dysfonctionnements des secteurs administratifs

- diminution progressive du nombre de fonctionnaires et d’agents publics

 

Evolutions possibles et directions probables

- poursuite et élargissement du désinvestissement étatique dans la plupart des secteurs

- concentration des moyens financiers sur les fonctions régaliennes pour l’Etat central

- transfert des pouvoirs vers les collectivités locales et territoriales amenées (probablement) à devenir de plus en plus autonomes en matière de décision, d’orientation et de financement

- l’Etat (central) pourrait progressivement se cantonner, outre aux grandes fonctions régaliennes, à un rôle d’organisation et d’encadrement des collectivités locales et territoriales

 

Evolutions à très long terme

- l’Etat pourrait progressivement s’éteindre avec le regroupement des nations, la disparition progressive des frontières, le développement et la généralisation de la spiritualité (et donc la baisse des comportements délétères…)

- les structures de pouvoir pourraient s’internationaliser, institutions planétaires d’encadrement de moins en moins actives et nécessaires avec le développement des territoires locaux de plus en plus autonomes, de moins en moins en compétition, de plus en plus solidaires et enclins à la coopération.

- et peut-être enfin, la suppression de tout organisme d’encadrement, de contrôle et d’organisation lorsque tous les individus seront totalement autonomes, ouverts, respectueux et capables de vivre dans une harmonie naturelle perpétuelle... et/ou lorsque chaque individu sera apte et capable de se gouverner totalement et d’entretenir des rapports révérenciels avec l’ensemble de l’Existant*…

* Cette perspective, aujourd’hui, peut laisser songeur… mais qui n’a jamais rêvé d’une telle société ? Et qui sait qu’elle n’adviendra pas un jour (lointain sûrement)…?

 

Objectif idéal (implicite)

Eradication du besoin étatique lorsque les individus s’autogouverneront de façon naturelle, juste, respectueuse et intelligente avec un sentiment d’Unité permanent à l'égard de l’Existant…

 

 

Perspectives*

* Voir les perspectives de la rubrique « alimentation ».

 

Sociétés de demain

Organisation politique (et mode de gouvernance) : le modèle démocratique pourrait se généraliser et devenir le seul modèle viable et approprié (avec, bien sûr, quelques poches de résistance). Mais sur le plan national, les dysfonctionnements démocratiques se feront sans doute toujours plus « criants ». Emergence et développement « d’une décentralisation » démocratique. Les collectivités locales pourraient commencer à devenir des « territoires centraux » où s’exerceraient des règles démocratiques plus appropriées et plus transparentes. L’Etat central pourrait exercer de plus en plus un rôle fédérateur et d’encadrement du « bon fonctionnement » démocratique au sein des collectivités locales et pourrait renforcer ses pouvoirs régaliens. Les décisions et les orientations pourraient alors émaner toujours davantage des autorités supranationales (regroupements des nations en « zones territoriales » plus larges et pouvoir accru des organismes internationaux qui « dicteraient » leurs directives)

Organisation judiciaire (et policière) : poursuite de l’envolée inflationniste des lois, des décrets et des arrêtés dans tous les domaines de l’existence et tous les secteurs de la société. Renforcement de l’arsenal policier et judiciaire. Développement d’une société d’hyper surveillance et de contrôle.

 

Sociétés d’après demain

Organisation politique (et mode de gouvernance) : sur le plan local, les collectivités pourraient s’organiser de façon toujours plus autonome et deviendraient les principaux « lieux de vie » démocratiques. Les instances internationales pourraient devenir prépondérantes en matière d’orientation politique, économique, sociale et environnementale… le modèle démocratique continuerait de s’étendre sur l’essentiel des territoires. Les regroupements des nations se poursuivraient. L’organisation politique tendrait à devenir supranationale et mondiale. Les fonctions régaliennes de l’Etat central en matière coercitive pourraient atteindre leurs limites.

Organisation judiciaire (et policière) : poursuite de l’envolée inflationniste des lois, des décrets et des arrêtés dans tous les domaines de l’existence et tous les secteurs de la société à l’échelle nationale, supranationale et mondiale. Poursuite du renforcement de l’arsenal policier et judiciaire au niveau planétaire. Développement d’un monde d’hyper surveillance et de contrôle.

 

Sociétés à moyen terme

Organisation politique (et mode de gouvernance) : sur le plan local, généralisation progressive de l’autonomie des collectivités en matière d’organisation, de fonctionnement et d’orientation. Développement d’une organisation politique supranationale et mondiale. Harmonisation progressive des règles et des lois à l’échelle planétaire. La démocratie pourrait être quasiment omniprésente. Les grands « pôles territoriaux » tendraient à coopérer et à se réunir en conservant néanmoins leurs spécificités. La notion de « village planétaire » commencerait réellement à devenir une réalité.

Organisation judiciaire (et policière) : décroissance progressive des lois (excepté celles d’encadrement et d’organisation), de l’arsenal policier et judiciaire au niveau planétaire et de l’hyper surveillance.

 

Sociétés à long terme

Organisation politique (et mode de gouvernance) : sur le plan local, l’autonomie des collectivités pourrait laisser progressivement la place à l’autonomie des individus (qui « s’auto gouverneraient » avec de plus en plus de justesse, d’intelligence et de respect) jusqu’à l’éradication complète de tout besoin d’organisation. La gouvernance et l’encadrement devenus mondiaux apparaîtraient de moins en moins nécessaires (hormis peut-être, éventuellement, en matière de relations avec les formes non terrestres) et tendraient également à disparaître. Chaque individu deviendrait à lui seul « une société » et entretiendrait avec l’ensemble de l’Existant des liens respectueux et harmonieux.

Organisation judiciaire (et policière) : déclin progressif des lois et des systèmes policiers et judiciaires jusqu’à leur totale éradication. Chaque individu aura probablement totalement « intégré » les lois « naturelles » d’Amour et de Paix…

 

 

L’organisation économique (la production, les échanges, le travail, la monnaie, la distribution et la consommation)

 

Généralités

Comme nous l’avons déjà évoqué, toute société humaine instaure un système d’organisation de la production, de la distribution, de la monnaie, du travail, de la consommation et des échanges entre les individus.

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Organisation de la production : chasse (pêche), cueillette, organisation élémentaire du lieu de vie

Organisation de la consommation : consommation directe des produits de la chasse (ou de la pêche) et de la cueillette

Organisation des échanges économiques : éventuels échanges interindividuels

Les modes de paiement : inexistant

Organisation du travail : division naturelle des tâches intracommunautaires (sans doute) en fonction de la force physique et des « prédispositions naturelles » des individus

 

Sociétés primitives

Organisation de la production : essentiellement agricole et communautaire. Et quelques spécialités artisanales

Organisation de la consommation : les individus consomment ce qu’ils produisent et ce que « les voisins » produisent, et (éventuellement) sorte d’épicerie, marchés locaux plus ou moins spécialisés, foires d’envergure régionale et/ou « nationale » ponctuelles

Organisation des échanges économiques : pas ou peu d’échanges, avec le troc, puis la monnaie

Les modes de paiement : troc, coquillages, graines, pierres, pièces

Organisation du travail : travaux agricoles familiaux et/ou communautaires longs, pénibles et sans rémunération (les individus travaillent, participent à la production familiale ou communautaire pour « avoir le droit » de manger)

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

Organisation de la production : quasi complète séparation entre les activités de production et le travail et la consommation. Activités essentiellement agricoles et artisanales

Organisation de la consommation : magasins de détail, marchés locaux, foires d’envergure régionale et/ou nationale ponctuelles

Organisation des échanges économiques : essentiellement échanges intracommunautaires et avec les sociétés voisines. Et « échanges » entre les pays colonisateurs (« exploiteurs ») et les pays colonisés (« exploités »)

Les modes de paiement : argent, or, pièces, billets, lettres de change

Organisation du travail : travaux agricoles. Travail artisanal et prémices des tâches industrielles pénibles et à la chaîne

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

Organisation de la production : multiplication des intermédiaires dans le processus de production de biens (avec toujours plus de valeur ajoutée). Et développement des grandes firmes multinationales

Organisation de la consommation : multiplication des intermédiaires (centrales d’achats, grossistes, magasins de détail, supermarchés, hypermarchés, centres commerciaux, grandes enseignes et chaînes de distribution). Emergence des AMAP (raccourcissement de la chaîne de distribution pour les produits bio : du producteur au consommateur). Et émergence de la disparition progressive des petits magasins (sauf dans certains secteurs)

Organisation des échanges économiques : mondialisation des échanges

Les modes de paiement : pièces, billets, chèques, cartes de crédit, émergence des paiements immatériels

Organisation du travail : travaux agricoles de plus en plus « mécanisés ». Généralisation du travail industriel pénible et à la chaîne. Et fort développement des services (prestations) avec la création de quantité de nouveaux emplois

 

Sociétés d’aujourd’hui

Organisation de la production : développement des grands groupes industriels. Fort développement des services et des prestations en particulier avec les grands groupes commerciaux et les grandes chaînes commerciales. Et développement des autoentrepreneurs

Organisation de la consommation : développement des énormes entreprises de stockage et des entreprises de vente à distance (internet) et de vente « clé en main » (hypermarché drive par exemple). Et développement des AMAP (raccourcissement de la chaîne de distribution pour les produits bio : du producteur au consommateur)

Organisation des échanges économiques : hyper mondialisation des échanges (dans certains secteurs notamment les biens manufacturés). Et essor des (nouveaux) échanges locaux (dans les autres secteurs)

Les modes de paiement : cartes de crédit, paiements immatériels

Organisation du travail : ère du « tout travail » et du workfare, l'emploi devient la condition obligatoire pour être « intégré au système » et obtenir un revenu nécessaire à la satisfaction des besoins

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu une telle évolution), nous pouvons dire que l’organisation économique a globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Au début de l’humanité, les tâches humaines étaient éminemment simples et élémentaires : chasser (pêcher), cueillir, manger, survivre, se défendre et se protéger. A l’instar de la vie animale, l'existence humaine était rude. Rude mais simple. Puis, les Hommes se sont organisés, les « plus forts » (les hommes en général) se sont consacrés à la chasse et à la protection de la tribu ou de la communauté et les « moins forts » (les femmes en général) au foyer et à la préparation des « repas ». Voilà exposée, en une ligne élémentaire, la première division du travail dans le monde humain (et qui a, encore aujourd’hui, de très beaux restes…).

 

Avec la sédentarisation, les tâches et les activités humaines se sont développées et complexifiées. Elles demandaient parfois un apprentissage. Et les rôles se sont naturellement « distribués » selon les aptitudes, les capacités et les « compétences » des individus. L’artisanat a été créé, les tâches domestiques se sont multipliées, les enfants avaient besoin d’être élevés… les communautés se sont élargies, les bouches à nourrir sont devenues plus nombreuses, les découvertes et les inventions allèrent bon train, les échanges et le commerce ne purent se contenter du troc (trop élémentaire), les demandes devinrent plus exigeantes et l’Homme se retrouva « obligé » d’organiser cet « incroyable chantier » pour permettre une production en mesure de subvenir aux besoins de chaque individu et faciliter les échanges… ainsi sont nées la division du travail (au sens strict) et la monnaie… La production s’est organisée, le travail aussi (chacun à son poste, chacun tenant son rôle… ceux qui cultivaient, semaient et récoltaient, ceux qui transformaient les denrées en farine et/ou en repas « prêts à être ingurgités », ceux qui fabriquaient les outils, ceux qui lavaient le linge, ceux qui gardaient les troupeaux, ceux qui élevaient les enfants etc etc.).

 

Certaines communautés décidèrent de tout (ou presque) mettre en commun et de partager « les fruits » de leurs travaux. D’autres (la plupart) estimèrent que chacun devait récolter « les fruits » de son propre travail et, grâce à la monnaie, pouvoir s’offrir ce qu’il désirait ou lui manquait… la favorisation de l’intérêt personnel et l’avidité firent le reste…

 

L’accroissement des communautés, le développement toujours plus grand de la technique et du « progrès » (matériel), les désirs toujours plus exigeants des individus en matière de confort et de satisfaction, l’émergence progressive d’une autorité de gouvernance, puis de l’Etat achevèrent d’instituer un système de plus en plus complexe pour organiser (au mieux) la production (et donc l’offre de biens et de services) destinée à répondre à une demande toujours plus forte de « vivre mieux » et de façon plus aisée et plus confortable. On a ainsi assisté à la création de pléthore de nouvelles activités et d’une kyrielle de nouveaux secteurs qui ont permis la satisfaction de besoins toujours plus nombreux. La monnaie et l’argent sont devenus les pièces maîtresses de cette organisation. Des institutions financières et des banques ont été créées pour gérer les échanges économiques et financiers. Ainsi a été créé le système bancaire et monétaire… Et peu à peu, les individus se sont retrouvés à travailler contre un salaire. Ainsi sont nés les travailleurs et les salariés… Les individus les plus fortunés, en échange du capital qu’ils investissaient dans les différentes entreprises (industrielles et/ou commerciales), étaient exempts de travailler car ils recevaient un « retour sur investissement » qui les dispensait de mettre (comble de l’horreur à leur yeux) les mains dans la poussière et le cambouis. Ainsi sont nés les dividendes et les actionnaires…

 

Au fil des découvertes et des inventions (offrant à l’existence humaine toujours plus de confort et de facilité...), la consommation est progressivement devenue l’axe et l’aspect centraux dans la vie des Hommes, s’imaginant pouvoir être heureux (enfin) et trouver « le bonheur » en accumulant les choses et les objets. Fort conscientes de cette aspiration, les entreprises sont devenues expertes en publicité et en propagande matérialiste. Elles ont alors créé quantité de besoins en innovant et en rendant ces innovations « totalement indispensables » au bonheur des individus qui (pour l’essentiel) se sont pris et au piège et au jeu… Les marchés financiers se sont ardemment complexifiés devenant des bourses, puis de purs marchés spéculatifs aux « produits financiers » calculés à partir d’algorithmes diaboliquement compliqués… Tous les secteurs économiques se sont, eux aussi, éminemment complexifiés, ils ont multiplié les intermédiaires, les créations de toutes sortes, impulsant des modes de consommation (à coups de matraquages publicitaires qui ont fleuri un peu partout et qui fleurissent, encore aujourd’hui, dans tous les espaces possibles et imaginables en envahissant la vie quotidienne des Hommes sans la moindre contestation ni le moindre haut-le-cœur*...).

* Ou presque...

 

Bref, le monde humain s’est organisé et est devenu (sur l’ensemble de la planète) un immense et « terrifiant » marché où tout s’achète, où tout se vend, où tout se monnaye et se négocie (la bouffe, l’or, les matières premières, la santé, les fringues, les appartements, les couches culottes, les machines à laver, l’eau, le pétrole, les bagnoles, la qualité de l’air, la misère, la souffrance, les sentiments, le sexe, les émotions, l’amour, les informations, l’art, les savoirs, la connaissance, l’éducation, l’intelligence, la spiritualité et même la connerie en boîte et en sachet…). Bref, un monde où tous les coups sont permis…

 

Un monde où tous les individus, toutes les entreprises, toutes les structures et toutes les organisations (quelle que soit leur nature) se livrent à une concurrence sans merci et à une guerre impitoyable sur tous les marchés formels et officiels et sur tous les marchés informels et officieux… Un monde où l’abondance des uns et le dénuement des autres (en particulier dans la satisfaction des besoins vitaux et élémentaires) ne semblent affecter et émouvoir quasiment personne (hormis quelques voix outrées, révoltées et/ou désemparées) et où l’immense majorité ne pipe le moindre mot pourvu qu’elle participe « à la fête » et accède à une part du gâteau… comme si ce fonctionnement et cette organisation collective s’étaient emparés (quasi inconsciemment) d’une idéologie qui prône que « chacun a ce qu’il mérite », reflet peut-être vrai (mais pas certain) d’une sorte d’adage « karmique », en vigueur dans certaines traditions religieuses, qui stipule que « chacun vit ce qu’il mérite » (et nous ajouterions aussitôt afin de comprendre ce qu’il a à comprendre… mais nous n’en avons aucune certitude…).

 

Comment l’Homme en est-il donc arrivé là ? La réponse est simple. L’histoire de l’humanité a été implacablement gouvernée par le psychisme (et ses caractéristiques dont nous avons abondamment parlé) et les croyances qu’il a enkystées dans l'esprit des Hommes. Cette organisation sociétale n’est donc, en réalité, que l’exact reflet collectif du psychisme humain…

 

Notons enfin que les conflits et la violence (mais également les stratégies d’entente) qui autrefois (et pendant une très longue période) concernaient essentiellement la vie organique – en « touchant » principalement les corps – ont, en partie (et en partie seulement), quitté la sphère corporelle (au regard du nombre toujours incroyablement élevé d’infractions concernant les atteintes à la personne(1)) pour envahir massivement la sphère des échanges économiques où les exactions, la férocité et la sauvagerie (à peine déguisées et à peine régulées) se sont déchaînées et ont explosé un peu partout(2)

(1) Sans compter, bien sûr, la violence exercée à l’encontre des animaux et des autres formes terrestres…

(2) Soulignons, ici, l’analogie quasi parfaite (et stupéfiante) entre la biologie (et, en particulier, la chaîne alimentaire) et l’économie (et, en particulier, le monde du travail et le « monde des affaires ») comme s’il s’était opéré, au fil de l’histoire terrestre et humaine, un lent (et inévitable) glissement de la violence d’un domaine à l’autre… En bien des points (sinon dans tous), il y a une coïncidence parfaite, mais contentons-nous d’en relever trois… En premier lieu, il existe une grande similitude entre l’opportunité des animaux en matière alimentaire et l’opportunité des êtres humains et des entreprises dans le monde « des affaires ». En deuxième lieu, il existe une grande similitude entre les niches alimentaires et les niches économiques. En effet, à l'instar des animaux, les entrepreneurs s’insèrent dans des secteurs ou des domaines que personne n’a eu jusqu’alors l’idée d’exploiter et/ou qui offrent encore la possibilité de « se faire une place » pour « vivre »… Et enfin, il existe une grande similitude des comportements (collisions et collusions — le célèbre « struggle for life » darwinien) lorsque le territoire et/ou la niche est (sont) saturé(e)(s), les uns et les autres luttent, se battent et évincent leurs concurrents pour s’accaparer le territoire et assurer leur domination… bref, en un mot : biologie et économie, mêmes combats…

 

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer « la prospérité » de la société et la satisfaction de l’ensemble des besoins et des désirs de (chacun de) ses membres de façon permanente (selon les contextes économiques national et international).

 

Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

- les « nouvelles technologies »

- la transformation des structures de production et de distribution

- les nouvelles tendances de la consommation

- la pénibilité du travail

- la prolifération des intermédiaires dans la distribution

- la tendance (dans certains secteurs) au « raccourcissement » de la chaîne de distribution

- l’obsolescence programmée

- l’explosion des déchets liés à la consommation

- les inégalités en matière de revenu et de richesse

- la « folie » et la « monstruosité » du modèle productiviste (le « tout croissance »…)

 

Evolutions actuelles

- le « Workfare »

- la prolifération des entreprises du « net » (e-commerce(1), m-commerce(2)…)

- la transformation du commerce et des échanges économiques (ubérisation(3) de l’économie, application du système « peer-to-peer(4) » aux échanges économiques, développement des services et des prestations entre particuliers via une plate-forme(5)…)

- l’hyper consommation

- l’émergence « timide » d’un « anti consumérisme »

- le « made yourself »

- le consommateur « roi »

- la flexibilisation du travail

- le développement des services multi-cartes

- l’hyper mondialisation

- la création « artificielle » de nouveaux besoins

- l’immatérialité monétaire

(1) Commerce électronique via internet.

(2) Achats par l’intermédiaire du smartphone.

(3) Néologisme* qui désigne le commerce qui met des ressources à disposition des clients et/ou qui leur fournit un (ou des) service(s) depuis leur smartphone (à tout moment et sans délai).

* Préfixe « issu » du nom de la société californienne « Uber » qui a développé et exploité des applications mobiles de mise en contact d'utilisateurs avec des conducteurs réalisant des services de transport.

(4) Que l’on pourrait définir comme une sorte de mise en réseaux de fichiers accessibles à tous les utilisateurs…

(5) Du genre « rbnb », entreprise qui a créé une plate-forme communautaire de location et de réservation de logements entre particuliers…

 

Evolutions possibles et directions probables

- l’hyper flexibilisation du travail

- le développement des services et des prestations hyper individualisés de proximité

- l’automatisation progressive de tous les secteurs industriels (biens manufacturés)

- le développement et la généralisation de « nouvelles façons » de consommer

- l’hyper financiarisation du monde

- l’essoufflement naturel du productivisme et du consumérisme au profit d’un modèle de coopération et d’entraide économiques

 

Evolutions à très long terme

- de prodigieux progrès en matière de réponses aux besoins (liés aux découvertes et inventions induites par les avancées techniques et scientifiques)

- le progressif déclin des échanges internationaux

- la réorganisation, puis la diminution progressive des échanges locaux

- le déclin, puis la disparition de la monnaie

- le déclin, puis la disparition du travail

 

Objectif idéal (implicite)

Eradication du besoin d’organisation économique, des échanges, du travail et de la monnaie lorsque les individus pourront « fabriquer par eux-mêmes » tout ce dont ils auront besoin… et seront en mesure d’accéder (progressivement) à une totale autonomie…

 

 

Perspectives*

* Voir les perspectives de la rubrique « alimentation ».

 

Sociétés de demain

Organisation de la production : généralisation des grands groupes industriels et des grands groupes prestataires de services. Et généralisation des microentreprises multi-cartes de proximité

Organisation de la consommation : généralisation des énormes chaînes de stockage et des entreprises de vente à distance et de vente « clé en main » hyper personnalisées. Développement de la vente directe pour certains secteurs (prestations de services divers, alimentaire et artisanat). Et généralisation de la disparition des petits magasins (sauf dans certains secteurs)

Organisation des échanges économiques : totale généralisation de la mondialisation des échanges (dans certains secteurs notamment les biens manufacturés). Et généralisation des (nouveaux) échanges locaux (dans les autres secteurs)

Les modes de paiement : mode de paiement immatériel (avec support)

Organisation du travail : le travail pourrait devenir « roi tyrannique ». Hyperspécialisation des tâches. Emergence d’autres modes de travail (multi-cartes, « multi-jobs », à distance ou très flexibles par exemple). Et émergence d’activités plus porteuses de sens pour l’individu et la société

 

Sociétés d’après demain

Organisation de la production : réorganisation progressive des grands groupes et des microentreprises multi-cartes. Et réorientation progressive des activités

Organisation de la consommation : quasi généralisation de la distribution des biens manufacturés à distance avec d'énormes centrales d’achats. Et généralisation des micros entreprises et des prestataires de services multi-cartes

Organisation des échanges économiques : généralisation des oligopoles au sein des grands ensembles territoriaux (pour les biens manufacturés). Et extension de la généralisation des (nouveaux) échanges locaux (dans les autres secteurs)

Les modes de paiement : immatériels (sans support)

Organisation du travail : essoufflement naturel du travail « tyrannique ». Développement d’activités professionnelles plus épanouissantes individuellement et collectivement. Et développement (possible) du Revenu Minimum d’Existence*

* Allocation versée aux individus sans condition de ressources ni obligation de travail (« système » qui reconnaît la participation de l'individu à la société, indépendamment de l'emploi)…

 

Sociétés à moyen terme

Organisation de la production :

- création et production au niveau central, constitution de grands pôles de production, de prestations et de services avec fourniture de la production, des prestations et des services à distance

- puis (lorsque le progrès le permettra), inversion du processus de centralisation avec relocalisation et décentralisation de la recherche, de la production et de la distribution (de façon de plus en plus « fine » et locale)

- création et production au niveau régional

Organisation de la consommation :

- généralisation de la distribution des biens manufacturés à distance avec des unités de distribution et de prestations élémentaires et basiques implantées localement. Et vente directe et prestataires de services au niveau local (pour certains secteurs)

- développement de la relocalisation et de la décentralisation de la distribution des biens manufacturés (niveau régional). Et distribution directe et prestataires de services au niveau local

Organisation des échanges économiques :

- progressif déclin des échanges économiques mondiaux. Et augmentation des échanges locaux

- développement et généralisation de la disparition des échanges économiques mondiaux. Et fort développement des échanges locaux

Les modes de paiement : diminution progressive des échanges monétisés jusqu’à leur quasi suppression

Organisation du travail :

- réorganisation progressive du monde du travail avec une orientation vers des secteurs et des domaines phares (recherche, fabrication industrielle, écologie, enseignement, savoirs, bien-être, spiritualité)

- généralisation du travail « tournant » selon les aspirations des individus avec diminution drastique du temps de travail journalier. Et émergence progressive d’un travail non obligatoire et non rémunéré

 

Sociétés à long terme

Organisation de la production :

- création et production au sein de la communauté locale

- puis création, production et consommation au sein du foyer

- puis création, production et consommation totalement individuelles

Organisation de la consommation :

- généralisation de la relocalisation et de la décentralisation de la distribution des biens manufacturés (niveau local). Développement de la production et de la fabrication au niveau du foyer

- puis création, production et consommation au sein du foyer

- puis création, production et consommation totalement individuelles

Organisation des échanges économiques :

- quasi disparition des échanges internationaux. Et quasi généralisation des échanges locaux

- quasi suppression des échanges économiques locaux

- suppression des échanges économiques

Les modes de paiement : suppression des échanges monétisés

Organisation du travail :

- généralisation du travail non obligatoire et non rémunéré par vocation ou aspiration temporaire. Et émergence de la disparition de la notion de travail (les individus deviennent de plus en plus capables d’assurer toutes les fonctions dans tous les domaines…)

- chaque individu œuvre à sa convenance à certains domaines de « son choix » pendant une durée choisie (elle aussi, à sa convenance). Et développement de la disparition de la notion de travail

- disparition totale de la notion de travail

 

 

Les relations avec l’extérieur

 

Généralités

Comme nous l’avons déjà évoqué, toute société humaine instaure un système de défense et de protection contre l’extérieur (plus ou moins fort et agressif) et des instances chargées des relations avec le « reste du monde ».

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Peu de liens avec « l’extérieur ». Echauffourées, intimidations, conflits, exterminations (sans doute), appropriations territoriales et domination des « clans » adverses.

 

Sociétés primitives

Peu de liens avec « l’extérieur ». Conflits territoriaux (sans doute) violents et/ou échanges (troc) selon le degré d’agressivité des communautés.

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

Guerres et commerce. Grandes invasions. Croisades. Colonisation. Appropriations territoriales. Exterminations. Pillage des richesses. Domination des peuples. Création des nations et des pays.

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

Naissance et généralisation du droit international et des organisations internationales (SDN, ONU etc etc). Les frontières nationales sont « définies ». Conflits mondiaux. Fort développement du commerce international. Généralisation et mondialisation des échanges. Progressif et tardif déclin des conflits armés (malgré de plus ou moins nombreuses poches de résistance…). Très progressive paix entre les peuples et les nations.

 

Sociétés d’aujourd’hui

Mise en avant des organismes internationaux dans les relations économiques (FMI, OMC…) et diplomatiques (ONU…) entre les nations et dans l’élargissement du respect des « droits de l’Homme » (Tribunal Pénal International…). Complexification des éléments géopolitiques avec, en particulier, la multipolarisation du monde (plusieurs nations très influentes sur l’échiquier(1) international), la montée d’une nouvelle forme de terrorisme et l'essor et/ou la relative pérennisation de certains conflits régionaux (Moyen Orient par exemple) où chaque nation essaye de louvoyer en « eaux troubles » (dans les eaux troubles internationales) au gré des courants, des opportunités économiques, des discours et des changements politiques… Le monde, de plus en plus pacifié, n’en demeure pas moins un salmigondis opaque où les nations et les individus ne savent plus à quel saint se vouer, ni où poser les pieds… une girouette presque hors de contrôle où les double, triple, quadruple discours sont légions et viennent contredire les actes (et les interventions ici et là) des nations et où personne ne sait exactement qui gouverne et « possède » le pouvoir (ni comment fonctionne ce monde(2) — de plus en plus complexe)… serait-ce les Etats ? Quelques Etats (G7, G8, G20) ? Les nations les plus puissantes économiquement ? Les grandes firmes internationales ? Les bourses ? Les algorithmes financiers ? Quelques collusions entre « milliardaires » ? Les interactions entre ces différents protagonistes ? Qui peut savoir...?

(1) La notion d’échiquier rappelle, bien sûr, que le monde demeure pour la quasi-totalité des nations un terrain d’affrontement...

(2) Le monde semble, plus ou moins, aller là où les vents le portent… mais point de capitaine(s), semble-t-il, sur le paquebot… l’argent et le pouvoir comme seuls maîtres à bord !!! Gare au naufrage ! pourraient crier certains Cassandres…

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu une telle évolution), nous pouvons dire que les relations extérieures ont globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Guerre et commerce… depuis les premiers cris de « l’Homme des cavernes » jusqu’à l’Homme d’aujourd’hui (et, sans doute, pour les Hommes et leurs descendants de demain et d’après-demain), les guerres et le commerce ont toujours fait (et feront toujours*) tourner le monde… Si l’Homme ne se consacre pas à l’un, il se consacre à l’autre… et parfois même simultanément aux deux... La guerre et le commerce semblent, en vérité, les maître-mots de toute société (et tout individu bien sûr) en matière de relations et d’échanges… A ce titre, il est frappant de constater que les relations d’une communauté ou d’une société avec ce qu’elle considère comme « le reste du monde » obéissent (très souvent) aux mêmes règles que les relations qu’un individu entretient avec « les autres »… Il ne s’agit, bien souvent, que d’un changement de plans (le plan individuel devient simplement collectif). L’Homme s’est toujours montré méfiant (et donc, souvent, agressif — agressivité engendrée par la peur) à l’égard de l’inconnu et des inconnus et a toujours considéré l’Autre comme un moyen de répondre à ses désirs et à ses besoins. Et une communauté ou une société n’échappe pas à la règle…

* Tant que les caractéristiques psychiques persisteront… et seront « à la manœuvre »…

 

Des premières échauffourées et des premiers trocs et échanges entre les membres d’une même communauté aux transactions multinationales, aux gigantesques carrefours commerciaux et aux « petits et grands » conflits mondiaux qui ont frappé toutes les époques, et en particulier le 20ème siècle, l’histoire humaine a toujours été marquée par l’appât du gain, le commerce, la violence et les guerres. Rêves de grandeur d’une civilisation, désirs de conquête et d’appropriation territoriale (matières premières et richesses souterraines), volonté de puissance et d’hégémonie, volonté de domination et d’asservissement des peuples (au nom d’une idéologie), toutes les sociétés, au cours de l’histoire, ont été amenées au négoce et à être, tour à tour (au gré des vents historiques), les « bourreaux » et les « victimes », les « va-t’en guerre » dominateurs et sans scrupule ou ont vu leur territoire et leur peuple envahis et dominés par une « puissance étrangère ». Ainsi est l’Homme et le monde qu’il fait « tourner »… Et (comme nous l’avons déjà vu) les racines des désirs et de cette « violence ontologique » résident au plus profond du psychisme humain… Et l’histoire n’est, à ce titre, qu’un éternel ressassement des « vieilles » rengaines humaines… elle se répète et se répétera indéfiniment tant que l’Homme n’aura pas déraciné cet instinct d’appropriation, de domination et de puissance*…

* Et pour y parvenir, il lui faut comprendre profondément les mécanismes à l’œuvre…

 

Soucieuses de défendre « bec et ongles » leur territoire, leurs intérêts, leurs valeurs, leur identité (et que sais-je encore…), toutes les sociétés ont développé un arsenal guerrier (militaire et commercial) de plus en plus impressionnant et de plus en plus performant… véritable « course à l’échalote » où les découvertes et les progrès firent florès à peu près partout et contribuèrent grandement à faire de « l’art de la guerre » et de « l’art du commerce » des priorités (absolues)…

 

En matière militaire, les grognements, les coups de bâton et les jets de pierre des premiers Hommes ont vite laissé place aux lances, aux arcs, aux boucliers, aux armures, aux arbalètes, aux armes à feu, aux canons, aux fusils, aux fusils mitrailleurs, aux chars d’assaut, aux bombardiers, aux avions de chasse, aux lances missiles air-air, terre-air, sol-sol…, à la bombe atomique, à la bombe à hydrogène et aux armes chimiques et bactériologiques sans compter le développement massif des nouvelles technologies guerrières (les avions « furtifs », les drones etc etc)… L’imagination humaine s’est toujours montrée très fertile lorsqu’il s’agissait d’assurer sa défense, sa protection ou sa tranquillité ou de satisfaire ses rêves et désirs de gloire et de puissance… Infanterie, cavalerie, marine de guerre, sous-marins, aviation, tous les terrains et tous les milieux furent « occupés et défendus »… Quant au négoce et au commerce, ils se sont étendus à tous les territoires (ou presque) et à tous les secteurs et domaines (jusqu’à la traite humaine* évidemment).

* Esclavage et servage (entre autres ignominies...)... et jusqu'à l'esclavagisme « moderne » et l'exploitation contemporaine de la misère « humaine » (en bien des lieux et des domaines)...

 

Mais les guerres étaient la règle et lorsqu’elles laissaient aux Hommes quelque répit… aussitôt le commerce refleurissait (ne l’empêchant pas, bien sûr, de sévir aussi en temps de guerre sans compter, évidemment, le très lucratif commerce des armes… les affaires sont les affaires, n’est-ce pas ?). Ainsi, de façon cyclique et récurrente, les populations étaient contraintes de prendre les armes et de se rendre sur les champs de bataille pour servir de « chair à canon », l’honneur (quelle horreur !) de la patrie était en jeu… et combien de massacres, d’exterminations, d’exécutions, d’exactions, de tortures et combien de malheureux ont péri, dans l’histoire de l’humanité, pour abreuver la terre de leur sang… boucherie humaine où les animaux (transformés, souvent, en instruments de guerre), n’ont pas été, eux aussi, bien sûr, épargnés…

 

Après des millions et des millions de morts à travers les siècles et deux grands conflits mondiaux qui ont fait trembler le monde au cours du 20ème siècle et après des milliards de juteuses transactions commerciales locales, régionales, nationales et internationales, les esprits (toujours plus ou moins « échauffés ») se sont néanmoins persuadés qu’il valait mieux « faire des affaires » que « faire la guerre » et se sont cantonnés à une « guerre froide*» où les armes de dissuasion et de destruction massive ont connu une apothéose paroxystique… Puis, progressivement (avec l’effondrement du bloc soviétique), on a assisté (en dépit de quelques « escarmouches » ici et là) à une détente et à une lente pacification sur une grande part des territoires terrestres. Mais la guerre a seulement changé de territoire… et on la retrouve aujourd’hui (plus vaillante que jamais — comme nous l’avons déjà souligné) sur le terrain économique… et sur tous les territoires planétaires. Et bien qu’il reste, aujourd’hui, quelques régions et zones où la guerre et l’horreur ne connaissent pas de répit, l’essentiel des nations et des sociétés se contente à présent de livrer bataille à coups de prises de marché, de taux de croissance et d’exportations en galvanisant leurs troupes, une armada d’entreprises, de firmes internationales et d’établissements financiers bien décidés à conquérir le monde avec leurs dollars et prêts à « s’entre-tuer » jusqu’au dernier…

* Bloc « de l’Ouest » avec l’OTAN contre bloc « de l’Est » (pays signataires du pacte de Varsovie).

 

Notons enfin que la très grande majorité des nations et des sociétés continue à maintenir son armée et son armement militaire. Et que le domaine de la « recherche et développement » en la matière va bon train (en dépit d’une tendance aux restrictions budgétaires). Seuls de très rares pays ont décidé (avec intelligence) de renoncer à toute armée et à tout armement…

 

Il est notable de préciser que les « paramètres » de la guerre ont, eux aussi, changé et que la probabilité d’assister à une guerre conventionnelle (guerre de « face à face » entre deux armées « traditionnelles ») s’estompe lentement. La nouvelle distribution des cartes sur le plan géopolitique (disparition d’un monde bipolaire – Est-Ouest – au profit d’un monde multipolaire – pays occidentaux et pays dit « émergents ») et l’apparition et le développement du terrorisme à l’échelle planétaire, orchestré par une poignée d’individus aux revendications politico-religieuses nébuleuses et peu convaincantes (qui voudraient nous faire croire en un affrontement « civilisationnel »…), incitent les sociétés et les Etats, outre à booster leurs services de renseignement, à maintenir une vigilance armée(1) appropriée et à continuer de montrer leurs muscles (armés) dans la cour du monde pour avoir, plus ou moins, l’illusion d’y tenir leur place et leur rang (comme l’illustre, par exemple, aujourd’hui la bien obsolète composition du conseil de sécurité de l’ONU(2)).

(1) Dispositifs plus ou moins opérationnels dans ce genre de conflits très inégal entre une armée conventionnelle et des groupes armés « invisibles » et très mobiles qui se « fondent » dans la population...

(2) Au sein duquel les membres permanents sont tous détenteurs de la bombe atomique...

 

Notons, à ce propos, qu’en dépit de l’attachement de certaines anciennes « grandes puissances » à leurs prérogatives et à leur influence dans la marche du monde (dont « l'aura » et la réputation datent des grands mouvements de colonisation) et qui sont devenues aujourd’hui des puissances moyennes (voire très moyennes), les sphères de pouvoir et d’influence vont (et elles sont déjà en train de) connaître de profonds bouleversements qui vont poser les fondements d’un nouvel ordre mondial, obligeant (comme toujours depuis le début de l’histoire terrestre) à des alliances, des ententes et des regroupements qui auront une influence décisive sur l’avenir des nations et des sociétés mais également, au regard des grands enjeux contemporains et des défis à plus ou moins court terme auxquels les Hommes devront faire face*, sur l’avenir de l’Homme et de l’humanité…

* Fuite en avant et essoufflement des modèles sociétaux et économiques, pollution massive, surpopulation…

 

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer la prospérité et la sécurité de la société et de ses membres de façon permanente et de la façon la plus « habile » possible (selon les contextes et les situations économiques et géopolitiques).

 

Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

- le développement d’un terrorisme « identitaire » religieux (pseudo-religieux)

- la mondialisation des économies et des échanges économiques et financiers

- la multipolarité du monde

- les poches de conflits armés disséminées ici et là

- les revendications d’indépendance de certaines minorités à travers le monde

- le double mouvement de régionalisation du monde et de création de grandes zones territoriales

- les flux migratoires massifs des populations vers les territoires « développés »

- le repli communautaire et (pseudo) « civilisationnel »

 

Evolutions actuelles

- la généralisation de la pacification entre les sociétés et les peuples

- le développement de la « solidarité internationale » en cas de catastrophes naturelles ou de crises sanitaires majeures

- la poursuite du « glissement de la violence » vers les domaines économiques et financiers (guerre économique totale)

- le repli identito-communautaire avec l’érection de « murs de protection » au sein des territoires nationaux (communautés « sécuritaires », lotissements sécurisés etc) et autour des grands ensembles territoriaux (par exemple, aux Etats-Unis « contre* » les migrants mexicains, en Europe « contre » les migrants d’Afrique et du Moyen Orient, en Israël « contre » les palestiniens et les pays limitrophes etc etc)

* Le terme « contre » pourrait paraître maladroit mais il est utilisé, ici, à dessein pour souligner la dimension de lutte et d’opposition…

 

Evolutions possibles et directions probables

- le remaniement des frontières avec la progressive disparition des entités nationales au profit des « grands pôles territoriaux », favorisant la libre circulation des personnes et des biens en leur sein et, peut-être, un blocus et un barrage (selon la configuration que prendra le monde) destinés à refouler toutes les migrations extraterritoriales jugées importunes au niveau local comme au niveau des « grands ensembles territoriaux ».

- la lente transformation du commerce, de la concurrence et de la guerre économique en coopération et en entraide entre les différentes zones territoriales.

- l’émergence et le développement d’une solidarité internationale dans des secteurs où la concurrence a toujours été prédominante, voire omnipotente

- la progressive prédominance des institutions et organismes internationaux dans « le vivre ensemble » mondial en matière économique (échanges entre les individus), juridique (droits des individus), sociale (bien-être des individus) et environnementale (rapports des individus à l’Existant).

 

Evolutions à très long terme

- la généralisation de la coopération, de l’entraide et de la solidarité dans tous les secteurs de la société et dans tous les domaines de l’existence

- l’harmonisation mondiale en matière de conditions d’existence et de qualité de vie (satisfaction des besoins, droits et liberté…)

- la disparition progressive des frontières, des nations et des grands ensembles territoriaux

- un espace terrestre (voire même spatial) totalement pacifié et dégagé de toute entrave à la libre circulation des personnes et des biens avec implantation libre

 

Objectif idéal (implicite)

Eradication de tous les dangers réels et potentiels sur le territoire et de toute entrave à la prospérité, au « bonheur », à la liberté et à la libre circulation des individus

 

 

Perspectives*

* Voir les perspectives de la rubrique « alimentation ».

 

Sociétés de demain

- commerce hypermondialisé avec concurrence accrue entre les nations et les regroupements nationaux (les « grands pôles géographiques ») en matière commerciale et en matière d’appropriation des territoires et des ressources naturelles

- progressive pacification et disparition des conflits armés entre les nations et les « grands pôles territoriaux » avec poches de résistance, induites par les revendications communautaires, identitaires et idéologiques

 

Sociétés d’après demain

- la mondialisation du commerce est paroxystique et montre des signes d’essoufflement (incapacité à répartir de façon appropriée et équitable les richesses – les conditions de vie, liées au modèle économique dominant capitaliste et individualiste, deviennent de plus en plus insupportables pour les individus...)

- la paix mondiale sur la totalité des territoires terrestres est à portée de main…

- émergent les premiers signes d’une volonté de faire de la Terre un espace commun harmonieux et équitable

 

Sociétés à moyen terme

- le commerce et la concurrence sont progressivement délaissés au profit d’une coopération et d’un esprit d’entraide

- la paix mondiale devient une « réalité »

- les frontières des nations et des « grands ensembles territoriaux » tendent à devenir de plus en plus poreuses et inutiles

 

Sociétés à long terme

- la planète et le territoire spatial deviennent progressivement un gigantesque espace commun de paix, d’entraide et d’harmonie

 

 

Ces quatre grandes organisations sociétales (politique, judiciaire, économique et les relations avec l’extérieur) ont de très fortes répercussions sur l’organisation territoriale des sociétés et conditionnent très largement les flux et les mouvements migratoires intra nationaux et internationaux et la circulation des populations sur l’ensemble de la surface terrestre, thématiques essentielles des sociétés humaines dont nous ne pouvons faire l’impasse…

 

 

L’organisation des territoires

 

Généralités

Nous ne pouvons manquer de débuter cette rubrique par deux (énormes et merveilleux) truismes(1). Les individus sont naturellement enclins à fuir la misère, l’oppression et la guerre... et l'immense majorité aspire à s’établir sur des terres de liberté, de paix et de prospérité. Ces (évidentes(2)) lapalissades n’ont cessé, au fil des siècles, de se vérifier par quantité de mouvements migratoires plus ou moins massifs selon les périodes historiques.

(1) Comme vous l’avez remarqué, nous adorons les poncifs…

(2) Voilà une redondance aisée, n’est-ce pas ? Oui, en effet… nous avons affaire, ici, à une très basique figure de la périssologie…

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Nomadisme et/ou semi nomadisme « forcé »

 

Sociétés primitives

- sédentarisation et/ou persistance du semi nomadisme avec quasi absence de flux « migratoires »

- sociétés distantes les unes des autres, vie communautaire rurale et développement progressif des bourgades

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

- grandes explorations terrestres et maritimes (découverte du monde)

- grandes migrations et colonisation(s)

- faibles mouvements migratoires intra territorial

- ruralité et croissance progressive des zones urbaines

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

- poursuite et généralisation de la colonisation (puis déclin et disparition « officielle »…)

- flux migratoires nationaux et internationaux importants (très fort exode rural et migration conséquente des populations des pays dits « en voie de développement » et/ou des anciens territoires colonisés vers les pays dits « développés »)

- développement des grandes villes et des mégalopoles

- désertification rurale et hyper croissance des zones urbaines, émergence des grandes mégalopoles urbaines

 

Sociétés d’aujourd’hui

- flux migratoires internationaux importants malgré le « repli territorial » des « pays riches »

- réorganisation progressive des territoires nationaux : forte croissance urbaine, développement des zones péri urbaines et rurbaines, repeuplement « homéopathique » des zones rurales

- poursuite de la désertification rurale (vie campagnarde traditionnelle), de l’hyperurbanisation et du développement des grandes mégalopoles. Emergence des néo-ruraux. Développement des zones périurbaines et des rurbains

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu une telle évolution), nous pouvons dire que l’organisation des territoires a globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Après les premiers pas (les tout premiers pas) de l’Homme sur Terre, les individus ont sans doute été amenés (si j’ose dire !) à suivre les troupeaux pour chasser. L’Homme était donc probablement, à ses origines, plus ou moins nomade (ou semi nomade). Et il ne s’est (sans doute) sédentarisé qu’au fil de « ses voyages » en découvrant une terre « d’abondance » et de « paix » en mesure de satisfaire l’essentiel de ses besoins.

 

Notons également que certaines populations se sont implantées (comme l’ont fait certaines espèces animales) en des lieux plus hostiles mais qui avaient la particularité d’être peu « exposés » à des dangers potentiels (essentiellement d’autres êtres humains chez les Hommes et l’absence ou la rareté des prédateurs chez les animaux).

 

Ainsi s’est (peut-être) réalisée l’implantation humaine sur Terre. Pendant longtemps (très longtemps), à côté des communautés nomades et semi nomades (contraintes, au gré des saisons et des aléas climatiques, de « suivre » leurs troupeaux en quête de ressources végétales), vivaient les Hommes sédentaires qui devaient probablement peu ou rarement quitter « leurs terres », contraints de rester « sur place » au vu des modes de déplacement peu adaptés aux voyages au long cours et/ou jugeant inutile de se déplacer au regard des ressources, des richesses et/ou des possibilités environnantes...

 

Mais lorsque la contrée natale n’était plus en mesure d’assurer la survie et/ou de répondre à leur rêve de paix et de prospérité, les Hommes se sont (toujours) vus contraints (souvent la mort dans l’âme) de reprendre leur bâton et leur balluchon pour aller chercher en d'autres terres « une vie meilleure » et trouver un « eldorado » en imaginant « qu’ailleurs » ferait toujours mieux l’affaire qu’ici…

 

Au cours de l’histoire, les Hommes ont donc toujours plus ou moins voyagé (de façon individuelle ou collective)… au gré des guerres, des conquêtes, des invasions et des famines... Notons néanmoins qu’avant le développement et la (plus ou moins grande) généralisation des modes de déplacement mécaniques, l’organisation du territoire et de l’espace terrestre était sans doute relativement stable. Les différentes zones habitées se peuplaient et se dépeuplaient au fil des guerres, des naissances et des décès (et des rares départs et arrivées). Et l’identité communautaire devait être, très certainement, chevillée au corps… « l’Etranger » habitait alors à la « porte d’à-côté » (à ce propos, il est frappant de constater que les revendications identitaires et territoriales ont à ce jour à peine évolué…).

 

Aussi, pendant des millénaires (et jusqu’à une époque pas si lointaine), la surface de la Terre se divisait entre les terras incognitas et les zones peuplées et connues. Ainsi, au cours de l’histoire, plusieurs grandes civilisations à travers le monde ont (sans doute) ignoré l’existence des autres sociétés hormis éventuellement à travers leurs conquêtes et les guerres qu’ont livrées certaines sans oublier (dans une moindre mesure) les récits plus ou moins crédibles et entachés d’imaginaire de quelques voyageurs téméraires (et plus ou moins solitaires...)…

 

Avec l’avènement des transports maritimes (au long cours) puis, plus tard, du chemin de fer, la donne changea. Et le monde put progressivement être exploré et découvert... Et l’on assista, outre au développement des grandes routes commerciales maritimes et terrestres, à quelques grandes vagues migratoires à travers le monde, populations d’aventuriers et/ou d’individus décidés à « tenter leur chance » ailleurs qui s’implantèrent un peu partout, livrant très souvent bataille aux autochtones (en les exterminant, en les réduisant à « quantité négligeable et asservie » et en s’accaparant « leurs » terres, « leurs » richesses, le pouvoir, l’administration et l’organisation du territoire)… les exemples font florès sur tous les coins du globe…

 

On assista également à plusieurs vagues de migration sur les territoires nationaux, les villes grossirent et se multiplièrent car les activités (et donc la promesse d’une vie meilleure) y étaient concentrées. Les grands exodes ruraux offrirent ainsi aux villes des milliers et des millions de bras. L’industrie en bénéficia avec largesse… Les capitales nationales virent exploser le nombre de leurs habitants, les quartiers urbains s’organisèrent (regroupements des individus en fonction de leur rang social et/ou de leur origine géographique), les lieux au ban des villes (les banlieues) se développèrent… etc etc. Et dans les pays dit « développés » (économiquement parlant), les campagnes progressivement se désertifièrent…

 

Avec le développement des transports internationaux (routes, bateaux, trains, avions), les mouvements migratoires et commerciaux se sont mondialisés. Les habitants des colonies ont été « invités » à participer aux guerres (qui n’étaient pas les « leur »…) et (après avoir vu pillées leurs richesses) à venir chez leurs « bienfaiteurs » pour servir de bras et de main d’œuvre malléable (avec la promesse très souvent mensongère et rarement tenue) d’une vie meilleure… posant, selon les époques et l’origine géographique et ethnique des migrants, quantité de problèmes d’intégration*, d’ostracisme, de racisme et d’exclusion…

* Notons, en aparté, qu’il existe plusieurs « modèles d’intégration » : essentiellement « l’assimilation » (avec « obligation » d’accepter inconditionnellement les us et coutumes et les « valeurs » et normes du pays d’accueil et le « reniement », plus ou moins contraint, du pays d’origine) et « le communautarisme » qui ressemble davantage à une forme de cohabitation, plus ou moins tolérée et tolérante, entre différentes populations migratoires sur un même territoire (en général d’envergure nationale).

 

Nous ne pouvons manquer, dans cette rubrique, d'évoquer les innombrables mouvements migratoires au cours des dernières décennies et les vagues actuelles de migrants, « contraints » de fuir la misère, la guerre ou la dictature et de quitter leur « terre natale » pour essayer de trouver asile en des contrées plus hospitalières et/ou plus prospères qui tendent d’ailleurs à l’être de moins en moins (hospitalières et prospères) au regard de la récurrence des crises économiques, financières, sociales et sociétales qu’elles connaissent… et qui les poussent à réguler les migrations(1) et à repousser des « hordes de malheureux(2) » qui tentent de passer leurs frontières pour y vivre et y travailler, s’y installer provisoirement ou définitivement afin d’envoyer quelques deniers indispensables à la survie des membres de la famille et/ou de la communauté restés sur place… éléments dramatiques et problématiques auxquels sont (et seront) confrontées toutes les sociétés (à l’échelle planétaire) tant que persistera, outre la prédominance de l’intérêt personnel chez les individus et les nations, le modèle économique et sociétal dominant en vigueur aux quatre coins du globe, source d’inévitables inégalités…

(1) Seuls les migrants « intéressants » pour la société d’accueil sont accueillis…

(2) Jugés sans intérêt et sources potentielles ou effectives de problèmes et de « nuisances », terres des « droits de l’Homme » comprises…

 

Aujourd’hui, les frontières résistent et se fortifient (tant bien que mal) en dépit de la poussée désespérée et toujours plus puissante et massive des peuples affamés et assoiffés de paix et de liberté… mais cette stratégie se révélera sans doute (de plus en plus) impuissante à « endiguer » les vagues migratoires tant qu’elle ne sera pas accompagnée d’une réorganisation mondiale en matière d’échanges et de coopération entre les sociétés et les peuples…

 

Notons également que dans bon nombre de zones économiquement développées (les « pays riches »), on assiste aujourd’hui à une réorganisation progressive des territoires nationaux avec le repeuplement (relatif) des campagnes (grâce au développement — relatif lui aussi — des néo-ruraux), la généralisation des zones périurbaines (souvent des « zones dortoirs » avec la construction frénétique de lotissements plus ou moins de standing, plus ou moins low cost...) et le développement des zones rurbaines (des villes la campagne*).

* En suivant presque « à la lettre » le « bon mot » d’Alphonse Allais…

 

Notons enfin qu’au vu des problématiques actuelles (disparités économiques, inégalités en matière de niveau et de qualité de vie entre les individus et les sociétés, surpopulation urbaine et ses conséquences sur la criminalité), il ne fait aucun doute que l’organisation territoriale humaine, au niveau local comme au niveau mondial, sera appelée à l’avenir à des transformations substantielles et radicales…

 

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer la libre circulation et la liberté d’implantation (provisoire et/ou « définitive ») de tous les individus (autant que possible…).

 

Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

- le développement d’un terrorisme « identitaire » religieux (pseudo religieux)

- la mondialisation des économies et des échanges économiques et financiers

- la multipolarité du monde

- les poches de conflits armés disséminées ici et là

- les revendications d’indépendance de certaines minorités à travers le monde

- le double mouvement de régionalisation du monde et de création de grandes zones territoriales

- les flux migratoires massifs des populations vers les territoires « développés »

- le repli communautaire et (pseudo) « civilisationnel »

- le développement des « lieux de vie » et des lotissement sécurisés

- l’autonomisation de plus en plus forte des collectivités locales

 

Evolutions actuelles

- développement et tendance à la généralisation des communautés soucieuses d’assurer un « vivre entre soi » (entre individus partageant un socle commun de valeurs ou partageant des « fondamentaux idéologiques »)

- repli identito-communautaire avec l’érection de « murs de protection » autour des grands ensembles territoriaux (par exemple, aux Etats-Unis contre les migrants mexicains, en Europe contre les migrants d’Afrique et du Moyen Orient, en Israël contre les palestiniens et les pays limitrophes etc etc)

 

Evolutions possibles et directions probables

- le remaniement des frontières avec la progressive disparition des entités nationales au profit des « grands pôles territoriaux », favorisant la libre circulation des personnes et des biens en leur sein et, peut-être, un blocus et un barrage (selon la configuration que prendra le monde) destinés à refouler toutes les migrations extraterritoriales jugées importunes au niveau local comme au niveau des « grands ensembles territoriaux ».

- l’autonomisation des collectivités locales et territoriales amenées à devenir de plus en plus libres en matière de décision, d’organisation et de fonctionnement (dans le cadre fixé par le pouvoir central, lui aussi, amené à s’élargir et à devenir supranational) où les individus pourraient s’implanter selon « leurs valeurs » et/ou « leur idéologie ».

 

Evolutions à très long terme

- la généralisation de la coopération, de l’entraide et de la solidarité entre les individus, les collectivités locales et les grands groupes territoriaux dans tous les domaines de l’existence

- l’harmonisation mondiale en matière de conditions d’existence et de qualité de vie (satisfaction des besoins, droits et liberté…)

- la disparition progressive des frontières, des nations et des grands ensembles territoriaux

- un espace terrestre (voire même spatial) totalement pacifié et dégagé de toute entrave à la libre circulation des personnes et des biens avec implantation libre

 

Objectif idéal (implicite)

Eradication de toute entrave à la libre circulation des individus

 

 

Perspectives*

* Voir les perspectives de la rubrique « alimentation ».

 

Sociétés de demain

- poursuite des flux migratoires internationaux massifs malgré le « repli territorial » des « pays riches »

- accession progressive des pays dit « en voie de développement » à de meilleures conditions matérielles d’existence et à un niveau de vie « décent » qui pourraient inciter les individus à rester sur « leurs terres »

- réorganisation progressive des territoires nationaux : forte croissance urbaine, développement des zones péri urbaines et rurbaines, repeuplement des zones rurales et création d’espaces et de « lieux de vie » communautaires organisés

- trois mouvements : hyperurbanisation et mégalopoles, régénérescence et modernisation des villages et développement de nouveaux « lieux de vie » (regroupements d’habitats sécurisés et alternatifs)

 

Sociétés d’après demain

- relative stabilisation des flux migratoires internationaux (qui pourront néanmoins demeurer très massifs)

- fort développement des collectivités et communautés locales organisées et de plus en plus autonomes

- les individus s’implanteraient de plus en plus selon « leurs affinités » dans des collectivités et/ou communautés « adaptées » à leur « idéologie » (sécuritaire, solidaire, écologique, religieuse et/ou spirituelle)

- trois mouvements : hyperurbanisation et mégalopoles, régénérescence et modernisation des villages et développement de nouveaux « lieux de vie » (regroupements d’habitats sécurisés et alternatifs)

 

Sociétés à moyen terme

- la disparition progressive des frontières et l'harmonisation des conditions d’existence et de la qualité de vie à l’échelle planétaire pourraient permettre une forte diminution des flux migratoires « forcés »

- les individus pourraient être de plus en plus libres d’aller et « de vivre » où bon leur semble avec qui bon leur semble selon « leurs affinités naturelles »

- un processus progressif de désurbanisation de l’habitat. Développement, généralisation et modernisation des zones périurbaines, des villages et des nouveaux « lieux de vie » communautaires et multiplication des communautés à taille humaine sur l’ensemble du territoire terrestre

- l’éradication progressive de l’habitat urbain stricto sensu. Et généralisation des « lieux de vie » à taille humaine

- totale généralisation des « lieux de vie » à taille humaine. Et émergence d’un déclin progressif des zones d’habitat strictement sédentaire

 

Sociétés à long terme

- la planète et le territoire spatial pourraient devenir progressivement un gigantesque espace commun de paix, d’entraide et d’harmonie où chaque individu serait libre de circuler et de demeurer (le temps « qu’il souhaite ») sur le territoire et l’espace de « son choix »…

- les « lieux de vie » pourraient se transformer en simples lieux de rencontre et d’échanges plus ou moins provisoires ou ponctuels. Et généralisation du processus de disparition des habitats « sédentaires »

- éradication totale de l’habitat (sédentaire), les individus pourraient simplement se retrouver provisoirement ou ponctuellement pour « partager » et « être ensemble »…

 

 

Au terme de ce long (très très long) chapitre consacré aux créations et aux réalisations humaines et avant d’entreprendre leur « synthèse chronologique » à travers les grandes périodes de l’histoire, amusons-nous (un peu idiotement(1)) à faire l’analogie suivante. Si l’on comparait la « pleine Conscience(2) » à un doctorat de 3ème cycle universitaire (Bac+7), on pourrait dire que l’Homme en matière de réalisation (créations et fabrications) serait en classe de CE1 (Bac-10), qu’il serait en matière d’organisation (organisations sociétale et collective) en classe de CE2-CM1 (Bac-8 ou 9), qu’il serait en matière de savoirs et de perception à l’école maternelle (Bac-12) et en matière de compréhension et de sensibilité à la crèche ou au jardin d’enfants (et pour certains, il ne serait pas outrageux ni exagéré de penser que leur place se trouverait davantage dans une pouponnière ou une couveuse et que d'autres en seraient encore « réduits » à l’état de spermatozoïde caché dans un repli testiculaire…). Et dans notre comparaison (totalement stupide, il faut bien le reconnaître…) l’ensemble de la scolarité — de la classe de maternelle élémentaire jusqu’au doctorat — et le passage en classe supérieure ne se comptabiliseraient pas, bien sûr, en années mais en siècles et en millénaires… Fin de la blague idiote…

(1) Après toutes ces pages, nous avons tout de même bien le droit de nous « amuser un peu »… même avec des blagues idiotes (nous avons toujours adoré les blagues idiotes…)…

(2) Voir les paragraphes consacrés au cheminement spirituel.

 

4 décembre 2017

Carnet n°64 La conscience et l'Existant - Chapitre 6 (suite)

Essai / 2015 / L'exploration de l'être

La Vie et l’Existant ne semblent, en réalité, qu’un gigantesque jeu — violent et merveilleux — et une permanente célébration… A hauteur d’Homme, peut-être pourrions-nous penser que nous nous apprenons les uns les autres (et, bien souvent, à notre insu) à mieux les regarder et à mieux les vivre. A mieux les comprendre et à mieux les aimer… mais sur le plan de la Conscience, tout ce « cirque » — aimable ou corrosif — semble (presque) sans importance… Est-ce qui est… et ce qui est n’altère jamais Le Regard…

 

Nous avons été contraints (pour des raisons d'ordre technique) de diviser la version numérique de cet ouvrage en dix parties.

Sommaire

Chapitre introductif

Chapitres 1 à 5

Chapitre 6 (début)

 

 

Les relations : les réponses aux besoins relationnels, sexuels, affectifs, communicatifs et informationnels

 

Généralités

L’Homme est un être relationnel. Le besoin relationnel s’exprime, en général, par le besoin de contact avec ses congénères (mais également avec d’autres formes : les animaux et la nature par exemple). Le caractère grégaire de l’être humain l’incite donc fortement (et principalement) à être en contact avec ses pairs. Aussi a-t-il besoin de nouer avec eux(1) des relations de nature sexuelle et affective, de communiquer avec eux(1) et de se tenir informé des évènements majeurs de la communauté (ou d’une partie de la communauté).

 

Afin de tenter d’y voir plus clair dans cette très dense et nébuleuse thématique, nous pourrions éventuellement catégoriser les relations selon le critère d’intimité(2) :

 

- les individus très intimes(3) : relations et échanges sexuels, sensoriels et affectifs avec (en général) partage du lieu de vie et activités communes (relations amoureuses et/ou « maritales » et familiales(4) – au sens strict) ;

 

- les individus intimes : relations et échanges affectifs et (éventuellement) sensoriels non sexuels (relations familiales – au sens large – et amicales très proches) ;

 

- les individus proches : relations et échanges amicaux (copains, copines) ;

 

- les individus fréquemment fréquentés : relations très régulières sinon quasi quotidiennes — relations professionnelles et entourage proche (collègues, voisinage…) ;

 

- les individus occasionnellement fréquentés (relations irrégulières, ponctuelles ou rares) : relations avec l’entourage large (voisinage, connaissances…) ;

 

- et les individus inconnus.

(1) Avec (en général) un certain nombre d’entre eux ou un très faible nombre d’entre eux…

(2) A ce titre, les salutations d’usage dans les courriers et courriels sont révélatrices de ces différentes catégories (de « gros bisous/je t’embrasse partout » à « salutations distinguées » en passant par « je t’embrasse très fort/bisous affectueux », « bien amicalement », « amicalement », « cordialement »…).

(3) Cette classification peut être remise en cause si elle n’est pas pondérée par le degré de proximité « profondément ressenti ». Ainsi, il arrive fréquemment que des individus aient des rapports sexuels et/ou entretiennent des relations sans éprouver le moindre sentiment de proximité…

(4) Selon les époques et les contrées, selon les us et coutumes sociaux et familiaux et l'âge des individus, les parents (les ascendants), les enfants (les descendants) et la fratrie appartiennent (en général) à cette catégorie (soulignons néanmoins, qu'au regard du tabou quasi universel que représente l'inceste(A), les individus dotés d'une certaine « proximité génétique(B) » sont peu enclins, ne s'autorisent pas et/ou ne sont pas autorisés à entretenir des rapports sexuels...)...

(A) Le terme « inceste » tire son origine du latin « incestum » qui signifie « souillure »...

(B) « Loi naturelle » plus ou moins consciente pour favoriser, sans doute, une certaine diversité génétique, nécessaire à la survie et au développement de l'espèce (on connaît fort bien les risques de la consanguinité...)...

 

Notons, en aparté, que la communication peut être verbale et non verbale. Et que la parole constitue (jusqu’à aujourd’hui) le mode de communication et d’échange humain principal* entre les individus (excepté entre les individus très intimes).

* La communication non verbale qualitative et silencieuse (qui permet de ressentir et de « connaître » l’intériorité de son interlocuteur sans avoir recours au langage — et (le plus souvent) accessible à partir d’un certain degré de compréhension, de perception et de sensibilité, induit (en général) par un cheminement spirituel) est extrêmement rare…

 

Nous ne pouvons passer sous silence, ici, les caractéristiques majeures des relations humaines. Bien que la plupart des Hommes (loin s’en faut !) ne les perçoive pas ainsi, tentons de les résumer en quelques mots… De façon synthétique, nous pourrions dire que les individus (en général) nouent des relations avec leurs congénères en aspirant (plus ou moins consciemment) à ce qu’ils répondent à leurs désirs et à leurs attentes (voire les comblent entièrement) et/ou en espérant qu’ils leur procurent amour et attention... Ils ne voient donc (bien souvent) en l’Autre(1) que ce qu’il représente à leurs yeux et/ou ce qu’il pourrait leur offrir… Chacun semble fonctionner ainsi(2)… Notons, entre parenthèse, que tous pensent et veulent faire croire le contraire(3)… En définitive, chacun semble n’avoir d’yeux et n’aimer(4) que ce que l’Autre lui procure et lui apporte… Ainsi sont et semblent fonctionner le psychisme et la très grande majorité des relations entre les Hommes…

(1) « L’Autre » est donc perçu (consciemment ou non) comme un moyen (voire comme un instrument) nécessaire à la satisfaction des besoins et désirs personnels...

(2) Et personne, en vérité, (sauf exception) n’est en mesure de regarder l’Autre « réellement » et moins encore de l’aimer « réellement » (pour ce qu’il est)…

(3) Ah ! Lorsque le psychisme est à l’œuvre (et à la manœuvre) ! Toujours à bercer d’illusions… et à faire prendre des vessies pour des lanternes…

(4) Pour regarder « réellement » l’Autre (tout être et toute chose aussi d’ailleurs) et l’aimer « réellement » (pleinement sans condition ni attente), il semble nécessaire de « quitter » l’espace psychique et « d’habiter » moins partiellement l’espace de Conscience (et jusqu’à aujourd’hui, et sans doute encore demain, seul un cheminement spirituel le permet et le permettra – nous aborderons cette thématique dans les paragraphes consacrés au plan spirituel).

 

Notons également que les relations de proximité (les relations avec l’environnement « habituel » et avec les individus intimes et très intimes) — et en particulier les relations amoureuses et amicales — obéissent à une sorte de processus d’usure naturel (lassitude liée au fonctionnement psychique). Rappelons que ces relations, à leur début, sont (en général) très largement constituées de représentations projectives (chaque individu projette sur l’autre ce qu’il aimerait qu’il soit…) et chacun, en général, se présente (et se montre) sous son aspect le plus appréciable (le plus aimable — aimable au sens d’être aimé…) afin d’entrer en contact, de nouer une relation et obtenir ce qu’il désire… La première étape se caractérise donc par la coïncidence (plus ou moins parfaite) entre l’image que l’Autre renvoie et les représentations mentales des individus. Coïncidence qui induit un sentiment de proximité quasi immédiat et un sentiment de bonheur... La deuxième étape se caractérise par la prise de conscience d’un décalage entre les représentations mentales et ce qu’est et renvoie l’Autre. A ce stade relationnel, il n’est alors pas rare de voir survenir de « petits arrangements(1) » et de « petites transactions(1) », chacun « calculant » et « évaluant » l’Autre et la relation(2) à l’aide d’une grille (assez floue en général) de « coûts et de bénéfices » relationnels… Lorsque les bénéfices « personnels » sont jugés insuffisants, les individus sont très souvent enclins à demander à l’Autre (de façon plus ou moins explicite ou directe) de se conformer à leurs représentations mentales. Sans grand succès en général... En matière relationnelle, l’habitude, l’attachement, la peur de la solitude et de l’inconnu font « le reste »… mais disons que tant que les bénéfices(3) personnels offerts par une relation sont supérieurs à ses désagréments(3), la relation se poursuit. Lorsque les désagréments deviennent supérieurs aux bénéfices, les individus se séparent (sauf pour les cas « pathologiques » : dépendance, « immaturité » affective etc etc).

(1) Sorte de petits contrats (mesquins, inconscients et plus ou moins tacites) qui permettent la poursuite de la relation…

(2) Cela peut paraître « horrible » mais cela semble fonctionner ainsi…

(3) Ces deux paramètres doivent être pondérés par le degré de crainte à l’égard de la solitude et/ou de l’inconnu (en matière relationnelle).

 

Notons aussi qu’en matière de relations très intimes entre les individus, dans un passé pas si lointain, et encore à l’œuvre aujourd’hui dans de nombreuses contrées, les mariages étaient (ou sont) des alliances* arrangées par les familles et/ou les clans, scellant, plus qu’un « pacte sentimental », un arrangement pécuniaire et matériel et/ou l’assurance d’un rang social…

* Soulignons, ici, que « l’alliance » que les mariés se passent au doigt révèle, à bien des égards, la nature du pacte signé : faire « alliance » pour affronter ensemble les vicissitudes de l’existence (chacun s’appuyant et « se servant » de l’Autre pour « être plus fort » et « mieux armé » en cas de « coups durs »…).

 

NOTE : ces catégories ne sont, bien évidemment, pas figées. Elles sont amenées plus ou moins régulièrement à se réorganiser. Et les individus peuvent passer d’une catégorie à l’autre selon l’évolution des relations…

 

NOTE SUPPLEMENTAIRE : chaque catégorie de relations obéit à des codes de conduite et à des règles implicites, plus ou moins tacites et assimilés par les individus (et plus ou moins variables selon les sociétés) qui régissent les comportements. Leur transgression, si elle est acceptée par l’interlocuteur, engendre souvent (et pour un temps plus ou moins long) un changement de catégorie relationnelle (plus ou moins consenti entre les individus). En revanche, si cette transgression n’est pas acceptée et/ou si elle enfreint les lois qui régissent les rapports entre les individus, ce refus engendre, en général, une exclusion de « l’individu fautif » (avec, éventuellement, des poursuites pénales et des conséquences judiciaires*…).

* En particulier, lorsque l’infraction est avérée et « reconnue » par un tribunal…

 

En matière relationnelle, le psychisme semble opérer une distinction entre les liens qui lui paraissent utiles et nécessaires, ceux qui lui semblent neutres et ceux qu’il juge inutiles ou néfastes. Il s’attache, prend soin et « utilise », en général, les premiers à des fins égotico-utilitaristes, est relativement indifférent à la deuxième catégorie (excepté lorsqu’entre(nt) en jeu un contact et/ou une émotion) et rejette ou fuit les troisièmes. Ainsi, le respect apparent des autres formes (individus, animaux, végétaux, environnement…) est principalement lié à l’utilité et aux bénéfices égotiques qu’elles procurent (consciemment et/ou inconsciemment). Plus le lien apparaît utile aux individus, plus ils le « chérissent » tout en s’assurant qu’il « procure » ce dont ils estiment avoir besoin. Le sentiment de proximité plus profond avec les autres formes – et les actions non égotiques qui en découlent – ne peuvent naître qu’avec la Conscience* (ce qui permet aux individus d'être « animés », à des degrés divers, de certaines de ses caractéristiques…).

* En matière relationnelle, plus la Conscience est « habitée » largement et profondément, plus l’Autre (quelles que soient sa nature et ses caractéristiques) est respecté « pour ce qu’il est » sans attente égotique, plus le respect devient révérencielle, la bienveillance naturelle et spontanée et le sentiment de proximité devient fort (jusqu’au sentiment d’Unité et d’Amour absolu).

 

Notons enfin que le sentiment de solitude est ressenti par à peu près tous les Hommes. Et la solitude (définie communément comme l’absence de relations avec ses congénères) est, en général, perçue comme insupportable. Elle est fuie, bannie et considérée comme une « tare », une sorte de « malédiction » (stigmatisante) ou comme le signe d’un « dysfonctionnement » ou d’une « monstruosité » personnel(le)... Aussi, la grande majorité des êtres humains préfère nouer des relations peu satisfaisantes et « entourer leur solitude » de compagnie plutôt que d’affronter un « face à face » avec eux-mêmes*… Beaucoup ne voient pas la dimension compensatoire et purement égotique des relations humaines… A ce titre, il est intéressant de noter que la solitude semble pourtant une condition très favorable à la rencontre « avec soi » (et avec l’Infini que chacun porte en soi…). Cette rencontre (fondamentale) « avec soi » inaugure souvent les premiers pas sur le chemin spirituel (nous y reviendrons dans les paragraphes consacrés au cheminement spirituel). Disons simplement, ici, que cette rencontre (plus ou moins profonde) permet aux individus de mieux comprendre ce qu’il sont et de pouvoir (par la suite) rencontrer l’Autre de façon plus ouverte, plus saine et plus libre et sans attente égotique…

* « Face à face » qu’ils redoutent et craignent par-dessus tout…

 

Terminons ce paragraphe par les conflits relationnels (qui existent partout où sont les Hommes… et aussi — ne l’oublions pas ! — partout où vivent les autres formes terrestres…). Quelle que soit la nature des relations, elles semblent ontologiquement conflictuelles(1). Et il arrive même qu’elles produisent des rancœurs, des rancunes et des désirs de vengeance plus ou moins violents qui « hantent » et « gangrènent » les esprits(2) pour des périodes plus ou moins longues…

(1) Caractéristique liée, en grande partie, au psychisme (identifié au corps) et aux représentations mentales qui prédisposent les individus à l’affrontement, chacun « défendant » son identité, ses désirs, ses attentes, ses idées, ses croyances, ses idéologies et qui conduisent presque inéluctablement à transformer toute rencontre en guerre « de position »…

(2) Comme si le psychisme cherchait une cause, un responsable et/ou un coupable (qui ne sont, bien sûr, qu’apparents), à son insatisfaction, à sa frustration et à « ses malheurs »…

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Lieux de rencontre : les lieux physiques de la communauté

Mode de communication : mode de communication non verbal et émergence progressive de la communication verbale (langage articulé)

Mode d’information : inexistant ou quasi inexistant (excepté la perception visuelle et les fonctions sensorielles)

 

Sociétés primitives

Lieux de rencontre : les lieux physiques de la communauté (et éventuellement les communautés alentour)

Mode de communication : la parole* lors des rencontres physiques

Mode d’information : les échanges entre les individus et (éventuellement) les messagers (ou « les invités » extracommunautaires…)

* Bien que la parole ne semble constituer qu’une « infime partie » de la communication (qui est principalement composée de l’intonation, du son de la voix, des « mimiques » faciales et surtout du langage corporel), elle a toujours été le « canal d’échanges » principal dans la très grande majorité des relations humaines…

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

Lieux de rencontre : les lieux physiques de la communauté (et éventuellement les communautés alentour) et les voyages

Mode de communication : la parole* lors des rencontres physiques. Et le télégraphe

Mode d’information : les échanges entre les individus, les gazettes locales, le télégraphe

* Et, accessoirement, l'écriture (échanges épistolaires...).

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

Lieux de rencontre : les lieux physiques de « la communauté » (et éventuellement « les communautés » alentour) et les voyages

Mode de communication : la parole* lors des rencontres physiques, le téléphone

Mode d’information : les échanges entre les individus, la radio, la télévision et la presse écrite

* Et, accessoirement, l'écriture (échanges épistolaires...).

 

Sociétés d’aujourd’hui

Lieux de rencontre : les lieux physiques. Et les rencontres liées aux « nouvelles technologies » (internet, réseaux sociaux, smartphones…)

Mode de communication : la parole. Et l’ensemble des possibilités liées aux « nouvelles technologies » (smartphones, textos, e-mails, dialogues vidéo…) qui permettent d’être relié à tout instant aux individus appartenant à « la sphère personnelle » et/ou jugés nécessaires ou indispensables

Mode d’information : les échanges entre les individus, la radio, la télé, la presse écrite, internet et les réseaux sociaux qui permettent de se tenir informé de tous les évènements majeurs sur l’ensemble de la planète

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées et un peu désordonné…)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu une telle évolution), nous pouvons dire que les réponses aux besoins relationnels ont globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Offre – production – structures

Le domaine des relations a connu, au fil de l’histoire, des changements considérables. Les possibilités de rencontre entre les individus qui se limitaient autrefois à la tribu, à la communauté, au village, aux bals, aux lieux publics et aux lieux de travail se sont considérablement élargies. Et aujourd’hui, les individus peuvent (à peu près) rencontrer « le monde entier »...

 

En matière de « relations aux animaux », autrefois, les rencontres se limitaient à la faune sauvage et/ou aux animaux de rente (en général, considérés comme danger ou source alimentaire). Et aujourd’hui, chacun peut rencontrer des animaux comme (à peu près) bon lui semble (animaux de compagnie, promenades dans la nature, zoos, réserves animalières…).

 

Quant « aux relations à la Nature », elles aussi ont significativement évolué. Alors qu’autrefois la « Nature » était (le plus souvent) considérée comme hostile ou ressources utiles, avec le développement des univers urbains (artificiels), elle est aujourd’hui considérée comme lieu de détente et de ressourcement (soit lieux « sauvages » mais plus généralement « coins de nature » remaniés par l’Homme avec minimisation des désagréments naturels* — les parcs par exemple).

* En la « civilisant » pour qu’elle devienne plus plaisante à l’œil, moins dangereuse, plus confortable…

 

En matière de relations humaines, nous avons assisté au développement (et à la généralisation) des possibilités de rencontres et des modes de communication : téléphone, smartphone, internet, fibre numérique (Skype : voix et image*)… avec des moyens de communication de plus en plus rapides et de plus en plus performants en matière de distance (abolition progressive de la distance) qui permettent (de plus en plus) de recréer les conditions d’une rencontre « réelle »…

* Et bientôt plus encore…

 

Les relations humaines amoureuses (et/ou sexuelles) sont aujourd’hui régulées par une forme de marché informel avec une offre et une demande de type quasi capitaliste(1). Elles échappent, en partie, à un marché capitaliste formel (quoique pas totalement avec les relations sexuelles tarifées(2), les agences matrimoniales, les sites de rencontres (sur internet) et les applications (pour smartphone) en tous genres où chacun se vend… en choisissant l’Autre sur un immense catalogue…).

(1) Si l’on est un peu réaliste et/ou cynique…

(2) Le « plus vieux métier du monde » toujours en vigueur (si j’ose dire !) sur toute la surface du globe… partout où il y a des hommes…

 

Les relations familiales, professionnelles et amicales et toutes les autres formes de relation humaine « informelle » sont censées échapper à la monétisation (sauf pour le travail* qui a, bien sûr, son marché — nous y reviendrons abondamment dans les paragraphes consacrés au travail et à l’organisation économique). Mais ces types de lien obéissent malgré tout (au vu des caractéristiques psychiques des individus) à des règles tacites d’échanges réciproques de menus services…

* Qui n'appartient plus à la sphère des relations « informelles » (depuis la complexification de l'organisation sociétale)...

 

Il semble essentiel de dire, ici, quelques mots sur l’évolution des relations « intimes » et de la famille. Dans les pays dits « développés », on a assisté, au cours des dernières décennies, à une forte croissance du nombre de divorces (et des ruptures dans les « unions libres »), à un éclatement de la cellule familiale traditionnelle et à une forte hausse des familles monoparentales. La montée de l’individualisme, l’autonomisation financière des femmes, l’évolution et une certaine forme de « libéralisation » des mœurs ont progressivement offert aux couples la possibilité de se séparer plus facilement… Et beaucoup ont franchi le pas reléguant aux oubliettes les temps « du patriarche » et « de bon papa » où « les traditions communautaires » et les pressions sociales et familiales constituaient des freins majeurs à la rupture des « liens conjugaux »…

 

Notons également que les délits et crimes sexuels, qui ont toujours plus ou moins existé*, demeurent très nombreux, que l’homosexualité était, il y a peu encore, et est toujours considérée, dans certaines parties du monde, comme une déviance ou une perversion sexuelle mais également comme un délit (ou un crime) et que le droit – en la matière – s’est progressivement élargi (avec le développement des droits de l’Homme) et a constitué l’un des instruments majeurs de la judiciarisation et de la pénalisation de certains comportement sexuels jusque-là ignorés ou occultés (comme la pédophilie par exemple)…

* Signe révélateur de la forte « dimension animale » à l’œuvre chez les Hommes où le mâle en rut satisfait ses instincts sexuels sur la femelle (consentante ou non) qui « passe » à proximité…

 

Nous ne pouvons également passer sous silence les relations qu’ont toujours plus ou moins entretenues les populations à l’égard des minorités. De tous temps, et quelle que soit leur nature (géographique, communautaire, ethnique, religieuse, sexuelle…), les minorités ont toujours (sauf exceptions) fait l’objet de brimades et/ou de persécutions et subi le rejet, l’exclusion, la stigmatisation, la domination et la violence (et parfois même l’extermination) de la majorité avec l’aval et l’appui (très souvent) des autorités, des lois et du système judiciaire*… les exemples en la matière sont légions... rappelons simplement (comme nous le disions plus haut) que l’homosexualité, considérée toujours aujourd’hui, dans de nombreuses contrées du monde, comme une infraction, et qui l’était encore dans les pays dit « développés » jusqu’à une date pas si lointaine, a toujours (plus ou moins) fait les frais d’exactions, de rejets et d’ostracisme…

* Sans compter, bien sûr, les minorités dominantes qui infligeaient (et continuent parfois d’infliger) à la majorité soumise leur hégémonie et lui imposaient (ou lui imposent toujours) leur diktat (systèmes esclavagistes, lois de ségrégation raciale, systèmes d’apartheid et autres nobles réjouissances…). Systèmes qui en disent long (eux aussi) sur la nature relationnelle des Hommes…

 

Aujourd’hui, les « relations aux animaux domestiques » n’échappent pas au marché de type capitaliste. On y trouve une offre privée (éleveurs et animaleries principalement(1)). Notons également que l’animal est toujours considéré à la fois dans les mœurs et en matière juridique comme une « chose » (un meuble(2)) sur lequel l’Homme a toute autorité et tout pouvoir (y compris celui de lui donner la mort)… Quant aux autres animaux (animaux d’élevage), inutile de faire un dessin… on sait à quoi ils sont destinés (et on connaît leurs effroyables conditions d’existence…). Quant à la faune sauvage, elle peut se laisser approcher dans la nature (en promenade près de chez soi ou en voyage dans des zones « sauvages ») ou on peut la trouver dans des zoos et des réserves naturelles (payantes).

(1) Sans compter les nombreux trafics d’animaux domestiques (mais également d’animaux sauvages – avec, entre autres, les « Nouveaux » Animaux de Compagnie) et les trafics de produits tels que l’ivoire, les défenses d’éléphants, les cornes de rhinocéros, les nids d’hirondelles, les ailerons de requins, la viande de baleine… et on en passe…

(2) Malgré de très timides percées, dans certaines régions du monde, pour lui attribuer le statut d’« être sensible »…

 

Un mot (enfin) sur les « relations aux végétaux ». Nous ne parlerons pas, ici, des fruits et légumes* mais des « relations à la Nature » (non consommable) : elles se manifestent soit à travers l’entretien (et la possession) de plantes d’agrément qui ornent le foyer (à l’intérieur et/ou à l’extérieur), soit en promenade autour de chez soi (parcs, bois, forêts ou à la campagne), soit en espace protégé (parfois gratuit parfois payant).

* On connaît leur sort (même si cela peut prêter à rire ou à sourire…)...

 

Quelques mots (pour finir) sur la communication et l’information (au sens large et au sens strict). Depuis que l’Homme est Homme, la communication a toujours, plus ou moins, été instrumentalisante et destinée à montrer la part « la plus reluisante » de l’individu, du groupe, de la structure, de l’institution ou de la cause que cette communication était censée exposer ou défendre… En la matière, tout n’est et n’a toujours été que « propagande et défense de l’image »... Partout et de tout temps… au niveau individuel (le plus intime) comme à l’échelle collective (mondiale et planétaire).

 

Dans cette perspective, il est donc peu étonnant que les informations livrées (par divers canaux) à la population ont toujours été plus ou moins dictées et contrôlées par le pouvoir en place (déformation, rétention, censure, storytelling …) et utilisées à des fins de propagande et d’instrumentalisation des masses(1). En matière d’information, la liberté de la presse(2) (considérée comme le quatrième pouvoir dans les sociétés démocratiques) est un gage (fragile) de transparence (et de vérité) malgré les collusions (et autres copinages) — possibles et existants — avec le pouvoir politique (et économique). A ce titre, notons que la généralisation d’internet et l’avènement des « nouvelles technologies » ont permis aux individus de participer à cette liberté d’expression, de pouvoir livrer des informations, de dénoncer et d’alerter « le monde entier » des dérives et des excès, des malversations, des opacités et des instrumentalisations dont ils étaient victimes et/ou les témoins en les diffusant sur le net et sur les divers réseaux sociaux (comme le font, par exemple, aujourd’hui ceux que l’on appelle « les lanceurs d’alerte »…), obligeant tous et chacun (individus, entreprises, Etats, institutions, associations, groupes et structures) à la transparence(3)… et à l’exactitude des informations qu’ils délivrent…

(1) Précisons, ici, que nous n’adhérons à aucune mouvance qui clame à qui veut l’entendre (haut et fort en général) que le monde serait aux mains de quelques individus et que les évènements majeurs seraient l’œuvre de minorités complotistes…

(2) Presses écrite, radiophonique et télévisée…

(3) Pour le meilleur et pour le pire…

 

Demande – consommation – individus

Autrefois, les individus étaient relativement tributaires des modes de déplacement et de communication, peu propices aux rencontres avec « l’extérieur » et qui les « confinaient » à des rencontres sur les lieux physiques qu’ils fréquentaient. Au fil des progrès, les déplacements et les modes de communication ont permis d’élargir, assez substantiellement, le périmètre des rencontres. Aujourd’hui, les individus peuvent être connectés à leur guise avec le plus de monde possible (avec opportunité de choix selon leurs besoins « relationnels »…). Mais ils demeurent toujours très tributaires de leurs capacités expressives — essentiellement langagières –, de leur compréhension et de leur perception relativement grossières et élémentaires (nous y reviendrons dans les paragraphes consacrés au plan spirituel)…

 

Les relations amoureuses se sont globalement éloignées de la dimension religieuse et affranchies de l’approbation familiale et/ou clanique. Et elles se sont globalement libéralisées (union libre, mariage homosexuel…).

 

Quant aux relations aux autres formes (animaux de compagnie et espaces naturels), elles connaissent (selon le degré de développement économique du pays) une certaine forme d’engouement, en particulier chez les citadins qui vivent (comme nous l’avons déjà évoqué) dans un univers humain de plus en plus artificiel (composé de béton, d’immeubles, de rues, de magasins, de bureaux et de supermarchés…).

 

Toutes ces informations générales (livrées un peu à la façon d’un « inventaire à la Prévert ») ne doivent, bien évidemment, pas nous faire oublier les effroyables inégalités en matière de relations qui sévissent (et ont toujours plus ou moins sévi) dans le monde où une partie de la population bénéficie, grâce à un encadrement législatif (dans les sociétés de droit), d’une certaine liberté et d’une certaine forme de tranquillité et d’apaisement (somme toute relatifs) en matière relationnelle et une autre partie (en particulier les minorités et les femmes) est toujours soumise à la dangerosité et à la peur du « rapport à l’Autre » mais également à la domination de la majorité, à l’ancestral machisme, à la phallocratie ou au patriarcat et à des traditions et mœurs éculées sans autre choix que de subir le diktat de la communauté (et de ses mâles...).

 

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer la satisfaction des besoins et des désirs en matière sexuelle, affective, relationnelle, communicationnelle et informationnelle de façon sécurisée et permanente et de façon aussi rapide, simple, confortable et intelligente que possible (selon les capacités et possibilités offertes par les savoirs et la technique) et assurer l’amélioration des réponses (leur fabrication, leur accès et leur utilisation) en matière de rapidité, de simplicité, de durabilité, de sécurité, de confort et de possibilités nouvelles*… (avec amélioration continue de l’amélioration – cycle infini…).

* Ainsi qu’en matière de satisfaction, de plaisir, de bonheur, de joie et de beauté qu’elles peuvent offrir…

 

Eléments pour une analyse « théorique* » plus fine et plus profonde

- l’Homme est une forme énergétique vivante complexe perceptive complexe préconsciente

- les contenus communicatifs et informationnels sont des formes énergétiques immatérielles « synthétiques » idéatives et représentatives (avec support expressif et/ou communicationnel) qui peuvent induire des formes énergétiques immatérielles « synthétiques » émotionnelles

* Voir les éléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde de la rubrique « alimentation ».

 

Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

- l'amélioration substantielle des capacités de déplacement et de mobilité

- la généralisation et l’expansion des univers urbains (mégalopoles géantes)

- le développement des « nouvelles technologies »

- l’accroissement du besoin de sécurité ressenti par une grande majorité des individus

- les évolutions en matière de mode de vie et de « mode relationnel » (entre autres via la « sphère numérique » et « virtuelle »)

- un « vivre ensemble » de plus en plus « explosif »

- une tendance au repli sur soi

- l’efflorescence des lois qui « encadrent » le rapport à l’Autre

 

Evolutions actuelles

- généralisation et développement des possibilités de rencontre pour tous les types de relation entre les individus (amicale, amoureuse, sexuelle, par centre d’intérêt, professionnelle…) mais également avec les autres formes (essentiellement avec les animaux et la nature)

- généralisation et développement des possibilités de communication instantanée et en réseaux (accessibles à tous et à tout instant – e-mail, SMS, MMS, Skype et « consorts », Twitter, Facebook, applications sur smartphone…)

- multiplication et généralisation des modes de communication qui donnent « l’impression » et la sensation d’un contact direct et « réel » (avec tous les sens)

 

Evolutions possibles et directions probables

- généralisation des modes de communication ultra rapides

- être relié en permanence (ou à sa guise…)

- modes de communication qui permettent une proximité (qualitative) de plus en plus grande (lorsque la perception et la compréhension se seront développées et le permettront*…)

* Voir les paragraphes consacrés au cheminement spirituel.

 

Evolutions à très long terme

- à terme, pouvoir rencontrer tout (et tous), à tout instant, en tous lieux et de façon immédiate

- augmentation du degré de proximité (et d’intimité) avec tous les êtres et l’ensemble de l'Existant (tous les plans) – sentiment de communion et d’Unité permanent (avec, peut-être, chimie de synthèse et mondes virtuels…)

- être relié à l’ensemble de l’Existant de façon immédiate et permanente dans tous les domaines

- être en communion avec Tout

 

Objectif idéal (implicite)

Eradication des besoins relationnels par leur généralisation (avec un obstacle majeur : tant qu’il existera une forme, des liens singuliers subsisteront — soulevant « le problème » du passage d’un monde fini à un monde infini). Quant à la sensibilité (notons néanmoins que l'on pourra simuler les émotions), il est nécessaire qu’elle soit « réellement » ressentie (une sensibilité d’Être) pour éprouver un sentiment de proximité et d’Unité et un Amour inconditionnel… si l’on n’y parvient pas, les individus (les êtres humains et leurs descendants, les trans-humains et/ou les post-humains) seront peut-être condamnés à vivre les émotions par « procuration » à partir du cerveau organique (« paramétré », entre autres, à cette fin...).

 

 

Perspectives*

* Voir les perspectives de la rubrique « alimentation ».

 

Sociétés de demain

Lieux de rencontre : les lieux physiques. Et les rencontres liées aux « nouvelles technologies » (développement des possibilités de rencontre de tous types — professionnel, amical, amoureux, sexuel — instantanée et en réseaux)

Mode de communication : la parole. Et l’émergence de modes de communication qui donnent « la sensation » d’un contact direct et « réel » (avec tous les sens) et qui permettent d’être relié, à tout instant, avec un toujours plus grand nombre d’individus « réels » ou virtuels

Mode d’information : connexion quasi simultanée et quasi permanente à toutes les infos planétaires

 

Sociétés d’après demain

Lieux de rencontre : les lieux physiques et les rencontres liées aux « nouvelles technologies » (généralisation des possibilités de rencontre de tous types et développement des rencontres dans des univers virtuels avec des individus, des animaux dans des lieux et univers entièrement créés selon les désirs du psychisme…)

Mode de communication : la parole et le développement des modes de communication qui donnent la sensation d’un contact direct et « réel » (avec tous les sens) et qui permettent d’être relié, à tout instant, avec un toujours plus grand nombre d’individus « réels » ou virtuels. Et l’émergence d’un kit communicatif

Mode d’information : connexion simultanée et permanente à toutes les infos planétaires. Et l’émergence d’un kit informatif

 

Sociétés à moyen terme

Lieux de rencontre :

- développement des rencontres physiques en tous lieux de la planète et émergence des lieux de rencontre dans l’espace. Généralisation des rencontres dans des univers virtuels avec des individus, des animaux dans des lieux et univers entièrement créés selon les désirs du psychisme.

- généralisation des rencontres physiques en tous lieux de la planète et développement des lieux de rencontre dans l’espace. Et accroissement et forte amélioration des rencontres dans des univers virtuels avec « tout ce que l’on désire » et dans des lieux et univers entièrement créés selon les aspirations du psychisme

Mode de communication :

- la parole. Généralisation des nouveaux modes de communication. Emergence de modes de communication sans parole éminemment plus qualitatifs (ressentir et percevoir l’Autre, ses émotions, son « intériorité »…). Et amélioration et développement du kit communicatif.

- la parole. Amélioration quantitative et qualitative des nouveaux modes de communication. Développement et amélioration des modes de communication sans parole qualitatifs avec de plus en plus de formes (individus, animaux, formes virtuelles). Emergence d’une sorte de télépathie avec un nombre restreint d’individus. Généralisation du kit communicatif. Et développement d’un kit communicatif intégrable et immatériel

Mode d’information :

- connexion simultanée et permanente à toutes les infos planétaires. Emergence d’une perception qualitative dans un périmètre restreint (qui permet de ressentir l’intériorité des individus). Et amélioration et développement du kit informatif.

- connexion simultanée et permanente à toutes les infos planétaires. Développement et amélioration d’une perception qualitative dans un périmètre plus large (qui permet de ressentir l’intériorité des individus et d’autres formes – animales par exemple). Et développement d’un kit informatif intégrable et immatériel

 

Sociétés à long terme

Lieux de rencontre :

- développement puis généralisation des rencontres physiques en tous lieux et en tous univers « réels » et virtuels

- toutes les rencontres pourraient devenir possibles et immédiates avec toutes les formes existantes ou créées, en tous lieux, en tous espaces-temps, dans tous les univers existants ou créés

Mode de communication :

- poursuite de l’amélioration quantitative et qualitative des nouveaux modes de communication. Généralisation et poursuite de l’amélioration des modes de communication sans parole qualitatifs avec de plus en plus de formes (individus, animaux, formes virtuelles). Développement d’une sorte de télépathie avec un nombre important d’individus. Et développement et amélioration du kit communicatif intégrable et immatériel

- généralisation de la télépathie avec un sentiment de proximité avec toutes les formes. Et généralisation du kit communicatif intégrable et immatériel

- être relié en permanence avec toutes les formes de l’Existant, de façon éminemment qualitative, avec un sentiment d’Unité

Mode d’information :

- connexion simultanée et permanente à toutes les infos planétaires. Développement et amélioration d’une perception qualitative dans un périmètre de plus en plus large (qui permet de ressentir avec toujours plus de finesse et de profondeur l’intériorité des individus et d’autres formes animales et végétales par exemple). Et développement et amélioration du kit informatif intégrable et immatériel

- connexion simultanée et permanente à toutes les infos planétaires. Généralisation d’une perception qualitative dans un périmètre très étendu (qui permet de ressentir, avec une grande finesse et une grande profondeur, l’intériorité de toutes les formes (animales, végétales, minérales, « invisibles », extra-terrestres). Et généralisation du kit informatif intégrable et immatériel

- connexion directe et totale (fine et profonde) à toutes les formes de l’Existant

 

 

La protection psychique : les réponses aux besoins de protection et de défense psychiques

 

Généralités

L’Homme s’est (incontestablement) identifié au corps (au « corps-cerveau »)… Et au vu des caractéristiques psychiques (que nous avons largement abordées), la peur, la frustration, le sentiment d’insécurité et la souffrance sont des éléments majeurs et centraux chez les êtres humains. Ils éprouvent donc le besoin de se prémunir et de se protéger de la souffrance et des dangers potentiels, réels et/ou ressentis qui génèrent un sentiment d’insécurité.

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Lutte contre l’insécurité physique et matérielle : voir la rubrique « défense et protection des personnes et des biens »

Lutte contre l’insécurité psychique : inexistant ou quasi inexistant

Lutte contre la souffrance et le mal-être : inexistant ou quasi inexistant

 

Sociétés primitives

Lutte contre l’insécurité physique et matérielle : voir la rubrique « défense et protection des personnes et des biens »

Lutte contre l’insécurité psychique : règlement communautaire. Et « réunions » organisées entre les individus pour faire part « des griefs et des doléances » et rétablir (autant que possible) des liens pacifiques et harmonieux (conseil des « sages », conseil communautaire…)

Lutte contre la souffrance et le mal-être : alcool, substances psychotropes, soutiens familial, amical et/ou communautaire. Et éventuellement « visite(s) » chez le guérisseur et/ou le guide spirituel (sorcier — chamane ou autres)

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

Lutte contre l’insécurité physique et matérielle : voir la rubrique « défense et protection des personnes et des biens

Lutte contre l’insécurité psychique : développement et généralisation des lois, des règlements et « des sanctions » en cas d’infraction (exclusion, relégation, bagne, prison, peine de mort…). Développement des forces de l’ordre « publiques » et des « milices privées »

Lutte contre la souffrance et le mal-être : alcool, substances psychotropes, soutiens familial, amical et/ou communautaire. Et éventuellement « visite(s) » chez le guérisseur et/ou le guide religieux

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

Lutte contre l’insécurité physique et matérielle : voir la rubrique « défense et protection des personnes et des biens »

Lutte contre l’insécurité psychique : fort développement et totale généralisation des lois, des règlements et de l’arsenal pénal en cas d’infraction (prison, exécution, peine de mort…) et des forces de l’ordre publiques et des « milices privées »

Lutte contre la souffrance et le mal-être : alcool, substances psychotropes, soutiens familial, amical et/ou communautaire. Eventuellement « visite(s) » chez le guérisseur et/ou le guide religieux. Développement de la médication allopathique chimique (antidépresseurs, anxiolytiques…). Et développement de la psychiatrie et des psychothérapies

 

Sociétés d’aujourd’hui

Lutte contre l’insécurité physique et matérielle : voir la rubrique « défense et protection des personnes et des biens »

Lutte contre l’insécurité psychique : forte augmentation des lois et règlements, des forces de l’ordre et du nombre de sanctions de l’arsenal pénal en cas d’infraction (avec lente et progressive éradication de la peine de mort). Et fort développement des vigiles, des gardes, des agents de sécurité, des milices privées et des organismes de surveillance

Lutte contre la souffrance et le mal-être : Alcool, substances psychotropes. Généralisation de la médication allopathique chimique (antidépresseurs, anxiolytiques). Généralisation de la psychiatrie, des psychothérapies, des groupes de paroles et des activités de « développement personnel »

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu un tel développement), nous pouvons dire que les réponses aux besoins de protection psychique ont globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Offre – production – structures

Le domaine de la protection psychique a connu, au fil de l’histoire, des changements considérables. Autrefois, les réponses étaient principalement d’ordre individuel (alcool, résignation, éventuel « travail sur soi ») et/ou communautaire (soutiens familial et amical).

 

Ce domaine est progressivement et globalement passé de la sphère privée à la sphère publique. Et sur le plan collectif, cette fonction est aujourd’hui (le plus souvent) une prérogative de l’Etat, censé assurer aux individus un sentiment de sécurité (sécurité des biens et des personnes — intégrité du corps et de l’esprit) et chargé de veiller à un « vivre ensemble » le moins disharmonieux et violent possible.

 

Sur le plan de la souffrance psychique, l’Etat a pris (en général) des mesures de santé publique et développé un système psychiatrique qui a fortement évolué au cours de l’histoire (asiles, hôpitaux psychiatriques, psychiatrie ambulatoire…). Le traitement et la prise en charge des patients atteints de troubles psychiques — psychiatriques ou psychologiques — (en dépit de nombreux archaïsmes) se sont globalement améliorés. Aujourd’hui, la tendance est à la généralisation de la prise en charge des individus en proie à la souffrance et/ou souffrant de troubles psychiques. Les traitements allopathiques (antipsychotiques, antidépresseurs, anxiolytiques…) et les psychothérapies se sont également quasi généralisés.

 

Et le domaine de la protection psychique est généralement, aujourd’hui, un secteur mixte (public et privé) fortement régulé par l’Etat, où psychiatres et psychologues peuvent être consultés à l’hôpital ou en cabinet libéral privé.

 

Demande – consommation – individus

Autrefois, les Hommes étaient relativement impuissants face à la souffrance et aux « agressions psychiques ». Au fil de l’histoire, la prise en charge par l’Etat s’est accrue (avec les lois sur la sécurité qui encadrent les rapports humains et le développement de la psychiatrie), et les individus ont pu alors progressivement bénéficier « d’une aide et d’un soutien extérieurs organisés » en dépit (comme nous le disions précédemment) de la persistance de certains archaïsmes...

 

La souffrance demeure néanmoins un élément central dans la vie psychique et fait partie intégrante de la vie humaine. La « dureté » des rapports humains, les difficultés liées à l’existence et à la condition humaine, le fonctionnement parfois âpre, violent et sans pitié de la société, le stress de « la vie moderne » (avec, entre autres réjouissances, le culte de l’efficacité, de la performance, du (faux) dépassement de soi, la tyrannie de « la normalité », de la beauté etc etc) impliquent nécessairement une souffrance à des degrés divers. Au-delà des troubles psychiatriques pathologiques, les nombreux cas de dépression, de burn out, de mal-être, d’addiction, de consommation d’alcool et de drogues sont les signes tangibles des difficultés ressenties par tous les Hommes*.

* Et face à la souffrance (comme face à toute chose), chacun, aujourd’hui comme hier, demain comme avant-hier, bien sûr, « fait », « faisait » et « fera » ce qu’il peut... et comme il peut (désolé pour cet « horrible » poncif !)…

 

Une très large part de cette souffrance semble pourtant inconsciente ou faire l’objet d’un déni (ou d’une dénégation). Ainsi, peu d’Hommes voient dans leur recherche effrénée de plaisir (en tous genres : sexuel, distractif, alimentaire, festif…) une dimension compensatoire et un moyen d’échapper ou de recouvrir une certaine forme de « misère » existentielle et/ou métaphysique…

 

Parallèlement aux prises en charge psychiatriques et psychologiques et aux activités « compensatoires », notons que les individus tentent parfois de « régler » ou de fuir leur mal-être par divers procédés (en particulier, par le « développement personnel » et la religion…).

 

Notons enfin que la souffrance et l’insatisfaction existentielle demeurent, à bien des égards, des éléments prépondérants qui invitent, tôt ou tard, à s’interroger (de façon plus ou moins profonde) et constituent des moteurs puissants qui amorcent (souvent) une démarche spirituelle (seule issue « véritable », semble-t-il, aux affres psychiques de la condition humaine…)

 

Toutes ces informations générales ne doivent, bien évidemment, pas nous faire oublier les inégalités en matière de santé psychique et de souffrance qui sévissent (et ont toujours plus ou moins sévi) dans le monde où une partie de la population a accès à la psychiatrie, aux psychothérapies et aux traitements allopathiques (avec les excès et les écueils que l’on connaît…) et une autre partie se trouve bien « seule et fort démunie » face à la souffrance et aux pathologies psychiques et/ou n’a d’autre choix qu’un enfermement débilitant et inhumain.

 

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer la satisfaction des besoins et des désirs en matière de défense et de protection psychiques de façon sécurisée et permanente et de façon aussi rapide, simple, confortable et intelligente que possible (selon les capacités et possibilités offertes par les savoirs et la technique) et assurer l’amélioration des réponses (leur fabrication, leur accès et leur utilisation) en matière de rapidité, de simplicité, de durabilité, de sécurité, de confort et de possibilités nouvelles*… (avec amélioration continue de l’amélioration – cycle infini…).

* Ainsi qu’en matière de satisfaction, de plaisir, de bonheur, de joie et de beauté qu’elles peuvent offrir…

 

Eléments pour une analyse « théorique* » plus fine et plus profonde

- l’Homme est une forme énergétique vivante complexe perceptive complexe préconsciente

- les contenus psychiques sont des formes énergétiques immatérielles « synthétiques » idéatives et représentatives (avec support expressif et/ou communicationnel) et/ou des formes énergétiques immatérielles « synthétiques » émotionnelles.

* Voir les éléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde de la rubrique « alimentation ».

 

Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

- le « vivre ensemble » harmonieux

- la violence et les comportements délétères des individus

- le « musellement » des désirs et pulsions par les lois, les règlements, les règles et l’organisation sociétales

- les questions éthiques

- la question de la liberté (individuelle) : « tous protégés, tous surveillés »

 

Evolutions actuelles

Lutte contre l’insécurité physique et matérielle :

- surveillance collective des individus – systèmes de vidéosurveillance généralisés

- l’aspiration des individus à se prémunir contre tous les risques (catastrophes naturelles, agressions physiques et psychiques « ego-identitaires ») – généralisation des assurances

- développement des lieux privés et publics clos (quasi « hermétiques ») et/ou ultra-surveillés

Lutte contre l’insécurité psychique :

- surveillance collective des individus pour accroître le sentiment de sécurité dans tous les domaines (dans les rapports physiques, les échanges sur internet et sur les smartphones…)

- développement et généralisation des lois et des règlements

- accroissement des forces de police (voire des milices privées et autres organismes de surveillance) pour assurer le sentiment collectif de sécurité psychique

Lutte contre la souffrance et le mal-être :

- psychiatrie (dysfonctionnements psychiques) et psychothérapie (« réparations » psychiques)

- augmentation des produits chimiques de synthèse consommés de plus en plus à « la moindre insatisfaction »

 

Evolutions possibles et directions probables

Lutte contre l’insécurité physique et matérielle :

- généralisation des systèmes de protection de plus en plus intelligents, gadgétisés et miniaturisés, capables de neutraliser toutes les tentatives de vol et d’agression sans tuer les individus (mais en les paralysant pour les « remettre » aux autorités et aux forces de l’ordre)

Lutte contre l’insécurité psychique :

- généralisation et développement de la surveillance collective et individuelle et du contrôle dans tous les domaines — dans les rapports physiques, dans les échanges sur internet, sur les portables et dans les « nouveaux modes » relationnels et de communication (société transparente et hyper-policière)

Lutte contre la souffrance et le mal-être :

- développement des « béquilles chimiques » pour maintenir un degré de satisfaction (de plus en plus élevé) avec appareillages miniaturisés intégrés au cerveau

 

Evolutions à très long terme

Lutte contre l’insécurité physique et matérielle et lutte contre l’insécurité psychique :

- transformation (possible) de l’individu par la chimie (et la génétique) pour réguler ses désirs et ses comportements afin de permettre des rapports et des échanges non violents et non délétères

Lutte contre la souffrance et le mal-être :

- intégration de capsules chimiques (micro capsules) dans le cerveau, au cours de l’existence ou dès la naissance, avec néanmoins la limite, sans doute, infranchissable de l’ennui (sauf si la chimie parvient à bloquer ce sentiment…) pour vivre dans un sentiment de confort et de satisfaction permanent avec libération immédiate de substances pour réguler la satisfaction et la pérenniser (transhumanisme chimique)

- transformation et création d’un « psychisme » (ou du moins d'un cerveau) « sans sensibilité » ou sans les désagréments de la sensibilité

 

Objectif idéal (implicite)

Eradication de la souffrance et du besoin de protection. Thématique qui soulève plusieurs problématiques : les comportements délétères des individus (à l’origine des relations conflictuelles), l’identification du psychisme au corps, les désirs narcissiques, la douleur et les dangers liés aux caractéristiques de « l’organique » et de la matière, « l’élargissement » du psychisme à l’espace de Conscience, la transformation de « l’organique » en synthétique — voire en formes immatérielles... Notons que tant que subsistera une identification à la forme (qu’elle soit matérielle ou immatérielle) persistera un potentiel de souffrance…

 

 

Perspectives*

* Voir les perspectives de la rubrique « alimentation ».

 

Sociétés de demain

Lutte contre l’insécurité psychique :

Accroissement du nombre de lois, de règlements, de polices d’assurance, de contrats formels et d’assignements en justice dans tous les domaines. Augmentation de la surveillance individuelle et collective, des forces de l’ordre, des milices privées et des organismes de surveillance. Et augmentation des remparts et des systèmes de protection contre tous les types d’agression personnelle

Lutte contre la souffrance et le mal-être :

Alcool, substances psychotropes. Accroissement de la médication allopathique chimique (antidépresseurs, anxiolytiques…) avec le développement d’une médication de confort (pour maintenir un degré de satisfaction minimal). Emergence de systèmes synthético-chimiques de neutralisation de la souffrance (transhumanisme cérébral synthético-chimique) et émergence d’un kit de protection psychique. Psychothérapies et groupes de paroles, activités de « développement personnel ». Et (lente) émergence d’un « travail » spirituel

 

Sociétés d’après demain

Lutte contre l’insécurité psychique :

Poursuite de l’accroissement du nombre de lois, de règlements, de polices d’assurance, de contrats formels et d’assignements en justice dans tous les domaines. Généralisation de la surveillance individuelle et collective, des forces de l’ordre, des milices privées et des organismes de surveillance. Augmentation des remparts et des systèmes de protection contre tous les types d’agression personnelle (systèmes de protection et de réparation dans toutes les sphères relationnelles)

Lutte contre la souffrance et le mal-être :

Alcool, substances psychotropes. Généralisation de la médication allopathique chimique (antidépresseurs, anxiolytiques…) et généralisation de la médication de confort (pour maintenir un degré de satisfaction minimal). Développement des appareillages synthético-chimiques et émergence d’appareillages chimico-immatériels intégrés au cerveau (transhumanisme cérébral chimico-immatériel). Amélioration et développement du kit de protection psychique. Psychothérapies et groupes de paroles « sophistiqués », activités de « développement personnel ». Et développement (progressif) du « travail » spirituel

 

Sociétés à moyen terme

Lutte contre l’insécurité psychique :

- diminution progressive du nombre de lois, de règlements, de polices d’assurance, de contrats formels et des assignements en justice dans tous les domaines. Et diminution progressive de la surveillance individuelle et collective, des forces de l’ordre, des organismes de surveillance privés et des remparts et systèmes de protection contre tous les types d’agression

- baisse drastique du nombre de lois et de règlements. Et baisse drastique de la surveillance individuelle et collective, des forces de l’ordre et des remparts et systèmes de protection.

- déclin progressif du besoin de protection psychique

Lutte contre la souffrance et le mal-être :

Généralisation et amélioration des appareillages synthético-chimiques et chimico-immatériels intégrés au cerveau (transformation du cerveau sans « les désagréments de la sensibilité », voire la fabrication d’un cerveau synthétique paramétré pour supprimer, en partie, la souffrance et garantir un degré de satisfaction) — transhumanisme cérébral synthético-chimique et post-humanité cérébrale synthétique. Généralisation du kit de protection psychique et/ou émergence d’un réel et profond « travail » spirituel. Développement et amélioration du cerveau synthétique ou quasi synthétique. Et émergence du kit de protection psychique intégrable et/ou généralisation d’un profond travail spirituel avec « résultats » patents et une réelle (et conséquente) diminution de la souffrance

 

Sociétés à long terme

Lutte contre l’insécurité psychique :

- éradication quasi-totale des lois, des règlements, des forces de l’ordre et des systèmes de protection. Et poursuite de la disparition du besoin de protection psychique

- éradication totale des lois, des règlements, des forces de l’ordre et des systèmes de protection. Et disparition du besoin de protection psychique

- complète extinction du besoin de protection psychique

Lutte contre la souffrance et le mal-être :

- généralisation (éventuelle) du cerveau synthétique ou quasi synthétique. Et développement et amélioration du kit de protection psychique intégrable et/ou généralisation d’un travail spirituel avancé avec « résultats » probants et quasi éradication de la souffrance

- généralisation de l’achèvement du travail spirituel avec l’éradication quasi-totale de la souffrance. Et généralisation du kit de protection psychique intégrable

- individus pleinement réalisés, éradication totale de la souffrance

 

 

Les distractions : les réponses aux besoins distractifs

 

Généralités

L’Homme est contraint à de nombreuses activités (pour répondre à ses différents besoins organiques et psychiques élémentaires). Et le psychisme est soumis à la fois à un degré de saturation psychique et à la crainte du vide et de l’ennui… Aussi, l’Homme (et le psychisme) éprouvent le besoin de se distraire… Notons que la distraction peut être considérée (à bien des égards) comme une forme de fuite du « réel » et de l’existence quotidienne (perçus, en général, par les Hommes comme difficiles et routiniers)…

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Inexistant ou quasi inexistant (hormis la sieste peut-être…)

 

Sociétés primitives

Activités utiles ou ludiques (individuelles ou communautaires)

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

Activités utiles ou ludiques (individuelles, familiales ou communautaires)

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

Activités utiles, ludiques ou sportives individuelles, familiales ou collectives. Développement et généralisation de la radio, de la télévision et des jeux vidéo. Et émergence du tourisme (voyage d’agrément)

 

Sociétés d’aujourd’hui

Jeux traditionnels, sports et loisirs traditionnels. Jeux internet, jeux vidéo individuels ou en réseaux, musique et films « à tout heure » sur tous les supports (smartphone, tablette, ordinateur, télévision…) et forte croissance de la virtualité. Emergence de nouvelles activités et de nouveaux sports sensationnels (à frissons). Développement des voyages d’agrément (avec le tourisme de « masse » : centres de vacances « paradisiaques », croisières sur « bateau usine »…) et des zones dédiées aux loisirs familiaux (parcs d’attraction, parcs de loisirs…) et individuels (SPA, centres de remise en forme et de bien-être…)

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu un tel développement), nous pouvons dire que les réponses aux besoins distractifs ont globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Offre – production – structures

Le domaine du divertissement a connu, au fil de l’histoire, des changements considérables. Les Hommes sont (pour ainsi dire) passés des osselets aux distractions virtuelles et aux jeux vidéo en réseaux en s’arrêtant (assez longuement) sur les (quasi) indétrônables dominos, jeux de cartes et loto, puis, plus tardivement, sur la radio et la télévision (et on en passe évidemment…) qui demeurent aujourd’hui, en dépit des avancées technologiques, des activités distractives majeures*.

* Notons néanmoins que les « jeunes générations » tendent aujourd’hui à les « bouder » et les considèrent (en général) comme des « outils distractifs » obsolètes qu’ils relèguent volontiers aux orties de l’histoire et du siècle passé…

 

La sphère distractive a évolué au fil de l’imagination et de l’évolution des supports qui ont permis son existence (support matériel, support informatique, support numérique…). Des distractions utiles et familiales et de la sieste aux distractions virtuelles hautement « dépaysantes » et sensationnelles, l’univers de l’entertainment n’a cessé de se développer et d’attirer de nouveaux et toujours plus nombreux adeptes. Ainsi, aujourd’hui, les Hommes passent une part substantielle de leur journée et de leur existence à se divertir (sans doute le troisième poste en terme d’heures quotidiennes après le travail et le sommeil dans les pays dits « développés »).

 

Notons également que l’on assiste, de nos jours, à un développement des possibilités d’interaction (pour que « le public » participe davantage…). Il existe, en effet, aujourd’hui un fort développement de l’interactivité (que l’on pourrait qualifier, à bien des égards, de pseudo-interactivité*) dans un grand nombre de domaines du divertissement (et de la « culture »).

* Les exemples font un peu partout florès… tels que les buzzers et les votes (via des boîtiers ou les smartphones dans de nombreux jeux télévisés) qui permettent à l’ « homo télévisionus » (lui aussi, un peu crétinus) de participer aux « festivités télévisuelles » ou de voter, depuis son canapé, pour sélectionner des candidats dans de multiples jeux, concours et émissions de « télé-réalité » sans compter les balbutiements interactifs dans le domaine culturel (films, DVD, livres et jeux vidéo essentiellement) où les professionnels de la distraction ont cru judicieux d’insérer quelques éléments « pseudo interactifs » (comme des éléments numériques offrant diverses informations « supplémentaires »…). Soulignons que cette pseudo interactivité relève manifestement davantage d'une maladroite tentative de séduction destinée à « caresser » les individus « dans le sens du poil(1) » que d’une réelle et authentique participation… Cette fausse « participation active » se limite d’ailleurs (le plus souvent) à une pression « toute bête » sur un boîtier même si elle offre l’illusion au « consommateur distractif » d’être partie prenante à la fête(2) (et non quantité négligeable et passive). Ajoutons enfin (en particulier dans le domaine des arts et du savoir) que les œuvres n’ont pas « attendu » cette pseudo interactivité (et son arsenal de procédés artificiels et « puérils » et – disons-le aussi – assez crétins) pour « toucher » (et agir sur) l’intelligence et la sensibilité des individus (lecteurs, spectateurs et autres téléspectateurs)…

(1) En leur donnant l'illusion de « participer » plus activement (eux, que l’on a longtemps cantonnés en matière distractive à une accablante passivité)...

(2) Il faut voir le visage ravi et radieux (quasi extatique) des participants invités sur les plateaux télé, heureux de voir leur geste ou leur avis pris en considération (Ah ! Lorsque l’on flatte — même maladroitement et hypocritement — les sentiments narcissiques, la jubilation est – presque toujours – au rendez-vous !)…

 

Le secteur du divertissement (comme tant d’autres) s’est industrialisé et a permis le développement d’une offre distractive très diversifiée(1). L’imagination semble sans limite(2) et les moyens de la matérialiser tentent, tant bien que mal, de suivre son rythme effréné… Jeux de cartes, jeux de société, radio, radio-crochet, télévision, jeux télévisés sans cesse renouvelés, télé réalité, talk-show, séries télévisées, films, musique, parcs d’attraction toujours plus « ébouriffants », sports toujours plus nouveaux et sensationnels, consoles vidéo toujours plus perfectionnées, jeux de rôle virtuels et réels, jeux vidéo toujours plus réalistes, imaginatifs et interactifs, la palette n’a cessé de s’élargir avec toujours plus de « nouvelles » activités qui viennent s’ajouter à la liste (déjà bien longue…) des loisirs et hobbies traditionnels (jardinage, déco, bricolage, promenade, activités sportives, voyages d’agrément etc etc).

(1) Des jeux et du pain se lamentait déjà Juvénal (poète de l’Antiquité romaine), et les Hommes sont satisfaits…

(2) Reflet (sans doute) de la Conscience…

 

Quelques mots sur la télévision(1) qu’il nous est impossible, ici, de ne pas égratigner (un peu)… Alors qu’elle aurait pu être un outil d’apprentissage merveilleux et un instrument « d’éducation » efficace, au regard de la demande des consommateurs télévisuels (et de la bêtise ambiante), on l’a réduit, au fil de la course effrénée à l’audimat, à un vil appareil chargé d’offrir aux « masses populaires » des programmes télévisés d’une affligeante indigence (pour l’essentiel)… du pur « entertainment » à visée commerciale et idéologique destiné, selon la célèbre expression d’un dirigeant d’une chaîne de télévision privée (dans les années 2000) « à divertir [le téléspectateur], à le détendre pour le préparer entre deux messages [publicitaires]. Ce que nous [leur(2)] vendons […], c'est du temps de cerveau humain disponible. » On ne peut être plus clair… Fin du coup de griffe…

(1) Notons, ici, l'incroyable fascination qu'exerce(nt) la télévision (en particulier) et les écrans (en général) sur le psychisme humain... Le psychisme qui regarde, via un écran, un défilement « quelconque » d'images (un film par exemple) est non seulement distrait du « réel », mais semble prendre un certain plaisir (un délicieux et malin plaisir...) à être à la fois « absorbé » par les images et totalement « extérieur » à leur contenu et à leur déroulement... Osons une explication (audacieuse... ? Juste... ? Nous n'en savons rien... plausible sûrement...) : le psychisme (identifié à la forme) n'est guère en mesure d'appréhender la vie (phénoménale) et ses évènements comme la (pleine) Conscience*, capable (à travers un regard impersonnel) d'observer et de contempler la vie (phénoménale) en étant à la fois « Un » avec tout ce qui s'y déroule (sentiment d'Unité) et totalement en retrait (en « arrière-plan ») et « non concernée » par les évènements. Cette fascination du psychisme pour les images pourrait donc être une sorte de substitut... en effet, comme il lui est impossible de percevoir la vie et ses phénomènes « à la façon » de la Conscience, la télévision et les écrans pourraient lui permettre, à travers les images et la virtualité, de répondre à « ce besoin » d'unité et de totale « inactivité » (être sans agir ni participer au déroulement des évènements – se référer au désir-fantasme de contemplation évoqué dans les paragraphes consacrés aux désirs-fantasmes)...

* Ou lorsque la Conscience est « habitée » plus largement (voir les paragraphes consacrés au cheminement spirituel)...

(2) En parlant d’une célèbre marque de soda qui (soit dit en passant) a réussi à conquérir la planète entière… Ce qui en dit, bien sûr, assez long sur la « disponibilité » du cerveau humain…

 

Il convient également, dans cette rubrique, de noter la profonde transformation de l’industrie « distractive et culturelle » contemporaine (musique, cinéma, photographie, livres — entre autres domaines) qui a dû opérer, ces dernières années, de très nombreuses et très substantielles adaptations avec le développement et la généralisation du numérique.

 

On a ainsi assisté à un effondrement de l’industrie du disque et des CD (avec la possibilité de créer et de diffuser « sa propre musique » via internet et de télécharger des milliers de morceaux sur des lecteurs MP3 – MP4 et on en passe…). On a également assisté à la quasi disparition des appareils photographiques argentiques puis numériques (avec la généralisation des smartphones), à la transformation de l’industrie du cinéma (avec l’essor considérable des DVD et autres blu-ray, du streaming, des films « à la carte » etc etc) et à la transformation du monde du livre et de l’édition (avec les ouvrages numériques, les tablettes de lecture, le développement de l’auto-publication à travers l'apparition de « nouveaux » modèles éditoriaux et l’émergence de « nouvelles façons » de lire…). Bref, le monde du divertissement (et de « la culture ») tente aujourd’hui de s’adapter (tant bien que mal) à la « révolution numérique* »… et sera probablement amené, dans les années à venir, à « épouser » les « progrès » des « nouvelles — des toujours « plus nouvelles » et innovantes — technologies »…

* Comme il l’a toujours fait à travers les siècles au fil des « révolutions techniques et technologiques »…

 

Le secteur du divertissement est aujourd’hui globalement un domaine régulé par un marché de type capitaliste avec une offre privée. Et il est soumis à des normes essentiellement en matière de sécurité et d’accessibilité en fonction de l’âge des individus.

 

Demande – consommation – individus

Autrefois, les individus étaient relativement peu exigeants en matière de distraction. Lorsqu’ils ne peinaient pas à la tâche, une sieste, un passe-temps utilitaire ou une discussion informelle à l’ombre d’un arbre étaient (sans doute) considérés comme des moments de détente rares et précieux... Au fil des progrès techniques et technologiques et avec la création des jours de repos, des congés payés, des vacances et de la retraite, les exigences se sont considérablement accrues. Les individus sont, pour la plupart, incapables de rester « sans rien faire » comme ils aiment (souvent) à le dire… alors ils « s’occupent » et occupent leur temps libre selon leurs centres d’intérêt*, leur goût et leur pouvoir d’achat…

* Nous ne pouvons résister, ici, à souligner que la chasse et la pêche constituent encore aujourd’hui, dans toutes les contrées du monde, des « loisirs » fort prisés (en particulier par la gente masculine)… Nul n’y voit un « outrage honteux » au Vivant… Non ! Un « passe-temps » débonnaire qu’ils disent… no comment !

 

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer la satisfaction des besoins et des désirs distractifs de façon sécurisée et permanente et de façon aussi rapide, simple, confortable et intelligente que possible (selon les capacités et possibilités offertes par les savoirs et la technique) et assurer l’amélioration des réponses (leur fabrication, leur accès et leur utilisation) en matière de rapidité, de simplicité, de durabilité, de sécurité, de confort et de possibilités nouvelles*… (avec amélioration continue de l’amélioration – cycle infini…).

* Ainsi qu’en matière de satisfaction, de plaisir, de bonheur, de joie et de beauté qu’elles peuvent offrir…

 

 

Eléments pour une analyse « théorique* » plus fine et plus profonde

- l’Homme est une forme énergétique vivante complexe perceptive complexe préconsciente

- les contenus distractifs sont des formes énergétiques immatérielles « synthétiques » idéatives et représentatives (avec support expressif et/ou communicationnel) qui peuvent induire des formes énergétiques immatérielles « synthétiques » émotionnelles.

* Voir les éléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde de la rubrique « alimentation ».

 

Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

- les possibilités accrues de mobilité

- les possibilités accrues de création

- l’explosion des loisirs et du « temps libre »

- le vieillissement de la population

- l'essor des « nouvelles technologies »

- la « révolution » numérique et les prochaines « révolutions » technologiques

- l’efflorescence des « mondes virtuels »

- la créativité humaine

- la demande (toujours plus exigeante) des consommateurs de divertissement

 

Evolutions actuelles

- distractions de plus en plus sensationnelles, imaginatives et sans danger (sensations fortes en toute sécurité)

- multiplication et généralisation des possibilités de création où chacun exprime « ce qu’il souhaite » (de façon plus ou moins originale et plus ou moins « artistique »…)

- création de structures et de domaines entièrement consacrés aux besoins distractifs, de plus en plus « dépaysants » et sensationnels (parcs d’attraction et parcs de loisirs à thème etc etc)

- des distractions de plus en plus interactives et en réseaux

 

Evolutions possibles et directions probables

- création d’univers de plus en plus distractifs (où les cinq sens seraient actifs), de plus en plus « incroyables », « dépaysants » et relaxants et à la fois de plus en plus proches du « réel » et de plus en plus réalistes

- création de mondes et d’univers créatifs virtuels où chacun aurait l’illusion d’en être le créateur, l’auteur et le protagoniste principal (avec l’efflorescence des mondes virtuels*)

- création d’univers pour « s’échapper du réel » où les individus pourraient vivre, faire, imaginer, ressentir « tout et n’importe quoi… »

* Genre « second life(1) » mais en éminemment plus « sophistiqués »…

(1) « Second life » est un univers virtuel (également appelé un métavers) qui permet aux joueurs (ou aux utilisateurs) d'incarner des personnages virtuels dans un monde créé par les résidents eux-mêmes…

 

Evolutions à très long terme

- évasion dans des mondes et des univers très divers, très « dépaysants », imaginaires ou, au contraire, très « réalistes » où les individus pourraient avoir l’impression (voire le sentiment), avec l’activation des cinq sens, de pouvoir tout faire, toute créer, tout vivre… et/ou dans lesquels ils pourraient être réellement projetés (physiquement et psychiquement ) avec mise en réseaux (comme dans le « monde réel » existant, instituant ainsi une forme de mise en abyme « virtuelle »…)

- création d’espaces et d’univers capables de faire ressentir et de faire vivre l’intensité, la diversité, la joie, l’amour, la beauté et la liberté totale en toute sécurité

- élimination progressive du besoin distractif (en effet, si les individus éprouvent une grande satisfaction permanente – grâce, en particulier, à un cheminement spirituel* –, alors toutes les choses et toutes les activités prennent des allures de jeux, de joie et de plaisir. Et tout devient possible : vivre, créer, imaginer tout – absolument tout – immédiatement sans risque ni restriction…)

* Voir les paragraphes consacrés au cheminement spirituel.

 

Objectif idéal (implicite)

Eradication du besoin distractif (avec le passage de l’espace psychique à l’espace de Conscience)

 

 

Perspectives*

* Voir les perspectives de la rubrique « alimentation ».

 

Sociétés de demain

- généralisation de la virtualité. Et développement des activités et sports sensationnels (à frissons).

- généralisation des zones dédiées aux loisirs familiaux (centres de vacances « paradisiaques », parcs d’attraction et de loisirs, croisières sur « bateau usine »…) et individuels (SPA, centres de remise en forme et de bien-être…). Développement des divertissements virtuels, interactifs, relaxants et sensationnels où le psychisme serait de plus en plus intégré. Et émergence du tourisme spatial et d’un kit distractif*

* Aujourd’hui, le smartphone (à bien des égards) en fait déjà office…

 

Sociétés d’après demain

Explosion des mondes virtuels très divers, à la fois très « dépaysants » et très « réalistes » où les individus pourraient vivre, faire, imaginer, ressentir des choses de plus en plus « incroyables »… où serait projeté quasi totalement le psychisme et où chacun aurait le sentiment d’être le créateur et l’acteur principal des évènements… Sophistication et amélioration des zones dédiées aux plaisirs et au bien-être familial et individuel. Développement du tourisme spatial et amélioration et développement du kit distractif

 

Sociétés à moyen terme

- émergence de mondes virtuels parallèles où les individus pourraient vivre (et se réfugier), dans lesquels ils pourraient être, en partie, projetés physiquement et satisfaire une partie de « leurs désirs et de leurs fantasmes ». Progression du tourisme spatial et généralisation du kit distractif. Et émergence d’une diminution du besoin distractif(1)

- développement et amélioration des mondes virtuels parallèles où les individus pourraient vivre (et se réfugier), dans lesquels ils pourraient être presque totalement projetés physiquement et vivre une grande partie de « leurs désirs et de leurs fantasmes ». Généralisation du tourisme spatial (plus lointain). Emergence du kit distractif intégrable. Et poursuite de la diminution du besoin distractif(1)

 

Sociétés à long terme

- généralisation des mondes virtuels parallèles où les individus pourraient vivre (et habiter), dans lesquels ils pourraient être presque totalement projetés physiquement et vivre selon leurs aspirations... Amélioration et sophistication du tourisme spatial (encore plus lointain). Développement et amélioration du kit distractif intégrable. Et baisse drastique du besoin distractif(1)

- généralisation des mondes virtuels parallèles où les individus pourraient vivre (et habiter), dans lesquels ils seraient totalement projetés. Amélioration et sophistication du tourisme spatial et généralisation du kit distractif intégrable et quasi éradication du besoin distractif(2)

- existence et création incessante de pléthore de nouveaux mondes virtuels. Tourisme spatial. Et éradication du besoin distractif(2)

(1) La perception s’élargissant, les besoins distractifs, autrefois si nécessaires (au psychisme), s’estompent progressivement car les choses, les situations, les évènements et l’existence sont (de plus en plus) vécus dans un esprit de jeu (spirituel) et ressentis avec intensité, joie, amour, beauté et liberté…

(2) Tout (ou quasiment tout) est vécu dans une très intense satisfaction où tout devient jeu et joie... et les possibilités de la Conscience font que tout est possible, que tout peut être vécu et créé sans restriction (éradication du besoin distractif par généralisation du jeu et de la joie à chaque instant)…

 

 

L’expression : les réponses aux besoins expressifs

 

Généralités

L’Homme a toujours éprouvé le besoin de s’exprimer. L’expression semble même constituer un élément central de la nature humaine... comme en témoignent (entre autres exemples) les premiers cris et grognements humains, ses premiers borborygmes (avant l’émergence du langage articulé) et les premiers dessins rupestres*… Nous n’allons pas, ici, arpenter les méandres théoriques de l’expression humaine… Disons simplement (si j’ose dire !) que les expressions peuvent être d’ordre émotionnel, imaginaire, artistique, langagier, « s’écouler » de façon naturelle et/ou être à visée pratique et/ou liées aux savoirs et à la connaissance.

* Et sans doute avant les fresques pariétales, des représentations de l’Existant « dessinées » sur le sol à visée pratique (par exemple pour organiser une chasse aux mammouths, aux bisons ou à l’aurochs ou décrire un point de passage à gué d’une rivière)…

 

Soulignons également que les formes expressives (ou canaux d’expression) semblent très nombreuses et que les Hommes peuvent s’exprimer par le corps (communication non verbale, faciale, gestuelle, corporelle, danse…), par le langage et les images et utiliser différents supports (le dessin, la sculpture, l’écriture, la peinture, la musique… la liste est très longue…).

 

Et précisons enfin (de façon schématique) que la dimension expressive est essentiellement liée aux domaines des échanges verbaux, des rêves, de l’imaginaire, des émotions, du savoir, de la connaissance et de la création artistique*.

* Et tous ces domaines, bien sûr, peuvent se mêler — et se mêlent bien souvent — d’une inextricable façon...

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Expressions rudimentaires (sans doute nécessaires à la survie)

 

Sociétés primitives

Parole. Et activités artistiques ou décoratives liées (en général) au sentiment d’appartenance communautaire

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

Parole. Et activités artistiques ou décoratives liées (le plus souvent) au sentiment d’appartenance communautaire ou sociale

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

Parole. Journaux intimes. Et activités artistiques ou décoratives individuelles ou collectives

 

Sociétés d’aujourd’hui

Parole lors des rencontres physiques (et des « rencontres » via les « nouvelles technologies »), journaux intimes, expressions artistiques, loisirs créatifs, réseaux sociaux, Facebook, internet avec les blogs et les sites internet

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu un tel développement), nous pouvons dire que les réponses aux besoins expressifs ont globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Offre – production – structures

Soulignons, en premier lieu, que le langage, la parole et l'expression orale se sont (sans doute) manifestés assez rapidement chez les Hommes (pour qu'ils soient en mesure de créer des représentations de l'Existant et capables de les « utiliser » de façon idoine). Et il est fort probable que le langage ait évolué au fil de la complexification de la cognition et des représentations du « réel ». Cette cartographie de l'Existant était vraisemblablement, à l'origine, liée, à la curiosité qui caractérise la nature humaine, mais également (et principalement) indispensable(1) aux besoins de survie de l'espèce pour que les individus puissent connaître et comprendre leur environnement, s'y déplacer et s'organiser(2), de façon appropriée et judicieuse, et y prélever leur subsistance (nous aborderons brièvement la thématique du langage dans les paragraphes suivants et dans ceux consacrés aux besoins de compréhension)...

(1) Absolument indispensable...

(2) Même de façon sommaire... (à ce propos, on pourrait d'ailleurs supposer que la vulnérabilité des Hommes, dont la constitution a toujours été peu adaptée à l'environnement naturel et à la vie « sauvage », a contribué à la création du langage... langage qui leur a permis d'échanger, de partager des savoirs et des compétences, de s'organiser et d'élaborer des stratégies de survie*... et sans lequel ils n'auraient, peut-être, pu survivre (et, sans doute, se développer)...

* Stratégies moins élémentaires que s'ils avaient été seuls et/ou sans possibilité de partager leurs savoirs et leur expérience...

 

Le domaine expressif a connu, au fil de l’histoire, des changements considérables. Le langage, les langues et l'expression orale n'ont cessé, au fil des siècles, d'évoluer et de s'enrichir... Quant aux possibilités expressives – en particulier, les expressions écrites* – (tant du point de vue des créateurs que des utilisateurs), elles ont évolué essentiellement en fonction, outre de la complexification de la cognition et des représentations de l'Existant, des supports expressifs (et de leurs caractéristiques) : sol, pierre, papyrus, papier, livres (imprimerie), cassettes audio et vidéo, disquettes, fichiers numériques…

* Notons, ici, que la création de l'écriture a représenté une véritable révolution en matière de représentation (et de compréhension) de l'Existant puisque les savoirs (nous y reviendrons brièvement dans les paragraphes consacrés aux besoins de compréhension) ont pu être stockés et transmis, en transcendant les limites de l'oralité, aux contemporains mais également aux générations suivantes à travers leurs supports...

 

Notons (en aparté) que les possibilités expressives ont toujours, plus ou moins, tendu à toucher le plus grand nombre d’individus (en particulier en matière de savoirs et d’art). Pour le reste, on laisse (et on a toujours laissé) à l’imagination, à la sensibilité, à l’émotion, à la créativité et à l’intelligence humaines le soin de s’en occuper*…

* Et elles ont plutôt l’air d’y œuvrer avec créativité et (disons-le) avec un certain succès...

 

Le secteur expressif est un domaine singulier qui concerne éminemment la sphère individuelle (et les échanges interindividuels) mais aussi la sphère collective, en particulier lorsque l’expression concerne les savoirs et l’art (et, dans une beaucoup plus faible mesure, la connaissance*).

* Qui relève de la sphère privée dans l’immense majorité des sociétés humaines.

 

Les expressions liées aux savoirs et aux arts sont généralement un domaine mixte (public et privé) où l’Etat et un certain nombre d’acteurs privés interviennent de concert et/ou de façon complémentaire. L’Etat prend en charge (en général) la conservation et la diffusion des œuvres écrites et artistiques majeures, considérées comme « patrimoine culturel », (essentiellement) par le biais des bibliothèques et des musées. Quant aux acteurs privés, ils agissent, créent et « produisent » (ou se produisent) sur le « marché de l’art » (éditeurs, galeries, galeristes, producteurs, expositions, ventes aux enchères, commissaires-priseurs, auteurs, créateurs, réalisateurs, acteurs, comédiens, musiciens, peintres, plasticiens, artistes…).

 

Notons également que nous assistons aujourd’hui au développement massif des expressions tous azimuts à travers l’efflorescence des réseaux sociaux, des blogs et autres sites internet où chacun exprime ce qu’il veut (mais disons plutôt — et sans condescendance — ce qu’il peut…). Un salmigondis souvent indigeste et écœurant d’opinions, de poncifs(1), de préjugés et de jugements où chacun se met en scène ou dévoile (très souvent) les « insipides merveilles » de son existence, avec plus ou moins d’ostentation(2), contenus, en général, fort éloignés des expressions artistiqueset de savoirs…

(1) Eux aussi… nous ne sommes donc pas les seuls…

(2) Pour faire « le buzz » et avoir son quart d’heure de gloire « peu glorieuse »…

 

Notons enfin qu’avec la croissance phénoménale des univers virtuels et des jeux vidéo et l’avènement massif de ce que les Hommes appellent aujourd’hui « les nouvelles technologies », les créateurs (infographistes & Cie) trouvent là un terrain expressif très conséquent et sans doute très prometteur qui repousse (et repoussera plus encore demain et après-demain) les frontières de la création et de l’imaginaire (images de synthèse très sophistiquées par exemple) et ouvre (et ouvrira — sans doute — bien davantage à l’avenir) des perspectives créatives et expressives tout à fait inédites…

 

Demande – consommation – individus

Les Hommes se sont très tôt exprimés... Au delà des nécessités de survie et des besoins de communication qui ont (sans doute) donné naissance au langage, la parole, à leurs yeux, les distinguait des autres animaux. Aussi, dès les linéaments d'un langage – à peu près – structuré et suffisamment riche et « fourni » (en vocabulaire), ils ont eu recours à l’expression orale et n'ont jamais cessé, depuis, de dire, de parler, de commenter, de donner leur avis, de bavarder et de papoter... Et il ne serait pas exagéré de dire (si j'ose dire !) qu'ils en ont usé avec outrance et avec délice, au fil de leur évolution et de leur histoire, au point de devenir une espèce bavarde (très bavarde). Notons également que les Hommes qui se sont toujours (plus ou moins) exprimés à des fins pratiques (pour l'essentiel) ont fini (assez rapidement) par parler pour ne rien dire et/ou à tort et à travers, tout le temps et à peu près partout, pour raconter, en général, des banalités (et/ou des futilités) sans intérêt... Ne nous appesantissons pas...

 

En matière de savoirs et d’art, autrefois (et jusqu’à un passé encore récent), les individus étaient relativement ignorants. Peu avaient accès à la lecture et à l’écriture. Et peu avaient le temps de s’y consacrer après une journée éreintante à « trimer » au champ ou à l’usine… Avec l’éradication progressive de l’analphabétisme et de l’illettrisme, la démocratisation des savoirs et l’accès généralisé des populations aux études (élémentaires et supérieures), l’expansion considérable des « classes moyennes » et l’avènement des politiques culturelles, les individus ont eu accès à ce que les Hommes appellent la culture (les arts et les savoirs). Notons néanmoins que ce domaine (bien qu’il se soit foncièrement démocratisé ces dernières années) n’a pu se débarrasser totalement de son caractère élitiste*…

* Le caractère élitiste de la culture est lié à l’histoire en général et à l’histoire de la culture en particulier. Domaine auquel n’avaient autrefois accès que les élites et à l’égard duquel les masses populaires, toujours plus ou moins engluées dans les préoccupations et les tracasseries quotidiennes, domestiques et pragmatiques n’ont jamais montré que peu de goût et d’intérêt…

 

Malgré un certain engouement, la consommation culturelle demeure encore aujourd’hui relativement modeste. Les organisateurs de festivals, de concerts, de lectures publiques, d’expositions diverses ont beau s’enthousiasmer (et se gargariser parfois) du nombre de visiteurs, la consommation culturelle se révèle, à bien des égards, assez superficielle… En effet, l’intérêt pour les œuvres artistiques et de savoirs semble se cantonner (au mieux) à ce que les Hommes appellent la culture générale lorsqu’il ne se réduit pas (tout bonnement) à une simple distraction vaguement « culturelle », à un simple « passe-temps » ou à « un moyen » (comme un autre) d’assouvir son besoin « d’intensité émotionnelle »… comme si l’art et les œuvres de savoirs se montraient encore (encore et toujours) incapables de toucher plus profondément « l'intelligence » et la sensibilité des individus et demeuraient une voie inappropriée* vers la Connaissance, inapte (en tout cas) à susciter, chez eux, des interrogations sur l’existence, sur la nature « du réel » ou sur l’identité plus profonde des êtres. Ainsi, en dépit de la démocratisation relative de l’art et de la culture, il semblerait que « les répercussions » des œuvres sur les individus, leur perception et leur existence soient toujours à peu près nulles…

* Si l’art et les livres n’y parviennent pas, alors que faire ? Attendre la maturation « naturelle » des esprits peut-être…

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer la satisfaction des besoins et des désirs expressifs de façon sécurisée et permanente et de façon aussi rapide, simple, confortable et intelligente que possible (selon les capacités et possibilités offertes par les savoirs et la technique) et assurer l’amélioration des réponses (leur fabrication, leur accès et leur utilisation) en matière de rapidité, de simplicité, de durabilité, de sécurité, de confort et de possibilités nouvelles*… (avec amélioration continue de l’amélioration – cycle infini…).

* Ainsi qu’en matière de satisfaction, de plaisir, de bonheur, de joie et de beauté qu’elles peuvent offrir…

 

Eléments pour une analyse « théorique* » plus fine et plus profonde

- l’Homme est une forme énergétique vivante complexe perceptive complexe préconsciente

- les contenus expressifs peuvent être des formes énergétiques immatérielles « synthétiques » idéatives et représentatives (avec support expressif et/ou communicationnel) ou des formes énergétiques immatérielles « synthétiques » émotionnelles.

* Voir les éléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde de la rubrique « alimentation ».

 

Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

- les possibilités accrues de création

- la créativité humaine (et ses « limites »…)

- la complexification du monde

- l’explosion du besoin expressif des individus

- la « saturation » des « espaces » et « des esprits » liée au fort développement des modes expressifs (voire à leur « envahissement » dans la vie quotidienne…)

 

Evolutions actuelles

- généralisation et développement des possibilités expressives instantanées et en réseaux (accessibles à tous et à tout instant (e-mail, SMS, MMS, Twitter, Facebook…)

- multiplication et généralisation des créations où chacun exprime « ce qu’il souhaite » (de façon plus ou moins originale et plus ou moins « artistique »…)

 

Evolutions possibles et directions probables

- création de mondes et d’univers créatifs où chacun aurait l’illusion d’en être le créateur et l’auteur (mondes virtuels)

- permettre à tous de « ressentir et de vivre la beauté et la vérité », que tout devienne « art », que tous les instants, dans tous les plans, deviennent « pur acte de création » pour tous…

 

Evolutions à très long terme

- développement, puis généralisation, des modes expressifs « hautement » qualitatifs (sans parole ni intellect…)

- éradication des besoins et des domaines expressifs par leur complète généralisation… et par la compréhension directe et immédiate de tous les plans. Toutes les existences, tous les gestes, toutes les expressions et tous les actes, sur tous les plans et dans tous les mondes et tous les univers, pourraient alors devenir de « pures créations » où chacun pourrait être partie prenante et « intégré »…

 

Objectif idéal (implicite)

- éradication (possible) du besoin expressif (soulevant le problème de « l’élargissement » de l’espace psychique à l’espace de Conscience). Notons néanmoins que tant qu’il existe une forme, elle est soumise, de façon quasi ontologique, à se manifester et à s’exprimer. Mais soulignons aussitôt que la Conscience* est, elle aussi, amenée à « s’exprimer » à travers la création de ses manifestations énergétiques… L’expression serait-elle alors un impératif incontournable tant dans le monde formel et fini que dans un univers informel et infini ?

* Qui est un espace perceptif immatériel « silencieux »…

 

Perspectives*

* Voir les perspectives de la rubrique « alimentation ».

 

Sociétés de demain

- généralisation et amélioration des possibilités expressives instantanées et en réseaux, accessibles à tous et à tous moments. Multiplication et généralisation des créations où chacun exprime « ce qu’il souhaite » (toujours de façon plus ou moins originale et plus ou moins « artistique »).

- développement des modes expressifs artistiques (et non artistiques) interactifs pour permettre à tous de « ressentir la beauté et l’intensité ». Et émergence d’un kit expressif

 

Sociétés d’après demain

Explosion des mondes virtuels très divers, à la fois très « dépaysants » et très « réalistes » où les individus pourraient vivre, faire, imaginer, ressentir des choses de plus en plus « incroyables »… où serait projeté quasi totalement le psychisme... où chacun aurait le sentiment d’être le créateur et l’acteur principal des évènements… Et amélioration et développement du kit expressif

 

Sociétés à moyen terme

- émergence de mondes virtuels parallèles où les individus pourraient vivre (et se réfugier), dans lesquels ils pourraient être, en partie, projetés physiquement... où ils pourraient créer et satisfaire une partie de « leurs désirs et de leurs fantasmes ». Généralisation des modes expressifs artistiques (et non artistiques) interactifs pour permettre à tous de « ressentir la beauté et l’intensité » et commencer à « ressentir la vérité ». Et généralisation du kit expressif

- développement et amélioration des mondes virtuels parallèles où les individus pourraient vivre (et se réfugier), dans lesquels ils pourraient être presque totalement projetés physiquement et où ils pourraient créer et vivre une grande partie de « leurs désirs et de leurs fantasmes ». Développement des univers virtuels artistiques où serait donnée à ressentir et à vivre « la vérité ». Diminution progressive du besoin expressif(1) avec l’émergence de modes de communication sans parole éminemment plus « qualitatifs » (ressentir et percevoir l’Autre, ses émotions, son « intériorité »…). Et émergence du kit expressif intégrable

 

Sociétés à long terme

- généralisation des mondes virtuels parallèles où les individus pourraient vivre (et habiter), dans lesquels ils seraient presque totalement projetés physiquement et où ils pourraient vivre selon leurs aspirations... Généralisation des univers virtuels artistiques où serait donnée à ressentir et à vivre « la vérité ». Baisse drastique(1) du besoin expressif avec le développement de modes de communication sans parole éminemment plus « qualitatifs ». Et développement et amélioration du kit expressif intégrable

- généralisation des mondes virtuels parallèles où les individus pourraient vivre (et habiter), dans lesquels ils seraient totalement projetés physiquement et dans lesquels ils pourraient créer et vivre selon leurs aspirations. Généralisation des univers virtuels artistiques où serait donnée à ressentir et à vivre « la vérité ». Quasi éradication(2) du besoin expressif avec la généralisation de modes de communication sans parole éminemment plus « qualitatifs ». Et généralisation du kit expressif intégrable

- existence et création incessante de pléthore de nouveaux mondes réels et virtuels. Et éradication du besoin expressif(2)

(1) La perception s’élargissant, les besoins expressifs, autrefois si nécessaires (au psychisme), s’estompent progressivement car tous les gestes, toutes les pensées, toutes les expressions et tous les actes se rapprochent progressivement de la « pure création » et sont capables de toucher, de plus en plus profondément, un grand nombre d’individus…

(2) Tout (ou quasiment tout) est vécu dans une très intense satisfaction où tout devient « pure création », jeu et joie... et les possibilités de la Conscience font que tout est possible et réalisable… que tout peut être vécu et créé sans restriction (éradication du besoin expressif par généralisation de la « pure création », du jeu et de la joie à chaque instant)...

 

 

La compréhension : les réponses aux besoins de compréhension

 

Généralités

L’Homme a toujours été amené à s’interroger* pour savoir et connaître... Son statut d’animal « supérieur » lui a toujours enjoint de comprendre l’Existant (les savoirs et la connaissance des différents plans) et à comprendre l’existence (la connaissance et les représentations de ce qu’est — ou pourrait être — la Vie).

* Poussé à la fois par une insatiable curiosité et une soif de découverte et contraint de trouver des réponses toujours plus performantes à ses besoins...

 

Son incapacité à comprendre globalement et directement l’existence et « les choses » de l’Existant l’a contraint à développer sa cognition et ses capacités réflexives, mnésiques et analytiques pour connaître et représenter ce qu’il comprenait et ce à quoi il avait accès (grâce, en particulier, à la création du langage et à son développement)... Nulle autre voie ne s’offrait à lui… Ce besoin de compréhension et les représentations de l’Existant et de l’existence sont très liés au plan que nous avons qualifié de représentatif intellectuel (que nous développerons dans la partie suivante). De façon schématique, nous pourrions catégoriser les réponses aux besoins de compréhension ainsi :

 

La Connaissance qui concerne les représentations et la compréhension de l’existence (et de « la vérité »). Domaine étudié par la métaphysique, la philosophie, les religions et la spiritualité. Elle est globalement considérée comme relevant de la sphère individuelle (ou privée). Et n’est, en général, enseignée collectivement que pour les individus qui veulent exercer une « fonction » religieuse ou cultuelle (moines, moniales, prêtres, pasteurs, rabbins, imams, sorciers, chamanes…) et accessoirement une fonction professionnelle en lien avec la réflexion sur l'existence (prof de philo par exemple).

 

Les savoirs (théoriques et appliqués) concernent les représentations et la compréhension de l’Existant (tous les domaines, tous les plans et tous les systèmes) : astrophysique, physique, chimie, géologie, écologie, biologie (moléculaire, cellulaire, végétale, animale, humaine), médecine, bactériologie, botanique, écologie, paléontologie, sociologie, archéologie, ethnologie, géographie, histoire, économie, psychologie, philosophie, mathématiques, informatique (et on en passe… et de beaucoup moins drôles !)…

 

Les savoirs nécessitent des espaces (des lieux et des temps) dédiés à l’étude, à la recherche, aux découvertes et aux inventions qui sont essentiellement assurées, au niveau collectif, par les universités et les centres de recherche, mais également des espaces dédiés à la transmission (écoles, collèges, lycées, universités) et des supports et des lieux de stockage (essentiellement encyclopédies, livres, bibliothèques, médiathèques, fichiers numériques et aujourd’hui cloud).

 

Voir ANNEXE 4 (le plan représentatif intellectuel)

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Support et stockage : la parole, le savoir, la « connaissance » et l’expérience « des anciens »

Espaces et lieux consacrés aux savoirs, à la transmission des savoirs et à la connaissance : apprentissage général par la famille et la communauté

 

Sociétés primitives

Support et stockage : la parole, le savoir, la « connaissance » et l’expérience « des anciens »

Espaces et lieux consacrés aux savoirs et à la transmission des savoirs : apprentissage général par la famille et la communauté. Et apprentissage spécifique (« professionnel ») par la famille et la communauté (lorsque cela est possible) ou par le ou les détenteur(s) des savoirs et/ou des connaissances pour les activités qui nécessitent un apprentissage plus long et/ou plus complexe

Espaces et lieux consacrés à la connaissance (et à son amélioration) : long apprentissage de la représentation de l’existence, des croyances et des pratiques religieuses par un guide spirituel (sorcier – chamane) réservé à un ou à quelques individu(s) (au maximum)

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

Support et stockage : les livres, les bibliothèques, les savants, les hommes de science, les lettrés

Espaces et lieux consacrés à la transmission des savoirs : apprentissage, compagnonnage, écoles primaires, universités

Espaces et lieux consacrés aux savoirs (et à leur amélioration) : universités

Espaces et lieux consacrés à la connaissance (et à son amélioration) : long apprentissage de la représentation de l’existence, des croyances et des pratiques religieuses par un ou des guide(s) spirituel(s) et/ou religieux (représentant(s) du culte) réservé à quelques individus « attirés » par et/ou « promis » à la vie religieuse et enseigné (en général) dans des centres religieux

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

Support et stockage : les livres, les bibliothèques, les savants, les hommes de science, les lettrés, les universitaires. La presse spécialisée. Et l’émergence des supports informatiques (disques durs, disquettes, CD, clé USB)

Espaces et lieux consacrés à la transmission des savoirs : écoles primaires, collèges, lycées, universités

Espaces et lieux consacrés aux savoirs (et à leur amélioration) : universités, émergence et généralisation des centres de recherche

Espaces et lieux consacrés à la connaissance (et à son amélioration) : long apprentissage de la représentation de l’existence, des croyances et des pratiques religieuses par un ou des guide(s) spirituel(s) et/ou religieux (représentant(s) du culte) réservé à quelques individus « attirés » par la vie religieuse et enseigné dans des centres religieux. Et émergence d’un « questionnement spirituel » chez une minorité d’individus

 

Sociétés d’aujourd’hui

Support et stockage : généralisation du cloud, des fichiers numériques, d’internet, des bibliothèques physiques et numériques

Espaces et lieux consacrés à la transmission des savoirs : écoles, universités et grandes écoles

Espaces et lieux consacrés aux savoirs (et à leur amélioration) : généralisation des universités et des centres de recherche

Espaces et lieux consacrés à la connaissance (et à son amélioration) : accroissement du nombre de démarches spirituelles individuelles. Emergence de centres de « développement personnel » et de centres spirituels (le plus souvent de tradition religieuse)

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu un tel développement), nous pouvons dire que les réponses aux besoins de compréhension ont globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Offre – production – structures

Le domaine de la compréhension et des savoirs a connu, au cours de l’histoire, des changements considérables. Au fil de la complexification des représentations, des découvertes et des possibilités techniques et « scientifiques », l’ignorance quasi-totale des premiers Hommes s’est progressivement transformée.

 

Notons que les premiers savoirs étaient, sans doute, à visée pratique (techniques de chasse, connaissance des plantes destinées à la consommation et aux remèdes). Et le langage (comme nous l'avons déjà évoqué) a probablement été (en grande partie) à l’origine des possibilités de développement des représentations de l’Existant. Il a sans doute d’ailleurs été créé pour nommer « les choses » et son évolution a accompagné toute l’histoire des savoirs.

 

Au fil de la complexification des représentations de l’Existant, les savoirs sont devenus indispensables à la compréhension du monde. Des disciplines d’étude ont été créées (et avec elles, les universités). Et pendant une très longue période, seule une minorité y avait accès… L’essentiel des individus n’avait besoin que de ses bras pour travailler au champ et/ou (plus tard) à leur établi.

 

Dans un passé pas si lointain, notons qu’il était possible à un seul individu d’acquérir une connaissance générale approfondie (selon les critères de son époque) de l’Existant et même de l’existence. Ainsi, de nombreux philosophes étaient à la fois hommes de lettres et hommes de science (des premiers philosophes antiques aux encyclopédistes(1) des « Lumières » en passant par la célèbre figure de « l’honnête homme »). Mais l’extension considérable des savoirs au cours des 18ème, 19ème et 20ème siècles a contraint les savants et les lettrés à une forme de spécialisation, rendant de plus en plus improbable (et inaccessible) toute velléité d’omniscience(2)

(1) Sans oublier, bien sûr, les « grands esprits » de la Renaissance et de l’époque médiévale — véritables parangons d’éclectisme et de connaissance (quelle que soit leur « civilisation »)… 

(2) Ou même de polymathie...

 

Avec la complexification des activités humaines et des tâches professionnelles et la volonté (plus ou moins forte) des élites à « éduquer » le peuple, l’enseignement est devenu obligatoire et accessible à tous : apprentissage des savoirs de base (lecture, écriture, calcul), apprentissage de l’ensemble des savoirs élémentaires (lycée sanctionné par le baccalauréat) et apprentissage professionnalisant (en vue d’exercer un métier ou de « trouver un emploi ») et/ou (très accessoirement) apprentissages généraux et spécialisés (par discipline) approfondis (3èmes cycles universitaires).

 

Notons aussi (en aparté) que depuis quelques décennies (avec la montée de l’individualisme et l’institution de la sphère familiale comme « centre éducatif premier » des individus), la sociabilisation* aurait tendance à devenir le premier apprentissage nécessaire, « enseignement » dont ont la charge les jardins d’enfants et l’école maternelle.

* Être avec et parmi les autres pour apprendre à réguler et à inhiber la dimension narcissique de chaque individu et à composer avec les désirs égotiques des autres…

 

Soulignons également que les apprentissages et l’éducation dont bénéficient les individus au cours de leur scolarité, outre les problématiques et les difficultés rencontrées par un certain nombre d’entre eux dans l’intégration des enseignements, ne semblent pas avoir pour objectif central (loin s’en faut) d’apprendre aux individus à réfléchir objectivement (et par eux-mêmes), ni de comprendre l’Existant pour « la joie de savoir et de connaître » ni même de leur permettre de devenir des êtres plus autonomes et plus « intelligents » (ou, du moins, plus « éclairés ») mais s’inscrivent très souvent dans une perspective strictement utilitaire comme celle de permettre à la société (et au système humain) de trouver « des bras et des cerveaux » en offrant à chaque individu un rôle et une fonction pour faire « tourner la machine » et assurer le fonctionnement sociétal…

 

Quant aux enseignements approfondis (toujours, plus ou moins, réservés à une frange minoritaire des individus), les recherches s’effectuent, assez souvent, à des fins utilitaires (voire parfois commerciales) et souffrent, en général, d’une certaine forme de myopie, empreinte (la plupart du temps) d’idéologie (« scientisme rationalisant »), d’une certaine forme d’étroitesse de « cadre de pensée » et d’un manque d’interdisciplinarité*…

* Mais loin de nous l’idée de blâmer le monde de la recherche…

 

En matière de support, de stockage et de transmission des données et des savoirs, on a assisté, ces dernières années, à un développement considérable des progrès avec le numérique (fichiers, cloud…) sans compter les très nombreuses recherches (notamment en matière d’intelligence artificielle) qui ont boosté d’une incroyable façon les capacités analytiques, mnésiques et calculatoires et ont permis des découvertes et le développement de nouvelles disciplines (nanosciences, ordinateur quantique entre autres exemples…). Mais en dépit des incessantes avancées de la science, nous pourrions dire (de façon générale) que les savoirs restent, à certains égards, balbutiants et qu'ils seront sans aucun doute amenés à connaître à l’avenir des développements très nombreux (avec d'innombrables découvertes)…

 

Quant à la connaissance (compréhension et représentations de l’existence), elle tire son origine (comme nous l’avons déjà évoqué) dans la capacité humaine à s’interroger (s’interroger sur ses expériences et, de façon générale, sur l’existence) et dans le plus ou moins impératif besoin de l'Homme de donner du sens (signification et orientation) à ce qui est vécu… Notons que le fait d’expérimenter et d’être confronté à la douleur, à la souffrance et à la mort a sans doute grandement contribué à l’apparition (et au développement) de ce besoin de compréhension…

 

L’homme, à ce titre, est un animal métaphysique… mais la connaissance qui, autrefois, était intimement liée aux savoirs, s’en est progressivement déconnectée. Et elle est devenue, depuis fort longtemps aujourd’hui, outre le domaine réservé de la philosophie et de la métaphysique, le « pré carré » quasi exclusif des religions. Notons que la raison, la rationalité et « l’esprit scientifique » qui se sont extraordinairement développés en réaction aux croyances et aux idéologies religieuses passées(1) se sont détournés de la Connaissance essentiellement en raison (si j’ose dire !) de leur incapacité à cerner, de façon objective, rationnelle et « scientifique », un domaine qui ne semble pouvoir être appréhendé ainsi(2). La connaissance est donc livrée aujourd’hui (et depuis des lustres), outre à la sphère individuelle (ce qui est, sans doute, une sage chose…), aux églises et aux chapelles de toutes traditions et, depuis peu, à quelques gourous (parfois légitimes parfois charlatans)… en se cantonnant la plupart du temps (sauf exceptions) à des croyances dogmatiques et à des préceptes de vie imposés(3).

(1) Croyances et idéologies religieuses qui régnaient un peu partout et pendant des siècles en se présentant comme des « vérités divines » indiscutables (sans fondement et, bien sûr, invérifiables…).

(2) La connaissance semble avoir besoin, en effet, d’une certaine forme de subjectivité, d’une sensibilité et d’une indispensable intégration à l’Être que la méthode « scientifique » ignore et ne peut mettre en œuvre avec ses outils…

(3) Oui, imposés (ou que l’on s’impose), et donc, bien sûr, qui ne peuvent être (le plus souvent) « naturellement intégrés » par les rares individus « concernés » (nous y reviendrons dans les paragraphes consacrés au cheminement spirituel)...

 

Demande – consommation – individus

Autrefois, les individus étaient presque totalement ignorants. Leurs savoirs et leur connaissance se limitaient, en général, à ce qu’ils expérimentaient et à ce qu’on leur disait ou racontait… et les Hommes, depuis que l’humanité existe — est-ce bien utile de le préciser — en ont avalé des couleuvres et des balivernes… et aujourd’hui encore… Au fil de l’histoire, des découvertes et des progrès des savoirs et de la connaissance, seule une infime minorité semblait montrer quelque intérêt pour les « choses de l’esprit ». Et aujourd’hui encore, peu ont un réel appétit de savoir et de connaissance*…

* Avec un peu de cynisme, on serait même tenté de dire que les savoirs se limitent toujours et bien souvent (en dépit d’une certaine forme de curiosité qui peut habiter les individus), en une formule un peu cinglante et lapidaire, à faire la distinction entre les carottes et les choux fleurs pour la préparation du pot-au-feu…

 

Hormis les apprentissages scolaires obligatoires (plus ou moins mal vécus chez la plupart…) et les apprentissages professionnels (plus ou moins longs selon les capacités et les goûts de chacun), le savoir et la connaissance relèvent totalement (comme nous l’avons dit) de la sphère individuelle. Et il appartient à chacun de s’y consacrer selon ses appétits… mais il semblerait (comme nous l’avons également déjà souligné) que ces domaines demeurent toujours bien peu appétants pour l’essentiel des Hommes… Et pour ceux qui « s’y collent » ou « s’y penchent », butinant ici et là quelques informations dans les domaines de leur intérêt, le savoir et la connaissance semblent davantage relever de la curiosité intellectuelle et/ou de la culture générale que d’un besoin de compréhension (global et profond) de l’Existant et de l’existence. Ainsi semblent vivre les Hommes…

 

En dépit de la « médiocrité ambiante » (à laquelle naturellement nous nous associons — du moins en partie), on assiste depuis quelques temps à un frémissement des esprits de plus en plus nombreux, au vu de la dureté, de l’inconsistance et de l’absurdité apparentes du monde actuel, à essayer de trouver du sens dans le chaos, lui aussi apparent, contemporain. Certains se tournent alors vers le « développement personnel » ou les religions (qui représentent souvent un refuge aisé et peu exigeant mais éminemment peu salvifique…), d’autres s‘interrogent plus profondément et se désespèrent de ne rien trouver… ni sens, ni orientation, ni appui. La spiritualité alors n’est plus très loin… à portée de main (et de regard)…

 

Toutes ces informations générales ne doivent, bien évidemment, pas nous faire oublier les profondes inégalités en matière de savoirs (et de connaissance) qui sévissent (et ont toujours plus ou moins sévi) dans le monde où une partie de la population a accès à l’éducation, aux savoirs (élémentaires et « supérieurs ») et aux enseignements « métaphysiques et spirituels » et une autre partie ne bénéficie d’aucune éducation ni d’aucune instruction et se voit contrainte, à l’heure de la complexification du monde, à rester analphabète ou illettrée sans espoir de « s’élever par l’esprit » ni de sortir la tête du « marigot » des croyances et de la résignation fataliste…

 

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer la satisfaction des besoins et des désirs en matière de compréhension de façon sécurisée et permanente et de façon aussi rapide, simple, confortable et intelligente que possible (selon les capacités et possibilités offertes par les savoirs, la connaissance et la technique) et assurer l’amélioration des réponses (leur fabrication, leur accès et leur utilisation) en matière de rapidité, de simplicité, de durabilité, de sécurité, de confort et de possibilités nouvelles*… (avec amélioration continue de l’amélioration – cycle infini…).

* Ainsi qu’en matière de satisfaction, de plaisir, de bonheur, de joie et de beauté qu’elles peuvent offrir…

 

Eléments pour une analyse « théorique* » plus fine et plus profonde

- l’Homme est une forme énergétique vivante complexe perceptive complexe préconsciente

- les contenus psychiques réflexifs sont des formes énergétiques immatérielles « synthétiques » idéatives et représentatives.

* Voir les éléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde de la rubrique « alimentation ».

 

Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

- la complexification du monde

- les nouvelles technologies

- le besoin insatiable de transformer l’Existant

- les interrogations des individus face à « l’absurdité » et au chaos apparents du monde contemporain

- la morosité ambiante et l’absence de perspectives offertes par les sociétés contemporaines

 

Evolutions actuelles

- généralisation de l’accès immédiat et permanent à tous les savoirs et à toutes les connaissances

- développement et généralisation des intelligences artificielles

- mise en réseaux immédiate et permanente et indéfiniment actualisée en temps réel de toutes les intelligences artificielles et des stocks de données et d’informations

 

Evolutions possibles et directions probables

- accroissement (éventuel) des capacités mnésiques, analytiques et de puissance calculatoire des cerveaux

- création de logiciels et de systèmes d’intelligence artificielle avec capacités mnésiques (stockage de données), analytiques (traitement de l’information) et réflexives incroyablement puissantes, capables de tout emmagasiner, de tout calculer, de tout savoir, de tout analyser pour « coacher » le psychisme et les individus à tout instant dans tous les domaines possibles et imaginables

- perception de plus en plus large, profonde et fine (augmentation substantielle de la connaissance des plans, de l’infiniment petit à l’infiniment grand (compréhension de l’Univers) et amélioration substantielle de la compréhension de notre origine, de notre nature réelle et de « la vérité »)

 

Evolutions à très long terme

- création de logiciels et de systèmes d’intelligence artificielle intégrés au cerveau-psychisme (transhumanisme synthétique cérébral)

- connaissance de tous les plans et « Connaissance incarnée »

 

Objectif idéal (implicite)

- être la « Connaissance incarnée », omniscience globale instantanée (tout savoir, tout connaître, tout comprendre de façon directe*…) avec quelques difficultés et obstacles : en effet, les individus auront beau percevoir plus loin, plus profondément et plus finement, savoir « tout sur tout » et avoir un savoir complet (une connaissance complète des plans), subsistera un obstacle de taille : pour qu’il y ait une réelle compréhension et une véritable Connaissance, il est nécessaire qu’il y ait intégration à l’Être… Sans cet aspect, il ne peut y avoir d’intelligence absolue « incarnée ». Autre problématique (concomitante) : est-il possible d’insuffler à l’intelligence artificielle la Connaissance et l’Intelligence de l’Être ? A priori, la réponse est négative… Il convient toujours (jusqu’à preuve du contraire…) que la compréhension passe par ce « mystérieux » processus d’intégration à l’Être

* Accès direct au « réel » sans avoir recours à la pensée et à l'intellect...

 

 

Perspectives*

* Voir les perspectives de la rubrique « alimentation ».

 

Sociétés de demain

Support et stockage : généralisation de l’accès immédiat et permanent à tous les savoirs et à toutes les connaissances. Développement et généralisation des intelligences artificielles. Mises en réseaux permanentes et actualisées en temps réel des intelligences artificielles et des stocks de données et d’informations. Emergence d’un kit de connaissance de l’Existant (savoirs). Et émergence (possible) d’une régression des capacités cérébrales d’une partie de la population (liée à l’inactivité cérébrale due à l’usage permanent de l’intelligence artificielle)

Espaces et lieux consacrés à la transmission des savoirs : écoles, universités et grandes écoles

Espaces et lieux consacrés aux savoirs (et à leur amélioration) : universités et centres de recherche. Apparition de nouveaux domaines et création de nouvelles disciplines

Espaces et lieux consacrés à la connaissance (et à son amélioration) : développement des démarches spirituelles individuelles. Et développement des centres de « développement personnel » et des centres spirituels, induit par l’émergence d’un besoin de compréhension et de spiritualité chez une partie de la population

 

Sociétés d’après demain

Support et stockage : fort développement des intelligences artificielles. Amélioration des mises en réseaux permanentes et actualisées en temps réel des intelligences artificielles et des stocks de données et d’informations. Amélioration et développement du kit de connaissance de l’Existant (savoirs). Accentuation et développement (possible) d’une régression des capacités cérébrales d’une partie de la population (liée à l’inactivité cérébrale due à l’usage permanent de l’intelligence artificielle). Et émergence (possible) d’un développement des capacités cérébrales d’une autre partie de la population (mnésiques, analytiques, puissance calculatoire…)

Espaces et lieux consacrés à la transmission des savoirs : écoles, universités et grandes écoles. Amélioration et généralisation d’un module d’apprentissage personnalisé (utilisant l’accès immédiat à tous les savoirs mis en réseaux et le développement des intelligences artificielles) avec l’augmentation des enseignements à distance.

Espaces et lieux consacrés aux savoirs (et à leur amélioration) : forte expansion des universités et des centres de recherche. Apparition de nouveaux domaines et création de nouvelles disciplines

Espaces et lieux consacrés à la connaissance (et à son amélioration) : développement des démarches spirituelles individuelles. Et développement des centres de « développement personnel » et des centres spirituels, induit par l’émergence d’un besoin de compréhension et de spiritualité (de plus en plus vif) chez une partie de la population

 

Sociétés à moyen terme

Support et stockage : amélioration substantielle des intelligences artificielles. Amélioration et généralisation du kit de connaissance de l’Existant (savoirs). Poursuite (possible) de la régression des capacités cérébrales d’une partie de la population (liée à l’inactivité intellectuelle due à l’usage permanent de l’intelligence artificielle). Amélioration (possible) des capacités cérébrales d’une autre partie de la population (mnésiques, analytiques, puissance calculatoire…), de ses capacités de compréhension et de perception (avec émergence de l’intégration de la Connaissance à l’Être). Poursuite de l’amélioration des intelligences artificielles. Emergence d’un kit de connaissance de l’Existant (savoirs) intégrable. Généralisation (possible) de la régression des capacités cérébrales d’une partie de la population (liée à l’inactivité cérébrale due à l’usage permanent de l’intelligence artificielle). Et amélioration (possible) des capacités cérébrales d’une autre partie de la population (mnésiques, analytiques, puissance calculatoire…), de ses capacités de compréhension et de perception (avec développement de l’intégration de la Connaissance à l’Être)

Espaces et lieux consacrés à la transmission des savoirs : écoles, universités et grandes écoles avec l’émergence et le développement de disciplines ayant trait à la connaissance (et non plus seulement aux savoirs). Amélioration et généralisation d’un module d’apprentissage des savoirs et de la connaissance personnalisé et permanent (utilisant l’accès immédiat à tous les savoirs mis en réseaux et le développement des intelligences artificielles) à l’usage des individus « immatures » (jeunes) et des individus adultes (par forte augmentation du besoin de compréhension tout au long de la vie) avec l’augmentation incessante des enseignements à distance. Ecoles, universités et grandes écoles avec la généralisation de disciplines ayant trait à la connaissance (et non plus seulement aux savoirs) et émergence et développement de disciplines sur la Conscience et l’intégration des savoirs et des connaissances à l’Être. Et généralisation d’un module d’apprentissage intégrable des savoirs et de la connaissance personnalisé et permanent (utilisant l’accès immédiat à tous les savoirs mis en réseaux et le développement des intelligences artificielles) à l’usage de tous

Espaces et lieux consacrés aux savoirs (et à leur amélioration) : la recherche devient l’une des activités majeures des sociétés avec de nouveaux domaines d’investigation, de profondes améliorations des savoirs existants, de nouvelles disciplines, la découverte de nouveaux plans et le développement de disciplines qui relient les savoirs entre les différents plans

Espaces et lieux consacrés à la connaissance (et à son amélioration) : la spiritualité devient l’un des domaines majeurs des sociétés (organisation de l’enseignement et de l’accompagnement spirituels). Et émergence d’un kit de connaissance spirituelle

 

Sociétés à long terme

Support et stockage : émergence et développement des intelligences artificielles très sophistiquées. Amélioration et généralisation du kit de connaissance de l’Existant (savoirs) intégrable. Et nette amélioration des capacités cérébrales (mnésiques, analytiques, puissance calculatoire…). Amélioration substantielle des capacités de compréhension avec perception de plus en plus fine, de plus en plus vaste et de plus en plus profonde (avec généralisation de l’intégration de la Connaissance à l’Être). Généralisation des intelligences artificielles très sophistiquées. Généralisation du kit de connaissance de l’Existant (savoirs et connaissance) intégrable. Avec capacités cérébrales mirifiques (mnésiques, analytiques, puissance calculatoire…), compréhension quasi-totale et perception quasi-totale (avec quasi complète intégration de la Connaissance à l’Être). Eradication du besoin de supports et de stockage par omniscience globale instantanée et généralisation de l’Être comme « Connaissance incarnée »

Espaces et lieux consacrés à la transmission des savoirs : écoles, universités et grandes écoles avec la généralisation de disciplines ayant trait à la connaissance (et non plus seulement aux savoirs) et généralisation des disciplines sur la Conscience et l’intégration des savoirs et des connaissances à l’Être. Et généralisation d’un module d’apprentissage intégrable des savoirs et de la connaissance personnalisé et permanent (utilisant l’accès immédiat à tous les savoirs mis en réseaux et le développement des intelligences artificielles) à l’usage de tous

Espaces et lieux consacrés aux savoirs (et à leur amélioration) : développement de nouveaux domaines d’investigation, de nouvelles disciplines et connaissance de la quasi-totalité des plans de l’Existant. Omniscience globale instantanée

Espaces et lieux consacrés à la connaissance (et à son amélioration) : la spiritualité devient le cœur même des sociétés. Généralisation du kit de connaissance spirituelle intégrable. Être et « Connaissance incarnée »

 

 

NOTE GENERALE : les découvertes dans certains domaines ont été, sont et seront automatiquement et systématiquement utilisées dans les autres secteurs...

 

Nous ne pouvons résister à ajouter à cette (déjà bien) longue liste un petit extra non obligatoire mais complémentaire (révélateur, à bien des égards, du psychisme) que vous pouvez passer si vous frisez l’overdose*…

* Et on le comprendrait…

 

 

Les besoins de réalisation de tous les désirs : les réponses aux besoins de satisfaction de tous les désirs

 

Objectifs généraux

Assurer la satisfaction des besoins et des désirs en matière de désir (si l’on peut dire…) de façon sécurisée et permanente et de façon aussi rapide, simple, confortable et intelligente que possible (selon les capacités et possibilités offertes par les savoirs et la technique) et assurer l’amélioration des réponses (leur fabrication, leur accès et leur utilisation) en matière de rapidité, de simplicité, de durabilité, de sécurité, de confort et de possibilités nouvelles*… (avec amélioration continue de l’amélioration – cycle infini…).

* Ainsi qu’en matière de satisfaction, de plaisir, de bonheur, de joie et de beauté qu’elles peuvent offrir…

 

- désir de transformer l’Existant pour vivre des situations et des évènements satisfaisants, plaisants, confortables, sécurisants (en adéquation avec ses attentes et ses représentations mentales), porteurs de bonheur, de joie, de beauté et d’intensité

- désir de vivre des contenus psychiques (émotions, représentations mentales...) satisfaisants, plaisants, confortables, sécurisants et porteurs de bonheur, de joie, de beauté et d’intensité

 

 

Tendances actuelles

Ainsi, nous assistons aujourd’hui dans une grande partie du monde dit « développé » à des tendances qui pourraient bien à l’avenir se généraliser, se renforcer et connaître de fulgurantes avancées et d’éclatants progrès avec par exemple :

 

- une augmentation des activités de bien-être et d’épanouissement personnel

- la création de mondes virtuels où tout pourrait devenir possible en matière de valorisation narcissique et de relations... où tous les désirs pourraient être comblés avec « sensations de réalité » de plus en plus performantes

- la création de domaines et d’inventions robotiques et chimiques de synthèse pour satisfaire tous les désirs et tous les désirs-fantasmes (permanence, sécurité, complétude…)

- la création de structures et de domaines entièrement consacrés aux désirs (dans tous les domaines), des univers dédiés au plaisir (de tous ordres), alimentée par les incessantes inventions et découvertes

- la généralisation du plaisir et de la satisfaction immédiate et incessamment renouvelable des désirs essentiellement en matière de relation, de sexualité, de confort ménager, de bien-être (sommeil, image de soi et sentiment narcissique), l’éradication totale de l’insatisfaction etc etc.

 

Notons que si les Hommes et/ou leurs successeurs parviennent à créer ce genre d’univers, les individus pourraient éprouver un sentiment égotique paroxystique et de surpuissance (l’Homme à l’égal des « Dieux »). Et soulignons qu’aujourd’hui, malgré leur ignorance et leurs capacités retreintes, un certain nombre éprouve déjà (plus ou moins inconsciemment) ce genre de sentiment... Sans compter, évidemment, les risques possibles (voire probables) d’hyper arrogance et d’hyper violence et donc d’hyper surveillance (si les Hommes et/ou leurs successeurs demeurent dans l’espace psychique) avec néanmoins « l’infranchissabilité » de quelques obstacles majeurs dont celui-ci (entre autres) : comment créer les conditions pour « passer » d’un plan fini (pour satisfaire les désirs qui sont infinis) à un plan infini ? Fin de la parenthèse…

 

 

A l’ensemble des besoins précédemment évoqués viennent s’ajouter trois autres grandes catégories de besoin (le travail, l’argent et l’administration), trois créations majeures de l’Homme absolument incontournables au vu des caractéristiques des individus et du fonctionnement des sociétés humaines (que nous aborderons, de façon plus détaillée, dans les parties consacrées à l’organisation sociétale) mais dont nous ne pouvons manquer, ici, de dire quelques mots…

 

- le besoin de travailler/d’exercer un emploi (rémunéré*)

- le besoin d’argent

- les besoins administratifs

* Oui, rémunéré, il va sans dire…

 

Notons que l’argent, le travail et l’administration constituent « des besoins » absolument majeurs et centraux pour les individus et les sociétés mais demeurent secondaires* (au sens où ils ont été créés secondairement pour répondre aux caractéristiques psychiques humaines et au fonctionnement de la société).

* Au vu de leur nature secondaire et artificielle, ils pourraient être amenés à disparaître lorsque les individus seront suffisamment « mûrs » pour abandonner naturellement leurs comportements délétères (liés à leur degré d’ignorance) et, en particulier, leur irrespect insensible et leur inclination à l’appropriation personnelle…

 

Tentons, comme pour les autres catégories, d’en dresser un aperçu synthétique.

 

 

Le besoin de travailler (d’exercer un emploi ou une activité professionnelle rémunéré(e)) : les réponses au besoin de travailler

 

Généralités

L’Homme a toujours été contraint de travailler. L’expression « gagner sa croûte » est révélatrice, à bien des égards, de cette obligation. Si l’Homme veut manger, il doit fournir un travail*…

* Jusqu’à aujourd’hui, il en a toujours fait « l’amer » constat et l’on n’a cessé, à travers les âges, de le lui inculquer (« l’oisiveté est la mère de tous les vices » n’est-ce pas à l’aide de ce genre de maxime qu’on l’a — très souvent — éduqué ?)…

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Cueillette et chasse. Travaux « domestiques » élémentaires

 

Sociétés primitives

Chasse, cueillette et/ou travaux agricoles familiaux (ou communautaires) longs, pénibles et sans rémunération (les individus travaillent, participent à la production familiale ou communautaire pour « avoir le droit » de manger…)

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

Travaux agricoles de plus en plus « outillés ». Travail artisanal. Et linéaments progressifs du travail industriel

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

Travaux agricoles de plus en plus mécanisés. Généralisation du travail industriel pénible et à la chaîne. Et fort développement des services (prestations) avec la création d’une kyrielle de nouveaux emplois

 

Sociétés d’aujourd’hui

Ere du « tout travail », condition obligatoire pour être « intégré au système » et obtenir un salaire nécessaire à la satisfaction des besoins élémentaires

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu un tel développement), nous pouvons dire que les réponses aux besoins de travailler et d’exercer un emploi ont globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Offre – structures

Le travail a connu, au fil de l’histoire, des changements considérables. Autrefois (et pendant très longtemps), on travaillait dans le champ familial (ou communautaire) pour assurer sa subsistance. Avec la complexification de la société humaine et la création de la monnaie (nous y reviendrons dans les paragraphes consacrés à l’organisation sociétale), les individus ont été contraints de travailler hors du cadre familial et/ou communautaire. L’artisanat s’est développé. Avec la révolution industrielle (au 19ème siècle), les individus ont quitté les champs et/ou leur établi pour les usines (et les villes). L’essentiel des individus ne possédait alors que sa force de travail pour subvenir à ses besoins. Seuls les propriétaires* d’usine(s) (et donc du capital) n’étaient pas « soumis » au labeur éreintant et quotidien… mais les autres (tous les autres) étaient contraints de travailler « à la sueur de leur front » et les mains « dans la poussière » ou « le cambouis »…

* Qui (en général) appartenaient à de grandes familles (bourgeoisie et/ou aristocratie) et ne représentaient qu’une part infime des individus.

 

Avec la complexification des tâches industrielles, une partie des ouvriers a eu accès à des activités de supervision (contremaîtres). Avec la progressive « démocratisation » des études, les individus « les plus éduqués » ont pu prétendre à des postes d’ingénieur. Au fils des siècles, les Etats se sont développés et la fonction publique a été instituée (assez tardivement) pour assurer le fonctionnement des différentes administrations. Ainsi, divers emplois dans l’éducation nationale, la police, la gendarmerie, les transports, les télécommunications, les « énergies » et le domaine social ont été créés. Peu à peu, les classes moyennes se sont développées et ont représenté l’essentiel des salariés. Et au fil des progrès et du développement économique, l’ère industrielle s’est lentement et progressivement éteinte au profit des sociétés dites tertiaires* — au sein desquelles les services et les prestations deviennent majoritaires — et qui constituent jusqu'à aujourd’hui le secteur économique qui emploie et recrute l’essentiel des individus…

* Aujourd’hui (comme dirait l’autre…), il n’y a quasiment plus de métier, il n’y a que des emplois… De façon schématique, on pourrait dire que les métiers nécessitent l’apprentissage (plus ou moins long) d’un savoir-faire alors les emplois ne requièrent que des compétences…

 

De nos jours (et depuis fort longtemps déjà), le travail est un secteur régulé par un marché de type capitaliste plus ou moins encadré et organisé par l’Etat (interdiction du travail des mineurs(1), législation sur le marché du travail, syndicats, droit du travail, salaire minimal etc etc). La tendance actuelle semble globalement à la disparition progressive (à la lente déliquescence ?) de l’Etat Providence – le Welfare state (intervention substantielle et « bienveillante » de l’Etat en cas d’impossibilité de travailler de façon provisoire ou définitive) – au profit du workfare qui s’accompagne d’une libéralisation du marché du travail très imprégnée d’une idéologie ultralibérale plus ou moins mâtinée d’une note sociale-démocrate (la flexisécurité par exemple) où l’on fait la part belle aux entreprises et aux entrepreneurs (véritables figures héroïques de la modernité et seules icônes contemporaines de la réussite…) tout autant qu’à l’idéologie capitaliste, productiviste et consumériste, qui, grâce à la mondialisation, s’impose partout sur la planète comme le seul modèle possible(2)

(1) Même si dans de nombreux pays, aujourd’hui, les enfants travaillent encore…

(2) Modèle d’organisation de la production et des échanges aujourd'hui dominant dont le fonctionnement révèle, de façon évidente, une grande similitude avec le fonctionnement psychique (on pourrait même dire qu’il en constitue le reflet quasi exact)…

 

Demande – individus

Autrefois, les individus travaillaient. Aujourd’hui, ils travaillent. Et demain, sans doute travailleront-ils encore… le travail a toujours été plus ou moins associé à l’idée de contrainte et de pénibilité. Bien que l’on ait assisté à une diminution très progressive du temps de travail, à la création des jours de repos, des congés payés, de la retraite, des syndicats, des revendications salariales et du droit de grève, le travail demeure encore et toujours une obligation quasi généralisée. Autrefois, les individus travaillaient la terre pour manger. Aujourd’hui, ils travaillent à l’usine, en institution, au bureau, en open space, sur un chantier ou dans leur cabinet pour obtenir un revenu qui leur permette de manger, de se loger et de se payer quelques « menus plaisirs et distractions ». Le travail représente toujours (avec le sommeil) l’activité à laquelle les êtres humains consacrent le plus de temps (plus d’un tiers de la journée).

 

Avec l’avènement de la culture de l’efficacité et du résultat, l’âpreté et la violence de la concurrence entre les entreprises et les individus (les conflits armés ont globalement laissé place aux guerres économiques entre les entreprises et à la compétition entre les individus — nous y reviendrons abondamment…), les salariés sont obligés de « livrer bataille » et de « faire bonne figure » malgré une pressurisation, une précarisation et un stress quasi permanents. Les arrêts de travail, les burn out, les dépressions font florès un peu partout… On enjoint aux individus d'être compétitifs et performants, à être engagés corps et âme « pour leur boîte », malléables à merci en fonction des injonctions des marchés et des aléas économiques, accessibles à tout moment, on caresse dans le sens du poil leur ego à la fois meurtri et flatté, on les soumet à des évaluations permanentes pour réaliser aveuglément des objectifs économiques et financiers absurdes et insensés(1). L’argent roi est partout consacré et le profit « à gogo » devient le seul but, l’unique idéal dans une incessante fuite en avant sans doute nécessaire pour cacher le vide, l’inconsistance et la misère des sociétés contemporaines… malgré l’émergence (timide) de quelques voix qui s’élèvent face à « la folie » du monde et la naissance (quelque peu timorée) de nouvelles organisations du travail(2).

(1) Qui pourraient se résumer à « faire du fric et du profit »…

(2) Par exemple, les entreprise autogérées ou les entreprises dites « libérées » qui rendent, de façon plus ou moins instrumentalisante, le travail plus épanouissant (autant que possible…), sans contrôle et avec plus de responsabilité individuelle quelle que soit la fonction occupée au sein de l’entreprise.

 

Notons néanmoins qu’en dépit de « l’absurdité et de l’ignominie » apparentes de cette organisation du travail où l’immense majorité des individus s’échine « à la besogne » dans le seul but d’obtenir un salaire (et, la plupart du temps, en se plaignant de ses conditions de vie professionnelle), bien peu seraient en mesure d’occuper « leur temps libre » de façon « intelligente » si on leur offrait la possibilité de ne plus travailler… En outre, le métier ou la profession représente aujourd’hui pour la quasi-totalité des individus l’élément central de leur identité (en particulier, pour les activités professionnelles « valorisantes »)… et beaucoup sombreraient dans un vide et un mal-être abyssaux* si on les « privait » de leur emploi…

* Que les individus et les sociétés seraient incapables de gérer (et moins encore d’en comprendre « l’origine profonde »...).

 

Achevons cette rubrique(1) par un mot (un petit mot) sur le bénévolat qui représente une activité non négligeable (dans les pays dits « développés ») et qui s’inscrit (très souvent) de façon complémentaire au travail salarié (rémunéré) sur les plans individuel et collectif… et qui consiste à œuvrer gratuitement et régulièrement(2) « à titre personnel » dans un (ou des) domaine(s) que les individus « affectionnent » ou jugent important(s) ou essentiel(s)…

(1) Notons que nous aurions pu aborder cette thématique dans la rubrique des besoins distractifs… en effet, bon nombre d’individus appréhende le bénévolat comme une forme d’occupation, un simple « passe-temps » pour « occuper » leur temps libre…

(2) « En dehors » des heures de travail pour les personnes engagées dans une activité professionnelle ou de façon (plus ou moins) substitutive à l’activité professionnelle pour les personnes dites « inactives ».

 

Toutes ces informations générales ne doivent, bien évidemment, pas nous faire oublier les incroyables inégalités en matière d’emploi qui sévissent (et ont toujours plus ou moins sévi) dans le monde où une partie de la population a plus ou moins la possibilité de choisir une branche d’activité selon ses capacités et ses goûts et une autre partie est cantonnée à dégoter un travail (quand elle en dégote un…) souvent misérable, sous-payé, rébarbatif, exténuant, répétitif et peu épanouissant (mais tous les jobs ne le sont-ils pas ?)…

 

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer la satisfaction des besoins et des désirs en matière de travail de façon sécurisée et permanente et de façon aussi rapide, simple, confortable et intelligente que possible (selon les capacités et les aspirations des individus et les possibilités offertes par les structures de production et le contexte économique) et assurer l’amélioration des réponses (leur fabrication, leur accès et leur utilisation) en matière de rapidité, de simplicité, de durabilité, de sécurité, de confort et de possibilités nouvelles*… (avec amélioration continue de l’amélioration – cycle infini…).

* Ainsi qu’en matière de satisfaction, de plaisir, de bonheur, de joie et de beauté qu’elles peuvent offrir…

 

Eléments pour une analyse « théorique* » plus fine et plus profonde

- l’Homme est une forme énergétique vivante complexe perceptive complexe préconsciente

- le travail est une forme énergétique immatérielle qui crée des formes énergétiques immatérielles idéatives et/ou des formes énergétiques matérielles synthétiques

- les « lieux de travail » sont des formes énergétiques matérielles « synthétiques » qui abritent (entre autres) des formes énergétiques vivantes complexes perceptives complexes préconscientes, des formes énergétiques matérielles synthétiques et des formes énergétiques immatérielles idéatives et émotionnelles.

* Voir les éléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde de la rubrique « alimentation ».

 

Les autres éléments que nous abordons habituellement dans cette rubrique* seront étudiés (amplement) dans les paragraphes consacrés à l’organisation économique de la société humaine (nous vous invitons à vous y référer).

* Qui sont (pour mémoire) les paramètres pris en considération de nos jours, les évolutions actuelles, les évolutions possibles et les directions probables, les évolutions à très long terme et l’objectif idéal (implicite).

 

 

Perspectives*

* Voir les perspectives de la rubrique « alimentation ».

 

Sociétés de demain

Le travail devient « roi tyrannique ». Hyperspécialisation des tâches. Emergence d’autres modes de travail (multi-cartes, « multi-jobs », à distance ou très flexibles par exemple). Et émergence (progressive) d’activités plus porteuses de sens pour l’individu et la société

 

Sociétés d’après demain

Essoufflement naturel et progressif du travail « tyrannique ». Et développement d’activités professionnelles plus épanouissantes individuellement et collectivement

 

Sociétés à moyen terme

- réorganisation progressive du monde du travail avec une orientation vers des secteurs et des domaines phares (recherche, fabrication industrielle, écologie, enseignement, savoir, bien-être, spiritualité)

- généralisation du travail « tournant » selon les aspirations des individus avec diminution drastique du temps de travail journalier. Et émergence progressive d’un travail non obligatoire et non rémunéré

 

Sociétés à long terme

- généralisation du travail non obligatoire et non rémunéré par vocation ou aspiration temporaire. Emergence de la disparition de la notion de travail (les individus deviennent de plus en plus capables d’assurer toutes les fonctions dans tous les domaines)

- chaque individu pourrait œuvrer (à sa convenance) à certains domaines de sa convenance pendant une durée choisie (elle aussi, à sa convenance). Développement de la disparition de la notion de travail

- disparition totale de la notion de travail

 

 

Le besoin d’argent : les réponses aux besoins pécuniaires

 

Généralités

Depuis la création de la monnaie (instituée à l’origine pour donner une valeur aux objets et aux biens et permettre des échanges plus aisés), les Hommes ont progressivement attribué à l’argent une place centrale à tel point qu’il est rapidement devenu un élément essentiel et prépondérant dans l’existence humaine(1)... Il a ainsi quitté son rôle d’instrument pour devenir une fin en soi, un objectif à part entière... Et l’argent, un peu partout, a été « consacré »... en devenant, dans l'esprit des individus, le synonyme absolu du bonheur (ou du moins de la satisfaction des besoins et des désirs(2)).

(1) Les Hommes l’ont très vite associé à la possibilité de répondre à leurs besoins et à leurs désirs.

(2) Les Hommes estiment que l’argent (et la sexualité) « font » tourner le monde. En tout cas, il est notable que ces deux domaines sont à l’origine de l’essentiel des activités humaines…

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Eventuellement troc (plus ou moins informel)

 

Sociétés primitives

Troc. Graines, pierres, coquillages et pièces

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

Pièces, billets

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

Pièces, billets, chèques, cartes de crédit

 

Sociétés d’aujourd’hui

Cartes de crédit, paiements immatériels, monnaies virtuelles

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu un tel développement), nous pouvons dire que les réponses aux besoins pécuniaires ont globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Offre – structures

L’argent a connu, au fil de son histoire, des changements majeurs : coquillages, graines, cailloux, pierres précieuses, or, pièces d’or, d’argent, monnaies frappées par « les puissants » et les rois, billets de banques, cartes de crédit, paiements en ligne, paiements immatériels, bitcoins (et autres monnaies virtuelles)...

 

La création des institutions financières et des banques publiques et privées a permis d’institutionnaliser le système financier qui s’est progressivement complexifié (crédits, épargne, banques centrales, produits et marchés financiers, marchés des taux d’intérêt, taux de change , bourses et places financières, marchés spéculatifs de plus en plus complexes…). La monnaie est devenue un domaine clé et un élément absolument central dans la vie des individus, des entreprises et des Etats. Le « nerf de la guerre » comme aiment à le souligner certains (parfois non sans une certaine jubilation ou un certain cynisme…). Et au vu de l’intérêt (si j’ose dire !) qu’il représente, le domaine monétaire et financier est devenu quasi omnipotent. A ce titre, il semble assez clair que les « riches » de ce monde se trouvent être (et se sont toujours trouvés) en général parmi « les plus puissants » et les plus influents… Et aujourd’hui, il est fort probable que les consortiums financiers internationaux, les fonds de pension et autres « grandes puissances financières » imposent « leurs lois » et dictent, plus ou moins, leurs directives et leurs orientations(1) aux instances politiques et aux institutions internationales dans l’organisation, le fonctionnement et la marche du monde(2)

(1) En tirant « les ficelles » dans l’ombre… Il semble évident que leurs transactions et leurs « lobbyistes » demeurent (le plus souvent) très secrets et bien opaques…

(2) Il n’est pas de notre ressort d’entrer dans les détails ni de fournir des éléments « indiscutables » quant au pouvoir de l’argent… mais, à bien des égards, il ne serait sans doute pas abusif de penser que depuis qu’il existe, c’est lui et leurs détenteurs qui fixent l’essentiel des règles…

 

Demande – individus

Depuis fort longtemps (quasiment dès la création de la monnaie), nul Homme n’est en mesure de vivre sans argent… Il constitue, outre la clé de voûte du système humain*, un élément absolument central et incontournable dans la vie des individus. Au point parfois de leur faire « perdre la tête » et/ou de commettre le pire…

* L’argent est si central que l’économie (et, en particulier, la microéconomie) en a fait le paramètre essentiel des deux principaux agents économiques que sont les entreprises qui, selon cette discipline, maximisent leur profit sous contrainte de coût et les individus et les ménages qui maximisent leur satisfaction (leurs désirs) sous contrainte de budget…

 

Beaucoup voient dans l’argent le gage d’une vie meilleure… tous (à peu près tous) veulent en gagner (et si possible toujours plus… et même davantage…) et par tous les moyens possibles (et imaginables), de façon légale et/ou illégale (travail acharné, ambition professionnelle, jeux d’agent, loterie, casino, épargne, investissement, spéculation, entreprise commerciale florissante, vol, braquage, escroquerie, extorsion, fabrication de fausse monnaie… la liste est très longue…). Notons que cette quasi éternelle et écrasante omnipotence de l’argent a suscité parfois des réactions diverses dans certaines communautés (assez minoritaires) d’individus : troc « moderne », Systèmes d’Echange Local (SEL), monnaies locales et diverses autres innovations et tentatives en la matière…

 

Toutes ces informations générales ne doivent, bien évidemment, pas nous faire oublier les effroyables et effarantes inégalités en matière de richesse qui sévissent (et ont toujours plus ou moins sévi) dans le monde où une partie de la population accumule l’argent et les richesses et vit dans une abondance et un luxe écœurants et une autre partie qui ne possède rien (ou si peu) doit se résigner à survivre chichement avec un revenu dérisoire et insuffisant…

 

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer la satisfaction des besoins et des désirs pécuniaires de façon sécurisée et permanente et de façon aussi rapide, simple, confortable et intelligente que possible (selon les capacités et les aspirations des individus et les possibilités offertes par le contexte économique) et assurer l’amélioration des réponses (leur fabrication, leur accès et leur utilisation) en matière de rapidité, de simplicité, de durabilité, de sécurité, de confort et de possibilités nouvelles*… (avec amélioration continue de l’amélioration – cycle infini…).

* Ainsi qu’en matière de satisfaction, de plaisir, de bonheur, de joie et de beauté qu’elles peuvent offrir…

 

Eléments pour une analyse « théorique* » plus fine et plus profonde

- l’Homme est une forme énergétique vivante complexe perceptive complexe préconsciente

- l’argent est une forme énergétique matérielle « synthétique » ou immatérielle associée à une forme énergétique immatérielle idéative (symbolique) et émotionnelle.

* Voir les éléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde de la rubrique « alimentation ».

 

 

Les autres éléments que nous abordons habituellement dans cette rubrique* seront développés (amplement) dans les paragraphes consacrés à l’organisation économique de la société humaine (nous vous invitons à vous y référer).

* Qui sont (pour mémoire) les paramètres pris en considération de nos jours, les évolutions actuelles, les évolutions possibles et les directions probables, les évolutions à très long terme et l’objectif idéal (implicite).

 

 

Perspectives*

* Voir les perspectives de la rubrique « alimentation ».

 

Sociétés de demain

Modes de paiement immatériels (avec support)

 

Sociétés d’après demain

Modes de paiement immatériels (sans support)

 

Sociétés à moyen terme

Diminution progressive des échanges monétisés

 

Sociétés à long terme

Suppression des échanges monétisés

 

 

Les besoins administratifs : les réponses aux besoins administratifs

 

Généralités

Avant la création des Etats, l’Homme n’était pas contraint de « rendre des comptes » à la puissance publique (qui, par définition, n’existait pas). Nous aborderons, de façon plus détaillée, ces thématiques dans les paragraphes consacrés à la société humaine. De façon schématique (voire ultra simpliste(1)), nous pourrions simplement dire, ici, que la prise en charge par les Etats de certains secteurs (les domaines régaliens, en particulier, la nécessité d’assurer l’ordre public et la défense du territoire), les a « contraints » à trouver des fonds pour financer leurs dépenses (les dépenses publiques) et les a donc (plus ou moins) « obligés » à avoir recours à l’impôt(2) et au recensement de la population(2) (avec bien des excès, des abus et des spoliations au cours de l’histoire et qui sont encore d’actualité dans de très nombreuses contrées du monde…). Les Hommes ont donc dû, dès les linéaments d’une vague et officielle structure territoriale régie par une quelconque autorité, se plier à des obligations (impôts, conscription, enrôlement militaire, papiers d’état civil… on en passe et de beaucoup moins drôles…).

(1) Et en partie erronée (mais nous l’assumons)…

(2) Même si l’origine de l’impôt et du recensement est plus lointaine et moins liée (beaucoup moins liée) à la défense de l’intérêt public…

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Participation et contributions naturelles et « obligatoires » aux tâches collectives et d'intérêt général (sans doute sous peine de stigmatisation et/ou d’exclusion)

 

Sociétés primitives

Participation et contributions naturelles et « obligatoires » aux tâches collectives et d'intérêt général (sans doute sous peine de stigmatisation et/ou d’exclusion)

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

Emergence, développement et généralisation des obligations (puis, plus tardivement, des droits) à l’égard des autorités gouvernantes (seigneur, souverain, Etat…) – contributions financières (et/ou en nature), participation obligatoire à la défense du territoire…

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

Forte augmentation de l’intervention des Etats dans tous les domaines de la « sphère individuelle » (droits et obligations – les obligations sont essentiellement relatives aux impôts, aux cotisations sociales, aux diverses autorisations et attestations, à l’état civil, aux permis, au respect des normes, des arrêtés, des décrets et des lois… et les droits concernent essentiellement la participation aux élections, les revenus de redistribution et de remplacement, la garantie d’une prise en charge étatique dans certains domaines (éducation, justice, santé, parfois logement et transport…).

 

Sociétés d’aujourd’hui

Accroissement quantitatif et qualitatif des domaines d’intervention de la puissance publique en matière de lois, de normes et de règlementations et, de façon concomitante, émergence et développement d’une réduction de la prise en charge financière de l’Etat* dans un grand nombre de domaines (en particulier la santé, le logement, les transports et l’éducation).

* Liée, sans doute, à la fois à la récurrence des crises économiques et financières depuis le début du 20ème siècle et à l’émergence, au développement et à la prédominance actuelle d’une idéologie politique de type social-démocrate, fondée sur une participation financière publique réduite exceptée pour les individus considérés comme « indigents » et/ou fortement précaires, un encadrement (législatif) relativement strict du marché et des échanges entre les individus mais avec un contrôle et une régulation minimale et une forme d’accompagnement assez neutre et plutôt de type libéral en matière individuelle…

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu un tel développement), nous pouvons dire que les réponses aux besoins administratifs et publics ont globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Offre – structures

Le domaine public a connu, au fil de l’histoire, des changements considérables. Les obligations ont varié en fonction des régimes (despotique, autocratique, démocratique…) et des circonstances (conflits, paix…).

 

De façon générale, les Etats ont contraint « leurs sujets », autrement dit le peuple, à participer au « fonctionnement sociétal » et à la défense du territoire (sur lequel ils avaient autorité). De façon simpliste, nous pourrions dire qu’ils ont exacerbé (souvent avec grand succès) la fibre patriotique des « citoyens » pour exercer leur pouvoir.

 

Au fil de l’histoire, les Etats ont pris des mesures de plus en plus fortes et contraignantes pour encadrer la vie des individus, les obligeant à payer des impôts (de multiples impôts), à payer des cotisations sociales ou à souscrire à des contrats d’assurance (privés) dans de nombreux domaines (logement, santé, véhicule etc etc). Les Etats ont également progressivement régi tous les domaines de l’existence avec, par exemple, les politiques familiales et sociales, les lois, les normes et les règlements en matière d’hygiène, de santé, de scolarité obligatoire, de logement, de travail, de circulation, de relations individuelles et collectives etc etc, censés garantir le traitement équitable des individus, les protéger les uns des autres (ce qui est, en partie, vrai…) et assurer un « mieux être » individuel et un « vivre ensemble » acceptable* (nous aborderons ces éléments, de façon un peu moins grossière, dans les paragraphes consacrés à la société et à l’organisation étatique).

* Très souvent au détriment de la liberté individuelle comme si les Etats « muselaient » certaines pulsions et tendances humaines en craignant (parfois de façon légitime) d’éventuels débordements et une certaine forme de chaos…

 

Demande – individus

Autrefois (et jusqu’à un passé assez récent), les individus subissaient sans résistance ni revendication l’autorité publique (par crainte, absence et/ou méconnaissance du droit). Avec le développement des sociétés démocratiques et la montée de l’individualisme, les individus sont devenus moins enclins à suivre aveuglément les directives (autoritaires) des pouvoirs publics. Certaines revendications ont donc contraint les Etats à prendre en considération « la liberté individuelle », à moins intervenir et à moins encadrer la sphère privée. En dépit de ce sursaut, les individus (en échange des droits octroyés par la « puissance publique(1) ») se sont vus contraints, dans de nombreux pays, de remplir un certain nombre d’obligations (et de remplir, par la même occasion, quantité de paperasses…) :

 

- pièces d’identité civile (carte d’identité, passeport) ;

- obtention de différents permis (de conduire, de construire, de port d’armes, de chasse…) ;

- impôts ;

- diverses assurances collectives (assurance sociales traditionnelles — système de répartition) et privées (système de capitalisation dans différents domaines – logement, véhicule, santé…) ;

- divers formulaires, attestations, certificats en vue d’obtenir certains revenus de redistribution (sommes versées par l’Etat dans diverses situations)…

- etc etc(2).

(1) Qui dit bien son nom…

(2) Arrêtons-là notre liste ! Et évitons de gaspiller trop de papier, aujourd’hui (en dépit de « l’ère informatique »…), les administrations (entre autres institutions) s’en chargent déjà très largement…

 

Toutes ces informations générales ne doivent, bien évidemment, pas nous faire oublier les effroyables inégalités en matière d’intervention publique qui sévissent (et ont toujours plus ou moins sévi) dans le monde où une partie de la population vit dans des sociétés de droit et bénéficie d’une certaine forme de liberté (d’expression, de circulation etc), d’une certaine forme d’égalité de traitement, d’une assistance (plus ou moins « généreuse ») de l’Etat et d’une probité de ses administrations (et de leurs fonctionnaires) et une autre partie vit dans des sociétés de non droit et subit la dictature, le musellement, les arrestations arbitraires et les répressions policières ainsi que la corruption, le vol, les magouilles et l’iniquité des pouvoirs publics et de ses gouvernants…

 

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer le fonctionnement de l’Etat et l’organisation, la sécurité et l’évolution de la société et du « vivre ensemble » en prenant en considération et en respectant (en général) les libertés individuelles des citoyens (droits, qualité de vie, « épanouissement » personnel…) en fonction des deniers publics (finances publiques et budgets « ministériels »). Et assurer l’amélioration du fonctionnement, de l’organisation, de la sécurité et de l’évolution de la société et l’amélioration du « bien-être » de chaque individu.

 

Eléments pour une analyse « théorique* » plus fine et plus profonde

- l’Homme est une forme énergétique vivante complexe perceptive complexe préconsciente

- l’Etat est à la fois une forme énergétique immatérielle idéative et une forme énergétique matérielle « synthétique » qui abrite (entre autres) des formes énergétiques vivantes complexes perceptives complexes préconscientes

* Voir les éléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde de la rubrique « alimentation ».

 

Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

- les crises économiques et financières

- le vieillissement de la population

- l’expansion démographique

- le taux de chômage

- les migrations internationales

- les inégalités et disparités entre les pays-nations

- la réorganisation de la hiérarchie économique (avec l'essor des pays dits « émergents »)

- l’hégémonie de l’idéologie productiviste, capitaliste, consumériste et individualiste

- les restrictions budgétaires (imposées par les « autorités » nationales et supranationales)

- la tendance à la « social-démocratisation » des Etats et des nations

- la tendance à la progressive substitution du Welfare state par le Workfare

- l’absence de perspectives et d’idéaux sociétaux (hormis le sacro-saint et absurde taux de croissance…)

- le mal-être croissant des individus (dans le monde du travail et la société)

- le repli identitaire et communautaire

- la dimension « asphyxiante » des Etats qui régissent de plus en plus tous les domaines de la sphère individuelle (multiplication des impôts, augmentation des contributions sociales, inflation des lois et des normes « phagocytantes »)

 

 

Les autres éléments que nous abordons habituellement dans cette rubrique(1) et dans la rubrique « Perspectives(2)» seront développés (amplement) dans les paragraphes consacrés à l’organisation politique et judiciaire de la société humaine (nous vous invitons à vous y référer).

(1) Qui sont (pour mémoire) les évolutions actuelles, les évolutions possibles et les directions probables, les évolutions à très long terme et l’objectif idéal (implicite).

(2) Qui sont (pour mémoire) les orientations possibles pour les sociétés de demain et d’après-demain ainsi que pour les sociétés à moyen et long termes.

 

 

Note générale sur l’évolution des kits (modules)

Quelques mots sur les différents kits que nous avons évoqués tout au long de cette partie. Soulignons d'abord que ces kits existent déjà aujourd’hui mais ne sont pas (en général) appréhendés ainsi... Le sac à dos, par exemple, pourrait être une grossière mais néanmoins parfaite illustration. Lorsque l’on part en randonnée, que met-on dans un sac à dos ? En premier lieu, des denrées alimentaires et une gourde, sorte de « kit alimentaire », des vêtements, sorte de « kit vestimentaire », un nécessaire de toilette et une trousse de secours, sorte de « kit de santé », une tente, sorte de « kit de logement », un réchaud et une popote, sorte de « kit domestique », un couteau, sorte (entre autres) de « kit de protection », un téléphone portable, sorte de « kit de communication », une carte (et/ou un guide), sorte de « kit de savoirs », un livre, sorte de « kit de distraction* », une carte de crédit, sorte de « kit financier » etc etc.

* Ou kit de compréhension (selon le livre et l'aspiration des individus)...

 

Il est probable que les kits(1) (véritables) mais également leur contenu et leurs batteries soient, dans un premier temps, assez volumineux et peu autonomes (en effet, il conviendra sans doute de les recharger (en énergie) et de les réapprovisionner souvent(2)). Ils pourraient d’abord être fabriqués (et le seront sûrement) par les industriels selon diverses techniques, déjà plus ou moins existantes et améliorables, avant de l’être probablement à l’aide de plus ou moins grosses imprimantes 3D. Il est fort probable également qu’ils soient ultra personnalisables (totalement adaptés aux besoins individuels).

(1) Que l’on pourrait également appeler « modules ».

(2) A l'instar des cigarettes électroniques aujourd'hui...

 

Au fil des progrès techniques et technologiques, on peut imaginer (sans grande difficulté) que ces imprimantes 3D se perfectionnent, se miniaturisent et puissent être accessibles au plus grand nombre, permettant (plus ou moins) à chaque foyer de posséder la sienne. Une partie de ces kits, leurs contenus et leurs batteries pourrait être alors fabriquée « à la maison ». Puis (ou de façon parallèle), ces kits (leur contenu et leur batterie) pourraient continuer à se miniaturiser, à se sophistiquer, à s’autonomiser et à devenir de plus en plus « intelligents »… Et tous pourraient (à terme) évoluer progressivement vers des kits immatériels capables de créer de « l’organique », du synthétique, de l’organo-synthétique, du chimique, du chimico-synthétique puis de l’immatériel avant de devenir progressivement intégrables au corps et/ou au cerveau et/ou à une sorte de combinaison ou de « peau » qui subira, elle aussi, de nombreuses transformations avant de devenir très sophistiquée, totalement autonome et intelligente (adaptable à toutes nouvelles circonstances) et immatérielle, fonctionnant en circuit fermé « ouvert », pleinement auto-régénérante et connectée à toutes les autres formes et à l’ensemble de l’Existant.

 

Comme nous l’avons évoqué (pour chaque type de besoin) dans les paragraphes consacrés aux évolutions probables, pourraient ainsi fleurir des kits alimentaires ou alimentaro-hydriques, voire alimentaro-oxygéno-hydriques, des kits de santé, d’évacuation, de protection, de fabrication, de création, de reproduction, de défense, de communication, de connaissance (savoirs), de connaissance spirituelle etc etc(1) qui ne cesseront (comme nous l’avons déjà dit) de se sophistiquer et de se miniaturiser avant d’être progressivement intégrables à une sorte de combinaison synthético-chimique, puis synthético-immatérielle puis immatérielle qui offrira (à terme) une très large palette de possibilités avec différents modes (et avec tous les degrés possibles et imaginables). Nous ne prendrons pas la peine ici de développer ce point (il appartient aujourd’hui à la science-fiction(2)…), nous nous limiterons (par souci de simplicité) à donner les principaux modes (qui pourraient exister) : mode nul qui serait le mode humain naturel sans aide ni artifice / mode modéré / mode médian / mode élevé / mode maximum. Ces différents modes permettraient ainsi aux individus de choisir, dans tous les domaines, les modes les plus appropriés selon leurs aspirations, leurs capacités, leurs caractéristiques ou leurs spécificités.

(1) Notons qu’il y aura également un kit financier ultra individualisé qui deviendra très vite immatériel et qui disparaîtra très progressivement avec l’avènement de la Conscience et la transformation des individus*, des relations interindividuelles et des sociétés (nous y reviendrons dans les paragraphes consacrés aux sociétés de moyen et de long termes)...

* De moins en moins enclins à s’identifier à la forme…

(2) Et pourrait laisser dubitatifs, circonspects, rêveurs ou très enthousiastes certains esprits contemporains…

 

Illustrons simplement notre propos en prenant quelques exemples. Ainsi, en matière de reproduction, un individu pourrait choisir de se reproduire naturellement (mode nul) sans aucune intervention artificielle, en éliminant certains risques (mode modéré), en éliminant la plupart des risques (mode médian), en éliminant tous les risques avec une part d’incertitude (mode élevé) ou en éliminant tous les risques et en optant pour une duplication directe et à l’identique ou de son choix (mode maximum).

 

En matière de santé, un individu pourrait décider de vivre (le temps qu’il souhaite et avec la possibilité de changer de mode à tout moment) en mode nul, sans protection bactérienne, virale et sans modification génétique, sans anesthésique et sans remplacement des organes qui subiraient alors une sénescence provoquant la disparition de l’individu (qui pourrait donc ressentir la douleur et avoir des troubles, et donc éventuellement décider de sa mort), ou bien de vivre en mode modéré, médian, élevé ou maximum, c’est-à-dire avec invulnérabilité, insensibilité totale à la douleur et immortalité…

 

Enfin, en matière alimentaire, un individu pourrait choisir de s’alimenter avec des aliments organiques (mode nul) jusqu’à des apports nutritifs immatériels appropriés directs et automatiques (mode maximum) et avec toute la palette intermédiaire.

 

Notons également que ces différents kits pourraient éventuellement être en mesure (pourquoi pas ?) d’opérer une sélection très fine en fonction des parties du corps. Ainsi, par exemple, en matière de protection, un individu pourrait choisir une protection élevée pour les pieds, une protection moyenne pour la tête, une protection modérée pour le tronc et une protection nulle pour les membres etc etc… Et à terme, ces fonctionnalités pourraient être activées soit automatiquement selon les besoins et/ou la dangerosité du milieu soit simplement actionnées par la pensée…

 

3 décembre 2017

Carnet n°63 La conscience et l'Existant - Chapitre 6

Essai / 2015 / L'exploration de l'être

La Vie et l’Existant ne semblent, en réalité, qu’un gigantesque jeu — violent et merveilleux — et une permanente célébration… A hauteur d’Homme, peut-être pourrions-nous penser que nous nous apprenons les uns les autres (et, bien souvent, à notre insu) à mieux les regarder et à mieux les vivre. A mieux les comprendre et à mieux les aimer… mais sur le plan de la Conscience, tout ce « cirque » — aimable ou corrosif — semble (presque) sans importance… Est-ce qui est… et ce qui est n’altère jamais Le Regard…

_

 Nous avons été contraints (pour des raisons d'ordre technique) de diviser la version numérique de cet ouvrage en dix parties.

Sommaire

Chapitre introductif

Chapitres 1 à 5

 

 

Chapitre 6 LES CREATIONS ET LES REALISATIONS HUMAINES

(Généralités, tendances historiques et perspectives générales*)

* Perspectives possibles au regard des caractéristiques et du fonctionnement psychiques (que nous avons « poussés jusqu’à leur extrême limite ») pour mettre en évidence les orientations que pourraient emprunter (à l’avenir) les individus dans la satisfaction de leurs besoins et de leurs désirs…

 

Soulignons (d’emblée) qu’il ne s’agira pas ici de fournir une analyse exhaustive, détaillée, objective et universitaire de l’histoire du monde humain (tâche rébarbative et inutile dans notre perspective…) mais de dessiner à gros (très gros) traits l’évolution humaine à travers ses thématiques et paramètres principaux*.

* Ce long (trop long ?) chapitre sera donc émaillé de poncifs et parfois même de clichés mâtinés de quelques envolées tendancieuses — assez inégales, parfois « punchy » selon les domaines (et l’inspiration) et souvent relativement « ethnocentriques(1) » – qui, malgré quelques inévitables oublis, en constituent, à nos yeux, l’attrait principal… et contribueront (peut-être…) à en égayer et à en alléger le caractère inévitablement systématique, pesant et fastidieux… 

(1) Reconnaissons-le… Ainsi est le psychisme et nous n’y échappons pas…

 

Pour chaque thématique, nous exposerons d’abord quelques généralités avant de donner un aperçu global de son évolution au cours des siècles : des premiers Hommes aux sociétés d’aujourd’hui avant de livrer quelques éléments sur son évolution possible à très long terme sans oublier (évidemment) les sociétés de demain et d’après-demain et les sociétés de moyen et de long termes.

 

 

 

LES ACTIONS ET LES FABRICATIONS HUMAINES : LE PLAN REALISATIONNEL ACTIF

(Les réponses aux besoins organiques, matériels et psychiques élémentaires)

Toutes les thématiques abordées dans cette rubrique correspondent aux actions et réalisations humaines menées pour répondre aux principaux besoins organiques, matériels et psychiques élémentaires.

 

Voir ANNEXE 5 (le plan réalisationnel actif)

 

 

Remarques liminaires

Au fil de l’élargissement des regroupements humains (dont l’écrasante majorité est aujourd’hui constituée en nation), la complexité organisationnelle des sociétés a peu à peu évincé la possibilité pour les individus de consommer les « fruits » de leur production… En matière de réponses aux besoins ressentis, nous ferons donc la distinction (quand cela s’avère nécessaire) entre la production (la fabrication, la création, l’offre et les structures) et la consommation (l’utilisation et la demande des individus).

 

La généralisation du modèle sociétal dominant contemporain (qui s’appuie essentiellement sur l’individualisme, le capitalisme, le productivisme et le consumérisme — nous y reviendrons longuement dans les paragraphes consacrés à l’organisation économique) semble être la preuve que le psychisme  fonctionne de façon identique quels que soient les territoires. Ainsi, tous les hommes (sauf exception) semblent aspirer au confort, à la sécurité et à la durabilité des réponses aux besoins et à l’insatisfaction ressentis, induits par leur condition organique, matérielle et psychique.

 

Les paramètres majeurs principaux que les individus et les sociétés ont été, sont et seront amenés à prendre en considération sont les suivants (la liste est, bien évidemment, non exhaustive) :

 

- la « dimension finie » de la planète Terre ;

- la croissance démographique de l’espèce humaine ;

- le stock limité de ressources naturelles ;

- la pollution des sols, de l’air, de l’eau ;

- les cycles de croissance du Vivant ;

- le respect croissant des manifestations de l’Existant (de plus en plus amplement, Hommes, animaux, environnement, espace) comme l’attestent les lois — encore timides et timorées — sur le respect des minorités intégrées ou non intégrées au système dominant actuel, le respect de l’animal, le respect de l’environnement, les lois et règlements supranationaux concernant les « droits humains », la lutte contre la pollution, le respect de la biodiversité, de l’environnement… etc etc ;

- l’évolution de l’espèce humaine.

 

Après ces quelques généralités, il est temps d’aborder l’ensemble des besoins humains et la façon dont les Hommes ont tenté d’y répondre au cours des siècles et la façon dont ils (et/ou leurs éventuels successeurs) pourraient être, à l’avenir, amenés à les satisfaire…

 

 

L’alimentation : les réponses aux besoins alimentaires

 

Généralités

Satisfaire les besoins alimentaires a toujours constitué une priorité pour l’Homme. Au point d’y consacrer, à l’instar des autres organismes vivants, la part la plus importante de son temps et de son énergie. L’alimentation est donc LE besoin vital humain essentiel et central (sinon primordial*). Soulignons également que l’alimentation humaine a toujours été (plus ou moins) composée d’aliments d’origine animale et végétale.

* Au point où « le manger pour vivre » a été parfois remplacé par le « vivre pour manger », révélant l’alimentation comme l’un des rares plaisirs humains – compensatoire (en général) à bien des égards…

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Cueillette et chasse (et/ou pêche).

 

Sociétés primitives

Agriculture traditionnelle extensive et petits élevages extensifs de type familial et/ou tribal et communautaire pour la consommation familiale et/ou communautaire.

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

Agriculture et élevage traditionnels extensifs (de type familial et « professionnel* »).

* Avec, au fil des siècles (et selon les contrées), l'existence parfois de systèmes de servage ou d'esclavage...

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

Agriculture et élevage extensifs. Et fort développement de l’agriculture et de l’élevage intensifs et hors-sol (de type agroalimentaire et agro-industriel).

 

Sociétés d’aujourd’hui

Agriculture et élevage intensifs. Monocultures mécanisées, robotisées et informatisées hors sol. Et petites cultures et petits élevages bio.

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu une telle évolution), nous pouvons dire que les réponses aux besoins alimentaires ont globalement évolué ainsi.

* Un brin éthnocentré et légèrement enclin au « contemporanéisme »… Désolé !

 

Offre – production – structures

Après ses premiers pas (sans doute un peu « poussifs »…) de chasseur-cueilleur, l’Homme a (incontestablement) effectué un bond gigantesque en découvrant le feu (et donc la cuisson des aliments – toujours en vigueur aujourd’hui). Sa sédentarisation a sans aucun doute favorisé la naissance de l’agriculture et de l’élevage (à moins que cela ne soit l’inverse…).

 

Pendant une très (très très) longue période, l’agriculture et l’élevage ont connu peu de progrès significatifs. Les Hommes demeuraient très largement tributaires des conditions climatiques et de la qualité des sols(1). Afin de produire en quantité suffisante (et pouvoir « manger à leur faim »), les Hommes se sont donc vus contraints d’améliorer en permanence les rendements agricoles(2). Et l’agriculture et l’élevage, grâce au progrès technique, n’ont cessé, au fil de l’histoire humaine, d’améliorer leur productivité. Ils se sont progressivement rationalisés, puis ils se sont (assez tardivement) mécanisés, robotisés et industrialisés pour devenir, au cours du 20ème siècle, éminemment productivistes (par réaction à la longue période de pénurie qu’avait, à peu près toujours, connu l’humanité).

(1) Paramètres toujours (plus ou moins) d’actualité aujourd’hui en dépit des incontestables progrès et transformations dans le secteur agricole.

(2) En associant leur « force de travail » et en « utilisant » la « force animale » avant l'apparition de la mécanisation...

 

L’agriculture (l’élevage et les cultures végétales) a ainsi eu recours, de façon massive (de plus en plus massive), aux engrais (naturels puis chimiques), aux pesticides (pour augmenter la résistance aux maladies et la productivité), aux médicaments (curatifs et prophylactiques), à la sélection (essentiellement en matière d’élevage) et aux modifications génétiques (essentiellement pour les cultures végétales) et aux moyens artificiels de production (pour augmenter la vitesse de croissance) avec, pour conséquence, une réification massive de l’animal (parqué comme une marchandise – de la vulgaire « viande sur pattes »), une pollution massive des sols et des sous-sols, une appropriation des ressources en eau et une contamination des aliments (pesticides et chimie – hormones – médicaments)…

 

Peu à peu, l’agriculture s’est transformée en industrie agroalimentaire et a vu ses circuits de distribution se complexifier (avec une forte croissance du nombre d’intermédiaires dans la « chaîne – de distribution – alimentaire ») : centrales d’achats, grossistes, supermarchés, hypermarchés, magasins, commerçants, vente au détail…). Les petites exploitations agricoles de type familial et les petits agriculteurs se sont raréfiés et ont aujourd’hui quasiment disparu*.

* Notons que depuis la révolution industrielle, le nombre d’agriculteurs a diminué, d’une façon exceptionnelle, dans les pays dit « développés ».

 

Dans l’immense majorité des cas, le secteur alimentaire est aujourd’hui un domaine régulé par un marché de type capitaliste avec une offre privée (secteurs agroalimentaire et agro-industriel, chaînes de distribution, restauration…). Notons également qu’il bénéficie, de façon fréquente, (un peu partout dans le monde) des aides de l’Etat (subventions…) et est soumis (dans les « pays riches ») à des normes et des règlements très stricts essentiellement en matière de production (diplôme agricole, AOC*…) et d’hygiène (conservation des aliments, « chaîne du froid »…).

* Appellation d’Origine Contrôlée.

 

Au cours des dernières décennies, on a assisté à une uniformisation et à une standardisation des produits alimentaires, à une perte de goût et de la valeur nutritive des aliments, à une mainmise des industriels et des distributeurs sur les producteurs, au rôle accru du markéting (packaging et campagnes de promotion publicitaire) et à un effroyable gaspillage alimentaire.

 

On peut également noter qu’après l’ère de « la grosse bouffe(1) » qui a sévi dans les régions du monde les plus riches (mouvement, sans doute, réactif à l’économie de « rationnement » et de « disette » qu’a toujours, plus ou moins, connu l’humanité), la tendance semble être à la diététique et aux nutritionnistes qui élaborent, un peu partout, quantité de repas « équilibrés et sains » (très normatifs(2)) en traquant tout excès lipidique et glucosé… 

(1) Et/ou de « la mal bouffe »... bien grasse et bien sucrée…

(2) Et voire parfois même quasi dictatoriaux…

 

Quelques mots enfin sur la restauration* qui constitue une sorte d’extension du secteur alimentaire (et souvent agroalimentaire) et qui a toujours offert aux Hommes la possibilité de satisfaire leur goût (si j’ose dire !) pour le plaisir gustatif et/ou de répondre à leur besoin de commodité (en leur épargnant la préparation des repas) et/ou à une certaine idée de « la convivialité »… Des premières échoppes et des tavernes d’autrefois, comme pour l’essentiel des secteurs et des activités humaines, les deux derniers siècles ont vu fleurir une offre pléthorique avec quantité d’établissements dédiés aux « arts de la table » : de la « haute gastronomie » pour « gourmets fortunés » à l’échoppe de kebab en passant par les fastfoods, les food trucks, les restaurants de quartier, les bistrots et toute une gamme de restaurants étoilés (évalués par certains guides gastronomiques) et une incroyable diversité d’établissements qui proposent des mets des quatre coins du monde…

* Secteur qui propose aux individus de la nourriture pour restaurer (sous forme de nutriments) une partie de l’énergie — sans doute parmi les plus grossières — nécessaire à leur survie et à leur fonctionnement.

 

Demande – consommation – individus

Quant aux consommateurs, avant l’ère productiviste et consumériste, ils peinaient souvent à se nourrir… Et s’alimentaient tant bien que mal*, au gré des aléas climatiques et de leurs répercussions sur l’abondance des récoltes.

* Le temps du « pain noir »…

 

Les voyages, puis les « lointaines » colonies ont permis à certaines denrées de s’implanter « un peu partout dans le monde » et de devenir des aliments « ordinaires » (épices, thé, café, pomme de terre etc etc). Au cours de l’avènement du « tout alimentaire », on a assisté à l’efflorescence de nombreux produits (en tous genres…)… et à la naissance de nouvelles pathologies (qualifiées d’« alimentaires ») : surpoids, obésité, maladies cardio-vasculaires mais aussi anorexie, boulimie… Et aujourd’hui, beaucoup aspirent à consommer des aliments variés et de qualité (« bons » pour la santé*) tout au long de l’année et des produits élaborés prêts à la consommation (sans contrainte de préparation).

 * Voire même des alicaments.

 

Nous ne pouvons résister, ici, à la tentation de dire un mot sur la chasse (sans doute l’un des plus anciens instincts de l’humanité) qui sévit toujours de nos jours — et sous différentes formes — dans quasiment toutes les parties du monde… chasse que l’on a transformée en loisir… en plaisir (sanguinaires il va sans dire…). Il n’existe toujours pas (ou quasiment pas) un seul endroit sur Terre où l’Homme ne se livre pas (et sans aucune nécessité vitale) à ses instincts archaïques*… Fermons la parenthèse.

* Ce qui (entre parenthèse) en dit long (très long) sur la lenteur de son évolution et son degré de sensibilité…

 

Toutes ces informations générales ne doivent, bien évidemment, pas nous faire oublier les effroyables disparités* en matière alimentaire qui sévissent (et ont toujours plus ou moins sévi) dans le monde où une partie de la population a accès à une surconsommation (presque écœurante) de vivres et de denrées en tous genres (et à toute heure du jour et de la nuit) et une autre partie demeure substantiellement mal et/ou sous-alimentée et connaît des périodes aiguës de disette ou de famine…

* « Disparités » qu’un glissement sémantique, quelque peu « idéologique » (avouons-le !), pourrait convertir en « inégalités(1) »... et nous applaudirions aussitôt des deux mains en tapant des pieds pour montrer notre très enthousiaste approbation… Oui, il y a, bien sûr, ici un peu d’idéologie mais en y réfléchissant — mieux et plus profondément — on comprend assez vite que le partage équitable des denrées (et des richesses) constitue une sorte de loi naturelle dont l’avènement, en ce bas monde, se réalisera tôt ou tard...

(1) Mais relevons néanmoins qu’en ce monde, tout est inégal. Chaque forme a des prédispositions et des caractéristiques singulières. Et est unique. Chaque « destin » est, lui aussi, unique et singulier. En effet, en nos terriennes contrées, pas une seule forme ni un seul itinéraire identique… tout est disparate et différent…

 

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Evolutions possibles au regard des caractéristiques et du fonctionnement psychiques pour mettre en évidence les orientations que pourraient emprunter (à l’avenir) les individus dans la satisfaction de leurs besoins et de leurs désirs…

 

Objectifs généraux

Assurer la satisfaction des besoins et des désirs alimentaires de façon sécurisée et permanente et de façon aussi rapide, simple, confortable et intelligente que possible (selon les capacités et possibilités offertes par les savoirs et la technique) et assurer l’amélioration des réponses (leur fabrication, leur accès et leur utilisation) en matière de rapidité, de simplicité, de durabilité, de sécurité, de confort et de possibilités nouvelles*… (avec amélioration continue de l’amélioration – cycle infini…).

* Ainsi qu’en matière de satisfaction, de plaisir, de bonheur, de joie et de beauté qu’elles peuvent offrir…

 

Eléments pour une analyse « théorique* » plus fine et plus profonde

- l’Homme est une forme énergétique vivante complexe perceptive complexe préconsciente

- les aliments peuvent être des formes énergétiques matérielles vivantes complexes non perceptives (végétaux), des formes énergétiques vivantes complexes perceptives élémentaires (animaux) ou des formes énergétiques matérielles synthétiques (préparations culinaires artificielles).

* Ces éléments seront nécessaires à notre tentative de représentation de la structure du « réel » (située dans le dernier chapitre de cette réflexion).

 

Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

- la pollution des sols

- le rationnement en eau (ou l’utilisation raisonnée de l’eau)

- le respect de l’animal

- la tendance bio (peu de pesticides et de chimie)

- la croissance démographique mondiale

- les inégalités alimentaires entre les nations

- les conditions de travail des agriculteurs

- le mode d’organisation, de production, d'échanges et de consommation des produits alimentaires

- la durée de conservation des aliments

- la baisse de la pénibilité à produire et à consommer

- l’augmentation du plaisir à consommer

- l’aspiration à une alimentation de plus en plus variée et consommable à tout instant

- l’aspiration à une alimentation saine pour le corps, la santé, le bien-être et l’environnement : produits bio

 

Evolutions actuelles

- l’agriculture « artificielle(1) » (non agricole)

- le bio (les AMAP(2) : circuits de distribution courts)

- l’agriculture locale (de qualité et de proximité)

- les monocultures intensives

- l’augmentation de la dimension des exploitations agricoles (qui deviennent de véritables « usines agroalimentaires »)

(1) Cultures (et jardins potagers) dans les villes par exemple : mode ? Epiphénomène ?

(2) Association pour le Maintien d'une Agriculture Paysanne.

 

Evolutions possibles et directions probables

- aliments génétiquement modifiés

- aliments de synthèse — remplacement de « l’organique » par le synthétique (biologie moléculaire, chimie de synthèse, cellules souches…) en augmentant « le goût » et en conservant les caractéristiques visuelles et gustatives des aliments organiques (végétaux et animaux) et en diminuant les caractéristiques nutritives néfastes afin de pouvoir tout consommer à volonté, à tout moment et à toute saison

- simplification de l’apport nutritif (pilules de synthèse)

- fabrication d’aliments de synthèse facilement productibles (puis, peut-être, intégrés directement au corps : transhumanisme corporel synthétique et/ou chimique)

- successeur de l’imprimante 3D* qui pourrait créer, en un instant, tous les objets possibles (objets synthétiques, organo-synthétiques, organiques…)

* Imprimante tridimensionnelle capable de produire des objets. Notons, ici, les balbutiements de l'imprimante 4D (qui utilise les mêmes techniques que l'imprimante 3D mais qui permet à l'objet « imprimé » de prendre en considération l'environnement – avec capacité d'adaptation aux circonstances)...

 

Evolutions à très long terme

- fabrication d’aliments non matériels (avec, éventuellement, le problème que pourrait poser la transformation du corps et de « l’organique » en système synthétique, puis en système immatériel)

- l’énergie « pure » pourrait devenir le seul besoin énergétique « nutritif » nécessaire

 

Objectif idéal (implicite)

Eradication des besoins alimentaires (sauf éventuellement le plaisir, la joie et le bonheur qu’ils peuvent offrir…)

 

 

Perspectives*

* Perspectives possibles au regard des éléments pour une analyse évolutive (exposés dans les paragraphes précédents) et des caractéristiques et du fonctionnement psychiques (que nous avons « poussés jusqu’à leur extrême limite ») pour mettre en évidence les orientations que pourraient emprunter (au cours des différentes périodes historiques à venir) les individus dans la satisfaction de leurs besoins et de leurs désirs…

 

Sociétés de demain

Industrie agroalimentaire de synthèse. Et petites cultures et petits élevage bio.

 

Sociétés d’après demain

Généralisation de l’agroalimentaire de synthèse. Et généralisation des petites cultures et élevages bio.

 

Sociétés à moyen terme

- développement des pilules de synthèse et de « l’organique » bio modifié génétiquement. Et émergence d’un kit* synthético-chimique alimentaire.

- généralisation et industrialisation des pilules de synthèse et de « l’organique » bio modifié. Et développement et amélioration du kit alimentaire synthético-chimique.

* La notion de kit (et son évolution) seront abordées et développées à la fin de ce sous-chapitre (nous vous invitons à vous y reporter).

 

Sociétés à long terme

- pilules de synthèse fabriquées quasi individuellement par les « successeurs » de l’imprimante 3D, capables de fabriquer de « l’organique » génétiquement modifié, de l’organo-synthétique et du synthétique « pur ». Généralisation du kit alimentaire synthético-chimique et développement d’un kit alimentaire synthético-chimique intégrable.

- pilules de synthèse intégrées directement au corps (transhumanisme corporel synthético-chimique). Amélioration et généralisation du kit alimentaire synthético-chimique intégrable et émergence et développement d’un kit alimentaire immatériel.

- éradication du besoin alimentaire et/ou apports nutritifs immatériels intracorporels  (transhumanisme corporel immatériel).

 

 

Les vêtements : les réponses aux besoins vestimentaires

  

Généralités

L’Homme est un organisme vivant vulnérable et fragile dont la constitution a toujours été peu adaptée à la vie naturelle (et « sauvage »). Il a donc, très tôt, éprouvé le besoin de se protéger des conditions climatiques (froid, chaleur, vent, pluie…) et du revêtement du sol (potentiellement dangereux) avant d’entretenir plus tard un rapport « psychiquement inconfortable » à l’égard de la nudité qui l’a contraint à la cacher... Il a donc sans doute, dès ses premiers pas, éprouvé le besoin de s’habiller.

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Peaux de bête. Vêtements en fibres végétales brutes.

 

Sociétés primitives

Vêtements en fibres végétales plus ou moins rudimentaires.

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

Vêtements élémentaires fabriqués de façon artisanale.

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

Développement et généralisation des vêtements en fibres naturelles « sophistiquées » fabriqués de façon industrielle. Et développement des fibres synthétiques.

 

Sociétés d’aujourd’hui

- vêtements élémentaires fonctionnels

- hyperpersonnalisation vestimentaire (valorisation narcissique et signe d’appartenance sociale)

- vêtements intelligents (adaptables au corps et aux conditions climatiques)

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu une telle évolution), nous pouvons dire que les réponses aux besoins vestimentaires ont globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Offre – production – structures

Le domaine du vêtement et de l’habillement a connu, au fil de l’histoire, de nombreux progrès : des premières peaux de bête aux tissus « intelligents » contemporains en passant par les tissus végétaux bruts, les tissus végétaux grossiers, les tissus végétaux tissés (cousus, brodés etc etc), les tissus végétaux manufacturés, les tissus synthétiques industriels, le vêtement a toujours plus ou moins essayé de faire « peau neuve* »…

* Même si, en définitive, rien de bien nouveau n’a été créé depuis la sortie des cavernes… les individus continuent de couvrir leur corps avec « un peu d’étoffe »...

 

Au cours des derniers siècles, ce secteur (comme tant d’autres) s’est industrialisé. Il a complexifié ses circuits de distribution, a vu émerger une série d’intermédiaires (centrales d’achats, grossistes, supermarchés, hypermarchés, magasins) et a permis la fabrication, à grande échelle, de matériaux de plus en plus solides et durables*. 

* Sans compter la stratégie actuelle (mais sûrement provisoire) des industriels (poussés par l’appât du gain) qui fragilisent les tissus ou utilisent volontairement des tissus de mauvaise qualité pour réduire leurs coûts.

 

Le secteur vestimentaire est aujourd’hui un domaine régulé par un marché de type capitaliste avec une offre privée (hypermarchés, chaînes de vêtements, magasins de prêt-à-porter). Et il est soumis (plus ou moins) à des normes et des règlements (en particulier en matière de sécurité). 

 

Depuis des décennies, on a assisté à une mondialisation de la production (délocalisation…) qui, sous couvert de minimisation des coûts de production et d’offrir aux populations locales un travail et une alléchante (et souvent mensongère) possibilité de développement, a simplement permis aux firmes de surexploiter sans vergogne la main d’œuvre autochtone. L’offre est devenue pléthorique et très diversifiée et « joue », de façon très nette, sur le besoin de singularisation égotique des individus (modes, prêt-à-porter, accessoires vestimentaires divers, haute couture…).

 

Demande – consommation – individus

Autrefois, les individus s’habillaient de façon éminemment simple et fonctionnelle. Puis, assez rapidement (bien avant l’ère consumériste), les individus ont attribué à l’habillement une fonction particulière : un signe de distinction et d’appartenance sociale et un instrument de séduction, qui se sont largement étendus et démocratisés avec le développement des classes moyennes avant d’envahir l’ensemble de la population*.

* Le vêtement « d’apparence » et « d’apparat » était autrefois réservé aux nantis : aristocrates, clergé et « bourgeois »… excepté, bien sûr, à l’occasion des « fêtes », des « célébrations » et/ou des « rituels » (rites de passage, rites funéraires etc etc) au cours desquels les individus (quelles que soient les époques historiques) étaient (le plus souvent) amenés à se parer de « leurs plus beaux atours » (notons — entre parenthèse — que ce comportement « vestimentaire » est toujours en vigueur aujourd’hui)...

 

En matière vestimentaire, les modes se succèdent et se ressemblent (par cycles), « pillent » ici et là les tendances « nouvelles », se réinventent de façon plus ou moins paresseuse, mollassonne ou créative… Bref, « la fringue » a, depuis belle lurette, perdu son caractère purement utilitaire et on l’affiche (et s’affiche avec elle) partout avec ostentation et fierté, soucieux de ne pas renvoyer une image ringarde « d’has been » mal froqué ou de « je-m’en-foutiste » débraillé  mais celle d’un individu singulier qui cherche à se différencier (mais pas trop) pour rester « in » et « tendance »… bref, partout (et depuis fort longtemps) les Hommes (et les femmes — aussi surtout* ?) sont tenus (si j’ose dire !) de se conformer au « moule vestimentaire » en vigueur…

* Non ! Pas seulement !

 

 

Eléments pour une analyse évolutive *

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer la satisfaction des besoins et des désirs vestimentaires de façon sécurisée et permanente et de façon aussi rapide, simple, confortable et intelligente que possible (selon les capacités et possibilités offertes par les savoirs et la technique) et assurer l’amélioration des réponses (leur fabrication, leur accès et leur utilisation) en matière de rapidité, de simplicité, de durabilité, de sécurité, de confort et de possibilités nouvelles*… (avec amélioration continue de l’amélioration – cycle infini…).

* Ainsi qu’en matière de satisfaction, de plaisir, de bonheur, de joie et de beauté qu’elles peuvent offrir…

 

Eléments pour une analyse « théorique* » plus fine et plus profonde

- l’Homme est une forme énergétique vivante complexe perceptive complexe préconsciente

- les vêtements peuvent être des formes énergétiques matérielles naturelles (végétaux) ou des formes énergétiques matérielles synthétiques.

* Voir les éléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde de la rubrique « alimentation ».

 

Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

- la pollution

- le rationnement en eau (ou l’utilisation raisonnée de l’eau)

- les conditions de travail des ouvriers de l’industrie textile

- le mode d’organisation, de production, d'échanges et de consommation des produits vestimentaires

 

Evolutions actuelles

- vêtements ultra personnalisables

- vêtements intelligents qui « s’adaptent » aux besoins du corps et aux conditions climatiques (voire aux besoins de santé)

 

Evolutions possibles et directions probables

- fabrication de vêtements adaptés à la vie dans tous les environnements (sur terre – dans des conditions climatiques extrêmes ou hors normes, sous terre, sous l’eau, dans l’air, dans l’espace)

- création d’une matière (ou carrément d’une peau) synthétique confortable (et personnalisable à loisir), adaptable en permanence aux besoins du corps, aux conditions climatiques, voire capable de protéger contre les agressions et de neutraliser l’entrée et/ou les interactions avec les formes non désirées (individus, animaux, insectes, pollens, poussières, bactéries…), et capable (à terme) de produire de l’oxygène (pour la respiration) — transhumanisme corporel synthétique

- successeur de l’imprimante 3D qui pourrait créer, en un instant, tous les objets possibles (objets synthétiques)

 

Evolutions à très long terme

- fabrication de vêtements immatériels (avec le problème que pose la transformation du synthétique en système immatériel)

- l’énergie « pure » pourrait devenir le seul besoin « vestimentaire » nécessaire

 

Objectif idéal (implicite)

Éradication des besoins vestimentaires, éradication de la matière périssable, voire éradication totale de la matière (vers une forme non matérielle) sauf éventuellement le plaisir, la joie et le bonheur qu’ils peuvent offrir…

 

 

Perspectives*

* Voir les perspectives de la rubrique « alimentation ».

 

Sociétés de demain

Généralisation des vêtements intelligents

 

Sociétés d’après demain

Création d’une matière synthétique polyvalente, autonettoyante, intelligente, adaptable aux besoins du corps, aux conditions climatiques et résistante aux infections et aux agents pathogènes (bactéries, virus…)

 

Sociétés à moyen terme

- généralisation et amélioration de cette matière synthétique

- transformation progressive de cette matière synthétique en peau synthétique

 

Sociétés à long terme

- fabrication de cette peau synthétique par l’éventuel successeur de l’imprimante 3D — sorte de combinaison polyvalente avec branchement synthético-chimiques de différents kits

- peau synthétique régénérative et protectrice directement intégrée au corps (transhumanisme corporel synthético-chimique) avec branchement possible de kits multiples chimico-immatériels puis totalement immatériels

- éradication du besoin vestimentaire et/ou sorte de film immatériel protecteur, intelligent, adaptable et évolutif capable de créer des remparts neutralisant contre tous types d’agression (climatique, pathogène, attaques diverses…)

 

 

La santé : les réponses aux besoins de santé

 

Généralités

L’Homme est un organisme vivant vulnérable et fragile soumis à de nombreux « facteurs dégradants » et potentiellement dangereux. Ses systèmes sensitif et nerveux le rendent particulièrement réceptif à la douleur. Aussi a-t-il toujours éprouvé la nécessité de rester « en bonne santé » et de se soigner lorsqu’il tombe malade ou lorsqu’il est blessé. La santé demeure souvent, à ses yeux, un « précieux capital » au point de lui faire dire parfois : « quand la santé va, tout va… ».

 

Il existe un nombre considérable de facteurs qui influent sur la santé (alimentation, conditions d’existence etc). Mais pour ne pas alourdir notre réflexion, nous pourrions réduire ces éléments à :

 

- la respiration (air non pollué) ;

- le repos corporel ;

- la médecine ;

- la pharmacopée (pharmacie) ;

- l’hygiène corporelle ;

- l’accès à l’eau potable ;

- et l’existence d’un système d’évacuation des eaux usées.

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Pas de médecine. Ni d’hygiène corporelle.

 

Sociétés primitives

Guérisseur doté des savoirs (« médicaux ») et hygiène de base. Médecine traditionnelle et pharmacopée élémentaire (plantes médicinales)

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

Développement de la médecine

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème  siècle)

Grands progrès médicaux. Développement de la médecine clinique et allopathique. Essor et généralisation de la prophylaxie et des spécialités médicales. Médicalisation de certaines périodes de l’existence (maternité, naissance, vieillesse). Pharmacopée chimique. Développement et généralisation des laboratoires pharmaceutiques, des professions paramédicales, de la radiothérapie. Généralisation des appareillages électroniques (électrocardiogramme, échographie…). Développement des appareillages d’imagerie « sophistiqués » (scanner, IRM — visualisation interne du corps et du cerveau). Développement des greffes d’organes et des prothèses synthétiques.  

 

Sociétés d’aujourd’hui

Les soins deviennent de plus en plus performants et sophistiqués. Médecine robotisée et informatisée. Pharmacopée chimique synthétique*. Prothèses synthétiques de remplacement. Augmentation considérable des capacités curatives et prophylactiques de la médecine. En dépit de l’apparition (a priori infiniment renouvelable) de nouvelles pathologies (adaptation des bactéries et des virus aux thérapeutiques médicamenteuses), on assiste à d’incessantes « prouesses médicales »…

* En dépit d'un recours accru d'une partie de la population des pays dits « développés » aux médecines qualifiées de « douces » et/ou de « parallèles » (mouvement en partie réactif au « tout allopathique ») : homéopathie, naturopathie etc. Cet  attrait pour les « médecines naturelles » (dans le domaine de la santé) semble analogue à « l'explosion » du « bio » dans le domaine alimentaire (réactif à l'agro-industrie)...

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu un tel développement), nous pouvons dire que les réponses aux besoins de santé ont globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Offre – production – structures

Pendant une très longue période, les Hommes étaient quasiment sans réponse (hormis quelques remèdes médicinaux) face à la maladie et à la douleur. Le domaine de la santé (comme tous les autres domaines) a connu, au fil de son histoire tardive, des progrès considérables : développement de nombreuses spécialités médicales, de la dentisterie, développement de la pharmacie, des activités paramédicales, des appareillages médicaux (radio, échographie, scanner, IRM), de l’asepsie, de la prophylaxie, de la prise en considération de la douleur des patients, développement de la médecine de confort… sans compter les nombreux progrès en matière d’hygiène corporelle avec la généralisation des points d’eau potable au sein de chaque logement, l’émergence, puis la généralisation des toilettes (raccordées au tout-à-l’égout ou à une fosse septique), des salles d’eau puis, des salles de bains où les Hommes ont pu réaliser leurs ablutions (quasi) quotidiennes…

 

Ce secteur (comme tant d’autres) s’est industrialisé… et l’on a assisté au développement d’une offre de soins conséquente et à la fabrication, à grande échelle, de produits allopathiques qui ont permis un accroissement considérable de la qualité de vie et de l’espérance de vie. Notons néanmoins que cette « explosion » des progrès médicaux a engendré son lot d’excès et d’écueils : prophylaxie systématique, prescriptions « à la pelle », nombreux effets iatrogènes inconnus, maladies nosocomiales sans compter la remise en cause d’un certain nombre de médicaments allopathiques, jugés soit inefficaces soit dangereux au fil des découvertes et des avancées de la science médicale.

 

Très majoritairement, le secteur de la santé (au sens strict – autrement dit les soins) est aujourd’hui un domaine mixte (public et privé) dont la qualité des services est parfois très différente. Les professionnels de santé (professions médicales et paramédicales) peuvent exercer « en libéral » ou dans le domaine hospitalier public. Quant aux produits pharmaceutiques, ils sont fabriqués essentiellement par des laboratoires privés dont les recherches demeurent grandement dépendantes des débouchés commerciaux. Les secteurs de la médecine et de la pharmacie sont très fortement régulés par l’Etat (normes très strictes, conventions, standardisation, protocoles, AMM*…).

* Autorisation de Mise sur le Marché octroyée aux médicaments après une batterie de tests « cliniques ».

 

Ces dernières décennies, le secteur de la santé (au sens large, autrement dit l’hygiène, le bien-être, la beauté…) a connu un très fort développement avec l’explosion (entre autres) des produits parapharmaceutiques, des produits de beauté et des produits « anti vieillissement ».

 

 

Demande – consommation – individus

Autrefois (et pendant de très longs siècles), les Hommes étaient à la merci des blessures, des accidents et des pathologies… et totalement impuissants face à la douleur et à la maladie. Au fil des découvertes et des progrès médicaux, la santé est devenue un domaine majeur de l’existence humaine à tel point que les individus la considèrent aujourd’hui  comme la norme, essayant d’éradiquer la moindre gêne ou la moindre douleur en réclamant un confort organique permanent et sans accroc (aspiration au bien-être corporel) et des solutions pour répondre à leurs exigences narcissiques (produits de beauté, chirurgies esthétique et de confort…). Il ne fait aucun doute que la salle de bain et les toilettes individuelles ont représenté une avancée considérable en matière d’hygiène (et de confort). Et fort de ces progrès, depuis quelques années fleurissent, ici et là, chez les particuliers* divers accessoires de bien-être corporel : douche-multi jets, jacuzzi, Spa, sauna et autres gadgets luxueux et inutiles… 

* Les plus fortunés et/ou les plus soucieux de confort…

 

Toutes ces informations générales ne doivent, bien évidemment, pas nous faire oublier les effarantes inégalités en matière sanitaire et d’espérance de vie qui sévissent (et ont toujours plus ou moins sévi) dans le monde où une partie de la population a accès à des soins de santé modernes et performants (et à une kyrielle de médicaments) et une autre partie bénéficie de soins élémentaires (voire parfois d’aucun soin) et continue de souffrir et de mourir d’innombrables pathologies que la médecine serait (pourtant) en mesure de traiter…

 

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer la satisfaction des besoins et des désirs en matière de santé de façon sécurisée et permanente et de façon aussi rapide, simple, confortable et intelligente que possible (selon les capacités et possibilités offertes par les savoirs et la technique) et assurer l’amélioration des réponses (leur fabrication, leur accès et leur utilisation) en matière de rapidité, de simplicité, de durabilité, de sécurité, de confort et de possibilités nouvelles*… (avec amélioration continue de l’amélioration – cycle infini…).

* Ainsi qu’en matière de satisfaction, de plaisir, de bonheur, de joie et de beauté qu’elles peuvent offrir…

 

Eléments pour une analyse « théorique* » plus fine et plus profonde

- l’Homme est une forme énergétique vivante complexe perceptive complexe préconsciente

- les cellules, les bactéries et les virus sont des formes énergétiques vivantes élémentaires.

* Voir les éléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde de la rubrique « alimentation ».

 

Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

- l’émergence permanente de nouvelles pathologies en lien avec le mode de vie, « l’apparition » de nouvelles bactéries et de nouveaux virus…

- la dimension éthique (en matière de manipulations génétiques – leur utilisation – et d’implantation de systèmes synthétiques dans le corps)

- le vieillissement de la population humaine

- l’accroissement de l’espérance de vie

- la répartition géographique des professionnels de santé

- le mode d’organisation, de production, d'échanges et de consommation de santé

- le désir des individus de « vivre plus vieux » et toujours « en bonne santé » et de « vivre sans douleur » (besoin de confort organique)

 

Evolutions actuelles

- émergence des robots-chirurgiens, des cellules souches pour les prothèses organiques

- émergence des possibilités de réaliser des interventions chirurgicales à distance  

- remplacement progressif des organes et des systèmes physiologiques par des produits de synthèse (prothèse) ou des systèmes de synthèse

- Suppression de la douleur

 

Evolutions possibles et directions probables

- suppression de la douleur en ne « conservant » que les caractéristiques plaisantes de la sensibilité

- permettre de « vivre plus vieux » sans douleur et « en bonne santé »

- modifications génétiques pour diminuer la survenance des pathologies, les risques pathologiques, « accroître » la santé. Et modifications génétiques pour augmenter la satisfaction et le confort du psychisme

- transhumanisme synthétique corporel généralisé au cours de l’existence ou dès la naissance (renouvellement permanent des organes et des systèmes physiologiques), capable de neutraliser les agressions pathogènes

- transhumanisme chimique corporel généralisé au cours de l’existence ou dès la naissance (renouvellement permanent des substances chimiques, hormonales etc nécessaires au bon fonctionnement physiologique et des systèmes chimiques), capable de neutraliser les agressions pathogènes

- augmentation substantielle de l’espérance de vie — cryonie…

 

Evolutions à très long terme

- successeur de l’imprimante 3D qui pourrait créer (de façon quasi immédiate) tous les objets possibles (objets synthétiques, objets organo-synthétiques…)

- suppression progressive de la dimension organique du corps

- fabrication d’un corps totalement synthétique (avec un défi sans doute irréalisable : le cerveau) si l'on parvient à fabriquer une prothèse cérébrale qui remplacerait parfaitement le cerveau alors le psychisme vivrait une révolution totale (sauf peut-être le ressenti de l’Être…)

- fabrication d’un corps immatériel (avec le problème que pose la transformation du synthétique en système non matériel)

- l’énergie « pure » pourrait devenir le seul besoin de santé nécessaire

 

Objectif idéal (implicite)

- éradication totale de la douleur et du besoin de santé avec passage de la forme organique vers le synthétique, voire vers une forme immatérielle

 

 

Perspectives*

* Voir les perspectives de la rubrique « alimentation ».

 

Sociétés de demain

- généralisation des logiciels de diagnostics médicaux

- généralisation de la médecine informatisée et robotisée

 

Sociétés d’après demain

Généralisation des robots médicaux, des organes synthétiques et des substances chimiques (transhumanisme corporel synthético-chimique curatif, prophylactique et de remplacement). Et émergence d’un kit de santé synthético-chimique destiné à lutter contre les pathologies

 

Sociétés à moyen terme

- développement des pilules synthético-chimiques et des appareillages synthético-chimiques avec disparition progressive de la douleur. Développement et amélioration du kit de santé synthético-chimique

- généralisation des pilules synthético-chimiques et des appareillages synthético-chimiques avec quasi disparition de la douleur. Généralisation du kit de santé synthético-chimique et développement d’un kit de santé synthético-chimique intégrable, destiné à lutter contre les pathologies et à réparer et à remplacer certains organes synthétiques (kit de santé prophylactique, curatif et de réparation)

 

Sociétés à long terme

- pilules de synthèse et appareillages fabriqués quasi individuellement par éventuel successeur de l’imprimante 3D, capable de fabriquer de « l’organique » génétiquement modifié, de l’organo-synthétique et du synthétique « pur ». Robot chirurgien personnel avec quasi éradication de la douleur. Généralisation du kit de santé synthético-chimique intégrable et émergence et développement d’un kit de santé immatériel

- pilules de synthèse et appareillages intégrés directement au corps (transhumanisme corporel synthético-chimique) intelligents, capables de s’adapter et de créer des remparts aux nouvelles pathologies, capables de créer eau et oxygène (si encore nécessaire) et de remplacer « ce qui a besoin de l’être » quasi instantanément avec éradication totale de la douleur. Et généralisation du kit de santé immatériel

- éradication du besoin de santé et/ou prophylactique, soins et réparations immatériels intracorporels immédiats (transhumanisme corporel immatériel)

 

 

La santé (suite) : les réponses aux besoins d’eau, d’air et de sols (non pollués)

 

Généralités

L’Homme est un organisme vivant vulnérable et fragile soumis aux besoins vitaux respiratoire et hydrique. Il est sensible au degré de pollution de l’air, de l’eau et de son environnement terrestre… Pollutions qui peuvent avoir de substantielles conséquences sur sa qualité de vie et sa santé.

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Eau : rivière

Air : aucune pollution

Système d’évacuation : nature

 

Sociétés primitives

Eau : rivière et puits

Air : aucune pollution

Système d’évacuation : nature (enfouissement)

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

Eau : bassins et réserves d’eau (plus ou moins potable)

Air : aucune pollution notable

Système d’évacuation : nature (enfouissement dans les campagnes et évacuation sur la voie publique dans les villes)

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

Eau : assainissement des bassins et réserves d’eau potable, développement et généralisation des canalisations d’eau potable avec plusieurs points d’accès dans les foyers

Air : fort développement de la pollution atmosphérique engendrée par l’ensemble des activités humaines

Système d’évacuation : développement et généralisation des toilettes, des fosses septiques et des égouts avec problème de pollution des sols, des rivières et des nappes phréatiques

 

Sociétés d’aujourd’hui

Eau : mesures anti-pollution, lutte contre le gaspillage, amélioration de l’accès à l'eau des populations sans eau potable

Air : généralisation de la pollution atmosphérique à l’échelle planétaire (particules, gaz à « effet de serre » etc etc.)

Système d’évacuation : système de tout à l’égout (avec quelques mesures écologiques), amélioration du système d’évacuation des déchets pour les populations sans système d’évacuation

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu un tel développement), nous pouvons dire que les réponses aux besoins en eau potable, en air et en sols non pollués ont globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Offre – production – structures

L’accès à l’eau potable, la qualité de l’air et des sols ont connu, au fil de l’histoire, des changements considérables. D’abord (et pendant très longtemps), l’eau était peu propice à la consommation (mares, rivières, fleuves). Puis, les Hommes ont progressivement assaini l’eau pour la rendre potable. Ils ont développé des réseaux d’approvisionnement en eau potable et des réseaux d’évacuation des déchets organiques et des eaux usées (urines et déjections). Puis, ils ont développé des réseaux de traitement et d’assainissement des eaux usées. En dépit de ces progrès, une part importante de la population humaine n’a toujours pas accès à l’eau potable (qui reste très inéquitablement répartie à l’échelle planétaire). Le progrès technique, le développement industriel et agricole et le mode de vie des populations ont contribué, de façon concomitante, à polluer l’air, les sols, les rivières, les fleuves et les réserves en eau douce mais également les mers et les océans... 

 

En général, les secteurs de l’eau et de l'évacuation des déchets organiques sont aujourd’hui un domaine mixte (public et privé) soumis à des normes plus ou moins sévères en matière d’hygiène. 

 

Notons que dans les pays « riches », on a assisté, ces dernières décennies, à une forte hausse des réglementations et des mesures anti-pollution dans tous les domaines et secteurs d’activités (en particulier dans les secteurs de l’énergie, de l’agriculture, des transports et de l’industrie). Mais il convient de souligner que ces différentes réformes se cantonnent (pour l’essentiel) à des « mesurettes ». Elles révèlent (le plus souvent) la velléité des autorités(1) en matière d’écologie qui s’avère absolument impropre (si j’ose dire !) à stopper et à enrayer les dommages environnementaux et sanitaires toujours plus nombreux et conséquents… Aussi, en dépit d’accords internationaux(2) et des voix alarmistes d’une partie de la communauté scientifique, la volonté internationale reste mollassonne… et les Etats et les nations bien trop occupés à défendre leurs intérêts économiques… pour qu’advienne une véritable politique en matière écologique…

(1) Les Etats montrent, en effet, peu d’enthousiasme à prendre (sérieusement) en considération le paramètre écologique. Au vu des coûts engendrés par ces mesures et au regard de la marche industrielle et consumériste des pays émergents (et en développement) qui « rattrapent » à grands pas « leur retard » en matière de développement économique en participant, eux aussi, de plus en plus activement à la pollution terrestre, les Etats sont assez peu enclins à prendre de véritables mesures et à engager des réformes drastiques...

(2) Accords de principe pour donner le sentiment à la population que la pollution est une priorité pour les autorités nationales et les organismes internationaux…

 

Demande – consommation – individus

Autrefois, les individus étaient tributaires des points d’eau naturels et s’installaient souvent à proximité d’une source (rivière, fleuve…). Aujourd’hui, l’eau potable est devenue la norme et une exigence (compréhensible) des populations. Et de nos jours, beaucoup luttent encore pour y avoir accès... De la même façon, dans de nombreuses régions du monde, l’évacuation des déchets reste une problématique majeure en matière de santé publique. Mais en dépit de la marche industrielle forcée du monde (et de son impact délétère sur l’environnement), la tendance est à la prise de conscience (progressive) de la nécessité du respect environnemental et à la (légitime) revendication pour une qualité de vie meilleure qui passe nécessairement par une qualité (minimale) de l’eau, de l’air et des sols…

 

Toutes ces informations générales ne doivent, bien évidemment, pas nous faire oublier les effroyables inégalités en matière de qualité de vie qui sévissent dans le monde où une partie de la population bénéficie de normes(1) et de mesures antipollution et une autre partie vit dans un environnement vicié et pollué, facteur de pathologies diverses et de mortalité(2).

(1) En matière de qualité de vie.

(2) Sans compter les « pays poubelles » chargés de recycler les objets de consommation des pays « riches » en « fin de vie » (souvent constitués de matériaux très polluants et/ou toxiques), activité très néfaste pour la santé des populations et l’environnement…

 

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer la satisfaction des besoins et des désirs en matière d’eau (potable), d’air (pur) et de sols et sous-sols (non pollués) de façon sécurisée et permanente et de façon aussi rapide, simple, confortable et intelligente que possible (selon les capacités et possibilités offertes par les savoirs et la technique) et assurer l’amélioration des réponses (leur fabrication, leur accès et leur utilisation) en matière de rapidité, de simplicité, de durabilité, de sécurité, de confort et de possibilités nouvelles*… (avec amélioration continue de l’amélioration – cycle infini…).

* Ainsi qu’en matière de satisfaction, de plaisir, de bonheur, de joie et de beauté qu’elles peuvent offrir…

 

Eléments pour une analyse « théorique* » plus fine et plus profonde

- l’Homme est une forme énergétique vivante complexe perceptive complexe préconsciente

- l’eau, l’air et la terre sont des formes énergétiques physiques élémentaires et peuvent constituer l’habitat de formes énergétiques vivantes élémentaires, de formes énergétiques vivantes non perceptives et de formes énergétiques vivantes complexes perceptives.

* Voir les éléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde de la rubrique « alimentation ».

 

Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

- la raréfaction des ressources en eau

- la pollution de l’eau (et des mers et des océans) par les activités humaines (agriculture, industrie, mode de vie…)

- la répartition inégalitaire des ressources en eau

- le non accès à l’eau potable d’une partie de la population humaine

- l’inexistence de réseaux d’évacuation des déchets organiques

- l’inexistence de réseaux d’approvisionnement en eau potable

- l’inexistence de réseaux de traitement et d’assainissement des eaux usées

- la pollution de l’air

- la pollution des sols et des sous-sols

- le mode de vie urbain contemporain

- la dimension éminemment préjudiciable (en matière environnementale) de l’industrie et de l’ensemble des activités humaines 

 

Evolutions actuelles

- baisse (timide) de la dimension polluante des activités humaines (air, eau, sol et sous-sols)

- permettre à chaque individu d’avoir accès à l’eau potable et à un réseau d’élimination des déchets non polluant (avec des obstacles majeurs comme, par exemple, les comportements d’appropriation (sans doute provisoires) de l’eau de certaines nations ou organisations industrielles)

 

Evolutions possibles et directions probables

- fabriquer une eau « artificielle » et un oxygène « artificiel » infiniment renouvelables

- production et consommation hydriques autonomes (par foyer et/ou petite communauté) avec création d’un cycle vertueux de récupération et d’assainissement (bassins végétaux et chimie propre pour filtrage)

 

Evolutions à très long terme

- fournir au corps un apport hydrique sous forme de molécules de synthèse

- transformation du corps organique en corps synthétique sans besoin hydrique

- fournir au corps un apport d’oxygène sous formes de molécules de synthèse

- transformation du corps organique en corps de synthèse sans besoin d’oxygène

- disparition progressive de la dimension polluante des activités humaines (et/ou post-humaines) jusqu’à l’éradication de toute pollution

 

Objectif idéal (implicite)

- éradication totale des besoins en eau et en oxygène.

 

 

Perspectives*

* Voir les perspectives de la rubrique « alimentation ».

 

Sociétés de demain

Eau : désalinisation de l’eau de mer, création d’un cycle autonome vertueux de l’eau de récupération et d’assainissement au niveau local. Et poursuite des mesures anti-pollution, de la lutte contre le gaspillage et de l’amélioration de l’accès à l’eau des populations

Air : aggravation de la pollution atmosphérique. Et mesures anti-pollution

Système d’évacuation : développement des toilettes sèches. Et dépollution du système de tout à l’égout par filtrage écologique

 

Sociétés d’après demain

Eau : développement des cycles autonomes vertueux de l’eau de récupération et d’assainissement au niveau local

Air : développement des mesures anti-pollution

Système d’évacuation : généralisation des toilettes sèches et de la dépollution du système de tout à l’égout par filtrage écologique

 

Sociétés à moyen terme

Eau : généralisation des cycles autonomes vertueux de l’eau de récupération et d’assainissement au niveau local. Emergence de la fabrication d’une eau « artificielle ». Développement de molécules de synthèse hydriques intégrables au kit alimentaire ou au kit de santé

Air : généralisation des mesures anti-pollution avec impacts positifs

Système d’évacuation : dépollution du système de tout à l’égout par filtrage écologique implanté au niveau local. Emergence d’un kit d’évacuation synthético-chimique. Diminution des besoins d’évacuation du corps (en partie par la transformation des apports alimentaires). Développement et amélioration du kit d’évacuation synthético-chimique intégrable

 

Sociétés à long terme

Eau : généralisation des molécules de synthèse hydriques intégrables au kit de santé ou au kit alimentaire intégrable. Emergence et développement d’une fabrication hydrique immatérielle —molécules de synthèse hydriques intégrées directement au corps (transhumanisme corporel synthético-chimique). Généralisation de la fabrication hydrique immatérielle intégrée au kit alimentaire ou au kit de santé immatériel. Eradication du besoin hydrique et/ou apports hydriques immatériels intracorporels — transhumanisme corporel immatériel

Air : disparition progressive de la pollution atmosphérique

Système d’évacuation : poursuite de la diminution des besoins d’évacuation du corps et récupération d’une partie des déchets pour réutilisation « corporelle » après avoir été transformés en énergie. Généralisation et amélioration du kit d’évacuation intégrable et émergence d’un kit d’évacuation immatériel. Généralisation de la transformation intracorporelle des déchets, toujours plus résiduels, pour être transformés en énergie avec (éventuelle) vidange occasionnelle des résidus non transformables. Et généralisation du kit d’évacuation immatériel. Eradication du besoin d’évacuation des déchets et/ou transformation des résidus par mécanisme intracorporel immatériel en énergie « pure » (transhumanisme corporel immatériel)

 

 

Le logement : les réponses aux besoins de logement

 

Généralités

L’Homme est un organisme vivant vulnérable et fragile qui éprouve le besoin de « se réfugier » dans un abri ou une zone abritée pour s’isoler des conditions climatiques (essentiellement température, vent et pluie), des agressions potentielles animales et humaines mais également « des yeux » de ses congénères. Avec sa sédentarisation, le logement va devenir un lieu essentiel que l’Homme associe très vite à l’idée de protection, d’espace privé et de « chez soi » où il peut s’adonner, dans l’intimité des murs, aux activités de son choix…

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Grottes et abris naturels

 

Sociétés primitives

Grottes, huttes et abris rudimentaires

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

Maisons individuelles, bâtisses sans grand confort*

* Les châteaux forts, les forteresses et les palais ne figurent pas dans cette rubrique car ces « logements » ne concernaient qu'une très infime partie de la population (ils étaient, en effet, réservés aux « puissants », aux nantis et autres « seigneurs »...).

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

Immeubles, buildings, maisons avec confort

 

Sociétés d’aujourd’hui

Habitat individuel (accession à la propriété) plus écologique avec trois tendances :

La « folie des grandeurs » (luxe, bien-être et démesure) et l'émergence des grandes tours d’habitation (très hauts gratte-ciels), le « simple, petit et écologique » et principalement le « moche, uniforme et à bas coût » (efflorescence des lotissements périurbains)

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

 

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu un tel développement), nous pouvons dire que les réponses aux besoins de logement ont globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Offre – production – structures

Comme tous les secteurs (et toutes les « activités humaines »), le logement a connu, au fil de l’histoire, des progrès considérables : grotte, hutte, cabane, maison, immeuble, building, gratte-ciel, tour gigantesque… Les villes ont dû trouver (bien évidemment) des solutions appropriées au manque d’espace… les immeubles, vous en conviendrez, n’ont sans doute pas été créés à l’origine dans un simple souci d’esthétisme architectural…

 

Les matériaux de construction sont devenus de plus en plus résistants et performants (en matière d’isolation essentiellement thermique (mais aussi phonique) : fibres végétales, rondins de bois, planches, pierres, torchis, ciment, béton, acier, béton armé… Les matériaux intérieurs ont connu une évolution identique (agrémentée d’une touche décorative) : sol de terre battue, parquet, tapisserie, placoplatre, dallage, revêtement des sols, moquette, linoléum, peinture… Notons enfin que la sophistication de l’aménagement intérieur et la généralisation des installations d’arrivées d’eau, de gaz et d’électricité ont achevé (provisoirement) d’offrir au logement toute sa fonctionnalité en permettant les commodités essentielles (et de nos jours, presque partout, considérées comme élémentaires) – toilettes et salle de bain.

 

Le logement est généralement aujourd’hui un domaine régulé par un marché de type capitaliste avec une offre privée (entreprises de BTP(1), promoteurs immobiliers, agences immobilières, ventes et locations de particuliers…). Il est également soumis (en général) à des normes et des règlements en matière d’implantation(2), de construction(2) et d’isolation thermique (et parfois à des normes sismiques dans les régions à risque…).

(1) Bâtiment et Travaux Publics.

(2) Notons, à ce titre, que dans les pays dits « développés », la législation actuelle se montre totalement réfractaire et particulièrement intraitable en matière « d’implantations sauvages » en interdisant ce que d’aucuns (sans doute des technocrates habitant de luxueux et très confortables habitats), appellent la « cabanisation du territoire ». Ainsi, avec les crises économiques récurrentes, la hausse du prix des loyers, l’inaccessibilité à la propriété, le développement des logements dits « précaires » (yourtes, mobiles homes, cabanes « faites maison » (si j’ose dire…) etc etc) en des endroits plus ou moins « retirés » (et non reliés aux réseaux d’eau et d’électricité) a été freiné (et voire même chahuté (si j’ose dire !) dans ses fondations)… et un grand nombre d’entre eux a été proscrit et « démantelé » manu militari…

 

Un mot (un petit mot) sur les logements sociaux (les parcs HLM(1)), censés offrir un habitat aux individus et familles « modestes » dans les pays dits « développés ». Ils connaissent (en général) un grand nombre de difficultés (insuffisance numéraire(2), « passe-droit », taux de rotation très faible etc etc.) et ne remplissent pas (en général) les missions dont ils ont la charge…

(1) Habitation à Loyer Modéré.

(2) Malgré l’existence (parfois) de quotas par commune...

 

Demande – consommation – individus

Autrefois, les individus habitaient dans des logements simples (élémentaires et sans fioriture). Au fil du progrès technique, le logement est devenu un lieu central dans la vie des Hommes. Aujourd’hui, la très grande majorité des individus aspire à un logement confortable et « à leur image ». L’accession à la propriété demeure, à leurs yeux, un projet de vie essentiel*. Les Hommes consacrent également beaucoup de temps, d’argent et d’énergie à leur logement pour le rendre confortable, douillet et agréable à vivre (bricolage, décoration intérieure, espace paysager et jardins…).

* Avoir enfin son « chez soi » à soi…

 

Nous ne pouvons omettre de souligner, dans cette rubrique, la très forte croissance, depuis une quinzaine d’années, des personnes sans domicile(1) (SDF(2)) dans les grandes agglomérations des pays dits « développés ». Faute de logement(3), ils s’installent, bon gré mal gré, un peu partout où ils ne sont pas (trop) rejetés : trottoirs, parcs, bois, bretelles d’autoroute etc etc…

(1) Mais également des camps (bidons-villes) et des migrants « en transit »…

(2) Sans Domicile Fixe.

(3) Malgré un nombre très élevé de logements vacants, les propriétaires sont très réticents à louer au « tout venant » et (en général) très exigeants dans la « sélection » des locataires (ainsi, par exemple, outre un nombre très élevé de garanties, il est communément admis, dans certaines régions, que le revenu doit représenter quatre fois le montant du loyer…) no comment !

 

Toutes ces informations générales ne doivent, bien évidemment, pas nous faire oublier les inégalités en matière de logement qui sévissent (et ont toujours plus ou moins sévi) dans le monde où une partie de la population vit, de façon luxueuse, dans des habitats gigantesques et ultra confortables et une autre partie vit misérablement dans des taudis (sans compter, bien sûr, ceux qui vivent « à la rue ») en s’entassant dans quelques mètres carrés sans le moindre confort…

 

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer la satisfaction des besoins et des désirs en matière de logement de façon sécurisée et permanente et de façon aussi rapide, simple, confortable et intelligente que possible (selon les capacités et possibilités offertes par les savoirs et la technique) et assurer l’amélioration des réponses (leur fabrication, leur accès et leur utilisation) en matière de rapidité, de simplicité, de durabilité, de sécurité, de confort et de possibilités nouvelles*… (avec amélioration continue de l’amélioration – cycle infini…).

* Ainsi qu’en matière de satisfaction, de plaisir, de bonheur, de joie et de beauté qu’elles peuvent offrir…

 

Eléments pour une analyse « théorique* » plus fine et plus profonde

- l’Homme est une forme énergétique vivante complexe perceptive complexe préconsciente

- l’habitat est une forme énergétique matérielle synthétique qui abrite des formes énergétiques physiques élémentaires, des formes énergétiques vivantes élémentaires et qui peut abriter des formes énergétiques vivantes complexes et des formes énergétiques vivantes perceptives.

* Voir les éléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde de la rubrique « alimentation ».

 

Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

- la Terre est un monde fini (et donc limité)

- le manque d’espace

- l’utilisation de matériaux de construction non polluants et non nocifs pour la santé

- les « règles » de plus en plus drastiques en matière de construction et d’implantation

- la « saturation » des zones urbaines

 

Evolutions actuelles

- logements de plus en plus écologiques, autonomes (en eau, en énergie, en système de retraitement des eaux usées et des déchets domestiques) et proches des « bienfaits de la nature » (mais sans ses désagréments)

- logements de plus en plus personnalisés (littéralement à « l’image même » de ses habitants…) en dépit de l’uniformisation des logements à bas coût construits par les promoteurs (pour réduire les coûts de fabrication)

- permettre à chaque individu d’avoir accès à un logement

- logement fonctionnel de petite taille avec tout confort – les micro-maisons (« small is beautiful »)

- logements de plus en plus intelligents, gadgétisés et de plus en plus sécurisés, avec énergie renouvelable et autonome et lieux dédiés au bien-être du corps

 

Evolutions possibles et directions probables

- logements de plus en plus intelligents, gadgétisés et de plus en plus sécurisés (avec systèmes de protection de plus en plus performants, neutralisant toutes les entrées qui protégeraient contre les agressions et les interactions avec les formes non désirées (individus, animaux, insectes, pollens, poussières, bactéries…), avec énergie renouvelable et autonome et lieux dédiés au plaisir et au bien-être 

- logements adaptés à tous les environnements (sur l’eau, sous l’eau, dans les airs, dans l’espace) qui permettraient d’habiter l’espace (le système solaire puis — à terme — l’Univers)

- logements en kit préfabriqués (montage facile et rapide)

- imprimante 3D qui réaliserait « tous les désirs » en matière de construction et de logement

 

Evolutions à très long terme

- successeur de l’imprimante 3D qui pourrait créer (de façon quasi immédiate) tous les objets possibles (objets synthétiques) dont la maison et son équipement

 

Objectif idéal (implicite)

- éradication du besoin en logement avec passage de la forme organique vers le synthétique, voire vers une forme immatérielle

 

 

Perspectives*

* Voir les perspectives de la rubrique « alimentation ».

 

Sociétés de demain

Développement des habitats fonctionnels « tout confort » et écologiques, de plus en plus autonomes en matière énergétique et de plus en plus intelligents en matière de gestion du confort domestique et de protection contre les intrusions

 

Sociétés d’après demain

Généralisation des habitats totalement autonomes en énergie et en eau, avec lieux dédiés au bien-être, de plus en plus robotisés et informatisés avec systèmes de protection de plus en plus sophistiqués contre tous types d’intrusion et d’agression (individus, animaux, insectes, pollens, poussières, bactéries…)

 

Sociétés à moyen terme

- développement des logements totalement autonomes et quasi hermétiques, adaptés à tous les environnements (sur l’eau, sous l’eau, dans l’air, dans l’espace…)

- généralisation des logements totalement autonomes, intelligents, « tout confort » et quasi hermétiques, adaptés à tous les environnements. Et émergence d’un kit de fabrication synthético-chimique

 

Sociétés à long terme

- fabrication d'habitats autonomes, hermétiques, intelligents par successeur de l’imprimante 3D intégrable progressivement à une combinaison polyvalente. Et émergence d’un kit de fabrication immatériel(le)

- sorte d’imprimante 3D ultra miniaturisée intégrée à la combinaison capable de créer tout objet dont un habitat dans tous types d’environnement de façon quasi immédiate. Et généralisation du kit de fabrication immatériel(le)

- éradication du besoin de logement et/ou création d’une sorte de bulle immatérielle protectrice, intelligente, adaptable et évolutive, capable de s’adapter à tous les types d’environnement (y compris l’espace bien sûr) et de créer des remparts neutralisants contre tous les types d’agression (climatique, pathogène, attaques diverses…)

 

 

Les tâches et le confort domestiques : les réponses aux besoins domestiques

 

Généralités

 

Les tâches domestiques ont toujours constituées une part substantielle du travail humain. Elles ont trait essentiellement à trois domaines principaux :

- la préparation des repas (et, accessoirement, le ravitaillement(1) en denrées et en produits nécessaires(2) – appelés, autrefois, produits de « première nécessité(2) »);

- le lavage du linge ;

- et le nettoyage du foyer (intérieur et extérieur).

(1) Ce que les Hommes appellent, aujourd'hui, « faire les courses » (en particulier, dans les pays dits « développés »)... De nos jours, « les courses » se font, en général, au marché et/ou dans les supermarchés et hypermarchés(A), autrefois, elles se faisaient à la ferme « d'à-côté(B) » et/ou à l'épicerie « du coin » et, il y a plus longtemps encore, dans le jardin familial ou communautaire(B)...)...

(A) Sans compter l'efflorescence actuelle de l'hypermarché-drive, des courses en ligne et autres livraisons à domicile (nouvelles « façons » émergentes de « faire les courses »)...

(B) Notons que le terme « faire les courses » est peut-être (sans doute ?) anachronique pour évoquer le ravitaillement en provisions à ces époques (lointaines ou ancestrales)...

(2) Ce qui apparaît nécessaire aujourd'hui n'existait pas et/ou était considéré, autrefois, comme superflu... 

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Préparation des repas : inexistant ou rudimentaire (repas après la chasse (et/ou la pêche) ou la cueillette)

Nettoyage du linge : inexistant

Nettoyage du foyer : inexistant ou rudimentaire

 

Sociétés primitives

Préparation des repas : rudimentaire, cuit au feu (bois, bouses…)

Nettoyage du linge : à la main (avec procédés naturels)

Nettoyage du foyer : ustensiles de base (manuels)

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

Préparation des repas : développement des fours et des instruments de cuisson

Nettoyage du linge : à la main (avec procédés naturels et/ou synthético-naturels)

Nettoyage du foyer : ustensiles de base (manuels)

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

Préparation des repas : développement et généralisation des appareils et ustensiles robotiques

Nettoyage du linge : développement et généralisation de la machine à laver

Nettoyage du foyer : développement et généralisation des appareils électroménagers

 

Sociétés d’aujourd’hui

Préparation des repas : deux tendances : plats « prêts à l’emploi » rapide(s) et repas bio avec préparation

Nettoyage du linge : automatisé et sèche linges

Nettoyage du foyer : robotisé et de plus en plus informatisé (avec commande à distance)

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu une telle évolution), nous pouvons dire que les réponses aux besoins domestiques ont globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Offre – production – structures

Des premiers ustensiles de cuisine et de nettoyage (« récipients » végétaux, cendres, sable, fagots…) à l’équipement « high-tech » contemporain (avec connexion et commande à distance du four, du thermostat, de la porte du garage en passant par tous les éléments électroménagers, l’ordinateur et tutti quanti…), le domaine des tâches domestiques a indéniablement évolué. Et a connu, au fil de son histoire toujours assez tardive, des progrès considérables en matière de conservation des aliments (réfrigérateur, congélateur) et en matière d’aides robotisées à la préparation des repas, au nettoyage des ustensiles, du linge et de la maisonnée avec la généralisation de l’électroménager auquel on intègre aujourd’hui des formes d’intelligence artificielle plus ou moins sophistiquées (actionnables à distance, réalisation automatique des tâches etc etc). Notons également que la généralisation des réseaux d’accès à l’eau potable, de gaz de ville et d’électricité a véritablement constitué une « révolution » dans le confort des foyers… et a posé les linéaments sur lesquels l’amélioration quasi incessante du confort s’est construit…

 

Les secteurs de l’équipement ménager, de l’ameublement et des produits d’hygiène sont aujourd’hui des domaines régulés par un marché de type capitaliste. Et sont soumis à des normes plus ou moins strictes en matière de sécurité. Notons (entre parenthèse) que, de nos jours, les industriels de l’électroménager (parmi bien d’autres), soucieux de vendre toujours plus (et plus fréquemment), ont élaboré l’obsolescence programmée(1) et toutes sortes de stratégies marketing et commerciales qui inondent tous les supports publicitaires et tous les espaces afin de « toucher » toutes les niches et tous les marchés en incitant tous les individus à consommer les innombrables « nouveaux produits(2) » qu’ils ne cessent « d’inventer » et de fabriquer…

(1) Avec des techniques qui visent à réduire la durée de vie d'un produit pour augmenter son taux de remplacement.

(2) Dont l’utilité est souvent fort discutable…

 

Demande – consommation – individus

Autrefois, les tâches ménagères occupaient un temps considérable dans la vie des Hommes (enfin disons plutôt dans la vie des femmes*…). Au fil des progrès, le confort domestique s’est accentué. Et les êtres humains sont devenus de moins en moins enclins à s’en occuper... La tendance actuelle est à la simplification outrancière et à l’éradication de toute pénibilité. Les tâches doivent être réalisées rapidement et de façon simple et automatisée. On assiste également depuis quelques années à l’émergence de produits (en particulier de produits ménagers et électroménagers) plus écologiques (moins néfastes pour l’environnement et moins « énergivores »).

* Nous écrivons cela, bien évidemment, sans la moindre pointe phallocratique…

 

Toutes ces informations générales ne doivent, bien évidemment, pas nous faire oublier les inégalités en matière de conditions de vie qui sévissent (et ont toujours plus ou moins sévi) dans le monde où une partie de la population vit de façon éminemment confortable en bénéficiant de tous les gadgets dédiés au confort et une autre partie vit de façon rudimentaire et sans le moindre confort…

 

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer la satisfaction des besoins et des désirs en matière de confort domestique et de réalisation des tâches ménagères de façon sécurisée et permanente et de façon aussi rapide, simple, confortable et intelligente que possible (selon les capacités et possibilités offertes par les savoirs et la technique) et assurer l’amélioration des réponses (leur fabrication, leur accès et leur utilisation) en matière de rapidité, de simplicité, de durabilité, de sécurité, de confort et de possibilités nouvelles*… (avec amélioration continue de l’amélioration – cycle infini…).

* Ainsi qu’en matière de satisfaction, de plaisir, de bonheur, de joie et de beauté qu’elles peuvent offrir…

 

Eléments pour une analyse « théorique* » plus fine et plus profonde

- l’Homme est une forme énergétique vivante complexe perceptive complexe préconsciente

- les instruments et appareillages domestiques peuvent être des formes énergétiques physiques naturelles ou des formes énergétiques matérielles synthétiques.

* Voir les éléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde de la rubrique « alimentation ».

 

Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

- l’aspiration à « la facilité »

- le désir de sécurité

 

Evolutions actuelles

- équipements ménagers de plus en plus intelligents, polyvalents (baisse de la pénibilité des tâches, voire entièrement réalisées par des robots)

- ordinateur central qui permet d’effectuer toutes les tâches (à distance) et de régler certains paramètres à partir d’un boîtier (ou d’un smartphone)

 

Evolutions possibles et directions probables

- suppression de toutes les tâches domestiques entièrement réalisées par des robots intelligents et polyvalents

- les repas se prépareront immédiatement et de façon autonome, le linge sera autonettoyant, la maison sera autonettoyante

- le boîtier se transformera peu à peu en gadget que l’on « aurait toujours sur soi » puis, pourra peut-être, être intégré au corps (ou au cerveau) — transhumanisme immatériel cérébral (« l’intention » du cerveau pourrait impulser, par exemple, un courant électrique qui actionnera des capteurs installés sur tous les appareils)

 

Evolutions à très long terme

- suppression totale des tâches domestiques

- accession automatique au confort domestique

 

Objectif idéal (implicite)

- éradication des tâches domestiques

 

 

Perspectives*

* Voir les perspectives de la rubrique « alimentation ».

 

Sociétés de demain

Développement de la robotique informatisée télécommandable à distance s’occupant de la préparation des repas et du nettoyage du linge et de la maisonnée

 

Sociétés d’après demain

Généralisation de la robotique informatisée télécommandable à distance s’occupant de la préparation des repas et du nettoyage du linge et de la maisonnée

 

Sociétés à moyen terme

Développement et généralisation des objets intelligents autonomes et autonettoyants

 

Sociétés à long terme

Eradication des tâches domestiques

 

 

L’énergie : les réponses aux besoins d’énergie

 

Généralités

Les Hommes ont toujours éprouvé la nécessité de recourir à l’énergie pour le confort de leur foyer (source de chaleur et de lumière et besoin de cuisson) et pour leurs déplacements. Sources énergétiques absolument indispensables à la vie humaine…

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Confort du foyer : inexistant. Puis feu

Modes de déplacement : énergie physique humaine

 

Sociétés primitives

Confort du foyer : feu, poêle (bois, excréments animaux)

Modes de déplacement : énergie physique humaine et/ou animale

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

Confort du foyer : feu, poêles à bois et à charbon, bougies, lampes à huile pour l’éclairage

Modes de déplacement : énergie animale, vapeur, énergie fossile (charbon), énergie éolienne (bateau à voile(s))

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

Confort du foyer : poêles à bois et à charbon, développement et généralisation de l’électricité (et du gaz) pour l’éclairage et le chauffage

Modes de déplacement : énergie fossile (pétrole) et électricité (réseau ferroviaire)

 

Sociétés d’aujourd’hui

Confort du foyer : deux tendances : électricité nucléaire et énergies propres renouvelables (solaire, éolienne, hydrolienne…). Et renforcement de l’isolation thermique

Modes de déplacement : énergie fossile (pétrole). Et émergence de l’énergie électrique (et solaire) pour les véhicules électriques (et solaires)

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu un tel développement), nous pouvons dire que les réponses aux besoins énergétiques ont globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Offre – production – structures

Le domaine de l’énergie a connu, au fil de l’histoire, des progrès considérables : découverte du feu, des énergies organiques (bois, excréments animaux), des énergies cinétiques naturelles (vent et moulin, rivière et roue à aube), des énergies fossiles (charbon, fioul, pétrole), découverte de l’électricité, du nucléaire, du photovoltaïque, création des barrages hydroélectriques, développement des centrales éoliennes, des centrales hydroliennes, fabrication des lampes à led…

 

Le secteur de l’énergie est aujourd’hui globalement un marché mixte (public et privé). Notons néanmoins que l’on assiste, un peu partout dans le monde (et comme dans, à peu près, tous les domaines), à une forte tendance à la privatisation et à « l’appropriation du marché » par les entreprises privées… Ce secteur est assez fortement régulé par l’Etat. Et est soumis à des règles et des règlements, plus ou moins stricts, en matière d’implantation (forage, centrale électrique), d’exploitation, de qualité et de distribution (avec, parfois, l’existence de prix plafonnés).

 

Demande – consommation – individus

Autrefois (et pendant une longue période), les individus étaient tributaires du feu. L’utilisation du charbon, puis du pétrole et de l’électricité a permis une généralisation de la satisfaction des besoins énergétiques. Aujourd’hui, la diminution des stocks d’énergies fossiles (charbon et pétrole), la pollution occasionnée par leur utilisation, les risques de certaines formes énergétiques (le nucléaire), le développement des énergies propres et renouvelables et la récurrence des crises énergétiques (qui sont plutôt, en l’occurrence, des crises entropiques…) ont amorcé une demande énergétique soucieuse du coût et de l’écologie. La dimension toujours plus énergivore et polluante des activités humaines a ainsi favorisé une progressive prise de conscience de l’utilité des économies d’énergie (par une consommation raisonnée) et la nécessité de développer des énergies propres et renouvelables.

 

Toutes ces informations générales ne doivent, bien évidemment, pas nous faire oublier les inégalités en matière énergétique qui sévissent (et ont toujours plus ou moins sévi) dans le monde où une partie de la population spolie et/ou surconsomme les « matières énergétiques » et une autre partie vit chichement sans bénéficier de l’utilité ni des « agréments » de l’énergie…

 

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer la satisfaction des besoins et des désirs en matière énergétique de façon sécurisée et permanente et de façon aussi rapide, simple, confortable et intelligente que possible (selon les capacités et possibilités offertes par les savoirs et la technique) et assurer l’amélioration des réponses (leur fabrication, leur accès et leur utilisation) en matière de rapidité, de simplicité, de durabilité, de sécurité, de confort et de possibilités nouvelles*… (avec amélioration continue de l’amélioration – cycle infini…).

* Ainsi qu’en matière de satisfaction, de plaisir, de bonheur, de joie et de beauté qu’elles peuvent offrir…

 

Eléments pour une analyse « théorique* » plus fine et plus profonde

- l’Homme est une forme énergétique vivante complexe perceptive complexe préconsciente

- l’énergie est une forme énergétique immatérielle (avec, essentiellement, un support physique ou un support immatériel).

* Voir les éléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde de la rubrique « alimentation ».

 

Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

- la disparition progressive des énergies fossiles (stock limité)

- les besoins énergétiques de plus en plus élevés des activités humaines

- la pollution

- le coût énergétique (en matière financière et en matière environnementale)

- les contraintes technologiques

 

Evolutions actuelles

Energies renouvelables de plus en plus « propres »

 

Evolutions possibles et directions probables

Autonomisation des foyers en matière d'énergie (propre et renouvelable)

 

Evolutions à très long terme

Création d’un système immatériel qui produirait de l’énergie « pure »

 

Objectif idéal (implicite)

Eradication du besoin énergétique avec support (passage vers une forme d’énergie « pure »)

 

 

Perspectives*

* Voir les perspectives de la rubrique « alimentation ».

 

Sociétés de demain

Confort du foyer : généralisation des deux tendances (nucléaire et énergies renouvelables)

Modes de déplacement : développement des véhicules électriques et émergence des véhicules solaires

 

Sociétés d’après demain

Confort du foyer : autonomisation énergétique au niveau local

Modes de déplacement : développement des véhicules solaires (terrestres et spatiaux)

 

Sociétés à moyen terme

Confort du foyer : autonomisation énergétique au sein de chaque foyer et domination des énergies propres et renouvelables. Et balbutiements d’une énergie « pure » immatérielle (sans support)

Modes de déplacement : généralisation des véhicules solaires (terrestres et spatiaux) et émergence des véhicules à énergie « pure »

 

Sociétés à long terme

Confort du foyer : développement et généralisation de cette énergie « pure ». Et intégration de cette énergie « pure » sur le plan individuel (transhumanisme corporel immatériel)

Modes de déplacement : développement et généralisation des véhicules à énergie « pure ». Et intégration de cette énergie « pure » au niveau individuel (transhumanisme corporel immatériel)

 

 

Les transports (des individus et des biens) : les réponses aux besoins de déplacement

 

Généralités

Les Hommes ont toujours éprouvé le besoin de se déplacer. Nécessité vitale pour la survie, en particulier, en matière de chasse et de cueillette pour les premiers Hommes (puis, avec le nomadisme) et, plus généralement, pour vaquer à leurs occupations et satisfaire l’ensemble de leurs besoins. Notons simplement, ici, qu’il existe différents types de transport : transports de personnes et de marchandises. Transports individuels et collectifs.

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Locomotion humaine (marche et course)

 

Sociétés primitives

Marche, locomotion animale, pirogue (pour les populations peuplant le littoral et/ou à proximité d'un cours d'eau) 

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

Marche, locomotion animale, locomotion animale tractée, vélo, train, bateau

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

Développement du train. Emergence des trains à grande vitesse, développement et généralisation des véhicules automobiles individuels et de transport (voitures, camions, semi-remorques). Développement des deux-roues motorisés. Et fort développement des transports aériens et maritimes

 

Sociétés d’aujourd’hui

Véhicule automobile généralisé et véhicule électrique. Transports en commun de plus en plus rapides. Généralisation des avions et émergence des véhicules spatiaux

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu un tel développement), nous pouvons dire que les réponses aux besoins de transport ont globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Offre – production – structures

A l’instar des autres secteurs, le domaine des transports a connu, au fil de l’histoire, des progrès considérables. Les modes de transport (marchandises et personnes) ont permis d’aller de plus en plus loin (et de plus en plus rapidement) sans le moindre effort et dans tous les milieux (terre, eau, air). Et cette expansion s’est accompagnée d’un incroyable développement des réseaux de circulation (en particulier terrestres avec les routes et les voies ferrées) nécessaires au désenclavement des territoires et au commerce (et à sa généralisation). La traction animale (cheval, mulet, âne et autres équidés) a longtemps été le mode de déplacement principal des êtres humains (animal de selle, charrette, diligence…)

 

Ce secteur (comme tant d’autres) s’est industrialisé et a permis le développement d’une offre de transport conséquente et la fabrication à grande échelle de véhicules en tous genres : vélo, scooter, moto, side-car, voiture, fourgon, camionnette, camion, semi-remorque, poids lourd, tramway, train, train à grande vitesse, barque, bateau, cargo, paquebot, ferry, « bateaux usines à croisière », avion, jet, fusée, navette spatiale*.

* Sans compter les jeux mobiles pour les enfants — petits et grands — (véhicules miniatures, patins à roulettes, skate, trottinette classique, trottinette électrique, gyropode, quads etc etc.)

 

Aujourd’hui, le secteur des transports est globalement un domaine régulé par un marché de type capitaliste avec une offre privée. Notons néanmoins que les transports collectifs relèvent parfois (en partie ou en totalité) du domaine public (notons, en aparté, que ce mouvement est depuis quelques années en train (si j’ose dire !) de s’inverser…). Ce secteur est soumis (en général) à des normes assez draconiennes en matière de sécurité et de circulation (avec l’efflorescence de multiples permis, de règles et codes de circulation sur terre, sur l’eau et dans les airs et une kyrielle d’accessoires et d’institutions dédiés à la sécurité des transports (casque, ceinture de sécurité, tour de contrôle de l’espace aérien, PC « route » entre un tas d’autres choses…).

 

Comme pour bien d’autres domaines, au vu de la relative saturation du marché des pays « riches(1) » et du fort potentiel des pays dits « émergents », les constructeurs automobiles (entre autres industriels) ont multiplié les modèles afin de toucher toutes les classes (sociales), tous les revenus et tous les individus, eux aussi, à coups de propagandes publicitaires et de modes totalement artificielles(2) (en promouvant hier, par exemple, la nécessité (fausse, bien évidemment) du 4x4 urbain et aujourd’hui, celle du cross over) afin d’influencer les goûts et les achats de « l’homo automobilus(3) »…

(1) Avec la généralisation des véhicules automobiles (2-3-4 voitures par foyer dans les pays industrialisés)…

(2) Mais toutes les modes ne le sont-elles pas ?

(3) Notons que l’homo automobilus est toujours, plus ou moins, un peu crétinus

 

Demande – consommation – individus

Autrefois, les individus étaient totalement tributaires de leur corps (lenteur et capacité de charge limitée). Au fil des progrès, les modes de locomotion ont permis des déplacements de plus en plus rapides et performants (en matière de distance), de plus en plus sécurisés et confortables avec l’émergence d’une plus grande autonomisation des moyens de déplacement.

 

La tendance actuelle semble globalement se détourner du véhicule comme signe extérieur de richesse, de valorisation narcissique et d’appartenance sociale (qui, dans certaines régions du monde, semble encore – et plus que jamais – d’actualité… sans compter, ici et là, « la mode » ridicule (disons-le) de la personnalisation des véhicules automobiles avec la possibilité de choisir, pour sa petite « choupette* » ou sa grosse « titine* », un toit jaune à pois bleus et des portières noires à rayures vertes pour se distinguer du voisin et « se sentir unique »…) pour se diriger (si j’ose dire ! en matière de transport…), avec les différentes et récurrentes crises énergétiques, vers des véhicules fonctionnels de taille réduite et à faible consommation énergétique.

* Oui ! Certains êtres humains entretiennent des liens « fusionnels » avec leur voiture en l’affublant de surnom ridicule. N’oublions pas que l’homo automobilus est toujours (plus ou moins) un peu crétinus

 

Toutes ces informations générales ne doivent, bien évidemment, pas nous faire oublier les inégalités en matière de transport (et de réseaux de transport) qui sévissent (et ont toujours plus ou moins sévi) dans le monde où une partie de la population bénéficie de tous les véhicules possibles et imaginables et d’infrastructures conséquentes et bien entretenues et une autre partie ne se déplace qu’à la force de ses jambes et/ou grâce à la locomotion animale* en disposant de réseaux de transport éminemment sommaires et/ou délabrés...

* Animaux dont les conditions de vie, entre parenthèse, sont tout aussi effroyables (sinon davantage) que le sort des populations qui les utilisent comme « moyens » de transport…

 

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer la satisfaction des besoins et des désirs en matière de transport de façon sécurisée et permanente et de façon aussi rapide, simple, confortable et intelligente que possible (selon les capacités et possibilités offertes par les savoirs et la technique) et assurer l’amélioration des réponses (leur fabrication, leur accès et leur utilisation) en matière de rapidité, de simplicité, de durabilité, de sécurité, de confort et de possibilités nouvelles*… (avec amélioration continue de l’amélioration – cycle infini…).

* Ainsi qu’en matière de satisfaction, de plaisir, de bonheur, de joie et de beauté qu’elles peuvent offrir…

 

Eléments pour une analyse « théorique* » plus fine et plus profonde

- l’Homme est une forme énergétique vivante complexe perceptive complexe préconsciente

- les moyens de transport sont des formes énergétiques physiques synthétiques.

* Voir les éléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde de la rubrique « alimentation ».

 

Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

- la pollution

- la disparition des énergies fossiles

- l’autonomie des batteries pour les véhicules électriques

- les « nouvelles technologies »

 

Evolutions actuelles

Développement des transports non polluants avec énergie renouvelable

 

Evolutions possibles et directions probables

- généralisation des modes de déplacement ultra rapides et capables d’aller de plus en plus loin, voire capables d’explorer l’espace (système solaire puis — à terme — l’Univers)

- automatisation des déplacements et des règles de circulation (avec la contrainte suivante : les individus aspirent à se déplacer à leur guise et à la vitesse de leur choix…)

 

Evolutions à très long terme

- déplacement instantané (ou quasi instantané) en tous lieux

- téléportation dans des lieux de plus en plus éloignés (voire dans des espaces-temps différents et dans des univers soumis à la temporalité – à des temporalités...)

- téléportation complète du corps (téléportation complète de « tout ce que l’on désire »…)

 

Objectif idéal (implicite)

- éradication du besoin de mobilité (ce qui signifierait « être partout à la fois »…) avec passage de la forme organique vers le synthétique, voire vers une forme immatérielle avec un seuil (un gouffre peut-être infranchissable) : « être partout à la fois et non localisé* »… ce qui semble impossible tant qu’il existe une forme (même immatérielle)…

* Caractéristique de la Conscience...

 

 

Perspectives*

* Voir les perspectives de la rubrique « alimentation ».

 

Sociétés de demain

Développement des véhicules propres et intelligents (navigation plus ou moins entièrement automatisée), de plus en plus autonomes, sécurisés et rapides. Et émergence des véhicules spatiaux

 

Sociétés d’après demain

Poursuite du développement et amélioration des véhicules propres et intelligents (navigation plus ou moins entièrement automatisée), de plus en plus autonomes, sécurisés et rapides. Emergence des véhicules terrestres ultra rapides et développement des véhicules spatiaux

 

Sociétés à moyen terme

- généralisation et amélioration des véhicules propres et intelligents (navigation plus ou moins entièrement automatisée), de plus en plus autonomes, sécurisés et rapides. Développement des véhicules terrestres ultra rapides. Et poursuite du développement des véhicules spatiaux

- émergence des véhicules à énergie « pure » (genre de téléportation) qui propulsent quasi instantanément en des lieux de plus en plus éloignés. Et émergence et développement d’un kit de déplacement chimico-immatériel

 

Sociétés à long terme

- développement des véhicules à énergie « pure » (genre de téléportation) qui propulsent quasi instantanément en des lieux encore plus éloignés. Généralisation du kit de déplacement intégrable et amélioration du kit de déplacement immatériel

- généralisation des véhicules à énergie « pure » (genre de téléportation de « tout ce que l’on désire »…) qui propulsent instantanément en presque tous lieux (voire en tous espaces-temps) et généralisation du kit de déplacement immatériel

- déplacement instantané en tous lieux et espaces-temps (transhumanisme corporel immatériel)

 

 

La protection des personnes et des biens : les réponses aux besoins de défense et de protection organiques et matérielles

 

Généralités

L’Homme est un organisme vivant vulnérable et fragile soumis à de nombreux facteurs « dégradants » et potentiellement dangereux. Il a donc toujours éprouvé le besoin de se protéger et de protéger les biens (nécessaires à la satisfaction de ses besoins) qu’il détient et/ou a en sa possession. 

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Protection des personnes, des biens et des regroupements humains : poings, pieds, bâtons, cailloux…

 

Sociétés primitives

Protection des personnes : poings, pieds, bâtons, cailloux, lances, lames, instruments divers

Protection des biens : clôtures, chiens

Protection des regroupements humains : poings, pieds, bâtons, cailloux, lances, lames, instruments divers

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

Protection des personnes : développement des armes à projectiles et des armes à feu

Protection des biens : murs, verrous, clôtures, chiens

Protection des regroupements humains : développement des armes à projectiles et des armes à feu

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

Protection des personnes : perfectionnement et grande amélioration des armes à feu

Protection des biens : murs, verrous, cadenas, coffres-forts,  grillages, clôtures barbelées

Protection des regroupements humains : généralisation des armes à projectiles et des armes à feu ultra puissantes et dévastatrices, lance rocket, char d’assaut, avion de chasse, avion bombardier, lance missiles, rampe de lancement d’ogives, bombe, bombe atomique, bombe à hydrogène…

 

Sociétés d’aujourd’hui

Protection des personnes : développement (possible) des armes d’auto défense (genre taser). Et généralisation des armes à feux (dans certaines contrées)

Protection des biens : alarme, vidéo surveillance. Développement des alarmes et des GPS avec localisation sur les objets (de « valeur »). Vigiles, agents de sécurité et organismes de surveillance. Et hyperprotection (murs et clôtures infranchissables)

Protection des regroupements humains : char d’assaut, avion de chasse, avion bombardier, lance missiles, rampe de lancement d’ogives, bombe, drone…

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu un tel développement), nous pouvons dire que les réponses aux besoins de protection des personnes et des biens ont globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Offre – production – structures

Le domaine de la protection a connu, au fil de l’histoire, des progrès notoires : développement des armes individuelles (pour la protection des biens et des personnes) et collectives (pour la protection des sociétés et des nations). La violence et la guerre, qui ont (à peu près) toujours eu cours chez les Hommes, les ont incités à trouver des systèmes de défense de plus en plus performants. Ainsi, en matière de protection des personnes, les armes se sont sophistiquées : poings, bâtons, couteaux, lances, arcs, arbalètes, revolvers, pistolets, fusils mitrailleurs… En matière de protection des biens, nous avons assisté à la même sophistication : chiens (de garde), cadenas, serrures, portes blindées, systèmes d’alarme (antivol et alarme maison), systèmes de géolocalisation (véhicules et bagages), systèmes de vidéo surveillance, systèmes de reconnaissance faciale, digitale et oculaire… quant à la protection des regroupements humains (communautés et nations), elle aussi, a connu une nette évolution : des premières « boules de feu » et autres armes à projectiles, l’humanité a réalisé de sérieux  « progrès » en matière d’armement : canons, fusil mitrailleurs, grenades, lances rockets, chars d’assaut, avions de chasse, avions bombardier, lances missiles, rampes de lancement d’ogives, bombes, bombes atomiques, bombes à hydrogène…

 

Aujourd’hui, les armes individuelles sont généralement soumises à une réglementation et à une législation(1) relativement drastiques et limitatives qui incitent les individus à éviter de « se faire justice eux-mêmes » et à avoir recours à des dispositifs légaux (censés respecter les droits des citoyens). Le domaine de la protection individuelle est aujourd’hui à la fois régulé par un marché de type capitaliste et soumis à une législation stricte (permis de port d’armes par exemple…). La protection des personnes (à titres individuel et collectif) est, en effet, un domaine qui relève des prérogatives de l’Etat (police et justice pour le maintien de l’ordre sur le territoire et armée contre les éventuelles attaques extérieures – nous aborderons, de façon beaucoup plus détaillée, cette thématique dans les paragraphes consacrés à l’Etat et à l’organisation judiciaire). Notons simplement ici que l’idéologie dominante actuelle semble être « au tout sécuritaire »(2) et confine (si j’ose dire !) à une forme de repli sur soi(3) généralisé (repli familial, communautaire et identitaire…).

(1) Ce qui n’empêche évidemment pas de se fournir sur le marché illégal…

(2) « Protégeons-nous de tout et de tous »…

(3) En effet, en cette ère de mondialisation et d’ouverture du « champ des possibles » en matière communicationnelle et relationnelle, on assiste, semble-t-il, à un repli sur soi (en partie réactif)…

 

Notons également que, dans une large partie du monde (dit « développé »), la notion de protection des personnes s’est, au cours des dernières décennies, très largement étendue à des domaines très divers (l’alimentation, la santé, le logement, les modes de déplacement etc etc ). Elle s’est manifestée, en réalité, dans la totalité ou la quasi-totalité des secteurs humains. Normes, nomenclatures, protocoles, cahiers des charges, réglementations, interdictions ont fait florès pour garantir aux individus, dans toutes les sphères de l’existence, une sécurité minimale dont le seuil n’a cessé de progresser (avec l’avènement et la généralisation du sacro-saint et absurde risque « zéro »…), poussant (assez souvent) à adopter des mesures (nationales ou internationales) absurdes et/ou terrifiantes. Donnons simplement, ici, les exemples de la systématisation des vaccinations obligatoires ou quasi obligatoires et de l’extermination (il n’y a pas d’autres mots !) de millions d’animaux de tous poils et en « bonne santé » (vaches, poulets, cochons et on en passe !) suspectés d’être un danger potentiel pour l’Homme alors que l’origine pandémique et les risques de contamination n’étaient absolument pas avérés lors, par exemple, des épidémies du virus H1N1, de la grippe aviaire ou des quelques cas mortels de la maladie de Creutzfeldt-Jakob… no comment !

 

Terminons enfin cette rubrique en disant qu’une bonne part de ces règles, normes de sécurité et interdictions n’aurait pas lieu d’être si les Hommes étaient moins enclins à la « filouterie* » et à la « truanderie* »… 

* Les termes sont vraiment très (très très) édulcorés !  

 

Demande – consommation – individus

Autrefois, les individus étaient relativement impuissants face aux différents types d’attaque et d’agression. Très vite, ils se sont « armés » (si j'ose dire !) pour y répondre... Mais « le vivre ensemble » a progressivement constitué un paramètre central dans les sociétés humaines et un système de justice (lois et règlements) s’est lentement substitué à la loi du talion qui a permis une cohésion sociale minimale sans laquelle toute société ne pourrait exister… malgré ces mesures, des violences tangibles et plus insidieuses ou subtiles demeurent… et font (presque) lois un peu partout où vivent les Hommes… (nous y reviendrons abondamment dans les paragraphes consacrés à l’organisation sociétale). 

 

Toutes ces informations générales ne doivent, bien évidemment, pas nous faire oublier les ahurissantes inégalités en matière de sécurité qui sévissent (et ont toujours plus ou moins sévi) dans le monde où une partie de la population vit de façon plus ou moins « retranchée » et/ou plus ou moins à l’abri des « violences du monde » et une autre partie vit dans une violence permanente (ou quasi permanente) et/ou dans une atmosphère réelle d’insécurité…

 

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer la satisfaction des besoins et des désirs en matière de défense et de protection des personnes et des biens de façon sécurisée et permanente et de façon aussi rapide, simple, confortable et intelligente que possible (selon les capacités et possibilités offertes par les savoirs et la technique) et assurer l’amélioration des réponses (leur fabrication, leur accès et leur utilisation) en matière de rapidité, de simplicité, de durabilité, de sécurité, de confort et de possibilités nouvelles*… (avec amélioration continue de l’amélioration – cycle infini…).

* Ainsi qu’en matière de satisfaction, de plaisir, de bonheur, de joie et de beauté qu’elles peuvent offrir…

 

Eléments pour une analyse « théorique* » plus fine et plus profonde

- l’Homme est une forme énergétique vivante complexe perceptive complexe préconsciente

- les armes et les systèmes de défense peuvent être des formes énergétiques vivantes ou des formes énergétiques physiques synthétiques.

* Voir les éléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde de la rubrique « alimentation ».

 

Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

- le « vivre ensemble » harmonieux

- la montée des régionalismes et des communautarismes

- l’exacerbation d’une certaine forme de violence (en particulier urbaine)

- le développement du terrorisme

- la montée de l’individualisme

- l'augmentation des revendications minoritaires

- le « musellement » des désirs et pulsions par les lois, les règlements, les règles et l’organisation sociétales

 

Evolutions actuelles

- systèmes de reconnaissance faciale, digitale, oculaire

- tendance à l’hyperprotection (et à l’hypersurveillance) des personnes et des biens

 

Evolutions possibles et directions probables

- généralisation des systèmes de protection de plus en plus intelligents, gadgétisés et miniaturisés, capables de neutraliser toutes les tentatives de vol et d’agression sans tuer les individus (mais en les paralysant pour les « remettre aux autorités ou aux forces de l’ordre »)

 

Evolutions à très long terme

- système de neutralisation immatériel, intégré à chaque individu et à chaque objet pouvant neutraliser toutes tentatives d’agression ou de vol.

 

Objectif idéal (implicite)

- éradication du besoin de protection des personnes et des biens (avec le passage de la forme organique vers le synthétique, voire vers une forme immatérielle)

 

 

Perspectives*

* Voir les perspectives de la rubrique « alimentation ».

 

Sociétés de demain

- développement (possible) des armes d’auto défense (genre successeurs plus sophistiqués du taser)

- vidéosurveillance généralisée et hyper protection de plus en plus performante et sophistiquée avec développement des systèmes de reconnaissance faciale, digitale et oculaire en presque tous lieux

 

Sociétés d’après demain

- généralisation (possible) des armes d’auto défense (genre successeurs plus sophistiqués du taser)

- généralisation de l’hyperprotection et des systèmes de reconnaissance faciale, digitale et oculaire en tous lieux privés et publics

 

Sociétés à moyen terme

- émergence de systèmes électronico-chimiques de neutralisation (en cas d’agression) avec paralysie provisoire des individus (pour les « remettre aux autorités compétentes »). Et émergence et développement d’un kit de protection synthético-électro-chimique

- miniaturisation et hyper individualisation de tous les systèmes de protection et de surveillance

- développement des systèmes électronico-chimiques de neutralisation, des systèmes synthético-chimiques de neutralisation pacifiques pour les individus et les objets (transhumanisme corporel électronico-synthético-chimique). Et généralisation du kit de protection synthético-chimique et développement d’un kit de protection immatériel

 

Sociétés à long terme

- généralisation des systèmes synthético-chimiques de neutralisation pacifiques (transhumanisme corporel synthético-chimique) et des systèmes de protection et de neutralisation pacifiques immatériels pour les individus et les objets . Et amélioration du kit de protection immatériel

- généralisation des systèmes de protection et de neutralisation pacifiques immatériels pour les individus et les objets (transhumanisme corporel immatériel). Et généralisation du kit de protection immatériel

- invulnérabilité ou quasi invulnérabilité pour les individus et les objets

 

 

La reproduction : les réponses aux besoins reproductifs

 

Généralités

L’Homme est un organisme vivant amené à se reproduire…

 

 

Bref aperçu historique

 

Premières sociétés humaines

Reproduction naturelle (avec – sans doute – un taux très élevé de mortalités périnatale et infantile)

 

Sociétés primitives

Reproduction naturelle (avec – sans doute – un taux très élevé de mortalités périnatale et infantile)

 

Sociétés d’avant-hier (jusqu’au 18ème siècle)

Reproduction naturelle (avec un taux élevé de mortalités périnatale et infantile). Et émergence et développement des sages-femmes et des maïeuticiens

 

Sociétés d’hier (jusqu’au 20ème siècle)

Reproduction naturelle. Et médicalisation de la période périnatale

 

Sociétés d’aujourd’hui

Reproduction naturelle. Et artificialisation, sécurisation et médicalisation de la reproduction

 

 

Trend historique (subjectif* à grandes enjambées)

Bien qu’il conviendrait de faire une distinction entre les différents types de sociétés au fil de l’histoire humaine (toutes les sociétés n’ont pas connu un tel développement), nous pouvons dire que les réponses aux besoins reproductifs ont globalement évolué ainsi.

* Voir le trend historique de la rubrique « alimentation ».

 

Offre – production – structures

Des premiers coïts et des premières mise-bas jusqu’aux (assez récentes) « mises au monde* » en passant par les premiers accouplements et les premiers accouchements, la reproduction, pendant une très longue période, a connu peu de changements. Au fil des progrès médicaux (assez tardifs), on a assisté à des avancées relativement significatives qui ont permis une baisse très conséquente de la mortalité pré et post-natale, de la mortalité infantile et des risques létaux pour les mères lors des accouchements. Voici, en quelques mots, le trend suivi : reproduction sexuée naturelle (non médicalisée) avec accouchement « à la maison », reproduction naturelle médicalisée (échographie, amniocentèse, accouchement « assisté », couveuse pour les prématurés…) avec accouchement en maternité, artificialisation du processus de reproduction pour les individus stériles et/ou avec « impossibilité naturelle » (les homosexuels par exemple) — fécondation in vitro, insémination artificielle…, généralisation de la médicalisation de la naissance et de la maternité et modes de reproduction de plus en plus séparés de la sexualité (développement de la contraception : pilules, préservatifs, stérilets etc etc), de plus en plus sécures, médicalisés, artificialisés et accessibles à tous (mère porteuse par exemple...) avec une législation de plus en plus ouverte et « libérale ».

* On pourrait appeler ainsi la naissance (la venue sur Terre) des nouveaux nés issus de diverses manipulations artificielles et/ou génétiques…

 

Le domaine de la reproduction est aujourd’hui (en général) un secteur mixte (public et privé) fortement régulé par l’Etat en matière de politique familiale (encouragement ou inhibition des naissances – avec les allocations familiales ou la politique de « l’enfant unique » par exemple) et en matière de sécurité (normes médicales à respecter) mais également en matière « d’accroissement des possibilités » induit par les progrès scientifiques (avec l’émergence de quelques « épineux » débats éthiques : âge maximum de reproduction, accès à la reproduction des individus non fertiles, repérage et modifications génétiques, « enfant-médicament » etc etc).

 

Notons également qu’il existe (apparemment) une corrélation négative entre le niveau de « développement économique » d’une société et son taux de natalité. Ainsi, bon nombre de « pays riches » contemporains n’atteint pas le « fameux » 2,1 enfants par femme (taux de fécondité nécessaire pour le renouvellement des générations). Le niveau de « développement économique » ne semble cependant pas le seul paramètre significatif : le changement de statut de la femme, le changement de statut de l’enfant(1), le « coût » financier de l’éducation pour assurer « le bien-être » éducatif et la « réussite » de sa progéniture (allongement de la durée des études), la montée de l’individualisme, la forte hausse du travail des femmes, l’éclatement de la cellule familiale traditionnelle, le taux de célibat(2) etc etc constituent, sans aucun doute, des facteurs prépondérants dans la baisse « naturelle » du taux de natalité. 

(1) Considéré de plus en plus comme un être « à part entière » et non plus comme « quantité négligeable », soutien familial ou une inévitable « fatalité »...

(2) A moins, bien sûr, que ces paramètres ne soient liés au degré « de développement économique » (hypothèse fort probable…).

 

Nous ne pouvons omettre, dans cette rubrique, d’aborder la thématique de la transmission (suite logique et extension de la reproduction). Essayons-nous donc à une brève synthèse…

 

En premier lieu, disons que la transmission concerne essentiellement, outre le domaine génétique, la culture et les « valeurs familiales » qui sont éminemment liées à la société de l’époque, au territoire géographique (que d’aucuns appelleraient « le terroir ») et au « rang social ». De façon un peu abrupte, disons que quelle que soit la société et/ou la communauté, il semble que les générations se suivent et se ressemblent… Bien qu’en la matière, l’époque contemporaine montre quelques signes et quelques velléités de changement — qui, sans doute, à l’avenir se développeront — avec (entre autres éléments) la transformation du statut de l’enfant* (que nous avons déjà évoqué), la montée galopante de l’individualisme, l’éclatement de la cellule familiale traditionnelle, la généralisation de l’accès aux savoirs et leur complexification, les générations continuent de se transmettre, outre un patrimoine terrien, immobilier et financier, des « us et des coutumes » quasiment indéracinables (sauf exceptions).

* Reconnu plus ou moins comme un individu (avec ses écueils, « l’enfant-roi » etc etc) et non comme « quantité négligeable » ou main d’œuvre familiale comme il l’a été pendant des siècles…

 

Notons également que les enfants (comme  les adultes d’ailleurs) se soumettent (en général) à « l’ordre établi », aux règles et aux normes instituées, plus ou moins sans résistance, rébellion ni remise en cause. Les « choses », les valeurs, les traditions, les devoirs et les obligations sont « avalés », ingérés et intégrés… Et même l’adolescence(1) ne semble pas échapper à la règle… L’essentiel des « jeunes » tend à s’inscrire dans la continuité familiale et sociale… Et même lorsque certains individus « se construisent » en réaction et/ou en opposition à leur lignée (familiale et sociale), l’âge adulte a vite fait, avec son lot de « rites de passage » (boulot, couple, logement — départ du nid parental), de lisser toutes velléités de démarcation et de singularisation pour les « ramener » dans le « chemin commun », les contraignant (plus ou moins la mort dans l’âme) à se plier aux normes en vigueur et à la « tyrannie de la normalité » familiale, sociale et sociétale (à la fois si rassurante et si « étouffante »…)…  bref, à peu près tous (sauf quelques exceptions) confortent et amplifient l’éternelle perpétuation(2) des « indéracinables » traditions humaines(3)

(1) Période au cours de laquelle les individus « encore en construction » (mais tous les Hommes ne le sont-ils pas tout au long de leur vie ?) sont censés édifier leur socle identitaire (entre autres périodes et autres contributions, bien sûr…), période où les révoltes et les remises en cause des traditions familiales et sociales semblent les plus actives…

(2) Notons ici que la « reproduction » pourrait fort bien signifier (et à de nombreux égards) « se reproduire à l’identique »…

(3) Eléments qui expliquent en partie (et qui s'expliquent aussi, en partie, par) l’inertie et l’extrême lenteur des transformations des groupes et des sociétés en général et des représentations mentales individuelles et collectives en particulier…

 

Demande – consommation – individus

Autrefois, les individus se reproduisaient comme tous les autres animaux (et mammifères). Et les femmes accouchaient dans le « nid familial »... Au fil des découvertes et des progrès médicaux, on a assisté à une forte médicalisation de la reproduction (maternité, examens prénataux, prise en charge périnatale…). La tendance, dans les pays dits « développés », est à la programmation « volontaire » (avortement, choix de l’âge, du moment (congélation du sperme et des ovocytes) et du mode de reproduction), à la diminution des désagréments et de la douleur lors des accouchements, à la réduction des conséquences de la maternité sur l’existence et le mode de vie et à la généralisation de l’accès à la reproduction (quels que soient l’âge et l’orientation sexuelle des individus).

 

Toutes ces informations générales ne doivent, bien évidemment, pas nous faire oublier les incroyables inégalités en matière de reproduction et de mortalité périnatale qui sévissent (et ont toujours plus ou moins sévi) dans le monde où une partie de la population bénéficie des « progrès contraceptifs » et du confort médical des maternités et une autre partie est toujours soumise aux aléas « organiques » et physiologiques de la copulation et des accouchements.

 

 

Eléments pour une analyse évolutive*

* Voir les éléments pour une analyse évolutive de la rubrique « alimentation ».

 

Objectifs généraux

Assurer la satisfaction des besoins et des désirs en matière de reproduction de façon sécurisée et permanente et de façon aussi rapide, simple, confortable et intelligente que possible (selon les capacités et possibilités offertes par les savoirs et la technique) et assurer l’amélioration des réponses (leur fabrication, leur accès et leur utilisation) en matière de rapidité, de simplicité, de durabilité, de sécurité, de confort et de possibilités nouvelles*… (avec amélioration continue de l’amélioration – cycle infini…).

* Ainsi qu’en matière de satisfaction, de plaisir, de bonheur, de joie et de beauté qu’elles peuvent offrir…

 

Eléments pour une analyse « théorique* » plus fine et plus profonde

- l’Homme est une forme énergétique vivante complexe perceptive complexe préconsciente

- les cellules fœtales sont des formes énergétiques vivantes élémentaires amenées à se complexifier et à se constituer en formes énergétiques vivantes complexes perceptives complexes préconscientes.

* Voir les éléments pour une analyse « théorique » plus fine et plus profonde de la rubrique « alimentation ».

 

Les paramètres pris en considération de nos jours (début du 21ème siècle)

- l’éthique

- l’allongement de l’espérance de vie (parentalité accessible à des individus d’âge plus avancé…)

- l’ère du « tout désir »…

 

Evolutions actuelles

- rendre la reproduction plus sécure et accessible à tous (dysfonctionnements et impossibilités naturelles — homosexualité, infertilité, vieillesse...)

 

Evolutions possibles et directions probables

- assurer une reproduction totalement sécure, directe, simplifiée, régulée de façon non sexuée (duplication par divers procédés)

- les cellules souches (stade « blastocyste »), transplantation embryonnaire

- contrôle et régulation de la fécondation (détection des anomalies génétiques, voire du potentiel de « dysfonctionnement comportemental » lié aux gènes)

 

Evolutions à très long terme

- duplication directe et immédiate et à volonté (clones – avatars)

- création d’un système « reproductif » capable de dupliquer le Vivant à volonté : des individus (Hommes, animaux, végétaux) déjà matures et/ou immatures (qui nécessiteraient une évolution et des apprentissages)

 

Objectif idéal (implicite)

Eradication du besoin de reproduction (avec les problématiques suivantes : les formes énergétiques sont soumises  à un besoin ontologique d’expansion dans le temps soulevant le problème du passage d’un monde fini et temporel à un monde infini et atemporel. Autre problème (possible) : le passage de la forme organique vers le synthétique, voire vers une forme non matérielle… Autre problème (éventuel) : le passage d’une forme « psychique » à la Conscience qui, elle-même, se reproduit (à travers ses manifestations énergétiques). Autres problématiques : la question de la sensibilité émotionnelle réellement ressentie (et non simulée par un paramétrage) et la sensibilité de l’Être pour « accéder » à l’Amour (inconditionnel) et à un sentiment de proximité (total) qui deviendrait (à terme) un sentiment d’Unité…

 

 

Perspectives*

* Voir les perspectives de la rubrique « alimentation ».

 

Sociétés de demain

Reproduction naturelle avec développement de l’artificialisation, de la sécurisation, de la médicalisation (détection des anomalies génétiques) et des possibilités (élimination progressive des dysfonctionnements et des impossibilités naturelles – homosexualité, infertilité, vieillesse…)

 

Sociétés d’après demain

Reproduction naturelle avec contrôle, régulation et réparation prénatales des anomalies génétiques (concernant le corps mais aussi les « dysfonctionnements comportementaux » potentiels…)

 

Sociétés à moyen terme

- émergence des modifications génétiques. Et émergence d’un kit reproductif

- développement des modifications génétiques. Emergence de la duplication directe (d’individus matures et immatures). Et amélioration et développement du kit reproductif

 

Sociétés à long terme

- généralisation des modifications génétiques. Développement de la duplication directe (clones, avatars). Emergence du kit reproductif intégrable. Et développement et amélioration du kit reproductif intégrable

- amélioration de la duplication directe (quasi immédiate et à volonté). Et généralisation du kit reproductif intégrable

- éradication du besoin reproductif et/ou duplication directe immédiate et à volonté

 

3 décembre 2017

Carnet n°62 La conscience et l'Existant - Chapitres 1 à 5

Essai / 2015 / L'exploration de l'être

La Vie et l’Existant ne semblent, en réalité, qu’un gigantesque jeu — violent et merveilleux — et une permanente célébration… A hauteur d’Homme, peut-être pourrions-nous penser que nous nous apprenons les uns les autres (et, bien souvent, à notre insu) à mieux les regarder et à mieux les vivre. A mieux les comprendre et à mieux les aimer… mais sur le plan de la Conscience, tout ce « cirque » — aimable ou corrosif — semble (presque) sans importance… Est-ce qui est… et ce qui est n’altère jamais Le Regard…

_

 Nous avons été contraints (pour des raisons d'ordre technique) de diviser la version numérique de cet ouvrage en dix parties.

Sommaire

Chapitre introductif : Pensées intuitives

 

 

Cette réflexion s’est déroulée pendant environ trois mois(1) à raison de six à sept heures de travail quotidien. Hormis quelques détails (que nous avons cru bon vérifier), elle s’est entièrement appuyée sur les savoirs et la connaissance(2) de l’auteur. La durée consacrée à cette étude pourrait paraître extravagante, irréaliste, présomptueuse et incroyablement courte (au regard de l’ampleur de la tâche : appréhender la Conscience et l’ensemble de l’Existant) et il est possible (voire probable), à ce titre, que nous ayons omis des éléments fondamentaux et/ou soyons « passés à côté » de thématiques essentielles, mais elle est plutôt révélatrice, à nos yeux, de la dimension éminemment restreinte et laborieuse du psychisme et de l’intellect humains, incapables de cerner en un clin d’œil et dans son ensemble une thématique et contraints de dérouler, de développer et d’enrichir péniblement leur réflexion parcellaire jour après jour, semaine après semaine… perspective fort éloignée de l’accès direct et fulgurant à la Connaissance spontanée — à laquelle nous avons parfois goûté —  et qui souligne (avec force) le caractère profondément rudimentaire et archaïque de l’esprit humain(3).

(1) D’avril à juin 2015.

(2) Savoirs et connaissance insignifiants et dérisoires dont les « faiblesses », les approximations et les inexactitudes pourraient (sans doute) faire sourire ou bondir les « spécialistes » des disciplines et domaines que nous avons effleurés pour dérouler cette réflexion… Au regard de l’absence de théories, de notes et de citations empruntées à d’autres auteurs, il est donc naturel que cette étude ne fasse mention d’aucune référence bibliographique (ceci n’est ni un essai ni un travail universitaire au sens strict)… Notons également que nous nous sommes octroyés une liberté de ton peu orthodoxe et avons eu recours à des formulations stylistiques peu usitées dans la communauté intellectuelle et le monde de la recherche sans compter un usage assez peu conventionnel des règles typographiques…

(3) Cantonné depuis la nuit des temps — des premiers hominidés jusqu’à aujourd’hui — à un rôle d’instrument indirect et très incomplet (à défaut de mieux…) mais sans lequel (rappelons-le) rien n’aurait pu et ne pourrait être appréhendé…  

 

Aussi, vous trouverez, dans cette analyse, une maladroite et modeste tentative de percer et de mettre à jour certaines caractéristiques de la Conscience et de l’Existant. Sur quantité de sujets et de thématiques, nous nous sommes, sans doute, fourvoyés et/ou résignés à rester « à la surface des choses »… Vous prendrez donc soin de corriger et de compléter nos erreurs et nos approximations et d’approfondir « nos légèretés » à la lumière de vos savoirs et de votre connaissance. Vous n’oublierez non plus pas de parcourir cette étude avec indulgence et d’excuser son caractère partiel, lacunaire et inévitablement tendancieux malgré notre souci de justesse et d’exhaustivité et notre volonté d’abolir (tant bien que mal) tout dogmatisme et toute idéologie…

  

*

  

Avant d’aborder cette réflexion, il est conseillé de « jeter un œil » aux pensées intuitives de la première partie de cet ouvrage. Leur lecture permettra de donner un aperçu des principales thématiques qui seront développées ici et de mettre en évidence la perspective dans laquelle elles s’inscriront…

  

*

  

Comme vous le constaterez (assez vite*), vous rencontrerez, au cours de votre lecture, une kyrielle d’astérisques, de parenthèses et de guillemets, pléthore d’ajouts, de tirets et de points de suspension et une surabondance de répétitions, d’apartés impromptus et de notes diverses (et variées) tantôt explicatives, tantôt drôles, tantôt tendancieuses (et personnelles) et parfois même des commentaires inopinés — voire même des commentaires de commentaires…

* Et peut-être même dès maintenant…voire même avant la lecture de ce « petit » paragraphe…

 

Vous pouvez, bien sûr, ne pas y prêter attention et les dédaigner avec mépris en particulier si ces procédés « stylistiques » vous ennuient, vous paraissent superfétatoires ou semblent alourdir cette réflexion en gâchant quelque peu votre plaisir (si tant est que l’on puisse prendre plaisir à ce genre de lecture…). Faites donc, bien sûr, à votre guise (et selon votre sensibilité)...

 

Sachez simplement qu’ils sont, à nos yeux, comme une respiration (entre deux apnées(1)) et révèlent notre goût (très prononcé) pour l’expolition(2) et l’épithétisme(3) voire l’épanadiplose(4) et notre attachement (sans faille) à la périssologie(5), à la parembole(6) et autres synchises(7)… Et en adepte patenté de l’amphigouri(8) et en inconditionnel consciencieux du galimatias, nous aimons parsemer nos pages de ces figures stylistiques (indigestes et ampoulées), signes tangibles (et éloquents) de notre souci (quasi pathologique) d’exhaustivité (réflexive(9)) et de notre aspiration maladive et monomaniaque (et quasi incontrôlable) à essayer de ne pas en oublier une miette (idéative)… même minuscule (ce qui ne nous empêche nullement, bien évidemment, dans cet aberrant souci du détail (et cette quête imbécile de la parfaite complétude(10)), de laisser passer des cargaisons de « grosses miches » nettement plus intéressantes — et fort nourrissantes —)… Mais de grâce, ne soyez pas (trop) effrayé(e) à la lecture de ce petit paragraphe liminaire où « on en fait des caisses » avec cette « petite » particularité rédactionnelle… pour essayer (peut-être) de vous y familiariser…

(1) « Respire » aurait-on envie de lui dire, « respire »…

(2) Consiste à répéter plusieurs fois la même chose ou le même argument dans des termes équivalents.

(3) Accumulation de précisions descriptives ou explicatives autour d'une idée centrale.

(4) Consiste à reprendre à la fin d'une proposition un mot situé en début d'une proposition précédente.

(5) Redondance qui consiste en l’ajout d’un ou de plusieurs détails inutiles qui n’apportent rien à la compréhension d’une idée ni à l’expression de cette idée, sinon pour l’alourdir.

(6) Consiste en une proposition insérée dans un discours pour exprimer le point de vue personnel de l'auteur. Proche de l’aparté.

(7) Consiste à modifier l’ordre des propositions d’une phrase, la rendant ainsi difficile à comprendre, voir incompréhensible…

(8) Texte volontairement obscur ou inintelligible à visée burlesque*…

* Mais dans cette réflexion, pas forcément… on est même parfois assez « loin » de l’envie de rire… (comprenne qui pourra…)

(9) Notre pensée fonctionne, en général, en arborescence et par intuitions et associations libres avec une certaine forme de distanciation à l’égard des idées qui nous traversent…

(10) Toujours perfectible ?

 

Profitons de cette prévenante « mise en garde » pour vous prier (également) d'excuser les inévitables coquilles, fautes(1) orthographiques, « vocabulistiques » et de ponctuation et autres erreurs(1) syntaxiques, grammaticales et stylistiques qui doivent (malheureusement) parsemer ces pages, en dépit de plusieurs lectures correctives attentives... En espérant simplement qu'elles n'outrageront pas votre exigence langagière (et/ou linguistique) et ne restreindront pas, de façon trop vive, votre aspiration à parcourir cet ouvrage(2).En vous souhaitant une bonne lecture…

(1) Parfois difficilement repérables (au vu de la longueur et de la densité du texte...) et/ou commises par ignorance...

(2) Ou pire, qu'elles vous y fassent renoncer...

 

 

Chapitre 1 LA CONSCIENCE(1) (2)

(1) Pour esprits peu « rationnalo-rigides » de ce début de 3ème millénaire du calendrier grégorien…

(2) Que les autres débutent leur lecture par le chapitre 2 « L’UNIVERS ET LA MATIERE »…

 

Au commencement est la Conscience. Avec ce petit clin d’œil pourrait débuter notre réflexion... mais empressons nous d’ajouter que cette assertion est erronée dans la mesure où la Conscience semble sans commencement ni fin. Du moins telle qu’elle nous apparaît*… A moins que nous puissions dire : au commencement sont la Conscience et l’énergie (qui lui est consubstantielle) ou la Conscience (seule) comme créatrice de l’énergie pure. En l’état actuel des connaissances, aucune des deux propositions ne peut être validée… et l’une ne semble pas plus valide ou sensée que l’autre…

* Nous y reviendrons amplement…

 

Notons également la possibilité que la Conscience (perçue comme « originelle » par les Hommes qui n’ont cessé, tout au long de l’histoire, de lui attribuer divers qualificatifs – le Divin, le Soi, la nature de l’Esprit, la Conscience, La Présence…) ne soit pas l’espace perceptif « originel » mais un espace issu d’une origine et d’un plan antérieurs. Proposition absolument invérifiable aujourd’hui…

 

 

Chapitre 2 L'UNIVERS ET LA MATIERE

 

PETIT COURS ACCELERE (et hyper simplifié*) D’ASTROPHYSIQUE, de PHYSIQUE et de BIOLOGIE

* A l’adresse des béotiens que nous sommes à peu près tous au fond…

Que les puristes et les spécialistes pardonnent cette longue enjambée en « gros sabots » (sans doute) truffée d’approximations et d’erreurs… L’énergie obéit à des cycles… et un jour, une forme ou un mouvement énergétique(1) est apparu(e) et badaboum « Big Bang », l’univers (ou des univers) a (ont) été « créé(s)(2) ». Dans l’univers que les êtres humains « appréhendent » aujourd’hui, les atomes et les molécules (entre autres éléments physiques(3)) se sont progressivement combinés et ont permis l’émergence de la matière, créant les galaxies, les étoiles, les systèmes planétaires et les planètes… Progressivement, sur l’une d’elles — la planète Terre — les combinaisons d’atomes et de molécules (toujours entre autres éléments physiques(3)) ont créé les conditions favorables à l’émergence de la Vie (carbone, hydrogène, oxygène, azote…). Et un nombre restreint des combinaisons atomiques et moléculaires est devenu vivant (procaryotes, eucaryotes, bactéries…). Progressivement, ces combinaisons se sont complexifiées et ont créé les conditions favorables à l’émergence de formes vivantes complexes (les végétaux et les animaux élémentaires). Progressivement ces combinaisons se sont complexifiées et ont permis l’émergence d’éléments vivants perceptifs. Et un nombre restreint des combinaisons vivantes a accédé à la perception (les animaux). Progressivement ces combinaisons se sont complexifiées et ont permis l’émergence d’éléments vivants perceptifs « préconscients ». Et un nombre restreint des combinaisons vivantes perceptives a accédé à la perception « préconsciente » (les Hommes). Voilà posée, en quelques lignes éminemment simplistes, l’évolution des formes énergétiques terrestres jusqu’à l’émergence de l’Homme (l’Homo sapiens).

(1) La théorie du Big Bounce (le Grand Rebond) semble rencontrer aujourd’hui quelques faveurs au sein de la communauté scientifique. De façon schématique, nous pourrions dire qu’elle définit le Big Bang comme une sorte de point de passage ou un goulet d’étranglement entre l’actuelle phase d’expansion de l’Univers et une phase de contraction qui l’aurait précédée. Elle semble « s’appuyer » sur la "gravitation quantique à boucles" (pour « réconcilier » la mécanique quantique — qui décrit très bien l’infiniment petit — et la relativité générale — qui décrit très bien l’infiniment grand) en stipulant (grosso modo) que l'univers alternerait entre des phases d'expansion et de contraction, avec des Big Crunch et des Big Bang entre ces phases…

(2) Il est également possible qu’une (ou d’autres) forme(s) ou un (ou d'autres) mouvement(s) énergétique(s) ai(en)t créé* un (ou d'autres) univers et/ou une (ou des) entité(s) énergétique(s) « ailleurs »…

* Ai(en)t créé autrefois, crée (ou créent) aujourd’hui ou créera (ou créeront) à l’avenir… 

(3) Energie sombre, matière noire etc etc.

 

Voir ANNEXE 1 (panorama général de la Conscience et de l'Existant – partie 1)

Voir ANNEXE 2 (panorama général de la Conscience et de l'Existant – partie 2)

 

 

QUELQUES ELEMENTS D’ASTRONOMIE – ASTROPHYSIQUE (pour les nuls*)

* Auxquels nous appartenons (bien évidemment)…

Après le Big Bang (et peut-être même avant(1)), l’univers ou les univers a (ont) été « créé(s) ». Au sein de celui que l’on appelle l’Univers(2) (avec une majuscule), différents objets « célestes », tels que les galaxies, les systèmes stellaires, les étoiles, les systèmes planétaires et les planètes etc etc, ont « vu le jour ». Ces différents « agrégats cosmologiques » n’ont cessé (et ne cessent) d’évoluer et entretiennent différents types de relations dont certaines ont été mises à jour par l’astronomie et l’astrophysique. Qui aujourd’hui (en ce début de 3ème millénaire) n’a pas, en effet, déjà entendu parler de quarks, de supernova, de naine blanche, de trou noir, d’énergie sombre, de matière noire, d’antimatière, de gravitation et d’électromagnétisme ? Qui n’a pas ne serait-ce qu’une vague idée des théories de Copernic, de Galilée, de Newton ou de la relativité générale d’Einstein, voire même de la théorie des cordes et de quelques autres réjouissances du même acabit ?

(1) Avec le Big Bounce qui laisse envisager la possibilité que l'Univers ait existé « de toute éternité »…

(2) Et au cours de son évolution…

 

Il n’est pas de notre ressort d’aborder ces notions astronomiques (et encore moins de les expliquer – nous en serions d’ailleurs bien incapables…), nous nous contenterons de noter que ces différents objets célestes sont organisés en systèmes évolutifs et interactifs et que la planète Terre se situe dans le système solaire, un des systèmes planétaires de la Voie lactée qui est l’une des innombrables galaxies de l’Univers (dont on ne sait toujours pas aujourd’hui s’il est fini ou infini ni même s’il ne représente qu’une infime partie d’un espace beaucoup plus vaste…)

 

 

Chapitre 3 LA MATIERE TERRESTRE

 

QUELQUES ELEMENTS DE PHYSIQUE ET DE CHIMIE (pour les nuls*)

* Voir la rubrique QUELQUES ELEMENTS D’ASTRONOMIE – ASTROPHYSIQUE.

De façon éminemment simpliste, on pourrait dire que les atomes et les molécules peuvent se combiner de multiples façons sous formes gazeuses, liquides et solides. Ces différents « agrégats physico-chimiques » n’ont cessé (et ne cessent) d’évoluer et entretiennent différents types de relations (de nature électronique, atomique, chimique, électrique…) dont certaines ont été mises à jour par la physique et la chimie. Pour de plus amples informations, nous renvoyons au tableau périodique des éléments (table de Mendeleïev) qui représente tous les éléments chimiques, ordonnés par numéro atomique et organisés en fonction de leur configuration électronique et à la célèbre maxime de Lavoisier* qui reformule, semble-t-il, une phrase du philosophe grec Anaxagore : « Rien ne naît ni ne périt, mais des choses déjà existantes se combinent, puis se séparent de nouveau ».

* « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme ».

 

 

VAGUE APERCU DU MONDE TERRESTRE AVANT L’EMERGENCE DU VIVANT

Avant l’apparition de la Vie terrestre, le monde a connu de nombreuses transformations et plusieurs bouleversements majeurs. Il ne s’agira pas, ici, de donner un aperçu exhaustif de cette évolution (loin s’en faut) mais de livrer quelques éléments qui ont permis de créer les conditions nécessaires pour qu’émerge le Vivant. Disons simplement que les combinaisons atomiques et moléculaires de carbone, d’hydrogène, d’oxygène et d’azote, la composition de l’air, l’abaissement significatif de la température, la constitution d’une couche terrestre et la formation de zones hydriques ont sans doute été à l’origine de la naissance de la Vie (les molécules organiques, les protocellules, les premiers êtres cellulaires et les premières bactéries).

 

 

Chapitre 4 LE VIVANT TERRESTRE

 

QUELQUES ELEMENTS DE BIOLOGIE & DE SCIENCES HUMAINES (pour les nuls*)

* Voir la rubrique QUELQUES ELEMENTS D’ASTRONOMIE – ASTROPHYSIQUE.

Le Vivant (essentiellement composé de molécules de carbone, d’hydrogène, d’oxygène et d’azote) n’a cessé de se complexifier depuis l’émergence de la Vie sur Terre donnant naissance à de très nombreux et très divers organismes. Aujourd’hui, ces différents organismes vivants peuvent se catégoriser, de façon éminemment simpliste, en organismes vivants élémentaires (cellules et bactéries…), en végétaux, en animaux et en êtres humains dont le fonctionnement, les relations et l’évolution sont étudiés par la biologie (et ses différentes branches) et les sciences humaines. Ces différents « agrégats organiques » n’ont cessé (et ne cessent) d’évoluer. Ils se sont organisés en systèmes (écosystème et sociétés humaines) et entretiennent différents types de relations (en particulier la chaîne alimentaire). 

 

De façon ultra simplifiée, nous pourrions dire que le Vivant terrestre peut se diviser en quatre grandes catégories* :

 

Les organismes vivants élémentaires (cellules, bactéries, virus…) qui sont des structures organiques élémentaires dotées d’un code génétique, d’un métabolisme et d’un système de reproduction. Ils sont composés d’atomes et de combinaisons moléculaires et organisés en systèmes organiques élémentaires (alimentaire, circulatoire, reproductif et de protection). Et sont constitués en systèmes plus ou moins complexes hors et au sein de toutes les formes vivantes (milieux terrestre, aquatique, aérien et dans la matière organique).

 

Les végétaux qui sont des structures organiques complexes dotées d’un code génétique, d’un métabolisme et d’un système de reproduction. Ils sont composés d’atomes et de combinaisons moléculaires et organisés en systèmes organiques complexes (alimentaire, circulatoire, reproductif, et de protection). Et sont constitués en systèmes plus ou moins complexes sur une grande partie de la surface terrestre (milieux terrestre et aquatique).

 

Les animaux qui sont des structures psycho-organiques perceptives (plus ou moins) complexes dotées d’un code génétique, d’un métabolisme et d’un système de reproduction. Ils sont composés d’atomes et de combinaisons moléculaires et d’éléments vivants élémentaires (essentiellement les cellules et les bactéries) et organisés en systèmes organiques complexes (sensoriel, circulatoire, nerveux, endocrinien, alimentaire, respiratoire, reproductif, de locomotion et de protections immunitaire et organique) et pour les animaux les plus sophistiqués en systèmes psycho-organiques plus ou moins complexes (cognitif, affectif et imaginatif élémentaires, expressif et communicatif). Et sont constitués en systèmes plus ou moins complexes sur une grande partie de la surface terrestre (milieux terrestre, aquatique et aérien).

 

Les êtres humains qui sont des structures psycho-organiques perceptives complexes dotées d’un code génétique, d’un métabolisme et d’un système de reproduction. Ils sont composés d’atomes et de combinaisons moléculaires et d’éléments vivants élémentaires (essentiellement les cellules et les bactéries) et organisés en systèmes organiques complexes (sensoriel, circulatoire, nerveux, endocrinien, alimentaire, respiratoire, reproductif, de locomotion et de protections immunitaire et organique), en systèmes psycho-organiques complexes (émotionnel, sexuel, affectif, de protection psychique et communicatif) et en systèmes psychiques complexes (cognitif, sentiments, réflexif, représentatif, organisationnel, distractif, imaginatif, expressif et de compréhension). Et sont constitués en systèmes complexes sur une grande partie de la surface terrestre.

* Pour des informations beaucoup moins basiques, nous renvoyons à l'arbre phylogénétique (ou arbre de vie) qui expose les relations de parenté entre les différents groupes d'êtres vivants... Notons que cette classification fait l'objet de nombreux débats entre les systématiciens et est susceptible d'être largement modifiée par les recherches (actuelles et à venir) et les « incessantes » nouvelles découvertes...

 

 

VAGUE APERCU DU MONDE TERRESTRE AVANT L’EMERGENCE DE L’HOMME

Depuis la naissance du Vivant jusqu’à l’émergence de l’Homme, le monde terrestre a connu de nombreuses transformations (entre autres, des variations thermiques et d’incessants mouvements liés à la tectonique des plaques qui ont fait émerger la configuration continentale actuelle avec les surfaces océaniques et terrestres, les montagnes etc etc). De nombreuses espèces vivantes (végétales et animales) sont apparues sur terre et dans les océans (qui constituent toujours environ 70% de la surface de la Terre). Un grand nombre d’espèces a disparu, d’autres ont évolué.

 

Jusqu’à l’apparition de l’espèce humaine, il semblerait que toutes les formes végétales et animales s’organisaient de façon naturelle et instinctive, formant un immense écosystème (avec des mécanismes naturels de régulation et de rééquilibrage en cas de survenance d’un déséquilibre) au sein duquel chaque forme vivante constituait le maillon d’une gigantesque chaîne alimentaire de type pyramidal (consommateurs primaires, secondaires et tertiaires) au sommet de laquelle régnaient, sans partage, les « grands prédateurs ».

 

Les formes végétales et animales étaient soumises à des luttes et à des stratégies de collusion intra-spécifiques et interspécifiques pour assurer leur survie (alimentaire et territoriale). L’écosystème les a donc naturellement invitées à occuper des territoires adéquats, peu ou pas occupés par des prédateurs* (niches territoriales) et fort pourvus en ressources alimentaires, voire parfois à orienter leur alimentation (niches alimentaires).

* Ou en compensant les risques de prédation par un taux de natalité élevé.

 

Les espèces animales étaient soit de « nature solitaire » soit de « nature grégaire » et formaient des groupes ou des communautés plus ou moins peuplés, plus ou moins organisés et hiérarchisés, plus ou moins nomades ou sédentaires selon leurs spécificités « naturelles » et l’abondance des ressources alimentaires. Avant l’apparition de l’Homme, la surface terrestre constituait un immense quadrillage relativement équilibré, peuplé d’espèces végétales et animales relativement diversifiées. 

  

 

Chapitre 5 L’HOMME ET LE PSYCHISME HUMAIN

Il est difficile de dater avec exactitude l’apparition du premier Homme. Néanmoins, l’émergence de l’espèce humaine constitue un élément absolument majeur dans l’évolution des formes terrestres et de la Vie sur Terre. Son développement (qualitatif et quantitatif) n’aura de cesse, au cours de son évolution, de transformer l’Existant et l’existence terrestres, la vie végétale et animale et « l’équilibre naturel » du monde. Afin de comprendre les ressorts de cette transformation, il nous faut nous intéresser aux éléments constitutifs majeurs de l’être humain dont le cerveau et le psychisme semblent être les clés de voûte… 

 

Il ne nous appartient pas (et nous en sommes parfaitement incapables) de connaître avec exactitude la façon dont le cerveau humain a pu émerger et « donner naissance » au psychisme. Le cerveau ne serait-il que la simple, incroyable et merveilleuse résultante d’une longue série de combinaisons moléculaires (éléments cellulaires, électriques, chimiques, hormonaux…) qui lui a permis d’accéder à la perception (et très vite à la cognition)? Une question fondamentale, ici, se pose : le cerveau a-t-il créé la perception ou a-t-il accédé à la perception (qui existait donc antérieurement) ? Débat fondamental qui ne semble pouvoir aujourd’hui être tranché (en l’état actuel des connaissances)… Cette incapacité est extrêmement frustrante d’autant qu’elle pourrait grandement conditionner l’évolution future des sociétés humaines et post-humaines en matière d’intelligence artificielle (nous y reviendrons dans les paragraphes consacrés à l’IA)… pour l’heure, nous qui avions souhaité une analyse factuelle neutre (totalement non idéologique), nous sommes confrontés à un choix (inévitable) et donc à une orientation biaisée en optant pour la première(1) ou la seconde(2) hypothèse.

(1) Première hypothèse : le cerveau a créé la perception...

(2) Seconde hypothèse : le cerveau a (simplement) accédé à la perception...

 

Bien que nous essaierons de considérer les deux hypothèses, le second axiome nous semble plus juste et plus probable(1). Nous argumenterons ce choix ultérieurement… Disons (pour l’heure) que nous avons « l’intime conviction(2) » que le cerveau n’a pas créé la perception mais que le Vivant a créé les conditions pour que le cerveau y accède. Cette hypothèse qui présuppose l’antériorité de la perception nous oblige à la définir et à donner quelques éléments sur son origine. Qu’est-ce que la perception ? Et qu’est-ce qui perçoit ? Vastes questions…

(1) Au regard de notre intuition, de notre compréhension et de notre expérience…

(2) Une « intime conviction » est par nature indémontrable et invérifiable... Nous nous efforcerons néanmoins, au cours de cette réflexion, de livrer les arguments nécessaires à son étaiement…

 

Bien que la perspective que nous déroulons ici s’inscrive dans un grand souci d’objectivité, nous présupposerons donc que la Conscience (perçue comme « originelle » par les Hommes) est à l’origine de toutes les manifestations de l’Existant (de toutes les formes énergétiques). Cette présupposition n’aura, en vérité, aucune incidence significative sur le déroulement factuel de l’évolution des formes terrestres et pourrait même être occultée... A ce propos, notons néanmoins qu’il est (pour le moins) étrange – et nous y reviendrons longuement – que le psychisme humain soit habité par une aspiration constante, puissante et « mystérieuse » qu’il l’enjoint de tenter de « retrouver » la totalité des caractéristiques de la Conscience*et de les faire advenir sur le plan phénoménal — sur le plan terrestre. Cette présupposition conditionne néanmoins un élément majeur : la perception.

* Se référer aux pensées intuitives exposées dans le livre 1.

 

A nos yeux, Ce qui perçoit est la Conscience (« originelle ») et toutes formes(1) de perception, pourvu que cette dernière soit sensible (c’est-à-dire capable d’éprouver) et dotée d’une capacité de distanciation, est la Conscience même si elle se trouve limitée (et conditionnée) par son support. Ainsi, prenons l'exemple d'une caméra de surveillance : son rôle est de filmer une zone circonscrite et restreinte, elle enregistre des faits, qui ne sont, en réalité, que des données et des informations sur des interactions entre des formes de l’Existant (un vol ou un braquage par exemple). Qui perçoit les images ? Celui qui les regarde. Qui regarde (et éprouve) celui qui regarde la caméra de surveillance qui, elle-même, « regarde » la zone circonscrite ? Il semblerait bien que cela soit la Conscience (ou l’attention impersonnelle) accessible à l’Homme enclin à la sensibilité et à la distanciation perceptive… Imaginons à présent un robot sophistiqué paramétré pour percevoir et regarder. Sa perception est limitée par ses capteurs. Serait-il capable de se regarder en train de regarder ? Serait-il capable d’éprouver ? Si nous répondons par l’affirmative, alors le robot serait en mesure d’accéder à « la Conscience sensible d’arrière-plan(2) »… si nous répondons par la négative, alors le robot n’est qu’un instrument de perception sans sensibilité ni capacité de distanciation… Nous tenterons de développer ces thématiques dans les paragraphes que nous consacrerons au cheminement spirituel et à l’intelligence artificielle. Revenons à présent au psychisme humain.

(1) Quel que soit leur support, le cerveau « organique » chez les humains ou le « cerveau » synthétique chez les systèmes d’intelligence artificielle (caméras, robots…)...

(2) Autre nom parfois donné à la Conscience « originelle »…

 

 

Bref aperçu évolutif du psychisme

A l’origine (dès l’émergence d’un cerveau élémentaire suffisamment élaboré), le psychisme perçoit des manifestations de l’Existant et des sensations (des ressentis corporels) internes (à l’intérieur du corps) et externes lorsque le corps est en interaction avec l’Existant (soulignons que le corps est toujours en interaction avec l’Existant…). Cette perception(1) (préconsciente) de l’Existant et des sensations lui font éprouver une sensation de confort ou d’inconfort(2) (puis plus tard, avec la complexification de la cognition, un sentiment de confort ou d’inconfort). Les ressentis corporels internes inconfortables invitent le psychisme à réaliser qu’il existe des besoins qui nécessitent d’être satisfaits(3) (afin de faire disparaître le sentiment d’inconfort). Il va donc mettre en œuvre des réponses(4) pour satisfaire ces besoins. En premier lieu, il va agir (réagir) pour combler les besoins ressentis. Et au fil de la répétition des actions mises en œuvre, la cognition va se développer et lui donner accès à la réflexion qui lui permettra de réitérer ces actions et/ou de les améliorer. Le psychisme comprend ainsi très vite que les besoins réapparaissent et qu’il n’est pas assuré de pouvoir y répondre. Il va donc s’attacher à trouver des réponses de plus en plus sûres et pérennes. L’amélioration des réponses et la complexification de la cognition permettent alors au psychisme de réaliser qu’il est capable d’améliorer ce sentiment de confort. Cette compréhension va sans doute, en partie, donner naissance au désir (et au sentiment de satisfaction — satisfaction de la réalisation des désirs qui progressivement prendra le pas sur la sensation de confort).

(1) Perception assez superficielle en mesure d’appréhender « le visible », « le proche » et « l’apparent » (pas ou peu « l’invisible », « le lointain » et « le profond »).

(2) Les sensations peuvent également être à l’origine d’émotions et de sentiments ressentis (par le psychisme) comme plaisants (agréables et donc confortables) ou comme déplaisants (gênants ou pénibles donc inconfortables).

(3) Pour la première fois dans l’évolution de la matière vivante, une forme est contrainte de satisfaire une partie de ses besoins sans prise en charge directe et naturelle par le système (comme dans le cas des végétaux). Les animaux et les hominidés furent, bien sûr, également concernés par cet aspect —  mais dans une moindre mesure — au vue de leur « instinct naturel » de survie… Instinct de survie dont l’Homme aussi (évidemment) est doté… Bref… une partie des besoins doit donc être prise en charge, les autres besoins, essentiellement les besoins et les fonctions métaboliques et physiologiques (la respiration ou la circulation sanguine par exemple) sont assurés par la Vie (la biologie, le système qui régit les lois du Vivant – des formes vivantes) sans l’intervention nécessaire du psychisme (plus tard, lorsqu’il en sera capable, le psychisme jettera à tous ces domaines un œil très attentif et très interventionniste…).

(4) Réponses de deux ordres : par l’action qui donnera naissance à ce que nous avons appelé le plan réalisationnel actif et par la réflexion qui donnera naissance à ce que nous avons appelé le plan représentatif intellectuel.

 

Contraint par sa crainte de l’inconfort et son besoin (puis, plus tard, son désir) de confort, le psychisme va développer des capacités cognitives et cartographier l’Existant. Cette « cartographie » de l’Existant va donner naissance aux représentations mentales qui vont permettre au psychisme de comprendre sa dangerosité, d’éviter ses dangers, de s’y orienter avec plus de facilité, d’en tirer toujours plus avantageusement parti (et, plus tard, de créer ce qu’il lui manque ou semble lui manquer…) pour trouver des réponses de plus en plus efficaces et satisfaisantes (de plus en plus sûres et de plus en plus durables). Ces représentations de l’Existant se divisent très vite en représentations de soi – conscience de soi(1)(2)(3) (le psychisme s’identifie au corps) et représentations « du reste du monde ». Ainsi, le psychisme s’empare de la sphère organique (le corps). Et, au fil des expériences et de l’évolution, « habité » par un farouche besoin de sentiment de confort, il ne cessera d’essayer d’améliorer les réponses aux besoins ressentis (et donc la qualité de sa satisfaction).

(1) Cette identification donne naissance à la notion de conscience de soi (représentation de soi, identifiée à la forme organique), puis aux notions d’égocentrisme, de sentiment narcissique et d’image de soi.

(2) La conscience de soi (identifiée à la forme) a donné naissance à l’égocentrisme, centre à partir duquel s’est développée une longue série : la préférence familiale, la préférence communautaire (communautarisme), la préférence locale ou régionale (régionalisme), la préférence nationale (nationalisme), l’anthropocentrisme, le géocentrisme et l’héliocentrisme (qui aujourd’hui, grâce à « l’amélioration des savoirs », a été abandonné…).

NOTE : l’intégration de « la sphère extérieure » (ce qui apparaît différent, étranger et extérieur à la forme – à l’individu) à « la sphère personnelle » et le sentiment de proximité (notamment affective) se réalisent par proximité (physique), par la compréhension (connaissance de « l’Autre » et connaissance de notre nature profonde) et son respect. Mais « la véritable intégration » (intégration à soi) ne se réalise qu’avec la pleine réalisation de notre réalité (accès à la Conscience par la spiritualité) : il n’y a dès lors plus d’autres. Tout est en soi… (nous aborderons très largement cette thématique dans les paragraphes consacrés au plan spirituel…).

(3) Cette conscience de soi est essentiellement liée aux caractéristiques physiques et psychiques et au mode de vie (alimentation, logement, vêtements, possessions matérielles, appartenance à certaines catégories, fonction au sein du système sociétal etc).

  

La complexification du psychisme (essentiellement liée à son identification au corps) va également créer d’autres besoins (essentiellement d’ordre psychique) et l’enjoindre d'y répondre. Ainsi, le psychisme va être amené à développer (plus encore) ses capacités cognitives et abstractives qui lui permettront d’améliorer ses capacités discriminantes, conceptuelles et organisationnelles, d’élaborer des contenus psychiques (les représentations mentales) de plus en plus élaborés et de transformer l’Existant en créant et fabriquant des outils de plus en plus sophistiqués. 

 

Le psychisme (qui est un plan perceptif « préconscient ») s’est donc inscrit, dès ses origines, dans une perspective égotique de type utilitariste conditionnée essentiellement par la satisfaction des besoins ressentis. L’ « émergence » de la « pré-conscience » dans le psychisme l’imprègne néanmoins, au fil de l’évolution (et à des degrés plus ou moins forts), de certaines caractéristiques de la Conscience(1) — d’une part, des tendances ou des prédispositions au respect (de nature révérencielle), à l’altruisme, à la générosité, à la bienveillance, à la solidarité, à l’entre-aide désintéressée, à la fraternité etc., pâles (et fragiles) reflets de l’Amour et d’autre part, un besoin de compréhension, lointain reflet de l’Intelligence(2).

(1) Se référer aux pensées intuitives exposées dans le livre 1.

(2) Chez de rares individus « préconscients » (plus « proches » de la Conscience que de la pré-conscience) mais qui ne disposent pas toujours de la possibilité (ou des capacités à) d’ « habiter » l’espace de Conscience de façon stable et/ou de façon plus large, il peut exister une perception plus profonde, plus large et plus fine qui leur permet, par exemple, de voir et/ou de sentir (grâce à une hypersensibilité – une hyper-sensorialité) les mouvements énergétiques entre les formes apparentes, de percevoir d’autres mondes et d’autres plans, d’y entrer et/ou d’entrer en communication avec les formes qui y « habitent ». Chez eux, peuvent aussi se manifester des besoins d’Infini (d’Absolu), d’omniscience (voire de « Connaissance incarnée »), d’Amour inconditionnel et de Paix absolue. Notons (entre parenthèses) que plus ces besoins sont manifestes et ressentis comme essentiels, plus les autres besoins organiques et psychiques deviennent secondaires (voire accessoires) — nous aborderons très largement ces thématiques dans les paragraphes consacrés au plan spirituel...).

 

 

LES CONTENUS PSYCHIQUES PRINCIPAUX

Le psychisme (qui est « en contact » permanent avec l’Existant à travers la perception visuelle et les sensations) est un espace traversé, de façon quasi continue, par de très nombreux mouvements énergétiques provisoires qui constituent ce que l’on peut appeler les contenus psychiques. Outre les perceptions visuelles de l’Existant (manifestations de l’Existant perçues par le psychisme), ces contenus sont essentiellement :

 

- des sensations (ressentis corporels, gênes, douleurs…) ;

 

- des représentations mentales (les pensées) qui se manifestent soit par des images (les représentations mentales imagées) soit par des idées (les représentations mentales conceptuelles) soit de façon mixte (images et idées entremêlées) et qui peuvent concerner plusieurs « sphères : soi (idées et images de soi), les autres (idées et images des autres), le monde (images et idées du monde), le temps (représentation du temps et de la temporalité) ;

 

- et des émotions (au sens large – émotions et sentiments).

 

En général, ces mouvements énergétiques provisoires (ou contenus psychiques) sont saisis par le psychisme et se transforment (se transmutent) aussitôt en besoins ou en désirs (ou en besoins-désirs). Besoins et/ou désirs qui créent immédiatement un sentiment d’inconfort et d’insatisfaction qui amène le psychisme à y répondre par des mouvements (l’action et/ou la réflexion) afin de les satisfaire pour retrouver sa zone de confort (et/ou éventuellement d’en améliorer l’accès, la qualité, la durée et la sécurité).

 

 

Les perceptions visuelles de l’Existant (manifestations de l’Existant perçues par le psychisme)

Les perceptions visuelles de l’Existant sont déterminées par les capacités du système sensoriel corporel — le système optique (sur le plan organique) – et les « capacités perceptives » du cerveau (sur les plans cérébral et psychique). Il semblerait que la perception humaine soit relativement restreinte. Elle ne semble, en effet, avoir accès qu’aux manifestations proches, apparentes et superficielles. Et se montre (en général) incapable d'appréhender les manifestations lointaines (l’étendue de l’Univers par exemple), les manifestations invisibles — non perceptibles à l’œil humain (les ultraviolets, les infrarouges, les mouvements énergétiques entre les formes, l’existence d’autres mondes, plans et univers par exemple) et les manifestations profondes (leur origine et leur nature réelle par exemple). Mais en dépit de ces « faibles » capacités, les manifestations de l’Existant perceptibles par le psychisme humain sont déjà (néanmoins) fort nombreuses. 

 

Les manifestations de l’Existant peuvent être schématiquement divisées en trois catégories :

 

- les manifestations sans effet sur le sentiment de confort et d’inconfort (neutres) qui n’impliquent pas nécessairement d’action (ou de réaction) ;

 

- les manifestations inconfortables (douloureuses, gênantes, pénibles) qui impliquent une (ou des) action(s) pour retrouver la zone de confort ;

 

- et les manifestations confortables (plaisantes) qui peuvent être à l’origine de plusieurs mouvements : la peur de les voir disparaître, le désir de les rendre plus durables* et/ou permanentes et le désir d’en améliorer la qualité et/ou l’intensité. Mouvements qui peuvent, à leur tour, créer une (ou des) actions afin d’améliorer la zone de confort.

* Ou d’en rendre l’accès et la venue plus aisés et plus certains et/ou la disparition plus difficile (voire impossible)…

 

 

Les sensations

Les sensations sont liées, bien sûr, aux capacités sensorielles corporelles : les cinq sens (excepté la vue(1) et l’ouïe(1) qui permettent la perception visuelle et la perception auditive — et non des « sensations visuelles et auditives »). Il s’agit, bien sûr, des sensations tactiles(2) (grâce au toucher), des sensations olfactives(2) (grâce à l’odorat) et des sensations gustatives(2) (grâce au goût).

(1) Notons que la Conscience « originelle » est également parfois appelée « Regard » ou « Ecoute » impersonnel(le) soulignant ainsi sa nature essentiellement perceptive…

(2) Comme si l’on désignait communément la vue et l’ouïe du point de vue de la perception et du « contenant » et le toucher, le goût et  l’odorat du point de vue de la sensation et du « contenu ». Soulignons également que la pratique spirituelle invite les individus à appréhender l’Existant à travers le « Regard », « l’Ecoute » et le « Ressenti » se plaçant ainsi délibérément « du côté » de la perception en matière de sensorialité…

 

Les sensations (et les ressentis corporels) peuvent également être divisées, de façon schématique, en trois catégories :

 

- les sensations sans effet sur le sentiment de confort et d’inconfort (neutres) qui n’impliquent pas nécessairement d’action (ou de réaction) ;

 

- les sensations inconfortables (douloureuses, gênantes, pénibles) qui impliquent une (ou des) action(s) pour retrouver la zone de confort ;

 

- et les sensations confortables (plaisantes) qui peuvent être à l’origine de plusieurs mouvements : la peur de les voir disparaître, le désir de les rendre plus durables et/ou permanentes et le désir d’en améliorer la qualité et/ou l’intensité. Mouvements qui peuvent, à leur tour, créer une (ou des) actions afin d’améliorer la zone de confort.

 

 

Les représentations mentales

Les représentations mentales ont émergé et se sont développées essentiellement grâce à la cognition (avec les capacités de conceptualisation et d’abstraction). Elles se composent essentiellement des représentations de soi, des représentations des autres, des représentations du monde, des représentations temporelles et des représentations conceptuelles – idées du « bien » et du « mal », du « vrai » et du « faux », du « beau » et du « laid », du « normal » et de « l’anormal », du « juste » et de « l’injuste », de « l’acceptable » et de « l’inacceptable » etc etc*.

* Le psychisme a « des idées » sur (à peu près) tout… oui, sur (à peu près) toutes les manifestations de l’Existant…

 

Les représentations mentales évoluent (ou du moins peuvent évoluer*) au fil des expériences (et tout au long de l’existence) et sont sous l’influence des représentations et des normes collectives en vigueur (dans la société). Elles occupent une place centrale dans la vie psychique comme si elles représentaient (pour le psychisme) l’essentiel de la « réalité » et constituaient (avec les perceptions visuelles et auditives et les sensations) l’une de ses seules possibilités d’accès à l’Existant (et à sa connaissance) au point de les voir (assez souvent) prendre le pas sur le « réel ».

* Les représentations mentales sont soumises à une très forte inertie… elles semblent « indéboulonnables » et fort peu évolutives…

 

Leur complexification a permis au psychisme d’élaborer une représentation de plus en plus complexe, de plus en plus abstraite, de plus en plus large et de plus en plus fine et détaillée de l’Existant (la cartographie mentale du « réel ») que nous avons décidé d’appeler le plan représentatif intellectuel (et qui fera l’objet d’une rubrique dans cette analyse).

 

Cette complexification et cette sophistication ont permis au psychisme de développer des capacités d’entendement et de s’interroger sur l’Existant, sur l’insatisfaction liée à la condition organique et aux conditions psychiques et intellectuelles limitées auxquelles la forme (le corps) est soumise, mais également de prendre conscience de certaines de ses potentialités (encore peu explorées et encore moins actualisées) et (accessoirement) du chemin qui « lui reste à parcourir » pour « retrouver » les caractéristiques de la Conscience (dont il a plus ou moins l’intuition — nous y reviendrons) et les faire advenir sur le plan phénoménal.

 

La complexification des représentations mentales a également permis au psychisme de voir émerger des réponses de plus en plus performantes aux besoins ressentis, de transformer l’Existant et de créer et de fabriquer quantités d’inventions pour satisfaire ses besoins et désirs que nous avons décidé d’appeler le plan réalisationnel actif (qui fera également l’objet d’une rubrique dans cette analyse). Comme elle lui a permis également de se donner « toujours plus de moyens » et de possibilités dans sa quête incessante et inlassable de confort, de sécurité et de permanence…

 

Les représentations mentales sont devenues si prépondérantes dans la vie psychique humaine qu’elles y ont très vite occupé une place (absolument) centrale. Au point de constituer des repères rassurants et un socle à partir duquel la très grande majorité des individus « édifie » et « construit » son existence…

 

… au point où elles orientent ou colorent, de façon substantielle, la perception visuelle de l’Existant comme si elles « habillaient » le perçu*.

* Allant parfois même jusqu’à s’y substituer de façon quasi complète, donnant ainsi au psychisme le sentiment de voir « la réalité » alors qu’il ne perçoit que la projection de ses propres représentations…

 

… au point où la très grande majorité des individus accorde une importance cruciale aux repères (et privilégie les habitudes).

 

… au point où la très grande majorité des individus évite (avec soin) de les remettre en cause et ne peut souffrir (le moins du monde) de les voir mises « à mal », « bousculées » ou ébranlées afin de préserver un sentiment de sécurité psychique (fallacieux, bien entendu…).

 

… au point où la très grande majorité des individus est toujours encline à émettre, de façon incessante (et souvent inconsciemment), de nombreux et divers jugements et opinions sur toutes les manifestations de l’Existant*.

* Jugements sur soi, sur les autres, sur le monde, sur ce qui est et ce qui devrait être alors que le psychisme ne perçoit que ce qui a l’air d’être et crée artificiellement une « référence idéale » en croyant que « le réel » devrait s’y conformer…

 

… au point où la très grande majorité des individus a systématiquement recours aux projections anticipatives (création de représentations mentales temporelles). Processus qui consiste à se projeter dans le temps et à prévoir à l’avance les situations futures possibles et à déterminer, parmi toutes celles qui sont envisagées, celle qui sera (selon toutes vraisemblances) la plus porteuse de satisfaction et/ou de confort et de sécurité*, faisant naître ainsi le désir de voir cette situation se concrétiser « de façon réelle » (autrement dit qu’elle se matérialise sur le plan de l’Existant).

* Certains individus vont être prédisposés à prendre des risques et à privilégier une situation potentiellement plus porteuse de satisfaction que leur situation présente. D’autres, au contraire, vont privilégier la sécurité et renoncer à des situations potentiellement plus porteuses de satisfaction mais dont la survenue n’est pas garantie.

 

Notons que ce processus crée des attentes très fortes (parfois nombreuses et très puissantes dans l’espace psychique) à l’égard des manifestations de l’Existant (les évènements, les circonstances, les situations et les interactions) qui peuvent envahir complètement l’espace psychique et avoir de fortes répercussions sur l’encombrement psychique (soucis et préoccupations concernant la réalisation effective du (ou des) scénario(s) retenu(s)). Soulignons également que ce processus a une très grande influence sur les comportements stratégiques adoptés par les individus, prêts à utiliser tous les moyens à leur disposition pour que leur attentes se réalisent (et deviennent « réalité ») et à éliminer les obstacles (tous les obstacles réels, ressentis, potentiels ou imaginés) qui pourraient entraver (ou retarder) leur réalisation.

 

Bref, comme nous le constatons, à travers ces quelques éléments, les représentations mentales sont innombrables, à peu près « partout »... (dans tous les « recoins » du psychisme) et totalement omnipotentes…

 

Les représentations mentales, véritable noyau du psychisme, ont ainsi une influence prépondérante et centrale sur les désirs, les attentes, la perception des manifestations de l’Existant, le sentiment subjectif de sécurité psychique et le sentiment subjectif de satisfaction psychique.

 

A l’instar des manifestations de l’Existant et des sensations, les représentations mentales peuvent être divisées, de façon schématique, en trois catégories :

 

- les représentations mentales sans effet sur le sentiment de confort et d’inconfort (neutres) qui n’impliquent pas nécessairement d’action ;

 

- les représentations mentales inconfortables (pénibles) qui impliquent une (ou des) action(s) pour retrouver la zone de confort ;

 

- et les représentations mentales confortables (plaisantes) qui peuvent être à l’origine de plusieurs mouvements : la peur de les voir disparaître, le désir de les rendre plus durables et/ou permanentes et le désir d’en améliorer la qualité et/ou l’intensité. Mouvements qui peuvent, à leur tour, créer une (ou des) actions afin d’améliorer la zone de confort.

 

 

Les émotions (au sens large – émotions et sentiments)

Bien qu’elles puissent se manifester sans raison apparente* ni lien avec les manifestations de l’Existant, les émotions semblent, en grande partie, liées au degré de coïncidence (de correspondance ou de décalage) — plus ou moins fort — entre d’une part, les besoins, les désirs et les attentes ressentis et leur satisfaction effective et d’autre part, entre les représentations mentales et « la réalité ».

* Du moins non perceptible par le psychisme (dont la perception, rappelons-le, est restreinte et limitée…).

 

Les émotions et les sentiments* occupent également un rôle central dans la vie psychique. Ils colorent très fortement le psychisme et influencent grandement les liens avec l’Existant et les rapports avec les formes.

* Il serait sans doute judicieux, ici, de distinguer les émotions des sentiments. De façon très simpliste, disons que les émotions semblent appartenir à la sphère psycho-organique alors que les sentiments semblent relever davantage de la sphère psychique (même si ces derniers ont également des répercussions sur le corps)... En effet, les premiers surviennent de façon relativement « brute » et « spontanée » alors que les seconds apparaissent davantage comme des constructions mentales (même si le « processus » d'élaboration n'est pas conscient ou perçu et qu'il reste – en général – assez flou)...

 

Les émotions — émotions et sentiments — peuvent être également divisées, de façon schématique, en trois catégories :

 

- les émotions sans effet sur le sentiment de confort et d’inconfort (neutres) qui n’impliquent pas nécessairement d’action ;

 

- les émotions inconfortables (douloureuses, gênantes, pénibles) qui impliquent une (ou des) action(s) pour retrouver la zone de confort ;

 

- et les émotions confortables (plaisantes) qui peuvent être à l’origine de plusieurs mouvements : la peur de les voir disparaître, le désir de les rendre plus durables et/ou permanentes et le désir d’en améliorer la qualité et/ou l’intensité. Mouvements qui peuvent, à leur tour, créer une (ou des) actions afin d’améliorer la zone de confort.

 

 

DEUX MECANISMES CENTRAUX DU PSYCHISME

 

Le désir

Le désir constitue sans doute l’un des plus puissants moteurs du psychisme. Il s’est probablement manifesté (de façon plus vive) dès que le psychisme a réalisé qu’il était en mesure d’accroître sa satisfaction (son sentiment de satisfaction) en améliorant les réponses aux besoins ressentis.

 

Les désirs sont extrêmement liés au sentiment d’insatisfaction et/ou de manque (lorsque les besoins et les désirs ne sont pas satisfaits) et au sentiment d’incomplétude* (lorsque l’ensemble des besoins et des désirs est satisfait mais que subsiste un résiduel et inaltérable sentiment d’insatisfaction…).

* Le sentiment d’incomplétude n’est pas toujours ressenti (ou perçu) par les individus…

 

Les désirs sont (en général) soumis à l’impératif d’immédiateté (ou tout au moins à la rapidité de leur satisfaction). Ils paraissent infinis (et infiniment renouvelables) alors que les possibilités « de les satisfaire » sur le plan de la Vie terrestre semblent limitées (en dépit des efforts et de l’énergie déployés par les Hommes pour y répondre…). En effet, à mesure de leur satisfaction (grâce aux réponses trouvées par le psychisme pour les « combler »), d’autres désirs apparaissent, appelant à améliorer les réponses et/ou à en trouver de nouvelles qui, à leur tour, créent d’autres désirs… indéfiniment...

 

Les désirs sont incroyablement puissants. Ils sont porteurs d’une très forte énergie qui donne naissance à des actions et des réflexions d’une grande vitalité qui ne peuvent s’éteindre (le plus souvent) qu’avec la satisfaction des désirs (ou éventuellement avec leur abandon « contraint*» — désirs inaccessibles ou irréalisables par exemple).

* Avec (en général) une « non acceptation » (avec un enfouissement, un refoulement…) qui engendre des effets et des répercussions plus ou moins forts et durables sur le plan psychique et/ou organique et/ou sur l’entourage…

 

 

BREF APARTE : avec l’émergence de la monnaie (créée, à l’origine, pour faciliter les échanges entre les individus), l’argent va très vite occuper une place essentielle dans la vie des Hommes. La raison en est simple : le psychisme va lui attribuer un rôle déterminant : satisfaire les besoins et les désirs. L’argent ne cessera dès lors d’être (avec la sexualité, autre domaine essentiel où se manifeste le désir…) l’une des préoccupations majeures du psychisme et des Hommes (nous aurons maintes fois l’occasion d’y revenir…). 

 

 

La zone de confort (ou de satisfaction)

Le psychisme est (au regard de son identification à la forme) soumis à la nécessité de rester dans sa zone de confort, contraint de la retrouver (s’il la quitte) et d’en améliorer les caractéristiques (car il est soumis au désir) en matière de qualité, de durée (de durabilité) et de sécurité afin d’accroître (ou d'améliorer) son sentiment de satisfaction.

 

Voici les éléments principaux qui influent sur le sentiment de satisfaction (et plus exactement sur le degré de sentiment de satisfaction) ou d’insatisfaction ressenti par le psychisme :

 

- la satisfaction(1) ou la non satisfaction des besoins ressentis (que nous aborderons dans les paragraphes suivants) ;

 

- la satisfaction(1) ou la non satisfaction des désirs ressentis (désirs conscients ou inconscients – perçus ou non perçus – que nous aborderons également dans les paragraphes suivants) ;

 

- la satisfaction(1) ou la non satisfaction des attentes (le degré de coïncidence entre les attentes – les projections temporelles des désirs et/ou les projections des représentations mentales et les manifestations perçues de l’Existant(2)) ;

(1) Et plus exactement sur le degré de satisfaction.

(2) Les manifestations perçues de l’Existant sont, pour l’essentiel, les situations, les évènements, les circonstances et les interactions avec les autres formes.

 

- le temps nécessaire entre l’apparition des besoins, des désirs et des attentes et leur satisfaction ;

 

- la nature satisfaisante (plaisante et/ou confortable) ou insatisfaisante (déplaisante, pénible et/ou inconfortable) des manifestations perçues de l’Existant ;

 

- le degré de coïncidence entre les manifestations perçues de l’Existant et les représentations mentales (non temporelles et non projectives) ;

 

- la nature plaisante (confortable) ou déplaisante (inconfortable) des sensations et des représentations mentales ;

 

- le degré d’encombrement psychique*(taux de saturation psychique mesuré par la place — voire même l’envahissement – des contenus psychiques dans l’espace psychique) ;

* L’encombrement psychique est délimité par une fourchette haute et une fourchette basse. Ainsi, un excès de contenus psychiques peut provoquer une saturation psychique, source d’inconfort qui peut aller jusqu’à un effondrement psychique. Et, a contrario, l’absence de contenus psychiques ou « le vide » est une très grande source d’inconfort psychique (en général, perçu comme « insupportable »…).

 

- le degré d’activité psychique*;

* L’activité psychique est circonscrite par une fourchette haute et une fourchette basse. Ainsi, un excès d’activité psychique peut provoquer une saturation psychique, source d’inconfort qui peut aller jusqu’à un effondrement psychique. Et, a contrario, l’absence d’activité psychique peut engendrer l’ennui, source d’inconfort psychique (en général, perçu comme « insupportable »…).

 

- le degré de pression et de contraintes* (internes et externes) exercées sur le psychisme (et éventuellement leur origine et leur nature) ;

* Les pressions et les contraintes auxquelles le psychisme est soumis (pressions internes ou externes) sont délimitées par un seuil. En effet, un excès de pression et de contraintes provoque, en général, un stress, source d’inconfort psychique (qui peut aller jusqu’à un effondrement psychique) mais peut aussi créer de l’anxiété (et/ou de l’angoisse), autre(s) source(s) d’inconfort psychique.

 

- la nature satisfaisante (plaisante et/ou confortable) ou insatisfaisante (déplaisante, pénible et/ou inconfortable) des émotions et des sentiments (en partie liée aux interactions avec l’Existant – à leur nature plaisante ou déplaisante, à leur degré de coïncidence avec les représentations mentales, à la satisfaction ou la non satisfaction des besoins, des désirs, des attentes, au degré d’activité psychique et au degré de pression et de contraintes…) ;

 

- le sentiment subjectif de satisfaction* et d’insatisfaction (sentiment subjectif de joie ou de contentement avec capacité de distanciation) essentiellement à l’égard de la vie et du monde – les manifestations de l’Existant – en matière de satisfaction des besoins, des désirs et des attentes et à l'égard de ses capacités (réelles ou imaginées) à les satisfaire, sa capacité de distanciation et ses capacités à endurer l’insatisfaction ;

* Le sentiment subjectif de satisfaction ou d’insatisfaction dépend essentiellement du sentiment subjectif de confort et du sentiment subjectif de sécurité. Outre qu’il varie selon les paramètres liés à ces deux sentiments subjectifs, notons qu’il peut être altéré par un dysfonctionnement structurel (pathologies psychiques).

 

- le sentiment subjectif de confort et d’inconfort (sentiment subjectif de bien-être et de mal-être avec capacité de distanciation) essentiellement à l’égard de la vie et du monde – les manifestations de l’Existant – en matière de satisfaction des besoins, des désirs et des attentes et à l'égard de ses capacités (réelles ou imaginées) à les satisfaire, sa capacité de distanciation et à endurer l’inconfort ;

 

- le sentiment subjectif de sécurité* et d’insécurité (sentiment de confiance avec capacité de distanciation) essentiellement à l’égard de la vie et du monde – les manifestations de l’Existant – en matière de satisfaction des besoins, des désirs et des attentes et à l'égard de ses capacités (réelles ou imaginées) à les satisfaire, sa capacité de distanciation et ses capacités à endurer l’insécurité.

* Le sentiment de sécurité (psychique) est lié à l’absence de dangers et/ou de douleur (réel(le)s, ressenti(e)s, potentiel(le)s ou imaginé(e)s) pour le corps(1) et à l’absence de dangers et/ou de souffrance (réel(le)s, ressenti(e)s, potentiel(le)s ou imaginé(e)s) pour le psychisme(2) qui peut être ou se sentir (dans ces deux cas) agressé (donc potentiellement ou réellement « entrer » dans la zone d’inconfort) lorsque, par exemple, les situations, les évènements ou les interactions sont perçus comme éprouvants, difficiles ou insupportables et/ou qu’ils altèrent, déstabilisent ou sont susceptibles de dégrader (voire de détruire) les représentations mentales. 

(1) Par exemple, une douleur ou un excès d’inconfort corporel peut engendrer un inconfort psychique qui peut aller (s’il est puissant) jusqu’à l’évanouissement (sorte de coupure du circuit perceptif).

(2) Les situations, les évènements et les interactions qui sont perçus comme psychiquement difficiles ou éprouvants peuvent créer des traumas — traumatismes psychiques — avec la possibilité d’évanouissement en cas de perception totalement « insupportable » comme ils peuvent altérer les représentations mentales et causer un inconfort psychique profond et/ou un mal-être (parfois persistant)...

 

 

LES BESOINS PSYCHIQUES (besoins, besoins-désirs, désirs et désirs-fantasmes)

Le psychisme est soumis* au corps (et la matière), eux-mêmes, soumis à la fragilité, à la douleur, à l’usure, à la finitude, à la pesanteur-lenteur, aux conditions environnementales et climatiques et aux interactions avec les autres formes (individus, animaux, bactéries etc) sans oublier le besoin de respiration et de repos pour le corps, il éprouve donc :

* Au regard de son identification à la forme…

 

 

Des besoins organiques et matériels

- un besoin respiratoire ;

 

- un besoin de repos corporel (soumis à la fatigue — épuisement énergétique du corps – au sens littéral) ;

 

- des besoins alimentaires (nourriture et eau) ;

 

- des besoins vestimentaires (pour protéger le corps) ;

 

- des besoins de santé, d’hygiène et de propreté (hygiène, absence de douleurs et de gênes, accès à l’eau (potable) et évacuation et traitement des eaux usées) ;

 

- des besoins de logement (refuge pour le corps, l’individu et les objets dont il a besoin) ;

 

- des besoins domestiques (la réalisation des tâches domestiques, essentiellement, préparation des repas, lavage du linge et nettoyage du foyer intérieur(1) et extérieur(2) ») ;

(1) Habitat.

(2) Jardin.

 

- des besoins énergétiques (confort du foyer et « carburant » pour les modes de déplacement et de communication) ;

 

- des besoins de défense et de protection (sécurité du corps et des biens matériels – armes et systèmes de protection des personnes et des biens) ;

 

- des besoins de mobilité et de déplacement ;

 

- des besoins reproductifs.

 

 

Le psychisme est également soumis à une zone de confort, il éprouve donc :

 

 

Des besoins psychiques élémentaires

- des besoins relationnels et affectifs (contacts et liens avec ses congénères pour des raisons organiques – sexualité et éventuellement reproduction – pour des raisons de protection psychique – le besoin d’aide, de soutien et d’appui par incapacité à subvenir seul à tous ses besoins organiques – par besoin de sentiment d’appartenance et de sentiment d’utilité – peur de la solitude et de l’isolement – par besoin de vivre avec des « références et des repères » humains – peur de la folie – pour des raisons psychiques liées au désir-plaisir – essentiellement émotions et sentiments « de proximité » amoureux et amicaux. Ces différents besoins engendrent un besoin grégaire – besoins de liens familiaux, amicaux et sociaux et des besoins de communication et de partage) ;

 

- des besoins de rencontres (par affinités et centres d’intérêt, avec ses pairs : rencontres familiales, amicales, affectives et amoureuses, sexuelles et avec les autres formes de l’Existant : animaux, végétaux, environnement…) ;

 

- des besoins de communication et d’information (modes de communication pour les échanges et pour savoir « ce qui se passe » chez les autres individus, connaître les évènements que vit la communauté humaine — ou une partie de la communauté humaine – et/ou s’informer des évènements « du monde »…) ;

 

- des besoins de protection et de défense psychiques (besoin d’un sentiment de satisfaction, de confort et de sécurité psychique minimal (variable selon les individus) dans tous les domaines. Ces domaines sont essentiellement liés au corps et à la matière (corps qui peut être blessé, endommagé et biens matériels – possessions – qui peuvent être altérés ou détruits par les évènements et les circonstances et/ou altérés, volés ou détruits par les interactions avec les autres formes (individus, groupes, animaux, bactéries) et liés au psychique qui peut se sentir et/ou être agressé par les évènements, les circonstances et les interactions avec les autres formes (individus, groupes, animaux, bactéries).

 

Ces besoins de protection et de défense psychiques se composent essentiellement :

 

- du besoin de repos psychique (le sommeil) — sorte de mise en veille relative du psychisme soumis à la fatigue (épuisement énergétique du psychisme – au sens littéral) qui peut, en outre, être utilisé comme moyen de s’extraire de l’ennui (perçu comme une source d’inconfort psychique) ;

- du besoin de sécurité physique minimale de l’individu (comme « corps-mental ») – absence de dangers réels, ressentis, potentiels ou imaginés pour le corps — besoin de sécurité physique et matérielle (voir les besoins de défense et de protection des personnes et des biens) ;

- du besoin de sécurité psychique minimale de l’individu par rapport à son identité, à l’image de soi (représentation mentale de soi) – et l’absence de dangers réels, ressentis, potentiels ou imaginés pour le psychisme et l’identité (personnelle) ;

- et du besoin de confort et de satisfaction psychique minimal(e) (absence de souffrance et de mal-être).

 

- des besoins distractifs (besoin de s’extraire de l’ennui – sentiment de vide – quand le psychisme est « inoccupé » (induisant un sentiment d’inconfort psychique) mais également besoin de s’extraire de la souffrance(1) et besoin de s’extraire des sphères que l’Homme est contraint d’investir (essentiellement les sphères liées à la satisfaction des besoins organiques et psychiques et/ou les activités imposées par la société humaine qui nécessitent beaucoup « de temps et d’énergie ») pour avoir le loisir (si j’ose dire !) de se consacrer à (et de s’absorber dans) une sphère récréative plaisante sans contrainte (ou avec contraintes choisies) et selon les préférences et les moments de nature plutôt « solitaire » ou plutôt « collective » et qui nécessite plus ou moins la mobilité du corps et le besoin de dépenses énergétiques (accessoirement en lien avec la curiosité, le besoin d’exploration et l’inclination naturelle du psychisme à aimer les fictions et les histoires comme signe révélateur — peut-être — d’un besoin inconscient de contrôler les évènements et de leur attribuer des caractéristiques plaisantes(2) — une « happy end » par exemple). Ces besoins distractifs concernent essentiellement les jeux, les « passe-temps » divers, les sports, les loisirs, les voyages d’agrément ;

(1) Il n’est pas rare que les Hommes utilisent des substances qui modifient le fonctionnement cérébral (et la « perception psychique »), telles que l’alcool et les drogues comme « moyen distractif », une façon de s’extraire de la dureté et de la pénibilité de l’existence (ressenties par le psychisme).

(2) Comme une façon, peut-être, de « compenser » l’absence de maîtrise du « réel » et des événements « réels » et leur caractère foncièrement inévitable, inéluctable, pénible et assez fortement porteurs de « souffrance » (pour le psychisme)…

 

- des besoins expressifs qui se composent essentiellement :

 

- du besoin d’expression émotionnelle (sorte de canal de libération émotionnelle comme si les émotions avaient besoin de « sortir du psychisme »* et de s’extérioriser…) ;

- du besoin de créer des représentations de l’Existant (par les images – représentations imagées – et par le langage – représentations abstraites) ;

- du besoin d’inscrire les savoirs sur un support et les stocker (par incapacité à les appréhender globalement de façon spontanée et par faibles capacités analytiques et  mnésiques) ;

- du besoin de « laisser une trace » (et/ou de témoigner) de ses expériences ;

- du besoin de raconter et/ou d’inventer des histoires (goût naturel du psychisme pour la fiction et la narration, lié au besoin d’évasion (façon de fuir la pénibilité « du réel » et ses cycles « routiniers » ressentis par le psychisme) ;

- et du besoin de convaincre (et de rallier « les autres » à son idéologie – à ses « représentations du monde »).

 * Le même mécanisme semble à l’œuvre lorsque les émotions se manifestent sur le plan physique (pleurs, cris, etc)…

 

- des besoins de compréhension. Ils se composent essentiellement :

 

- du besoin de savoir(s) pour trouver et améliorer les réponses aux besoins (et aux désirs) ressentis par le psychisme, l’invitant à la connaissance de l’Existant (la cartographie de l’Existant) – connaissance de tous les plans et systèmes et leur fonctionnement — lié aussi, en partie, à la curiosité ;

- du besoin d’organiser les savoirs (étant donné la complexification progressive des représentations et des réponses) en systèmes de plus en plus conceptuels et abstraits (et améliorer leur développement et fonctionnement) ;

- du besoin de donner du sens à l’existence (signification et direction) et/ou de diminuer (ou de résoudre) l’insatisfaction ressentie / au vécu (et plus généralement / l’existence), induit essentiellement par la souffrance et la disparition du corps (la mort) qui invitent à s’interroger sur « son existence » (et/ou, plus généralement, sur l’existence), sa nature et son identité et/ou à s’engager dans « une recherche existentielle » (voire directement dans un cheminement spirituel).

 

Le psychisme met tout en œuvre pour satisfaire ces besoins organiques, matériels et psychiques élémentaires. Mais la façon dont il y répond est très fortement marquée par d’autres besoins et désirs : les besoins-désirs narcissiques, les besoins-désirs, les désirs d’ordre général et les désirs-fantasmes.

 

Le psychisme (identifié à la forme) est également soumis à l’image de soi et au sentiment narcissique, il éprouve donc :

 

 

Des besoins-désirs narcissiques

- des besoins-désirs de singularisation dans tous les domaines investis (ou ceux qui semblent les plus à même d’offrir une valorisation narcissique (être/se sentir unique, singulier, important, le meilleur…) ;

 

- des besoins-désirs de reconnaissance et d’amour (être reconnu, être respecté, être apprécié, être aimé…).

 

Le psychisme est également soumis au désir, il éprouve donc :

 

 

Des besoins-désirs

- des besoins-désirs de plaisir (dans tous les domaines) ;

 

- des besoins-désirs de confort, de satisfaction et de bien-être (dans tous les domaines) ;

 

- des besoins-désirs d’amélioration du confort, de la sécurité et de la durabilité dans la satisfaction des besoins organiques et psychiques élémentaires et dans la satisfaction des besoins-désirs narcissiques et des besoins-désirs (et accessoirement en matière de rapidité, de simplicité et de permanence, d’accès, de plaisir, de joie, de bonheur et de beauté qu’ils peuvent procurer…) ;

 

- des besoins-désirs de satisfaction de tous les désirs (et de leur amélioration permanente) dans tous les domaines.

 

 

Des désirs d’ordre général

- désir de « vivre des situations* », des évènements, des circonstances et des interactions satisfaisants, plaisants, confortables, sécurisants (en adéquation avec les attentes et les représentations mentales), porteurs de bonheur, de joie, de beauté et d’intensité.

* Autrement dit, des sensations, des manifestations de l’Existant (des interactions avec l’Existant), des émotions, des sentiments et des représentations mentales.

 

Le psychisme met tout en œuvre pour satisfaire ces besoins et ces désirs (les besoins organiques et matériels, les besoins psychiques élémentaires, les besoins-désirs, les besoins-désirs narcissiques et les désirs d’ordre général). Mais il est également soumis à des enjeux et impératifs liés aux caractéristiques générales des plans matériels et organiques et aux caractéristiques générales et spécifiques du plan psychique qui induisent l’existence de désirs plus profonds (conscients ou inconscients – perçus ou non perçus) : les désirs-fantasmes qui vont avoir une influence prépondérante sur la façon de satisfaire les besoins et désirs précités.

 

 

Des désirs-fantasmes

Ainsi, le psychisme est soumis à la récurrence des besoins et des obligations. Il est également soumis à des activités permanentes de toutes sortes (en particulier pour satisfaire les besoins), à la récurrence des cycles jour/nuit, à la récurrence des saisons, à l’ennui et à la routine (induits par la superficialité de ses capacités perceptives…), à la crainte de l’ennui et du vide et la « fixité » de ses représentations mentales (qui figent l’Existant sans percevoir ses riches, divers et innombrables mouvements…), il éprouve donc :

 

- le désir-fantasme (inconscient — non perçu sans impératif ressenti d’actualisation) de liberté totale*(1);

* Liberté totale qui pourrait être définie ainsi : pouvoir, à tout instant, créer, faire, exprimer (et y compris ne rien créer, ne rien faire, ne rien exprimer) ce qu’il veut quand il veut comme il veut où il veut avec qui il veut sans aucune limitation, restriction et obligation et (accessoirement) en toute sécurité.

(1) Caractéristique de la Conscience et/ou dimension ressentie en habitant (plus largement) l’espace de Conscience.

 

- le désir-fantasme d’intensité(2) (ou d’exaltation) ;

 

- le désir-fantasme de diversité.

(2) Ressentir un sentiment de grande intensité à la vue de la diversité de l’Existant est très proche du sentiment  d’émerveillement, caractéristique ressentie en habitant (plus largement) l’espace de la Conscience.

 

Le psychisme est également soumis à la douleur, à la lenteur-pesanteur et à la finitude du corps, à la souffrance (psychique) et aux dangers pour le corps et pour le psychisme, il éprouve donc :

 

- le désir-fantasme de protection et de sécurité maximales avec risque zéro qui cache le désir-fantasme (inconscient — non perçu sans impératif ressenti d’actualisation) d’invulnérabilité absolue(1) ;

 

- le désir-fantasme de durabilité maximale qui cache le désir-fantasme (inconscient — non perçu sans impératif ressenti d’actualisation) de permanence « permanente » (immortalité(1)) ;

 

- le désir-fantasme d’expansion (infinie(2)) et le désir-fantasme (inconscient — non perçu sans impératif ressenti d’actualisation) d’Infini(1) ;

 

- le désir-fantasme d’immédiateté(2) (de simultanéité entre l’apparition des besoins et des désirs et leur satisfaction).

(1) Caractéristiques de la Conscience, inaltérable, permanente, infinie et/ou dimension ressentie en habitant (plus largement) l’espace de Conscience.

(2) Les désirs s’inscrivent dans une temporalité alors que la Conscience semble s’inscrire dans une perspective atemporelle…

 

Le psychisme est également soumis à la dureté et à la violence (organique et psychique) des interactions, au foisonnement du Vivant et au chaos apparent de l’Existant et à son ignorance (ou sa non compréhension) à son égard (qui l’amène, parfois, à croire à l’absurdité du monde et de l’existence…), il éprouve donc :

 

- le désir-fantasme de bonheur (correspond à une sorte de plénitude-complétude d’ordre individuel*) ;

 

- le désir-fantasme de réalisation personnelle (correspond à une sorte de plénitude-complétude d’ordre individuel*) ;

 

- le désir-fantasme de joie(1) — vivre et voir partout la joie ;

 

- le désir-fantasme d’amour(1) — vivre et voir partout l’amour ;

 

- le désir-fantasme de paix (tranquillité absolue) (1) — vivre et voir partout la paix ;

 

- le désir-fantasme d’harmonie(1) — vivre et voir partout l’harmonie ;

 

- le désir-fantasme de beauté(A) (1) — vivre et voir partout la beauté ;

 

- le désir-fantasme (inconscient — non perçu sans impératif ressenti d’actualisation) de perfection(B) (1) ;

 

- le désir-fantasme (inconscient — non perçu sans impératif ressenti d’actualisation) de contemplation(1) (inactivité – être sans agir ni participer à l’Existant) ;

 

- le désir-fantasme (inconscient — non perçu sans impératif ressenti d’actualisation) d’Intelligence (absolue) (1) – tout savoir, tout connaître, tout comprendre…

* Se sentir utile, épanoui(e), bien « dans sa peau » etc etc.

(1) Caractéristiques de la Conscience et/ou dimension ressentie en habitant (plus largement) l’espace de Conscience.

(A) La beauté a toujours (et de tout temps) irrésistiblement attiré (voire fasciné) le psychisme humain sans doute parce qu’elle procure une joie indicible. Joie qui pourrait être intimement liée au fait que la beauté perçue à la vue d’un « être beau », d’un « paysage beau » ou d’une « expression belle » permet aux individus de voir (ou même de « toucher du doigt ») la matérialisation (concrète et « réelle ») de leur idée et/ou de leur représentation de la beauté (de leur idée de la perfection…)... ce qui (entre parenthèses) les incite, très souvent, à vouloir posséder « l'objet », porteur de cette beauté...  

(B) Il existe une différence majeure entre l’idée de la perfection fabriquée par le psychisme (qui correspond, en général, à une représentation mentale relativement floue et étroite où l’idée du « personnage* » (auquel s’identifie l’individu) vit pleinement l’ensemble de ses désirs et fantasmes (au sens large)) et le sentiment de perfection ressenti en « habitant » (plus largement) l’espace de Conscience où tout est ressenti comme parfait (y compris les aspects réellement ou potentiellement âpres et douloureux pour le psychisme et le « personnage* »…).

* Caractéristiques individuelles ou personnalité...

 

Le psychisme est également soumis au sentiment d’incomplétude et à la relativité de son existence (et de tous les autres plans), il éprouve donc :

 

- le désir-fantasme (inconscient — non perçu sans impératif ressenti d’actualisation) de plénitude-complétude(1) ;

 

- le désir-fantasme (inconscient — non perçu sans impératif ressenti d’actualisation) d’Absolu(1).

(1) Caractéristiques de la Conscience et/ou dimension ressentie en habitant (plus largement) l’espace de Conscience.

 

Le psychisme est également soumis à la temporalité, il éprouve donc :

 

- le désirs-fantasme (inconscient — non perçu sans impératif ressenti d’actualisation) d’achèvement complet et définitif(1) ;

 

- le désir-fantasme (inconscient — non perçu sans impératif ressenti d’actualisation) de permanence (éternité) (1).

(1) Caractéristiques de la Conscience et/ou dimension ressentie en habitant (plus largement) l’espace de Conscience.

 

Le psychisme (identifié à la forme) est également soumis à l’image de soi et au sentiment narcissique, il éprouve donc :

 

- des besoins-désirs de singularisation (être/se sentir unique, singulier, important, le meilleur…) qui cachent le désir-fantasme (inconscient — non perçu sans impératif ressenti d’actualisation) d’Unicité(1)  (être l’Unique…) ;

 

- des besoins-désirs de reconnaissance et d’amour (être reconnu, être respecté, être apprécié, être aimé…) qui cachent le désir-fantasme (inconscient — non perçu sans impératif ressenti d’actualisation) d’Unité(1) (être l’Unique s’aimant Lui-même à travers toutes les manifestations de Lui-même…).

(1) Caractéristiques de la Conscience et/ou dimension ressentie en habitant (plus largement) l’espace de Conscience. Tout est ressenti comme « Un ». La « multitude » est Un. Et Tout se manifeste dans le « regard » impersonnel qui ne fait qu’Un avec tous les « phénomènes » (indissociabilité de la Conscience et de l’Existant).

 

Comme nous l’avons déjà évoqué, tous ces désirs (besoins-désirs, besoins-désirs narcissiques, désirs d’ordre général et désirs-fantasmes) vont très substantiellement orienter les réponses et la satisfaction des besoins organiques et matériels et des besoins psychiques élémentaires. Mais ils orienteront également très fortement et très largement les rapports entre les individus et leur organisation (le modèle sociétal).

 

 

Le fonctionnement général du psychisme

 

Liens entre psychisme et cerveau

Le psychisme et le cerveau entretiennent des liens très étroits : ce dernier semble à la fois le support et le créateur du psychisme. Nous pourrions essayer d’étoffer cette rubrique (plus qu’indigente… totalement inexistante…) mais, en réalité (au vu de notre connaissance), nous n’en serions guère capables(1)… aussi nous préférons « renvoyer » aux travaux(2) de ceux qui (si j’ose dire !) y « réfléchissent »... 

(1) Hormis quelques affligeantes banalités*, nous empilerions probablement les bêtises et les âneries (toutes plus « grosses » les unes que les autres…)… il semble donc plus raisonnable de laisser ce domaine aux spécialistes des neurosciences…

(2) Avec le développement de l’imagerie médicale, les scientifiques essayent aujourd’hui (entre autres exemples) de repérer les zones cérébrales « actives » (ou « activées ») au cours des différentes activités psychiques (la pensée, les émotions etc etc)… et de comprendre les relations entre les différents processus psychiques et le cerveau…

* Voici un bref aperçu de ces éléments « truistiques » : l’encéphale semblerait constituer le « second cerveau » (le premier serait une sorte de « cerveau du ventre », appelé aussi « cerveau intestinal » — une « annexe » du système nerveux central plus ou moins autonome — permettant à l’organisme de transformer les aliments en nutriments (signe que la biologie et la physiologie ont eu la primauté « chronologique » sur la psychologie et le psychisme… et que l’ingestion « d’autres formes » et leur « intégration » au corps (via les nutriments) constituent une activité éminemment complexe qui nécessite un « système neuronal » qui leur soit dédié… ), le néocortex semble jouer un rôle prédominant dans les fonctions cognitives, les lobes pariétaux seraient impliqués dans la perception de l'espace et dans l'attention, le lobe frontal interviendrait dans la planification et le langage, la plasticité cérébrale se réaliserait tout au long de la vie (avec la création de réseaux synaptiques), la glande pinéale aurait un rôle central dans la pensée (Descartes la désignait même comme le « siège » de l'âme), quant au cerveau « reptilien », il serait « responsable » des comportements primitifs nécessaires pour assurer les besoins fondamentaux, les neuromédiateurs (et, en particulier, la sérotonine et la dopamine) seraient des éléments essentiels dans « le sentiment de bien-être » (ou de mal-être) et interviendraient (entre autres fonctions) dans les « circuits de la récompense » et de la satisfaction (avec également — entre autres — les endorphines)… nous pourrions ajouter quelques autres banalités du même acabit… mais voilà, grosso modo, l’essentiel de nos savoirs (totalement dérisoires) en la matière… une suite de banalités sans intérêt… et qui s’avèrent (qui plus est…) totalement inutiles dans notre perspective…

 

 

Un espace perceptif circonscrit et limité doté d’une très forte propension à la saisie

Le psychisme semble être un espace perceptif circonscrit et limité (à bien des égards). Il pourrait être également considéré comme un univers « très mobile* », mais il semble plutôt qu’il soit traversé par d’innombrables mouvements (les contenus psychiques que nous avons déjà abordés) qu’il s’empresse (et ne peut s’empêcher) de saisir (expliquant ainsi son caractère apparemment mobile*). Il nous faut souligner, ici, la forte (voire très forte) propension du psychisme à la saisie. Il ne serait pas exagéré de dire qu’il « s’accroche » à tout ce qui le traverse (ou, du moins, à tous les éléments et manifestations qu’il juge « importants » et/ou qu’il estime bénéfiques et porteurs d’agréments ou néfastes et porteurs de désagréments — réels ou potentiels)… Ces mouvements sont essentiellement :

 

- des perceptions visuelles de l’Existant (les manifestations de l’Existant) ;

- des sensations (les ressentis corporels, les gênes, les douleurs…) ;

- des besoins ;

- des pensées – représentations mentales (les idées, les images, diverses représentations…) ;

- des désirs ;

- et des émotions (les émotions et les sentiments).

* Cette caractéristique apparente serait-elle liée à l’identification du psychisme au corps(1) ?

(1) Corps qui — rappelons-le — est une forme énergétique relativement mobile (relativement compte tenu de son caractère physique  — la matière semble, en effet, constituer une sorte de « frein »… comme si elle agissait comme une force d’inertie en mesure « d’alourdir » ou de « ralentir » l’énergie…).  

 

Les sensations, les représentations mentales (pensées, images, idées), les émotions, les besoins et les désirs sont si puissants qu’ils peuvent d’une part, occuper tout l’espace psychique (contenus psychiques « invasifs ») et peuvent d’autre part, colorer*, de façon substantielle, les perceptions visuelles de l’Existant (comme s’ils les habillaient d’un filtre en imposant leur coloration – leur orientation ou leur angle de vue – « au perçu » — à tout ce qui est perçu). Et ils orientent également les comportements (actions pour les satisfaire et les matérialiser) en faisant en sorte de faire advenir ou de créer les conditions de leur matérialisation (ou de leur satisfaction) et d’éliminer ou de contourner tous les obstacles (réels, potentiels ou imaginés) qui entraveraient leur matérialisation (ou leur satisfaction).

* Et ils les colorent d’ailleurs très souvent…

 

 

Un univers complexe sujet à la projection

Le psychisme est un univers complexe sujet à la projection (voire, peut-être même, de nature essentiellement « projective » au regard de l’omnipotence des représentations mentales). En effet, en raison de la prégnance et de « l’emprise » des représentations mentales (qui constituent l’essentiel de ses connaissances), celles-ci orientent grandement la perception du psychisme (perception de soi, des autres, du monde) comme si elles aussi « habillaient » le perçu…

 

 

Zone de confort, satisfaction, peurs et désirs

En dépit d’une capacité d’adaptation aux situations (les évènements, les circonstances et les interactions), variable selon les individus mais généralement relativement faible (avec néanmoins une capacité d’habituation), le psychisme est soumis à un sentiment de confort(1) psychique qui est circonscrit de façon étroite et contraignante avec peu d’amplitude(2) (avec fourchettes hautes et basses au-delà desquelles le psychisme ne peut se maintenir durablement). Lorsque l’inconfort psychique se manifeste, le psychisme n’a de cesse de vouloir retrouver sa zone de confort.

(1) Contrairement à certains paragraphes précédents, nous utiliserons, ici, indifféremment les termes « zone de confort » et « zone de satisfaction »…

(2) Amplitude qu’il ne semble guère possible de modifier (ou d’élargir) en se maintenant dans l’espace psychique… Seul un élargissement (une façon « d’habiter » plus largement l’espace de Conscience) semble en mesure de développer cette amplitude…

 

Comme nous l’avons évoqué, sa nature le contraint à rester dans sa zone de confort. Et le soumet donc, de façon quasi permanente, à la peur (la peur de quitter sa zone de confort, la peur de rester dans sa zone d’inconfort et la peur de ne pas « améliorer » sa zone de confort…) et au désir (le désir de rester dans sa zone de confort, le désir d’en améliorer la qualité et la durée et le désir de la retrouver s’il la quitte…) :

 

- la peur (réelle, ressentie, potentielle ou imaginée) de quitter sa zone de satisfaction (zones de confort et de sécurité) ;

 

- la peur* de la non satisfaction des besoins organiques et matériels vitaux ;

- la peur* de la non satisfaction des autres besoins organiques et matériels (non vitaux) et des besoins psychiques.

 

… auxquelles il convient d’ajouter les peurs (certaines sont redondantes) liées au fait que le psychisme se soit identifié à la forme (au corps — forme fragile et vulnérable) qui est réellement et potentiellement soumise aux dangers, à « la puissance » de l’Existant (le monde et la Vie), à la pénibilité et à la misère de l’existence, à la douleur, à l’usure et à la finitude :

 

- la peur* de la douleur ;

- la peur* de la souffrance ;

- la peur* des dangers pour le corps et le psychisme (peurs que les situations, les évènements, les circonstances et les interactions le blessent et/ou mettent « à mal » ses représentations mentales) ;

- la peur de la mort.

 * Réelle, ressentie, potentielle ou imaginée.

 

- La peur (réelle, ressentie, potentielle ou imaginée) de rester dans sa zone d’insatisfaction (zones d’inconfort et d’insécurité) ;

 

- la peur* de la persistance de la non satisfaction des besoins organiques et matériels vitaux ;

- la peur* de la persistance de la non satisfaction des autres besoins organiques et matériels (non vitaux) et des besoins psychiques.

 

… auxquelles il convient d’ajouter les peurs (certaines sont redondantes) liées au fait que le psychisme se soit identifié à la forme (au corps — forme fragile et vulnérable) qui est réellement et potentiellement soumise aux dangers, à « la puissance » de l’Existant  (le monde et la Vie), à la pénibilité et à la misère de l’existence, à la douleur, à l’usure et à la finitude :

 

- la peur* de la persistance de la douleur ;

- la peur* de la persistance de la souffrance ;

- la peur* de la persistance des dangers pour le corps et le psychisme (peurs que les situations, les évènements, les circonstances et les interactions le blessent et/ou mettent « à mal » ses représentations mentales) ;

- la peur que la mort soit une fin « définitive ».

* Réelle, ressentie, potentielle ou imaginée.

 

- la peur de ne pas améliorer sa zone de satisfaction (zones de confort et de sécurité) ;

 

Essentiellement la peur de ne pas améliorer la qualité, la durée et la sécurité de la satisfaction de l’ensemble des besoins organiques et matériels vitaux et non vitaux, des besoins psychiques et des désirs.

 

 

- le désir de rester dans sa zone de satisfaction (zones de confort et de sécurité) ;

 

- le désir de la satisfaction des besoins organiques et matériels vitaux ;

- le désir de la satisfaction des autres besoins organiques et matériels (non vitaux) et des besoins psychiques.

 

… auxquels il convient d’ajouter les désirs (certains sont redondants) liés au fait que le psychisme se soit identifié à la forme (au corps — forme fragile et vulnérable) qui est réellement et potentiellement soumise aux dangers, à la puissance et à la misère du monde et de la Vie, à la douleur, à l’usure, à la pesanteur, à la lenteur et à la finitude :

 

- le désir d’absence de douleur* ;

- le désir d’absence de souffrance* ;

- le désir d’absence de dangers* pour le corps et le psychisme (désir que les situations, les évènements, les circonstances et les interactions ne le blessent pas et/ou ne mettent pas « à mal » ses représentations mentales) ;

- le désir (souvent inconscient) que la mort ne soit pas une fin « définitive ».

* Réelle (réels), ressentie (ressentis), potentielle (potentiels) ou imaginée (imaginés).

 

- Le besoin-désir de retrouver sa zone de satisfaction (zones de confort et de sécurité) s’il l’a quittée

 

Idem que « le désir de rester dans sa zone de confort ».

 

- le désir d’améliorer sa zone de satisfaction (zones de confort et de sécurité) ;

 

- essentiellement le désir d’améliorer la qualité, la durée et la sécurité de la satisfaction de l’ensemble des besoins organiques et matériels vitaux et non vitaux et des besoins psychiques.

 

… auxquels il convient d’ajouter les désirs (certains sont redondants) liés au fait que le psychisme se soit identifié à la forme (au corps — forme fragile et vulnérable) qui est réellement et potentiellement soumise aux dangers, à la puissance et à la misère du monde et de la Vie, à la douleur, à l’usure, à la pesanteur, à la lenteur et à la finitude, à la dureté et à la violence (organique et psychique) des interactions, au foisonnement du Vivant et au chaos apparent de l’Existant et à son ignorance (ou sa non compréhension) à son égard (qui l’amène parfois à croire à l’absurdité du monde et de l’existence) :

 

- le désir de vivre des situations et des évènements plaisants, confortables, sécurisants (en adéquation avec ses attentes et ses représentations mentales), porteurs de bonheur, de joie, de beauté et d’intensité ;

- le désir de vivre des contenus psychiques (émotions, représentations mentales...) plaisants, confortables, sécurisants et porteurs de bonheur, de joie, de beauté et d’intensité ;

- le désir de protection et de sécurité maximales avec risque zéro ;

- le désir de durabilité maximale et de permanence ;

- le désir d’expansion ;

- le désir d’immédiateté (de simultanéité entre l’apparition des besoins et des désirs et leur satisfaction) ;

- le désir de bonheur ;

- le désir de joie ;

- le désir d’amour ;

- le désir de paix ;

- le désir d’harmonie ;

- le désir de tranquillité ;

- le désir de beauté ;

- le désir de réalisation personnelle ;

- le désir (inconscient — non perçu sans impératif ressenti d’actualisation) de perfection ;

- le désir (inconscient — non perçu sans impératif ressenti d’actualisation) de contemplation (inactivité – être sans agir ni participer à l’Existant) ;

- le désir (inconscient — non perçu sans impératif ressenti d’actualisation) d’Intelligence (absolue).

 

… auxquels il convient d’ajouter les désirs liés au fait que le psychisme (qui s’est identifié à la forme) soit soumis à l’image de soi et au sentiment narcissique :

 

- des désirs de singularisation (être/se sentir unique, singulier, important, le meilleur…) ;

- des désirs de reconnaissance et d’amour (être reconnu, être respecté, être apprécié/aimé…).

 

… auxquels il convient d’ajouter les désirs liés au fait que le psychisme ait des capacités perceptives superficielles et des représentations mentales qui figent l’Existant (sans percevoir ses riches, divers et innombrables mouvements) qui le soumettent donc à l’ennui et à la routine :

 

- le désir d’intensité (ou d’exaltation) ;

- le désir de diversité.

 

… auxquels il convient d’ajouter les désirs liés au fait que le psychisme soit soumis au sentiment d’incomplétude et à la relativité de son existence (et de tous les autres plans) :

 

- le désir (inconscient — non perçu sans impératif ressenti d’actualisation) de plénitude-complétude.

 

… auxquels il convient d’ajouter les désirs liés au fait que le psychisme soit soumis à des obligations permanentes de toutes sortes :

 

- le désir (inconscient — non perçu sans impératif ressenti d’actualisation) de liberté totale.

 

… auxquels il convient d’ajouter les désirs liés au fait que le psychisme soit soumis à la dimension temporelle :

 

- le désir (inconscient — non perçu sans impératif ressenti d’actualisation) d’achèvement complet et définitif ;

- le désir (inconscient — non perçu sans impératif ressenti d’actualisation) de permanence.

 

 

Notons ici que le psychisme est très attaché au sentiment de confort « acquis » et à tous les éléments qui le permettent et/ou lui en donnent l’accès... L’accroissement du sentiment de confort s’appuie sur ce sentiment de confort « acquis ». Et la perte (ou la suppression) de l’un de ces éléments engendre un inconfort psychique (pas, peu ou mal accepté…).   

 

Lorsque l’inconfort cesse, le psychisme ressent un sentiment « de soulagement ». Et lorsque le confort s’accroît, il ressent provisoirement « davantage de satisfaction » (sentiment de satisfaction accru). Satisfaction dont il finit par « se lasser » (car il intègre ces éléments à la « normalité des choses » en les considérant comme « acquis »)…

 

 

Frustration, dépendance et attachement

Bien que le psychisme dispose d’une capacité de contentement relative (lorsque l’essentiel des besoins et des désirs est satisfait), celle-ci est de nature provisoire. Et (comme nous l’avons vu) d’autres désirs apparaissent spontanément et naturellement, suscitant l’inconfort psychique et appelant à être satisfaits. Ainsi est la nature complexe du psychisme…

 

Enfin, même lorsque tous les désirs « possibles et imaginables » sont comblés, subsiste un sentiment d’incomplétude et de manque (un résidu d’inconfort psychique inaltérable qui ne peut jamais être comblé*…), rendant impossible un sentiment de confort et de satisfaction psychique complet (parfait) et durable, ravivant sans cesse le cycle incessant et infernal des désirs et de leur satisfaction et invitant (accessoirement) à s’interroger sur soi (sur l’existence, sur sa nature véritable et son identité profonde) et à essayer de comprendre (et de « résoudre ») ce sentiment d’insatisfaction…

* Que les individus (comme nous l’avons déjà évoqué) ne sont pas toujours en mesure de ressentir…

 

Le sentiment de satisfaction psychique (sentiments de confort et de sécurité psychiques) est si prépondérant et essentiel que le psychisme est sujet :

 

- à la frustration (si ses désirs ne sont pas satisfaits). Frustration qui engendre un inconfort psychique « dévastateur » à l’origine de nombreux mécanismes, réactions et manifestations sur les plans psychique (mécanismes de défense divers*), émotionnel (tristesse, désespoir, énervement, colère etc) et organique (psycho-somatisation).

* Lorsque « le réel » est trop éloigné des désirs et/ou des représentations mentales, le psychisme peut même aller jusqu’à « décrocher » du « réel » pour ne vivre que « dans ses représentations » (dissociation, clivage…).

 

- à la dépendance. En effet, tout ce qui semble offrir (ou « procurer ») un sentiment de satisfaction au psychisme — situations, activités, domaines, objets, êtres, idées, représentations — peut engendrer (et engendre souvent) une dépendance psychique et conduire — tout comme le plaisir d’ailleurs — à des comportements addictifs (voire compulsionnels ou obsessionnels). Et au contraire, tout ce qui semble donner un sentiment d’insatisfaction peut entraîner une aversion (qui peut conduire les individus à vouloir éliminer – ou à supprimer – tout ce qui, à leurs yeux, en est à l’origine)...

 

- à l’attachement. En effet, tout ce qui « rassure » le psychisme (et favorise le sentiment de sécurité psychique) — situations, activités, domaines, objets, êtres, idées, représentations — peut engendrer (et engendre souvent) un attachement (en particulier un attachement « affectif » sur le plan relationnel…). Qui peut provoquer, lorsqu’il se trouve rompu (pour une raison ou une autre…) de profonds inconforts psychiques (sentiment de déstabilisation, de perte – avec crise de panique, d’angoisse – voire un sentiment d’amputation ou d’arrachement…).

 

 

Les comportements délétères

L'identification au corps et le sentiment de satisfaction psychique (sentiments de confort et de sécurité psychiques) sont également si prépondérants que le psychisme exacerbe, dans tous les domaines, des comportements :

 

- de saisie et d’accaparement (possession) ;

 

- de favorisation de l’intérêt personnel*;

* On pourrait considérer ce que l’on appelle « l’égoïsme » comme une façon pour l’espace de perception (l’espace psychique ici en l’occurrence) de prendre soin (d’une manière extrêmement limitée) des formes – d’un nombre très limité de formes : celle à laquelle le psychisme s’identifie et celles qu’il « juge » nécessaires à la satisfaction de « ses besoins et désirs »…

 

- d’estime de soi et de valorisation narcissique ;

 

- de pouvoir (puissance) ;

 

- d’instrumentalisation et d’élaboration de stratégies très variées (force, agression, élimination, entente, séduction, ruse, mensonge etc – la gamme est très large…), qui ont de fortes répercussions sur les rapports et les échanges entre individus*, leur attitude à l’égard des autres formes (animaux, environnement) et le fonctionnement du système (la société humaine) malgré l’avènement progressif des notions d’altérité, d’équité et de respect (relatif) et leur lente (et assez superficielle) intégration dans le psychisme humain et le système (la société humaine) ;

* De façon très schématique, les autres représentent pour le psychisme (essentiellement) :

- un moyen d’accéder à la satisfaction des besoins et désirs (instrumentalisation plus ou moins consciente) ;

- un obstacle à la satisfaction des besoins et désirs (lié à la concurrence et à la compétition entre les formes) ;

- un moteur (besoin de reconnaissance narcissique) et/ou un frein pour réussir à accéder à la satisfaction des besoins et désirs — selon les circonstances et les caractéristiques psychiques des individus (à la fois entrave à la satisfaction de certains besoins et désirs et inhibiteur des besoins et désirs dont la satisfaction met en jeu le respect de l’altérité (en vigueur dans la société).

 

- de maîtrise et de contrôle auxquels la cognition lui donne en partie accès en lui permettant (autant que possible) d’anticiper et de planifier dans tous les domaines « possibles et imaginables » afin que le « réel » s’ajuste et se conforme à ses besoins, désirs et représentations, l’obligeant à imaginer (sans cesse) tous les scénarios possibles des évènements (et leur déroulement) ;

 

- de modification et de transformation du « réel » et de l’Existant (avec ses capacités cognitives et ses capacités créatives) pour que ces derniers soient en mesure de répondre au mieux — et toujours mieux — à ses besoins, à ses désirs, à ses attentes (aux scénarios et au déroulement des évènements qui lui semblent plus favorables en terme de satisfaction) et à ses représentations mentales (concepts de bonheur, de réalisation de soi, de perfection etc etc).

 

 

La puissance créatrice du psychisme

Le psychisme est doté enfin d’une grande puissance créatrice. Grâce à la cognition qui lui offre l’accès aux représentations, à la conceptualisation, à l’abstraction, à l’analyse (au traitement des données), à la discrimination, au jugement, aux capacités mnésiques et aux capacités d’organisation et d’ordonnancement, il est à l’origine de la création de plusieurs plans.

 

Parmi ces plans, on trouve (principalement) :

 

- le plan émotionnel ;

 

- les plans imaginaire et imaginatif (les représentations mentales imagées) ;

 

- le plan représentatif intellectuel* (représentations mentales conceptuelles liées aux images et aux langages) ;

* Aujourd’hui, cette capacité est encore balbutiante mais recèle un très fort potentiel. Potentiel analytique et de puissance calculatoire (traitement et rapidité de traitement des données), potentiel mnésique, potentiel de savoirs, de connaissance et de compréhension, potentiel d’approfondissement et d’élargissement de la perception… 

 

- le plan artistique ;

 

- le plan réalisationnel actif* (qui constitue l’ensemble des réponses du psychisme aux besoins et à l’insatisfaction ressentis) ;

* Malgré les très nombreuses inventions humaines, cette capacité (créative et de transformation) est également encore aujourd’hui balbutiante bien qu’elle possède, elle aussi, un très fort potentiel...

 

- sans oublier (évidemment) le plan spirituel (qui semble être un plan perceptif sensible de distanciation qui permet « d’habiter » plus amplement l’espace de Conscience) ;

 

- et la société humaine (système fort complexe comme nous le verrons…) qui permet aux individus perceptifs « préconscients » de vivre ensemble et qui révèle (à bien des égards) sa grande puissance de création et de transformation de l’Existant sur le plan collectif ainsi que son immense « pouvoir » sur l’ensemble des plans (qu'il – le psychisme – tente inlassablement de transformer, d’améliorer et de contrôler (pour matérialiser ses désirs-fantasmes…).

 

Le psychisme entretient avec eux comme avec d’autres plans (en particulier le plan organique) de très nombreux (et très complexes) liens et a sur eux de très puissantes et très nombreuses implications… Bref, (et terminons-là par un poncif…), le psychisme est un plan absolument décisif et déterminant… 

 

Voir ANNEXE 3 (l'Homme et le psychisme, créateurs de différents plans)

 

 

LES GRANDS TYPES PSYCHIQUES

Il existe de très nombreuses (et parfois très complexes) classifications des types psychiques et comportementaux qui définissent, selon divers critères, plusieurs types de personnalité… Dans bon nombre d'entre elles, on trouve ainsi des personnalités (de type, de tendance ou dotées de caractéristiques) narcissique(s), anxieuse(s), histrionique(s), obsessionnelle(s), dépressive(s), borderline, dépendante(s), paranoïaque(s), schizoïde(s), sociopathe(s)… mais ces catégorisations ne nous sont, ici, d’aucune utilité… essayons plutôt de construire une classification adaptée à notre perspective.

 

A cette fin, nous allons créer une typologie en dégageant sept grands paramètres en fonction desquelles le psychisme adopte des postures différentes : posture du psychisme 1. /soi, 2. /aux autres, 3. /aux centres d’intérêt, 4. /aux manifestations de l’Existant (situations, circonstances, évènements), 5. /au temps et aux contenus psychiques, 6. /au monde et à la Vie, 7. /aux comportements collectifs et à l’évolution de la société.

 

Ainsi, selon sa posture à l’égard de ces paramètres, le psychisme peut être :

 

1. /soi

Très égotique/égotique/égotico-altruiste (plus égotique qu’altruiste)/altruisto-égotique (plus altruiste qu’égotique) ;

 

2. /aux autres

Libre/libro-dépendant/dépando-libre/dépendant ;

 

3. /aux centres d’intérêt

Utilitariste-pragmatique/pragmatico-intellectuel/intellectuel ;

 

4. /aux manifestations de l’Existant (situations, circonstances, évènements)

Satisfait/satisfo-insatisfait/insatisfo-satisfait/insatisfait ;

 

5. /au temps et aux contenus psychiques

Soucieux/anxio-relax/relaxo-soucieux/relax* ;

* Relax « réel » sans manifestation émotionnelle, comportementale ou psychosomatique…

 

6. / au monde et à la Vie

Prudent/prudo-intrépide/intrépido-prudent/intrépide ;

 

7. /aux comportements groupaux et à l’évolution de la société

Conservateur/moutonnier/progressiste.

 

 

Chez les Hommes, le psychisme le plus répandu (le plus commun) semble être de type égotique ou (parfois) égotico-altruiste, dépendo-libre, utilitariste-pragmatique ou pragmatico-intellectuel, insatisfo-satisfait, soucieux ou anxio-relax, prudo-intrépide, moutonnier.

 

NOTE : ces types donnent, bien sûr, une orientation générale. En réalité, chaque individu peut, tour à tour et selon les domaines, favoriser l’une ou l’autre de ces postures mais pour l’ensemble des domaines (et de façon générale) l’une d’elles est plus marquée que les autres (c’est celle-ci que nous retiendrons dans notre classification et dans notre perspective).

 

 

FOCUS : tentons à présent de développer, de façon plus détaillée, le paramètre n°7 lié aux comportements groupaux et à l’évolution de la société qui aura une grande incidence (et une grande importance) dans l’évolution des modèles sociétaux (que nous aborderons plus loin). Selon cette classification, il y a trois grands types de posture psychique :

 

- les conservateurs (type minoritaire) frileux et réfractaires, plus ou moins satisfaits des représentations de l’Existant, des représentations de l’existence et des réponses aux besoins ressentis, soucieux de laisser « l’ordre des choses » tel qu’il est, rétifs aux changements, au progrès, à l’évolution et à « la nouveauté » ;

 

- les intégrés passifs moutonniers (type éminemment majoritaire) globalement plus ou moins satisfaits qui suivent « le mouvement en marche », s’y « fondent » avec parfois quelques velléités inoffensives de démarcation (différenciations narcissiques) ou de revendications (pour préserver ou améliorer — en général — « leurs acquis ») et qui ont une inclination forte à « la facilité », à « la tranquillité » et au « confort », pas totalement repliés sur eux-mêmes et sur « leur acquis » ni totalement ouverts aux autres et à « la nouveauté » (excepté lorsqu’elle n’est pas – ou est peu – porteuse de risques et si elle est en mesure d’améliorer leur « tranquillité » et leur « confort »…) ;

 

- les progressistes globalement « insatisfaits » qui aspirent (à) et désirent « changer (et transformer) les choses » et le monde, dépasser et repousser les limites, adeptes du changement et de la nouveauté avec un fort besoin de comprendre et/ou d’améliorer... Au sein de ce type psychique, il existe un sous type composé d’individus qui aspirent davantage à la « compréhension de l’existence » qu’à l’amélioration forcenée de l’Existant que l’on retrouve (en général) dans la « sphère spirituelle ».

 

Ces trois grands types psychiques se retrouveront évidemment dans les mouvements comportementaux de masse et les grandes orientations sociétales (que nous aborderons ultérieurement).

 

 

RESUME DU PSYCHISME

En dépit de sa complexité, nous pourrions résumer le psychisme ainsi :

 

Le psychisme est un espace perceptif « restreint » (au regard de ses caractéristiques et de son fonctionnement) soumis :

 

- à l’identification au corps (à l’origine des sentiments égotiques et narcissiques, de la forte propension à la saisie des « contenus psychiques » et des comportements délétères) ;

- à l’omnipotence des représentations mentales (à l’origine des encombrements psychiques, des projections mentales, des anticipations, de la coloration de l’Existant et des comportements délétères) ;

- à de nombreux désirs et peurs (à l’origine de l’insatisfaction chronique, de la frustration et des comportements délétères) ;

- à une zone de confort — de faible amplitude — (à l’origine de l’inertie, de la dépendance, de l’attachement et des comportements délétères).

 

 

SYNTHESE DU PSYCHISME et DES BESOINS PSYCHIQUES

 

Deux grandes catégories de besoins

Les besoins et les désirs ressentis par le psychisme se manifestent dans les domaines principaux suivants :

1. l’alimentation

2. l’eau (potable) – l’évacuation et le traitement des eaux usées

3. la santé

4. les vêtements

5. le logement et les tâches domestiques

6. l’énergie (confort domestique et son utilisation dans les modes de transport et de communication)

7. les armes

8. les systèmes de protection des personnes et des biens – (protection du logement, de l’image, du sentiment narcissique, des rencontres...)

9. la mobilité (les modes de déplacement)

10. la reproduction

11. les relations et les rencontres (de tous ordres)

12. les modes de communication et d’information

13. les possibilités expressives et de savoirs

14. Les possibilités de distraction (divertissement)

15. les savoirs et la connaissance (leur stockage, leur accès, leur transmission)

16. le sentiment de confort et de bien-être psychiques (sentiments de satisfaction et de sécurité) dans tous les domaines

17. et (éventuellement) tous les nouveaux besoins et nouveaux domaines qui pourraient apparaître…

 

On pourrait regrouper ces domaines en deux grandes catégories :

 

- les besoins liés aux caractéristiques de « l’organique » et de la matière (fragilité, douleur, usure, finitude, pesanteur, lenteur) : domaines n°1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9 et 10 ;

 

- et les besoins liés aux caractéristiques du psychisme (fragilité, besoin de sentiment de confort, de sentiment de satisfaction, de sentiment de sécurité, de diversité, de nouveauté, de sensation, besoin d’être « occupé » (absorbé) — peur de l’ennui) : domaines n°5, 8, 11, 12, 13, 14, 15, 16 et 17.

 

Au vu des caractéristiques et des modes de fonctionnement du psychisme, notons que les Hommes sont enjoints d'assurer la satisfaction des besoins et des désirs dans tous les domaines de façon sécurisée et permanente et de façon aussi rapide, simple, confortable et intelligente que possible (selon les capacités et possibilités offertes par les savoirs et la technique) et à assurer également l’amélioration des réponses (leur fabrication, leur accès et leur utilisation) en matière de rapidité, de simplicité, de durabilité, de sécurité, de confort et de possibilités nouvelles ainsi qu’en matière de satisfaction, de plaisir, de bonheur, de joie et de beauté qu’elles sont susceptibles d’offrir (avec un processus d’amélioration continue de l’amélioration – dans une sorte de cycle infini…)

 

 

Les grands besoins sous-jacents

De façon synthétique (et au regard des désirs-fantasmes que nous avons évoqués), on pourrait également dire que le psychisme est à la recherche de :

 

- la sécurité absolue ;

- la permanence absolue ;

- la liberté totale (absolue) ;

- l’intelligence absolue.

 

Que l’on pourrait synthétiser par :

 

- l’autonomie absolue*.

* Notons qu’en dépit de cette autonomie totale (s’il y parvient un jour…), le psychisme ressentirait, outre un ennui (une lassitude à jouir, à chaque instant, de cette liberté totale), un sentiment d’incomplétude et de manque qui engendrera un sentiment d’inconfort psychique qui l’amènera (tôt ou tard) à s’interroger et à chercher « du sens »… Ce besoin de compréhension invitera l’individu à se questionner sur « son existence », sa nature et son identité et à s’engager dans une recherche existentielle qui débouchera immanquablement sur une recherche spirituelle, seule clé véritable, semble-t-il, à la cessation de la quête métaphysique (et éperdue) de l’Homme et à « son » insatisfaction ontologique…

 

Mais également de :

 

- l’Unité-unicité – l’Amour absolu ;

- la Plénitude-Complétude totale (absolue) – satisfaction et confort absolus (bonheur, paix, joie, amour, beauté…).

 

Bref, en un mot, vivre, ressentir et « acquérir » (ou plus exactement « retrouver ») les caractéristiques de la Conscience…

 

Soulignons que cet élément constitue, sans doute, l’un des arguments majeurs en matière d’antériorité de la Conscience et qu’il invite naturellement à privilégier l’hypothèse que nous avions rapidement abordée dans l’un des paragraphes introductifs de cette analyse(1) : le cerveau est un outil qui donne accès à la perception (il ne l’a donc, a priori, pas créée). En effet, pour quelles étranges et mystérieuses raisons le psychisme aspirerait-il à voir émerger(2) ces caractéristiques si elles ne lui étaient pas déjà « familières » ?   

(1) La perception est antérieure à la matière et au Vivant (et donc au cerveau)...

(2) Ou (plus exactement) pourquoi chercherait-il à les « retrouver »… ?

 

Notons évidemment (comme nous l’avons souligné à plusieurs reprises) que ces besoins sous-jacents orientent, de façon très marquée, l’évolution des réponses mises en œuvre pour satisfaire les besoins organiques et matériels, les besoins psychiques élémentaires, les besoins-désirs narcissiques et les désirs.

 

 

Deux grands types de réponses

Le psychisme (qui s’est identifié à la forme organique – une structure énergétique physique vivante) est « contraint » à satisfaire les besoins liés aux caractéristiques organiques et matérielles mais également à satisfaire son désir d’être de moins en moins tributaire et affecté par ses besoins organiques et matériels.

 

Comme il est également « contraint » à satisfaire les besoins spécifiquement liés aux caractéristiques psychiques mais aussi à satisfaire son désir d’être de moins en moins tributaire et affecté par ses besoins psychiques.

 

Aussi, au fil de la sophistication des réponses et de la complexification de la cognition, deux voies (somme toute assez complémentaires) s’offrent à lui :

 

- assurer la permanence de la satisfaction de tous ces besoins (matériels, organiques et psychiques), les garantir en toutes circonstances et à tout instant, en veillant à assurer une amélioration permanente des réponses ;

 

- éradiquer ces besoins (excepté peut-être les dimensions de plaisir, de bonheur, de beauté et de joie* qu’ils sont en mesure d’offrir…)

* Et leur intensité…

 

 

NOTE (un peu prématurée peut-être…) SUR LE PSYCHISME ET LA DIMENSION SPIRITUELLE

En dépit (et au-delà) de tous ses désirs, il semble que le psychisme aspire (en réalité) à se libérer de tout désir (y compris celui de se libérer…).

 

Il est d’ailleurs fort probable qu’au fil de « ses recherches* » (et de son évolution*), le psychisme soit amené à comprendre que son identification à la forme est « erronée », qu’il n’est (en réalité) qu’un espace perceptif (sans identification) et que les formes (toutes les manifestations énergétiques) sont indissociables de Ce qui perçoit – la Conscience (indissociabilité et Unité entre Ce qui perçoit et ce qui est perçu). Les comportements égotiques, de saisie, d’accaparement, de favorisation personnelle, de volonté de puissance et d’instrumentalisation (dont il est à l’origine) seraient alors naturellement amenés à s’estomper (puis à disparaître), permettant aux formes de suivre leur « cours naturel » (selon leurs spécificités, leur potentiel et leurs prédispositions). Notons que ce processus semble absolument nécessaire à l’émergence de conditions phénoménales propices à la survenue de formes aux caractéristiques de plus en plus proches de celles de la Conscience*… Fin de la parenthèse (prématurée).

* Nous aborderons cette thématique dans les paragraphes consacrés au cheminement spirituel et dans les paragraphes consacrés aux sociétés à moyen et long termes.

 

 

Trois grandes orientations possibles

Face à ces besoins (et plus généralement face à l’insatisfaction), il semblerait que le psychisme puisse s’orienter de trois façons possibles* :

* Trois orientations qui peuvent être suivies simultanément et de façon complémentaire.

 

L’amélioration de la perception et de la compréhension

Cette orientation correspond à « l’élargissement » de l’espace psychique. Elle est induite par l’insatisfaction des réponses (et de leur amélioration) et un (fort) besoin de compréhension. Le psychisme est ainsi amené à voir diminuer (progressivement et de façon naturelle) les besoins et les désirs… Cette orientation (ultra minoritaire jusqu’à aujourd’hui) correspond globalement au cheminement sur les voies spirituelles directes(1) (2).

(1) Notons que les voies spirituelles directes ne sont pas exemptes d’écueils et de difficultés. Elles ne semblent pas non plus « convenir » à (ou coïncider avec) la sensibilité d’un grand nombre d’individus… En matière d’écueils et de difficultés, citons simplement, ici, l’existence de résidus égotiques (liés à la persistance partielle de l’identification au corps), l’existence de résidus psychiques, l’existence d’entraves dans le mystérieux processus d’intégration à l’Être ou des affirmations péremptoires (et prématurées) de certains « adeptes » ou individus engagés dans cette voie, un peu (trop) « pressés » de déclarer à qui veut l’entendre qu’ils sont « le Soi impersonnel » alors qu’il est évident qu’ils vivent toujours, de façon tangible et substantielle, une forte identification égotique à la forme(2)

(2) Nous aborderons ces thématiques dans les paragraphes consacrés au cheminement spirituel.

 

 

La transformation du psychisme

Cette orientation consiste (en général) à restreindre (et/ou à « inhiber ») à coups « de forceps » les besoins et les désirs afin que le psychisme se « familiarise avec le contentement(1) »… Cette orientation (ultra-minoritaire, essentiellement de type religieux fondamentaliste ou ultra-rigoriste) s’inscrit globalement dans une perspective religieuse(2) et/ou (parfois) dans une perspective spirituelle progressive(2) qui s’échine (et parfois même « s’acharne ») à essayer de transformer le psychisme à coups d’idéologie (démarche presque toujours « infructueuse » car le processus naturel d’intégration à l’Être n’est pas respecté…) et se cantonne (le plus souvent) à une forme de « mimétisme simiesque et superficiel » des attitudes et des comportement (« réellement » spirituels). Cette orientation est également confrontée à de nombreux écueils et difficultés(3) et parvient (de façon rarissime) à transformer « le religieux » en voie spirituelle authentique (directe ou progressive) ;

(1) Pour que le psychisme apprenne à « se satisfaire » de ce qui est

(2) Les notions de voie religieuse, de voie spirituelle directe et de voie spirituelle progressive seront définies dans les paragraphes consacrés au cheminement spirituel.

(3) Thématiques que nous aborderons dans les paragraphes consacrés au cheminement spirituel.

 

 

La transformation de l’Existant

Cette orientation consiste à améliorer la qualité des réponses aux besoins et aux désirs (en « corrigeant » leurs caractéristiques en matière de durabilité, de sécurité, de simplicité, d’immédiateté etc etc). Il existe, ici, plusieurs possibilités qui peuvent être conjointement (et complémentairement) suivies :

 

La transformation du corps (la transformation de l’individu)

 

Le corps peut être transformé (essentiellement) de deux façons :

 

Soit par « l’effort » pour qu’il soit, par exemple (entre mille autres exemples…), en meilleure santé et vive plus longtemps(1). « Voie » qui nécessite patience et persévérance, qui s’avère très incertaine(2) et qui n’offre (au bout du compte) que de « maigres » possibilités et avancées(3)

(1) Aspirations très communes et très répandues chez les Hommes… Voilà pourquoi nous mettons en évidence ces exemples dans cette rubrique…

(2) Au vu du nombre de paramètres qui influent sur l’état de santé et l’espérance de vie…

(3) Les individus peuvent bien prendre soin de leur corps et/ou le « façonner », les « lois » de la  biologie et de la physiologie ne sont pas extensibles à l’infini…

 

Soit par « le progrès » (sans effort) pour que le corps (toujours entre mille autres exemples…) soit en meilleure santé et vive plus longtemps... Cette « voie » semble porteuse d’un potentiel de transformation beaucoup plus élevé mais est et sera (plus encore à l’avenir) confrontée à des obstacles et/ou à des « freins » importants (comme les progrès technologiques et les questions éthiques par exemple). Jusqu’où, en effet, peut-on transformer l’Homme sans « porter atteinte » à son humanité ? Questions éthiques qui jalonneront la transformation des êtres humains mais qui pourraient s’estomper devant les agréments offerts par le progrès (avec l’éventuelle émergence de la trans-humanité corporelle synthétique et immatérielle et l’évolution des post-humains). Jusqu’où pourront et seront prêts à aller, d’un point de vue technique, les humains et les post-humains ? Grandes questions que nous aborderons ultérieurement…

 

La transformation du psychisme (transformation de l’individu)

 

Le psychisme peut être transformé également (et essentiellement) de deux façons :

 

Soit par « l’effort » pour qu’il « apprenne le contentement » (thématique que nous avons déjà évoqué dans l’une des rubriques précédentes). Outre les voies religieuses et les voies spirituelles progressives, notons qu’il existe également d’autres « outils » : le « développement personnel* » et l’augmentation des savoirs (la connaissance de l’Existant) par exemple, qui tentent d’assouplir et/ou d’élargir le psychisme… et, bien sûr, toujours quasiment en vain… Les raisons principales tiennent aux faibles capacités d’élasticité du psychisme et au fait que les idéologies et les savoirs « n’affectent » que la sphère intellectuelle des individus et ne permettent donc que de « micro-imprégnations » superficielles (et non une profonde intégration à l’Être)...

* Le développement personnel vise essentiellement à la transformation de soi : soit pour se défaire de certains aspects « pathologiques » ou invalidants (phobie, anxiété, déprime, timidité), soit pour améliorer « ses performances » (mieux communiquer, gérer son temps, s'affirmer).

 

Soit par « le progrès » (sans effort) pour que le psychisme soit plus « satisfait » et moins (voire plus du tout) réceptif à la souffrance*. Cette « voie » semble plus prometteuse mais sera amenée également à prendre en considération quelques obstacles et/ou « freins » majeurs (essentiellement le progrès technique et les questions éthiques). Jusqu’où, en effet, peut-on transformer le psychisme et le cerveau humain sans remettre en cause l’humanité ? Questions qui jalonneront, là aussi, la transformation de l’humanité mais qui pourraient peut-être, elles aussi, passer « à la trappe » au regard des agréments offerts par le progrès (avec la trans-humanité cérébrale chimique, synthétique et génétique, voire immatérielle et l’évolution des post-humains). Jusqu’où pourront et seront prêts à aller, d’un point de vue technique, les humains et les post-humains ? Grandes questions, là aussi…

* Sans oublier, bien sûr, la transformation (entre autres par la chimie et/ou la génétique) de certaines caractéristiques psychiques qui « affectent » grandement les relations interindividuelles et mettent « à mal » et/ou en péril « le vivre ensemble » et la vie en collectivité…

 

La transformation de l’Existant (hors corps et hors psychisme)

 

L’Existant peut être transformé (essentiellement) pour deux raisons principales :

 

Soit pour « améliorer » les caractéristiques de la matière et en particulier de « l’organique » (afin qu’ils deviennent moins fragiles, plus durables, plus satisfaisants et plus plaisants…) avec, là également, des obstacles et des « freins ». Et avec les mêmes questions éthiques : jusqu’où peut-on transformer le Vivant ? Et en la matière (si j’ose dire !), il faudra sans doute compter avec « ce que représente » la Vie pour les Hommes*, leur attachement profondà sonégard et « leur goût » pour le Vivant qui orienteront (en tout cas dans un futur proche) l’évolution des transformations génétiques et les ajouts et autres modifications chimiques (plus ou moins structurels) sur les animaux, les végétaux et la matière. Jusqu’où pourront et seront prêts à aller, d’un point de vue technique, les humains et les post-humains ? Seront-ils « prêts » à créer de la matière et du Vivant totalement synthétiques ? Grandes questions également…

* La Vie a toujours été, à leurs yeux, (plus ou moins) précieuse...

 

Soit pour « améliorer » les rapports et les interactions entre les individus et les formes (afin que les relations deviennent moins conflictuelles et moins violentes…) avec des manipulations génétiques, des apports chimiques et des « appuis » synthétiques (et avec les mêmes questions éthiques). Jusqu’où pourront et seront prêts à aller, d’un point de vue éthique et technique, les humains et les post-humains ? Toujours les mêmes grandes questions…

 

 

Après cet aperçu (assez large et détaillé*) du psychisme humain, nous allons pouvoir aborder les créations et les plans principaux dont le psychisme et l’Homme sont à l’origine. Dans le chapitre suivant, nous étudierons donc l’ensemble des actions, des fabrications, des représentations et des créations humaines. Nous analyserons ainsi :

 

- le plan réalisationnel actif qui regroupe les actions et les fabrications humaines pour répondre aux besoins organiques, matériels et psychiques élémentaires ;

 

- le plan représentatif intellectuel qui regroupe les créations et les représentations humaines de l’Existant et de l’existence ;

 

- le plan spirituel (qui concerne la compréhension sensible et le degré de « Conscience » des individus — la connaissance de soi) ;

 

- la société humaine et L’ORGANISATION SOCIETALE qui concernent essentiellement l’organisation politique et judiciaire, l’organisation économique (organisation de la production, des échanges économiques, de la monnaie, du travail et de la consommation), l’organisation des relations extérieures et l’organisation territoriale instaurées par la collectivité pour assurer « le vivre ensemble ».

* Et espérons-le, ni trop brouillon ni trop embrouillé… Notons que ce chapitre, au regard de la complexité du psychisme (et de ses innombrables caractéristiques « enchevêtrées »), nous a parfois donné un peu « de fil à retordre »… Et cette présentation que l’on espère (à peu près) structurée et claire ne s’est pas révélée l’un des exercices les plus aisés de cette réflexion… Et (soit dit en passant) bien d’autres complications nous attendent… Hum ! Hum !

 

3 décembre 2017

Carnet n°61 La conscience et l'Existant - Chapitre introductif (pensées intuitives)

Essai / 2015 / L'exploration de l'être

La Vie et l’Existant ne semblent, en réalité, qu’un gigantesque jeu — violent et merveilleux — et une permanente célébration… A hauteur d’Homme, peut-être pourrions-nous penser que nous nous apprenons les uns les autres (et, bien souvent, à notre insu) à mieux les regarder et à mieux les vivre. A mieux les comprendre et à mieux les aimer… mais sur le plan de la Conscience, tout ce « cirque » — aimable ou corrosif — semble (presque) sans importance… Est-ce qui est… et ce qui est n’altère jamais Le Regard…

_

Nous avons été contraints (pour des raisons d'ordre technique) de diviser la version numérique de cet ouvrage en dix parties.

Sommaire

 

 

Chapitre introductif : PENSEES INTUITIVES

 

Réflexions sur la conscience et l’énergie

N’y aurait-il qu’un seul homme au monde ? Et un environnement — projeté par lui — qui ne serait que son propre univers ? Ainsi pourrait être formulée la question sur le plan mental. Et comment pourrait se traduire cette interrogation depuis l’espace impersonnel ? N’y aurait-il donc qu’une Conscience ? Et une énergie brute qui lui serait associée, manifestation de sa propre puissance créatrice ? Une question alors se pose : y a-t-il une possibilité de rendre cette énergie brute consciente (consciente d’elle-même et de sa source) ? Et par quel procédé ou processus ? En ce qui concerne la Vie terrestre, l’Homme serait-il la clé (ou l’une des clés) de cette perméabilité entre la Conscience et l’énergie ? En dépit de son ignorance et de sa lenteur compréhensive, l’humanité semble dépositaire de cette potentialité. En effet, globalement, au fil de l’évolution temporelle et historique, la Conscience semble de plus en plus manifeste en chaque représentant de l’espèce humaine.

 

La clé réelle de cette porosité entre Conscience et énergie serait-elle alors principalement liée au cerveau, organe, chez l’Homme, a priori doté de capacités et d’un potentiel supérieurs à ceux des autres espèces terrestres ? Au vu des différences fondamentales entre l’Homme et les autres espèces vivants sur Terre, il semblerait, en effet, que l’encéphale soit la clé principale de l’interface entre la Conscience et l’énergie. Un outil nécessaire mais insuffisant. Une sorte de camp de base pour atteindre une porte d’accès…

 

Afin que l’énergie devienne plus consciente, l’individu doté d’un cerveau doit voir toutes les dimensions de son être (mental, corps et existence) imprégnées par une compréhension progressive de sa nature profonde (la Conscience) car seule cette imprégnation profonde a un impact réel sur la transformation de l’individu. Ce point souligne la dimension essentielle de la quête spirituelle qui amène à une exploration de notre identité (de ce que nous sommes) avec le franchissement des différentes étapes de la connaissance de soi jusqu’à la pleine réalisation.

 

Cette compréhension progressive permet à chaque individu (chaque individu étant évidemment une forme d’énergie) de construire et de vivre un univers (un univers phénoménal) aux caractéristiques de plus en plus proches de celles de la Conscience (jusqu’à devenir identiques). Caractéristiques que l’on pourrait synthétiser en trois mots : Amour, Paix et Intelligence.

 

On pourrait penser un peu hâtivement que l’éducation et les apprentissages de base tels qu’ils sont mis en œuvre dans les sociétés humaines — enseignements, conventions sociales et bienséance — permettraient de vivre dans un monde d’Amour, de Paix et d’Intelligence. Évidemment, il n’en est rien. La compréhension du monde, la connaissance de soi et le respect d’Autrui ne sont qu’apparents et superficiels. Le savoir accessible à la grande majorité de l’humanité est actuellement inapte à percer les mystères de la Vie et de la Conscience et à apporter une réponse satisfaisante à la question de notre origine et de notre identité réelle. Et les règles sociales régissant le vivre ensemble ne sont respectées le plus souvent que par un sens éthique très faible, engendré, pour l’essentiel, par la crainte de l’exclusion ou de la stigmatisation que provoquerait leur non-respect.

 

En conclusion, il semblerait que seule l’imprégnation profonde de la compréhension à toutes les dimensions de l’être d’un individu, rendue possible par l’existence de son cerveau (outil nécessaire mais non-suffisant) permette une entrée puis une installation progressive de la Conscience dans l’énergie jusqu’à une parfaite adéquation : l’énergie consciente, reflet parfait de la Conscience sans objet (dans la mesure des caractéristiques de l’énergie). Bref, en un mot, une complète et parfaite similitude des caractéristiques de la Conscience et de l’énergie. A ce stade, on pourrait imaginer que la forme énergétique parvenue à sa pleine réalisation se dissolve et disparaisse entièrement dans la Conscience. Mais ne nous égarons pas en de trop lointaines et invérifiables conjectures…

 

En replaçant cette réflexion dans le cadre de l’évolution du Vivant — et de la Vie — elle-même création supposée de la Conscience, voilà qui met en évidence un phénomène absolument remarquable : l’extraordinaire puissance créatrice de la Conscience capable, à partir du vide, de faire émerger le manifesté en combinant quelques atomes de carbone, d’hydrogène, d’oxygène et d’azote — base de l’organique — qui, au fil de la temporalité historique (appréhendée sur le plan mental et de façon conceptuelle) parviennent à se complexifier et à se sophistiquer au point de créer le cerveau humain*en mesure, lui-même, de créer... et de se développer au point d’apprendre à actualiser le potentiel qu’il recèle (et/ou peut-être – qui sait ? – à créer lui-même ce potentiel) pour retrouver la source de son émergence (la Conscience) et faire advenir ses caractéristiques (l’Amour, la Paix et l’Intelligence) sur les plans organique et terrestre comme l’atteste, de façon évidente et souvent très laborieuse, l’évolution des sociétés humaines.

* Notons qu’initialement (et encore très communément répandu aujourd’hui), le cerveau – cet outil puissant – n’est utilisé que pour faire survivre l’organisme dans lequel il est placé (l’Homme dans ce cas précis) à seules fins de perdurer et de se développer (obéissant ainsi à l’une des règles fondamentales du Vivant et de la Vie(1))...

(1) L’Homme n’est en grande partie (et encore de nos jours, en ce début d’ère anthropocène) qu’une énergie brute. Une énergie imprégnée d’un degré ou niveau de Conscience très réduit.

 

Enfin, pour clore ce début de réflexion, il semble peu saugrenu d’imaginer qu’il existe d’autres manifestations intelligentes de la Conscience sur d’autres plans et dans d’autres univers. Autres que celui de « l’organique » qui n’est sans doute qu’une possibilité d’existence et de manifestation pour l’énergie (parmi une infinité). Reste alors une question : l’énergie a-t-elle été créée par la Conscience ? Ou son existence est (de toute éternité) consubstantielle à la Conscience ? Vaste question…

 

Cette pensée (aux allures de vrai poncif...) apparaît, en réalité, comme totalement triviale . Et se voit évidemment corroborée par quantité de conclusions révélées par l’étude de thématiques mille fois explorées et ressassées au cours de l’histoire humaine : nature versus culture, le rôle prépondérant du cerveau dans l’évolution humaine, la place essentielle de l’Homme sur Terre, l’importance de la spiritualité dans l’avènement d’une existence terrestre pacifique et harmonieuse. Bref, rien de bien nouveau sous le soleil

 

 

Réflexions sur la conscience et l’énergie (suite)

La nature fondamentale de l’énergie (qui concerne l’ensemble des manifestations et des phénomènes) semble se caractériser par trois éléments essentiels : le mouvementLe changement qui s’explique, en partie, parce que les formes prises par l’énergie sont très largement soumises à leur contexte environnemental (ce qui est particulièrement vrai pour « l’organique » très répandu sur Terre). Mouvement et changement qui sous-entendent l’existence du temps. Et enfin, le troisième élément : la finitude de ses manifestations (même si celles-ci semblent se recombiner indéfiniment).

 

La nature fondamentale de la Conscience (Présence, espace impersonnel) semble, quant à elle, se caractériser par trois éléments contraires : la permanence (l’éternité) et l’immobilité, vécue dans le seul présent. Et donc l’absence de temporalité. Et l’infini (existence non délimitée et non localisée).

 

Petit aparté sur les caractéristiques et modes de fonctionnement du mental : à l’instar de toutes les manifestations, le mental (ou du moins le cerveau) que l’on peut considérer comme l’un des plus éminents et sophistiqués représentants de l’énergie de la Vie terrestre (car plus ou moins imprégné de Conscience(1)) est soumis et appelé au mouvement (mouvement que l’on pourrait qualifier de physique(2) et mouvement que l'on pourrait qualifier de temporel(3)). Mouvements physiques qui expliqueraient son incapacité à l’immobilité (à habiter l’instant et le présent) et sa grande mobilité (son besoin incessant de saisir les pensées, les émotions et les ressentis corporels qui sont, eux-mêmes, des phénomènes ou des manifestations en mouvement) et mouvement temporel qui expliquerait son inlassable nécessité à se projeter dans le temps (dans le passé avec les souvenirs et dans le futur avec les anticipations projectives).

(1) Voir le fragment concernant la perméabilité entre énergie et Conscience.

(2) Même si ce terme semble peu approprié pour désigner les mouvements d’une entité très globalement immatérielle (en dehors, évidemment, de son support organique qu'est le cerveau)...

(3) Qui sous-entend l’évolution et le devenir avec ses inexorables cycles...

 

Il est intéressant de noter que toutes les manifestations (dont le mental – ou du moins le cerveau – fait partie) semblent porter en elles la nécessité (le besoin ontologique et fondamental) de retrouver les trois caractéristiques de la Conscience : en premier lieu, la permanence (c’est-à-dire une forme d’éternité). Chaque forme d’énergie aspire ou éprouve le besoin, la nécessité ou le désir, au cours de son évolution temporelle (à laquelle toutes les manifestations d’énergie sont soumises) de se rapprocher — autant que sa nature et ses caractéristiques le permettent — de l’éternité. En effet, n’aspirent-elles pas toutes à se préserver le plus longtemps possible (chaque chose cherchant à persévérer dans son être pour reprendre le conatus de Spinoza) et à demeurer vivantes ou existantes autant qu’elles en sont capables ?

 

Ainsi, l’aspiration à l’immortalité des manifestations (des formes d’énergie) semble montrer qu’elles tentent de trouver une voie qui leur permette d’atteindre l’éternité (caractéristique de la Conscience) en intégrant leur nature assujettie au mouvement, à la temporalité et à la finitude. Un peu comme si l’immortalité devenait le synonyme de l’éternité quand celle-ci était soumise à la dimension temporelle…

 

En deuxième lieu, l’infini. Outre le besoin d’être ou de vivre le plus longtemps possible, chaque manifestation ne cherche-t-elle pas à s’étendre et à se développer toujours davantage (selon ses caractéristiques, ses possibilités et sa potentialité) afin d’approcher (autant que possible) l’infini ? Il semble évident qu’une très large part des formes vivantes ou existantes œuvrent inlassablement, au cours de leur existence, à leur expansion… (expansion tendant, évidemment, vers l’infini).

 

Enfin, en troisième lieu, l’immobilité. Cette dernière caractéristique ne semble concerner que les formes d’énergie les plus sophistiquées. Celles qui semblent peu ou prou imprégnées de Conscience telles que le mental (ou du moins le cerveau) qui nous intéresse ici au premier chef. Ainsi, le mental ne serait-il pas à la recherche d’un équilibre (ou d’un état d’équilibre) parfait auquel rien ne pourrait être ôté ou ajouté, d’une stabilité permanente, une sorte d’ataraxie ou de bonheur continu, proche parent de l’immobilité ? 

 

Afin d’essayer de brosser un tableau à peu près exhaustif des liens entre l’énergie et la Conscience (dans les limites de ma compréhension actuelle) et d’essayer d’aborder de façon plus complète les liens entre l’une des formes les plus sophistiquées de l’énergie qu’est le mental (ou du moins le cerveau) et sa source qu’est la Conscience, il conviendrait à présent d’ajouter aux trois caractéristiques essentielles que nous venons d’évoquer (qui sont, pour rappel, la permanencel’immobilité et l’infini) celles que nous avons déjà évoquées à maintes reprises dans nos fragments : la Paix, l’Amour, la Plénitude-Complétude, la Joie et l’Intelligence. Essayons succinctement de les reprendre une à une et de comprendre* si chacune de ces caractéristiques représente une véritable aspiration pour l’esprit humain. 

* Comprendre globalement (et sans doute assez superficiellement)...

 

A ce stade de la réflexion, peut-être serait-il judicieux d’opérer une dichotomie entre les esprits (les mentals) imprégnés plus fortement de la Conscience et les esprits encore très largement soumis aux seuls besoins de préservation et d’expansion (qui semblent encore représenter l’essentiel de l’humanité au 21ème siècle). Mais (en y réfléchissant un peu...), il semble inutile de réaliser cette typologie* et de développer cette partie car il apparaît avec clarté et évidence que la plupart des esprits humains cherchent, dans tous les actes et les projets qu’ils entreprennent, la tranquillité (un état mental, qui est le reflet de la Paix), l’affection et l’amour (avec un petit « a »), à être altruiste, généreux ou à venir en aide à Autrui(qui sont des reflets de l’Amour – avec un grand « A »), le bonheur et le plaisir (reflets de la Joie), un sentiment d’unité et d’osmose avec eux-mêmes et le monde (qui sont des reflets de la Plénitude-Complétude) et qu’un certain nombre d’entre eux cherche, à travers le savoir, à comprendre le monde et ce qu’ils sont (le reflet de l’Intelligence). Il semble donc évident que le mental humain (ou du moins le cerveau – pris toujours ici comme forme ou manifestation sophistiquée de l’énergie sur le plan de la Vie terrestre) est indéniablement à la recherche des caractéristiques de la Conscience précitées.

* Succincte et basique...

 

Petite note supplémentaire. La Conscience possède sans doute d’autres caractéristiques (que nous n’avons pas pris la peine ici d’évoquer). Il en est une qui n’est peut-être pas fondamentale pour l’Homme mais qu’il l’est sans aucun doute sur le plan de la Conscience : la pureté. Autrement dit, l’impossibilité pour la Conscience d’être entachée, abîmée ou salie par l’énergie, ses manifestations et leurs mouvements.

 

Ainsi, pour nous restreindre au champ de l’existence humaine, rien de ce que pourraient faire les Hommes ne saurait atteindre et toucher Ce qui perçoit, c’est-à-dire la Conscience. Elle restera, de toute éternité, immaculée. Et j’ai le sentiment que certains esprits humains cherchent cette pureté de façon maladroite dans leur existence, en particulier, à travers le besoin de propreté – voie très commune et répandue – (nettoyage de la maisonnée, de l’intérieur... ce qui peut prêter à sourire...).

 

Une autre caractéristique me vient également à l’esprit : la nudité. L’être – la Conscience – est d’une certaine manière, ce qu’il reste lorsque tout a disparu. Et il me semble que la recherche de simplicité et de dépouillement (et plus largement le besoin de désencombrement) de certains esprits humains est révélatrice d’une volonté de nudité, d’atteindre sur le plan énergétique et phénoménal cette caractéristique de la Conscience.

 

Quoi qu’il en soit, il semblerait que les formes d’énergie sophistiquées ne puissent réellement et totalement accéder à ces caractéristiques de la Conscience dans une sempiternelle fuite en avant car leur existence-même s’inscrit dans un monde fini et cyclique* et que leurs caractéristiques sont subordonnées, de façon ontologique, à des principes limitants et restrictifs, ce qui rend impossible l’accès à un univers non fini. Ainsi, pour illustrer brièvement et simplement notre argumentation, prenons l’exemple de l’immortalité : même si l’Homme parvient à repousser indéfiniment la mort de son entité corporelle, il ne parviendra jamais à atteindre l’éternité. Même s’il parvient à vivre des centaines de millions d’années, le corps est par nature soumis à la finitude car il s’inscrit, de par ses caractéristiques, sur un plan fini. Et il en est de même pour toutes les autres caractéristiques…

* Même en retenant l’hypothèse d’une évolution éternelle de l’énergie — qui serait sans commencement ni fin — hypothèse qui s’appuierait sur l’axiome de consubstantialité de l’énergie et de la Conscience...

 

Conclusion. Au lieu de se jeter dans cette insatisfaisante fuite en avant et cette impossible quête, il serait sans doute plus judicieux pour les manifestations énergétiques dotées ou imprégnées de Conscience d’inverser leur trajectoire pour remonter à leur source jusqu’à une sorte de saut dans un autre plan (saut dans l’espace d’arrière-plan) et pouvoir ainsi « habiter » la Conscience – Ce qui perçoit – le regard éternel, immobile, permanent et infini et accessoirement empli ou baigné de Paix, d’Amour, de Joie, d’Intelligence et de parfaite Plénitude-Complétude tout en laissant évoluer leurs mouvements et leurs élans naturels (les aspirations et besoins d’actualisation que nous avons précédemment évoqués) sur le plan fini où elles se manifestent. C’est d’ailleurs ce à quoi elles œuvrent (sciemment ou non) en suivant le processus selon lequel elles semblent avoir été « programmées »…

 

En fait, il semblerait que la Conscience ait créé le monde manifesté (et ses formes) en inscrivant ses propres caractéristiques dans leur potentiel et que tous leurs mouvements naturels d’actualisation permettent d’approcher de plus en plus sans jamais pouvoir les atteindre sur le plan où elles se déroulent. Comme si la Conscience avait créé une sorte de jeu infini portant en lui les caractéristiques mêmes de son impossible achèvement…

 

Pour résumer cette laborieuse réflexion (sur cette passionnante et inépuisable thématique), il semblerait que l’énergie, ses manifestations et leurs mouvements appartiennent à un plan (ou à un univers) fini et soumis à la temporalité alors que la Conscience appartient à un plan infini et atemporel. Il n’y a donc aucune possibilité pour l’énergie de retrouver (sur le plan où elle se manifeste) les caractéristiques (parfaitement identiques) de la Conscience qui sont, pour mémoire, la permanencel’immobilitél’infini et accessoirement l’Amour, la Paix, la Joie, la Plénitude-Complétude et l’Intelligence. Sur le plan où elle se déroule, l’énergie, à travers ses formes et leurs mouvements, n’a d’autres possibilités que de tendre indéfiniment vers ces caractéristiques sans jamais pouvoir les atteindre. Le seul accès possible réside pour elle dans le saut que ses manifestations peuvent réaliser vers le plan de la Conscience, donc sur un plan en amont d’elles-mêmes (l’arrière-plan). Du moins pour l’heure… on pourrait envisager que l’énergie et ses manifestations parviennent, un jour, au fil de leur évolution (dans cette fameuse fuite en avant dont nous avons parlé) à réaliser cet incroyable (et tout de même assez peu probable) saut du plan fini et temporel à un plan infini et atemporel… bien que peu réaliste, on ne peut exclure cette hypothèse… 

 

Commentaires sur les fragments précédents. Cette réflexion comporte de nombreuses lacunes, fautes, approximations, maladresses et lourdeurs stylistiques, longueurs et redondances. Elle n’est qu’une ébauche (comme on peut le constater) et ne constitue qu’une première épreuve (pas ou très peu corrigée) qui mériterait évidemment quelques développements et éclaircissements*.

* Et je ne sais encore si je prendrais le temps et la peine d’y apporter les corrections et les ajouts nécessaires. Elle me rappelle simplement l’époque où j’adressais certaines de mes réflexions à l’état brut (comme celle-ci) à M. et à G. (aujourd’hui disparus) qu’ils prenaient aussitôt soin d’éclairer à la lumière de leur grille de lecture personnelle. L’essentiel du temps, nos discussions viraient au débat d’idées stérile mais parfois certains éléments alimentaient la compréhension et la perspective de chacun… comme un modeste (très modeste il va sans dire) Think tank informel dédié humblement à la Connaissance…

 

 

Réflexions sur la conscience et l’énergie (suite) 

A partir des réflexions que nous avons développées dans les paragraphes précédents, essayons-nous à un bref et inoffensif exercice d’anticipation. Et tentons de voir ce que pourrait être la Vie terrestre à l'avenir...

 

En premier lieu, à court et moyen terme. Lorsque l’humanité prendra conscience de l’absurdité de son idéologie (hyper) productiviste et (hyper) consumériste (réactive à l’économie de pénurie qu’elle a toujours connue), lorsqu’elle prendra conscience de l’ignominie du système organisationnel omnipotent et esclavagiste qu’elle a conçu, qui écrase et exploite la Vie, le Vivant et la Terre, les Hommes, les animaux et l’environnement, une nouvelle ère pourra débuter… il y a de fortes chances que l’humanité se réorganise alors en petites communautés (à taille humaine) démocratiques et quasi-autonomes qui pourront être fédérées et entretenir entre elles une solide coopération. Abolition des frontières, abolitions des nations. Beaucoup de paramètres entrent en jeu dans l’évolution de l’humanité et de la Vie sur Terre. Et je n’ai pas la prétention (loin s’en faut) de tous les repérer. Ceci n’est qu’une très courte et vague esquisse. Mais il est un paramètre qui s’avère absolument incontournable (que j’aborderai succinctement) : la dimension essentielle de la quête spirituelle pour opérer le saut de l’Homme vers l’espace d’arrière-plan — la Conscience — et faire advenir, en chaque Homme, une véritable révolution perceptive nécessaire à l’intégration dans son esprit de toutes les caractéristiques de la Conscience (que nous avons abondamment évoquées).

 

Sans ce passage d’une grande part de l’humanité vers le plan de la Conscience, il sera impossible de faire advenir, à échelle collective, une société humaine terrestre (spatiale et/ou extra-terrestre s’il prenait à l’Homme le besoin de coloniser d’autres territoires…) qui ressemblerait à terme au monde des dieux (tel que le conçoit, par exemple, le bouddhisme tibétain) : une société de Paix, d’Amour et d’Intelligence où chacun serait amené à poursuivre son exploration de l’être, à participer selon ses aspirations à la communauté à seule fin de mener une vie heureuse, harmonieuse et épanouie (à titre individuel comme à titre collectif), où la violence disparaîtrait, où la police et l’armée n’auraient plus aucune utilité.

 

A terme, l’humanité pourrait se voir investie d’une activité éducative auprès des animaux et des autres créatures qui peuplent la Terre essayant de les inviter à ces caractéristiques de Paix, d’Amour et d’Intelligence, créant peut-être, grâce à la technologie et à la génétique, une alimentation qui ne détruirait aucune vie, changeant le code génétique des carnivores pour qu’ils deviennent végétariens ou créant des corps sans besoin alimentaire ou même éradiquant la sphère organique (dont elle a, tout au long de l’histoire, essayé d’atténuer ou d’éliminer les désagréments)…

 

Envisager les modalités pratiques d’une telle société n’a pas beaucoup de sens. Mais sans ce passage collectif à une authentique spiritualité, il y a de fortes chances que l’humanité et la Vie terrestre plongent dans une longue et mortifère errance et/ou dans un indescriptible chaos en créant un monde toujours plus dur et violent, un monde où les conflits et les guerres seront généralisés, un monde de contrôle et de surveillance à l’échelle planétaire. Un monde d’apocalypse et de terreur…

 

Petit aparté sur l’hyper technologie, l’avènement des mondes virtuels et le transhumanisme. Le progrès technique est en marche. Et il ne semble pouvoir s’enrayer. Les apports et les bénéfices qu’il offre en termes de rapidité de communication, de mises en réseaux simultanées et de confort (voire de bien-être) sont tels que l’Homme ne semble pouvoir s’en passer.

 

Certaines dérives et certains écueils ne pourront sans doute pas être évités : le sacre des gadgets (en tous genres), l’incessante fuite dans le divertissement et l’hyper distraction… et des dangers plus grands encore tels que la montée en puissance des machines qui pourrait engendrer la mise sous tutelle de l’Homme et du Vivant ou l’égarement dans des mondes virtuels de plus en plus sophistiqués et envahissants reléguant la sphère organique à un simple support… et j’en passe.

 

Néanmoins, il semble possible que l’humanité s’engage dans une utilisation intelligente (et éclairée) du progrès technologique en généralisant la robotisation de l’industrie vouée à la fabrication des objets nécessaires, dégageant totalement l’Homme des tâches éreintantes et pénibles (comme cela s’est déjà réalisé au 20ème siècle dans certains secteurs économiques) pour le libérer complètement et lui permettre de se consacrer entièrement à son épanouissement et à son (indéniable) besoin spirituel.

 

Le progrès et le transhumanisme pourraient permettre une qualité de vie accrue et devenir des outils prodigieux dans le développement de l’Intelligence. Mais tout cela n’est rien… Et le monde évoluera selon le processus qui est inscrit en lui… et inutile de jouer les Cassandres ou les visionnaires optimistes… arrivera ce qui arrivera. Ces pauvres élucubrations* n’ont en soi aucun intérêt...

* Un simple jeu intellectuel sans portée ni conséquence auquel je rechigne (je sens ma pensée paresseuse et peu encline à cerner cette trop vaste et ambitieuse thématique). Et je n’ai, d’ailleurs, aucun goût pour évoquer ce qui sera... Ces derniers paragraphes ont été ébauchés à la hâte et indéniablement bâclés… Leur écriture éloigne de l’être. Et de ce qui est… qui demeurent, au-delà de ma curiosité insatiable, mes seules véritables préoccupations… 

 

Mais achevons tout de même cette bancale réflexion par les mots suivants : au vu de la différence de plans (assez probante) entre la Conscience et l’énergie peut se poser la question de l’existence d’autres plans. Selon la perception humaine, la Conscience semble à l’arrière-plan alors que « l’organique » (la matière) et le « psychique » (les représentations composées d’images et/ou d’idées – qui sont des manifestations énergétiques perceptibles par le cerveau humain) semblent appartenir à l’avant-plan. Nous avons déjà évoqué l’existence probable d’autres plans (de l’avant-plan) inaccessibles à la perception et l’entendement humains. Mais nous pouvons aussi imaginer que la Conscience perçue par les humains (certains humains) comme l’arrière-plan n’est qu’un plan au-delà duquel pourrai(en)t exister un (ou d’) autre(s) plan(s)… nous entrons là dans une perspective quasiment inconcevable pour notre intellect (en tout cas pour le mien)… il est donc plus sage de clore (provisoirement) notre réflexion sur cette passionnante et quasi impénétrable thématique… 

 

  

Réflexions sur la conscience et l’énergie – suite et fin (provisoire)

Notes supplémentaires. Bien qu’aujourd’hui, l’existence humaine soit éminemment organique, grossière, très peu consciente, emprunte de douleurs, de souffrances, de violence et d’une longue série d’aspects peu enviables, si l’on interrogeait l’humanité, une immense majorité des êtres humains (en dépit de leurs conditions de vie effroyables) la considérerait globalement comme le must sur Terre comparée à d’autres formes d’existence, en particulier aux conditions de vie animales (même s’il existe, en vérité, très peu de différences entre la vie des Hommes et celle des animaux). Il serait sans doute plus juste de supposer que la vie humaine est loin d’être une sinécure et encore moins une panacée (même en ce début de 21ème siècle), qu’elle ne l’a jamais été en dépit de la potentialité (souvent non actualisée) dont l’Homme semble dépositaire et de l’évolution humaine (assez remarquable à certains égards) depuis sa sortie des cavernes.

 

Parmi la très probable multiplicité des formes que peut revêtir l’énergie et la (toute aussi probable) multiplicité des plans et des univers existants, le monde humain (au regard de ses caractéristiques) ne doit pas être l’un des plus attrayants. Il existe sûrement des plans et des univers où la vie est plus douce et plus propice au bien-être et à l’épanouissement, des plans et des univers où règnent une Paix, un Amour et une Intelligence (très proches des caractéristiques de la Conscience), des plans et des univers au sein desquels l’actualisation de la compréhension de la nature fondamentale des formes que revêt l’énergie (dans son complet achèvement) permet aisément de retrouver les caractéristiques de la Conscience (dont nous avons déjà tant parlées) et de les faire advenir avec facilité sur le plan ou dans l’univers que ces formes occupent.

 

Dans le prolongement des fragments précédents, nous pouvons imaginer à terme (dans des dizaines, centaines ou milliers d’années [les paris sont ouverts !]) si l’Homme actualise son potentiel de compréhension sans s’égarer dans les écueils qui jalonneront son évolution, le plan humain et l’existence humaine occuperont une place plus prometteuse et plus séduisante parmi l’ensemble des plans et univers existants (plans et univers dans lesquels l’énergie se manifeste). Une sorte de progression dans la « hiérarchie existante » des bons plans (si j’ose dire !).

 

Cette supposition sous-entend évidemment que tous ces plans et univers ne sont pas fixes et que leur évolution dépend, outre des formes qui les composent, du potentiel dont elles disposent (potentiel sans doute « programmé »  par la Conscience) mais aussi des interactions qu’elles parviennent à créer entre elles et, bien sûr, de leur propre potentiel créatif (engendré, en grande partie, par les éléments précités) qui pourraient leur permettre de créer et de donner naissance, elles-mêmes, à d’autres plans (ainsi, la création des mondes virtuels actuellement en plein essor dans le monde humain en est un parfait exemple). Et bien que nous soyons à l’aube de la virtualité, les mondes (virtuels) créés dans certains jeux vidéo, avec l’existence d’avatars, pourraient inaugurer une longue série d’univers virtuels de plus en plus imaginatifs et de plus en plus sophistiqués tantôt de plus en plus proches du monde humain et tantôt de plus en plus éloignés… l’avenir le dira…

 

Si ces éléments s’avéraient exacts (et bien d’autres encore que nous ignorons), il ne serait pas insensé de penser que cet incroyable et indescriptible agencement évolutif créé par la Conscience et l’énergie forme un écheveau en mouvement d’une inimaginable complexité au potentiel créatif ahurissant (une complexité et un potentiel créatif absolument dingues en vérité !) qui confine — si j’ose dire tant c’est vaste ! — ce duo extraordinaire au génie absolu (ou plus exactement au génie de l’Absolu)… à moins (comme nous l’avons déjà évoqué dans le paragraphe précédent) que la Conscience ne soit, elle-même, qu’une forme que pourrait prendre… et évidemment on ne saurait répondre… (et bien malin celui qui pourrait s’aventurer à avancer une réponse*)… mais au vu de l’énormité et de l’étendue du cadre de pensée que nous effleurons, il serait plus sage d’en rester là… cette perspective est bien trop vaste pour notre minuscule cerveau…     

* A ce sujet, on pourrait tout de même suggérer en guise de brève extension (un brin fantasmagorique) que dans une perspective quelque peu anthropomorphique (et c’est peu dire), on pourrait imaginer que la Conscience appartienne à une sorte d’entité et serait à ce géant gigantesque ce que le mental est à l’Homme (comme l’énergie serait à cet inimaginable colosse ce que « l’organique » est à l’être humain). En déroulant cette hypothèse, il serait alors loisible de penser qu’il pourrait exister un grand nombre de géants gigantesques, peut-être eux-mêmes créés par une entité plus vaste, elle-même créée par… et indéfiniment jusqu’à retrouver la source originelle de toutes les créations et manifestations… Vaste programme ! L’Homme — comme création et manifestation intermédiaire — n’est assurément pas, dans sa modeste exploration, au bout de ses surprises… Mais qu’il parvienne à imaginer ce genre de perspective dénote indéniablement qu’il porte en lui une étincelle d’Intelligence…

 

  

Réflexions sur la conscience et l’énergie – synthèse

Essayons de résumer en quelques lignes cette réflexion. Que notre raisonnement s’appuie sur la consubstantialité de l’énergie et de la Conscience ou de l’énergie comme création (ex nihilo) de la Conscience importe peu. Il semblerait que la Conscience (au vu de ses caractéristiques) appartienne à un plan infini et atemporel. Quant à l’énergie, on peut penser qu’elle a le loisir de pouvoir se manifester sur une infinité de plans... A la façon dont l’énergie s'est déployée dans l’Univers et, de façon plus restrictive, sur la Terre (manifestations dont l’être humain a conscience), il semblerait que l’énergie soit soumise à un espace-temps (extrêmement vaste mais limité), autrement dit à un univers fini et assujetti à la temporalité.

 

Or, il semblerait qu’au fil de l’évolution temporelle, les formes d’énergie les plus sophistiquées aspirent à « retrouver » les caractéristiques de la Conscience mais comme elles se situent dans un espace soumis au temps et à la finitude, elles ne peuvent que tendre indéfiniment vers ces caractéristiques sans jamais pouvoir les atteindre. A moins qu’elles ne parviennent un jour, au fil de leur évolution et de leur sophistication, à créer les conditions nécessaires pour réaliser un saut d’un espace fini et temporel vers un espace infini et atemporel, elles n’ont pour l’heure d’autre option que d’effectuer un « saut en arrière » pour retrouver le plan de la Conscience. On pourrait également supposer que les formes d’énergie les plus abouties (sur le plan psycho-organique) dont les caractéristiques sont les plus proches de celles de la Conscience finissent par se dissoudre et réintégrer entièrement le plan de la Conscience.

 

Il apparaît également avec clarté que les formes d’énergie les plus évoluées parviennent (sans doute à partir de la potentialité insufflée par la Conscience, la créativité engendrée par leurs interactions et leurs toujours plus grandes capacités) à créer d’autres plans au sein même du plan où elles se manifestent comme l’illustre, par exemple, la création du plan conceptuel humain (composé d’idées et de représentations) créé à partir du plan psychique, lui-même, créé (ou accessible) à partir du cerveau, issu du plan organique.

 

Nous ne pouvons également omettre la possibilité que la Conscience ne soit, elle-même, qu’une forme de quelque chose d’inconnu à l’entendement humain et/ou un plan au-delà duquel existerai(en)t un (ou d’) autre(s) plan(s)…

 

Demeure néanmoins l’épineuse question (actuellement insoluble au vu de ma compréhension) des plans qui ne pourraient être que des projections sans réalité (et accessoirement leur organisation et les liens qui les unissent), thématiques que nous aborderons dans nos prochains fragments…

 

Ces pensées — pour peu qu’elles puissent paraître originales ou inattendues — ont simplement traversé mon esprit. Et la très laborieuse élaboration de cette réflexion — exposée dans plusieurs fragments de ce carnet (et réunis ici) — n’est qu’une maladroite tentative* d’en dérouler le fil.

* Cette réflexion révèle bien davantage que la largesse du « champ de pensée » qu’elle sous-entend, les limites de mon intellect à cerner ces éléments avec clarté... l’étroitesse et la pauvreté de mon esprit à les retranscrire avec aisance pour leur donner leur pleine ampleur…

  

 

Réflexions sur la conscience et l’énergie – développements et extensions

 

— Les plans, leur nature, leurs liens et leur organisation —

Qu’en est-il des plans ? Sont-ils réels ? Ou projectifs ? Sont-ils à la fois réels (consistance et solidité de leur existence) et projectifs (représentations créées par le cerveau) ? Essayons de jeter les idées telles qu’elles nous viennent (nous tenterons de les structurer ultérieurement).

 

En premier lieu, il nous apparaît évident que sans le cerveau*, il nous serait sans doute impossible d’avoir conscience de ces différents plans (et accessoirement de parvenir à « habiter », de façon consciente, l’espace d’arrière-plan – la Conscience). Comme il semble tout aussi évident que le cerveau nous donne à voir et à appréhender ces plans en fonction de sa structure, de sa complexité et en lien avec nos capacités sensorielles et la taille de l’organisme dans lequel il est placé. Ainsi, il ne fait aucun doute qu’une drosophile, une souris, un loup, un éléphant et un Homme ne « voient » pas et n’appréhendent pas ce que l’on appelle le monde de la même façon. Ils n’en ont pas la même perception. Ou, autrement dit, ils en ont une représentation différente.  

* Peut-on imaginer ce que serait la perception sans cerveau ? Je crains que non… le cerveau serait-il alors à la fois un obstacle à « habiter », de façon consciente, l’espace impersonnel de la Conscience (par sa farouche propension à la représentation et à la conceptualisation) et un instrument nécessaire pour ressentir et comprendre que nous sommes, a priori, cet espace de perception d’arrière-plan et que tout ce qui est perçu l’est depuis cet espace de Conscience ? 

 

Intéressons-nous d'abord à ce nous avons coutume d’appeler le plan réel (le monde tel qu’il nous apparaît). A certains égards, la réalité du monde (le plan réel) ne fait aucun doute : au-delà de la représentation que nous en avons, nous sentons bien qu’il y a quelque chose (de solide et de consistant*) plutôt que rien (un vide inconsistant n’induisant aucune sensation) mais sa réalité nous reste inconnue car il semblerait que nous ne pouvons avoir accès qu’à sa représentation. Représentation intimement liée au cerveau (sa structure, sa complexité etc etc).

* Quel Homme pourrait dénier la solidité du sol ressenti sous ses pieds ?

 

Lorsque l'on « habite » l’espace de la Conscience, on ne voit – me semble-t-il* – que des mouvements d’énergie entre des formes énergétiques provisoirement et grossièrement cristallisées (les formes en apparence séparées que le mental perçoit habituellement). Formes (provisoirement combinées en « structures ») non fixes qui entretiennent des échanges permanents avec toutes les autres structures et qui composent un tout indissociable. Bref, un monde d’incessants mouvements énergétiques*... Lorsque l'on n’habite que l’espace mental (humain), on ne perçoit que des formes organiques (les êtres vivants) et inertes (les minéraux) qui semblent séparées et qui semblent interagir ou échanger parfois entre elles.

* Dans mon exploration de l’arrière-plan (l’espace de la Conscience), j’ai ressenti qu’il n’y avait que Conscience – Ce qui perçoit – et d’innombrables mouvements d’énergie qui se cristallisent provisoirement en formes, formes qui ne cessent de se transformer et d’échanger entre elles. Peut-être n’ai-je pas suffisamment approfondi et stabilisé cette percée dans l’arrière-plan pour que cette perception soit plus prégnante et plus présente dans ma perception et mon vécu quotidiens ? 

 

On peut également constater que la « coloration » du mental a une réelle incidence sur notre perception du monde (ce que l’on a coutume d’appeler « le réel »). Ainsi, un être humain dont le mental a une inclination à la noirceur et au pessimisme et qui a tendance à voir la face sombre des choses, appréhendera le monde comme un univers dangereux, terrifiant et mortifère contrairement à un être humain dont le mental est sensible à la beauté et enclin à l’optimisme qui l’appréhendera comme un univers magnifique, source de réjouissances.

 

Au terme de ce bien maigre développement, pourrait-on seulement affirmer (en guise d’indigente conclusion) que le monde (le plan « réel ») semble bel et bien exister mais que les sens et le cerveau nous en interdisent l’accès direct et qu’ils ne peuvent nous en offrir qu’une représentation qui diffère selon leur structure et leurs capacités ? A moins que son accès direct (pour les êtres vivants et donc pour les êtres humains qui nous intéressent, ici, au premier chef) se situe justement sur le plan sensoriel (ressentir le monde plutôt que de le penser) comme pourrait l’attester, par exemple, le caractère essentiel de la sensorialité — en particulier tactile (importance donnée aux ressentis corporels et énergétiques) — dans toute démarche spirituelle authentique...

 

Autre point sur le caractère réel ou projectif (illusoire) du monde. Bien que ce dernier semble manifester des signes tangibles d’existence et un caractère apparemment réel (du moins solide), il est possible que la puissance d’illusion du mental, notre attachement à ses projections et plus globalement le formatage de l’esprit humain nous incitent irrévocablement à prendre des vessies pour des lanternes... Tant qu’existe un corps-mental, il semble que l’Homme ne puisse réellement trancher sur la réalité ou l’irréalité du monde. Comme si du point de vue humain, cette thématique demeurait absolument indécidable

 

Enfin, n’excluons pas la possibilité que le monde ne soit ni totalement réel ni totalement illusoire (mais une sorte de mix entre les deux), une sorte d’univers mi réel mi illusoire comme peuvent parfois nous apparaître certains rêves…

 

Essayons à présent de centrer notre réflexion sur les différents plans* (perceptibles par le cerveau humain). Qu’en est-il de leur agencement et de leur organisation ? Et qu’en est-il des liens et rapports qu’ils entretiennent ? Existent-ils des règles générales (et des règles spécifiques) qui régissent leurs relations ?

* Le plan organique (le monde de la matière) à l’origine du plan cérébral – ou psychique – (le monde de l’esprit), lui-même à l’origine de plusieurs plans : le plan conceptuel (le monde des idées), le plan émotionnel (le monde des émotions et des sentiments), le plan des représentations (le monde des images), le plan du rêve (le monde onirique), les plans astral et chamanique (perçus par une infime minorité des Hommes).

 

Une fois encore, laissons venir les idées sans vouloir les structurer en un système complet et cohérent. Il semblerait que seul le plan organique soit régi (principalement régi) par la sensation (grâce à un réseau de cellules innervées) même si la perception de la sensation n’est a priori possible que grâce à l’existence du cerveau, donc à l’existence du plan cérébral (ou psychique).

 

Grâce à la perception de la sensation, le cerveau emmagasine dans « la mémoire » une palette de sensations, les catégorise (par sa capacité de discrimination) en les « jugeant » neutres, plaisantes ou déplaisantes afin d’établir des liens entre les situations et les sensations. Le cerveau, par sa capacité d’abstraction et de conceptualisation, peut dès lors cartographier ce qu’il sent (le monde sensitif) pour permettre à l’organisme dans lequel il est placé de s'y déplacer de façon appropriée (en évitant les sensations désavantageuses et déplaisantes et en essayant — autant que possible — de retrouver les sensations bénéfiques et agréables) et d'y prélever ce dont il a besoin.

 

Cette capacité de mémorisation et cette prédisposition à cartographier le sensitif sont sans doute à l’origine de la conceptualisation que le cerveau ne cessera, au fil de son évolution, de développer et dont il ne cessera de se servir pour permettre à l’organisme dans lequel il est placé (l’Homme ici en l’occurrence) de s’orienter avantageusement dans le monde organique sensitif et d’y survivre.

 

Le développement de cette capacité de conceptualisation permettra à la représentation du monde sensible de devenir de plus en plus fine et détaillée, de plus en plus complexe et de plus en plus vaste (à mesure de l'exploration du monde sensitif). Elle sera à l’origine du langage, de l’abstraction, des mathématiques etc etc jusqu’à atteindre une sorte de point de bascule où la représentation (de plus en plus sophistiquée) prendra plus ou moins totalement le pas sur la sensation (qui restera néanmoins active et déterminante dans certains cas – l’eau bouillante d’une casserole qui brûle la peau par exemple) mais occultée l’essentiel du temps (comme l’illustre la fameuse formule « vivre dans sa tête »). 

 

Il semble très difficile (intuitivement) de donner une représentation de l’organisation de ces plans (et de leur agencement). Mais sans aller plus en avant dans la réflexion (qui ne m’apparaît pas, au fond, si fondamentale ni réellement intéressante, ce qui altère substantiellement mon ardeur et mon envie de l’approfondir...), j’ai l’intuition que toutes les manifestations (quel que soit leur plan) sont des formes énergétiques qui ont besoin de certaines propriétés et caractéristiques, d’un support et d’un environnement particulier (contexte, environnement, plan) pour s’exprimer. Nous pourrions en rester là (et conclure un peu hâtivement que toute manifestation est énergie) mais nous tâcherons (autant que possible) de poursuivre notre réflexion afin de vérifier si la conclusion à laquelle nous parvenons par le raisonnement corrobore pleinement cette intuition.

 

A ce stade de notre (poussive et paresseuse) analyse, il serait sans doute judicieux (et plus simple) d’établir une sorte d’organigramme réunissant tous les plans connus et perceptibles par l’Homme (car bien évidemment, notre réflexion se limite – comme nous l’avons déjà dit – à l’étude des plans accessibles à l’entendement humain) et d’établir, une à une, toutes les relations qu’ils entretiennent entre eux. Mais avant de s’y pencher, essayons de jeter sur le papier les liens qui nous viennent spontanément à l’esprit.

 

Le lien le plus significatif semble être le suivant : le cerveau et le plan psychique semblent être au cœur de l’ensemble de l’édifice. Sans cerveau, pas de perceptions, pas de représentations, pas de concepts, pas d’idées, pas d’émotions etc etc. Comme si le cerveau et le psychisme constituaient le point central et névralgique (si j’ose dire) de tous les plans, de la reconnaissance de l’existence (à l’amont d’eux-mêmes) du plan organique, du plan énergétique et de l’espace de la Conscience) et de la création et de la reconnaissance (à leur aval) de tous les autres plans existants…

 

Autre lien déterminant : le plan créateur d’un autre plan semble être le support nécessaire à son existence. Ainsi, par exemple, prenons le plan du rêve. Les rêves sont un plan créé par le mental. Sans mental, pas de rêve. Et le mental est, lui-même, un plan créé par le cerveau. Sans cerveau, pas de mental. Quant au cerveau, il émane, bien sûr, du plan organique. Sans « l’organique », pas de cerveau. En reprenant cette courte « chaîne », cela reviendrait à dire : pas « d’organique », pas de cerveau ; pas de cerveau, pas de mental ; pas de mental, pas de rêves. L’existence des rêves est donc conditionnée par l’existence du mental, lui-même conditionné par l’existence du cerveau, lui-même conditionné par l’existence de « l’organique », lui-même conditionné par l’existence de l’énergie (et de la Conscience). Formeraient-ils alors une sorte de série de poupées russes ou seraient-ils imbriqués et interpénétrés de façon plus complexe ?

 

Le troisième point qui me vient à l’esprit est le suivant : les plans ne semblent faire sens et ne sont perceptibles et reconnus que par ceux (les organismes) qui en connaissent l’accès, l’alphabet, les codes et les règles. Ainsi, pour un chat, un livre (qui appartient au plan conceptuel des idées) n’est sans doute qu’un rectangle de matière (plan organique). Le monde des idées qui lui est proposé par le livre lui est, a priori, totalement inaccessible. Comme peut être impénétrable le monde  mathématique ou l’univers informatique pour des personnes qui en ignorent le langage…

 

Quatrième point : l’immersion complète ou l’absorption totale dans un plan incite à croire à sa réalité (à la solidité et à la consistance de son existence) comme s’il convenait d’habiter (au moins) le plan n-1 (le plan qui est à la fois le support et le créateur du plan concerné) pour comprendre sa nature projective (ou illusoire) et ne pas en être totalement le jouet ou le prisonnier... A ce titre, le rêve est un bon exemple. Ainsi, lorsque nous rêvons et que nous n’avons pas conscience de rêver, le rêve semble réel. Mais si nous avons conscience de rêver, alors nous comprenons son caractère non réel. Dans le prolongement de cette idée, il semblerait qu’il faille (encore et toujours) revenir à l’impérieuse nécessité d’effectuer le trajet vers l’amont jusqu’à la source originelle* de cette série de plans dont la Conscience et l’énergie apparaissent (toujours) à la fois comme les clés, les instigateurs et les libérateurs...  

* Objet essentiel de la quête spirituelle…

 

Il semble également évident qu’il existe une porosité entre les plans et une sorte d’interpénétration. Ils ont les uns sur les autres des impacts et des influences (parfois réciproques). Ainsi, les rêves et les cauchemars (le plan onirique) ont des répercussions sur le psychisme (le plan psychique) et le cerveau (le plan organique) et nos humeurs (le plan émotionnel) et sur la façon dont on va débuter notre journée (le plan dit « réel » ou physique). Autre exemple, celui de la publicité (le plan des images) qui influence le psychisme (le plan psychique) qui, à son tour, influence nos achats (les plans organique et « réel » physique). Il en est de même pour la Conscience (le plan de la Conscience) qui, lorsqu’elle est « habitée », a de profondes incidences sur les plans organiques et psychiques (joie, tranquillité du corps et du psychisme etc etc).

 

Venons-en à l’élaboration de notre organigramme, censé exposer l’ensemble des liens entre les différents plans et leur ordonnancement (cette thématique sera, en fait, l’objet de la réflexion détaillée*, exposée dans le second livre de cet ouvrage : la Conscience et l’Existant – Une perspective).  

* On peut même dire qu’elle a germé et vu le jour au cours du déroulement de cette réflexion intuitive…

 

En définitive... il est possible que ces différents plans ne doivent pas être ainsi artificiellement séparés (comme nous incite à le faire le mental) et qu’ils apparaissent, en vérité, selon certaines conditions qu’il est inutile d’appréhender et de définir sur le plan intellectuel. Comme si tout ce qui se déroulait au sein de ces plans n’était, en réalité, que des manifestations et des mouvements d’énergie qui auraient pris des propriétés et des caractéristiques (une sorte de déguisement nécessaire) pour apparaître et s’exprimer… ce qui reviendrait à penser que quels que soient les plans et quelles que soient les manifestations qui s’y déroulent, tout ce qui y apparaît* est une forme prise par l’énergie (ou autrement dit, que la nature fondamentale de toute chose matérielle ou immatérielle est l’énergie) et que tout ce qui est perçu l’est par la Conscience – Ce qui perçoit – (ou autrement dit, que la nature fondamentale de la perception est la Conscience). Comme si, en définitive, tout pouvait se réduire et se résumer à deux éléments : l’énergie pour définir tout ce qui apparaît et se manifeste et la Conscience pour définir tout Ce qui perçoit…

* Matière, êtres, idées, pensées, émotions, rêves, mondes et univers divers, plans (bref l'ensemble des phénomènes) ne seraient qu’énergie...

 

Nous ne pouvons, ici, nous empêcher d’ajouter (comme nous l'ont permis de le ressentir – très superficiellement sans doute – nos trop éphémères expérimentations de l’Unité) que tout ce qui est perçu est totalement indissociable de Ce qui perçoit. Et la boucle est bouclée (CQFD) : on en revient à la consubstantialité de la Conscience et de l’énergie qui était le principal paradigme de notre (très intuitive) réflexion. En un mot, quel que soit le plan que nous percevons, quel que soit le plan où nous nous situons (le plan d’où « nous voyons les choses »), tout — tout ce qui perçoit et tout ce qui apparaît et se manifeste — n’est que Conscience et Energie (absolument indissociables).

 

 

Réflexions sur la conscience et l’énergie – développements et extensions

 

— La mort, « l’âme » et la « part consciente » qui transmigre —

Cette réflexion sur les liens entre l’énergie et la Conscience n’a pas abordé l’existence éventuelle de l’âme (en termes chrétiens) ou la question de la réincarnation — transmigration (en termes bouddhistes). Il convient donc de s’y pencher brièvement. Qu’est-ce qui semble « passer » (à défaut de trouver un terme plus approprié) de vie en vie ? Qu’est-ce qui semble transmigrer d’existence en existence* ?

* Si tant est que ce mécanisme soit à l’œuvre…

 

Avant d’aborder cette thématique, précisons (en matière de Vie terrestre) que le souffle (et la respiration) semble(nt) l’apanage des formes d’énergies terrestres les plus évoluées, dotées d’un cerveau qui, par son intermédiaire, peuvent avoir accès à la perception et donc, plus ou moins, à la conscience de soi (en tant que forme) et à la conscience du monde. Soulignons que la conscience de soi se cantonne (dans l’immense majorité des cas chez les créatures terrestres) à une identification au corps (et au « corps-mental » chez l’Homme) et au sentiment d’exister comme entité séparée (du reste du monde). Cette conscience de soi donne l’impression à la dite forme (selon sa perception et son degré de compréhension) d’avoir des caractéristiques personnelles, d’expérimenter des situations et de vivre des évènements dans un monde (ou un univers) donné.

 

Avant de développer notre réflexion, il conviendrait également de dire quelques mots sur ce qui nous laisse supposer « qu’ une part de l’esprit conscient » est amenée à vivre sous différentes formes (et donc à vivre plusieurs existences). Pour ne pas alourdir notre propos, nous limiterons notre réflexion à l’existence humaine.

 

En premier lieu, il semblerait que « la part consciente » présente en chaque individu ne parvienne à comprendre facilement et à intégrer dans « son vécu » sa nature plus profonde qu’est la Conscience. Or, comme ce processus de compréhension, chez les humains, est peu ou prou engagé, il n’est pas idiot de penser qu’il nécessite un temps beaucoup plus long (qu'une seule existence) pour qu’il puisse être achevé (ce qui sous-entendrait, au vu de la lenteur de ce processus, l’existence d’un grand nombre de vies). En outre, comme il semblerait que toutes les manifestations cherchent, à leur insu, à retrouver les caractéristiques de la Conscience (que nous avons abondamment évoquées dans les premiers paragraphes de cette réflexion), il ne semble pas stupide de penser que dès qu’existe un accès (en tant que forme) à une « part consciente », celle-ci s’engage dans le processus de compréhension de sa nature profonde (ce qui nécessiterait pour parvenir à l’achèvement de cette compréhension, comme le sous-entendait le point précédent, un grand nombre d’existences).

 

Autre élément. Bien que nous pensons que le libre arbitre (et la liberté) sur le plan phénoménal* est à peu près nul (les êtres étant soumis à un grand nombre de conditionnements et de forces en présence qui orientent très substantiellement leurs aspirations, leurs élans, leurs désirs et leurs actes), on ne peut dénier que ces actes ont des conséquences sur l’existence, le corps (la part organique) et la « part consciente (ou psychique) » des autres êtres. Et il ne semble pas farfelu de penser que les conséquences de ces actes (qui, entre parenthèses, induisent de multiples réactions (réactions-réponses) — je te mets une claque, je reçois une claque) ne sont pas toujours comprises (loin s’en faut) par leurs auteurs. Il semblerait que l’une des plus sûres façons de comprendre les conséquences de nos actes soit de les vivre de l’intérieur en les expérimentant non comme celui qui en est à l’origine mais comme celui qui les subit. Ainsi, par exemple, pour évoquer une thématique qui m’est chère, un chasseur qui n’a pas conscience de tenir à l’égard de la Vie une attitude inappropriée (et c’est le moins que l’on puisse dire...) devra sans doute passer de l’autre côté du fusil (en une autre vie en général) pour que sa compréhension (la compréhension de la « part consciente » qui est en lui) s’actualise sur ce point. Et il en est sans doute ainsi pour tous nos actes…

* Les plans essentiellement physique et psycho-organique.

 

Ces deux points nous semblent suffisants pour étayer l’hypothèse de la multiplicité des existences. Il en existe sûrement d’autres que nous ne prendrons pas la peine d’évoquer ici. En dépit de l’incontestable probabilité de la pluralité des existences, nous ne pouvons néanmoins exclure l’hypothèse d’unicité de l’existence (hypothèse peu satisfaisante dans la perspective que nous avons développée ici) dans laquelle chaque « part consciente » se manifesterait au cours de « son intégration » à une forme d’énergie (en mesure de « l’accueillir ») et réintégrerait, à la disparition de la dite forme, l’espace de Conscience.   

 

Venons-en aux faits : la mort. La mort n’est sans doute qu’une dissolution complète de la structure formelle prise provisoirement par l’énergie et sa réintégration dans le flux d’énergie pure (« pure » au sens de non combinée en forme) ou sa recombinaison (éparpillée et multiple) avec d’autres formes.

 

Quant à la « part consciente » intégrée à cette structure formelle provisoire (et, en général, identifiée à elle), elle subit, au cours du passage de la mort, une sorte de black-out (un oubli quasi complet de l’univers quitté et des apprentissages nécessaires qui lui sont associés) pour réintégrer (quelques temps plus tard) une autre structure formelle provisoire guidée par ses attirances, ses aspirations, ses élans singuliers, les mouvements en présence, son degré de compréhension de sa nature profonde (la Conscience) et les « expériences » qui lui sont nécessaires pour l’actualiser tout en conservant « le niveau » de compréhension acquis. Un peu comme si « les parts conscientes » étaient soumises à une sorte de continuum discontinu (autrement dit, à une continuité entrecoupée d’intégrations successives dans des structures formelles différentes et variées), ce qui sous-entend que leur « niveau » de compréhension évolue de façon linéaire (ne pouvant jamais régresser et se rapprochant toujours davantage de la Conscience et de ses caractéristiques) tout en pouvant s’intégrer à des formes très variées et au sein d’univers très nombreux, obligées d’apprendre (à chaque nouvelle intégration) les règles, les codes et les lois qui régissent l’univers en question.

 

Malgré l’attrait de ce principe de continuité, nous ne pouvons occulter l’hypothèse d’absence de continuum pour la « part consciente » (hypothèse néanmoins peu convaincante dans la perspective que nous exposons ici). Il serait donc possible, dans ce cas, que « la part consciente » se voit intégrée dans une forme et projetée dans un univers de façon aléatoire ou selon une logique impénétrable par l’esprit humain.

 

En matière de réintégration des « parts conscientes » dans des formes structurelles provisoires, deux hypothèses peuvent être retenues.

 

Soit nous pouvons imaginer que les « parts conscientes » sont attirées (selon les éléments précités) par une palette déjà existante de formes énergétiques comme peut l’être, par exemple (dans cette illustration triviale), un individu désireux d’acheter une voiture qui optera selon ses goûts, ses aspirations etc etc pour un véhicule parmi une palette certes variée mais limitée de véhicules existants.

 

Soit le pouvoir de l’esprit est si puissant qu’il est capable de créer et de faire advenir des formes totalement originales et singulières, parfaitement adaptées aux « besoins » des « parts conscientes » dans l’actualisation de leur compréhension de leur nature profonde (la Conscience).

 

Notons ici (en aparté) que ce ne sont (sans doute) pas les conditions et les situations qui créent la nature des choses. Mais la nature des choses qui crée les conditions et les situations propices à leur développement, à leur actualisation et à leur plein épanouissement (hypothèse valable tant pour l’intégration de la « part consciente » dans une forme, sa « projection » dans un univers donné que dans l’avènement des situations et des évènements qu’elle sera amenée à expérimenter au cours de son existence « de forme »). Refermons l'aparté.

 

Cette possibilité correspondrait, dans notre exemple trivial (de bagnoles), à la possibilité pour un individu de composer sa voiture de façon totalement originale en la créant de toute pièce, prenant un châssis de telle marque et pouvant le transformer, y ajoutant la carrosserie d’une autre marque et pouvant la modifier, choisissant un moteur d’une autre marque encore et pouvant y apporter des modifications de puissance etc etc. sans compter, évidemment, qu’un mix des deux options soit possible…

 

Rien ne peut être exclu… mais disons qu’il n’est pas insensé de penser que la nature protéiforme de l’énergie, son immense potentialité à s’inscrire dans une infinité de plans et sa capacité à s’exprimer et se matérialiser permettent à toutes les « parts conscientes » à travers leur perception (et leur identification à la forme intégrée) de vivre « leur karma » (comme le diraient les bouddhistes et les hindouistes) ou de façon moins religieusement teintée, de vivre exactement ce dont elles ont besoin pour s’éveiller à leur véritable nature (qui, rappelons-le, une fois de plus, semble être la Conscience)...

 

Enfin, ajoutons que notre façon d’appréhender les formes (et donc La forme) et notre attitude à leur égard (en tant que forme et « part consciente ») n’ont, dans l’Absolu, aucune incidence sur l’énergie (inépuisable) et la Conscience (inaltérable, éternelle et sans commencement ni fin). Même en cas de destruction, de maltraitance, de malveillance, de rudesse ou de négligence... En outre, il semblerait que « les parts conscientes » – et les formes dans lesquelles elles seraient intégrées – ne « vivent » et n'expérimentent (en dépit de leur impression et de leur sentiment(1)) absolument rien en tant que formes individuelles (ni les situations, ni les expériences, ni les évènements, ni le plaisir, ni le « bonheur », ni la douleur, ni la souffrance etc etc) puisque la perception pourrait être, en réalité,  simplement « vécue » par la Conscience(2) (et depuis l'espace de Conscience) et les ressentis simplement « éprouvés » par elle(2)...

(1) Et même si la propension à l’identification à la forme intégrée par la « part consciente » est très forte...

(2) C'est à dire par Ce que nous sommes « réellement » et profondément – (non en tant qu'entité séparée mais en tant qu'espace perceptif à la fois non identifié à la forme et indissociable de tous les phénomènes, y compris, bien entendu, de toutes les formes énergétiques existantes...)...

 

… ce qui pourrait laisser penser, au regard de l’incroyable et infinie diversité des formes, des situations, des expériences et des ressentis existants (rien que sur le plan de la Vie terrestre) que la Conscience prend, si l’on peut dire, un certain plaisir* à ces « petits jeux » combinatoires et énergétiques et, peut-être même, « s’en amuse » avec malice et (une bonne dose d') espièglerie… 

* Voire même un (très) malin plaisir...

 

3 décembre 2017

Carnet n°60 La conscience et l'Existant - Sommaire

Essai / 2015 / L'exploration de l'être

La Vie et l’Existant ne semblent, en réalité, qu’un gigantesque jeu — violent et merveilleux — et une permanente célébration… A hauteur d’Homme, peut-être pourrions-nous penser que nous nous apprenons les uns les autres (et, bien souvent, à notre insu) à mieux les regarder et à mieux les vivre. A mieux les comprendre et à mieux les aimer… mais sur le plan de la Conscience, tout ce « cirque » — aimable ou corrosif — semble (presque) sans importance… Est-ce qui est… et ce qui est n’altère jamais Le Regard…

_ 

Nous avons été contraints (pour des raisons d'ordre technique) de diviser la version numérique de cet ouvrage en dix parties.

 

Sommaire

Chapitre introductif

Chapitres 1 à 5

Chapitre 6 (début)

Chapitre 6 (suite)

Chapitre 6 (suite et fin)

Chapitre 7 (début)

Chapitre 7 (suite et fin)

Chapitres 8 et 9

Table des matières

 

La Conscience et l’Existant — Une perspective déroule*, de façon détaillée, notre réflexion sur la Conscience et l’Existant (son passé, son présent et son devenir).

* Au sens littéral… nous déroulerons, en effet, le fil de notre pensée en exposant « par le menu » les idées et les arguments qui nous ont traversés (et tels qu’ils nous ont traversés)... Nous prendrons soin d’avancer lentement… et de laisser cette réflexion cheminer graduellement pour lui permettre de « se déployer », page après page, chapitre après chapitre, aussi loin, aussi largement et aussi finement que possible… 

 

 

SOMMAIRE 

 

CHAPITRE INTRODUCTIF : PENSEES INTUITIVES

 

CHAPITRE 1 LA CONSCIENCE

 

CHAPITRE 2 L'UNIVERS ET LA MATIERE

     2.1 Petit cours accéléré d’astrophysique, de physique et de biologie

     2.2 Quelques éléments d’astronomie – astrophysique

 

CHAPITRE 3 LA MATIERE TERRESTRE

     3.1 Quelques éléments de physique et de chimie

     3.2 Vague aperçu du monde terrestre avant l’émergence du vivant

 

CHAPITRE 4 LE VIVANT TERRESTRE

     4.1 Quelques éléments de biologie & de sciences humaines

     4.2 Vague aperçu du monde terrestre avant l’émergence de l’homme

 

CHAPITRE 5 L’HOMME ET LE PSYCHISME HUMAIN

     5.1 Bref aperçu évolutif du psychisme 

     5.2 Les contenus psychiques principaux 

          5.2.1 Les perceptions visuelles de l’Existant

          5.2.2 Les sensations 

          5.2.3 Les représentations mentales 

          5.2.4 Les émotions 

     5.3 Deux mécanismes centraux du psychisme

          5.3.1 Le désir

          5.3.2 La zone de confort

     5.4 Les besoins psychiques (besoins, besoins-désirs, désirs et désirs-fantasmes)

          5.4.1 Des besoins organiques et matériels

          5.4.2 Des besoins psychiques élémentaires

          5.4.3 Des besoins-désirs narcissiques

          5.4.4 Des besoins-désirs

          5.4.5 Des désirs d’ordre général

          5.4.6 Des désirs-fantasmes

     5.5 Le fonctionnement général du psychisme

          5.5.1 Liens entre psychisme et cerveau

          5.5.2 Un espace perceptif circonscrit et limité doté d’une très forte propension à la saisie

          5.5.3 Un univers complexe sujet à la projection

          5.5.4 Zone de confort, satisfaction, peurs et désirs

          5.5.5 Frustration, dépendance et attachement

          5.5.6 Les comportements délétères

          5.5.7 La puissance créatrice du psychisme

     5.6 Les grands types psychiques

     5.7 Résumé du psychisme

     5.8 Synthèse du psychisme et des besoins psychiques

          5.8.1 Deux grandes catégories de besoins

          5.8.2 Les grands besoins sous-jacents

          5.8.3 Deux grands types de réponses

          5.8.4 Note sur le psychisme et la dimension spirituelle 

          5.8.5 Trois grandes orientations possibles

 

PARTIE 3

CHAPITRE 6 LES CREATIONS ET LES REALISATIONS HUMAINES

     6.1 Les actions et les fabrications humaines : le plan réalisationnel actif 

          6.1.1 Remarques liminaires

          6.1.2 L’alimentation : les réponses aux besoins alimentaires

          6.1.3 Les vêtements : les réponses aux besoins vestimentaires

          6.1.4 La santé : les réponses aux besoins de santé 

          6.1.5 La santé (suite) : les réponses aux besoins d’eau, d’air et de sols (non pollués)

          6.1.6 Le logement : les réponses aux besoins de logement

          6.1.7 Les tâches et le confort domestiques : les réponses aux besoins domestiques

          6.1.8 L’énergie : les réponses aux besoins d’énergie

          6.1.9 Les transports (des individus et des biens) : les réponses aux besoins de déplacement

          6.1.10 La protection des personnes et des biens : les réponses aux besoins de protection matérielle

          6.1.11 La reproduction : les réponses aux besoins reproductifs

 

PARTIE 4

          6.1.12 Les relations : les réponses aux besoins relationnels, sexuels, affectifs et communicatifs

          6.1.13 La protection psychique : les réponses aux besoins de protection et de défense psychiques

          6.1.14 Les distractions : les réponses aux besoins distractifs

          6.1.15 L’expression : les réponses aux besoins expressifs

          6.1.16 La compréhension : les réponses aux besoins de compréhension

          6.1.17 Les besoins de réalisation de tous les désirs : les réponses aux besoins de satisfaction

          6.1.18 Le besoin de travailler : les réponses au besoin de travailler

          6.1.19 Le besoin d’argent : les réponses aux besoins pécuniaires

          6.1.20 Les besoins administratifs : les réponses aux besoins administratifs

          6.1.21 Note générale sur l’évolution des kits (modules)

 

PARTIE 5

     6.2 Les représentations et les créations humaines : le plan représentatif intellectuel 

          6.2.1 Le plan artistique

          6.2.2 Le plan imaginaire

          6.2.3 Les savoirs

          6.2.4 La connaissance

          6.2.5 Notes sur la quête existentielle 

     6.3 La connaissance de soi (compréhension sensible) : le plan spirituel

          6.3.1 Le plan spirituel

          6.3.2 Le cheminement spirituel

          6.3.3 Bref aperçu historique

          6.3.4 Trend historique

          6.3.5 Eléments pour une analyse évolutive

          6.3.6 Perspectives

     6.4 Le système – la société humaine

          6.4.1 Bref aperçu historique

          6.4.2 Les fondamentaux de la société humaine

          6.4.3 Quatre grands types d’organisations

          6.4.4 Quelques généralités sur la société humaine

          6.4.5 Synthèse de la société humaine

          6.4.6 L’organisation sociétale générale

          6.4.7 L’organisation politique et judiciaire

          6.4.8 L’organisation économique

          6.4.9 Les relations avec l’extérieur

          6.4.10 L’organisation des territoires

 

PARTIE 6

CHAPITRE 7 L’HISTOIRE DU MONDE ET SON EVOLUTION POSSIBLE

SOCIETES, ORGANISATIONS, INDIVIDUS ET RAPPORTS A L’EXISTANT

     7.1 Quelques précisions 

     7.2 Les débuts de l'humanité 

          7.2.1 Les premières sociétés humaines

          7.2.2 Le portrait de l’individu médian

          7.2.3 Les rapports à l’Existant

     7.3 Le monde « primitif » 

          7.3.1 Les sociétés « primitives » et « traditionnelles »

          7.3.2 Le portrait de l’individu médian

          7.3.3 Les rapports à l’Existant

     7.4 Le monde d'avant-hier (de l’antiquité au 18ème siècle)

          7.4.1 Les sociétés d’avant-hier

          7.4.2 Le portrait de l’individu médian

          7.4.3 Les rapports à l’Existant

     7.5 Le monde d'hier (du 18ème à la fin du 20ème siècle)

          7.5.1 Les sociétés d’hier

          7.5.2 Le portrait de l’individu médian

          7.5.3 Les rapports à l’Existant

          7.5.4 Aparté intuitif sur les tendances générales au fil de l’évolution de l’histoire humaine

     7.6 Le monde d'aujourd'hui

          7.6.1 Les sociétés contemporaines

          7.6.2 Le portrait de l’individu médian

          7.6.3 Les rapports à l’Existant

     7.7 Le monde de demain

          7.7.1 Les sociétés de demain

          7.7.2 Le portrait de l’individu médian

          7.7.3 Les rapports à l’Existant

 

PARTIE 7

     7.8 Le monde d'après-demain

          7.8.1 Les sociétés d’après-demain

          7.8.2 Le portrait de l’individu médian

          7.8.3 Les rapports à l’Existant

          7.8.4 Aparté intuitif sur l’évolution des individus et des sociétés

     7.9 Le monde à moyen terme

          7.9.1 Le monde des « conscients élémentaires »

          7.9.2 Le monde des « conscients élaborés »

          7.9.3 La coexistence de plusieurs mouvements

          7.9.4 Le portrait de l’individu médian

          7.9.5 Les rapports à l’Existant

     7.10 Le monde à long terme

          7.10.1 Généralités

          7.10.2 L’organisation sociétale générale

          7.10.3 L’organisation des réponses aux besoins et les conditions d’existence

          7.10.4 La coexistence de plusieurs mouvements

          7.10.5 Le portrait de l’individu médian

          7.10.6 Les rapports à l’Existant

     7.11 Le monde à très long terme

          7.11.1 Le monde des « conscients conscients complets »

          7.11.2 Le portrait de l’individu médian

          7.11.3 Les rapports à l’Existant

 

PARTIE 8

CHAPITRE 8 TENTATIVE D’ANALYSE PLUS FINE ET PLUS PROFONDE

     8.1 Généralités, problématiques, questions et réflexions (presque) tous azimuts

          8.1.1 Quelques éléments « en vrac »

          8.1.2 Quelques vagues intuitions supplémentaires…

     8.2 Tentative de représentation de l’Existant — la structure fondamentale du « réel » contemporain ?

          8.2.1 Les différentes formes énergétiques

          8.2.2 L’ensemble des interactions entre les formes énergétiques

          8.2.3 Note « personnelle et subjective »

          8.2.4 Note sur « le destin » des formes

          8.2.5 Note supplémentaire sur « le destin » des « parts conscientes »

     8.3 Trend historique

          8.3.1 Période historique antérieure au « Big Bang »

          8.3.2 Période historique post « Big Bang »

          8.3.3 Période historique avant l’émergence du Vivant perceptif

          8.3.4 Période historique après l’émergence des animaux et des Hommes

          8.3.5 Période historique de l’Homme « moderne »

     8.4 Perspectives

          8.4.1 Période historique à court et moyen termes

          8.4.2 Période historique à long et très long termes

          8.4.3 Commentaires et remarques

     8.5 La perception (au moins six « façons » majeures « d'habiter » l'espace de conscience)

          8.5.1 Inexistante ou quasi inexistante (totale ignorance — quasi « pure » inconscience)

          8.5.2 Très restreinte (quasi-totale ignorance)

          8.5.3 Restreinte (quasi-totale ignorance)

          8.5.4 Partielle (Conscience mineure)

          8.5.5 Large (Conscience majeure)

          8.5.6 Pleine et entière (Conscience totale)

 

CHAPITRE 9 SYNTHESE GENERALE SIMPLIFIEE

 

Conclusion générale

 

ANNEXES

ANNEXE 1 : panorama général de la Conscience et de l'Existant – partie 1

ANNEXE 2 : panorama général de la Conscience et de l'Existant – partie 2

ANNEXE 3 : l'Homme et le psychisme, créateurs de différents plans

ANNEXE 4 : le plan réalisationnel actif

ANNEXE 5 : le plan représentatif intellectuel

ANNEXE 6 : l'organisation générale de l’Existant contemporain

ANNEXE 7 : panorama général de la Conscience et de l'Existant – partie 3

ANNEXE 8 : panorama général de la Conscience et de l'Existant – partie 4

ANNEXE 9 : panorama général de la Conscience et de l'Existant – synthèse

 

3 décembre 2017

Carnet n°59 Entre nous

Journal / 2015 / L'exploration de l'être 

Notre vraie famille est – je crois – celle que la vie nous fait rencontrer au quotidien. Et que l’on retrouve chaque jour dans la joie. La mienne est à la fois très restreinte et infinie. Dans cette famille naturelle, quelques membres fidèles : les chiens, le ciel, le vent et les nuages, les arbres, les oiseaux et les insectes, les fleurs, les herbes sauvages et les cailloux des chemins. Mon carnet et ma besace...

Chaque jour, nous nous asseyons au bord du monde et nous nous réjouissons en silence...

Tous m’apprennent le précieux et l’éphémère. La joie et l’humilité. Beaucoup d’instants de grâce passés ensemble. Et je leur suis infiniment reconnaissant. Le cœur émerveillé et empli de gratitude pour leur présence. Et leur enseignement.

 

 

Dire la vie qui nous entoure. Qui se pose un instant dans le regard qui l’accueille et la contient... et exprimer la joie de l’être. Voilà peut-être notre travail. Celui sur lequel on se penche chaque jour – comme un miracle (et sans trop y croire) – tantôt enthousiaste, tantôt fataliste, tantôt avec lourdeur, tantôt avec légèreté. Fidèle au poste, malgré tout, depuis (déjà) tant d’années.

Et puis, il y a le ciel à qui je confie mes témoignages. Qu’il regarde d’un air détaché par dessus mon épaule. Et auxquels il acquiesce en silence. 

Autrefois, je l’interrogeais souvent. Sur les pas, sur la marche et le sens du chemin. Mais la terre, les paysages et les visages m’ont tant dépouillé qu’aujourd’hui il me laisse le côtoyer (et l’habiter) sans retenue...

Et je suis heureux à présent de ces notes que j’inscris chaque jour sans relâche ni impatience sur mes carnets. Au bon vouloir du ciel et du vent. Au gré des gestes et des pas...

Les collines, les arbres et les pierres en sont les témoins quotidiens. Et j’aime leur présence à mes côtés. A l’égard du ciel et des saisons, nous avons le même cœur fidèle... 

L’idée d’écrire une œuvre m’a quitté. Aujourd’hui, jouir du regard me contente. Et l’écriture, souvent, se manifeste dans ce trop-plein de jouissance. Comme une aspiration (presque) totalement impersonnelle à témoigner de cette joie silencieuse. Et l’offrir à ceux qui lisent ces lignes. Le cœur en communion. Comme une invitation (peut-être) à nous laisser nous dépouiller du peu que nous possédons (que nous croyons posséder...), à se départir de tous les espoirs de la terre pour devenir simple spectateur de nos pas. Simple habitant du ciel. Des âmes et des êtres comblés goûtant à l’ineffable. Sujets émerveillés. Résidents inaltérables au sein de la présence tendre et bienveillante. Pleinement souveraine.

 

 

Aux heures vespérales, nous avons croisé les yeux ronds d’une chouette postée sur le mur d’une vieille cabane abandonnée. Mais à peine ai-je eu le temps de m’exclamer in petto (et un peu idiotement) : « Oh ! Comme c’est chouette ! » qu’elle s’était envolée. Sans doute avais-je encore la démarche trop humaine pour passer inaperçu. Pour apparaître comme une figure familière et inoffensive aux yeux de mes frères naturels...

 

 

A cette heure du jour, le ciel gris et bas – presque bleu pâle – se couvre de rayures roses et orangées. Au loin, les collines et l’horizon se détachent. Et offrent aux yeux un spectacle grandiose et merveilleux. Je ralentis le pas. Note ces quelques mots sur mon carnet et m’enfonce à pas lent – l’œil ravi et le cœur radieux – dans la nuit naissante.

 

 

Dans le monde humain, il n’y a (presque) que des personnalités. Dans la nature, il n’y en a aucune. Il y a des créatures qui vaquent simplement à leurs nécessités. Animées par des mouvements naturels. Voilà pourquoi l’on s’y sent à son aise et à sa place... La nature revigore et régénère alors que les paroles et les gestes – tous les mouvements artificiels – des Hommes excitent, énervent et épuisent.

 

 

On aime la force, la puissance (le pouvoir) et la beauté – on y aspire et/ou on y est attaché – lorsque l’on se sent (consciemment ou non) misérable et démuni (lorsque l’on se sent privé de ces attributs). A partir d’un certain degré de compréhension et de sensibilité, ces caractéristiques perdent totalement leur attrait. On n’y voit que le signe de la faiblesse (et de la misère). Et l’on devient intensément sensible à la fragilité et à la vulnérabilité. Notre cœur et nos yeux émus les devinent partout... Elles donnent une beauté indicible à toutes les expressions et manifestations qui les portent avec authenticité et les reflètent sans ombre...

 

 

Au détour d’un sentier – perdu dans un vallon escarpé et sauvage – deux sangliers, insouciants, vaquent la truffe (le groin ?) au sol à la recherche de quelque nourriture. Deux survivants d’une harde sans doute décimée par les chasseurs. Je m’assieds pour les regarder. Les chiens, aussi, ont stoppé leur course et les regardent, intrigués. Ils ne nous accorderont pas un regard. Libres et fiers, peu soucieux des Hommes et pas le moins du monde effrayés (ou traumatisés) par leur passion meurtrière. En les regardant, je pense (pourtant) avec tristesse à leurs congénères traqués, pourchassés et massacrés par des meutes d’abrutis armés et leur horde de chiens sauvages qui parcourent la campagne (collines, forêts et bords de rivière) la haine en bandoulière et la bave aux lèvres. Aussi peu soucieux de la nature et du vivant que je le suis de l’argent et des affaires des Hommes...

 

 

La diversité humaine – en matière d’aspirations et de centres d’intérêt – me laisse parfois songeur. Songeur et perplexe. L’ignorance est une bien piètre excuse à la barbarie... 

Aimer le monde, prendre soin des êtres, être attentif et bienveillant à leur égard, vivre sans détruire ni endommager, se réjouir sans s’accaparer ni posséder, être un simple passant émerveillé par la beauté du monde et conscient de la préciosité de la vie est-ce donc si difficile ? Pourquoi est-ce si peu répandu chez les Hommes ? 

En ce monde. En cette vie. Tout est si fragile et éphémère. Comment peut-on passer une existence entière à l’ignorer... à refuser cette évidence... et à vivre en feignant le con-traire ? Il faut faire preuve d’un grand aveuglement, être entaché de bien des encombrements (nos illusoires désirs narcissiques et nos machiavéliques représentations) ou envahi par un refus et une peur terrifiante pour ne pas voir et ne pas comprendre que la moindre manifestation, la moindre parcelle du vivant et de l’Existant appelle tout notre amour et toute notre attention...

 

 

Je ne possède rien (ou si peu). Quelques nécessités pour le corps. Le regard en bandoulière. Voilà ma seule richesse (sans aucun titre de propriété évidemment...). Et c’est avec lui (et rien d’autre) que je traverse la vie et arpente les paysages du monde... 

Je n’attends pas des Hommes qu’ils adoptent ce mode de vie... Et loin de moi l’idée d’ériger cette existence en modèle. Mais j’attends que la Conscience descende sur l’esprit des Hommes. Pour qu’elle les éclaire... Je sais pourtant qu’elle ne pourra advenir que lorsqu’ils seront assez vides et assez mûrs pour quitter le mental et la recevoir (et l’habiter) comme il se doit... Patience est donc nécessaire...

 

 

L’hiver nous déshabille plus que toute autre saison. Et c’est dans la désolation des paysages – au plus froid des jours – que l’on peut juger de la chaleur du cœur. Est-il assez vif et brûlant pour éclairer la grisaille et l’obscurité ? Assez vif et brûlant pour rayonner dans la solitude hivernale ? Est-il assez large pour accueillir les souffrances – et la sensibilité plus vive – aiguisées par la froideur des jours ? Ah ! L’épreuve de la morte-saison...

 

 

Le dimanche, on voit les Hommes se promener sur les trottoirs des villes, dans les rues marchandes et les centres commerciaux, dans les parcs et sur les chemins de campagne. En couple ou en groupe. Peu de solitaires. Presque jamais. 

La solitude leur paraît insupportable. Ils la craignent autant qu’un couteau tranchant pointé devant leur gorge. Quant à moi, ce sont les Hommes et les groupes qui m’insupportent. Leur badinage, leur posture et leur parole sans épaisseur. La solitude à plusieurs et l’ennui collectif dont ils s’entourent et qu’ils tentent (vainement) de déguiser en rencontre ou en fête pour ne pas avoir à affronter la solitude qui étreint le cœur de chacun...

 

 

L’ombre de la mort n’est pas la mort. Mais sans doute effraye-t-elle davantage que tout trépas...

 

 

A pas fébriles, il marchait (croyait marcher) vers son destin. Ignorant qu’il se tenait dans chaque foulée. Et quelque part dans le ciel, juste au dessus de sa tête... 

Ainsi vivent (et s’acharnent) les Hommes. Ils imaginent construire leur destin sans comprendre que toutes les édifications les éloignent de la joie qu’ils cherchent. 

Rien ne pourra jamais leur offrir la grâce de ne rien être...

 

 

A petits pas vers la mort : que faire sinon sourire ? En sourire et lui sourire, n’est-ce pas là l’attitude la plus juste ?

 

 

Un regard impersonnel (sans aucune personnalité). Et le monde s’éclaire, devient enfin réel. Neuf pour la première fois. Nouveau à chaque regard... Il n’y a d’autre façon de regarder le monde.

 

 

Dans les conversations et les discussions. Dans les discours de pacotille lancés à la foule. Dans les vitrines apocryphes de la propagande et des idéologies. Dans la jungle des mots, aucune parole vraie. Aucune parole vivante. Une éloquence de paillette. Un ramassis de représentations et de poncifs. Des idées sans épaisseur. Un langage exsangue et décharné. Creux. Le monde n’est (le plus souvent) qu’un bavardage inutile...

La parole des vivants (des presque vivants) est comme un feu de bois vert, elle enfume mais sa flamme est si faible qu’elle ne sait réchauffer les corps ni éclairer les âmes...

La parole vraie et vivante ne peut jaillir que des clairières silencieuses. Et des déserts. Lorsqu’elle reflète la vérité et le silence, elle contient alors toute l’épaisseur du monde... et transperce son opacité... Dans le brouhaha ambiant, cette parole est rare. Elle seule pourtant est nécessaire et précieuse...

 

 

L’hostilité des paysages et des saisons s’estompe lorsque disparaît le personnage. L’adversité du monde peut demeurer. Mais dans le ciel et la nature, on devine partout des alliés. Et des amis fidèles qui aiguisent (ou font jaillir) la joie d’être vivant...

 

 

Aux heures froides de la nuit, lorsque la lune est haut dans le ciel, les Hommes rêvent-ils qu’ils rêvent leurs jours ? Ou le sommeil est-il si profond que la rêverie est éternelle... Les esprits pourront-ils jamais voir le jour ?

 

 

Face à la fragilité des heures, il convient de se soumettre. Et de s’y fondre... Jamais de s’y soustraire ou de s’y opposer. Et moins encore de la dominer ou de l’habiller d’une force artificielle et apparente pour se croire souverain du temps... On ressemblerait alors à un mendiant qui aurait revêtu la cape d’un roi. Un mendiant se tenant au pied de l’instant et tendant son bol en espérant une obole qui ne viendra jamais...

 

 

S’asseoir humblement sur le chemin. Et regarder...

 

 

Notre vraie famille est – je crois – celle que la vie nous fait rencontrer au quotidien. Et que l’on retrouve chaque jour dans la joie. La mienne est à la fois très restreinte et infinie. Dans cette famille naturelle, quelques membres fidèles : les chiens, le ciel, le vent et les nuages, les arbres, les oiseaux et les insectes, les fleurs, les herbes sauvages et les cailloux des chemins. Mon carnet et ma besace...

Chaque jour, nous nous asseyons au bord du monde et nous nous réjouissons en silence...

Tous m’apprennent le précieux et l’éphémère. La joie et l’humilité. Beaucoup d’instants de grâce passés ensemble. Et je leur suis infiniment reconnaissant. Le cœur émerveillé et empli de gratitude pour leur présence. Et leur enseignement.

 

 

Affronter l’idée de la mort (de sa propre mort), voilà pour l’Homme (ordinaire) le gage d’entrer dans la vie réelle. Le reste n’est qu’ajournement et consolation...

Passée la tristesse, l’idée de vivre en sursis offre à l’instant une formidable épaisseur. Une formidable intensité. De cette intensité naît la vie pleine. Le sentiment intense d’être pleinement vivant. Et de ce sentiment vient la joie...

Vivre ainsi à chaque instant du jour est (sans doute) le présent le plus haut que la vie puisse offrir à un homme...

 

 

Libéré des contraintes et des exigences humaines (sociales et familiales), des rencontres et des représentations, seul face à soi. Pleinement seul dans la solitude. Dans ce face-à-face avec le SeulUn avec le regard. Existe-t-il plus libre et plus pleine existence ? Combien d’Hommes pourraient-ils se targuer d’une vie plus dense ?

Mais tout cela, bien sûr, n’est offert qu’au regard impersonnel. Le personnage, lui, n’a pas quitté sa condition indigente. Et sa misère. Peut-être même se sont-elles accentuées en apparence... Sa lente déliquescence a simplement offert la possibilité d’habiter ce regard si étranger aux Hommes...

 

 

S’en remettre aux mains de la vie. Et à la tendresse du regard...

 

 

A l’ère de la vitesse et de l’immédiateté (de la fulgurance creuse et insensée), la marche devrait nous guider. Et nous (re)donner le rythme juste pour traverser la vie. Et le monde. Aller à petits pas selon les prédispositions naturelles de l’Homme. La marche érigée en force de résistance face à la perpétuelle fuite en avant proposée et exigée par la modernité...

 

 

Autant le bavardage des Hommes me lasse ou m’exaspère dès les premières secondes (et que dire lorsque j’y suis contraint pendant de longues minutes ou – pire – pour quelques heures : un véritable supplice !), autant je peux rester des journées entières auprès des arbres et en compagnie du ciel. Avec eux la communion est directe et naturelle. Leur présence a nettement plus de consistance que la société des Hommes. Et leur parole silencieuse infiniment plus d’épaisseur que toutes les conversations et discussions du monde...

 

 

La nature et les animaux – tous les êtres naturels – sont nus. Vrais et authentiques. Bruts et fragiles. Eminemment vivants. Seul l’Homme se pare et se déguise. Endosse un costume et veut paraître (en toutes situations). Se protège à outrance et s’immunise contre tous les dangers. S’enlise dans l’artifice, la fausseté et le mensonge. Voilà pourquoi il paraît si peu vivant... si étranger à la vie et aux lois naturelles... Le monde n’a jamais connu de créature plus empruntée. Plus pleutre et plus insensée.

 

 

Il y a ces instants de grâce où le ciel se déchire pour ouvrir votre cœur. Dans ces instants-là, vous savez – vous sentez – que le regard est inaltérable. Et éternel.

 

 

Un oiseau traverse le ciel. Comme s’il se frayait un passage dans l’infini. L’infime dans l’indicible. L’éphémère dans l’éternel. Messagers toujours l’un de l’autre...

 

 

La parole silencieuse jaillit du silence. Elle ne peut (évidemment) émaner que de lui. Elle s’offre lorsqu’il n’y a ni bavardage ni intention. Lorsque le cœur – sans activité ni projet – est ouvert à l’inconnu. Réceptif à ce qu’il ignore et à ce qui passe...

Dans ces instants de grâce (d’attente sans attente), le cœur est suffisamment accessible pour la recevoir. L’esprit – étranger à ses propres soucis – suffisamment vacant et disponible pour la recueillir. Et selon les circonstances (et l’auditoire), la bouche ou la main pourront s’en faire les fidèles traductrices. La première l’énoncera avec simplicité, droiture et sobriété. La seconde la couchera sur le papier avec naturel, innocence et humilité.

Sans cet accueil délicat et exigeant – dégagé de tout désir et d’arrière-pensée – la parole silencieuse se fanerait ou poursuivrait sa route – son invisible et mystérieux chemin – en quête d’une âme plus humble et moins occupée – délaissant tous les passages obstrués et les réceptacles indisponibles – pour un regard et une présence sans ombre...

 

 

Le monde est une scène. Et un décor. Les acteurs y tiennent leur rôle. Et les yeux regardent. Les habillent de beauté ou de laideur. De ruse ou de naïveté. De grâce ou d’obscurité. Les yeux n’ont le choix des couleurs... selon les teintes qu’on lui prête, le spectacle pourra paraître différent, mais la pièce sera identique...

Seul le regard voit l’envers du décor. Et peut offrir aux yeux la joie et l’innocence du spectateur – témoin à la fois impartial et engagé – ravi d’assister à cette représentation insensée. A cette vaste comédie tantôt dramatique tantôt jubilatoire. Ne cessant jamais d’éprouver pour la troupe des comédiens une immense et sincère tendresse...

 

 

La rose et la marguerite exhalent chacune un parfum différent. Pourtant elles reflètent la même unité qui s’exprime à travers elles. Mille nuances. Significatives ou subtiles. Les différences peuvent être infimes ou majeures, elles ne sont qu’apparentes. Ainsi en est-il (évidemment) de toutes les formes. Et au delà de leur apparence, rien ne distingue le granit, l’argile et le sable, la rose, la marguerite et le se-quoia, l’insecte, le puma et l’éléphant, l’indien, le burundais et le finnois. Expressions multiples d’une unique essence...

 

 

[Hommage aux victimes des attentats parisiens du 13 novembre 2015]

Ce matin, j’ai appris à la radio la nouvelle du carnage (plusieurs attentats perpétrés aux fusils-mitrailleurs et aux explosifs). Toute la matinée, la voix des journalistes qui se succédaient à l’antenne pour livrer les détails atroces de cette accablante actualité a été recouverte par de multiples détonations – les tirs de nos inoffensifs et débonnaires amis chasseurs (qu’ils aillent donc au diable ou brûler en enfer !). Partout la barbarie et l’œuvre ignoble des Hommes qui détruisent et anéantissent la vie et l’Existant au nom de principes, d’intérêts et de traditions (anciennes et nouvelles)...

 

Quand donc les Hommes comprendront-ils que l’idéologie et le profit ne peuvent diriger les actes ? Qu’ils ne peuvent gouverner le monde et les êtres ? Et qu’ils sont toujours porteurs d’une incroyable souffrance ?

 

Un grand pas sera réalisé lorsque le cœur – la sensibilité, l’innocence et la bienveillance (naturelles et authentiques) – auront repris leurs droits. Et leur place. Mais avant ce juste retour des choses combien de milliards de créatures devront-elles être massacrées au nom d’une barbarie qui ne daigne plus même taire son nom et qui s’affiche à présent un peu partout avec fierté et ostentation ?

 

 

Mon carnet. Ami et confident. Témoin des jours. Modeste fenêtre entrebâillée sur le monde par laquelle je jette aux Hommes quelques graines de rien et d’herbes folles. Le vent se chargera de les diffuser... Quant aux moissons et aux récoltes, laissons au ciel le soin d’en décider. A chacun sa tâche. A chacun son œuvre...

 

 

Devant la vie et l’amour. Devant la mort et la vérité, on peut détourner le regard. Baisser les yeux. Mettre la tête dans un sac. Mais le plus sage est de les regarder sans sourciller – apeuré certes mais sans sourciller – prêt à se laisser déchirer ou dévorer. De ces terrifiants face-à-face, on ne ressort que plus vivant...

Lorsque ces rencontres ont été profondes et authentiques, qu’elles ont effacé dans nos cœurs, nos peurs et nos désirs, nos croyances et nos espoirs, qu’elles nous ont dépouillés de l’idée même d’être quelqu’un, on est enfin mûr pour rencontrer la vie et l’amour. La vérité et la mort. On est enfin capable de vivre et d’aimer. De faire rayonner la vérité. Et de mourir.

 

 

Après le refus et la colère de ne rien être. Après l’angoisse et la tristesse que cette idée a suscitées. Lorsque toutes nos édifications et nos certitudes ont été jetées à terre. Lorsque, assis sur notre tas de cendres, nous regardons la désolation dans les yeux. Lorsque nous avons abandonné tout espoir de nous tirer de ce mauvais pas. Lorsque tout a disparu subsiste le regard, dépouillé de tous ses encombrements et ses scories. La désespérance peut alors se transmuter en joie. Et les paysages désolés se débarrasser de leurs oripeaux pour nous révéler toutes leurs merveilles. Toute leur beauté.

 

 

Il est parfois difficile de demeurer dans la nudité du regard. L’esprit si habitué à combler le vide est toujours prompt à remplir l’espace nu. Il s’y livre avec un malin plaisir dans une sorte d’automatisme trompeur dès que le regard penche du côté du personnage, dès que se manifestent l’idée d’être quelqu’un et le désir de lui donner consistance. Cette vacuité lui est totalement insupportable...

 

 

Ah ! Ces pauvres jours faits de riens et de petites choses dérisoires que l’esprit s’empresse d’ériger en événements monumentaux. En ouvrages grandioses. En monuments indispensables et essentiels...

 

 

Dès que l’on aspire à contenir les choses, elles se défont. Dès que l’on aspire à les retenir, elles s’éloignent... Être le regard qui épouse la présence. Et les disparitions. Suffisamment ancré en lui-même pour se réjouir de toutes les transformations.

 

 

Il souhaitait se défaire de l’horizon. Mais chaque pas – chaque foulée – lui rappelait (à la fois) cette impossibilité. Et son inexistence.

 

 

L’inconfort des jours ? Non ! Celui de l’esprit qui refuse et ne sait accueillir... Que faire alors ? Accueillir le refus, le malaise et le désagrément qu’il a engendrés. Les autoriser à se déployer. Leur laisser (toute) la place. L’inconfort s’amenuisera ainsi. Les problèmes demeureront peut-être mais ils perdront leur caractère problématique. En bref, ne rien refuser. Tout accueillir, y compris le refus et sa cohorte d’effets réactifs ou délétères...

 

 

Lorsque nulle construction humaine n’enlaidit les paysages. Lorsque nul bruit humain ne recouvre le silence, le monde peut enfin révéler sa beauté. Sa nature brute et sauvage. Infiniment harmonieuse. Non que l’esprit humain ne sache s’en faire le reflet mais il est (en général) si étroit, si obscur et encadré par la raison qu’il en dénature (presque toujours) le charme originel...

 

 

En voyant l’émoi, la consternation et l’élan de solidarité suscités par la tragédie qui a frappé Paris le 13 novembre 2015, je ne peux m’empêcher de penser – en dépit de la volatilité des émotions, de leurs faibles impacts sur la sensibilité et leur capacité très restreinte à intégrer l’Être (les événements passent, l’émotion s’estompe puis disparaît et les esprits – fidèles à eux-mêmes – demeurent inchangés), je ne peux m’empêcher de penser – disais-je – que lorsque la condition animale suscitera la même émotion, que la condition humaine et la condition animale seront considérées de façon identique, l’humanité aura franchi un grand pas. L’ensemble des espèces vivantes, la vie et la planète n’auront plus à craindre les Hommes. Un avenir meilleur alors se dessinera. Une cohabitation heureuse et harmonieuse pourra voir le jour. La vie fraternelle sera accessible. A portée de main.

 

 

Devant notre impuissance. Devant notre impuissance face à la vie et aux événements, nous n’avons (en vérité) qu’une seule arme : aimer. Être présent et à l’écoute. Prendre soin de ceux qui nous entourent. Embrasser d’un regard tendre ce que nous rencontrons. Et ce qui nous échoit...

Si tu n’es pas en mesure d’être tendre avec ce qui t’entoure (êtres et choses), sois au moins tendre avec toi-même. Avec tes caractéristiques, ton comportement, tes émotions et tes sentiments, ton incompréhension et tes refus. Accueille-les sans retenue. Ne te consacre qu’à cette tâche. Accorde-leur toute ton attention et tout ton amour jusqu’à les accepter de tout ton cœur. De toute ton âme. Et la tendresse pour ce (et ceux) qui t’entoure(nt) surgira alors naturellement sans même que tu t’en rendes compte...

 

 

Aimer ce qui arrive. Aimer ce qui surgit et advient. Il n’y a d’autre manière d’être au monde...

En vérité, nous n’avons le choix. Après s’être battus et débattus pour acquérir ou obtenir ce que nous avons cru nécessaire pour trouver la paix et la joie (ou être heureux) et voir (et comprendre) que toutes ces acquisitions, tous ces rêves réalisés ne les offrent pas... qu’ils ne transforment que le décor de notre existence ; après avoir traversé la colère, la tristesse et la désespérance... ; lorsque l’idée d’être quelqu’un nous a quittés... ; lorsque l’idée d’avancer et de progresser, de réussir et de parvenir à quelque fin et l’idée de se réaliser nous ont abandonnés, l’Amour s’ouvre à nous comme la seule – et ultime – voie possible. Et malgré quelques cicatrices – parfois encore sensibles ou un peu à vif – nous nous y engouffrons, le cœur apaisé...

 

 

Les formes ont besoin les unes des autres. L’entraide et la solidarité sont essentielles à leur survie. A leur égard, le regard éprouve une immense tendresse. Il aime leurs roulades et leurs jongleries. Leurs chants, leurs grimaces et leurs cris. Leurs farces, leurs caprices et leurs espiègleries. Leurs jeux (tantôt rudes et sauvages tantôt aimables et charmants) et leurs bizarreries. Il aime leur manège et tous leurs stratagèmes, leur danse incessante et leur triviale ou divine comédie – et peut-être même y est-il très attaché – mais il peut vivre sans elles. Sans aide ni appui. Lui seul, en ce monde, s’auto-suffit...

 

 

La nuit est tombée sur les collines. Au loin, les lumières des villages environnants comme une présence irréelle dans notre espace – notre réalité – naturel(le) et nocturne...

 

 

Il y a mille grâces en ce monde. Mais la plus haute est sans doute (pour paraphraser Kenkô) de vivre dans l’émouvante intimité des choses...

 

 

L’insouciance des enfants me fait penser à l’inconscience des adultes. Ils jouent, ils crient et s’amusent à faire semblant, imaginant la vie éternelle. Et reléguant la mort à une irréalité lointaine. Refusant d’admettre l’évanescence de nos vies.

Les existences – comme toute chose et toute forme – sont pourtant aussi brèves et inconsistantes que les nuages. A peine nés qu’ils se transforment. A peine le temps pour les uns de traverser un petit bout de ciel et pour les autres de parcourir un petit bout de terre qu’ilss’effacentdans le silence. Phénomènes mineurs ne laissant aucune trace de leur fugace séjour.

La vie est un étrange et funeste songe. Et la mort un mystérieux passage dont le regard seul triomphe. Inaliénable. Impérissable. Souverain et éternel. Unique perspective à nous offrir, à travers la perception et la sensibilité, le senti-ment d’exister...

 

 

Assis sur le chemin, un œil posé sur la page d’un livre, l’autre posé sur le ciel, j’ai vu un ange passer. Il avait les traits d’une petite chienne beige un peu enrobée. Elle s’est avancée vers moi, la bouille radieuse et la queue frétillante. Elle s’est installée à mes côtés, le flanc bien calé contre ma cuisse (mes chiens ne l’ont pas croisée : ils vaquaient à « leurs affaires », le nez dans les fourrés alentour). D’un regard, elle a quémandé quelques caresses que je lui ai offertes avec joie. On est resté ainsi quelques instants en silence. Tout entiers à notre rencontre... Puis, rassasiée, elle m’a quitté, le cœur ravi, pour rejoindre ses « humains* » postés à quelques encablures. Je l’ai regardée s’éloigner, ravi, moi aussi, de cette visite. Heureux d’avoir croisé un ange aujourd’hui.

* Les Hommes ont coutume d’appeler la (ou les) personne(s) en compagnie d’un chien : le (ou les) « maître(s) »... (auto-proclamation humaine aux relents – souvent inconscients – de domination et d’esclavagisme... confirmés – la plupart du temps – par les usages et les comportements à l’égard de la gente canine...). Moi, j’ai l’habitude de désigner celui (ou ceux) qui accompagne(nt) un chien par le terme : « son » (ou « ses ») humain(s)... Simple question de point de vue (le mien se défend d’être trop anthropocentrique...).

 

 

On ne décide de rien. Jamais. Evidemment. On laisse simplement advenir et s’actualiser ce qu’il y a en soi. Que l’on en ait conscience ou non. Que l’on y consente ou non...

Ce que les Hommes appellent leur existence n’est rien d’autre que cette actualisation continue. Et de cette mystérieuse mise à jour, ils ignorent tout (l’origine, les entremêlements et les imbrications). Et sur elle, ils n’ont aucun contrôle. La plupart tente de la nier, de l’occulter ou de la dominer. Et (au mieux) de la faire coïncider avec leurs idéaux. De la ramener sur les rails de leurs représentations...

Mais de ces gesticulations et de ce fatras illusoire, l’actualisation de ce qui est en soi n’en a cure... Peine perdue donc que d’y résister ou de s’y opposer. La longue glissade du destin n’en sera que plus accidentée et chaotique... Aussi est-il plus sage de laisser courir le destin selon ses lois propres. Et non selon les règles qui régissent notre esprit ignorant.

 

 

Je n’ai aucune foi, aucune confiance ni aucune sympathie pour les méthodes, les préceptes et les principes. Néanmoins deux ou trois petites règles me semblent essentielles à la vie d’un Homme : 

– qu’il laisse sa nature, ses goûts et ses caractéristiques personnelles décider de l’environnement et du mode de vie les plus propices à son épanouissement (si l’occasion lui est offerte...) ;

– qu’il laisse ses aspirations profondes décider des directions et des orientations existentielles (en dépit des incertitudes et des craintes qu’elles peuvent susciter...) ;

– qu’il trouve enfin en lui l’espace qui lui permette d’accueillir tout ce qui advient et se présente.

Et je n’ai (à l’égard des Hommes) qu’un seul souhait : qu’ils soient suffisamment sages et avisés pour se laisser guider par ces quelques règles et laisser leur existence entre leurs mains...

 

 

Premières gelées. Premières morsures de l’hiver. Comment les animaux des bois, des plaines et des jardins parviennent-ils à résister au froid ? En dépit de quelques transformations physiologiques, leur corps doit endurer les variations climatiques sans la moindre protection. Supporter la chaleur estivale et la froideur hivernale.

Sans le recours (intelligent) mais artificiel à l’habitat, aux vêtements et aux accessoires, l’Homme serait bien en peine de supporter – même en nos contrées tempérées – les saisons (et les amplitudes thermiques). Il serait, en vérité, incapable de survivre à cette épreuve...

Cet élément s’ajoute à la liste des arguments qui laissent à penser que l’Homme est un animal singulier dont les particularités lui enjoignent de sortir de (et de transcender) son animalité originelle et (par extrapolation) de faire advenir graduellement au sein de la vie terrestre (et phénoménale) le règne de la Conscience.

 

 

Rouges gorges et mésanges se succèdent sur la mangeoire installée devant la maison. J’y ai déposé une motte de beurre, des graines et un peu d’eau. Les uns s’y posent avec crainte et timidité. Les autres avec témérité et effronterie.

Ces visites hivernales me réjouissent au plus haut point. Et chaque matin, je reste de longs instants à contempler leur silhouette alerte et gracile. Leurs incessantes allées et venues. Au plus froid de l’hiver, l’étrange balai qu’ils offrent à mes yeux ravis réchauffe les corps. Et le cœur...

 

 

Chaque jour, nous marchons dans les collines, escaladant et dévalant les pentes escarpées comme d’autres empruntent les grands boulevards et les couloirs de métro ou se frayent un chemin parmi les vitrines et les badauds. Nous croisons et saluons les oiseaux, les insectes, les lapins, les lièvres et les sangliers comme d’autres arpentent leur quartier en faisant un signe de la main à leurs voisins. Nous sommes à notre aise sur ce territoire. Familiers de ses habitants. A notre place dans ces paysages sauvages et isolés. Dans ce qui semble constituer aujourd’hui notre fief naturelnotre jardin quotidien et nécessaire, visité et arpenté (le plus souvent) dans la joie et l’émerveillement.

 

 

Pour les Hommes, le héros est celui qui lutte – contre le monde ou contre lui-même – qui pourfend et qui vainc pour parvenir à ses fins. Pour voir se réaliser ses rêves et ses désirs (narcissiques). L’idéologie sous-jacente de cette vision du héros humain est le dénuement de l’individu (perçu comme entité dérisoire face à la puissance des éléments) qui doit se battre et s’engager dans l’affrontement et le combat pour survivre face à l’adversité et l’hostilité du monde... Quel paradigme indigent et restreint ! Quelle vision partielle et fallacieuse qui se nourrit de trompeuses apparences ! Comme les Hommes se fourvoient...

Beaucoup (sinon presque tous) ignorent que la véritable figure héroïque est celle de l’Homme dont les désirs et la volonté n’ont plus cours – trop faibles ou suffisamment éteints – pour gouverner son existence. Le véritable héros est celui qui épouse, embrasse et accueille. Qui est si transparent qu’il devient invisible et inexistant. En accord total avec ce qui est. Aussi impersonnel et puissant que le monde et les paysages. Celui-là est le véritable héros* ! Pourtant, il passe aux yeux du monde pour un raté, pour un fou ou un demeuré. Les Hommes le considèrent comme un être insignifiant. Un être indigne d’attention... On le dénigre, on le prend en pitié ou on ne le remarque pas... Comment la foule pourrait-elle accorder ses louanges et sa considération à un Homme sans aspérité ? A un Homme sans personnalité ? Celui-là pourtant est le véritable héros ! La figure exemplaire dont devraient s’inspirer les foules ! Mais non ! L’immaturité incite les Hommes (comme toujours) à prendre des vessies pour des lanternes. A encenser des héros de bazar et de pacotille, tout juste capables de faire rêver les enfants ! Mais ne blâmons pas trop les Hommes ! L’humanité n’est-elle pas encore dans sa prime jeunesse ? Laissons-la sortir de l’enfance ! Avec les années (et avec les siècles), les Hommes gagneront (sans doute) en maturité et en sagesse. Pour l’heure, laissons-les jouer aux cow-boys et aux indiens, aux gendarmes et aux voleurs ! Laissons-les honorer des héros sans gloire ni épaisseur ! Et vénérer des figures de papier costumées ! A l’insouciance et à l’inconscience du jeune âge succédera (sans doute) le temps de la compréhension et de la connaissance ! Et gageons qu’à l’âge adulte, l’ère de la Conscience voit le jour ! Mais il va sans dire, au vu de l’incompréhension et de l’ignorance actuelles, qu’une longue marche évolutive – un long chemin d’apprentissage – attend les Hommes...

* Comme pouvait l’être, par exemple, la figure de l’Homme réalisé ou accompli dans l’Inde traditionnelle (ou – dans une moindre mesure – dans la Chine et le Japon traditionnels). Qu’il fut mendiant anonyme, moine errant ou gourou authentique et renommé, devant lui tous les Hommes sans distinction – l’homme de la rue comme le « riche », le « guerrier », le « puissant » ou le roi – s’inclinaient ou se prosternaient en signe de vénération, reconnaissant l’accomplissement de soi (impersonnel) comme la plus haute réalisation humaine...

 

 

Aux matins blêmes et venteux, le cœur rougeoyant. Solide comme un roc. Insubmersible.

 

 

Contraint de me rendre à S., petite ville située à une quinzaine de kilomètres de notre lieu de résidence, je suis frappé par l’effervescence urbaine (à laquelle je suis peu coutumier...). Des milliers – des millions – de mouvements simultanés s’entrecroisent, se frôlent et s’évitent sur un espace aussi restreint (sur une aire composée de trottoirs et de rues encadrés par les vitrines des magasins et les immeubles d’habitation). Le plus marquant dans cette atmosphère urbaine – dans cette étrange chorégraphie à laquelle participent automobilistes et piétons – est que nul ne souhaite être détourné de son itinéraire, de sa trajectoire ou de son allure. Et chacun n’est attentif à l’Autre qu’à seule fin d’éviter la collision.

En ville, la concentration humaine et la densité démographique sont si fortes que l’Autre n’est qu’un élément mobile du décor. Il est quasiment toujours perçu comme une gêne, un frein ou un obstacle. Et presque jamais (hormis dans quelques lieux comme les bars et les cafés dédiés au « partage » et aux tête-à tête – plus ou moins superficiels il est vrai...) comme un être à part entière ou une source potentielle de découverte et de rencontre. Tristes agglomérations...

Et je songe aux espaces désertiques et aux lieux isolés où l’Autre (voisin ou voyageur) est presque toujours considéré comme un ami et accueilli comme un invité – un hôte précieux – que l’on reçoit avec respect et bienveillance. Quel que soit le domaine, quantité et qualité ne font décidément pas bon ménage...

 

 

Au loin, dans le soir tombant, la lune – jaune, presque orangée, toute ronde – posée sur une colline. Comme une perle dans son écrin naturel. Je l’ai observée longtemps. A la fin de notre entrevue, j’ai deviné un sourire (un immense et tendre sourire) et un clin d’œil malicieux. Comme pour me dire : « oui, ainsi est la vie... ».

 

 

Dans la solitude glacée et venteuse des paysages, le pas lent. Et le cœur sensible et inébranlable. Ainsi chemine l’âme sereine. Dans la rudesse, l’inconfort ou la turbulence des jours comme dans la grâce, l’extase ou la plénitude. L’esprit tranquille. Et la joie au cœur.

 

 

La besace en bandoulière et le carnet dans la poche, j’arpente les collines. Je regarde le ciel, les paysages désertiques et le petit homme courbé dans le froid et le vent qui marche à pas lent. Et une pensée soudain me traverse : et si ce modeste passant – ce pauvre scribe – (qui n’obéit qu’aux injonctions du vent, du ciel et des nuages) appartenait à la noble lignée des « ramasseurs de grand bâton de la montagne froide » ? En serait-il un cousin éloigné ? Et je souris de ce petit clin d’œil – et de ce sincère hommage – au célèbre trio du Tiantai(1) : Hanshan, Fengkan et Shih-Te(2). Humbles ermites, poètes et philosophes du 7ème et 8ème siècles.

A me voir déambuler dans la solitude du monde en griffonnant quelques notes à l’abri des talus, il serait loisible de m’attribuer une certaine parenté. Oui, peut-être suis-je (après tout) l’un de leurs modestes et lointains parents ? A titre personnel, j’accepterais (évidemment) ce titre avec joie, gratitude et profonde humilité... Mais gardons-nous de nous décerner avec un fallacieux triomphalisme de trop hypothétiques médailles ! N’apposons pas sur notre vie, notre parcours, nos activités ou nos œuvres de quelconques étiquettes (aussi élogieuses soient-elles...) ! Poursuivons simplement notre chemin – et notre tâche – en silence et avec modestie. Laissons notre existence et notre travail libres de s’affirmer par eux-mêmes, de revêtir la forme qui leur sied et d’explorer les champs du possible en toute liberté (sans les enfermer, les contenir ou les limiter à une forme ou à un genre particulier). Oui, soyons assez sages pour laisser au ciel le soin de décider des titres et des succès, des accointances et des filiations...

(1) Le mont Tiantai – montagne de la terrasse céleste – situé dans la province du Zhejiang, au sud de Shanghai.

(2) Hanshan littéralement « montagne froide », Fengkan « grand bâton » et Shih-Te « ramasseur ».

 

 

T’es-tu suffisamment fréquenté en profondeur pour savoir non seulement qui tu es mais Ce que tu es... ?

 

 

Auprès des arbres et des nuages, je me tiens. Amis fidèles des jours et des saisons.

 

 

Les Hommes marchent à côté de la vieA côté de leur vie. Pour ma part, je m’efforce (malgré moi) de me tenir dans ses bottes. A chaque pas. Secoué parfois par ses longues enjambées. Et prenant soin de ne pas chavirer à chaque soubresaut. A chaque virage...

 

 

En lisant quelques lignes de B. (l’un de ses livres m’accompagne en promenade ces derniers temps) me vient l’envie d’écrire ces quelques mots. Lorsque la grâce vous touche, elle fait exploser des milliers de bombes dans votre nuit. Et vous ne comprenez pas ce qui arrive. Cette terrifiante déflagration vous laisse à terre. Sans voix. D’un geste machinal – d’un geste de survie – vous essuyez simplement sur votre peau – et dans votre cœur – tous les débris. Tous ces éclats mutilants. Vous pensez simplement que vous ne pourrez plus jamais vous tenir debout. Que vous ne pourrez plus jamais marcher. Puis, lentement vous vous redressez et vous constatez que ces bombes ont fait exploser les ténèbres. Qu’elles ont fait exploser les barreaux qui vous tenaient prisonnier des ténèbres. Oui, c’est souvent des abysses que nous naissons à la lumière. Souvent à partir du plus noir des jours – du plus noir de la vie – que s’offrent les éclaircies. Puis, d’éclaircies en éclaircies, la pénombre s’éclaire. La lumière se fait plus vive. Après l’explosion, la vie continue. Elle est à la fois exactement la même. Et totalement différente. Mais la lumière demeure présente. Toujours. Même dans les jours gris. Même dans les heures sombres. Elle est toute entière à son travail. A son œuvre. Elle irradie, débusque l’obscurité restante. L’éclaire et la fait disparaître. Ensuite vient le rayonnement. L’obscur peut encore advenir mais la lumière l’éclaire d’un autre éclat. Plus supportable. Presque joyeux malgré parfois la tristesse, la souffrance ou les malheurs. A présent vous pouvez vous tenir debout dans le silence comme dans la tourmente. Eminemment vivant et sensible à la douleur des êtres. A la douleur du monde.

 

 

Au détour d’un bosquet, nous sommes tombés nez à nez avec un troupeau de brebis qui pâturaient sur une petite parcelle. De jeunes brebis – nées cette année – à en juger par leur silhouette et leur tête lainée si caractéristiques... Je me suis assis en silence. Et elles se sont avancées, intriguées, pour se poster devant nous. Et pendant près d’un quart d’heure, je leur ai parlé (avec douceur pour ne pas les effrayer) de la vie qui les attendait, des marmots qu’on allait les contraindre à mettre au monde chaque année (et qui leur seraient retirés), de leur mort inéluctable à l’abattoir. Et j’ai achevé ma petite allocution improvisée en leur conseillant de vivre chaque instant aussi pleinement qu’elles le pouvaient. Les quatre cent têtes me regardaient attentives et silencieuses. Comme si elles buvaient ces paroles sages et prévenantes. Affectueuses et fraternelles (peu habituées sans doute à ce qu’on leur parle ainsi...). Je crois que je n’ai jamais eu d’auditoire plus attentif et approbateur. J’ai bien noté quelques mouvements de patte à l’égard des chiens (les brebis ont coutume de taper l’un de leurs sabots antérieurs sur le sol en présence d’un prédateur potentiel) mais pas le moindre signe de contestation... Mon discours achevé, je suis resté quelques instants à les regarder en silence. Puis je les ai saluées avec déférence et tendresse pour poursuivre notre chemin sur les berges de la rivière. La nuit tombait. Nous n’allions plus tarder à rentrer au bercail.

 

 

Le cœur libre et sans attache. L’esprit vide. L’Homme peut enfin devenir regard sensible et vivant. Porteur d’une infinie tendresse pour le monde. D’un amour inégalé pour tout ce qu’il rencontre. Et ses pas, ses gestes et ses paroles peuvent alors s’en faire – presque totalement – l’exact reflet.

 

 

Nous avons croisé un renard ce soir. En rentrant à la maison. Il loge (sans doute) à quelques pas d’ici. J’ai coutume de lui offrir les restes de la gamelle des chiens et les carcasses de poulet (qui compose l’essentiel de leur menu) derrière la haie de grands chênes voisins. Nous l’entendons souvent rôder la nuit près de la maison à la recherche de la nourriture que je dépose à son intention. Malgré son agilité et sa discrétion, on l’entend se glisser dans les fourrés en faisant crisser les feuilles mortes. Je l’ai aperçu subrepticement à deux reprises à travers les hautes herbes... Ombre furtive dans l’obscurité. Mais aujourd’hui, nos regards se sont croisés. Et malgré la présence de mes fieffés détrousseurs de « gibier » (gibier à leurs yeux), il n’a pas manifesté le moindre signe d’inquiétude. Le poil brillant (roux et argenté), le regard fier et malin (je l’ai lu dans ses yeux vifs), la posture altière. Magnifique ! Nous nous sommes regardés plusieurs secondes. A la fois surpris et intrigués par cette rencontre inattendue. Puis il a traversé le chemin avec souplesse et élégance, s’est arrêté une nouvelle fois, a jeté un dernier coup d’œil dans notre direction et il a disparu dans la nuit.

 

 

La vérité – l’esprit vide et le cœur pur qui en sont les reflets – démasquent le mensonge, l’ignorance et la fatuité. Avec eux, ils sont intraitables. Ils les débusquent, les traquent et les contraignent à regarder l’hypocrisie. La duperie. Jusqu’à les anéantir. Jusqu’à les faire disparaître*. Une fois débarrassé de ces imposteurs, lorsqu’ils ont déblayé toutes les illusions, lorsqu’il ne reste aucune certitude – sur ce riche et fertile terreau de la non connaissance et de l’humilité – peut naître, s’épanouir et rayonner la vérité.

* S’approcher de la vérité en négligeant ou en omettant ce travail reviendrait à prendre appui sur un château de sable...

 

 

Le chant du vent dans le silence. Le ciel nu sur l’horizon. A-t-on jamais entendu plus belle mélodie ? A-t-on jamais connu plus parfaite harmonie ?

Ah ! La divine architecture du monde ! Sublime nature vierge de toute intervention humaine...

 

3 décembre 2017

Carnet n°58 Le nuage, l'arbre, le brin d'herbe et le silence

Journal / 2015 / L'exploration de l'être

Des graines à foison. Plantées sous mes pas. Des fleurs sauvages parmi les cailloux des chemins. Le ciel récoltera ce qui lui revient. Les Hommes auront leur part. Tout leur sera offert. Il s’agira simplement de garder les yeux ouverts. Quant à moi, je partirai, nu. Les poches vides. Le cœur gonflé de joie et de tristesse. Demain ne sera pas un funeste adieu. Un départ célébré. Un bout de chair que l’on jette aux loups. Une maigre pitance pour rassasier leur faim infatigable. Et je me tiendrai parmi eux. Et en surplomb observant le modeste spectacle de cette fin. De cette fête. Triste et joyeux du sort offert aux vivants.

 

 

Il marchait seul, dans l'immensité des plaines, au creux des vallées et au sommet des collines. Témoin (et terrain) de mille anecdotes et de l'essence des choses.

 

 

Je regarde le monde. Et vous gémissez. Tu regardes le monde. Et nous luttons. Vous regardez le monde. Et ils haïssent. Il regarde le monde. Et tu soupires. Nous regardons le monde. Et je m'interroge. Ils regardent le monde. Et il comprend. On regarde le monde. Et nous l’aimons. Nous regardons le monde. On regarde le monde. On regarde. Et le monde disparaît...

 

 

Une étincelle à la porte de l'Infini. Et l'amour s'embrase. Le monde s'éclaire.

 

 

Créature(s) autrefois indésirable(s) aujourd'hui tant aimée(s)...

 

 

Une lumière brille au fond de l'abîme. Toujours. Sinon comment pourriez-vous le (sa)voir ?

 

 

Quel sort pour les damnés de la Terre ? Ne vous inquiétez pas... Eux aussi connaîtront la lumière. Eux aussi sauront qu'ils ont toujours été lumière.

 

 

Le secours machiavélique des yeux égarés et apeurés...

 

 

L'étreinte des beaux jours. Et la caresse de l'hiver. Sensibilité vivante...

 

 

L'âme s'émerveille de toute offrande. Et s'offre dès lors sans compter...

 

 

Où se cache le miracle ? Tu es... Cela ne suffit-il pas ?

 

 

La bourgade des jours tranquilles assiégée de toutes parts. Par les heures creuses et les saisons, les soucis et le temps qui passe...

 

 

Un soupir. Un éclat de voix. Un éclat de verre. Un éclat de rire. Et le silence. Le jour s'apaise.

 

 

Un espace sans drame. De simples métamorphoses. Les chiffons vides gesticulent, crient, se débattent, s'enchaînent, se défont...

Il n'y a aucun crédit à accorder à l'étoffe. La seule foi est à inscrire dans le regard (le regard des spectacles et des accoutrements) et en ce qui porte les vêtements.

 

 

Nous vivons en des lieux impropres – disent-ils – aux plaisirs, aux distractions, aux jeux et au badinage. Propices à la solitude. Et à la rencontre avec cette part de nous-mêmes (à cette part d’entièreté de nous-mêmes) que si peu connaissent... et qui offre pourtant à toutes les rencontres leur beauté. Et leur dignité.

Ces terres peuvent paraître hostiles. Austères. Mais elles seules sont à même – nous semble-t-il – d'offrir la Joie, l'Amour et la Paix nécessaires à toute rencontre.

Rencontres de vent. Rencontres de sable. Rencontres d’œil torve, de rictus ou de bouches affamées. Rencontres de pacotille, de paillettes ou de merveilles. Rencontres souveraines, saugrenues ou de souffrance. Rencontres légères. Rencontres pleines. Toujours.

A moins que la rencontre avec soi n'ait eu lieu, toute rencontre est (toujours) le lieu du gémissement, de la mendicité ou de la morsure. Effleurements utilitaires sans écho, sans profondeur ni résonance... sans cœur ni sourire (excepté peut-être celui de la peur, de la gêne, du jeu machiavélique, de la posture ou de la fausse réjouissance).

 

 

Je regarde mes souliers (de vieilles sandales) usés par les chemins. Ai-je donc tant appris des horizons et de la solitude des paysages ?

Et cette question résonne dans mon cœur fragile, posé parmi les collines, à la merci de la pluie qui foudroie et des vents qui balayent nos scories et nous font perdre (ou tourner) la tête...

 

 

De quel bois sommes-nous faits pour nous laisser aller à la cognée des heures ? L'instant jamais ne peut s'échapper de cette douce, éternelle et souveraine Présence.

 

 

Notre travail ? Qui sait ? Peut-être est-ce de dormir du sommeil des morts (ou des justes) et de laisser se dissiper celui des presque vivants ? Peut-être est-ce de rire du vent des abîmes en se laissant malmener ou emporter vers l'horizon qui nous décharge et nous défait...? Peut-être est-ce de ne rien être ? Peut-être est-ce de regarder les spectacles du monde en gémissant (de temps en temps) et en s’attristant (parfois) de ne jamais y être conviés ? Peut-être est-ce de pleurer des larmes de peine... et des larmes de rire... au gré des jours et des circonstances ? Peut-être est-ce de s'agenouiller vaincus par les événements et oubliés par l'histoire... et sourire (sourire toujours) du sort que l'on nous réserve ? Peut-être est-ce cela... ou peut-être est-ce autre chose ? Être suffisamment défaits sans doute et suffisamment inexistants pour accueillir ce qui est donné, ce qui est offert et ce qui est repris... et qui s'en va... suffisamment poreux et transparents pour que le regard (toujours) s'en émeuve dans la Joie...

 

 

En ces terres immobiles, l'immobilité...

Et le vent sans conséquence sur l'humus

 

En ces terres immobiles, le pays et les territoires des renégats

Et leurs guerres épouvantables sans conséquence sur l'humus

 

En ces terres immobiles, la course du soleil sur le monde déclinant

 

Et là-haut, toujours les étoiles

Et là-bas, toujours le tonnerre et les coups de semonce

Et ici, toujours le silence des terres immobiles, joyeux (toujours) des funestes destins

 

L'humus retournera à l'humus. Le silence au silence.

Et des terres immobiles toujours renaîtra l'éphémère

 

 

Un pas après l'autre

Et le soleil se lève, puis décline

Et les jours passent

 

Un pas après l'autre

Et l'horizon se rapproche, puis s'éloigne

Et le chemin s'étire

 

Un pas après l'autre

Et les semelles s'usent, le corps s'épuise

Et les semelles et le corps vieillissent

 

Un pas après l'autre

Et les yeux se ferment, la traversée s'achève

Et la mort emporte

 

Où avais-tu donc mis ton regard ?

 

 

Ne porte les yeux sur l'horizon ni sur les pas

Laisse le regard s'ouvrir, l'horizon et les pas s'élargir

Devenir si minuscules

Jusqu'à disparaître

Jusqu'à devenir regard

 

 

La neige tombe sur les linceuls

Le temps recouvre nos oripeaux de sa longue robe noire

Mais le printemps revenu, la glace a fondu

Les drames s'effacent et renaissent les âmes

dépouillées de leurs liens, nettoyées de leurs souillures

Aussi fraîches et innocentes que la neige d'hiver

 

 

Dans le cercle invisible, les ailes mystérieuses nous portent. Où que nous allions, nous soutiennent. Alliées de nos jours fastes comme de nos instants funestes, croisant leurs pairs et s’entremêlant en joutes féroces et en rondes joyeuses. Infatigables.

 

 

Le monde (chaque être) cherche à être aimé (regardé et écouté). Et s’identifiant à la forme, ne comprend (ne comprend pas encore) qu’il est ce qu’il cherche : ce regard et cette écoute aimante...

 

 

L’Amour ne peut se trouver, se côtoyer et se fréquenter que dans ce lieu perceptif. Jamais dans le monde qui n’est qu’un univers d’objets et de chiffons vides.

 

 

Monde de chiffons vides où l’espace perceptif – regard et écoute – identifié (le plus souvent) aux formes, aux objets et aux oripeaux n’a pas encore su trouver sa pleine mesure ou s’amuse (aux dépens des chiffons vides) à se prendre pour eux... posture (imposture) à l’origine de tant de maladresses et de malentendus... source première de l’Histoire (du monde) et de toutes les histoires qui le façonnent...

 

 

Qu’est-ce que le silence ? Et peut-on jamais l’exprimer ? La parole (comme toutes choses) émane de lui... et pointe vers cette écoute silencieuse que toutes les créatures et tous les êtres, doués de perception, peuvent ressentir et habiter. Et qu’ils sont profondément.

 

 

Un regard (un seul regard). Et tout se consume d’Amour. Tout se transmute en Joie. Et tous les objets sont aussitôt sanctifiés...

Bien des Hommes (sinon tous) donneraient tout l’or du monde pour ce regard. Et ils auraient raison... Qu’ils se dépouillent donc... mais subsisterait pourtant l’avidité (et le désir de le posséder), obstacle rédhibitoire pour le ressentir (et le vivre)... Le regard ne s’offre qu’à ceux qui se sont dépouillés de toute velléité d’accaparement.

 

 

La poésie n’a besoin de mots. Le regard poétique est un silence profond. A la fois plein et vide. Si plein qu’il s’auto-suffit. Et si vide qu’il peut tout accueillir.

 

 

Crier ? Se débattre ? Gesticuler ? Défendre ? Combattre ? Proclamer ? Revendiquer ? Faire l’apologie ? Non ! A quoi bon... Simplement être... et faire et agir guidés par les forces naturelles et spontanées qui nous enjoignent de participer au monde...

To be, to act and share. Être, faire et partager. Être le témoin impassible (le regard) et l’acteur conscient du monde. Non selon ses idées et ses convictions mais animés par la vérité et son rayonnement. Naturel, authentique et consistant (avec légèreté). Sans attente ni prosélytisme... Quant au reste, pas d’inquiétude. Le monde s’en charge...

 

 

L’heure peut se donner au jour. A condition qu’elle laisse intact le monde.

L’heure que tu offres au monde, garde t-en une part (n’oublie jamais de t’en garder une part) sinon le monde gouvernera tes jours. Ta vie se consumera sans relâche. Et de tes œuvres ne restera bientôt (et finalement) que des cendres et de la poussière...

 

 

Le monde est une abstraction. Il n’y a pas de monde. Il n’y a jamais eu de monde. Et il n’y aura jamais de monde. Il y a, il y avait et il y aura toujours ce qui est là devant soi à cet instant-même. Le reste n’est que rêverie.

Aspires-tu à faire de ta vie et de tes actes les outils d’une fantasmagorie ? Ou aspires-tu à être réellement présent ? Et à faire de tes actes (de chacun de tes actes) un instrument réel agissant sur le Réel ?

 

 

A marche perdue vers le siècle ? Non ! De petits pas sans conséquence. Et le ciel ? N’y songe pas. Il est déjà habité...

 

 

S’estompe le jour à qui s’abandonne. Demeure l’instant.

 

 

Que faire de la fureur du monde ? Accueillir. Embrasser du regard silencieux. Et offrir ce qui advient.

 

 

Que dit le silence ? De regarder. D’écouter. Et de laisser les bruits naître et mourir en lui...

 

 

Le grand jaillissement des eaux funestes sur le monde. Et les sourires de circonstance. Âmes engoncées de trop de paroles et de mensonges. De circonvolutions. Et parmi ces regards tièdes et malhonnêtes, une paire d’yeux francs et loyaux comme un éclat, comme une brève éclaircie dans la grisaille sirupeuse des jours.

 

 

C’est dans la nudité et le dépouillement que se révèle toute la dimension de l’Être. Et la grandeur de l’Homme. A la fois objet dérisoire, instrument perfectible et ordonnateur souverain...

 

 

Devant nos gestes défaits ? Sourire et laisser faire...

Devant la misère du monde ? Sourire et agir à sa mesure...

Devant l’indigence des êtres ? Sourire et éclairer (autant que l’on en est capable)...

Quant au reste, cela ne nous concerne pas...

 

 

Face à l’ineffable patrie des mots, le silence est souverain.

 

 

Qu’offrir à mon cœur qui ne sait qu’il souffre ?

Qu’offrir au monde qui ne voit son aveuglement ?

Les aveugles conduisent les Hommes. Et mon cœur souffre en silence.

 

 

Nos adieux au monde. Déchirants et interminables.

 

 

Le nuage, l’arbre et le brin d’herbe accompagnent mes promenades quotidiennes. Fils de la terre et amis du ciel, nous nous retrouvons chaque jour dans le regard...

Compagnons libres et fidèles. Libres de toute fidélité. Et fidèles à la liberté.

 

 

Parce qu’il ne nous est pas offert de connaître... parce qu’il ne nous est pas offert de donner... nous prions. En vain. Voués à la mendicité misérable des ignorants.

 

 

L’harmonie du jour : du silence et de la poussière.

 

 

Le regard vide balaye le monde de sa lumière. Et déniche tant de recoins de crasse et d’obscurité où s’agglutinent les Hommes.

 

 

Le reflet mensonger de la brume dans les yeux hagards.

 

 

Comment percer le mystère du regard ? Habiter l’espace derrière la frontière des yeux...

 

 

Se désensommeiller ? « Pourquoi donc ? » rétorquent les dormeurs, ivres de rêves et de songes. Somnambuliques.

 

 

Quand l’aube s’éteint, le jour se lève.

Quand tombe le soir, la lune s’élève.

Et les yeux au firmament conserve l’azur intact.

Clairs et rieurs, jouant dans l’éphémère.

Joyeux malgré les saisons

 

Public ravi des naissances et des disparitions

Indemne de toute rupture...

Et le front bas toujours qui s’incline...

 

 

Et de la disparition des yeux, qui s’en inquiète ?

Et des battements du cœur, qui s’en émeut ?

Et du cri silencieux des bêtes, qui s’en soucie ?

Et les brins d’herbe poussant sous l’asphalte ou bousculés par les vents, qui les regarde ?

Et des jours opaques derrière la glace, qui s’en occupe ?

 

N’y a-t-il personne en ce monde ?

A moins que tous les fantômes n’aient conquis la place...

 

 

Pas même une larme versée. Pas même un geste tendre. Pas même un regard accordé. Où jettes-tu donc tes pas ? A quelle foulée accordes-tu tes faveurs pour courir ainsi les yeux bandés ?

 

 

Ne t’inquiète pas des paysages, les saisons changent les décors. Soucie-toi de l’œil qui perce les formes et les couleurs. Et les réunifie. L’œil qui se réjouit des transparences...

 

 

Celui qui ne sourit pas s’invite à ma table. Et derrière le corps usé, je devine l’ardeur qui l’anime. Et derrière le regard triste, la joie qui se cherche. Et l’œil maladroit qui ne sait où se poser...

 

 

Le chant du labeur. Ses louanges. Et les récoltes de misère. A l’usine et aux champs triment les Hommes. Versent le sang et la sueur. Les entrailles des vivants offertes aux dents carnassières. Et le monde se réjouit de tant d’aisance. De l’errance des indigents. De la prestance des dirigeants. De l’étouffement des imposants, vagues voix dans la nuit criant dans le silence. Et toujours l’infamie en banderole. La barbarie et la camisole. Et le monde, chaque jour, dépérit. Et le peuple agonisant se réjouit. Réclame sa dose de pain et de sang. Et dans un râle de survie, offre son ardeur aux jeux sanglants.

 

 

Sur la colline sans gloire, je m’agenouille. Et aux chemins de vent, offre ma vie. Et au ciel, le peu qui reste...

 

 

Des graines à foison. Plantées sous mes pas. Des fleurs sauvages parmi les cailloux des chemins. Le ciel récoltera ce qui lui revient. Les Hommes auront leur part. Tout leur sera offert. Il s’agira simplement de garder les yeux ouverts. Quant à moi, je partirai, nu. Les poches vides. Le cœur gonflé de joie et de tristesse. Demain ne sera pas un funeste adieu. Un départ célébré. Un bout de chair que l’on jette aux loups. Une maigre pitance pour rassasier leur faim infatigable. Et je me tiendrai parmi eux. Et en surplomb observant le modeste spectacle de cette fin. De cette fête. Triste et joyeux du sort offert aux vivants.

 

 

Les heures se balancent sur leur corde raide. Leur fil fragile. Et les saisons offrent leurs menus gargantuesques qui rassasient les Hommes. Et que j’effleure du bord des lèvres. Affamé d’une autre faim. Avide d’une autre lumière que le soleil d’hiver qui réchauffe les âmes frigorifiées.

 

 

Si la grâce des Hommes ne t’est offerte. Ne la quémande pas. Elle aurait le goût âcre de l’obole. Regarde plutôt le ciel qui ne s’émeut que des humbles et des infortunés. Et qui méprise la puissance et la gloire que les Homme vénèrent.

Ne te méprends pas sur l’infortune. Elle n’est offerte qu’aux cœurs mûrs...

 

 

A quel soleil voues-tu tes jours ? Aux feux de la rampe ? Ou à la lumière du cœur ?

 

 

Connais-tu réellement celui que tu habites ? Que lui offres-tu pour qu’il apprenne à se réconcilier ?

 

 

[Dialogue entre eux et moi]

Les poches vides et le cœur libre. Mais où allons-nous de ce pas dépouillé ? En ce lieu qui ne s’atteint pas ne pourrions-nous pas demeurer ? Et à cette forme y as-tu pensé ? Laisse-la donc libre de suivre sa destinée. Et ne crains pas les vents qui la porteront. Et toutes ces contrées désertes et désolées où elle a erré, devra-t-elle encore les traverser ? Qui sait ? Ne t’effraie pas de ces lointains reflets. Va en paix et le regard confiant.

 

 

Au plus proche du sol et de la lumière, le regard s’étire. Le cœur découvre enfin ce que les yeux ne pouvaient voir...

 

 

Que ton cœur a-t-il choisi ? Le confort ou la vérité ? Le confort ferme les yeux et endort. La vérité les dessille et foudroie. Si tu aspires au repos et à la tranquillité, demande à ton cœur de se détourner de la vérité...

 

 

Demeure les mains vides, le regard neuf et le cœur ouvert. Et laisse les pas et les vents choisir le chemin. Les lieux et les paysages n’auront alors plus guère d’importance.

Est-ce que l’eau s’inquiète de sa forme, de son itinéraire, des contrées visitées et des lieux où elle repose ? Où qu’elle soit, elle demeure elle-même, paisible, virulente ou tourmentée selon les contextes, les passages et les traversées.

 

 

La seule réelle attention et la seule réelle audience sont celles que tu t’accordes. Le seul réel amour et le seul réel succès sont ceux que tu t’accordes. Celles et ceux que le regard t’offre en se penchant vers toi avec tendresse et bienveillance...

 

 

Dans la fine bouche de l’orgueil, les mots acérés. Et dans le cœur en paix, le silence.

 

 

L’ombre secrète de la mort qui nous accueille à bras ouverts. Ouvrant les délices amers du crépuscule.

 

 

Sans cesse la nuit dissipe ce que le jour a construit...

Sans cesse la mort défait ce que la vie a édifié (ce que nous avons édifié).

Partout le vent, les murs de pierres et la poussière...

 

Et au loin, la lune qui brille

Et les mains apeurées qui la désignent

Et les larmes qui coulent sur notre visage

 

 

Il n’y a plus bel écrin que le silence...

Joutes, louanges et blâmes s’y côtoient

Rondes de mots et de lances

Jeux d’ombres dans la lumière

 

 

Au creux de notre main, défaites et victoires que l’on accroche aux fenêtres du jour. Et que la nuit, d’un trait, efface...

 

 

Le jour s’étend à l’infini. La nuit dissipe le jour. Demeure l’infini.

 

 

N’y a-t-il donc que le vent pour balayer nos chimères ?

 

 

Qui est-on face à soi ?

Le visage grandit sous le jour. Les yeux bordent l’univers. Le monde invité au festin. Le ciel bas sous les paupières.

Un jour, la fête s’achève. Les mains et les yeux se raréfient. S’éloignent. Place déserte. Anéantissement. Cessation des miroirs et des reflets.

Nul œil à la ronde. Nulle main secourable. Monde de fantômes furtifs. Eloignement des sphères. Solitude tranchante. Défaite annonciatrice du face-à-face. Et de la rencontre.

Eparpillement. Renonciation. Lente déliquescence. Ascension de l’en-bas. Sommet des profondeurs. Anéantissement. Brume et percées. Ebranlements saugrenus. Découverte du noyau et de l’espace.

Confusion des sens. Nouveau départ. Nouvelle erreur. Introspection. Dépréciation. Poursuite de la traversée.

Désert infatigable. Marche. Nouvelle exploration. Rencontres furtives. Rencontre enfin.

Rien. L’espace. Le vide. L’abstraction du monde. Cessation partielle de la pensée. Lévitation. Le ciel.

Les premiers pas sur Terre. Poursuite de la marche. Pas fébriles. Pas tranquilles. Pas et regard. Regard et pas. Inextricablement liés.

Ecoute. Le silence.

Les bruits. Et la fureur du monde. La course. Les pas effrénés. Le silence.

L’accueil. La réconciliation. L’œil à demi-ouvert. L’humilité. La disparition partielle. Et le geste spontané.

Un pas. Puis l’autre. Et l’immobilité du regard.

L’usure du corps. La métamorphose des paysages. La tendresse et l’approbation du regard. Bienveillant.

 

 

A l’eau qui gronde, offre le creux de tes mains. Aux larmes qui coulent, offre ton épaule. A la colère qui éclate, offre ton sourire. A la misère qui ravage, offre tes bras. A l’ignorance qui blesse, offre la lumière. A ce qui passe, offre ta présence. A la vie, offre ton visage. Et ce que tu ne peux offrir, laisse-le se donner à toi...

 

 

Et du silence jaillit le monde, le bruit, la fureur et la violence... brefs éclats. Jaillissement éphémères qui en lui se résorberont...

 

 

Marche sans fin vers l’azur. Et le silence nous recouvre déjà...

 

 

Action ou inaction. Aucune différence. Gesticulations fébriles ou marche lente. Aucune différence. Gestes habités ou d’automate. Aucune différence. En haut ou en bas. Aucune différence. A gauche ou à droite. Aucune différence. Heureux ou malheureux. Aucune différence. Regard présent ou défait. Aucune différence. Être ou ne pas être. Aucune différence. Pourquoi alors s’en faire ? Est ce qui est. Soyons et agissons (simplement) comme cela nous est offert... Infimes acteurs de jeux sans conséquence...

 

 

A quoi destines-tu le jour ? A rien. Le cours des choses est (déjà) à l’œuvre.

 

 

Que devient-on au delà de soi ? Toujours plus soi-même...

 

 

Se soucier de soi ? Ou se soucier du monde ? Faire selon ses prédispositions, sa sensibilité et sa compréhension. L’un est l’élément de l’autre. Et les deux sont éléments de Soi. Chacun est amené à faire et à agir à sa mesure... Pas d’inquiétude...

 

 

Être le bras de l’ignorance ?

Ou les yeux de l’Amour et de l’Intelligence ?

Nul ne peut décider de participer à l’un ou à l’autre...

On agit selon la situation, ses conditionnements et sa compréhension...

 

 

A l’ombre barbare, nulle retenue.

Le monde. Cet étrange objet du désamour...

 

 

En ces terres de démesure, l’intérêt et la raison dominent. Quand donc le cœur les détrônera-t-il ?

Lorsque le cœur conscient gouvernera le monde, la paix sera souveraine. L’amour et l’intelligence régneront sans partage.

 

 

En regardant le monde, on comprend que les Hommes inventent et bâtissent des histoires. Et se délectent d’anecdotes pour échapper (en vain) au néant. Avec de la poussière, ils construisent et façonnent un monde pour oublier leur dimension dérisoire. Et comme on les comprend... Il est si difficile et inconfortable de côtoyer le vide. Et de s’y perdre. Voilà pourtant la seule issue véritable à l’inconsistance des jours...

 

 

De la surface, chacun peut témoigner. De la profondeur, seuls ceux qui y ont été plongés sans s’y perdre peuvent en parler...

 

 

Au commencement, l’Homme est dans la vie. Et face au monde. Et il arrive souvent qu’il se retrouve face à la vie. Et parfois hors du monde. Mais un jour, il est contraint de se retrouver face à soi au cœur même de la vie pour comprendre enfin que la vie et le monde sont en soi...

 

 

Une chose en nous continue d’être réfractaire à la comédie humaine. Aux mensonges et aux barricades érigés pour protéger une identité illusoire. Qui enferment la vulnérabilité de l’être. Qui obstruent l’espace et ruine (empêche) toute possibilité de rencontre (avec Soi, avec l’Autre et avec le monde). Cette immaturité nous est encore insupportable... Elle révèle notre incapacité à accueillir ce qui est. Nos attentes à l’égard de l’Homme et notre refus de la réalité humaine. Sans doute parce que nous aspirons – avec encore trop d’impatience et d’intransigeance – à ce que l’Homme parvienne à actualiser son potentiel (perceptif)...

 

 

Qui s’ennuie dans le vent ? Qui pleure devant le monde ? Qui s’extasie face au ciel ? Qui aspire à trouver refuge ailleurs ? Avant de répondre, interroge-toi : qui pose les questions et aimerait trouver des réponses ? Et qui en est le témoin ?

 

 

Un jour, un homme, quitte le monde. Il traverse des vallées, des forêts et des déserts et s’installe sur une colline. Pendant des années, il contemple le ciel, la terre, les bêtes, les arbres, les brins d’herbe et les pierres. Et un jour son visage s’illumine. Un matin, il quitte la colline et demande aux hommes de se réunir. Lorsque l’assemblée est attentive et silencieuse, il désigne un arbre et un nuage et dit : « ceci sont nos frères ». Puis il désigne un rocher et un brin d’herbe et dit : « ceci sont nos frères ». Ensuite il désigne un oiseau, un poisson, un insecte et un singe et dit : « ceci sont nos frères ». Ensuite il désigne la terre et dit : « ceci est l’origine de tous les enfantements et la mère nourricière ». Enfin, il désigne le ciel et dit : « ceci est l’ami, le guide et la source de la mère et de sa progéniture ». Il salue l’assemblée et s’éloigne en silence.

 

 

Les zébrures grises du ciel sur les collines. L’immensité changeante sur l’éphémère. Partout la beauté. La grâce de l’infime et de l’infini. Le sublime et l’harmonie. Les yeux et le cœur chavirés par tant de splendeur. L’âme apaisée. Et le regard tranquille. Savourant les merveilles du jour.

 

 

La grâce et le salut ne viennent ni des pas ni des gestes. Ni des chemins ni des paysages. Ils se tiennent souverains dans le regard. Majestueux dans le silence du cœur.

Ni le monde ni les heures ne peuvent les ternir. Indemnes de tout contact. Et de toute expression. En surplomb et au cœur même de l’Existant.

De ce regard jaillit la lumière qui éclaire l’Homme. Il ne peut y avoir de plus vaste et lumineux éclairage. Avec cette tendresse. Et cette douceur du cœur qui caresse le monde. Proximité tantôt amoureuse tantôt amicale avec l’ensemble des créatures.

 

 

Et dans notre sac, les souvenirs ténus que l’on transporte. Les maigres bagages de l’Homme. Quelques nécessités pour le corps. Quelques livres pour guérir ou apprivoiser l’âme. Et les paysages qui défilent. Inégaux encore pour le cœur. Mais toujours merveilleux pour le regard. La souveraine solitude des chemins. Et le silence de l’horizon.

 

 

Et il pria la lumière d’éclairer la noirceur, l’ignorance et l’ignominie. Et la pluie (l’averse diluvienne) de nettoyer la terre de ses scories, de ses mensonges et de ses obscurités. Ce qu’autrefois il appelait sa fange et ses immondices. Mais qu’importe les doléances (passées) et les prières, il savait que la lumière, un jour, brillerait sans ombre. Que l’amour et l’intelligence rayonneraient sans rival. D’un éclat si puissant que la confusion, la brume et l’incompréhension seraient dissipées. Après ces noces inespérées viendrait alors le règne absolu de la lumière. Totale et inégalée. Grandiose et majestueuse. Impériale.

 

 

Dans l’absence de jour et de clarté. Dans la confusion et l’ignorance brille la nuit. Mais dans l’obscurité demeure une lueur. Un étincelle prête à s’embraser. Pour que rayonne la lumière...

 

 

Prends garde à l’épaisse forêt des idées où l’on s’égare. Aux pensées obscures et aux textes labyrinthiques auxquels on s’enchaîne. Aux exégèses indigestes et aux préceptes ingreffables sur les âmes immatures. Observe plutôt l’immensité du ciel qui ouvre sur la haute et profonde vallée du cœur. Sur l’espace vide et infini qui accueille et libère...

 

 

Oh ! Le monde ! Tant de bruits pour nous détourner du silence. Tant d’images pour nous détourner du regard. Tant de mouvements, d’activités et de stimuli pour nous rassasier de sensations et de diversité et nous détourner de la perception.

Et pourtant... tous (sans aucune exception) pointent vers l’espace de perception silencieux. Et lorsque l’on tourne son regard et son écoute vers Ce qui perçoit, tous les contenus (bruits, images, mouvements, gestes, stimuli, sensations) deviennent égaux. Et sans importance. Et leur disparition nous laisserait (presque) indifférent...

 

 

Nous aimons les Hommes qui font face au mystère. De toute leur âme. De tout leur cœur. A chaque instant de leur vie. Qui ne revêtent aucun costume d’apparat pour cacher leur indigence existentielle. Qui ne jouent pas à faire semblant pour donner le change et faire bonne figure. Qui osent affronter et exposer la misère de la condition humaine (ordinaire). Qui n’écartent pas d’un revers de main les grandes questions de l’existence. Nous aimons ceux qui s’interrogent et aspirent au mystérieux face-à-face. Eux seuls, à nos yeux, sont véritablement et profondément humains.

Notre cœur a pour eux une sympathie naturelle. La même que celle que nous éprouvons pour les âmes marginales et esseulées, les âmes défaites, ostracisées ou désespérées et les âmes qui vouent à leur prochain (Hommes, animaux et Existant) un amour sincère et profond. Et qui se soucient des plus faibles et des plus vulnérables dans un élan spontané (avec un dévouement authentique). Malgré leurs failles, leur fragilité ou leur ignorance, ces êtres ont une consistance et une épaisseur inégalée parmi la troupe misérable des acteurs qui évoluent, gesticulent et pérorent sur la vaste scène de la tragique – et bien risible... et parfois désespérante – comédie humaine.

 

 

Pour peu que les Hommes aient quelque distance avec leur existence et l’on peut lire dans leurs yeux comme une surprise à se voir plongés dans les situations ou mêlés aux événements et aux circonstances... Comme si leur âme (une infime part de leur âme) avait deviné la dimension onirique du réel...

 

3 décembre 2017

Carnet n°57 L'office naturel

Journal / 2015 / L'exploration de l'être

L’homme qui passe ne laisse aucune trace de son passage. Laisse le jour et la nuit aussi vides que l’espace. Laisse la terre nourrir le corps du strict nécessaire. Laisse les astres tourner selon les consignes du ciel. Laisse les vents et les rivières suivre leurs cours. Laisse les pas trouver leur itinéraire, les mains servir ou se servir, la bouche prononcer quelques paroles selon les circonstances. L’homme qui passe laisse l’esprit à son agitation ou à son silence. Laisse toutes choses se faire et se défaire. Il ne désire rien. N’aspire à rien. Ne refuse rien. Ne dérange rien (ou si peu). Il obéit humblement aux injonctions naturelles des situations. Il est autant l’homme de la terre que du ciel...

 

Office (naturel) : emploi, fonction, charge que l’on est tenu de remplir, assistance et service que l’on rend… à travers les infimes travaux réalisés depuis mon minuscule et immense bureau sous le ciel comme une incessante célébration de la Vie et de la Nature (et accomplie, bien évidemment, en leur sein…).

 

*

 

Sur mon bureau, il y a des pierres et des herbes. Le soleil éclaire mes pages. Les arbres encouragent ma main de leur silence. Je peux noter ce que le ciel me dicte. A ma place dans l’office naturel, j’apprends, tantôt avec lourdeur tantôt avec légèreté, la joie du cœur et la paix de l’âme. A mon aise parmi les miens. Eux seuls m’ont offert cette place. Chaque jour, je les retrouve. Et je me fais discret à leur côté, soucieux de ne pas déranger leur labeur silencieux. Nous travaillons ensemble à la même œuvre. Humblement. Et cette œuvre est plus belle que celle à laquelle peinent les hommes. Elle célèbre la Vie qui unifie. Et non la raison mortifère qui uniformise et divise.

 

 

Les pierres, les arbres et les herbes portent en eux cette beauté que les Hommes cherchent maladroitement dans leurs mesquines tractations et leurs perfides paris. Cette beauté, ils ne la trouveront nulle part qu’en eux-mêmes quand ils auront compris que leurs misérables projets enlaidissent tout ce qu’ils touchent, tout ce qu’ils édifient. Qu’il n’y a rien à faire pour s’en saisir sinon se laisser défaire par le vent en se laissant mener par les lois naturelles.

 

 

C’est au Ciel que j’écris. Mais le vent est mon unique lecteur. Lui seul tourne les pages de mes carnets. Peut-être est-ce pour inviter le Ciel à s’y pencher et en faire retomber quelques fragments (qui sait ?) dans les yeux et le cœur des hommes qui jettent vers lui un regard interrogateur ou apeuré …

 

 

Il me plairait aujourd’hui (de toute évidence) de rencontrer chaque chose, chaque être, chaque situation, chaque phénomène, chaque mouvement ressenti ou perçu, profondément, entièrement. Pleinement. Oui, ce qui m’a toujours intéressé au plus haut point en cette existence est la pleine rencontre. Ne faire qu’Un avec ce qui est. Voie — s’il en est — de l’Unité. Chemin pour unifier absolument et parfaitement l’Absolu et le relatif. Mais ce degré extrême d’exigence à l’égard de la rencontre ne peut se réaliser dans le monde humain tant que l’on demeure sur le plan mental puisque l’on « rencontre » toujours l’Autre sciemment ou non en fonction de ses désirs, attentes et représentations et à des fins ou visées personnelles. Pour être réellement ouvert à la pleine rencontre, il convient d’être désencombré, vide, libre de tous désirs, de toutes attentes, de tous programmes. Totalement présent à ce qui surgit. Pleinement conscient du ressenti.

 

 

L’humanité ne m’a jamais offert de pleine rencontre. Trop d’attentes de part et d’autre. Hormis à de trop rares et fugaces occasions, je n’ai jamais ressenti d’unité parfaite. De dissolution réelle des frontières. D’abolition manifeste des séparations. Pour que cette unité ait lieu, il convient d’habiter l’espace commun qui est en amont du mental. On ressent, en premier lieu, la pleine rencontre avec les mouvements en soi (pensées, émotions, ressentis corporels) puis, lorsque l’on s’est suffisamment nettoyé de ses encombrements, on peut habiter pleinement l’espace commun et être totalement touché et traversé — mentalement, émotionnellement et sensoriellement — par ce qui a lieu quelles que soient les circonstances. On a alors le sentiment que tout se déroule en soi. Tout devient pleine rencontre. Unité parfaite entre Ce qui perçoit et ce qui est perçu.

 

 

Il me semble que la sensation et le sentiment les plus proches de cette perspective est l’état amoureux. Comme si nous étions amoureux à chaque instant de chaque chose. De tout surgissement. De toute manifestation. De tout état. Une sorte d’état amoureux (un flux de Présence et d’Amour) totalement impersonnel, tout à fait indépendant des circonstances et des habituelles satisfactions narcissiques…

 

 

N’érigeons rien en certitude. Vivons simplement ce qu’il nous est donné à vivre. Et faisons comme nous le pouvons selon notre compréhension.

 

 

Cette assertion qui résonne comme une affligeante trivialité dans la mesure où chacun — qu’il en ait conscience ou non — vit ce qu’il a à vivre en faisant de son mieux selon sa compréhension n’en touche pas moins, me semble-t-il, une profonde vérité*. Habiter l’espace commun en arrière-plan du mental est pourtant le gage — jamais acquis définitivement — de vivre les choses de l’avant-plan profondément et pleinement. Contrairement à l’usage commun des Hommes qui est de les vivre de façon assez mécanique, superficielle et fragmentaire. De façon très insatisfaisante globalement. Toujours sur le mode du manque, de la fuite ou de l’attente.

* Profonde vérité qui rend, semble-t-il, tangible dans sa confirmation au moins deux choses ; que tout est parfait tel que les choses sont et que « vivre l’arrière-plan » ne change absolument rien à l’Existant excepté que l’être qui habite cet espace impersonnel s’inscrit dans une activité qui rayonne d’Amour et d’Intelligence, source bénéfique pour les êtres alentour… ce qui ne rend pas pour autant imparfaites les actions des êtres encore non éveillés puisque ces actions agissent de façon absolument appropriée sur les protagonistes concernés en leur faisant vivre ce qu’ils ont besoin de vivre… et en leur faisant apprendre ce qu’ils ont besoin d’apprendre…

 

 

L’œil de la mort guette à la balustrade des jours. Attend le crépuscule. Et sautera sur toutes les âmes de passage restées au dehors. La mort — comme tout le reste — œuvre à sa tâche.

 

 

L’incandescence des jours sur nos âmes grises. Infranchissables.

 

  

Ô arbre, qu’as-tu fait de tes bourgeons printaniers ? Pourquoi tes feuilles sont-elles donc couchées à tes pieds ? A présent, tu gis seul dans les paysages. L’hiver t’a recouvert.

 

 

Ma fréquentation du genre humain ravive et me rappelle, avec toujours plus de force, de tristesse et de malaise, ma différence… mon inguérissable sentiment de décalage. Comme une blessure incicatrisable.

 

 

Je vois un peu partout à l’œuvre, dans le monde humain, l’ignorance, la volonté de puissance et la manipulation. L’idéologie sous-jacente à tout discours. L’étroitesse, la grossièreté et la maladresse des aspirations. Et j’éprouve toujours la plus grande difficulté à fréquenter, à accueillir et à accepter ces caractéristiques…

 

 

Rien n’est jamais véritablement acquis. Ni à l’arrière-plan. Ni sur l’avant-plan. Le premier peut simplement s’habiter — habiter la Présence permanente — plus ou moins (tant qualitativement que quantitativement). Quant au second, il convient simplement de s’abandonner à la variabilité des états et aux cycles incessants des phénomènes.

 

 

Plonger dans la sensation — dans chaque sensation — en laissant vibrer la sensorialité vivante qui pointe vers la perception — Ce qui perçoit. Je crois qu’il n’y a guère d’autres issues pour vivre (en tant qu’humain) l’Unité. L’union parfaitement superposable des phénomènes et de la Conscience.

 

 

Quelqu’un en moi sanglote de ne pas savoir. Et un autre plus vaste et en surplomb se réjouit de cette non-connaissance. Il sait que c’est là la seule perspective de justesse… la seule façon juste d’être. Et d’être au monde. Faire corps. Etre Un avec ce qui est… suffisamment vide et vaste pour être (avec) ce qui surgit…

 

 

L’authentique verticalité est la perspective qui embrasse toute horizontalité. Parfaitement, totalement, absolument (comme le miroir et son reflet complètement indissociables).

 

 

Il n’y a aucune séparation. En quoi que ce soit. Toute dichotomie éloigne. Et cet éloignement même est partie intégrante du grand Tout.

 

 

Vide et profonde humilité du je-ne-sais-pas ouvert à ce qui est

 

 

L’Unité se savoure et se célèbre à travers l’unicité provisoire et limitée de chacune de ses manifestations.

 

 

L’Amour évidemment fait tout aimer. L’intelligence et la beauté bien sûr. Mais aussi la bêtise, l’ignorance, la laideur et l’ignominie. Il permet, en effet, d’accueillir la haine et la destruction, en leur souhaitant la bienvenue non comme principes ontologiques ou valeurs fondamentales mais parce que d’une part, ils existent — sont présent et occupent une place substantielle dans le monde phénoménal — et parce que, d’autre part, ils portent en eux un amour et une intelligence qui ont besoin d’éclore…

 

 

Tout surgissement est sacré. Comme une manifestation divine. Rien ne peut être rejeté. Refoulé. Ni préféré. Tout ce qui advient est merveilleux. Au-delà de toutes préférences mentales.

 

 

Vide, absence de savoir, de prétention et d’attentes. Ouverture totale à la spontanéité et à la pleine liberté des mouvements et à leurs éventuelles conséquences réactives. Amour, respect et gratitude envers tout ce qui surgit.

 

 

Jamais aucun blâme, aucune condamnation, aucun jugement, aucune réprobation à l’égard de ce qui advient, y compris à l’égard de nos refus, de nos restrictions, de nos facilités, de nos résistances, de nos limites, de nos lâchetés, de nos faiblesses, de nos énervements, de nos névroses, de nos jugements, de nos blâmes et de nos condamnations. On laisse advenir tout — absolument tout — ce qui surgit. Et lorsqu’il arrive que l’un ou l’autre de ces mouvements se manifeste, il est accueilli (à l’arrière-plan) et aimé comme tous les autres mouvements, contenus ou états.

 

 

Dans un regard peut se déceler le trésor. Dans le geste sacré qui rayonne de joie…

 

 

La moindre prétention de savoir, de connaissance, de certitude et aussitôt l’espace se referme. Se rétrécit.

 

 

Laisse-toi actionner. La seule exigence est celle de la situation.

 

 

Il semblerait qu’il existe une règle dans tout cheminement spirituel authentique : l’impasse et l’absence totale d’échappatoire. Comme si la vie nous amenait, au cours de certaines phases critiques, dans un étroit goulot dont on ne peut s’extraire (ni en reculant ni en faisant un pas de côté), une impasse où toute fuite est rendue impossible et qui oriente nos pas dans une seule direction possible : s’enfoncer dans le goulot, dans la zone d’inconfort, s’approcher au plus près de la situation que tout notre mental récuse, rejette et dont il voudrait plus que tout s’extraire ou s’éloigner. Il semblerait qu’il existe aussi une autre règle qui concerne la « façon d’habiter » l’espace impersonnel : toute tentative de construction, d’édification informative en certitude rétrécit l’espace. Comme si l’espace se refermait pour « ramener » le regard à notre espace mental habituel si étroit et restreint…

 

 

[Hommage à Goldmund, mort le 21 janvier 2015]

Comme un arbre mort sous la cognée du temps. Seul sous le ciel, je me redresse d’un dernier espoir. Dénudé face à l’éternité, les saisons ont perdu leur emprise. Désormais je regarderai le temps m’effacer. Heureux de la terre et de la cendre se poser ici et virevolter là, reprendre leurs assauts pugnaces avant de décliner. Je soulignerai d’un trait léger les transformations. Je serai roi de la terre et roi du ciel. Souverain du temps et des saisons à l’heure de toutes les naissances et de toutes les oraisons. Je m’enivrerai de l’humus et du vent, des visages et des cris, des larmes et des sourires qui peuplent le monde. Je serai la clé de toutes les portes. Je serai les univers qui bordent les yeux, je serai le cœur de la mort et des vivants. Je serai leur hébétude et leurs joies sans pareilles. Je serai tous les rêves et tous les songes. Je serai tout ce que l’on ne peut imaginer. Je serai toutes les âmes. Et les dents carnassières. L’amour et la douceur. Et la colère des océans. Je serai le vide et tout ce qui l’habite. Je serai tout. Je serai n’importe quoi. Je ne serai rien. Je serai devenu ce qui existe avant que vous ne naissiez. Avant même que le monde et l’univers ne soient créés. Et je vous attendrai dans ce lieu qui n’en est pas. Venez à moi. A notre rencontre. Et nous serons Un. Vous comprendrez alors ce que nous avons toujours été.

 

*

 

 [Hommage* à Guy, mort le 31 janvier 2015]

Un homme singulier. Un être atypique, explorateur de domaines et de plans peu fréquentés par ses congénères. Scientifique, artiste et chamane. Apprenti. Eternel débutant comme il aimait à se définir. Chercheur de vérité. Furieux et insatiable adepte de la Connaissance, bien décidé à découvrir, selon ses propres termes, la structure fondamentale du réel. Homme aux mille chantiers parti trop tôt pour mener à bien et à terme sa folle — et bien compréhensible — ambition.

 

Guy est mort comme il a vécu, souverain et négligent sans jamais se départir (y compris jusqu’à ses derniers instants) d’une distance à l’égard de l’existence organique et matérielle, d’un humour à l’égard du monde et d’une farouche autodérision. Comme une façon pudique, timide et altière d’aller dans la vie pour laquelle il avait tant de doutes et si peu de certitudes… Et comme il avait raison…

 

Aujourd’hui, bien des pistes restent à explorer... Et je ne doute pas qu’il poursuivra ses recherches pour établir les liens entre les multiples disciplines dont il était si friand — et si féru — afin de découvrir la source créatrice de la longue série d’hologrammes et l’origine première de l’interminable mise en abyme (deux de ses intuitives théories sur lesquelles il était intarissable) pour que puisse enfin être couronnée la Connaissance explorée par cet esprit brillant et imaginatif… Allez ! Au boulot, Guy ! Toi qui détestais ce mot ! Remonte tes manches ! Joyeuse et fructueuse quête, l’ami ! Et bon vent !!!

* Brève allocution lue au cours de ses obsèques.

 

 

Il n’y a de soleils trompeurs. Mais un azur clair et limpide. Et un vent vif sur la plaine qui balaye les oraisons et les doléances. Qui défait les âmes de tous les accoutrements, forçant le regard à la joie spontanée et offrant au monde et aux paysages son intacte pureté.

 

 

Il n’y a rien qui vaille en ce monde. Sinon la solitude et la joie. Le reste n’est que compensation. Plaisant ou agréable parfois certes… mais en dépit des agréments qu’il offre, il ne peut être comparé à la pleine vivance de la solitude joyeuse qui ouvre à la plénitude si dense et si légère de l’être dénué de qualificatifs.

 

 

Au milieu de la nature souveraine — et de ses mouvements originellement naturels — assis sur le sol et les yeux au ciel, je me sens à ma place. Comme si ce cadre m’offrait le seul lieu en mesure de m’accueillir… le seul bureau où il me soit réellement possible de me laisser pleinement aller au travail de l’être

 

 

A quoi pourraient succomber les heures ? Nulle âme à la ronde et nul projet devant soi. L’espace libre de toutes contraintes… la grande liberté intégrant toutes les restrictions et toutes les limitations…

 

 

Qui est souverain au pays de l’innocence ? Et au royaume de l’ignorance et de l’insignifiance ? Qu’importe le lieu que nous habitons. Nous avons tous le même maître. Et la même figure. A la fois l’Hôte de toutes les formes et toutes les formes de l’Hôte.

 

 

A qui s’adressent ces pages ? Toutes ces pages qu’inlassablement j’écris… A cet autre moi-même qui autrefois cherchait l’Absolu avec acharnement. A cet autre moi-même présent en chacun qui semble recouvert — si souvent — par tant d’inambitieuses quêtes, à la fois prérequis à l’ultime rencontre et reflets célébratoires de l’Unité dans la restriction.

 

 

Mes longues promenades quotidiennes (marche et pauses interminables) sur les collines, sous le ciel, parmi les arbres, les herbes, les insectes et les pierres des chemins sont un espace merveilleux. Un espace de liberté et de travail. Un espace vital qui m’offre le contexte idéal pour me consacrer pleinement au seul travail digne et essentiel — à mes yeux — auquel devrait s’adonner l’être humain : œuvrer à la compréhension de ce que nous sommes et au travail perceptif. Un espace d’exploration de l’Être teinté chaque jour de découvertes, de perceptions et de ressentis différents (comme si les pans multiples de l’Être se donnaient à voir et se laissaient découvrir…). Un espace contemplatif et méditatif essentiellement vécu à partir de la Présence impersonnelle. Et un espace réflexif et intuitif où il m’arrive de noter — quand la nécessité se fait sentir — quelques inégaux fragments.

 

 

Mon seul travail est de ne rien être. Et de laisser libre cours aux mouvements phénoménaux dont le personnage — le corps-mental — fait partie…

 

 

Ô Homme ! Une fleur de neige à la boutonnière de ton costume maculé. Ecarlate. Et le sang du monde sous tes souliers. Tu peux bien cacher ton ignominie, crois-tu que le ciel couvrira indéfiniment tes méfaits ? Tu paieras pour avoir outrageusement exploité la terre et écrasé ses créatures. Tu peux bien parader aujourd’hui et te prendre pour le souverain du monde, demain le ciel te courbera l’échine, te glacera les sangs et t’enfoncera le visage dans la fange pour que tu rendes grâce à la terre car de ce lieu seul peut naître la compréhension. Et l’amour des créatures. Le regard pur qui laisse intacts tous les paysages.

 

 

La terre, le ciel. Une pierre et un bâton. Symboles de vie, de conscience et de cheminement.

 

 

Dans le silence profond du jour et le calme des heures, la parole est rare. L’écoute et le regard souverains.

 

 

A petits pas vers le jour, le soleil brille déjà…

 

 

Ivre de nature et de vent, de ciel et de silence, tous les chemins s’effacent.

 

 

L’homme humble est à la mesure de ses pas. Mais son regard est infini.

 

 

Au plus proche de l’herbe des chemins, on côtoie les ailes invisibles des anges. On ne peut plus dès lors aller vers le monde en conquérant. Ni en guerrier. On chemine sans fanfare ni trompette. Sans banderole. Le regard humble. Les yeux baissés qui brillent d’Amour et d’Infini.

 

 

Il y a l’horizon du père. Opaque. Infranchissable. Et partout la terre vierge où se posent nos pas.

 

 

Ni soumis. Ni conquérant. Humble et discret. Simple, naturel et sans idéologie. Mais apeuré parfois par l’incroyable sauvagerie du monde…

 

 

L’infini bleu du ciel. Et la noirceur du monde. Les cœurs gris. Les lèvres blanches. Et le sombre souffle du Vivant. Comment être sur terre depuis le ciel ?

 

 

Le monde est fou. Et il voudrait faire croire à la folie de ceux qui résistent à la sienne. Pourquoi si peu voient dans la jouissance de la richesse la plus grande indigence. La misère la plus haute. Et dire que l’essentiel du monde n’aspire qu’à s’y vautrer (avec ostentation). Aller de par le monde sans rien posséder. S’asseoir par terre dans le plus grand dénuement, les yeux baignés d’amour, d’infini et de gratitude, et le cœur en joie, voilà la plus haute richesse à laquelle puisse prétendre un Homme. On y accède quand la volonté a été anéantie, par la grâce du ciel. Quand les idées, les prétentions et les certitudes ont été balayées. Quand on se tient seul et nu au carrefour du ciel et de la terre et que tous les horizons ont perdu leur attrait.

 

 

Contrairement à la grande majorité des espèces, l’Homme n’a jamais eu que son esprit pour survivre. Etrange animal de la création et mystérieux organisme du Vivant que la Vie a doté d’un outil puissant — diaboliquement puissant — le mental qui a pu, au fil de l’évolution, se développer au point de pouvoir réaliser, entre mille ignominies et absurdités, de petites prouesses phénoménales. A quelles fins ? Au-delà du jeu et de la célébration de la Vie et de la Conscience, sûrement pour apporter sa pierre à l’édifice parmi (on peut le supposer) de très nombreux pairs existants et à venir dans la résolution de l’énigme de l’existence et de son origine (Vie et Conscience) et permettre de faire advenir sur le plan organique mais aussi sur le plan énergétique (qui en est le plus sûr soubassement) les caractéristiques de la Conscience : Amour, Joie, Paix et Intelligence…

 

 

Le ciel se penche sur mon épaule. Et en voyant mes pages, esquisse un sourire innocent — une sorte de moue bienveillante où l’on devine un « à quoi bon, mon ami ? » sous-entendant que nul lecteur ne saurait l’atteindre ou le trouver ainsi… Et je lui rétorque — sûr de mon bon droit — que mes pages sont humbles, qu’elles encouragent seulement les pas vers lui. Qu’il m’a fait son modeste serviteur et qu’il m’a livré à cette humble tâche : tenter de toucher le cœur de ceux qu’il appelle en silence et qui entendent au loin un murmure inaudible — incompréhensible — pour les ouvrir à son horizon, à sa perspective et à sa dimension. Toutes ces parts de lui-même qui le cherchent en ignorant quel chemin emprunter pour aller à sa rencontre et le retrouver…

 

 

L’ordinaire de chaque chose éclairé par un regard d’amour et de paix, voilà ce qui donne au monde sa beauté. Le merveilleux de la vie. Rien d’autre n’est nécessaire.

 

 

Rien ne peut altérer la joie sinon l’œil restrictif. L’étroitesse de l’espace mental qui craint, limite, discrimine, calcule et juge… et même lui, on peut l’aimer de l’espace que nous habitons.

 

 

Le labeur des jours et la marche des siècles n’ont aucune emprise sur la légèreté de l’âme qui ne reconnaît et ne peut vivre que la plénitude de l’instant. A ses yeux, le reste — toutes les activités auxquelles se livrent le monde et les hommes — n’a aucune existence. Aucune réalité. Peine perdue donc que de s’y consacrer à moins qu’une joie ne nous y porte naturellement.

 

 

Il y a un temps pour chaque chose en ce monde. Un temps pour le bleu du ciel et un autre pour l’or des visages. Un temps pour la solitude enchantée et le règne du silence et un autre pour le bruit et la fureur des foules. Un temps pour les cernes gris de l’angoisse et un autre pour les rires éclatants et l’allégresse. Un temps pour apprendre et un temps pour l’oubli. Un temps pour se réjouir et un autre pour s’attrister. Un temps pour ressentir le poids des heures et un autre pour vivre la grâce de l’instant. Un temps pour la vie et un temps pour mourir. Chaque chose porte en elle sa propre beauté. On ne peut, le plus souvent, que le pressentir ou l’entrevoir. Seul le regard nu — désencombré de l’idée de soi-même — peut le ressentir et le vivre pleinement.

 

 

Chaque jour, en rentrant à la maison après notre longue promenade, ma main secoue délicatement mon carnet au-dessus de la table de la cuisine. Et s’y dépose la maigre — et souvent réjouissante — récolte du jour…

 

 

Afin de donner un aperçu simplifié (et didactique) de la quête qui m’a animé au cours de cette existence, on pourrait la diviser en trois phases distinctes :

— la quête de sens et de vérité (sens de la vie et vérité de l’existence) ;

— le passage vers l’impersonnel ;

— et (enfin) l’exploration de l’être*.

* Cette dernière phase ne relève pas à proprement parler de la volonté personnelle et ne peut donc être réellement qualifiée de quête. En dépit de l’extinction de toutes les interrogations d’ordre existentiel ou métaphysique, il semblerait néanmoins que l’être continue de se livrer à sa propre exploration

 

*

 

Des empreintes sur la neige, voilà ce que nous léguons à notre avenir. Et aux Hommes qui poursuivront notre tâche. Notre seul héritage demeurera à jamais la pollution qui a odieusement envahi tous les espaces : l’air que nous respirons, les océans, l’eau et les aliments que nous ingurgitons, la terre que nous saccageons et les esprits qui continuent d’œuvrer à leurs funestes travaux…

 

 

J’ai brûlé toutes les idoles. Aujourd’hui, mes seuls maîtres sont le ciel(1) et le cours des choses(2)… C’est à eux que je confie — ce que les Hommes appellent — mon existence car en vérité eux seuls existent. Et tout leur appartient. L’un contemple ses propres créations que l’autre fait et défait au gré des jeux, des nécessités et des célébrations…

(1) La conscience (Ce qui perçoit).

(2) L’énergie (et accessoirement le « karma » auquel sont soumis, entre autres, les êtres et les créatures organiques).

 

 

L’homme qui passe ne laisse aucune trace de son passage. Laisse le jour et la nuit aussi vides que l’espace. Laisse la terre nourrir le corps du strict nécessaire. Laisse les astres tourner selon les consignes du ciel. Laisse les vents et les rivières suivre leurs cours. Laisse les pas trouver leur itinéraire, les mains servir ou se servir, la bouche prononcer quelques paroles selon les circonstances. L’homme qui passe laisse l’esprit à son agitation ou à son silence. Laisse toutes choses se faire et se défaire. Il ne désire rien. N’aspire à rien. Ne refuse rien. Ne dérange rien (ou si peu). Il obéit humblement aux injonctions naturelles des situations. Il est autant l’homme de la terre que du ciel. Mûr (sans doute) pour quitter la sphère organique et accéder au monde du sans forme ou à la dissolution complète dans l’impersonnel

 

 

Assis à proximité d’un pin, planté dans une minuscule clairière, entourée d’une folle (et exubérante) végétation, le ciel est mon seul compagnon. A quelques mètres s’écoule la rivière, claire et tranquille. Au loin, le bruit du monde. L’agitation des Hommes — mes compagnons lointains — dont je ne peux, en général, apprécier la présence qu’à distance raisonnable et dont la proximité immédiate trop souvent me blesse ou m’ennuie. C’est ainsi. Je suis bâti pour la solitude et les espaces naturels, être entouré d’arbres et de ciel, contraint de vivre — avec bonheur l’essentiel du temps — à plusieurs encablures de mes frères à deux pattes. Néanmoins, cette distance est parfois vécue avec une pointe de tristesse et un brin d’amertume nostalgique (un deuil pas totalement accepté sans doute…), déconcerté à l’idée de ne trouver aucune place (confortable et acceptable) dans la communauté humaine. Mais il en est ainsi. Il existe des Hommes pour vivre au sein de la société (l’immense majorité) et d’autres (infiniment minoritaires) pour vivre à l’écart, partiellement ou totalement hors du monde humain…

 

 

La vie est dense dans la solitude. Pleine, belle et joyeuse, l’essentiel du temps… Et comme elle peut se transformer en enfer ou en néant aussitôt que le mental prend les rênes… Mais auprès des Hommes, elle me semble presque toujours superficielle et fade. Inconsistante. Sans essence. Sans doute parce que la raison y domine et qu’à leur insu, elle asservit et anéantit tous les domaines qu’elle investit. La Vie et le Vivant, évidemment, en sont les premières victimes. Il est vrai que la raison (non éclairée), le plus souvent, soumet et détruit. Pour ne pas pâtir de ce mouvement omnipotent et fortement délétère, il conviendrait de laisser la Vie entrer dans la raison. Je crois, qu’à terme, l’Homme n’aura d’autres solutions…

 

 

L’invisible labeur des jours silencieux…

 

 

Chaque jour, j’arpente les bois, les collines ou les berges de la rivière. Marche solitaire en compagnie de mes chiens qui se plaisent (et c’est peu dire…) à vagabonder en pleine liberté sur les innombrables sentiers olfactifs qui parsèment « notre territoire ». Chemins invisibles dont eux seuls connaissent les secrets, les découvertes et les surprises. Il faut les voir gambader et s’affairer partout, la truffe au sol, s’enfoncer dans les fourrés et les taillis, les traverser avec force ou agilité, courir à perdre haleine à travers les hautes herbes, contourner les bosquets d’arbres et d’arbustes, aboyer comme de beaux diables lorsqu’ils dénichent un lapin et qu’ils poursuivent, en de longues courses haletantes, le pauvre animal, apeuré, qui détale en trombe à la recherche d’un abri ou d’un terrier pour échapper à ces opiniâtres et inopportuns poursuivants. Après leur course effrénée, mes deux incorrigibles et infatigables détrousseurs de lagomorphes sauvages (dont ils ne parviennent, heureusement, quasiment jamais à faire la peau) repartent en quête de nouvelles aventures. Une fois l’ensemble du territoire quadrillé, ils reviennent vers moi, la langue pantelante et le souffle court, et nous reprenons notre marche, moi à pas lents, eux à allure tantôt bonhomme tantôt rapide, pour nous poser quelques centaines de mètres plus loin, moi m’asseyant en un nouvel emplacement, eux repartant à la recherche de nouvelles pistes. Ainsi se déroulent nos après-midis, eux s’affairant tout entiers à leur existence joyeuse de chiens libres, moi me laissant aller à de profondes méditations, à de longues contemplations et à quelques rêveries ou pensées que je note sans empressement sur mon carnet. Chaque jour, ivres d’odeurs et de senteurs, de ciel, de nature et de liberté. Et seuls. Toujours seuls. Sous la pluie ou le soleil. Dans la joie ou la tristesse. Loin de toute présence humaine, comme le gage d’une paix vécue à l’écart de la communauté des Hommes.

 

 

Et je repense aujourd’hui (avec un peu de nostalgie) à deux de mes compagnons, l’un à quatre pattes, l’autre à deux, morts (tous les deux) il y a quelques semaines. L’un m’accompagnant autrefois dans nos folles et bien sages aventures sylvestres ou campagnardes. L’autre partageant mes réflexions et les modestes percées de mon humble odyssée métaphysique et spirituelle. Et aujourd’hui, une part de moi est triste de leur absence et de nos partages qui ne seront plus

 

 

La vie dénude notre regard. Le débarrasse de ses empêtrements et de ses scories jusqu’à le rendre humble. Et sensible à la beauté de ce que nous jugeons d’ordinaire insignifiant, trivial ou sans grâce. Tout prend alors des allures de merveilleux. Quand la moindre feuille, la moindre brindille, le moindre brin d’herbe, le moindre nuage, la moindre fleur, chaque visage, chaque paysage est vu pour ce qu’il est. Et non jugé en fonction d’une palette de représentations mentales édifiées à partir d’une hiérarchisation de l’idée de la beauté. Toujours partielle, sectaire, idéologique, dictatoriale et dénaturalisante

 

 

Vivre avec les merveilles de la Terre (et son abondance). Avant que les hommes qui en surexploitent les ressources l’anéantissent. Vivre avec les privilèges du ciel (ceux du regard céleste) qui demeurera intact quoi que fassent les Hommes. Etre humble (même si cela ne se décrète pas). Vivre en harmonie avec ce qui est. Ne rien s’approprier. Prélever le juste nécessaire. Ne rien détériorer. Passer humblement. Ainsi, où que nous allions, nous serons rois du ciel et de la terre. Modestes princes de nos pas. Et seigneur bienveillant du regard qui saura aller en paix dans l’enfer et le paradis de toutes les contrées que nous serons amenés à traverser.

 

 

Dans le bosquet des jours tranquilles, je me tiens. A l’abri de la folie des Hommes. Et de la fureur du temps.

 

 

La vie érode tous les horizons et l’idée de soi-même. Elle érode la croyance et l’espoir que la seule issue — à notre insatiable quête de joie, de plénitude et de paix — soit liée à certains contenus existentiels comme elle érode la croyance en notre individualité. Ainsi œuvre — ne cesse d’œuvrer — la vie afin d’intensifier l’instant et d’ouvrir l’espace du regard. Tout au long de notre existence, elle nous invite inlassablement au rien (à l’humilité totale et à l’absence de programme et de projet) pour que le regard se dénude et puisse enfin s’élargir et devenir infiniment attentif et sensible à ce qui est (dans l’instant), nous révélant ainsi le merveilleux de Ce qui perçoit et l’indicible beauté de chaque chose…

 

 

A qui s’offre la beauté du jour ? Au regard clair et étonné. Nu et innocent.

Et à qui s’offre la quiétude de la nuit ? A l’esprit qui a baissé les rideaux du jour…

 

 

L’humilité (absolue), la sensibilité (profonde) et le respect (inconditionnel) mènent à la souveraineté de l’Infini et de l’Amour…

 

 

Heureux les pauvres en esprit. Comme l’on comprend cette parole quand on voit l’esprit envahi de pensées, d’idées et de réflexions. Autant d’encombrements qui surchargent le mental et autant d’occasions, pour lui, de s’accrocher à l’inopérant bagage du savoir qui, en réalité, éloigne du vide nécessaire pour ressentir et vivre l’ÊtreÊtre pauvre en esprit permet, au contraire, de comprendre — en tant qu’individualité — que nous ne savons rien, que nous ne sommes rien, prérequis nécessaires à la vraie Connaissance. Au même titre que la richesse matérielle (comme l’illustre l’histoire du chameau et du chas de l’aiguille), le riche en biens, trop accroché à ses richesses, causes incessantes de tracas et de préoccupations, ne peut comprendre que les possessions éloignent du vide nécessaire pour ressentir et vivre l’Être. A contrario, la pauvreté matérielle permet de réaliser — en tant qu’individualité — que nous ne possédons rien, que rien ne nous appartient, prérequis nécessaire à la vraie Richesse.

 

 

Et pour se détendre un peu, un petit jeu vocabulistique (comme une petite récréation oxygénante) après cette longue logorrhée scripturale* insufflée par mon tyrannique besoin d’achèvement et d’exhaustivité qui m’exhorte à dérouler jusqu’à son extrême limite (et dans toutes ses dimensions) la pensée intuitive qui a le malheur de me traverser l’esprit :

l’acatalepsie s’aiguise à la perspective apophatique. Et la vie pélagique (pleinement océanique) s’obstrue, confinant notre être érémitique et valétudinaire (limite cacochyme) à la cataplexie. Ainsi pourraient gloser en langage vernaculaire, les prosélytes béotiens de la douance et autres thuriféraires (un rien flagorneurs) de l’hermétisme sibyllin et abstrus, au grand dam, évidemment, de leurs contempteurs (pour l’essentiel cénobites), adeptes patentés d’une stéréotypie gestuelle roborative et lénifiante et inflexibles partisans d’une doxa abêtissante à l’adresse du vulgum pécus et autres factotums décérébrés de l’ère anthropocène.

* En référence à la rédaction de l'ouvrage sur la Conscience et l'Existant qui m'a occupé pendant de longues semaines... 

 

 

Tous mes fragments (tout ce que j’ai écrit au cours de ces longues années) pourraient être regroupés en un seul volume et s’intituler Notes pour l’existence humaine. Et l’on pourrait y ajouter le sous-titre suivant : Parcours et processus de compréhension de ce que nous sommes.

 

 

Toutes ces réflexions ne doivent cependant pas nous détourner de l’Être et de la seule attitude qu’il convient (en réalité) de tenir à l’égard de tout ce qui se manifeste (qu’il soit réel ou illusoire, mi réel mi illusoire, tangible ou projectif, physique, organique, psychique, émotionnel, virtuel etc etc) : l’accueil et l’amour inconditionnels de tout ce qui surgit et est perçu… attitude à laquelle on est — de toute façon — naturellement et irrésistiblement convié au fil de notre compréhension…

 

2 décembre 2017

Carnet n°56 L'infini en soi

Recueil / 2015 / L'exploration de l'être

Une bande de terre où poser ses pas. Pour arpenter les sentiers de pierres. Et parcourir les collines. S’asseoir sur un rocher. S’offrir au vent, au soleil et à la pluie. Au ciel infini. Et laisser la diversité de l’univers apparaître dans le regard et s’éteindre dans le silence. Observer l’incessant jeu tantôt espiègle tantôt funeste des mouvements. Voir les formes et les phénomènes naître, virevolter, s’essayer à quelques cabrioles paisibles ou ardues avant de mourir. Beauté de chaque instant.

 

 

Chaque heure est un carrefour sans chemin. A la croisée se tient celui qui est debout. Ivre d’espoir et d’horizon, les pieds collés à la sente, attendant les craquelures du ciel.

 

 

Je suis seul avec l’infini qui se penche vers moi. Et me dit : il n’y a personne ici-bas.

 

 

Toi qui contemples le ciel, dis-moi : que dure le vol d’un oiseau ?

 

 

Peux-tu saisir le nuage qui passe ? Qu’attraperait ta main avide ? Et si tu laissais mourir ton indigence…

 

 

Un trait dessine le monde. Un autre l’efface. Je suis le cours des choses. Et la demeure immobile. Le ciel impassible qui voit mourir chaque trait les uns après les autres.

 

 

Ô Ciel ! Dis-moi où se cache la vérité. Où as-tu mis mon regard ?

 

 

La vaisselle s’égoutte dans l’évier. Les feuilles des arbres dansent dans le vent. Assis sur la terrasse, j’écoute le soir tomber.

 

 

La lune dans le ciel me regarde. Et je n’ai aucun mot à lui offrir.

 

 

Simple. Toujours plus simple devient la vie. Un thé. Un bol de soupe. Le linge qui sèche au vent. Quelques pas sur la colline. Et le printemps sur la montagne. Les arbres de la forêt. L’herbe des chemins. Un rocher pour regarder le ciel. Ma vie s’efface dans l’infini.

 

 

Le ciel reflète notre vrai visage avec plus de justesse que tous les yeux du monde. L’infini peut alors se déployer dans le regard.

 

 

Je m’étends contre la roche dure et froide. L’abeille butine à mes pieds. Le ciel est descendu dans mon regard. La joue posée sur l’herbe. Le cœur battant sur la terre. Le monde devient familier. On accueille l’insignifiance. Et la préciosité de toutes choses. L’Hôte qui ne pouvait souffrir de voir sa place usurpée ouvre enfin ses portes.

 

 

La pluie tombe du toit. La réalité se jette partout. Dans mon regard, le soleil et les yeux hagards. Le visage offert et les mains ouvertes.

 

 

Il n’y a d’horizons heureux. Voilà ce que nous apprend la marche ! Au bout de la route, on est mûr pour ouvrir enfin son regard au ciel. Et de constater avec effroi et étonnement qu’il a toujours été là… avant même nos premiers pas.

 

 

L’herbe qui m’accueille est plus secourable que les bras de mes frères. Elle n’attend rien de moi. Et je lui sais gré de me recevoir sans rien demander. Je ne perçois en elle pas l’ombre d’un désir. Et lorsque je la quitte, mon cœur s’emplit de gratitude et d’une main délicate, je la redresse.

 

 

Que peut l’œil face au ciel infini ? S’y perdre est la seule issue.

 

 

Les jours sombres se reposent à l’abri de la mémoire. Qui étais-je ? Aujourd’hui, je m’éloigne de l’ombre qui autrefois voulait m’enserrer. A mes trousses, le vide m’a rejoint. Et à présent, nous allons ensemble sur la route transparente et les chemins sans visage.

 

 

Sur le mont démuni je me tiens, grelottant de froid et de solitude. Mes yeux sont devant moi. Dans la terre je frissonne, les ailes repliées. Déplumées par le vent. Je ne sais que faire. Je reste assis au bord de moi-même. Dans la brume de mes rêves. Je me suis perdu. Je croyais être arrivé au lieu sans pareil. Mais mon regard m’a surpris hébété sous la pluie. Je me suis égaré sur le chemin que je croyais achevé. Où ai-je donc posé mes pas ? Et pourquoi dans le ciel les nuages me sourient ? Je m’ennuie ferme sur la terre. Le monde a scellé mon exil. Nulle part est mon origine et ma destination. Et j’ai perdu la route qui m’y menait. A présent où pourrais-je bien m’égarer ? Je n’avance qu’en moi-même. Et j’ai perdu la trace qui m’y menait. Les pas se suivent sans fin sur le cercle étroit qui m’entoure. Je n’avance qu’à reculons vers le gouffre qu’est mon centre. Je marche au bord du cercle qui m’enserre. Quand y tomberais-je ? L’horloge s’est enfoui sous la crasse accumulée depuis des siècles. Et je ne sais que faire du temps. Où est donc passée l’heure nouvelle ? Je suis sans ressource face à l’indigence. Et la monnaie n’est d’aucun secours. Les jours et les poches sont aussi vides que le ciel. Et mon regard penche davantage vers l’absence qu’en lui-même. On aimerait parfois habiter un autre songe. Mais tous les rêves sont nos tombeaux. 

 

 

J’aime me laisser caresser par les yeux des arbres, les yeux des herbes, les yeux des rochers, les yeux du vent… et le regard du ciel que j’habite.

 

 

Sur la table, la carafe et le bol, la feuille et le stylo attendent le baiser de Dieu. L’univers est en ordre. Comme sa marche sans fin qui s’attache à vouloir toucher le ciel. 

 

 

Balayer le sol. Marcher dans les collines. S’asseoir sur un rocher. S’allonger sur le sol. Ouvrir un livre. S’étendre sur sa couche. Manger en silence. Le regard éclaire le quotidien. Offre à tous les gestes et toutes les activités une beauté indicible. Notre cœur déborde de gratitude. On célèbre le sacré de l’existence. Et nos mains sages se recueillent en silence.

 

 

Le chant des oiseaux, l’écho de la forêt. Les paroles de la terre sont sages. Il n’y a que les hommes pour ne pas les entendre. L’instant si fragile dans mes mains ouvertes. Seul dans la forêt, les bruits du monde n’ont plus d’importance. On se retire de toutes volontés. On célèbre dans le silence ce qu’il y a devant nos yeux. Présent à ce que l’oreille entend. L’heure est légère. Elle s’éprend des beautés du jour. Les yeux assagis se reposent. Le tumulte qui autrefois nous agitait n’a plus prise sur le regard de paix. Les mains ont beau encore parfois s’agiter, les pas peuvent encore bien de temps à autre retrouver leur fébrilité d’autrefois, les yeux suivent, tranquilles, l’effervescence passagère. En attendant le silence, ils laissent les bruits s’éteindre.

 

 

Assis sous un arbre, j’écoute la pluie tomber. Et les corneilles qui jouent dans le vent. Au loin, le bruit des voitures. Et au-dessus de la tête, le ciel nuageux. Les yeux et la terre sont paisibles. Le monde est parfois si étranger à mon cœur. Comme s’il n’existait que pour la tête. On ressent pourtant que l’univers entier est en soi. Et l’on éprouve pour tout ce qui est là un amour profond. Mais on ne se perd ni dans les pensées ni dans l’imaginaire. On vit simplement au plus proche — dans l’intimité même — de ce qui est.

 

 

Une bande de terre où poser ses pas. Pour arpenter les sentiers de pierres. Et parcourir les collines. S’asseoir sur un rocher. S’offrir au vent, au soleil et à la pluie. Au ciel infini. Et laisser la diversité de l’univers apparaître dans le regard et s’éteindre dans le silence. Observer l’incessant jeu tantôt espiègle tantôt funeste des mouvements. Voir les formes et les phénomènes naître, virevolter, s’essayer à quelques cabrioles paisibles ou ardues avant de mourir. Beauté de chaque instant.

 

 

J’entends déjà l’eau ruisseler sur ma tombe. Et le rire des corbeaux dans le ciel. A la vue de ma dépouille, les yeux se détourneront. Et je girai seul parmi les ronces. Et bientôt sur mon sépulcre fleuriront les orties, les fleurs des prés et les herbes folles des chemins dont se repaîtront les bêtes affamées. Et je rirai seul de me voir si misérable. Et démuni parmi mes pairs à la tête ahurie et aux yeux effarés, frappés de stupeur de voir tant de joie et de gaieté dans cet enfer.

 

 

J’aime m’attabler avec moi-même. M’allonger sur ma couche avec moi-même. M’entretenir des hauts et des bas avec moi-même. Et lorsque je me suis déserté, les oiseaux, les arbres et les étoiles me répondent. Et m’enseignent. Puis je regagne le ciel. En paix. Je peux alors être là pour le monde. Les oiseaux, les arbres, les étoiles et le ciel le savent bien. Et même parmi les hommes, certains doivent le ressentir.

 

 

Il y a une grâce à toucher le ciel. Mais la plus magistrale est de l’habiter à chaque instant. En silence.

 

 

Le scintillement des eaux claires et la lumière artificielle des lampadaires. Et les millions d’hommes et d’insectes comme envoûtés, fascinés par le spectacle — la farce miroitante. Prisonniers des apparences toujours trompeuses. S’ils savaient (et s’ils le pouvaient), ils riraient de tant d’aveuglement et de maladresse. Et fouilleraient aussitôt avec une farouche détermination en d’autres lieux. Mais qui connaît cet espace lumineux enfoui en nos profondeurs qui ne se dévoile qu’à ceux qui se sont délestés de tous les mirages ?

 

 

Dans le jardin de pierres, mes ailes reposent. Les rêves d’envol se sont dissipés. L’azur s’est effacé. L’espace est ma demeure. Je suis l’Infini qui accueille le monde. Et l’éclaire. 

 

 

Les saisons mensongères. Et la vie secrète des morts. Jour de deuil ou jour de liesse, on se réjouit de l’heure présente. Perdu au fond des vallées. Assis au faîte des arbres. Debout au sommet des collines. Couché au fond de grottes solitaires. Sous le couvercle des jours tristes ou assis dans l’azur, on célèbre les jeux du monde, la vie espiègle et ses farces cruelles qui déchirent les âmes encore soumises aux légendes et aux mythes du monde qui ne savent voir l’Absolu qui les entoure et les aide à briser leurs chaînes (et leur coquille) pour habiter la liberté et l’infini dont elles sont éprises. On s’agenouille au pied des arbres pour les honorer. On marche dans le vent, les bras en croix et la tête haute dans les nuages, docile aux aventures, aux méandres des rivières et aux caprices de la terre. On salue le spectacle merveilleux, ses tyrans et ses bouffons, sa ribambelle de figurants qui rechignent à jouer leur rôle, les mains besogneuses et les esprits innocents, les râleurs et les mécréants, tous ceux qui marchent avec leur masque qui pend sur leurs genoux, les bourrus et les acariâtres. Puis on oublie le monde, ses spectacles et ses acteurs pour retrouver son antre solitaire.

 

 

L’heure présente si étrangère aux soucis du jour. L’heure si familière du rien qui s’étend. Au point de se fondre à l’Infini. Jointure entre le rien et le Tout. Cet étroit passage désencombré.

 

 

Marcher en silence. Et à petits pas. Voilà un délice pour la chair. Et pour l’âme. Sentir sous ses pieds les cailloux du chemin. Humer les parfums printaniers. Se laisser mouiller par la pluie fine de la journée. Sentir la caresse du soleil d’avril. Voir partout la beauté. Les arbres et les arbustes. Les fleurs sauvages et les herbes drues. Le sable et la terre. Les nuages. Les chiens qui gambadent. L’azur changeant. Les joutes et les querelles d’insectes. Leur combat déchirant. Leur labeur tranquille. Leur cri charmant. Le piaillement des oiseaux. Les jeux et les drames — petits et grands — des créatures sous le ciel. Les champs labourés. Les parcelles de vignes. Les ruines au détour d’un village. Les collines jusqu’à l’horizon. Les sentiers et les chemins. Et les petits pas tranquilles qui retournent chez eux. En sifflotant un petit air joyeux.

 

 

Un air de trompette secoue la terre. Et je vois les âmes apeurées courir en tous sens. Ne savoir où aller pour échapper au trépas. S’enfuir à perdre haleine à travers les plaines et les montagnes. Aller par milliers à travers les airs et les océans. Submerger la terre de leur pas affolés. Sans pouvoir s’abandonner aux secousses terrifiantes. Entonnant des cantiques pour apaiser leur terreur. Cris, chants et gesticulations. Implorations impuissantes, les mains ou le regard tourné(es) vers le ciel, ainsi vivent et meurent les Hommes.

 

 

Présence, poésie, métaphysique, nature, promenade, solitude, simplicité, dépouillement. Conditions propices ou manifestations de l’Absolu ?

 

 

Le carcan des heures fébriles. Et celui des heures creuses. Suivre sa pente. Toujours suivre sa pente. Se laisser porter sans résistance par les mouvements présents. Laisser s’éteindre toutes les idées sur la vie, sur le monde et sur soi. Se libérer des idées sur la liberté et la sagesse. Sur l’aliénation et l’ignorance. Etre au-delà de la liberté et de la non liberté. Au-delà de la sagesse et de l’ignorance pour enfin être libre. Libre des idées, libre du personnage, libre du monde et des mouvements. Etre à l’écoute de ce qui est là. Et laisser faire… toujours laisser faire…

 

 

Un mot. Un souffle. Le silence. Un arbre. Le vent. Et la poussière. Une étoile au loin. Et la lampe sur la table qui éclaire la pénombre. Les nuages. Le désert. Et les cités surpeuplées où s’agglutinent les hommes. Les orages. La brise légère. Les oiseaux et l’océan. Le ciel intact. Et le monde au creux de ma main qui jamais ne s’apaise des miettes qu’on lui jette. 

 

 

Les ports. Le large. Les bateaux. Les bastingages qui ne protègent jamais du vide. Et l’appel de la vie océane qui n’effleure jamais la tête des passagers sur les passerelles des usines à croisière en partance pour les tropiques. La terre. Les villes. La campagne à perte de vue. Les forêts denses et les clairières. Et l’infini du ciel que ne voient jamais les passants trop pressés de venir à bout de leur itinéraire. Les collines. Les plateaux et les montagnes. Et les cimes toujours invisibles pour les habitants retranchés dans les plaines.  

 

 

Habitant d’aucune contrée, on déserte les communautés. On déserte le centre et les périphéries. On déserte les minorités. On déserte l’exil, la relégation et la marginalité. On déserte même la solitude. Et ne reste rien. Nul être pour vous guider ou vous réconforter. Nul lieu pour s’installer. Nul endroit où se poser. Nulle valeur et nulle certitude sur lesquelles s’appuyer. Subsiste alors notre vraie nature. L’être immuable. L’être pur entaché d’aucun support, d’aucun contexte, d’aucune structure, d’aucun lien, d’aucun artifice. L’être indestructible. Le joyau recouvert sous tant de pelures…

 

 

Le cours des choses. L’odieux et admirable cours des choses. Et le regard inouï qui accueille la ronde.

 

 

Le personnage séquestré dans ses limites crie son désir d’Infini. Mais qui l’entend ? L’espace est le seul lieu de l’écho. La source même de la voix. Et le réceptacle de sa lente agonie. Jusqu’à son effacement total. Ondes plates et résonances dans le silence.

 

 

Parmi les oiseaux sifflotants, les bruits du cœur s’emmêlent, se détachent. Pulse le sang, courent les ondes. On demeure sans visage. Et le grand corps nous émeut de ses battements.

 

 

Les 10000 chants du monde ne résonnent plus à mes oreilles. Je marche inlassablement sur des chemins de silence où m’accueillent des myriades d’arbres et d’oiseaux. Je m’assois sur les rochers qui surplombent la plaine où les visages grimaçants se courbent sous le poids des peines. Je n’entends plus ni leurs cris ni leurs pleurs. Je cueille d’une main la rosée et d’un doigt offert au ciel, je m’ouvre à l’Infini. Qui sait que mes pas m’ont déserté ? Que mes mains ne sont plus miennes ? Et que mon visage s’est effacé ?

 

 

A l’ombre du tilleul, je repose. Caché par les haies de bouleaux, les pas me portent vers l’inconnu où les songes n’ont plus cours. L’herbe m’accueille et offre à mes reins une couche délicate. Roi du silence et du rien, vagabond misérable aux yeux des Hommes, mon trône n’est visible que du ciel que si peu habitent. Et mes larmes coulent sans tristesse devant l’indigence du monde qui offre à ses créatures de misérables spectacles dont elles ne se lassent jamais. Je me retourne sur ma couche étoilée offrant mes yeux sans visage à l’Infini dont je me nourris en silence.

 

 

Les têtes s’affichent hautes mais la lassitude a déjà gagné les cœurs. La compréhension est en marche. Ne reste qu’à attendre l’injonction du néant. Et l’appel du vide. La déconvenue des heures devant le silence.

 

 

L’abîme est la plus grande des certitudes. On ne sera plus jamais disposé à édifier le moindre monument.

 

 

Sous nos pas, la brume s’est dissipée. Et l’on s’agenouille au soleil couchant. Aux terrasses du monde, nulle âme. Ivre de ciel et de joie. Les montagnes ont jeté leurs eaux claires sur la plaine. Les crêtes regorgent de lumière. On s’étend sur le sol, les yeux assagis. La vie foisonnante à nos pieds. Un sourire délicat s’esquisse sur nos lèvres ravies. Heure glorieuse et sereine. On baigne dans la tranquillité du jour finissant. Et sur les chemins sans importance, les pas nous portent vers l’instant d’après. Les rochers accueillent l’assise légère. Le regard et l’Infini s’enlacent. Les paysages portés aux nues par la grâce s’effacent et réapparaissent. Les pieds s’évanouissent en silence. Les silhouettes dansent parmi les nuages passagers. L’heure s’éteint. Ni soir ni lendemain. L’éternité cueille le labeur du jour. Et nos yeux fermés se jouent des décors. Arbres, pierres, collines et forêts. Le temps s’est dissipé. On regagnera bientôt sa masure où l’on pourra s’endormir le cœur en paix.

 

 

L’heure s’efface sans crainte. Nous n’existons plus. Mais rien n’a disparu.

 

 

Le monde s’écharpe devant mes fenêtres et une douce mélancolie me retient à l’intérieur. J’aimerais songer à d’autres combats. Mais le supplice est trop fort pour que je m’y résolve.

 

 

Le feu a déjà tout dévasté. Et ne restera bientôt que des cendres. Du vent et des cendres. Du vent et de la poussière. Ainsi donc est la vie.

 

 

Les livres posés sur ma table de travail sont un rempart. Un donjon dérisoire qui ne me protègera jamais de vivre. Ils me donnent l’illusion d’une distance avec le monde. Mais je ne suis pas dupe. Le vivant continue de battre en moi.

 

 

Le monde a perdu son attrait. Quelques visages à présent veillent sur moi. Le monde s’est rétréci à quelques figures bienveillantes. Et à mesure de ce rétrécissement, l’Infini s’est élargi…

 

 

Le ciel est ma patrie. Et les arbres mes seuls frères. Chaque jour, je parcours la forêt à petits pas. La marche est lente et attentive. Ma communauté est végétale. J’ai toujours eu l’âme forestière. Comme mes congénères immobiles, je suis épris d’Absolu et de lumière.

 

 

Entre les jours, je me tiens. Sous la surface des choses, je devine des mondes imperceptibles. Inaccessibles aux sens. Une infinité de mondes parallèles. Des infra-mondes, des supra-mondes, des arrière-mondes projetés par l’esprit insatiable et fasciné par ses propres créations. Un écheveau d’images. Un labyrinthe de représentations où l’organique ne peut s’infiltrer. Un condensé de perceptions et de sensations impénétrables où les paysages et les frontières se traversent en une fraction de seconde.

La nature se vide de sa substance. L’organique se dessèche et se décompose. Des trépas en cascade. Des amoncellements d’os, de cadavres et de molécules. Une recombinaison incessante de matière et d’images.

 

 

Etre là. Simplement. Etre simplement là. Présent…

 

 

Les défaites salvatrices où toujours l’humilité sort victorieuse.

 

 

Rien. Le néant. Le monde a perdu son attrait. Aucune activité ne saurait me tirer de cette léthargie. Je me lasse même des spectacles qui me sont offerts. Les visages autour de moi se sont éloignés. Ne reste rien ni personne.

 

 

Ligoté par les lois implacables du vivant

L’abandon est la seule issue

Les pieds enchaînés et les mains attachées

Seul le cœur peut s’ouvrir

Et l’on pleure après tant d’acharnement

De ne pouvoir s’offrir l’ultime récompense

 

Englué dans notre carcan de pierres

On attend la lumière qui ne viendra pas de notre appel

Mais des yeux baissés vers la terre

Où le ciel pourra enfin nous enlacer avec tendresse

 

 

L’abîme céleste qui nous sauve des heures.

 

 

On ne rencontre en vérité que des ombres. Et des âmes mortes. Et moi qui aspirais à l’Amour. Et à la pureté des rencontres. Des fluides, des poils, des odeurs. Et des âmes retranchées, voilà ce que nous offre l’amour. Et je pleure en silence sur nos cœurs recroquevillées qui n’ont pas su — et ne sauront sans doute jamais — goûter à l’Infini et à la lumière. Pauvres créatures que nous sommes, misérables jusque dans nos élans.

 

 

Le vent noir que l’on respire. Et qui nous étouffe. Et l’aurore nue que nos doigts n’auront qu’effleurée. Et les guerres rouges que nos mains rejettent. Et dont nos yeux nous protègent. Et les ombres diaphanes. Et les cœurs gris qui encerclent notre vie. Et la menace partout du dénuement. Et les ombrelles mensongères des demoiselles d’honneur. Et les noces mièvres des amants dépossédés d’eux-mêmes. Et les suintements de la pourriture dans notre chair. Et les raccommodements ciselés à la hâte. Et les seaux d’excréments répandus sur le sol. Et la folle clameur des foules. Et le silence des morts. Tout cela nous effraie. Nous glace les sangs. Mais nous continuons à vivre, n’est-ce pas ?

 

 

La nudité sublime du monde

Couverte de haillons et de guenilles

Plaies béantes infligées par les hommes

 

Sommes-nous les songes que nous n’avons jamais faits ?

Que nous n’avons jamais osés faire ?

Et la pluie continue de chanter sur les toits d’automne.

 

 

Il n’y a rien à attendre de la terre. Rien à espérer du ciel. Il y a à se dévêtir jusqu’à la nudité du pas. La transparence du geste. L’effacement des horizons. Et leur renaissance originelle. Jusqu’au triomphe silencieux de l’invisible.

 

 

Dans le silence et la solitude. Face à mes livres, je me tiens dans l’impossibilité d’écrire. J’attends la vague qui m’anéantira. Et me laissera hors de moi-même. Au plus proche de ce que je suis. L’écriture viendra après. Elle est accessoire. Toute mon âme cherche à être. Dépouillée de tout artifice, de toute prétention, de toute mémoire, de toute construction. Etre dans sa plus grande nudité.

 

 

Comme un arbre mort sous la cognée du temps. Seul sous le ciel, je me redresse d’un dernier espoir. Dénudé face à l’éternité, les saisons ont perdu leur emprise. Désormais je regarderai le temps m’effacer. Heureux de la terre et de la cendre se poser ici et virevolter là, reprendre leurs assauts pugnaces avant de décliner. Je soulignerai d’un trait léger les transformations. Je serai roi de la terre et roi du ciel. Souverain du temps et des saisons à l’heure de toutes les naissances et de toutes les oraisons. Je m’enivrai de l’humus et du vent, des visages et des cris, des larmes et des sourires qui peuplent le monde. Je serai la clé de toutes les portes. Je serai les univers qui bordent les yeux, je serai le cœur de la mort et des vivants. Je serai leur hébétude et leurs joies sans pareilles. Je serai tous les rêves et tous les songes. Je serai tout ce que l’on ne peut imaginer. Je serai toutes les âmes. Et les dents carnassières. L’amour et la douceur. Et la colère des océans. Je serai le vide et tout ce qui l’habite. Je serai tout. Je serai n’importe quoi. Je ne serai rien. Je serai devenu ce qui existe avant que vous ne naissiez. Avant même que le monde et l’univers ne soient créés. Et je vous attendrai dans ce lieu qui n’en est pas. Venez à moi. A notre rencontre. Et nous serons Un. Vous comprendrez alors ce que nous avons toujours été.

 

2 décembre 2017

Carnet n°55 Le ciel nu

Recueil / 2014 / L'exploration de l'être

La secrète alchimie de la terre et du ciel. Réunis en notre cœur, ils s’étendent en tous points. Axes cardinal, longitudinal. Azur et nadir. Finesse du regard. Flottement des prunelles. Espace fixe. Mouvance des formes. Décret naturel de notre état.

Ce qui nous éconduit des sommets et nous porte au plus bas nous livre à nous-mêmes. Et cette offrande nous révèle le sens de toutes ascensions.

 

 

 Temps incertain

 

Nul ne peut nous dérober à nos pas.

Comment pourrait-on dérouter notre destinée ?

Notre âme-même ne nous appartient pas.

 

 

Nulle part. Voilà notre origine. Et notre destination.

Et nous autres, malheureux, nous nous acharnons

A maintenir le cap en chemin. Quelle désorientation !

  

 

Ni terre ni ciel. De la lumière et des nuages.

Des larmes et des lèvres closes.

Et parfois un rire sans borne.

  

 

Nos songes ne sont que des éboulis à la rencontre des cimes.

Aussi nul de sert de crier sous l’avalanche.

 

 

Les bois de l’homme sont impénétrables.

Un arbre pourtant (une branche parfois)

Suffit à faire naître la hache exploratrice –

L’outil salutaire des dévastations. 

 

 

Dans notre décor d’infortune, nous sommeillons.

Partons donc sur le chemin explorer nos coulisses.

 

 

En bordure de ciel

Des carrières d’étoiles empilées

Où patientent les âmes trop sages

Inintrépides.

 

 

Comme une fleur dans le vent,

Comme un oiseau sur sa branche,

Nous attendons l’heure propice des saisons.

 

 

Nous n’échapperons pas à la rosée sur les pierres du chemin.

 

 

Des ombres. Des lumières.

Et notre main tremblante

Effleure l’interstice

Où sommeille notre vrai visage.

 

 

Dans la trame labyrinthique,

Les créatures cherchent leurs fils.

Dénouent leurs liens jusqu’à l’origine.

 

 

Une mémoire de pierre

Sous le linceul de la terre

Et un bout d’aile déchiquetée

Voilà les parures de l’envol !

 

 

Un cri dans l’aube attend notre bouche.

Une plaine, nos mains tendues.

Un soleil à chaque horizon.

Un espoir de vent.

Et un feu sous notre chair.

 

 

Quand les cieux s’estompent

Les yeux éblouis par le pavé rugueux

Sur l’ineffable marelle des enfants sages

Sautant de la terre au ciel

La craie s’efface sous la pluie

Et les pas cherchent leurs traits

A la saison des rires.

 

 

Les yeux au bord de l’abîme

Et de grands bruits à l’horizon

Appellent la joie à effleurer nos lèvres.

 

 

Les yeux frondeurs sur l’azur

Le front planté d’étoiles

Et les semelles toujours jonchées de gravas

L’horizon s’ouvre aux mains ouvertes.

 

 

Le chemin est un dédale de forêts sombres.

Et l’on s’éreinte à la coupe,

Taillant à la hache

Jusqu’à l’obscur de nos pas.  

 

 

A notre mort, le vent dispersera nos cendres.

Et tous les visages s’éloigneront,

En protégeant leur front de cette poussière.

 

 

Quel œil ne réclame sa braise ?

Et quel homme ne rêve-t-il pas de dessiller sa prunelle ?

 

 

Sur cette terre, nul horizon. Et au fond du ciel, nul asile.

Mais une échelle à chaque pas. Et toutes les passerelles du chemin.

 

 

Jetons nos paumes et notre orgueil de parvenu.

Laissons le destin nous dévêtir

Et nous initier à la traversée sauvage des défroqués.

 

 

Ouvrons nos mains au mystère.

Et la lumière se glissera entre nos lèvres.

 

 

Un instant

Comme un éclair

Brise la brume

Et le ciel gris des temps incertains.

 

 

Semelles de vent

Et bouche ouverte au soleil

Un pas encore dans l’abîme

Et l’autre déjà ruisselant de joie.

 

 

Derrière la transparence des formes,

L’essence unique se révèle.

 

 

Sans terre ni ciel.

Un pas après l’autre.

                  

 

Un monde sans limite,

Voilà notre horizon.

Et notre regard.

 

 

A chaque pas, défaisons les frontières.

Sans nous soucier des empreintes qu’effacera le vent.

 

 

Les mots défaillent. Se succèdent d’abîme en perte.

Et sur la chair se resserre la peau des vivants.

 

 

Nos silences apaisent les tourments de la terre.

Les derniers soubresauts du sol à l’agonie.

Et nous nous découvrirons bientôt orphelins.

 

 

Nous attendrons l’heure propice qui brisera nos sortilèges.

Comme les pierres sous le soleil. Les fleurs sous la neige.

Impatients d’éclore de la gangue qui ensommeille nos siècles.

 

 

  

Sous le ciel

 

Le ciel abrite un secret

Un monde englouti qui ne peut disparaître

Une foison d’orchidées

Pour les sages et les innocents

Un butin d’étoiles qui se tissent en silence

Depuis la nuit des temps

Et qui éclosent chaque matin à l’aube

Pour tous les yeux vierges de la terre.

 

 

Nul abri où poser ses paupières

Nul autre abri que la lumière

Mais des larmes coulent sur nos joues.

Comme le sable recouvre les oasis.

 

 

Etre Présence

Là simplement

Pour l’Autre

A Soi-même

Y a-t-il plus belle offrande ?

 

 

L’éternité

Attend et scrute

L’insaisissable dans nos mains.

 

 

Rien  que ces instants

Qui s’évanouissent dans le vent.

Les jours comptés

Et les tours jetés

Aux orties du temps.

 

 

Au cœur de toute gravité

Trône en secret la déconsistance

Sur son lit de vent

Le sourire aux lèvres

Et les ronces à ses cheveux

Où s’écorche le souci des jours

Qui passent.

 

 

Y a-t-il un cœur derrière chaque ombre ?

Un cœur qui palpite à l’unisson des étoiles ?

 

 

Brisons le vent — cette icône de glace —

Pour y glisser nos yeux incandescents.

 

 

Un bel olivier poussera bientôt sur le terreau de nos craintes.

Et sur son ramage s’envolera une colombe.

Un ciel transparent jusqu’à ses pieds,

Traversé par quelques nuages indolores et innocents qui nous surprendront.

Et que nous accueillerons d’un sourire — les lèvres entrouvertes —

Comme une averse rafraîchissante.

 

 

Une terre sans miracle. Tel est notre oasis. Et notre mirage.

La délivrance de notre désert. Et de nos espoirs.

 

 

Il pleut toujours des pierres sombres et des éclats d’étoiles.

Des graviers de lumière aux pieds de nos grottes obscures.

 

 

Des simagrées sous la roche.

Comment échapper à l’aparté monstrueux qui leste les peuples ?

 

 

Sous la glace immonde des corps coule la sève.

La source des visages innocents.

 

 

Sous la peau

Des continents à explorer

Le forage léger des transparences.

 

 

Seul, un regard en haillon s’émerveille.

Et se réjouit de la beauté des étoiles.

 

 

Effaçons nos refus.

Et tous les obstacles disparaîtront.

 

 

Des fossés de complaisance. Et des ornières savoureuses.

Des pas et des impasses. Un territoire à creuser.

La matière de tout voyage.

 

 

Chaque cœur se disloquera ainsi sous la cognée du vent.

Et s’émiettera en pierres. Et sous les ruines, mille cimetières s’évanouiront.

Et nous pourrons enfin marcher ensemble parmi les fleurs

Dans des allées d’herbes folles. 

 

 

L’origine des jours n’attend aucun siècle pour éclore.

 

 

La déroute est en définitive le seul chemin.

L’unique voie de la délivrance. 

 

 

Le vent. Une rose. Et tous les pétales, un jour, éclatent au soleil.

 

 

 

Chemin

 

Nulle embellie à notre sourire

Les gestes fugaces s’estompent

Ne restent qu’un craquement sans apparat

Quelques crachats sur le sol rugueux

Et l’horizon toujours lisse derrière la vitre.

 

 

De l’entrave naît le ciel. Que l’on peut déjà entrevoir entre les barreaux.

 

 

Pourquoi se défaire de nos malles

Dont le contenu nous ignore

Ce trésor que nous délaissons avec superbe

Pour des guenilles d’or et de diamants ?

 

 

Des pas trop lourds sur la terre. Ainsi marchent les hommes dans leur sillon.

Croyant suivre l’azur derrière leur horizon. Espérant l’atteindre. Et le reculant toujours.

L’azur survient par mégarde. Il ne peut se dévoiler aux prunelles laborieuses et avisées. Et aux pas geignards.

Il se révèle à ceux qui se sont délestés jusqu’à l’os. N’épargnant ni leur chair. Ni leur âme.

Allant jusqu’à froisser tout espoir de lumière et qui avancent tremblant dans le noir, effrayés de tant folie, poussés et guidés à chaque pas par une folle nécessité…

Errant ici et là sans repère, sans certitude, sans identité ni destination. Rien. Et libres jusqu’à l’ivresse.

 

 

Le peuple des berges à l’horizon plat. Et fixe. A l’ascension accumulative.

Et le peuple des flots. Toujours à la dérive. 

 

 

Ayons l’audace de nous laisser surprendre.

D’aller les yeux fermés vers notre  enfantement.

Ne craignons ni les découragements, ni les infortunes.

Ni la folie, ni le désespoir. Laissons-nous traverser.

N’ayons crainte de nous fourvoyer.

Au fond des ornières. Au fond des fossés,

Des ailes nous attendent.

Pour nous envoler vers le fol azur

Qui s’impatiente de notre venue.

 

 

N’écartons rien. Remplissons-nous de tout ce qui se présente.

Et tout s’effacera. Notre dénuement sera alors richesse.

Invitant tous les possibles dans nos mains ouvertes.

 

 

La grande âme du monde s’ouvre à notre besace

Et la voûte étoilée invite nos pas au sentier éternel

Prenons garde en chemin de ne rien amasser.

 

 

Le sang des prémices à l’orée de notre bouche.

Les chants du monde recouvriront bientôt notre voix.

Ayons le cœur assez large pour nous ouvrir à la sente qui nous précède.

 

 

Murs de briques ou de vent.

Mais quelle différence pour nos mains nues ?

Et notre chair écorchée ?

 

 

Pourquoi s’enlaidir de tant de parures alors que la grâce se porte en haillons ?

 

 

Le monde offre ses mille spectacles.

Et nos yeux demandent vers quelle folie se tourner. 

Le pas innocent. Et la semelle toujours complice.

Nulle marche n’est épargnée.

 

 

Quelques étoiles dans la poussière.

Et le firmament naîtra bientôt sur l’asphalte.

 

 

Sans destination, les pas découvrent la direction.

Sans intention, les gestes deviennent justes.

 

 

N’imitons jamais les sages.

Cheminons en notre compagnie.

 

 

Les frontières ne sont que le commencement d’un autre territoire.

Et leur absence appelle l’infini. Le point ultime du monde

Qui devient le lieu de la présence.

 

 

Les frontières réclament leur part d’ouverture.

A-t-on déjà imaginé une ligne sans espace ?

 

 

Oublions les promesses de l’azur.

Négligeons les empreintes que nous nous sommes efforcés de conserver.

Ôtons toutes nos armures. Et marchons nus.

 

 

Réclamons notre dû de tendresse et d’alcool. Et partons.

Abandonnons nos parcelles et nos barricades. Nos terres infertiles.

Délaissons nos fauves et nos molosses carnassiers, gardiens des temples d’antan.

Oublions les joutes d’autrefois. Et les querelles où nous excellions.

Oublions l’amertume. Négligeons les accaparements.

N’engrangeons que les forces du vent. Et allons. Libres, nous serons.

 

 

Abandonnons les mains à leurs supplications.

Abandonnons les visages à leurs grimaces.

Soyons dignes sous l’averse. Et honorons les chemins que nos pieds nus traversent.

 

 

Nous sommes l’appel. Et le nom que nous avons cherché sur les chemins.

Le sens que nous avons creusé de nos mains. Le regard qui nous contemplait

Lorsque notre faim fouillait parmi les livres et les visages sans grâce.

 

 

Ne singeons pas les sages.

Ne jugeons point les imbéciles

Œuvrons à notre regard avec cœur

Et à notre cœur avec ardeur

Prodiguons-leur soins et tendresse

Accueillons leur pusillanimité

Et leurs battements étroits

Ôtons leurs voiles

Avec patience

Et marchons sans prudence

Notre pas lucide s’aiguisera.

 

 

Le ciel n’attend aucune offrande de la terre.

Mais des gestes justes. Une main habitée par le regard. Et la présence.

 

 

Nulle étoile ne peut satisfaire notre ciel.

Mais l’azur s’étend déjà à nos pieds.

 

 

Oublions la consistance du regard. La cohérence des pas.

La solidité du monde. Et abandonnons-nous au chemin

Qui scellera la victoire sur toutes les débâcles.  

 

 

Sur la terre mille soleils ne pourront éclore

Muette demeurera l’ardeur du printemps

Entre nos paupières mi-closes

Eructons nos songes

Défaisons l’abîme de nos pieds écorchés.

Pour fouler le territoire.

 

 

L’immobilité au bord de tous les chemins nous guidera. Et égayera notre  pas.

 

 

 

Humilité

 

Tant de traversées rieuses. D’âpres saisons.

De déserts. Et de sols chargés de passants.

Tant de pas harassants. De soleils inhabités.

De larmes versées. D’horizons parcourus.

Et de bouches agrippées.

Tant de mains tendues. De poings serrés.

Et la danse incessante des pas.

Cette danse s’arrêtera-t-elle un jour…?

Et pourrons-nous trouver notre vrai visage avant le terme du voyage ?

Embrasser nos lèvres cachées dans les replis de l’azur ?

 

 

Tant de visages. Et de supplices émiettés.

Tant de rivages. Et de contrées. De pas hébétés sous l’averse.

De rires gorgés de soleil. Tant de ciels parcourus.

D’égarements et d’impasses. D’averses et de saisons froides.

Tant de silence. Et d’espace. D’amassements et d’encombrements.

Reconnaîtrons-nous notre sourire parmi les silhouettes sans grâce

Qui s’affolent au seuil de l’abîme ?

Dans quel horizon avons-nous dissimulé notre mystère ?

 

 

Des orages. Et des soleils.

Et nous voilà baignant dans l’azur pluvieux.

Parmi les arcs-en-ciel. Dans l’éphémère manifesté.

 

 

L’épure des cimes. Le recouvrement des gouffres.

L’aplanissement des circonstances.

Et voilà le terrain dégagé, le pas ouvert aux évènements.

 

 

Derrière l’ombre oscillante

Le silence

Patiente

Et scrute

Notre présence.

 

 

A l’orée du cercle, l’œil s’éternise. S’égare. Se remplit.

S’étiole. Oublie les frontières. Se réjouit déjà de l’espace.

 

 

Un ciel s’efface toujours pour un autre plus vaste.

 

                   

Un pas sur les pierres

Une marche de sable jusqu’à l’horizon

Et les silhouettes d’argile

Attendent leur émiettement.

 

 

Dans la terre se déniche le ciel. Et inversement.

Le ciel ne peut se trouver en levant les yeux.

Mais en les abaissant au plus bas.

Alors le ciel s’ouvre et descend.

Le cœur s’approfondit et se creuse.

Et aussitôt le ciel s’y engouffre. Et l’âme s’élève.

Pour enfin vivre à hauteur d’homme.

 

 

Au cœur de l’antre

Se dévoilent les origines

Qui façonnent le chemin

Et la promesse d’une aube moins épaisse.

 

 

Ne cherchons rien.

Ecoutons et laissons-nous atteindre.

 

 

Les ombres en déroute.

Comme une armée vaincue par un seul combattant :

Le ciel engouffrant toutes les peurs et tous les assauts. Toutes nos vaines tentatives. 

 

 

La nudité est la seule gloire.

Le signe et la parure de la vraie richesse.

Le seul costume digne d’être porté.

 

 

L’œil est l’entrée en matière.

Porte où se meurent les substances.

Territoire où se révèle l’essence. 

 

 

On ne peut dessiller les yeux de force.

Ni à coup de décret. Ni à coup d’arguments.

Mais laisser entrevoir un autre regard.

Un regard qui prend sa source à l’origine.

 

 

Au seuil de l’aube sans nom. Quel soleil pourrait briller plus fort ?

 

 

Nulle rive à atteindre. Nul territoire à conquérir. Nul ordre à légitimer.

Mais un espace à accueillir. Et se laisser désencombrer.

Renoncer au désir même de nudité.

 

 

Notre destination : l’oubli et l’effacement. Le terreau des beaux jours.

 

 

La secrète alchimie de la terre et du ciel.

Réunis en notre cœur, ils s’étendent en tous points.

Axes cardinal, longitudinal. Azur et nadir.

Finesse du regard. Flottement des prunelles.

Espace fixe. Mouvance des formes.

Décret naturel de notre état.

 

 

Ne faisons allégeance qu’à nous-mêmes.

Et nous deviendrons serviteur de tous.

 

 

Ouvrons-nous à la présence.

Et laissons-nous habiter.  

 

 

 

S’abandonner

 

De l’innocence naît la candeur du jour.

 

 

En tous points les brumes obscures se dissipent. Laissant libres les perspectives.

 

 

Il y a derrière la lune un horizon sans tenaille.

Et à son seuil, des lèvres saillantes qui avalent et recrachent.

Une bouche béante qui laisse toujours neuf. Et sans blessure.

Et sur terre, quelques doigts maladroits qui la désignent

Et des myriades de prunelles hagardes

Qui regardent (partout) sans comprendre…

 

 

A la saison du désamour, ne nous précipitons pas vers notre refuge.

Nos allées charbonneuses. Nos contrées scintillantes.

Faisons face de toutes nos lèvres.

Et le baiser nous sera donné.

 

 

Nul abîme à parcourir.

L’abandon est le seul franchissement.

 

 

Les arcs-en-ciel se jouent de nos rêves.

Et nos ponts n’enjambent que des rives mortes.

De la terre, le ciel n’est accessible qu’à l’innocence.

Aux lèvres émues et silencieuses.

Ebahies par tant de splendeur.

 

 

La terre se couvre de mirages quand nous implorons le ciel.

Emiettons nos grimaces. Et la grâce nous sera accordée.

 

 

Retirons-nous de tout orgueil.

Revenons au centre de tous les cercles.

 

 

Ne pressentons-nous pas le manque qu’il nous faudra combler à mains nues ?

 

 

Il n’y a qu’un seul sillon à creuser. La pente où la vie nous a placés.

Mais pourquoi nous a-t-elle posés là ? Renonçons à comprendre.

Et avançons. Suivons notre sente.

La réponse se dessinera jusqu’à l’extinction de toutes questions.

 

 

Mille gestes ne pourront nous sauver de notre désarroi.

Mais un regard saura nous éclairer.

 

 

Ne clamons pas notre innocence.

Ecoutons et devenons silence.

 

 

Ce qui nous éconduit des sommets et nous porte au plus bas nous livre à nous-mêmes.

Et cette offrande nous révèle le sens de toutes ascensions.

 

 

Au cœur du labyrinthe, une forêt de palissades.

Et un horizon dévoilé derrière toutes les brumes.

 

 

A qui goûte le simple, un banquet de saveurs orgiaques est offert.

 

 

Et dans notre main du sable que nous avions pris pour de l’or. 

Aujourd’hui, nos yeux regardent nos doigts avec reconnaissance.

Nous savons à présent où se lève le soleil.

 

 

Il nous plairait de toute évidence d’estomper les siècles.

De renoncer à toutes ces orgies de temps où l’on s’ensommeille.

Pour nous éveiller à la rosée toujours fraîche des heures.

 

 

Parsemons nos allées de beauté.

Et les fleurs pousseront sur les terres les plus arides.

Parsemons nos prunelles de beauté.

Et nous verrons partout fleurir le monde.

 

 

Il n’y a de grimaces hideuses. Mais une souffrance parfois terrible

Qui défigure le visage des hommes.

Que leur âme ne prend encore la peine de soulager.

Il suffirait pourtant de 3 fois rien pour les convertir à des lèvres tendres.

A une bouche aimante pour apaiser leur peine.

Et ce trésor est en eux-mêmes encore enfoui sous la tristesse.

 

 

Exténuons les siècles jusqu’au firmament des âges.

Jusqu’aux horizons maudits des perspectives.

Dégorgeons les panses. Déversons les entrailles des mille projets terrestres.

Acérons l’œil neuf qui patientait sous les prunelles carnassières.

Et allons libres des entraves qui obstruaient les chemins !

 

 

Abandonnons le faire. Délestons-nous des identités.

Faisons face à l’insupportable nudité. A l’inconfort de ne rien être.

Et nous verrons briller au fond de notre cœur notre vrai visage. Notre seule réalité.

Alors nous pourrons reprendre le faire et l’habiller des multiples masques qu’imposeront les situations.

Mais nous aurons suffisamment fréquenté la peur et la joie,

Regardé dans les yeux la vérité pour s’en amuser et accueillir ce qui se présentera.

 

 

Il faudrait savoir habiter ses pics comme ses abîmes.

Et abandonner ses forteresses à leur gardien invisible.

Pour régner sur le royaume de l’innocence.

 

 

On ne peut rien dire du Tout.

Mais moins que rien.

Il y a le silence.

 

 

Le vide des cieux couchants

Et l’innocence de l’aube

Déchargée de tout horizon

Défont le sens de toutes promesses

Les ruses et les élaborations de l’esprit trop soucieux de certitude

Avide de guider le hasard et les circonstances

Vers des contrées plus sûres et moins rebelles

Moins rétives à la raison

S’affairent à parer à toutes éventualités

A tout surgissement de la matière

Dans le vaste jeu du monde

Au contraire, il faut nous dessaisir de tous accaparements de territoires

De tous assujettissements des êtres

Que l’on empile — de façon si vaine et coutumière — comme des trophées

Symboles de nos chimériques victoires

Sur la perte et l’impossible deuil de nos limitations

Il nous faut au contraire détrôner

Toutes solidifications des frontières toujours souveraines

Aux pays des contes où les mythes

S’étendent et s’étalent jusque dans les profondeurs de l’obscurantisme

De toutes les croyances profanes et sacrées — toujours encensées par le monde

De tous les dogmes auxquels se prêtent et se livrent les hommes

Soumis à l’enchevêtrement des conditionnements

Ainsi seulement pourrons-nous être sauvés de tous espoirs

De tous les chemins de sacrifices et d’artifices

Pour nous enfoncer dans une vérité insaisissable

Aux enjeux métaphysiques d’une puissance inédite

Nous vouant et nous ouvrant aux territoires les plus infréquentés

Où les risques demeurent nuls et sans prise sur les destins

Où la gloire et les riens se chevauchent et s’emmêlent avec fantaisie et sans certitude

Où l’intelligence et l’amour brillent d’un feu jamais à l’agonie

Tirant leur source d’une étincelle jamais née

Aussi vive et impénétrable que la lumière sans origine

Qui offre au monde une présence infiniment tangible.

 

 

Un ciel sans combat. Témoin de l’hostilité qui habille la terre. Un ciel si pur.

Contemplant tous les costumes et les parures de ceux qu’il a engendrés,

Habillant et déshabillant tous les personnages. Vêtements si changeants.

Spectacles infinis d’un seul regard. Toujours unique.

 

 

Nos rêves d’azur ne sont rien. Qu’un songe limité dans l’espace que nous sommes.

Mirage de tous les escaliers. La corde raide demeure invisible et mystérieuse.

Et vers son faîte, on se hisse déjà.

 

 

De piège en piège, la lumière captive réapparaît, plus intacte qu’au premier jour.

 

 

Délices des mains, coureuses de surfaces !

Délice des pieds, arpenteurs d’hémisphères !

Et nul être pour savourer, se délecter de tant de paysages !

Un regard unique et enveloppant qui dé-cisèle nos discriminations !

Rien ! Ou presque ! Alors que reste-t-il ?

 

 

Le monde s’efface d’un trait d’irraison. Ou de sagesse.

Tout s’émerveille de beauté. Dans la solidité du regard.

Et la précarité des yeux.

 

 

Nous ne sommes pas ce qui se meurt.

Nous sommes ce qu’il reste lorsque tout a disparu.

 

 

 

Au cœur du silence

 

Une pierre, du sable.

Une montagne, un chemin.

Mais où allons-nous de ce pas impatient ?

 

 

L’ailleurs serait-il plus propice qu’ici ?

Plus tard serait-il mieux que maintenant ?

Que cherchons-nous à fuir ?

Qu’espérons-nous qui ne soit déjà ?

 

 

Nous qui nous enorgueillissons, qu’avons-nous réalisé d’inoubliable ?

 

 

Qui voit le labeur des astres sur notre destin ?

Qui voit la rosée du matin ? Et la brume sur la montagne ?

Qui voit le vol des oiseaux dans le ciel ?

L’eau des rivières qui s’écoule éternelle ?

Et les nuages dans l’espace sans âge

Qui offre un escalier à ceux qui restent humbles et émerveillés ?

 

 

Observons ce qui vient, ce qui va.

Où sommes-nous, nous, qui ne bougeons pas ?

 

 

Il n’y a rien à désirer.

Rien ne manque. Tout est là.

 

 

Le silence est le seul poème.

 

 

Autorisons-nous à vivre.

Soyons simplement vivant.

 

 

Allons vers ce qui nous porte.

Ne résistons pas. Soyons comme l’eau.

Suivons notre pente naturelle.

 

 

Nous ne sommes ni ceci. Ni cela. Nous sommes.

 

 

Au cœur du monde, le silence.

Au cœur du silence, la paix.

Et dans la paix du cœur, la joie éclaire le monde.

 

 

Le trésor est dans le regard. Toujours.

Jamais sous le pas. Ni dans la main.

 

 

Le vent s’engouffre par la fenêtre du hasard. Du moins le croit-on ?

Seule la nécessité tient lieu de socle. Le jeu n’est pas celui du hasard.

Mais du merveilleux et de la joie qui invitent à la célébration de l’Existant.

Reflet de l’Unité commune.

 

 

La serpillère dans le seau.

Le bol dans l’évier.

Et la main qui dessine le jour.

 

 

Le silence de la maison.

Les bruits du monde à la porte.

Et le recueillement de nos mains sages.

 

 

Les saisons passent sans bruit.

Nous nous tenons à côté du vent.

Sous l’étoile qui nous observe.

 

 

Couchés dans l’herbe, nous regardons les arbres chanter l’univers.

 

 

Nous sommes seuls avec l’Infini qui se penche vers nous.

 

 

L’heure devient féconde dans le silence.

 

 

La brume sur la montagne se dissipe au soleil.

Comme nos rêves disparaissent à la lumière.

 

 

Retirés des affaires du monde. Et présents à l’univers.

 

 

Au soleil éternel et au ciel immuable, les nuages disent qu’ils passent.

Repasseront demain peut-être… Un jour sans doute…

 

 

Seuls parmi les étoiles on s’endort. Seuls parmi les herbes on se repose.

Seuls sous la pluie on danse. Seuls dans le vent nous sommes.

Et le monde s’agite dans notre paix.

 

 

La fleur se soucie-t-elle de son logis ?

L’étoile s’inquiète-elle d’éclairer le voyageur ?

Le silence est leur demeure. Et la paix leur seul labeur.

Au sein du ciel demeure l’immensité.

 

 

Les nuages et le vent accompagnent notre course lente.

Qui nous attendra ce soir ? Nous saluerons le soleil de notre couche.

Et les branches du cerisier en fleurs suspendues à la fenêtre.

 

 

Le ciel et la terre se rencontrent au loin.

Et sous les pas de celui qui marche.

Un jour vient le temps où l’on pose son bâton

Pour s’assoir sur la mousse verte de la forêt,

Près du cabanon que l’on a bâti à la hâte

Dans une clairière isolée

Où seuls le vent, les oiseaux et les herbes sont invités.

 

 

Où avons-nous posé le bâton qui guidait nos pas ?

Nous l’avons oublié sur les chemins qui nous égaraient.

Nous nous sommes assis dans l’herbe pour enlever nos bottes fatiguées

Et nous étendre parmi les nuages passagers.

 

 

A présent, nous marchons où le vent nous pousse.

Les saisons sont les mêmes partout.

 

 

Simple. Toujours plus simple devient la vie.

Un thé. Un bol de soupe. Le linge qui sèche au vent.

Le printemps sur la montagne. Les arbres de la forêt.

L’herbe des chemins. Un rocher pour regarder le ciel.

Notre vie s’efface dans l’Infini.

 

 

La vaisselle s’égoutte dans l’évier.

Les feuilles des arbres dansent dans le vent.

Assis sur la terrasse, nous écoutons le soir tomber.

 

 

Le piaillement des oiseaux et la serpillère sur son fil

Participent aux mêmes chants du monde.

Au même mouvement de l’univers qui naît et s’éteint dans le silence

Que notre cœur abrite avec humilité.

 

 

La lune dans le ciel nous regarde.

Et nous n’avons aucun mot à lui offrir.

 

 

Le temps s’est étendu à nos côtés.

L’heure s’est allongée au creux de notre main.

Nous reposons en silence à l’écart des affaires du monde.

 

 

Nous vivons ce que le destin place devant nous.

Un jour, il offre. Le lendemain, il retire.

Nous le laissons choisir les paysages.

La direction et les pas sont toujours justes.

 

 

N’effaçons rien.

Laissons tout se défaire.

 

 

Vivons simplement au plus proche  — dans l’intimité même — de ce qui est.

 

 

Le monde pèse beaucoup plus lourd que le ciel dans nos soucis.

Et qui sait aujourd’hui que nous avons le cœur si léger ?

 

 

La terre sacrée est celle où nous nous tenons.

Et le ciel n’est pas devant nos yeux.

Nous sommes l’Infini qui contient et enveloppe le ciel et la terre…

Nous sommes l’Infini qui accueille le monde. Et l’éclaire. 

 

2 décembre 2017

Carnet n°54 Ô mon âme

Journal poétique / 2014 / L'exploration de l'être 

Etre poète, c’est balbutier le monde. Et un monde inconnu. C’est tenter de dire dans une langue inexistante un pays que l’on ne connaît pas. C’est être muet face au commun. Face aux yeux et aux oreilles qui ne savent voir et entendre. Qui ne savent deviner les murmures et les continents sous la langue et les paysages. Etre poète, c’est ne pouvoir dire. C’est habiter un pays infréquenté que l’on ne parvient à décrire. A expliquer. C’est une impossibilité — une incapacité — à habiter le monde des hommes. C’est être blessé à chaque instant par leur grossièreté, leur prétention et leur ignorance. Etre poète, c’est être en chemin entre l’humanité et le ciel souverain. C’est être exilé de tous les royaumes. C’est une errance perpétuelle. C’est habiter une profondeur — une blessure — secrète que l’écriture tente de rendre lumineuse. Douce et lumineuse malgré l’inexistence du poète. Sa terreur et sa souffrance. Etre poète, c’est perdre toujours. Sur tous les terrains. Sur celui des hommes et celui qui est exploré, défriché, toujours mal connu. Etre poète, c’est un aveu d’échec et d’impuissance. C’est quelques pas sans gloire vers un pays inaccessible. C’est un besoin d’abandon auquel on ne parvient pas… 

 

 

Le vent noir des malheurs tourne au-dessus de nos têtes. La lumière blafarde des jours nous enterre. Et l’or des visages apaise nos cris.

 

 

Longtemps la boue s’est hasardée sous mes pas. Et est montée la semence. Statufiée. Gangue de terre. Protégeant du vent et des horizons. Planté dans un décor de pierres, j’attends la pluie. La dissolution. Le grand remède à la pétrification.

 

 

Dans le creux de ma main meurt la colombe. La paix que l’on avait confiée à mes doigts malhabiles. Trop grossiers pour la laisser s’épanouir au soleil. Et s’ouvrir au ciel. Je l’ai écrasée de trop de volonté. Etouffée dans ma poigne trop ferme.

 

 

L’aube s’est jetée en silence à mes côtés. Et je n’ai su la reconnaître. J’avais espéré un silence nu. Une paix sans chair. Des âmes sans silhouettes. Je n’ai su voir dans l’apparition le reflet de moi-même. Mais des songes et des étrangers barbares qui m’emmenaient au loin. Dans leur royaume de hache et d’opium où je n’ai jamais su vivre — où je ne saurais jamais vivre. Aucun nuage ne m’a porté au-delà des crêtes. Par-delà les rives. Et j’oscille aujourd’hui entre les royaumes des morts et des vivants. Loin de l’aire des sages que mon cœur a tant cherchée.

 

 

Il n’y a rien à attendre de la terre. Rien à espérer du ciel. Il y a à se dévêtir jusqu’à la nudité du pas. La transparence du geste. L’effacement des horizons. Et leur renaissance originelle. Jusqu’au triomphe silencieux de l’invisible.

 

 

Comme si les semences de l’âme s’asséchaient à force de désespérance… Etranger au monde des hommes et exilé du royaume céleste. Trop mûr pour l’un et pas assez pour l’autre. Condamné au pas fébrile et à l’errance alors qu’il faudrait se jeter sans crainte ni espérance dans les paumes de l’Absolu.

 

 

La terre se métamorphose tantôt en chair. Tantôt en tombe. Et mon âme peine à s’élever. A goûter le ciel nu. Ses reflets et ses replis innocents que je juge encore trop ombrageux pour m’y glisser sans crainte. Terrorisé déjà par les blessures chimériques qu’ils infligeront à mon âme maladive et fragile. Comme si l’horizon bordé de songes me contraignait à l’immobilité. M’enlisant jusqu’au front dans un vide imparable et terrifiant. Triomphal.

 

 

La maléfique maladresse de mes pas…

 

 

Rien ne pourrait me satisfaire. Excepté l’Absolu. Le monde relatif est à mes yeux un piètre réconfort à la misère de vivre. Je ne peux m’en contenter. Mais je ne parviens encore à le vivre depuis le plan de l’Absolu.

 

 

Instants brefs de la rencontre où l’on ne décide d’aucun passage. Passerelles surplombant les tunnels. Inaccessibles. Saccage des territoires. Défaite des horizons. En un seul point minuscule, concentré, surgissent les rêves. Et chutent les chimères en cascades véhémentes. Et se défont les idées. Et tombe la tête blessée, déjà bancale de tant de souvenirs. Et s’étiole le regard perdu au dehors et blessé au-dedans. Et la bouche se mue en horizon muet. Et les jambes prennent la fuite à travers les chemins déserts. Et les mains se heurtent aux parois invisibles du réel. Et les paumes saignent. Et les pieds ensanglantés foulent les aspérités des sentiers, cherchant refuge dans les anfractuosités de la roche. Et l’âme se disloque sous la butée des charges. Des silhouettes d’un monde trop occupé à s’extraire des rencontres, à s’abstraire dans d’insipides délices qu’il prend pour des extases. Et le cœur étouffe d’inamour et d’incompréhension. Et l’on meurt d’asphyxie et de terreur aux portes de l’abandon. Les yeux sauvages n’auront réussi à nous apprivoiser. L’âme barbare à peine éraflée par les jours poreux. Nous n’aurons survécu au désastre. Trop frileux pour se dévêtir et sauter sans crainte dans l’abîme vertigineux qui entoure la chair. Condamnés aux tâches rébarbatives, à la hache dévastatrice et aux hécatombes.  

 

 

L’ombre du feu me consume. Un silence de lune à la porte. Et les cendres de l’horizon. Et la braise rougeoyante du cœur. Je me réfugie en surplomb. Témoin immobile et impuissant de la dévastation qui ravage les paysages. Fumée intérieure. Brouillard du dehors. Je ne suis plus qu’un œil fatigué de voir. Un bandeau noir obstrue ma vue. Et les chemins des hauteurs ne sont que sensations. Matière et sens livrés à leurs fonctions organiques. Trivialité du corps. Esprit clos. Macération des idées. Pensées muettes. Et l’odieuse obligation de vivre bâillonnée. Voué à l’incertitude terrifiante du prochain pas.  

 

 

Le soleil épineux écorche la chair du monde. Les abris de pierres sont dérisoires. Les grottes, les trous dans la terre deviennent refuges provisoires pour le peuple nomade. Et l’on s’enfonce au-dedans pour échapper au gouffre qui guette partout. Et l’on escalade des montagnes de cendres, guidés par l’unique mât résistant — l’axe impassible qui attend notre ascension immobile et dont les yeux sages et azuréens disent qu’il ouvre sur le ciel guérisseur et sans limite.

 

 

Et derrière le masque impassible des hommes, j’entends les cris faméliques. Le flétrissement de la chair. Le resserrement du cœur et de la peau. La grande misère du monde est là. Recouverte. Dévastée par le craquellement des vernis de surface. Plaies béantes et à vif d’où suintent le sang et les larmes. Fluides premiers des hommes. Substances originelles de la matière que le grand vide lumineux et éclairant enveloppe et compose en leur prêtant vie quelques instants.  Nul — pas même le regard impérissable  — n’échappe à la fugace existence de la matière. Et à son éternel renouvellement. 

 

 

Une ombre parfumée a surgi à ma fenêtre. Je lui dois la clémence du jour.

 

 

Dans quel songe s’est égaré le ciel pour faire naître la tempête ? Et si l’orage et les éclairs n’étaient que dans les yeux, laissant l’innocente et éternelle candeur céleste accueillir toutes les chimères — toutes nos constructions de pacotille ?      

 

 

De l’autre côté de la terre, ils ont bâti des tours. D’immenses gratte-ciels. Et dans mon cœur, un édifice infranchissable attend les coups de masse du monde. A ma fenêtre, je vois déjà une armée de bulldozers avides de gravats et de déchets. Et je songe à l’autre côté de la terre que le désert recouvrira bientôt. A la destruction partout en marche qui balaiera toutes nos constructions — tous nos édifices — le fragile foisonnement du vivant qui emplit notre néant.

 

 

Le souffle obséquieux du monde et ses relents de violence contenue. Comme inhibé dans sa puissance par la présence de l’Autre, grand catalyseur du reflet de soi-même qui nous est renvoyé…

 

 

Les pierres du vent ne sont pas aussi dures que les roches de la terre. Sœurs jumelles pourtant. Clones identiques vues de deux ailleurs, pour l’instant inconciliables. Tant que le corps persiste. Tant que le cerveau se jette sur toutes choses. Superposables pourtant — je le sens — unifiables par un regard ajusté aux deux perspectives. Par un regard accueillant et pur. Soucieux de tous les plans.

 

 

Une âme ankylosée. Et fragmentée. Le soleil ne se lèvera plus. Il ne pourra désormais plus réchauffer mon âme frigorifiée. Gelée par tant de vents dévastateurs. De terres inhospitalières. Ô mon âme larmoyante, quand sècheras-tu au bonheur d’exister, aux délices du vivant ? Pourquoi m’as-tu abandonné ? T’ai-je laissé trop seule ? T’ai-je trop longtemps livrée aux griffes du monde ? Aux dents des loups ? Ô mon âme, réponds-moi ! Reviens vers moi ! Reviens m’habiter pour te goûter et poursuivre la route jonchée d’ossements et d’étoiles ! Allons de notre pas joyeux vers le ciel qui attend notre venue !

 

 

Je reste en amont de moi-même alors qu’il faudrait embrasser toutes les vallées. Partir du plus bas. Et laisser l’azur se superposer à tous les pas — à tous les surgissements.

 

 

Nature et connaissance. Intuitions réflexives, perception et sensorialité, voilà les trois mamelles dont mon âme se nourrit chaque jour. Là, assis au sein de la nature, l’œil posé sur les collines alentour et le ciel nuageux ou ensoleillé, je me sustente d’être, de voir l’esprit et le corps se laisser aller à leur penchant naturel. Mon petit carnet m’accompagne et devient le libre réceptacle de ce qui me traverse, transposé en notes, réflexions, fragments ou aphorismes.

 

 

La lumière creuse en nous ce puit sans fond…

 

 

Il se peut qu’en mes profondeurs, je m’éloigne des hommes. Mais mon être périphérique est de cette humanité faible et fragile. La moins encline à batailler pour construire et exercer sa place dans le monde humain et la nature. Porteuse, malgré elle, de prédispositions peu propices à la grossièreté, à la brutalité, aux simulacres, à la comédie, à la superficialité et à l’instrumentalisation. Quelque chose en moi me porte naturellement vers la gravité, la profondeur et l’innocence. Comme voué, à mon insu, aux souterrains et aux chemins des hauteurs, aux sentes qui fréquentent ou mènent — je ne sais guère — à la vérité, à l’Amour et à l’Intelligence. A la compréhension et à la pleine vivance de la mystérieuse énigme de l’existence.

 

 

Il y aura toujours des choses devant nos yeux. Ou au-dedans du regard. Mille choses égales. Mille choses banales. Le monde ne pourra se taire. Il continuera. Et un autre après celui-ci. Et indéfiniment renaîtront les choses. Et le regard sera de plus en plus proche. Et de plus en plus lointain. Il survivra à tous les mondes qu’il a créés et qui sont devant lui. Il ne s’éteindra jamais car il n’est jamais né. Et en lui naîtront et périront tous les mondes et toutes les choses. C’est éminemment triste et joyeux. Et c’est ainsi. Ni le monde ni le regard n’y peuvent rien. Et le monde moins encore que le regard qui (sans doute) par ennui et échapper à sa solitude désemparée les a fait naître.  

 

 

Le monde tourne. Et l’on n’est responsable de rien. On croit simplement l’être. Les choses suivent leurs cours. Et nous n’y pouvons absolument rien. Les choses se transforment selon leur potentialité et leur contexte. Quant au reste… il n’y a qu’à voir. Et rien d’autre. Si, voir et aimer. Etre le témoin accueillant de tout ce qui se présente. De tout ce qui a lieu…

 

 

L’horreur des saisons qui me tiennent en laisse. Ecrasent ma tête sous leurs bottes grossières. Et c’est pourtant avec les bourgeons, les fleurs, les feuilles mortes et les pierres que se manifeste l’Absolu. Pour l’Homme, l’Absolu n’est accessible que par et dans les détails — qui n’en sont pas. Pour vivre l’Absolu en ce monde — qui n’est fait que de détails qui n’en sont pas — il faut habiter les saisons pleinement. Inconditionnellement. Sans aucune échappatoire.

 

 

Etre poète, c’est balbutier le monde. Et un monde inconnu. C’est tenter de dire dans une langue inexistante un pays que l’on ne connaît pas. C’est être muet face au commun. Face aux yeux et aux oreilles qui ne savent voir et entendre. Qui ne savent deviner les murmures et les continents sous la langue et les paysages. Etre poète, c’est ne pouvoir dire. C’est habiter un pays infréquenté que l’on ne parvient à décrire. A expliquer. C’est une impossibilité — une incapacité — à habiter le monde des hommes. C’est être blessé à chaque instant par leur grossièreté, leur prétention et leur ignorance. Etre poète, c’est être en chemin entre l’humanité et le ciel souverain. C’est être exilé de tous les royaumes. C’est une errance perpétuelle. C’est habiter une profondeur — une blessure — secrète que l’écriture tente de rendre lumineuse. Douce et lumineuse malgré l’inexistence du poète. Sa terreur et sa souffrance. Etre poète, c’est perdre toujours. Sur tous les terrains. Sur celui des hommes et celui qui est exploré, défriché, toujours mal connu. Etre poète, c’est un aveu d’échec et d’impuissance. C’est quelques pas sans gloire vers un pays inaccessible. C’est un besoin d’abandon auquel on ne parvient pas…

 

 

Sous les yeux se cachent une chair et des continents que l’âme explore. Elle y cherche la matrice. La source de toutes existences.

 

 

L’ombre s’étire sous la cuirasse. Résiste. Refuse de capituler. Ô mon âme, dis-lui de s’abandonner…

 

 

La plupart (sinon l’immense majorité) des Hommes se fréquente pour fuir leur face-à-face. Echapper à leur propre rencontre en essayant — consciemment ou inconsciemment — de recouvrir ou d’oublier leur inconfort (métaphysique et/ou existentiel). Quant à moi, je n’apprécie et ne peux fréquenter que les êtres qui aspirent et cherchent avec ardeur à se rencontrer et invitent l’Autre à le faire. D’où le nombre extrêmement restreint d’amis rencontrés au cours de mon existence.

 

 

Chez les Hommes, il y a des fêtes hideuses où l’on rit — se force à rire — pour oublier les larmes que l’on n’ose pas laisser couler. Des larmes vraies pourtant qui les rapprocheraient d’eux-mêmes. Mais ces larmes seraient si douloureuses… sans compter l’aveu honteux de ne pas être heureux. Un sacrilège dans le monde des Hommes où les faux-semblants occupent toute la place. Rions donc ! Et oublions les larmes ! Oublions la tristesse ! Efforçons-nous à la gaieté ! Et tâchons de ne point trop gâcher la fête !

 

 

Je vois du dedans ce qui n’apparaît pas au dehors. Et mon âme, emportée dans quelque intériorité, s’égare dans des univers que l’on ne connaît pas. Je ne sais s’ils sont vrais ou fallacieux. Tout cela m’apparaît comme une histoire de profondeur et de perception…

 

 

Trop occupés à nous protéger, nous en oublions la sensibilité du cœur. Claquemurés dans nos zones de confort, nous refusons les vibrations des émotions fondamentales qui ouvrent le cœur à la souffrance du monde et à ses divines merveilles.

 

 

Il faut avoir longtemps fréquenté la solitude pour s’apercevoir qu’il n’y a personne. Que notre figure humaine n’est qu’une image. Nous ne sommes pas ces créatures. Nous sommes un regard. Nous ne sommes pas que ces créatures. Nous sommes conscience perceptive.

 

 

Eclopé, je m’abîme dans le silence

Parmi les brins d’herbe et les étoiles

Je me penche par-dessus le gouffre

Et me voilà sombrant en dessous du monde

Plus haut que les yeux scrutant l’azur.

Mes pas touchent-ils toujours terre ?

Et mes yeux en surplomb dénichent la mascarade

Le grand cirque de ses habitants apeurés et gesticulants

Dont les pas fébriles piétinent le sol

En quête d’un soleil réconfortant.

Et qu’il éclaire importe peu

Pourvu qu’il réchauffe l’âme esseulée

Presque moribonde

Se sentir vivant que diable !

Même mal même un peu

Vaut mieux que le néant

Et la solitude pourtant guette partout

Au-dehors comme au-dedans

Et par veulerie et paresse l’on s’abandonne

Aux jeux stériles et frivoles

Plutôt que de s’enfoncer dans la zone d’inconfort et de gravité.

Trop immatures encore pour la douloureuse et salvatrice traversée.

Et se laisser éteindre et étreindre, suffocants,

Par la main invisible qui nous a conduits jusqu’ici.

Souvent malmenés — du moins le croit-on —

Jusqu’au tombeau sans voir

Son invitation inlassable à nous ouvrir

A la réalité lumineuse de l’espace.

A l’Absolu éternel.

 

 

A l’écart des Hommes, assis sur les collines, je vis la gloire du rien. La célébration du vide.

Sans conteste, je suis. Nu. Sans rempart ni construction.

 

 

Etre regard qui perçoit ce qui est.

 

 

L’aube sans nom attend tes yeux. Le désengorgement de la tête, du cœur et du corps, tremplin à la nudité sans pareille pour que le vide s’habille de plénitude.

 

 

Dans le silence et la solitude. Face à mes livres, je me tiens dans l’impossibilité d’écrire. J’attends la vague qui m’anéantira. Et me laissera hors de moi-même. Au plus proche de ce que je suis. L’écriture viendra après. Elle est accessoire. Toute mon âme cherche à être. Dépouillée de tout artifice, de toute prétention, de toute mémoire, de toute construction. Etre dans sa plus grande nudité.

 

 

Etre le réceptacle ouvert à ce qui surgit…

 

 

Mes réflexions et ma poésie ne parlent pas au peuple. Elles ne pourront jamais lui parler. Elles sont destinées aux solitaires penchés sur eux-mêmes. Dans leur chambre close. Face à eux-mêmes. Avides et soucieux d’eux-mêmes. De faire naître l’ultime rencontre. Je ne parle qu’à ceux-là. A quelques-uns de ceux-là. Tant pis pour les autres. Et tant pis pour moi. Mon œuvre — je le sais — trouvera son public dans les âmes solitaires. Les âmes graves et en retrait du monde. Les âmes faméliques. Les âmes éprises d’Absolu que les jeux et le pain ne peuvent contenter.

 

 

Le regard est l’épris du ciel. La main, elle, appartient à la terre. Quant à l’âme, elle les relie.

 

 

L’âme, entité reliante (immatérielle)  et principe unificateur entre l’attention et l’action (le geste et le pas) ou le mouvement (émotions, pensées et tous les déplacements dans le monde objectal matériel et immatériel …), entre la conscience et les phénomènes, entre l’arrière-plan et l’avant-plan, entre Dieu et ses créatures, entre le ciel et la terre…

 

 

Toute construction est une solidification des certitudes. Toute solidification des certitudes est un éloignement de l’être. De ce qui est. Il convient de rester sans appui. Et se défaire même de cette idée. Est ce qui est. Simplement. Voilà la seule réalité. Le reste n’est que fantaisie et sur-ajout…

 

2 décembre 2017

Carnet n°53 Le grand saladier

Journal poétique / 2014 / L'exploration de l'être

Le vent noir que l’on respire. Et qui nous étouffe. Et l’aurore nue que nos doigts n’auront qu’effleurée. Et les guerres rouges que nos mains rejettent. Et dont nos yeux nous protègent. Et les ombres diaphanes. Et les cœurs gris qui encerclent notre vie. Et la menace partout du dénuement. Et les ombrelles mensongères des demoiselles d’honneur. Et les noces mièvres des amants dépossédés d’eux-mêmes. Et les suintements de la pourriture dans notre chair. Et les raccommodements ciselés à la hâte. Et les seaux d’excréments répandus sur le sol. Et la folle clameur des foules. Et le silence des morts. Tout cela nous effraie. Nous glace les sangs. Mais nous continuons à vivre, n’est-ce pas ? 

 

 

Liminaires

L’écriture — mes dérisoires fragments — ne sont que la partie visible du travail de l’être à l’œuvre dans les profondeurs. L’essentiel ne peut être relaté. Ni donné à voir. Il rayonnera en son heure par tous les pores de notre pleine vivance.

Il y a des jours moins clairs que les épines qui nous écorchent les yeux.

Il y a le silence des heures. Et l’heure du silence où tout pourra s’éteindre après moi. Et je sens dans mes paumes le monde renaître déjà.

Il y a aussi d’horribles cris dans mon cœur. Et ma bouche reste muette. Je ne saurais dire que le silence qui m’enveloppe. Et le bruit silencieux des chaînes que mes pas fébriles ont traînées. 

 

  

Nous sommes fondamentalement (en arrière-plan) un espace d’accueil et de contemplation. Transposées à l’avant-plan, ces caractéristiques deviennent — pour le personnage — disponibilité et attention bienveillante.

 

*

 

Nous regardons tous le ciel. Et parfois nos souliers.

Les toits se superposent sous la voûte.

Le ciel. Les nuages. Et le soleil.

Et les brumes sur les collines quadrillant les parcelles sombres et lumineuses.

 

*

 

En vérité, je suis un petit personnage nu cherchant à habiter l’espace nu. Et réciproquement. Je suis aussi l’espace nu cherchant à habiter un petit personnage nu. L’avant-plan et l’arrière-plan qui se cherchent pour être totalement unis (ré-unis).

 

*

 

Dans nos mains, la terre que nous nous offrons. Lambeaux de nature que nous dévorons. Fragments de matière qui s’auto-ingèrent. Des champs et des prés à perte de vue. Assemblage fantaisiste. Quadrillage parfait. La nature soumise au diktat de l’esprit humain.

 

*

 

La grande guérison de l’âme qui s’ouvre à l’Ineffable. Et se penche sur ses propres manifestations. Dans le ciel et la poussière enfin réunis, les pas ne font qu’un. Etre plein en accord avec tous les mouvements.

 

*

 

Le visage d’un homme mûr. Rides et cernes sur de petites moustaches broussailleuses. Un anonyme commun.

 

*

 

Il semblerait que le réel soit composé de pléthore de mondes à la fois superposés, entremêlés et adjacents dans une étrange et incroyable imbrication (que je serais bien incapable de représenter…), mondes qui seraient des plans projectifs, représentatifs et abstractifs  créés et explorés par le mental — cet instrument puissant et merveilleux. Ainsi le monde organique composé de matière, le monde des idées composé de concepts et le monde de l’imaginaire et des rêves composé de représentations formeraient l’essentiel des mondes accessibles à l’être humain (les mondes astraux et chamaniques étant « réservés » aux esprits humains les plus souples et les plus désencombrés) ce qui n’écarte pas, évidemment, l’existence de quantités d’autres mondes, plans et univers difficilement intelligibles, abordables et perceptibles par les Hommes. Et en arrière-plan de cette foison de mondes, la conscience, créatrice du mental, lui-même créateur des différents mondes et outil de navigation en leur sein. Une des grandes confusions de l’Homme serait de vivre le plan organique sur le mode des idées et des représentations au lieu de l’appréhender sur le mode de la sensorialité (tactile principalement). Seul le monde organique semble lié au mode sensoriel, ce qui n’exclut nullement que le monde des idées et des concepts et celui des représentations et des rêves et a fortiori tous les autres ne soient pas en mesure d’induire ou d’évoquer des sensations… à ce propos, ces sensations provoquées sont-elles créées à partir de la mémoire qui en a emmagasiné un stock grâce au plan organique ou ces sensations se réduisent-elles simplement à l’idée de sensation ? Ainsi rêver de manger une glace à la crème chantilly ou lire la description savoureuse d’une glace à la chantilly n’aura sans doute aucun effet si sur le plan organique on n’en a jamais mangée. L’évocation abstraite par les mots, l’imaginaire et le rêve n’induit donc une sensation qu’à condition de l’avoir déjà vécu sur le plan organique. Mais quant est-il pour des sensations que nous ne pouvons explorer sur le plan organique ? Ainsi par exemple, lorsque le chamane se transforme en aigle, a-t-il la sensation de voler ? Ou a-t-il l’idée de la sensation de voler ? Je ne sais pas. Allons un peu plus loin ! Et ne pourrait-on pas faire l’hypothèse que nous avons stocké en mémoire une infinité de sensations liée au fait que nous avons déjà vécu (pas en cette existence humaine évidemment) toutes les formes de tous les plans, mondes et univers existants ? A dire vrai, l’idée ne semble pas si saugrenue… mais reste, bien sûr, indémontrable et invérifiable sur le plan de la compréhension humaine…

Mais revenons sur le plan organique et tâchons de construire une typologie des sens en fonction de la distance entre les objets et le corps qui les ressent ou les perçoit afin de voir où nous mène cette réflexion… en matière de sensorialité, le goût est activé lorsqu’une forme est portée à la bouche ou ingérée (autrement dit lorsqu’une forme entre dans le corps). Le sens tactile lorsqu’une forme entre en contact avec le corps, l’odorat lorsqu’une forme est à proximité du corps, l’ouïe lorsqu’une forme émettant un son est peu éloignée du corps et enfin la vue lorsqu’une forme peut se trouver à bonne distance du corps (par temps diurne et clair). Notons en aparté que seuls la sexualité amoureuse et l’acte de manger font usage simultanément des cinq sens… comme si sur le plan organique, c’était-là les activités qui permettaient le plus de proximité entre 2 formes, la première donnant potentiellement naissance à une troisième forme (la procréation) et la seconde faisant disparaître une forme au profit d’une autre (ingestion et digestion des nutriments). Lorsque l’on met en relation cette classification triviale et évidente avec l’arrière-plan que l’on nomme aussi regard impersonnel, écoute impersonnelle ou espace d’accueil de tout ce qui se manifeste, il semblerait que l’on puisse affirmer que ce regard ou cette écoute soient « restreint » par l’ouïe ou la vue, par l’existence du corps, d’une matérialité limitanteSans eux, qu’adviendrait-il du regard et de l’écoute ? Seraient-ils infinis ? Ne pourraient-ils se manifester ? Dans ce dernier cas, la conscience infinie aurait-elle créé cette multitude d’entités à la seule fin de pouvoir « se goûter » à travers ses manifestations ? Et au-delà de se percevoir et de se goûter à travers tous ces organismes, le fait qu’elle enjoint chaque entité à l’habiter (habiter l’arrière-plan) en percevant autour de lui — jusqu’aux limites de sa matérialité — n’est-ce pas une façon pour elle de quadriller tout le territoire, l’espace infini ? Ce qui expliquerait, entre autres, le besoin humain de percevoir l’ensemble de l’univers, par l’astrophysique par exemple… Que faire avec cette idée que l’arrière-plan ressenti est restreint par la forme matérielle de celui qui l’habite ? Si tous les mondes ne sont que des projections, alors ce raisonnement perd toute validité. Il devient absolument caduc. La conscience — présence — regard — écoute — est l’être qu’il y ait objet (donc perception de l’objet) ou absence d’objet (conscience sans objet pure). Le réel ne serait donc que ce qui est perçu ou ressenti. Le reste n’est qu’abstraction. Et il convient donc de découvrir puis d’habiter Ce qui perçoit ce qui en nous perçoit et ressent…  

Note supplémentaire à propos des différents plans du réel. Pour un même plan, le mental peut accéder à différents degrés de compréhension et à différents niveaux de profondeur de regard… ce qui complexifie d’autant l’incroyable imbrication de tous ces plans…

 

*

 

Fonte des glaces. Réchauffement climatique. Des pans entiers de banquise s’effondrent. Des montagnes de neige s’affaissent. Indifférence générale de l’humanité retranchée dans sa petite sphère de confort technologique.

 

*

 

Les livres sont des bavardages inutiles. Il conviendrait simplement d’exprimer une parole jaillie du silence que l’on comprendrait en un éclair. Et qui serait intégrée définitivement à toutes les sphères de l’être

Je n’aimerais écrire que des mots essentiels qui souligneraient le silence d’où ils viennent, permettant à ceux qui les lisent ou les entendent de retourner leur regard vers la source même de Ce qui perçoit. Je tâcherais désormais d’être moins bavard…

 

*

 

Deux enfants regardent au loin. Leur horizon perceptif. Leur avenir restera muet.

 

*

 

Une formule semble juste pour tenter de résumer mon parcours et mon cheminement (quelle qu’en soit l’étape) : chercher sans fin à être pour être sans fin. Chercher jusqu’à l’obsession un peu folle à habiter le plan où l’on peut goûter indéfiniment l’infini immuable et éternel…

 

 

L’écriture n’a sans doute été au cours de ces longues années qu’un outil de compréhension et d’élagage. Un instrument de désencombrement afin de dépouiller l’être de ses couches inutiles.

 

 

Etre ne s’encombre d’aucun bagage. Ni d’aucune charge. Il s’agit d’être nu et dépouillé. Et de laisser se manifester tous les mouvements…

 

 

Tout est la manifestation de l’être. Mais pour le goûter, le ressentir et l’habiter, il convient de se dépouiller de tout

 

*

 

Un oiseau sur un fil électrique. Attendant ses congénères. Une solitude désemparée sous le ciel.

 

*

 

A force de rien (ne rien faire, ne rien vouloir, ne rien être…), on prête aux insignifiances toute notre attention. Et les choses les plus infimes prennent des allures merveilleuses. On s’extasie alors de tous ces petits riens qui constituent l’essentiel du manifesté…

 

*

 

Un homme observe le monde. L’Existant passé au crible. Le Manifesté dévoilera-t-il son intimité ?

 

*

 

Rester avec le matériau brut de la vie. Et observer. Voir ce qui se passe… voir comment cela fonctionne… voir qui crée quoi et comment… comprendre les mécanismes. Et les ressentir. Voir comment le noyau primordial — l’être pur — se voit encombré ou entaché de couches, d’images et d’écrans… comment tout est stimulé à chaque instant créant dans le rien quantité de mouvements…

 

*

 

Une silhouette passe devant une maison à la porte close. Aux volets fermés. On ne perce pas ainsi l’intimité du monde.

 

*

 

Voir, comprendre et ressentir à quel point le petit être en nous (l’être périphérique) est fragile, vulnérable et démuni. Et combien il a besoin de notre amour et de notre présence

 

*

 

Un homme s’éloigne à bicyclette, un violoncelle accroché derrière son dos. A en juger pas son accoutrement, la recette de son spectacle de rue lui procure à peine de quoi se nourrir.

 

*

 

Le rien du Tout.

 

*

 

Un homme à une tribune. Il lit ses notes. Tente-t-il de nous expliquer le monde ?

 

*

 

L’Autre Parole qui s’habille de silence.

 

*

 

Une vieille femme assise sous une tonnelle, enveloppée dans une longue couverture de laine. Le regard absent. Plongée sans doute dans quelques souvenirs.

 

*

 

Les joncs se courbent sous le vent. Et le chêne se gonfle d’orgueil. La tempête révèle la nature profonde des êtres. La singularité primordiale de leur forme.

 

*

 

L’effervescence d’une rue de centre-ville. Les bus, les voitures, les bicyclettes, une myriade de deux-roues motorisés, la foule des badauds. Et un homme assis par terre, abandonné à sa solitude, qui semble avoir délaissé tous les spectacles. 

 

*

 

Tout ce qui nous détourne de la rencontre pleine avec soi devrait être banni. Ou du moins délaissé… tant d’heures et de rencontres inutiles où l’on joue à la comédie du vivant… quelle tristesse de remplir notre être et notre existence de grimaces, de gesticulations insensées et de faux sourires qui éloignent la présence souveraine ! A moins, bien sûr, de jouer à jouer. De célébrer le jeu. Et d’en rire jusque dans nos silences…

 

 

N’ignorons jamais le cœur de l’essentiel ! Il s’habite dans la pleine vivance. Comme un embrasement de l’âme et des riens de ce monde ! Comme une apothéose du rien qui offre la joie et la plénitude ! Et le sentiment si dense d’exister avec légèreté ! D’être sans aucun qualificatif pour le vêtir…

 

*

 

Des livres sur un étal. Que nous vendent les libraires ? Du rêve ? Un antidote à l’existence ? Des guides pour exister ? Une fuite incessante de nous-mêmes ?

 

*

 

 L’aube chemine à travers la nuit.

 

*

 

Un amoncellement de briques et de toits. Une ville parmi d’autres. L’immonde promiscuité des corps. Et des regards qui ne se croisent même plus.

 

*

 

Les destins adjacents se croisent, se frôlent, se touchent et échangent sans jamais se rencontrer. Le lieu de la rencontre est en soi-même. Absorbé par l’unité commune, on peut dès lors accueillir le monde.

 

*

 

Deux enfants courent dans les sous-bois. Un grand sourire sur les lèvres. Ils jouent. Offrent au monde la beauté de leur insouciance. Quels adultes deviendront-ils ? Garderont-ils en mémoire ce jour de novembre où ils s’amusaient avec innocence ?

 

*

 

Nous ne sommes qu’un lourd bonheur devant un tas de cendres.

 

*

 

Des élèves dans une classe. Savent-ils seulement à quoi sert le savoir ? Combien sont là pour apprendre à connaître ? A faire les premiers pas vers la Connaissance ?

 

*

 

Ce si peu de silence que le monde nous octroie…

 

*

 

Une banlieue grise sous un ciel gris. Comme une chape de plomb sur des existences déjà bien ternes.

 

*

 

Dans ce monde d’apocalypse, l’annonce de la mort des anges est passée inaperçue. Les Hommes sont bien trop occupés. La plupart tente de s’arracher à eux-mêmes, d’échapper à l’impitoyable et tranchant face-à-face, les autres cherchent Dieu dans les livres. Tous ignorent qu’Il se penche vers eux pour leur murmurer à l’oreille une vérité insaisissable. Ils n’entendent que le son hagard de leur propre voix. L’écho leur répond parfois et ils s’imaginent percer là quelques profonds mystères.

 

*

 

Un jeune garçon penché sur un livre. Le regard concentré. Qu’apprend-il d’essentiel ?

 

*

                            

Pas d’écriture. Pas de présence ressentie. Saturation dans l’accompagnement de fin de vie de G., mon vieux compagnon. Lassitude des promenades et des paysages. Ennui. Solitude un peu désemparée — en cette période, l’isolement me pèse mais toute fréquentation humaine m’est encore plus intolérable. Ma relation au monde (dans sa présence comme dans son absence) est une totale impasse. Inactivité complète. Gestion pénible des travaux domestiques. Arrêt du tabac. Arrêt du sucre… tous ces éléments deviennent incroyablement pesants. Et affadissent plus encore l’existence déjà insipide du personnage.

  

*

 

Un vieil homme assis dans un canapé boit une tasse de thé. Un livre ouvert posé sur un étroit guéridon à proximité.

 

*

 

L’abîme céleste qui nous sauve des heures.

 

*

 

 

 

Une jeune fille assise sur un muret de pierre joue de la guitare pour quelques amis ravis qui forment un demi-cercle autour d’elle.

 

*

 

Contempler la beauté du ciel changeant. Les oiseaux passant haut sous les nuages. Moi qui ne fréquente plus guère mes congénères, ai-je encore figure humaine ?

 

*

 

Une carte géographique posée sur une table. Le monde — une partie du monde — tracé(e) sur une surface plane. Un quadrillage de routes encerclant des parcelles. Comme une représentation labyrinthique de nos itinéraires… Mais qui sait réellement où nous allons ?

 

*

 

Je suis sans ressource devant mon dénuement. Je dois m’extirper de ma tanière pour m’offrir aux lèvres de l’abandon.

 

*

 

La puissance, la beauté et la rudesse des paysages sauvages reléguant l’Homme au rang d’entité dérisoire et vulnérable.

 

*

  

En être réduit à la part la plus nue de soi. S’y confronter. Et s’y résoudre pour s’ouvrir aux aspects les plus vrais de soi-même. Aux caractéristiques fondamentales de son être agissant

Faire face aux parties les plus tendres et les plus fragiles de nous-mêmes pour nous ouvrir au cœur compatissant qui sommeille à l’intérieur et qui a besoin d’être pleinement habité pour éclore au monde…

 

*

 

Des silhouettes et leur ombre. Réunies par petits groupes. A la fois reliés et séparés. Et un homme seul qui contemple ses congénères.

 

*

 

Violence, conflits, guerres, massacres, ignorance, mesquinerie, instinct de survie organique, besoin de puissance et de destruction… pour apprécier et aimer ce monde-là — une part substantielle de la vie terrestre — et se réjouir d’y habiter, il faut être inconscient (aveugle) ou extrêmement conscient (très avancé sur les plans perceptif et spirituel). Entre ces deux pôles, on ne peut que le blâmer. Et détester y vivre.

Entre les aspects délétères et fortement mortifères précédemment énoncés, on peut aussi entrevoir quelques beautés et quelques merveilles — facteurs de réjouissance — tels que l’amour, la paix et l’intelligence et leurs extensions* (le respect de l’Existant, la bienveillance, l’entre-aide, la coopération, la fraternité et la solidarité) comme de rares îlots de douceur et de générosité dans un océan de puissance et de destruction.

* quand elles sont détachées de leurs miasmes les plus grossiers, autrement dit lorsqu’elles ne deviennent pas des instruments intégrés à une stratégie adaptative n’ayant pour fonction qu’assurer la survie des organismes et leur expansion (même s’il existe, il est vrai, une certaine beauté dans ce genre de mécanisme).

 

 

De l’inconscience à la complète conscience, on apprend pas à pas à comprendre le monde. Et à l’accepter. A accueillir la fluctuation de ses états et sa lente évolution. Et l’on comprend au moins deux choses essentielles : le monde ne peut être autrement que ce qu’il est, les êtres ne peuvent agir autrement que de la façon dont ils agissent et nous ne pouvons nous réduire à ces créatures fragiles qui se débattent dans ce panier de crabes impitoyables, nous sommes aussi la conscience impersonnelle dans laquelle se déroulent tous les mouvements de ce que nous appelons usuellement le monde.

 

 

Dans le monde manifesté (à l’avant-plan), il y a — pour l’essentiel — du karma qui s’épure et une foison de situations pour comprendre notre vraie nature, saupoudrées de menus plaisirs, de minuscules bonheurs et de quelques instants de répit. Le reste en cette existence terrestre n’est que le jeu espiègle de la vie et la célébration de l’Existant.

 

*

 

Dans nos mains, une cité merveilleuse que nous transformons en enfer…

 

*

 

En cette vie terrestre, je ne perçois qu’une immense détention où les créatures en sont réduites à se défendre les unes des autres. Et à s’entre-dévorer. Comme si la vie organique n’était qu’un pitoyable, effroyable et incontournable purgatoire pour nos âmes encore si grossières.

On (l’Homme) a beau essayer d’en atténuer la violence ou de transformer certaines régions et domaines en paradis (artificiel), ce monde — cet univers organique — n’en est pas moins régi de façon ontologique par la puissance et la destruction.

 

*

 

Un enfant marche la tête baissée le long d’un mur. Un long mur de séparation. Allant vers son destin circonscrit. Trop limité pour s’épanouir réellement.

 

*

 

Mon maître du jour (et sûrement pour bien longtemps) est une petite abeille morte de froid et d’épuisement qui gisait seule sur le toit de ma voiture après avoir œuvré tout au long de sa brève existence pour sa communauté et que j’ai trouvée au retour de notre promenade vespérale. Après s’être livrée aux mains du destin, elle avait su s’abandonner avec courage aux bras de la mort… et la vision de ce petit corps recroquevillé dans l’immensité m’a ému jusqu’aux larmes…

 

 

La jungle et la forêt vierge sont la vie. La pelouse impeccablement tondue et le parterre de roses décoratifs, l’esprit humain.

 

*

 

Un soldat casque vissé sur la tête, fusil-mitrailleur à la main déambule dans une rue jonchée de blessés et de cadavres. Au-dessus, un balai d’hélicoptères comme de gros insectes nécrophages emportent les corps mutilés.

 

*

 

Que rencontre-t-on face à soi-même ?

 

 

Derrière les bruits, les pensées et l’idée de solitude se terre le silence. Et qu’y a-t-il derrière le silence ?

 

 

Un espace en nous qui appelle notre attention. Qui demande à être pleinement habité. Il n’y a d’autre issue à la paix.

 

*

 

Un réalisateur tourne une scène d’amour. Une histoire de femmes voilées dans un pays lointain. Irréelle.

 

*

 

Le silence, le non-agir et l’abandon… portes simultanées qui ouvrent à l’ultime rencontre.

 

*

 

Une colombe au loin s’envole. S’éloigne du cataclysme et du carnage.

 

*

  

Mort de P. aujourd’hui. Le petit chien trouvé sur la route que j’avais confié à mes parents.

Ô Ciel, pourquoi as-tu pris notre visage ? Ne vois-tu pas notre peine — que nous portons sur nos épaules comme un lourd fardeau ? Pourquoi as-tu pris notre visage ? N’y a-t-il pas d’autres chemins ? Tu nous as faits si faibles et si fragiles. Que goûtes-tu à travers notre insignifiance ? A quelles embellies nous destines-tu ? Ô Ciel, pourquoi prends-tu tous ces visages ? Celui des faibles et celui des forts, celui des victimes et celui des bourreaux, celui de la vie et celui des morts ; à quel jeu t’amuses-tu ? Combien d’entre nous savent que nous sommes à la fois les jouets, le jeu et le Joueur ? Le goûté, le goût et le Goûteur… ? Pauvres de nous qui croyons n’avoir qu’un seul visage… nous ne goûtons que les larmes… 

 

*

 

Une femme tient à la main un bouquet de fleurs en regardant l’objectif mi-effrayée mi-séductrice. Comme inhibée dans ses désirs.

 

*

 

La vie se savoure à travers notre regard. Notre psychisme. Et notre corps. On la laisse et elle nous laisse en paix. On peut dès lors apprécier chaque instant. Le louant pour ce qu’il est. Ne souhaitant rien lui ajouter ni lui retrancher. Laissant les choses suivre leur cours et leur destinée. Sereines et éparpillées. Dans notre regard immobile et impassible. Confiant et bienveillant. Souverain.

 

*

 

Un gangster prend une femme en otage. Il braque sur elle un revolver et tente d’échapper au groupe de policiers qui l’entourent.

 

*

 

44 ans. Oui, déjà. Mais l’esprit toujours neuf de l’adolescence…

 

*

 

Dans un dessin animé, un étrange mouton noir aux cornes somptueuses se lie d’amitié avec une abeille dans un décor féerique.

 

*

 

Que deviendront nos amours mortes ?

 

*

 

Une mère joue avec son enfant. Ils chahutent sur un canapé dans de grands éclats de rire. De la gaieté dans les yeux.

 

*

 

Passager clandestin de sa propre vie. Le naufrage assuré…

 

 

Un silence glacé autour de moi. Et l’écho froid de ma voix qui n’en finit pas d’interroger…

 

 

Ô âpre Solitude, vers quelles contrées me mènes-tu ?

 

 

Sur la robe rouge de l’oubli il s’étendit. Et attendit la mort. Mais rien n’arriva. Et il dut se défaire plus encore…

 

 

Oublie tout ce que tu es — tout ce que tu crois être, oublie tout ce que tu sais — tout ce que tu crois savoir pour t’ouvrir aux lèvres nues de l’innocence.

 

 

La part sombre et le versant raide et sec de la joie avant de pouvoir l’habiter pleinement…

 

 

Pour agir, laisse jaillir la spontanéité du geste ou du pas. Dans le non-agir, soit immobile et tranquille. Laisse les phénomènes apparaître, suivre leur cours et disparaître.

 

 

L’eau vive des moribonds coule sur notre source. Engorgeant nos fontaines où le peuple a toujours refusé de s’abreuver.

 

 

Dans nos secrets alpages dorment nos troupeaux. Le berger a déserté les lieux pour regagner la plaine des hommes. Il nous appartient donc de créer le berger nouveau pour aller libres et unifiés par monts et par vaux et pouvoir s’établir en toutes contrées.

 

 

Le couvercle gris des jours comme une chape de plomb sur nos âmes captives.

 

*

 

Une femme entre deux âges promène son chien accompagnée d’un homme à casquette. Les deux ombres se chevauchent. Mais les regards ne se croisent pas. Comme perdus au loin. Dans un avenir commun improbable peut-être…

 

*

 

En un instant le soleil se lève.

En un instant la mort s’approche.

Mais qui voit le lent mouvement de l’astre ?

Et le lent mouvement de la faucille ?

 

Quelle aurore t’a vu naître ?

Et le soir tombe déjà

 

Par la fenêtre

Le petit homme regarde la pluie tomber.

Et des larmes coulent sur ses joues.

[à Hosai]

 

Une pluie intermittente dans nos yeux fragiles.

Et s’ils ne reflétaient plus jamais le soleil ?

 

Une ombre accourut

Et me vola mon âme.

 

La joie s’est invitée

Puis est repartie

La tristesse a tout recouvert

 

Des yeux hideux dans la brume cherchent le chemin.

Personne ne pourra les égayer

 

Nous nous sommes égarés

Désormais nous avancerons à reculons

Jusqu’à la source

 

*

 

Une horde de spectateurs, téléphone portable à la main, photographient les célébrités qui gravissent les marches d’un célèbre festival de cinéma. Chacun se sent autorisé à faire son show.

 

*

 

Des larmes sur ma feuille

Et ma main (aussitôt) dessine un soleil

 

Une ardeur de limace

Sur le sol rugueux

Et les épines du ciel

 

Où donc poser le pas ?

 

La terre est une idée

Le ciel est une idée

Où suis-je ?

 

Les semelles misérables

Mais qui est là qui nous regarde sans défaillir ?

 

Qui est-t-on ?

Sous le ciel, la même misère

Et au crépuscule, les mêmes larmes

 

Les songes du jour

Les rêves de la nuit

A quelle heure sommes-nous éveillés ?

 

Des coups, des brimades

Des destins en laisse

Où est donc la liberté ?

 

Et si elle était dans les yeux impassibles ?

 

 

 

Si la grande aurore nous était contée

Nous ne saurions la voir

Il faut des yeux nus pour la goûter

 

L’heure s’éternise

Et nous la quittons

Pour suivre notre étoile

 

Au loin brillent nos rêves

Mais la lumière est partout

Qui donc regarde l’obscurité ?

 

Le silence des heures

La nature muette

Et les bruits furieux dans notre tête

 

Les étoiles dansent dans nos yeux

Et nous les cherchons sur les chemins

 

La sombre parure de l’âme qui voile sa nudité

Pourquoi a-t-elle choisi pareil accoutrement ?

A présent, elle ne se reconnaît plus.

Et elle a oublié même son mensonge.

 

La pluie tombe

Les hommes tombent

Où a-t-on caché le soleil ?

Où avons-nous mis nos ailes de papillon ?

 

Les hécatombes se jouent de nos cris. Et de nos peines.

Elles se moquent de nos masques. Et de nos grimaces.

Demain elles nous engloutiront. Nous reste le rire…

 

*

 

Un homme seul assis à une table tourne les pages d’un livre.

 

*

 

A feu et à sang

Notre cœur parmi les gens

La nature solitaire est notre unique refuge.

 

Par-delà la terre

Par-delà la joie

On piétine sur le bitume

 

Nous n’avons ni la patience

Ni la constance de l’horizon

 

Nos pas toujours se dérobent

Le mouvement est leur nature

Et l’immobilité celle du regard

 

Mais où avons-nous fourré nos yeux ?

 

L’archipel du lointain, voilà notre rêve

Demain s’invitera plus tard

Et nous vivons recroquevillés

Ecrasés par les instants qui passent.

 

*

 

Une ville en contre-bas dans la plaine. On la voit s’étendre sur les monts alentour. Partout l’odieuse expansion en marche.

 

*

 

Les feuilles d’automne

La forêt tranquille

Et l’âme mélancolique

 

A la montagne des jouissances

Le tombeau des peines

Sous l’arbre on médite

 

Un rouge-gorge sur une branche

Les nuages dans le ciel

La prunelle ravie

Et le cœur en paix

 

Instants de ravissement que le ciel ne peut assombrir.

 

Le cœur défait

L’âme échevelée

Et le vent surgissant par-dessus nos têtes

Laissent l’œil innocent.

 

*

 

L’enseigne d’un hôtel de luxe à l’intérieur cossu et sophistiqué. A l’entrée, un portier au sourire gigantesque œuvre à sa tâche.

 

*

 

Il y a la longue — trop longue — liste des livres qui endorment. De ceux-là, inutile de parler. Il y a aussi la courte — très courte — liste des livres qui entaillent la chair ou égorgent. Ils dissèquent notre âme (nos faiblesses et notre veulerie) avec une tranchante lucidité. Et nous voilà écorchés au scalpel. Inutile d’y chercher la moindre source de réconfort. Et puis il y a les livres rares — trop rares — qui offrent la joie. Et plus rares encore, ceux qui nous invitent à la grâce… et parmi eux, les exceptionnels qui nous y ouvrent.

 

*

 

Un homme marche sur un sentier forestier. Les bois encerclent sa marche. Aimerait-il se perdre ? Ou se retrouver ?

 

*

 

Je ne suis qu’un oiseau sans cage. A qui la vie a coupé les ailes. A qui la vie a oublié de dessiner des ailes. Et qui en a (pourtant) la nostalgie. Je ne partirai jamais d’ici. La trajectoire est plate. Et circulaire. Et mon destin, la chute. Le sol ne se souviendra pas de moi. Et le ciel balaiera mes restes d’un coup de vent. Ornières et poussières j’aurais été. Et à jamais resterai.

 

 

Je laisse derrière moi des milliers de pages que personne n’a pris le temps ni la peine de lire. Je laisse derrière moi une œuvre qui tentait de gravir la lumière. Et je n’ai pas su même éclairer mes pas. Ni la marche aveugle et funeste des hommes.

 

 

Mes pas n’ont que raclé la terre. Je savais à peine me tenir debout. On ne peut envoler un destin voué à la boue. Et à l’enlisement. 

 

 

Aujourd’hui, le ciel recouvre mes songes. Je ne saurai bientôt plus rêver. Le réel a eu raison de moi. Et mon âme est inconsolable.

 

 

A l’orée des viscères, la bête se cache. Immonde et féroce, elle me dévore déjà.

 

 

On ne rencontre en vérité que des ombres. Et des âmes mortes. Et moi qui aspirais à l’Amour. Et à la pureté des rencontres. Des fluides, des poils, des odeurs. Et des âmes retranchées, voilà ce que nous offre l’amour. Et je pleure en silence sur nos cœurs recroquevillées qui n’ont pas su — et ne sauront sans doute jamais — goûter à l’Infini et à la lumière. Pauvres créatures que nous sommes, misérables jusque dans nos élans.

 

 

Nous souffrons le monde. La phrase est belle. Et juste. Et dire qu’avant de nous accoucher, c’est nous qui l’avons mis au monde.

 

 

Comme enfermé au dehors, je ne peux m’immiscer dans le monde des hommes. Trop brutal. Trop barbare. Pas de place pour les cœurs innocents. Pour les âmes pures. La boue et la bestialité y sont trop présentes. Quand des ailes pousseront sur mon âme affaiblie ? Dans mes yeux apeurés ? Ô anges, soutenez mon regard ! Et aidez-moi à vivre parmi les cieux ! Et des larmes coulent sur mes cils crottés de matière et de fange… 

 

*

 

D’immenses gratte-ciels. Une forêt de béton et de verre. L’homo citadinus sur son territoire. Univers factice créé selon les exigences et les caprices de son esprit de fuite. Façonné par son horreur de la nature sauvage. De la vie brute et foisonnante.

 

*

 

On se défait des regrets. Pas de l’amertume de n’avoir pas su exister…

 

 

Nous ne sommes en réalité qu’un amas de blessures incicatrisables. Et un corps perclus de douleurs. Et l’on nous exhorte d’être heureux ! Faut-il être fou, inconscient ou idiot pour ne pas voir le mal qui nous habite, nous ronge… et pèse de tout son poids sur nos âmes frêles et solitaires ?

 

 

La souffrance et la mort rôdent. Et nous avons l’inconscience de ne pas vouloir les voir. D’y faire face. De les apprivoiser ou de les dompter. En vérité, nous craignons plus que tout la pleine liberté. Nous nous contentons d’une liberté entre les murs. Une liberté de détention. Une pitoyable liberté en vérité ! Et nous vivons ainsi le corps emprisonné. Et l’âme ligotée. Pauvres créatures que nous sommes…

 

*

 

Un homme et une femme sur la place d’un marché devisent tranquillement. Ils échangent quelques nouvelles. Parlent de leurs proches. S’enquièrent de la santé de l’entourage de l’autre. Simulacre de rencontre. Croisement commun du peuple.

 

*

 

Ecrire un livre, c’est dé-voiler son âme. Ouvrir un livre, c’est rencontrer l’âme de son auteur. En ce monde, il n’y a de plus puissantes rencontres. Elles invitent à l’ultime rencontre. Celle que l’on fait avec soi et l’Infini que nous portons en nous.

 

*

 

Un restaurant bondé. Au centre de la salle, une table immense autour de laquelle sont réunies une trentaine de personnes bruyantes. Et extraverties. Mais sous l’apparence conviviale de camaraderie, les regards sont tristes et seuls. Perdus.

 

*

 

 Je ne suis qu’un clou blessé parmi la rouille. Minuscule bout de métal voué aux coups et à l’abandon.

 

*

 

Une barque minuscule sur un fleuve tranquille. Un homme rame à travers les flots. Au loin, on aperçoit une immense forêt et des montagnes. L’Homme, point dérisoire dans l’immensité naturelle.

 

*

 

Le vent noir que l’on respire. Et qui nous étouffe. Et l’aurore nue que nos doigts n’auront qu’effleurée. Et les guerres rouges que nos mains rejettent. Et dont nos yeux nous protègent. Et les ombres diaphanes. Et les cœurs gris qui encerclent notre vie. Et la menace partout du dénuement. Et les ombrelles mensongères des demoiselles d’honneur. Et les noces mièvres des amants dépossédés d’eux-mêmes. Et les suintements de la pourriture dans notre chair. Et les raccommodements ciselés à la hâte. Et les seaux d’excréments répandus sur le sol. Et la folle clameur des foules. Et le silence des morts. Tout cela nous effraie. Nous glace les sangs. Mais nous continuons à vivre, n’est-ce pas ?

 

*

 

Un jeune garçon pleure dans une chambre close. De quelle souffrance se sent-il responsable ? 

 

*

 

Les seigneurs des manteaux me harcèlent. Et je succombe sous leur poids. La nudité sera mon ultime vêtement. Ensuite je mourrai. Et le vent soulèvera mes ailes d’enfant sage. Sous mes moignons d’ailes d’adulte jamais né.

 

*

 

Des hommes seuls, tristes et pensifs devant leur verre assis au comptoir d’un bar. Atmosphère de solitude confinée. Et oppressante. Dégoulinante de misère.

 

*

 

Les ailes ne protègent de rien. Pas — surtout pas — de la misère de vivre. La boue et les nuées ont scellé leur pacte obscur. Et sur le parchemin nous piétinons. Etonnés de tant de mystère. Nous aurons au moins appris de l’incompréhension.

 

*

 

Une porte de chambre d’hôtel entrouverte par laquelle on aperçoit une femme de ménage s’affairer autour d’un lit.

 

*

 

Les nuages rouges de l’agonie.

Et le cri persistant de l’ombre.

Comme un resserrement du cœur et de la chair.

L’émiettement du cerveau.

Que le vent fougueux emporte au loin.

 

*

 

Un couple déambule bras dessus bras dessous sur le trottoir d’une route littorale. Canotier sur la tête. Flânerie de touristes en goguette. Silhouettes nonchalantes et un peu désœuvrés s’évertuant à tuer le temps de la villégiature en profitant de la vue et des paysages. Du plat bonheur de marcher côte-à-côte. Et d’être ensemble.

 

*

 

L’aube est là

Et nous la quittons pour des jours moins fastes

Des jours aussi obscurs que la nuit profonde

Que nous n’avons jamais vraiment voulu quitter.

 

*

 

Deux hommes agressent un automobiliste dans sa voiture. Violence des coups. Nul abri pour se protéger de la violence du monde.   

 

*

 

La nudité sublime du monde

Couverte de haillons et de guenilles

Plaies béantes infligées par les hommes

 

*

 

Dans une rue d’une gigantesque mégalopole, un homme pressé, téléphone portable collé à l’oreille et attaché-case à la main s’engouffre dans un taxi. La course incessante et stérile du monde.

 

*

 

Sommes-nous les songes que nous n’avons jamais faits ?

Que nous n’avons jamais osés faire ?

Et la pluie continue de chanter sur les toits d’automne.

 

*

 

Deux instituteurs bavardent dans une cour de récréation. Autour d’eux, une myriade d’enfants joueurs et enjoués. 

 

*

 

Sur la terre rouge des malheurs, le sang se déverse. Et le vent rougeoyant des augures mensongers. Comme un clou dans ma poitrine. Pétrifié de honte et d’angoisse, je devine mon sort livré à la barbarie. Comme les yeux de l’océan devinent la caresse perfide des vagues. Poissons et naufragés partageant la même demeure. J’accoure vers ce lieu isolé que je n’ai jamais quitté. Après m’être éparpillé dans des lieux dont on ne revient pas, je me terre là où se niche le cœur. J’aimerais secourir ce qui en moi ne peut l’être. L’extinction de la voix qui m’a sauvé. Et dont le souvenir hante mon corps. Mon âme s’entortille de douleur en son absence. Mon cri devient silence. La paix recouvrira bientôt tous les malheurs. A moins que je ne sois déjà mort ? Un lieu, un corps. L’âme. Et l’espace. Comment dissoudre la matière ou la réconcilier pour ne faire qu’Un ? Les chimères de l’âme. En quête de reconnaissance. Et d’espace. Extorsion de matière et d’espérance pour retrouver le fil perdu qui ne nous a jamais quittés. L’horizon se défait de nos sombres rêves. Puit noir prêt à accueillir la lumière que nos yeux avides effacent aussitôt qu’elle surgit. Les briques noires dont on s’entoure. Et qui obstruent l’espace. Qui blâmer ? Les gestes ? Ou la vue ? Et voilà que nous oublions le regard en surplomb ! Adossé à la citadelle hasardeuse, j’attends que s’ouvrent les portes. J’y attendrai des jours et des nuits. Dans une fébrile excitation. Je m’endormirai exténué d’attente et d’espoir. Je m’abandonnerai enfin aux portes closes. Et la citadelle aussitôt s’effacera. Révélant le royaume que je n’aurai jamais quitté. Comme si ma vue se fatiguait de ne jamais se trouver. De se chercher sans fin en elle-même. Et de ne goûter que son propre reflet sans jamais s’appartenir. Sans jamais s’habiter en glorieuse souveraine. Lasse de n’y dénicher que ses massacres et ses défaites. Comme étrangère à elle-même dans un monde d’ombres et de fantômes arrogants. Qui souffle la braise ? Et les orages sur nos vies incandescentes ? Et qui souffle la mort ? Comme si les vies grises ne pouvaient trouver d’autres ciels. Enterrés dans notre gouffre, nous cherchons à sortir de l’abîme. Nous gesticulons dans notre trou en quête d’une issue. Pour notre plus grand malheur, il n’y a pas d’issue. Et pour la joie des yeux et leur jeu espiègle, il n’y a jamais eu de trou… Et nos ailes poussives continuent de soulever la poussière sans atteindre le moindre ciel. Creusant davantage notre ornière. Le mental — le plan mental — est une atroce illusion d’optique. Effroyable et malicieuse. Nous existons peut-être… mais sous d’autres cieux.

 

2 décembre 2017

Carnet n°52 Réflexions et confidences

Journal / 2014 / L'exploraton de l'être

Je vois les Hommes vaquer à leurs occupations. Et à leur travail. Et je songe (en souriant) que mon activité principale — mon travail à moi — est de ne rien faire. D’habiter l’espace et la présence en notant de temps à autre quelques paroles jaillies du silence. D’accueillir dans la joie, la tendresse et la disponibilité les visages qui viennent à ma rencontre ou qui me rendent visite… D’aimer tout ce qui se présente sans rien rejeter. De goûter la vie fragile et puissante. D’être simplement.

 

 

On aménage parfois sa solitude pour échapper à la pesanteur du monde et à sa superficialité. A la fadeur et aux lourdeurs relationnelles habituelles. Et il nous arrive aussi de songer avec un brin de nostalgie à la joyeuse frivolité des Hommes, à leur compagnie parfois charmante ou délicieuse qui rassurent et contentent en nous ce qui a encore besoin de l’être sans compter, bien sûr, le besoin de repères, d’appuis et de certitudes si prisés par le mental. Et l’aspiration universelle à une présence permanente (et consistante) que nulle rencontre, bien sûr, ne saurait satisfaire excepté celle avec l’Infini que nous portons en nous...

 

 

La clepsydre des heures flétrit les corps et jamais ne nourrit l’âme. Le goutte-à-goutte tombe sur l’esprit spongieux qui se gonfle artificiellement d’une matière appelée à s’évaporer.

 

 

Jouer, célébrer, explorer, comprendre. Voilà quatre verbes que la vie ne cesse de mettre en œuvre. En tant qu’être humain, je m’aperçois — avec tristesse — que j’ai toujours négligé les deux premiers, m’acharnant avec une farouche détermination sur le quatrième en m’appliquant avec couardise et velléité à quelques timides incursions dans le troisième. Bref, un vivant très incomplet…

 

 

Pas d’idée sur ce qui devrait être. Etre simplement. S’ouvrir à ce qui survient. Accueillir ce qui est là. Et laisser passer ce qui disparaît…

 

 

Partout la vie court. Partout la vie s’agite et va. Flux permanent d’énergie entrecoupé de rares répits. Phénomènes naissants. Phénomènes finissants. Forces croissantes et recombinaisons incessantes. Bouleversements perpétuels de la matière et de la non matière. Quelle ronde incroyable et insensée !

 

 

La nature des relations entre les formes ? Guerre et commerce semblent les maîtres-mots.

 

 

Seule l’écoute — l’écoute pure — permet d’appréhender la globalité de la situation. Et d’impulser l’agir ou le non agir juste, approprié à l’ensemble des formes impliquées dans la situation sans alimenter l’ignorance et la haine. Au demeurant, toute action aussi partiale, partielle et réactive soit-elle et toutes ses implications sont justes dans la mesure où elle touche de façon appropriée les différents acteurs concernés afin de permettre à chacun de vivre, d’expérimenter et d’apprendre ce qui a besoin d’être vécu, expérimenté et appris… 

 

 

Que demander à la terre ? Et que demander au ciel ? Nous nous sentons si pauvres… alors que nous avons tant à offrir…

 

 

Que le monde change ou pas, qu’il se transforme ou pas, les mouvements sont en marche et la direction principale (du vivant) est prise depuis la naissance du premier mouvement. Que l’on y participe ou pas ne l’infléchira ni ne le renforcera… le cours des choses possède son propre souffle. Puissant et implacable. Au vu de l’agir, il convient donc de suivre ses propres résonances. Et qu’importe qu’elles appartiennent au mouvement principal ou à des mouvements secondaires, marginaux ou de résistance…

 

 

Le miracle des heures tranquilles.

 

 

L’encombrement des jours pèse sur nos âmes frêles qui n’aspirent qu’à la légèreté des heures.

 

 

La voie sans chemin. Tout est là. Tout est déjà là. Il convient simplement de vivre ce que la vie offre et donne à vivre. De suivre les aspirations que l’on porte en soi. Et de poser nos pas là où la vie nous enjoint d’aller… la compréhension se fait alors naturellement. A son rythme.

 

 

Le bien-être relationnel ; être à l’aise (en tant que créature — corps-mental) avec tout ce que l’on rencontre dans le monde objectal (êtres, choses, situations, évènements, émotions…).

 

 

L’éclat des jours sombres qui éclairent nos fragilités…

 

 

La vie est un voyage en soi-même où l’on est, malgré soi, invité à découvrir et à explorer des régions et des facettes de soi. Mille visages inconnus qui deviennent, au fil des chemins et des rencontres, de plus en plus familiers.

 

 

A l’écart du monde (humain), existe un espace immense — exempt de pollutions mentales composées d’images, de représentations, d’idées et d’aprioris —  que l’on peut habiter avec innocence et gratitude. Et que les désenchantés du monde peuvent investir, toujours plus à l’aise et émerveillés des paysages et des mouvements naturels qui en constituent le décor rustique et enchanteur au sein duquel la puissance sauvage et tranquille de la vie (et de la nature) n’a pas encore été contaminée par l’énergie artificielle et dévastatrice des hommes et leur inclination frénétique et maladive à la rationalisation et à la cohérence.  

 

 

Dans la solitude des collines, je me repose des bruits du monde. Quelques rêveries, quelques bouffées de cigarette et quelques vers de François Cheng accompagnent ma retraite. A mes pieds, une abeille agonisante se débat désespérément sous les assauts pugnaces de dizaines de fourmis. Et aussitôt je pense : « l’effroyable destin des formes soumises à l’insécurité et à la violence ! ». Tant de souffrances et de dévastations me glacent les sangs. Cet évènement — d’apparence anodine — me rend l’âme triste et ravive mon sentiment d’impuissance à intervenir dans l’implacable cours des choses.

 

 

Une ombre sournoise guette ma défaillance. Je la laisserais débusquer mes terreurs.

 

 

Les défaites salvatrices où toujours l’humilité sort victorieuse.

 

 

Je n’ai aucun goût à parcourir le monde. Je n’ai parfois pas même le cœur à explorer ma chambre close. Et où irais-je où je ne sois déjà ? Partout les saisons passent et se parent de leurs atours pour nous séduire et nous inviter à profiter de leurs charmes. Partout sous des visages différents, les cœurs sont identiques. Ils passent avec indifférence, les yeux rivés sur leur route. Ou nous accostent pour nous vendre leurs babioles (dans leur maigre bagage), nous soustraire quelques bénéfices ou nous pousser hors de leur territoire. Le vivant semble une impasse où l’on ne peut que se fourvoyer. Soyons donc au monde (puisqu’il nous est impossible de nous y soustraire) avec une indifférence bienveillante pour tous ses jeux et ses spectacles pitoyables et merveilleux où le vivant ne cesse — à son insu et de façon maladroite — de vouloir échapper à sa destinée comme pour mieux s’extraire de lui-même...  

 

 

Quel être ton âme aime-t-elle en secret ? Habitant là où tu ne sais encore aller…

 

  

Il y a parfois une grande solitude dans mon cœur que rien ni personne ne saurait remplir…

 

 

Je constate que l’idée de solitude demeure tenace dans mes instants de fragilité. Je ressens un vide immense que nulle âme humaine et nulle activité ne pourraient combler… je suis alors si totalement immergé dans l’avant-plan que j’en oublie que je suis l’espace qui accueille tout ce qui se manifeste… et il n’y a d’autre issue que celle de se laisser enlacer par ses bras tendres et réconfortants qui m’accueillent tout entier. Je me laisse alors bercer en m’abandonnant à ses caresses dans la plus grande volupté… enveloppé dans un océan de douceur et de tendresse… la présence bienveillante pure se penchant sur moi, pauvre et misérable créature…

 

 

L’ennui, la solitude, la routine sont parfois ressentis parce que nous ne vivons pas dans la sensorialité (par ignorance ou opacité sensorielle) mais dans les images, les idées et les représentations.

 

 

Rien. Le néant. Le monde a perdu son attrait. Aucune activité ne saurait me tirer de cette léthargie. Je me lasse même des spectacles qui me sont offerts. Les visages autour de moi se sont éloignés. Ne reste rien ni personne.

 

 

En cette terre d’orage, qui peut voir le ciel ?

Qui sait que le rire borde nos larmes ?

L’époustouflante âpreté de l’organique

Saturé de matière, je m’allonge sur le sol, exsangue — privé de toutes forces

Et mon regard ne peut percer la frontière qui le sépare de l’Infini

Je gis parmi les ronces et l’impuissance des chemins

Et si demain n’existait pas ?

 

Ligoté par les lois implacables du vivant

L’abandon est la seule issue

Les pieds enchaînés et les mains attachées

Seul le cœur peut s’ouvrir

Et l’on pleure après tant d’acharnement

De ne pouvoir s’offrir l’ultime récompense

 

Englué dans notre carcan de pierres

On attend la lumière qui ne viendra pas de notre appel

Mais des yeux baissés vers la terre

Où le ciel pourra enfin nous enlacer avec tendresse

 

 

La vie sans présence — l’énergie sans conscience — n’est qu’une gesticulation instinctive ou réactive qui ne suit que son propre mouvement (liée le plus souvent à la survie ou à l’idée de survie et chez l’Homme à satisfaire de tenaces et illusoires besoins psychologiques). Incapable d’attention à ce qui est en dehors de son mouvement. Ni bien sûr d’en prendre soin.

 

 

Après la lecture d’un carnet de voyage — extrêmement personnel et attachant — sur le Japon,  j’ai le sentiment en refermant l’ouvrage que je viens de quitter le pays du soleil levant. J’ai l’impression puissante d’y avoir séjourné avec l’auteur, marchant avec lui dans les ruelles sombres, visitant les temples et les jardins. De cette anecdote — d’apparence triviale — naît une réflexion intuitive intéressante. Les mots constituent un canal incroyable qui impulse — grâce à la mémoire — un lot (et un flot) d’images et de représentations mentales des lieux et des univers évoqués. Et je sens qu’il n’existe guère de différence — sinon le canal utilisé — entre les livres, les films, les rêves, les voyages astraux, les expériences chamaniques et ce que l’on nomme la réalité. Dans ce dernier cas, le canal utilisé est les perceptions sensorielles qui activent les représentations de ce que l’on appelle le réel. Mais il semblerait que l’imaginaire, le rêve et la réalité soient des univers représentatifs projetés et perçus par le mental dont les distinctions sont infimes. L’impression d’avoir visité des lieux, d’avoir vécu des évènements et expérimenté des situations est d’une puissance extraordinaire.

 

 

Une vie au service de l’exploration et de la compréhension de la vie. Telle est, je crois, ma destinée. Celle que l’existence m’a offerte. Peu de bagages. Et nul voyage. Le seul matériau est la vie-même. Pas de fonction ni de rôles social et familial. Rien. Quelques maigres évènements. Loin de l’idée de normalité, j’erre sur des chemins peu fréquentés que je n’ai pas choisis. Et au fil des pas, des régions entières sont visitées. Et des visages reconnus. Après maints périples et impasses, la connaissance de soi semble l’ultime contrée. Et malgré nos avancées, l’Infini conserve son mystère. Et les méandres de l’être n’en ont sûrement pas fini de nous surprendre. Habiter cet espace infini n’épargne pourtant nullement de vivre les plans de l’existence les plus périphériques et les plus triviaux. Etre. Et être au(x) monde(s), voilà à présent peut-être le défi ! Intégrer les univers relatifs à l’Absolu. Et inversement. Mêler et unir ces deux dimensions en une parfaite unité, cohérente et recentrée, spontanée et naturelle pour aller plus libre et plus vivant sur toutes les routes et dans tous les royaumes.  

 

 

Combien d’heures ai-je passées, seul et immobile dans la nature, assis en tailleur sur des chemins de pierres, des rochers inconfortables, des sous-bois ombragés et des clairières herbageuses, contemplant le ciel, les paysages changeants, la faune et la flore, les pensées et le vide, les yeux hagards et l’esprit un peu perdu dans cette contemplation étrange, forcé à l’inactivité, me voyant tantôt sombrer dans une douce félicité tantôt dans une insondable tristesse, voyant mon cœur indécis balancer entre les deux, fumant pendant de longues pauses ou m’allongeant sur le sol en levant les yeux vers le ciel, cherchant l’Infini et m’égarant le plus souvent dans une inconsolable méditation sur les affres de l’existence humaine…

 

 

Je suis parfois triste à l’idée de cette vie si peu active, cantonnée à quelques travaux domestiques, à quelques heures de marche solitaire et quotidienne dans la nature et à la rédaction de quelques lignes sur mes carnets. Mais la rare fréquentation du monde (humain) où je ne perçois le plus souvent que gesticulations réactives et tentatives de remplissage illusoire — en dépit d’une certaine utilité fonctionnelle au groupe — me console (tristement) et renforce mon besoin de me tenir à l’écart (afin de m’épargner cette vaine agitation). Comme si malgré mon âge — j’entame ma cinquième décennie — je n’avais encore véritablement pris la mesure de ma fonction en cette vie. Et au-delà de mes explorations et de mes recherches de n’avoir aucune idée sur ce qui m’anime réellement.

 

 

Ce qui m’intéresse fondamentalement chez les Hommes est leur degré de porosité à l’environnement, leur propension à se laisser toucher, traverser, bousculer et renverser par les rencontres, les situations et les évènements au point de réorienter, de modifier leur vie ou d’impulser des transformations sur des pans entiers de leur existence. Cette inclination révèle en vérité leur ouverture et leur disponibilité intérieure (et de façon sous-jacente leur quête), l’espace libre laissé à ce qui n’est pas eux-mêmes. Ce sont en général des êtres peu chargés de certitudes et de suffisance, qui se sont dégagés de leurs plus grossières carapaces et suffisamment humbles pour ne pas avoir peur de dévoiler à l’Autre leur non-savoir et leur ignorance… qui cherchent dans la rencontre le reflet de ce qu’ils n’ont su ou pu encore trouver en eux-mêmes par eux-mêmes… 

 

 

La solitude me pèse parfois. Mais la présence d’autrui m’est presque toujours insupportable (à de très rares exceptions près). Mon absence de fonction dans la communauté des hommes me met parfois mal à l’aise. Mais toute fonction sociale est pour moi un supplice. Bref… disons-le clairement : le personnage vit presque toujours un rapport au monde inconfortable… 

 

 

Il reste là, le petit bonhomme. Simplement là à attendre sans attendre que la vie lui donne une direction. Lui dicte un chemin où poser son pas. Mais il a beau regarder partout. Etre à l’écoute. Rien. Aucune invitation nulle part. Comme si la vie l’invitait simplement à rester là. A s’abandonner à ce qu’il ressent comme un enlisement. Un bourbier où il a l’impression de s’enfoncer un peu plus chaque jour depuis près d’un an. Que faire sinon s’ouvrir à ce qui est là en attendant un signe improbable ? Pour l’heure, aucun présage ni sur terre ni au ciel. Et un sentiment d’ensablement quasi permanent. Simplement se laisser être à la bonne volonté du ciel et des jours…

 

 

Dans ces sous-bois impartiaux, que de rêves naissants qui ne verront jamais le jour ! Comme si les lois du ciel et de la terre ne les autorisaient à éclore… morts in-utero. Et nous voilà à nouveau sans bagage, ouvert au moindre signe, au moindre appel malgré leur inexistence ! Que faire sinon tenter de rester à la source même de l’écoute en laissant les gestes et les choses aller de leurs pas routiniers et mécaniques !

 

 

Disciple de personne, je ne marche à la suite d’aucune empreinte. Seuls le ciel et la terre guident mes pas sur le sol nu et vierge. Chaque foulée et chaque arrêt sont mes seules boussoles. Et mes seules consolations. Et nulle part est ma destination.

 

 

Au jeu du « je », je ne veux pas jouer. Je suis trop mauvais perdant…

 

 

Que voulez-vous que j’y fasse si je suis désespéré ? A l’évocation de cet ouvrage de Günther Anders, je souris avec sympathie et amitié. J’ai bien connu ce sentiment autrefois…

 

 

Moi qui ai goûté la saveur (et les délices) de l’Absolu — sa paix, son silence et sa joie — je ne suis plus à présent qu’une âme vide et avide de retrouver (de réhabiter) cet espace. Mais je sais aussi que certaines caractéristiques du personnage (noirceur, gravité, austérité…) doivent être complètement reconnues, accueillies et intégrées. Et au vu de mon état d’esprit actuel, ce travail déplaisant est sûrement en cours…

 

 

[Le cheminement humain vers la connaissance — Tentative de synthèse]

Il y a le rien triste. Et le rien joyeux. Il y a le je ne sais pas triste. Et le je ne sais pas joyeux. Dans les premiers cas, on est collé au mental, chargé d’idées sur notre misère et sur le mauvais pas dans lequel on se sent pris au piège, chargé d’idées sur les gesticulations les plus appropriées pour s’en extraire et sur ce que devrait être notre vie. Dans les seconds cas, on est Ce qui perçoit avec bienveillance ce qui est, sans idée, sans commentaire, sans jugement. On est l’espace d’accueil clair et tendre dans lequel tout s’insère et se meut. Si une action surgit naturellement et spontanément, l’action s’effectue. Si rien ne surgit alors rien ne surgit ! Pas de problème. Jamais de problème. Alléluia ! Pour passer de la première perspective à la deuxième, il suffit de laisser la vie nous immerger dans notre misère et la laisser nous décharger de nos encombrements (nos idées, nos prétentions, nos espoirs, nos croyances, nos représentations) alors quelque chose de l’ordre de l’abandon peut advenir. On finit par s’abandonner simplement à ce qui est là… mais disons-le sans ambages : en général, ce passage est âpre et douloureux !

Avant le rien et le je ne sais pas tristes, il y a le faux plein qui n’est en réalité qu’une fuite éperdue de ce qui est et une vaine tentative de remplissage afin d’obtenir ce qu’on imagine meilleur ou plus avantageux. Avant le rien et le je ne sais pas tristes, il y a aussi le je sais ignorant et orgueilleux qui n’est en réalité qu’un je crois que je sais ou un je me persuade que je sais comme une façon maladroite et inadéquate de se rassurer quant à nos présupposées identité, connaissances et compétences… histoires que l’on se raconte (à soi-même) et que l’on raconte aux autres pour éviter la dépression, la folie ou la désillusion généralisée afin de ne pas sombrer prématurément — avant que l’on ne soit suffisamment mûr pour cela ou autrement dit que la compréhension en nous ait quelque peu progressé — dans le vide abyssal que nous sommes… Ainsi semble être le chemin à parcourir… après toutes ces vaines accumulations, on se désencombre jusqu’à ce qu’il ne reste rien pour enfin goûter la saveur de l’être nu…

Au-delà de ce passage — dont on ne sort peut-être jamais complètement tant nos encombrements sont parfois tenaces sur certains points — il y a des oscillations régulières entre les deux perspectives ; l’arrière-plan et l’avant-plan  (au gré des évènements qui stimulent la périphérie de l’être). Oscillations qui semblent progressivement ne plus nous affecter aussi radicalement. Vient ensuite la nécessité ressentie d’unir les deux plans, le besoin d’intégrer les caractéristiques de notre personnalité à l’Absolu pour que la présence impersonnelle — cet espace infini et lumineux que nous sommes en arrière-plan de toutes manifestations — soit en parfaite unité avec tous les phénomènes surgissants. Nous devenons alors Un avec toutes choses. L’unité parfaite. Voilà, me semble-t-il, retracé en quelques mots le parcours possible d’un être humain sur le chemin de la connaissance de soi. Au-delà, je ne sais pas. Une totale et complète ignorance. 

 

 

Que goûterions-nous de l’Absolu si l’organisme ne possédait de cerveau ? Le goûterions-nous autrement ? Question évidemment sans réponse…

 

 

La marche brune des siècles où le fascisme idéologique de la destruction se propage et s’amplifie, uniformisant la pensée et dévastant partout le vivant. Comme si ce dernier vouait une part substantielle de ses forces à sa propre éradication. Comme si l’organique portait en lui les germes de sa destruction. Et de sa disparition. A l’instar de toutes les formes qui portent en elles leur finitude. Si cette hypothèse est confirmée, la vie — le vivant organique — perdrait, aux yeux des Hommes, sa primauté et son rang d’entité sacrée et indépassable… bref son statut indétrônable. Le vivant serait-il donc une phase dans la forme que prend l’énergie… ? Et au-delà de son sempiternel jeu combinatoire tantôt grossièrement et provisoirement condensée tantôt fluide, l’énergie ne serait-elle pas, elle aussi — comme toutes les autres manifestations — régie par le cycle perpétuel de l’apparition, de la croissance, du déclin et de la disparition… ? 

 

 

Pensée intuitive (corolaire du précédent paragraphe) totalement inutile (car non intégrable au vécu) mais que je note ici pour la beauté du geste, le plaisir réflexif et l’incroyable largesse du champ de pensée dans laquelle elle s’inscrit. Et si le vivant n’était en réalité qu’une étape pour l’énergie comme le bourgeon l’est dans la croissance d’une plante, bourgeon qui donnera une fleur qui donnera un fruit qui donnera des graines qui donneront naissance à de nouvelles plantes. Elargissons encore un peu ! A ce stade, de deux choses l’une : soit l’énergie n’est, elle aussi, qu’un stade dans un processus qui la dépasse largement (qu’un autre bourgeon dans un processus plus vaste) et dans ce cas difficile d’imaginer en quoi l’énergie pourrait se transformer (en pure lumière ?) et quel est ce processus plus vaste dans lequel elle s’inscrirait… serait-ce la conscience élargissant encore « sa zone d’action » mais cela viendrait contredire l’axiome premier qui est que tout se manifeste dans cette conscience infinie, à moins que la lumière phénoménale soit amenée à inonder l’ensemble de la conscience lumineuse infinie ne laissant en elle aucune marque d’obscurité soit — comme il est sans doute plus vraisemblable et en tout cas plus raisonnablement envisageable — l’énergie est la plante elle-même qui passe par plusieurs étapes dans un jeu cyclique et perpétuel de son renouvellement et de son expansion… 

 

 

En regardant un documentaire sur la foi (chrétienne), j’ai le sentiment que tous les croyants interviewés tirent leur joie du sentiment qu’ils se sentent portés par les bras d’un plus grand qu’eux-mêmes.

 

 

Au cours de mes promenades quotidiennes, tout un peuple à mes pieds accompagne mes longues pauses solitaires. Une vie imperceptible, riche, rude et tranquille que les Hommes ignorent ou refusent de voir, leur rappelant sans doute avec trop d’évidence leur existence minuscule…

 

 

Je tente maladroitement de m’interroger sur ce qui m’anime profondément. Et je m’aperçois — avec un peu d’effarement — que mes centres d’intérêt se sont considérablement rétrécis au fil des années et qu’ils se limitent aujourd’hui à quelques maigres domaines : la quête et la connaissance de soi, les animaux et en particulier les chiens, l’écriture (comme chemin de compréhension) et la nature. Au cours de ma réflexion, je me rends compte que seules deux choses me réjouissent et m’émeuvent au plus haut point (jusqu’aux larmes). La première est de voir un être s’occuper d’un autre plus faible plus démuni et plus mal en point comme par exemple un être humain prenant soin d’un animal fragile ou fragilisé, vieux ou malade. La seconde chose qui me réjouit d’une incroyable façon est de voir un être en quête de lui-même, animé d’une insatiable curiosité et avide de réponses qui cherche à comprendre le grand mystère de la vie. Et disons-le sans détour, de tels spectacles sont malheureusement peu fréquents. A leur vue, une joie incroyable m’envahit tout entier. Et je sens monter en moi un puissant désir d’aider et d’offrir mon maigre bagage. J’embrasserais et enlacerais d’un amour débordant les acteurs principaux de ces scènes merveilleuses. En écrivant ces lignes, je prends  conscience que ces deux domaines ne sont en réalité que l’expression tangible de l’Amour et de l’Intelligence qui constituent en effet les seuls aspects de la vie qui m’intéressent réellement. Profondément et passionnément. Ce à quoi, il est vrai, je m’empresse de me livrer sans jamais rechigner jusqu’à mes dernières limites (mon seuil de saturation personnel) lorsque la situation se présente. Je comprends donc qu’hormis cet Amour et cette Intelligence, rien ne m’intéresse. Mais je note aussitôt (en esquissant un sourire un peu moqueur) que tout — tout ce qui existe et se manifeste — est l’expression (parfois très indirecte, parfois déguisée ou imperceptible) de cet Amour et de cette Intelligence. Comme si le monde prenait un malin et diabolique plaisir à revêtir les habits de l’ignorance et de la haine. Ah ! Quelle merveilleuse existence qui offre l’occasion de travailler à chaque instant du jour comme de la nuit pour débusquer l’Amour et l’Intelligence là où l’on croit ou imagine qu’ils ne sont pas…  

 

 

Aujourd’hui, ouverture de la chasse. Je hais les chasseurs. Je les ai toujours haïs. N’ayant jamais pu comprendre comment on pouvait s’adonner à un plaisir si sanguinaire… bref, en ce premier jour de tuerie officiellement autorisée, ça canarde dans tous les coins. Et le lieu où j’habite n’est même pas un refuge. Les détonations pleuvent de toutes parts puisque la maison située en rase campagne est entourée de prés et de champs, repères précaires pour les malheureux animaux qui font office de gibier. Quant à aller se promener dans les collines, il n’en est pas question… au vu de leur nombre et de leur propension à envahir d’une façon agressive et guerrière tout l’espace, on a vite le sentiment que notre territoire se réduit à à peu près rien

J’ai pourtant beau savoir que dans le grand cycle des réincarnations, les lapins et les sangliers d’aujourd’hui sont les chasseurs d’hier et que les chasseurs d’aujourd’hui seront les lapins et les sangliers de demain, je ne parviens pas à avoir l’once d’un début de compassion pour ces monstrueux prédateurs…

A l’évocation de cette thématique, une anecdote me revient en mémoire. Alors que je m’apprêtais à reprendre ma voiture laissée sur le bas-côté d’une petite route isolée après quelques heures de marche en forêt tout de vert vêtu et avec mes chiens ravis, un nain monté sur un scooter s’arrête à ma hauteur et me demande : « alors tu as tué un peu ? ». Pris de court (si j’ose dire), j’ai grommelé d’un air outragé et ombrageux en montant sur mes grands chevaux : « moi, je ne suis pas chasseur, c’est odieux et patati et patata… ». Bref, un manque total de répartie. J’aurais dû lui répliquer avec une ironie très sérieuse : « ouais, j’ai tué quatre nains, ils sont dans le coffre mais il m’en faudrait un cinquième pour faire des brochettes… »

Je vois que ce thème ne me laisse pas indifférent. Et j’avoue que si j’avais mesuré 2,10 mètres et pesé 120 kg (120 kilos de muscles), j’en aurais botté le cul à plus d’un. Botter le cul ou plutôt en termes plus réalistes écraser la gueule jusqu’à en faire de la bouillie ou de la pâté pour chiens. Le problème, c’est que je fais 1,10 mètre…

Quand je croise ces abrutis attablés devant « un bon gueuleton » ou le fusil à la main, je ne peux m’empêcher de leur lancer des invectives et des injures, assez fort pour qu’ils aient écho de mon mécontentement mais pas assez pour qu’ils entendent réellement le contenu de mes propos. De jolis noms d’oiseaux dont je les affuble avec une farouche détermination en les répétant une bonne demi-douzaine de fois… en criant de plus en plus fort à mesure que je m’éloigne (quel courage !) en souhaitant toujours leur mort et avec l’inavouable et secret désir que l’idée leur prenne un jour de s’entretuer jusqu’au dernier…

Je m’aperçois que sur le sujet je suis prolixe. Et même intarissable. Les mots sortent comme du pue… un besoin d’expulser ma rage et ma hargne bien inoffensives…

 

 

Petite virée citadine pour me rendre à la bibliothèque. J’en reviens épuisé. Tous ces mouvements d’énergie m’ont vidé de la mienne… je ne suis plus capable d’être immergé dans l’effervescence et le brouhaha urbains plus d’une heure. Au-delà, mes défenses se dissipent… et toute présence humaine devient une agression intolérable...

 

 

Il semblerait que l’existence s’aménage toujours autour de nos singularités. De nos caractéristiques essentielles. Ainsi, je suis le témoin privilégié de la façon dont elle s’est organisée pour moi ces dernières années. Immenses plages d’espace et de liberté. Vie à la campagne dans une petite maison isolée. Solitude. Pas de fonction professionnelle définie. Pas de rôle social. Pas de famille. Pas d’enfants. Peu de visages (très peu de visages). Chiens et nature. Longues promenades quotidiennes dans les collines ou en forêt. Travaux domestiques. Lecture. Ecriture de quelques notes sur mes carnets. Longues méditations. Longues pauses dans le rythme tranquille du quotidien pour ressentir et goûter l’être. Quelques rêveries agrémentées de quelques déviances à cette ascèse en soirée (ascèse qui n’en est pas une tant elle est naturelle) comme petit espace récréatif (offert au mental) dans le visionnage de documentaires ou de films.

 

 

Cantonné à la marginalité ou à l’inadaptation sociale pour les uns, au statut d’handicapé et d’invalide pour les autres, j’ai toutes les caractéristiques du looser intégral aux yeux du monde qui pose sur chacun un regard empli d’idées, d’images et de références identitaires et administratives etc etc. Et qu’importe ! Je suis riche de l’être et parfois des pensées sur l’essentiel et le vrai des choses qui parsèment mes carnets ou mes paroles au fil de mes rares conversations… hormis ces attributs — fondamentaux à mes yeux — je suis de la race des passe-partout. J’appartiens au grand peuple des anonymes ordinaires. Mais contrairement au plus grand nombre, je n’ai pas la prétention d’ériger au rang d’idéal la plus affligeante et triviale des existences…

 

  

La panurgerie n’est assurément pas à mes yeux la garantie d’une vie exemplaire ou remarquable. Ni la preuve d’une forme d’intelligence — fut-elle adaptative. Mais plutôt de leur exact contraire tant elle est usuellement impulsée par le mimétisme et la veulerie…

 

 

Le monde est un florilège de représentations. Et une fois ses besoins organiques satisfaits, il semblerait que chaque individu n’ait qu’une seule obsession : son image et celles de ce qui l’entoure… nous vivons dans un monde où une part substantielle du temps et de l’énergie est consacrée à valoriser et enjoliver ces images… Un monde de réclame (comme on disait autrefois) et de propagande à l’échelle individuelle comme à l’échelle collective. Un univers abject qui agit chez moi comme un repoussoir. Même si j’ai conscience que cette quête de beauté de surface révèle à l’insu de ceux qui s’y livrent une véritable recherche du Beau…  

 

 

Ah ! Ce besoin pathologique de vouloir offrir au monde une belle image de ce que nous croyons être ! Le mental est si sensible à ce qu’on lui renvoie qu’il dévoile par son insatiable besoin d’amour et d’approbation, l’immaturité de celle ou celui qui se prête à ce petit jeu médiocre des apparences…

 

 

A mesure de mon exploration de l’être, je décèle avec plus d’aisance et de rapidité l’idéologie sous-jacente de tout discours et les caractéristiques principales des êtres que je suis amené à croiser ou à rencontrer…

 

 

Tout référentiel est un encombrement. Il empêche non seulement de voir neuf mais surtout de vivre neuf, d’accéder à la grande liberté du regard et de l’âme pour leur permettre d’appréhender ce qui est sans aucun support comparatif qui ligote toujours la vision et l’agir dans des restrictions incarcérantes.

 

 

Les activités frénétiques et le brouhaha humains me sont devenus presque insupportables. Je ne peux désormais souffrir la belle organisation ordonnée du monde humain où chacun se donne à sa tâche, les uns creusant des trous juchés sur des engins de chantier, les autres charriant de gros blocs de pierre dans leur camion, d’autres encore servant des clients à la terrasse de cafés ou soignant des patients dans leur cabinet comme les frêles maillons d’une chaîne monstrueuse et insensée qui oblige chacune de ses composantes à être rivée à son poste sous couvert d’une utilité fonctionnelle au groupe… 

 

 

Je vois les Hommes vaquer à leurs occupations. Et à leur travail. Et je songe (en souriant) que mon activité principale — mon travail à moi — est de ne rien faire. D’habiter l’espace et la présence en notant de temps à autre quelques paroles jaillies du silence. D’accueillir dans la joie, la tendresse et la disponibilité les visages qui viennent à ma rencontre ou qui me rendent visite… D’aimer tout ce qui se présente sans rien rejeter. De goûter la vie fragile et puissante. D’être simplement.

Et n’en déplaise aux hommes, le je suis est sans doute le plus noble et le plus abouti des « travails ». Le plus incompréhensible et le plus énigmatique aussi. Et sans doute le moins ostentatoire pour les yeux immatures qui n’y décèlent qu’une sorte de paresse mortifère ou une langueur d’âme répréhensible. Comme de pauvres et misérables prunelles qui confondent présence, activité et agitation gesticulante, voyant dans cette dernière le seul signe tangible du labeur humain…

 

 

Je n’aime rien tant que ces longues pauses méditatives au cours de mes promenades, étant simplement là — empli de présence et de joie parmi les arbres et les pierres du chemin, me laissant aller parfois à quelques rêveries ou lisant quelques lignes ou quelques pages d’un livre, contemplant au loin la folle effervescence des Hommes et me laissant traverser par quelques fulgurances intuitives que je note — sans empressement — sur mes carnets. La vie s’écoule ainsi douce et apaisée, pleine et intense dans la présence et la plénitude. Et le doux ronronnement des jours tranquilles.

2 décembre 2017

Carnet n°51 Journal fragmenté

Journal poétique / 2014 / L'exploration de l'être

Les 10000 chants du monde ne résonnent plus à mes oreilles. Je marche inlassablement sur des chemins de silence où m’accueillent des myriades d’arbres et d’oiseaux. Je m’assois sur les rochers qui surplombent la plaine où les visages grimaçants se courbent sous le poids des peines. Je n’entends plus ni leurs cris ni leurs pleurs. Je cueille d’une main la rosée et d’un doigt offert au ciel, je m’ouvre à l’Infini. Qui sait que mes pas m’ont déserté ? Que mes mains ne sont plus miennes ? Et que mon visage s’est effacé ?

 

 

Je suis un personnage. Un minuscule personnage. Effrayé par ce monde si vaste.

Et toi ? Qui es-tu ?

Je suis… toi… je suis… l’espace… je suis… le monde… je ne suis… rien…

Qu’allons-nous faire pour vivre ? Et trouver un peu de joie ? Dans ce monde si désolant où l’on ne rencontre que pleurs et misère. Dans ce monde de bêtes affamées. Dans ce monde de drapeaux et d’épées où l’on voit partout le sang couler...

Le sang coule en effet… la terre se nourrit d’elle-même… peut-on empêcher le sang de couler ?

 

*

 

Le monde semble une machine infernale. Il n’a pourtant davantage de consistance qu’un songe.

 

 

Il marcha longtemps avant de témoigner. Sur toutes les pistes, il avait erré. Que fallait-il voir ? Il se posa longtemps la question.

 

*

 

Tu L’habites quand tu n’es pas.

 

 

La présence, le monde et le personnage ne font qu’Un.

 

 

Il n’y a de jours à bannir. De pièges à détruire.

 

*

 

La poésie l’avait toujours profondément ennuyé. La poésie absconse. Celle que l’on ne comprend pas. Non par manque d’intelligence. Mais par l’ésotérisme outrancier de ses auteurs.

 

 

Une bague au doigt ? « Moi, jamais » avait-il crié. Une voix en lui s’était révoltée. Une autre, plus sage, s’était mordu la langue. Jusqu’au sang. 

 

*

 

Nous ne sommes qu’un rêve…

Oui mais… qui est le rêveur ? Qui nous rêve… ? Et peut-on le rencontrer ?

Marchons ! Et allons à sa rencontre…

 

*

 

L’heure chavira. Et le plongea dans l’abîme.

 

 

Il se délesta de toutes charges. De toutes fonctions. Et s’en fut dans son plus simple appareil. Un cerveau chargé à bloc. D’une incroyable sophistication. Obstacle quasi rédhibitoire à marcher nu.

 

 

« Avec en tête, tous les rêves du monde, que puis-je faire ? » se demandait-il. L’encombrement tenace agissait comme un étau. Et la vie, pourtant, le pressait à vivre. Et pour lui, vivre c’était comprendre.

 

 

Aucun lieu où habiter. Il rêvait d’espace. Et d’Infini. Aurait aimé savoir où ils se logeaient.

 

 

Il rêvait d’Absolu. Et d’éternité. Mais ne voyait partout que de misérables organismes rampant vers le confort. Et le gain dérisoire de quelques années de vie supplémentaires. Triste monde, pensait-il souvent.

 

*

 

Le rien infinise. Et l’espace s’éternise.

 

*

 

Il refusait toutes formes de contrainte. L’écriture, elle aussi, se devait d’être libre. Libérée des cadres. Libérée des formes. Libérée même de l’idée de lecteur. Soumise à la seule aliénation de son auteur.

 

 *

 

La misère écarlate des rouges à lèvres. Il éprouvait une étrange attirance mêlée de dégoût pour les femmes peinturlurées. N’était pas dupe de leur misérable stratégie pour susciter le désir de pénétration (pour plagier la fameuse — et affameuse — phrase de Houellebecq).

 

*

 

Le monde se retire. Il gisait au creux de sa main inerte. L’océan avançait. Submergeait les terres arides. L’univers bientôt prendrait fin. Un dernier rire avant de disparaître.

 

 

Le soleil brillera toujours. Seul le rire des hommes est fragile.

 

*

 

Je me sens si dérisoire. Si vulnérable. Si seul.

Mais ne sommes-nous pas tous ensemble… ?

Sommes-nous seuls ? Les gens et le monde existent-ils ?

Allons à leur rencontre… nous verrons bien…

Et chemin faisant, ils allèrent à la rencontre du monde, s’arrêtant ici et là…

 

*

 

Le personnage résiste. Le sempiternel refus de la compromission et de la soumission à toutes formes contraignantes. A tous modèles de pouvoir. De vieilles lunes (pour le mental). Reflet de soi, oui. Refus inconscient de son propre autoritarisme et de sa propre mesquinerie. Mais on y sent aussi une résistance plus profonde à la monstruosité. Toujours ce besoin d’innocence, d’honnêteté et de pureté. Et son impossibilité d’advenir au niveau phénoménal. L’immaculé n’appartient qu’au nouménal. Alors pourquoi ce besoin de le voir fleurir dans le monde ?

 

 

Rejet du leurre. Et de la manipulation mentale si répandue ici-bas. Toujours à l’affût de toute idéologie sous-jacente. Et du besoin quasi organique de chaque forme d’étendre son territoire physique ou symbolique (pouvoir et puissance). Profond mal-être à la vue de ce processus. Et refus absolu d’y être impliqué (en tant que forme). Serait-ce un refus profond (viscéral) du réel ? Ou tout au moins de l’une de ses caractéristiques centrales ? Car partout en effet, cette dimension est à l’œuvre. Ô quel terrible conflit (ou quelle terrible incompréhension ?) que celui de vouloir la pureté là où elle ne peut advenir !

 

*

 

En ces temps d’amertume outrancière, il divaguait sur l’horizon. En ces temps d’asphalte piétiné, il fit halte. Aurait préféré rejoindre le silence. Mais à la périphérie, la joie s’éloignait. La fouille l’écartait de son centre. Ondulations des frontières mouvantes. Délices amers de l’enfouissement. Secousses de la dérive. Dérivations et déviance. Grand écart par-dessus la norme. Semelles posées aux extrêmes. Assise poreuse et inconfortable. Il lui fallait à présent se laisser happer par l’un des pôles. Laisser le mouvement le porter vers ses contrées naturelles. N’opposer nulle résistance au libre déploiement de son destin. Forces en mouvement inébranlables. Puissance à l’œuvre rognant la volonté personnelle d’investir une direction. Anéantissement des aspirations. Choix et libre arbitre illusoires dévastés par les flux en présence. En ces temps d’incertitude, nul point d’accroche. Nulle bouée. Nul horizon. L’abîme de chaque instant. L’abîme de l’immobilité. L’abîme de chaque pas. Tiré entre ciel et profondeur de la terre. Entre zénith et nadir. Disparition de la mobilité de surface. Disparition de toute horizontalité. Surface plane réduite à néant. Comme si la verticalité imposait sa puissance. Implacable. L’enjoignant aux montées et aux descentes sur l’unique axe survivant. Entre noirceur des abysses et transparence du ciel. Quelque part (entre les deux) il se tenait, mobile. Espérant seulement l’irrépressible attraction de la lumière. Et misant — sans doute avec trop d’espoir — sur son attrait si ancien. Comme si le temps des divagations horizontales s’achevait. Comme si le temps des errances de surface prenait fin. Comme si la verticalité s’imposait enfin comme seul chemin. Pour que le marcheur usé par les pas et les paysages du monde se laisse enfin porter par le vent et les forces (telluriques) qui l’ont placé en ce lieu. En cette aire d’envol ou de plongeon. Encore soucieux de la direction mais impuissant à la déterminer. Obligé de se la voir imposer.

 

*

 

J’aimerais rencontrer un sage. Un vieux maître de l’humanité

Parle… Que veux-tu savoir ?

 

*

 

Ne pas alimenter la sauvagerie du monde. Ne pas la juger. Ne pas la condamner. Et ne pas la nourrir. Cette violence ontologique du phénoménal a (sans doute) pour fonction de faciliter la compréhension à l’œuvre. Permettre aux différents organismes (formes et êtres) de la vivre du dedans afin de leur faire intégrer (entre autres) le respect fondamental de ce qui est — le manifesté et ses deux grandes catégories perceptibles : le vivant et l’inerte.

 

 

 La légèreté consistante de l'être.

 

 

Entremêlement resserré entre personnage et présence. Indissociables. Les singularités et caractéristiques du premier sont accueillies. Et insérées dans l’espace. Dans une étrange combinaison où la dimension égotique, ses conditionnements et ses limites trouvent enfin un espace d’acceptation. Et d’intégration. Dans lequel l’Absolu se manifeste à travers les spécificités du personnage toujours entaché de résidus égotiques. 

 

*

 

L’éveil est déjà là. Il suffit de s’y ouvrir. D’être présent à ce qui est là. A ce qui naît. A ce qui passe. A ce qui meurt. Présent à tout. Présent à rien. Aux obstacles qui n’en sont pas. Aux encombrements qui tirent leur source du vide. A la colère. A la tristesse. A la solitude. Présent aux jours qui passent. Présent à tout ce qui s’efface. Et quand tout s’efface, l’on demeure.

 

*

 

Les heures rocailleuses s’étiolent. Aire plane du temps.

 

 

Sur la terre enchanteresse, un décor. Des paysages d’infortune. Et dans les abysses, l’âme qui s’élève. Pour habiter de l’autre côté du rempart. Après des pertes immenses. La déchéance des représentations. Des rythmes paisibles et endiablés. La terreur des visages. L’appel des horizons. La sécurité des frontières. Les secousses salvatrices. Le ciel nu. La terre des métamorphoses. L’œil hagard. L’âme errante. Le territoire infini. L’absolue demeure. La présence éternelle enfin.

  

 

Gouttes délicates. Joie sans tache. Déferlement et désert. Charivari renversant. Ephémères contrées. Herbes couchées. Prairies clairsemées. Oublieux du passé, tu avances. Happé par les paysages. Terre jonchée de feuilles. Allongé contre le roc saillant. Tu t’agenouilles devant la beauté des cimes. L’oreille attentive au désarroi. A l’éviction des mondes. La traversée de la porosité sans relief. Des surfaces lisses et imbibées. Ternies d’aucun espoir. La disgrâce du cœur délaissé. Les meurtrissures s’éparpillent. Sans concession tu demeures. Indemne des prises d’assaut. Léger, tu danses. Etonné des printemps nouveaux. Ravi de tant de splendeur. Les étoiles se courbent. Si légères à tes pieds fleuris. Tu danses sur la crête. La masse noire du monde au loin. Défaites les tentatives. Le son du bois se fait sourd. L’appel de la forêt. Tu cours parmi les arbres. Insoucieux des épines et des souches. Tu ne rêves pas. Tu vis. Le noir à tes trousses ne t’effraie pas. Le souffle s’étend. 

  

 

Terre éteinte. Ciel resplendissant. Unitaire. Dégagé des empreintes. Des surfaces. Décors réconciliés. Parterres fleuris sur le ciel ouvert.

 

*

 

Il se tenait à l’écart du monde. Juste à côté de la vie. Pressentant que c’était là l’unique passage pour entrer en elle. Et la laisser entrer en soi. Afin de remonter jusqu’à La source.

 

 

Intrépide en pensées. Mais craintif (comme une huitre) devant l’écrasante puissance du monde.  

 

*

 

La demeure est cossue. Et l’herbe grasse. Aussi gras que le rire des convives attablés devant le banquet. Orgie d’oisiveté et d’insouciance. Expression manifeste de la fuite. Et toujours l’ennui qui attend derrière la porte.

 

*

 

Heures creuses et solitude. Portes d’accès à la plénitude souveraine

 

*

 

Le monde pouvait courir à sa perte. Il pouvait même disparaître. Il demeurait assis à ses côtés. La Vie maintenant son regard dans ses bras réconfortants.

 

 

A l’issue du carnaval, les figurants ôtent leurs plumes et leurs parures. Délaissent leur costume à paillettes en pleurant, happés par leur misère reléguée aux oubliettes pendant les quelques instants de la fête. 

 

 

Sur des tablettes vierges, le destin s’écrit. Arriverait-il à bon port ? La Vie se chargerait de la destination des corps. Quant au reste, le ciel était toujours transparent.

 

 

Que le monde s’efface dans le silence ! Et cette voix en lui qui ne cessait de crier…

 

 

A quoi bon soumettre les hommes au pire ?  De cette fange, le meilleur demeure invisible.

 

*

 

Il haïssait les intellectuels qui ornent leurs discours et leurs livres d’un hermétisme volontairement abstrus et sophistiqué. De la poudre jetée aux yeux crédules. Des ponts d’or vers de longs détours.

 

*

 

Derrière les gesticulations et la rumeur des villes, il entendait un long cri silencieux. Comme un bruit de chaînes invisibles que l’on racle sur le bitume. Et qui confine les Hommes à l’agitation et à la fureur.

 

 

A la terrasse des heures, il voyait les âmes s’impatienter.

 

 

Le cours de choses. L’odieux et admirable cours des choses. Et le regard inouï qui accueille la ronde.

 

*

 

Aucune méthode. Aucune stratégie. Laisser le mouvement guider la spontanéité. Le naturel est assuré de trouver sa pente…

 

*

 

Le destin lacustre des automates. La rouille. Et l’engloutissement.

 

*

 

L’écriture et la parole. Une farandole de mots glissant dans le silence.

 

 

Le personnage séquestré dans ses limites crie son désir d’Infini. Mais qui l’entend ? L’espace est le seul lieu de l’écho. La source même de la voix. Et le réceptacle de sa lente agonie. Jusqu’à son effacement total. Ondes plates et résonances dans le silence.

 

 

Ces mots, se demandait-il, serait-ce un récit ? Des fragments ? Un journal de philosophie poétique ? De poésie philosophique ? Non ! L’état brut de l’expression de la vie. L’une de ses innombrables manifestations langagières.

 

*

 

Le recueil des heures tranquilles. Bien calées au fond de sa maigre besace. Sous des tonnes d’ennui, de cris et de désespérance. Entourées de l’espace salvateur qui dissout les malheurs, les frustrations, les écœurements et les rancœurs.

 

 

Il surprit le monde. Assistait à ses mille spectacles. Une nonne dans la rue tendant la main vers l’horizon pour indiquer son chemin à un passant, un oiseau se désaltérant à la fontaine d’un village, un vieux assis sur un banc. Les commerçants attendant les chalands derrières leurs étals. Les amoureux en promenade se tenant par la main. Les vieilles traînant leur caddie en revenant du marché. La rumeur de la ville. Et le regard perdu. Absorbé par l’immense scène du monde.

 

*

 

Fréquentation du monde humain l’espace de quelques instants. Comme une brève incursion dans la vraie vie des gens, faite de représentations et d’idées… comment leur dire que cette vie-là n’est qu’un mirage ?

 

 

Laisser le temps dégrader les corps. Cadenasser les esprits. Jusqu’à l’explosion. Jusqu’à la disparition.

 

*

 

Le goutte-à-goutte laborieux de la pluie qui recouvre chaque parcelle de la terre…

 

*

 

Toujours laisser la Vie se manifester. S’exprimer. Ne pas — autant que possible —  stopper, briser, contrarier ou cadenasser ses élans. Ne pas créer de mouvements antagonistes. De mouvements de résistance. Tout laisser naître, croître et s’éteindre dans le silence.

 

*

 

Sur l’immense scène du regard se jouent les farces et les drames — petits et grands — les pirouettes, les cabrioles, les pieds-de-nez, les longues glissades… jouets du mouvement, les formes s’y prêtent bon gré mal gré, le cœur grave ou l’esprit léger, engluées dans la toile infinie où les destins se croisent et s’emmêlent…

 

 

Le départ majestueux des foules… dans un lent (et long) mouvement vers l’Inconnu.

 

*

 

Le livre est un compagnon de route facile et peu exigeant. Il s’offre et réconforte.

 

 

 

 

Le crépuscule des ombres. Toujours mortifères.

 

*

 

Il n’est besoin de rien pour être vivant ; un peu d’air, un peu d’eau, quelques fruits, quelques légumes, quelques vêtements, un abri contre la pluie et le froid. Et le corps est à son aise.

 

 

Les Hommes : des yeux fermés. Et une énergie brute. Gesticulante.

 

 

Dans une église, il vit deux visages se prosterner à la face de Dieu. L’un croyant sans doute y voir le Père tout puissant. L’autre sentant simplement qu’il s’agenouillait face à lui-même. Comme deux parties célébrant leur gratitude et leur reconnaissance réciproques.

 

*

 

Grandir sous les nuages. Mûrir dans le brouillard. Pas étonnant que les hommes ne voient pas le ciel ! Et que la cécité les frappe quand il leur est dévoilé !

 

 

Lorsque tu es encombré d’idées sur ce que devrait être la vie, il faut t’attendre à vivre la grande misère des attentes et de la prétention.

 

*

 

En ses terres reculées, il continuait d’observer le monde.

 

 

Le progrès (technique) semble avoir pour seuls desseins (conscients ou inconscients) de se défaire des désagréments du corps (pesanteur et douleur essentiellement) et de faire advenir sur le plan phénoménal (et au niveau mental) — de façon maladroite et intelligente mais sans aucun doute en vain — les caractéristiques principales du nouménal (paix, joie, éternité, infini, liberté, amour).

 

*

 

[Carnet de l'exploration de l'être]

La double thématique de la désidentification et de l’unité m’a longtemps hanté sans que je réussisse à en percer l’apparente contradiction. Aujourd’hui, quelque chose peut-être a été compris. C’est comme s’il s’agissait en premier lieu de se décoller du mental (distanciation) pour habiter l’arrière-plan (la présence). Puis, dans un second temps, lorsque la présence est habitée, de sentir que l’on ne fait qu’un (parfaite unité) avec les mouvements, que la présence ne fait qu’un (qu’elle est complètement collée) aux phénomènes ; pensées, mouvements du corps, mouvements émotionnels etc etc etc.

 

*

 

La beauté sournoise de l’éphémère. Au pied des marches, j’attends que le ciel descende. J’ai préparé sa venue. J’ai déblayé l’espace. Remisé les médailles. Les ai jetées dans l’abîme. Le néant les a englouties. Ne reste rien. Et j’attends sans impatience sa venue.

 

 

De son grand œil nécrophage, l’Infini nous guette. Impatient de se repaître de nos cadavres chimériques, de nos pelisses désossées, de nos prétentions décharnées.

 

*

 

Le rien s’invite jusque dans nos yeux apeurés, claquemurés derrière leurs remparts, leurs pont-levis et leurs hauts portails cadenassés où nous croupissons d’ennui, de peurs et d’envies tièdes en espérant sans y croire que le vent déblaiera tous les spectacles qui nous tiennent prisonniers en distrayant tristement notre détention chimérique. 

 

 

Ah ! Cette mélasse organisée qu’est le monde ! La vie — phénoménale — demeurera toujours un furieux bordel !

 

*

 

On puise avec aveuglement dans la grande encyclopédie des âges, en y cherchant un modèle, une référence. Toujours, bien sûr, inutiles et apocryphes.

 

 

Aucun mot, aucun livre, aucune bibliothèque, aucune littérature, aucune forme d’expression ni même aucune manifestation (phénoménale) ne saurait égaler un seul instant de présence silencieuse.

 

*

 

Sans masque ni costume, je suis nu devant l’Infini qui m’absorbe et me recrache au cœur de mouvements purs. Au sein de la présence pure.

 

 

J’écris pour ne pas sombrer davantage dans la bouche béante du néant qui m’aspire tout entier. Je me laisse y conduire et y résiste à la fois. Effrayé de tant de rien. Et d’espace…

 

 

La grande débâcle des heures.

 

 

Le piège du monde où l’on s’enlise. Ses douces sirènes qui nous tirent du repos des heures tranquilles et nous invitent à quitter notre sommeil pour rejoindre la marche folle et avide. Quelle hérésie que de s’y résoudre ! Pourquoi ne savons-nous pas, à cet instant, transformer la quiétude ronronnante et ennuyeuse en présence souveraine et tranquille ? Nous sommes encore trop chargés d’idées et de rêves auxquels nous nous attelons avec une déraison furieuse.

 

*

 

Le monde ne contient que ce que nous lui attribuons. En réalité, il est aussi vide et dépeuplé que l’espace. Le tourbillon des phénomènes est un songe déplaisant. Un entrelacement de chimères délétères.

 

*

 

L’eau claire s’éprend du temps qui passe. Demeure le mouvement éternel. La présence pure entachée d’aucun soleil. D’aucune étoile. Descend la rivière jusqu’à l’embouchure, plonge dans l’océan, renaît, réapparait ici et là en nuages, glaciers, nappes souterraines. Délicieuse félicité.

 

*

 

Parmi les oiseaux sifflotants, les bruits du cœur s’emmêlent, se détachent. Pulse le sang, courent les ondes. On demeure sans visage. Et le grand corps nous émeut de ses battements.

 

 

Les heures sont légendaires dans la mémoire. L’heure présente scintille en silence. Et aussitôt s’efface.

 

*

 

Les 10000 chants du monde ne résonnent plus à mes oreilles. Je marche inlassablement sur des chemins de silence où m’accueillent des myriades d’arbres et d’oiseaux. Je m’assois sur les rochers qui surplombent la plaine où les visages grimaçants se courbent sous le poids des peines. Je n’entends plus ni leurs cris ni leurs pleurs. Je cueille d’une main la rosée et d’un doigt offert au ciel, je m’ouvre à l’Infini. Qui sait que mes pas m’ont déserté ? Que mes mains ne sont plus miennes ? Et que mon visage s’est effacé ?

 

 

A l’ombre du tilleul, je repose. Caché par les haies de bouleaux, les pas me portent vers l’inconnu où les songes n’ont plus cours. L’herbe m’accueille et offre à mes reins une couche délicate. Roi du silence et du rien, vagabond misérable aux yeux des Hommes, mon trône n’est visible que du ciel que si peu habitent. Et mes larmes coulent sans tristesse devant l’indigence du monde qui offre à ses créatures de misérables spectacles dont elles ne se lassent jamais. Je me retourne sur ma couche étoilée offrant mes yeux sans visage à l’Infini dont je me nourris en silence.

 

*

 

L’heure s’échafaude toujours en silence. Sournoise, sous la présence.

 

 

Mille monstres sortis de nos vieilles lunes guettent notre visage sans histoire. Mille histoires poussent notre tête en avant, s’accrochent aux mille rêves que nos oreilles distraites entendent. Qui a dit que nous sommes seuls ?

 

 

Le monde martèle la terre de ses pas, envahit le territoire. Le silence demeure la seule réponse.

 

 

Les crocs-en-jambe de l’abîme bien décidé à nous faire tomber dans le vide.

 

 

L’heure s’étiole en pirouettes devant nos yeux indifférents.

 

 

Le monstre froid se régale de nos songes trop tièdes.

 

*

 

Les têtes s’affichent hautes mais la lassitude a déjà gagné les cœurs. La compréhension est en marche. Ne reste qu’à attendre l’injonction du néant. Et l’appel du vide. La déconvenue des heures devant le silence.

 

*

 

L’abîme est la plus grande des certitudes. On ne sera plus jamais disposé à édifier le moindre monument.

 

*

 

L’heure se couche en silence. Et je me repose enfin.

 

 

On aimerait jouir du rien. Et c’est le Tout qui nous est offert.

 

 

L’extrême douceur du rien caresse notre tête vide. Encombre encore l’absence de tout. Le manque n’est plus. Mais qui sait si le monde existe ?

 

*

 

Transparente est la brume dont s’enveloppe la tête. Mais de l’intérieur opaque demeure le brouillard.

 

 

A intervalles réguliers, je meurs. Et dire que je n’existe pas

 

*

 

Le monde s’agenouille à mes pieds crasseux où il a entrevu de l’or…

 

 

La tête s’agenouille devant le corps qui s’agenouille devant le cœur que surplombe le monde que surplombe le vide. Et l’on nous parle de réalité !!? Et de l’existence de Dieu !!? Le vide demeure notre seule patrie. Et dire que certains hommes sont assez fous pour en faire une nouvelle église !

 

*

 

Sous nos pas, la brume s’est dissipée. Et l’on s’agenouille au soleil couchant. Aux terrasses du monde, nulle âme. Ivre de ciel et de joie. Les montagnes ont jeté leurs eaux claires sur la plaine. Les crêtes regorgent de lumière. On s’étend sur le sol, les yeux assagis. La vie foisonnante à nos pieds. Un sourire délicat s’esquisse sur nos lèvres ravies. Heure glorieuse et sereine. On baigne dans la tranquillité du jour finissant. Et sur les chemins sans importance, les pas nous portent vers l’instant d’après. Les rochers accueillent l’assise légère. Le regard et l’Infini s’enlacent. Les paysages portés aux nues par la grâce s’effacent et réapparaissent. Les pieds s’évanouissent en silence. Les silhouettes dansent parmi les nuages passagers. L’heure s’éteint. Ni soir ni lendemain. L’éternité cueille le labeur du jour. Et nos yeux fermés se jouent des décors. Arbres, pierres, collines et forêts. Le temps s’est dissipé. On regagnera bientôt sa masure où l’on pourra s’endormir le cœur en paix.

 

*

 

Le monde est ce que je vois. Et ce que je sens…

 

 

Les fourmis vaquent à leur labeur tranquille. Les pierres, à leurs yeux, sont des montagnes. Géants de calcaire qu’il faut gravir ou contourner. Assis au milieu de leur steppe, je contemple au cœur des paysages, leur étrange balai.

 

 

Dans la vaste plaine isolée — entourée de forêts et de montagnes — je regarde les nuages haut dans le ciel imperturbable. Seul parmi les insectes et les oiseaux. Assis au pied d’un arbre sur le sol rocailleux, le chant des cigales berce mon repos. Au loin, l’espace ouvert se rapproche et me saisit. Tout baigne dans l’Infini.

 

 

Entre le ciel nuageux et la terre ombrageuse, les mouvements incessants. Et la conscience immobile. Qui voit ainsi le monde bouger… sans se laisser fasciner par ses mirages… ni participer à ses farces tragiques ? Economie des pas, des gestes et de la parole mesurés par le strict nécessaire. L’essentiel habité, dépouillé de tout superflu laisse se manifester les résidus égotiques et les incontournables fondamentaux physiologiques sans réellement y prendre part ni même se sentir concerné par leur survenance dans l’effroyable, mythique et désopilante comédie que les Hommes — paraît-il — appellent réalité. 

 

*

 

L’heure n’est plus à la vantardise. Il convient d’affronter ses démons. D’abattre ses chimères. De se défaire de ses voiles opaques.

 

 

La destination ne s’offre qu’au regard perdu. Les combats et le travail sont d’un autre âge. D’une époque à présent révolue. Que peuvent l’épée et la faucille contre le regard ? Le vent qui tournoyait au-dessus de notre tête a tout balayé. Et que sommes-nous devenus ? L’existence du monde autrefois si tangible — si certaine et si rassurante — n’a pas résisté à ses assauts incessants. Notre existence-même que nous pensions si réelle s’est étiolée. Nous ne savons plus qui ni ce que nous sommes… avons-nous même déjà existé ? Nous l’ignorons. Et la question-même a perdu tout attrait. Nous ne savons pas. Et cela nous est égal. Nous sommes. Simplement.

 

 

L’heure s’efface sans crainte. Nous n’existons plus. Mais rien n’a disparu.

 

*

 

Les saisons dévastatrices. Et les siècles n’en finissent pas de hurler… le cri rauque et désespéré des peuples… le cri ardent du progrès… le cri silencieux des forêts et des glaces… le monde est un cri commun — et démultiplié — qui cherche aveuglément la source de ses râles et de ses échos…  nostalgique (sans doute) du silence et des déserts…

 

*

 

On s’engouffre dans des jeux anesthésiants et des joutes territoriales pour échapper à l’unique rencontre qui vaille en cette existence. Celle qui saurait nous tenir en dehors de la vaste mascarade et de ses vaines tentatives de remplissage…

 

 

Le support maladif des heures où l’on s’accroche à ses chimères…

 

*

 

Le monde s’écharpe devant mes fenêtres et une douce mélancolie me retient à l’intérieur. J’aimerais songer à d’autres combats. Mais le supplice est trop fort pour que je m’y résolve.

 

 

Le feu a déjà tout dévasté. Et ne restera bientôt que des cendres. Du vent et des cendres. Du vent et de la poussière. Ainsi donc est la vie.

 

 

Les livres posés sur ma table de travail sont un rempart. Un donjon dérisoire qui ne me protègera jamais de vivre. Ils me donnent l’illusion d’une distance avec le monde. Mais je ne suis pas dupe. Le vivant continue de battre en moi.

 

 

Enfant déjà, je ressentais un grand besoin d’espace et de temps pour m’adonner à mes jeux. Adulte, les jeux m’ont quitté. Et le besoin d’Infini a remplacé les plages de solitude sans contrainte ni sollicitation. On n’échappe pas ainsi aux graines que l’on porte en soi et qui ne demandent qu’à éclore sur les terrains propices que la vie nous choisit.

 

 

Le monde a perdu son attrait. Quelques visages à présent veillent sur moi. Le monde s’est rétréci à quelques figures bienveillantes. Et à mesure de ce rétrécissement, l’Infini s’est élargi

 

 

Le ciel est ma patrie. Et les arbres mes seuls frères. Chaque jour, je parcours la forêt à petits pas. La marche est lente et attentive. Ma communauté est végétale. J’ai toujours eu l’âme forestière. Comme mes congénères immobiles, je suis épris d’Absolu et de lumière.

 

*

 

Entre les jours, je me tiens. Sous la surface des choses, je devine des mondes imperceptibles. Inaccessibles aux sens. Une infinité de mondes parallèles. Des infra-mondes, des supra-mondes, des arrière-mondes projetés par l’esprit insatiable et fasciné par ses propres créations. Un écheveau d’images. Un labyrinthe de représentations où l’organique ne peut s’infiltrer. Un condensé de perceptions et de sensations impénétrables où les paysages et les frontières se traversent en une fraction de seconde.

 

 

La nature se vide de sa substance. L’organique se dessèche et se décompose. Des trépas en cascade. Des amoncellements d’os, de cadavres et de molécules. Une recombinaison incessante de matière et d’images.

 

*

 

L’heure peut approfondir les siècles. Jamais les transcender. Excepté lorsque le silence remonte à son origine. Alors le temps disparaît. Les gestes s’éloignent des gesticulations réactives pour devenir naturellement féconds, intrinsèquement consistants, ontologiquement justes. Indépassables.

 

 

Nous sommes des Dieux sans créateur. Et dire que les Hommes se prennent pour des créatures !

 

*

 

L’abîme céleste accueille tous les naufrages. Et les naufragés encore terrifiés par la traversée. Déjà ébaubis par tant de transparence et de simplicité.

 

*

 

L’exploration du territoire lui semblait à présent inutile. Il l’avait maintes fois parcouru en cartographe consciencieux et discipliné. Il s’assit donc au pied d’un arbre. Et attendit que le ciel descende. Dorénavant une seule chose lui importait : habiter à chaque instant la présence, fondre sa singularité à  l’Infini, n’être qu’Un avec les choses et leur cours fluctuant, vivre pleinement la liberté et l’espace. Il connaissait les hommes. La nature. Les animaux. Le règne de l’organique. Les méandres de l’affect et du psychisme. Avait visité toutes les contrées imaginables. L’existence des uns et des autres n’avait plus de secret. Il connaissait toutes les régions et tous les visages de la vie. Que pouvait-il désormais attendre d’elle ? Elle lui avait dévoilé son intimité et ses apparents mystères. Il la voulait à présent aussi nue que lui-même pour préparer leurs noces. Et célébrer leur union. La fête auprès d’elle était déjà grandiose. Mais il la souhaitait permanente et sans faille.

 

*

 

Le roc maladif des chimères. On y enfonce un pic muni d’une grande longe attachée à notre cheville et l’on se plaint d’être prisonnier…

 

*

 

Il est des êtres au physique disgracieux et au costume défraîchi qui portent sur leur visage une infinie beauté et au fond de leur yeux une bonté insondable…

 

 

Tout homme (et sans doute tout être) a à la fois le pressentiment et la nostalgie de ce qu’il est réellement — plénitude, paix et joie — qu’il cherche de façon désespérée et maladroite à titre individuel à travers tout ce qu’il entreprend et qu’il tente inconsciemment et de façon collective d’aménager en système organisé sur le plan phénoménal. 

 

*

 

La vie humaine n’est que remplissages et évitements, une fuite perpétuelle de ce qui est. Alors que ce qui est constitue le matériau-même, le seul outil nécessaire à la compréhension et à la rencontre avec soi, sources du véritable contentement — cette joie et cette paix — au-delà des satisfactions mentales toujours liées aux circonstances, aux situations et aux contenus existentiels.

 

*

 

La route sans fin vers soi où nulle impasse, nul virage ne peuvent être anticipés. Où l’inconnu se découvre et s’explore à chaque instant…

 

 

Etre là. Simplement. Etre simplement là. Présent…

 

2 décembre 2017

Carnet n°50 Quelques mots

Journal poétique / 2014 / L'exploration de l'être

Le silence des heures profondes. Assis parmi les arbres et les herbes du chemin. Couché parmi les fleurs sauvages et les insectes qui peuplent le sol. Et l’azur au-dessus de notre tête. On s’émerveille du vent et des nuages. De la vie qui nous entoure en nous entraînant parfois dans sa danse… 

 

 

Seul dans la montagne, les pas portent vers l’essentiel. En ville, ils en éloignent. Dans la forêt ou sur les crêtes, on parcourt les chemins sans penser à la destination. Dans les rues, on court ici et là en s’attelant à mille besognes et l’on s’y perd.

 

 

Où habitons-nous pour nous sentir si misérables ?

 

 

Quand on est à l’écoute, on suit naturellement ce qui nous est naturel

 

 

Assis à l’ombre d’un arbre ou allongé sur les pierres du chemin, l’heure s’épuise en silence. Le ciel et les paysages entourent notre solitude joyeuse et sereine. Naturellement à l’aise dans ces décors naturels.

 

 

On ne fuit ni les hommes ni les villes. Mais notre cœur nous enjoint naturellement à la solitude des grands espaces peuplés d’arbres et d’oiseaux. On y est et y vit à notre aise. La compagnie des hommes en général ne nous enchante guère. Et il n’est pas rare qu’elle nous mette au supplice. Nul n’en est responsable. C’est une inclination naturelle qui nous fait apprécier davantage les merveilles de la nature et la compagnie des animaux que le bavardage incessant et les histoires dérisoires des hommes. Ainsi j’aime marcher seul avec mes chiens dans les collines ou dans la forêt. Loin du monde, on éprouve un délicieux sentiment de liberté. De vivre une existence riche, profonde et vraie. Une vie presqu’exclusivement sensorielle. Sans histoire ni souci. Sans image, sans parole ni pensée. Une vie simple et belle. Organique et inspirante où la présence peut s’habiter sans entrave. Bien plus que dans la société des hommes où règnent trop souvent le factice, les conventions et les représentations qui sollicitent et interpellent le personnage au point, bien souvent, de se voir quitter (à regret, bien sûr) cet espace impersonnel d’arrière-plan. Comme si l’excès de stimuli nous ramenait immanquablement au rôle que le monde aimerait nous voir jouer. A cet égard, la solitude est une précieuse compagne qui nous libère des griffes du monde (et de ses mâchoires happantes). Et qui mérite, à ce titre, d’être entretenue. Comme d’autres peut-être entretiendraient — le terme est aujourd’hui quelques peu désuet — une maîtresse tendre et câline toujours encline à éloigner et à réconforter de la fureur du monde. 

 

 

Ceux qui s’ouvrent à l’être sont de moins en moins soumis au diktat des images qui restreignent ce que nous appelons le monde à une collection plus ou moins variée de représentations figées, étroites, mensongères et illusoires. Toutes ces représentations éloignent du réel, obstruent le passage de l’être (en empêchant d’en ressentir la simplicité et la puissance) et enferment ceux qui y sont soumis dans une geôle de papier aussi illusoire que les barreaux d’images dont elle semble tapissée.

 

 

Allongé dans l’herbe, sans souci du monde, du temps, des obligations, des conventions sociales et des affaires domestiques, l’âme se détend. Se repose. Retrouve son état naturel. Sa véritable demeure. Seule la folie (ordinaire) du mental peut nous faire croire que notre état naturel se trouve dans le faire et l’agir, dans les pensées incessantes et la réalisation furieuse et débridée d’activités et de projets. Ces domaines sont investis à partir des besoins ressentis du corps et du psychisme qui appartiennent à la sphère du mouvement. Quant à l’âme, encore une fois, elle ne trouve la paix que dans le repos, le silence et l’immobilité quand elle sait s’extraire des mouvements du corps et de l’esprit qui lui sont si étrangers. 

 

 

Dans le jardin de pierres, mes ailes reposent. Les rêves d’envol se sont dissipés. L’azur s’est effacé. L’espace est ma demeure. Je suis l’Infini qui accueille le monde. Et l’éclaire. 

 

 

Les oiseaux, haut dans le ciel. Et les feuilles des arbres, folles dans le vent. Et les insectes partout, courant sur le sol. Et le petit homme inscrivant ces lignes sur son carnet. Je vois cela. Et j’ai le cœur en paix. Emu par ces mouvements. Et libre des histoires qu’ils recèlent. Où qu’ils soient, où qu’ils aillent, je serai toujours là, en surplomb d’eux-mêmes. Et je me réjouis de cette proximité que toujours j’aurai avec eux. Je vois partout les formes se frôler, s’ignorer, se heurter, se battre, se blesser, se tuer, s’aider ou se caresser parfois. Et je ne sais que faire pour qu’elles se respectent davantage dans leurs incessants échanges. Et qu’elles trouvent la paix et l’harmonie dans leur cohabitation. Et je pleure parfois de nous voir si démunis. Je sais pourtant que les arbres et les fleurs ne cesseront de pousser, que les lions dévoreront toujours les gazelles, que les prédateurs tueront toujours leur proie. Chaque forme doit ainsi apprendre de l’intérieur ce qu’elle a, elle-même, causé à autrui pour que mûrisse la compréhension afin de s’éveiller à sa véritable nature. A cet espace impersonnel d’arrière-plan. A cette présence immobile et silencieuse qui n’est que paix, joie et amour. Ainsi est le monde des formes avant d’accéder au sans forme

 

 

Une pie au sommet d’un arbre. Un écureuil sautant de branche en branche. Un chien qui s’étire. Le souffle léger du vent. Le défilement tranquille des jours.

 

 

Les instants glorieux où l’âme se repose. L’esprit sage. Et le cœur en paix. L’éternité pourrait bien défiler au rythme des tambours, le silence demeurerait.

 

 

[De la marche]

Griffées par les ronces sur les chemins abrupts, les jambes cherchent leur repos dans le rythme. Attendant sans impatience la pause où elles pourront enfin se délasser. 

 

 

Les chemins de pierres accueillent les pas. Et offrent le monde. Le regard accueille et offre les pas, les chemins et le monde.

 

 

Le territoire s’étend jusque dans l’infini du regard.

 

 

Il n’y a de frontières et de limites que mentales. L’infini est toujours à portée de regard. Nous le sommes. Et y baignons en tant que forme.

 

 

L’heure sombre dans le silence. Je m’éteins peu à peu dans l’Infini.

 

 

Le rien-misère des formes. Toujours dérisoires, fragiles et misérables. Et le rien-infini de notre nature véritable quand tout ce que nous croyons être, avoir et devenir a disparu. Subsiste alors l’être dont on ne peut rien dire (l’infini apophatique). Et entre les deux, le rien-apocalyptique au cours du processus où nos repères, nos certitudes, nos croyances et nos espoirs implosent ou explosent…

 

 

Nu est l’anagramme de Un. Et il ne pourrait en être autrement. Comme l’enfer est sans doute de trop en faire

 

 

L’horizon de pierres s’effrite. Et ne subsiste que l’espace.

 

 

Marchant à une allure soutenue sur les chemins. Ou lascivement allongé sur un rocher, on laisse le corps et la nature imposer leur rythme et leurs mouvements.

 

 

Qu’à chaque instant, la présence soit habitée… ou à défaut que l’essentiel et le grand mystère soient ressentis dans chaque situation. Voilà sans doute mes ultimes exigences mentales…

 

 

On se sent de plus en plus étranger au monde (humain). Non qu’on ne le comprenne… nous avons nous-mêmes baigné dans toutes ces histoires et ces soucis dérisoires. On se sent simplement détaché des affaires du monde. Comme si elles n’étaient que des jeux anecdotiques sans importance ni consistance. Des cris et des gesticulations sans conséquence. On se sent plus disposé à la compagnie des chiens, aux délices des promenades solitaires dans la nature. Et à la rédaction de ces notes — presque sans intérêt — sur ce carnet. Comme si ces activités étaient plus propices à faire ressentir la vraie vie. La vie pleine. La vie déchargée de ses représentations illusoires avec son lot d’images et d’idées toutes faites sur l’existence, le cours du monde et le cours des choses.

 

 

La solitude n’est pesante que pour celui qui éprouve le sentiment de manque, d’isolement et de séparation. Lorsque la présence est habitée, on se sent en unité avec l’environnement. Et il est impossible de se sentir seul et isolé…

 

 

Il m’arrive de m’asseoir à proximité de déjections animales. Et je n’en éprouve nulle répugnance. Les crottes de lapins, de brebis, de chiens, de blaireaux ou de sangliers me portent bien moins au dégoût que la merde humaine. Dans un autre registre, le bruit agaçant des mouches qui tournent au-dessus de notre tête en se posant de façon incessante sur notre corps dénudé, le bourdonnement lancinant des abeilles, le frottement parfois assommant des ailes de grillons, le halètement ou l’aboiement intempestif des chiens me sont plus supportables que le vacarme des marteaux-piqueurs, le brouhaha des rues, le rire et les paroles bruyantes du voisinage (humain), les pétarades automobiles ou les décibels émis par les chaînes hi-fi et les téléviseurs.

 

 

On aimerait que chaque heure s’émancipe du temps. Que chaque instant devienne présence. Laissant le personnage vagabonder là où le corps et le psychisme l’appellent… Moments exquis de liberté. En se laissant simplement porter par le miracle des jours.

 

 

Les saisons mensongères. Et la vie secrète des morts. Jour de deuil ou jour de liesse, on se réjouit de l’heure présente. Perdu au fond des vallées. Assis au faîte des arbres. Debout au sommet des collines. Couché au fond de grottes solitaires. Sous le couvercle des jours tristes ou assis dans l’azur, on célèbre les jeux du monde, la vie espiègle et ses farces cruelles qui déchirent les âmes encore soumises aux légendes et aux mythes du monde qui ne savent voir l’Absolu qui les entoure et les aide à briser leurs chaînes (et leur coquille) pour habiter la liberté et l’infini dont elles sont éprises. On s’agenouille au pied des arbres pour les honorer. On marche dans le vent, les bras en croix et la tête haute dans les nuages, docile aux aventures, aux méandres des rivières et aux caprices de la terre. On salue le spectacle merveilleux, ses tyrans et ses bouffons, sa ribambelle de figurants qui rechignent à jouer leur rôle, les mains besogneuses et les esprits innocents, les râleurs et les mécréants, tous ceux qui marchent avec leur masque qui pend sur leurs genoux, les bourrus et les acariâtres. Puis on oublie le monde, ses spectacles et ses acteurs pour retrouver son antre solitaire.

 

 

L’arbre demande-t-il son chemin ? La fleur se soucie-t-elle des jours ? L’étoile s’enquiert-elle de son rôle ? Le soleil et la terre s’interro-gent-ils sur leur labeur ? L’eau s’inquiète-t-elle de ses bienfaits et de ses dévastations ? Ô Homme, ressens-tu le joug de tes prétentions ? Et entends-tu l’appel du rien qui invite à l’abandon ? 

 

 

L’heure de la débâcle a sonné. Les chimères enfin brisées, l’ange peut s’envoler. Retrouver son paradis perdu. Le ciel à portée de poussière. A portée de misère où l’aigle et le cloporte sont égaux face au mystère.

 

 

Le jour prend soin de la nuit. Et respecte ses heures. La nuit prend soin du jour. Et respecte son labeur. Tous deux œuvrent pour un bien plus vaste qu’eux-mêmes. 

 

 

On danse sur la musique silencieuse des anges. On saisit la trompette du Dieu solitaire. Et l’on joue pour les morts. Et les vivants en sursis qui cherchent la route céleste, les yeux rivés sur leur sente misérable en quête d’une porte ou d’une parenthèse pour échapper quelques instant à l’implacable gravité terrestre, si éloignée de la légèreté et de la transparence du ciel qu’ils pressentent pourtant comme leur demeure véritable.

 

 

Le visage au plus proche de la terre. Là où est le royaume du corps. Le regard au plus proche de la source. Au cœur même de l’espace souverain infini. Là où est notre demeure.

 

 

Le rien ne s’approprie rien. Et de cette caractéristique, il tire sa grâce, sa justesse et sa puissance. Si l’esprit pouvait le ressentir, il jetterait aussitôt aux orties les misérables parcelles du Tout dont il se croit propriétaire.

 

 

Le silence des heures profondes. Assis parmi les arbres et les herbes du chemin. Couché parmi les fleurs sauvages des collines et les insectes qui peuplent le sol. Et l’azur au-dessus de notre tête. On s’émerveille du vent et des nuages. De la vie qui nous entoure en nous entraînant parfois dans sa danse… 

 

 

Un pas après l’autre. Et le monde déjà nous habite.

 

 

L’heure présente si étrangère aux soucis du jour. L’heure si familière du rien qui s’étend. Au point de se fondre à l’Infini. Jointure entre le rien et le Tout. Cet étroit passage désencombré.

 

 

Marcher en silence. Et à petits pas. Voilà un délice pour la chair. Et pour l’âme. Sentir sous ses pieds les cailloux du chemin. Humer les parfums printaniers. Se laisser mouiller par la pluie fine de la journée. Sentir la caresse du soleil d’avril. Voir partout la beauté. Les arbres et les arbustes. Les fleurs sauvages et les herbes drues. Le sable et la terre. Les nuages. Les chiens qui gambadent. L’azur changeant. Les joutes et les querelles d’insectes. Leur combat déchirant. Leur labeur tranquille. Leur cri charmant. Le piaillement des oiseaux. Les jeux et les drames — petits et grands — des créatures sous le ciel. Les champs labourés. Les parcelles de vignes. Les ruines au détour d’un village. Les collines jusqu’à l’horizon. Les sentiers et les chemins. Et les petits pas tranquilles qui retournent chez eux. En sifflotant un petit air joyeux.

 

 

Au fond de chaque cœur se cache le mystère que les pas, les mains et la tête ne sont en mesure de trouver. Lorsque les mains s’apaisent, la tête se vide et les pas s’éteignent, le mystère peut alors transparaître, être ressenti et envahir l’être. Les pas, les mains et la tête en sont alors lentement imprégnés jusqu’à en devenir l’exact reflet. 

 

 

Un air de trompette secoue la terre. Et je vois les âmes apeurées courir en tous sens. Ne savoir où aller pour échapper au trépas. S’enfuir à perdre haleine à travers les plaines et les montagnes. Aller par milliers à travers les airs et les océans. Submerger la terre de leur pas affolés. Sans pouvoir s’abandonner aux secousses terrifiantes. Entonnant des cantiques pour apaiser leur terreur. Cris, chants et gesticulations. Implorations impuissantes, les mains ou le regard tourné(es) vers le ciel, ainsi vivent et meurent les Hommes.

 

 

Je regarde les jeux infinis qui émanent de l’Infini. Ô Infini, tu nous habites et tu nous es, nous te sommes et t’habitons. Quand donc l’union a-t-elle eu lieu ? Tu contiens le plus infime. Et le plus infime te contient. Les Hommes pourtant cherchent partout où ils ne pourront se (te) trouver… quelle farce leur (te) joues-tu ? Comme tu es espiègle, présence vivante, sous tes malices parfois cruelles qui disloquent l’Existant en infinies combinaisons…

 

 

Des mots affûtés comme une lame. Sur la pierre de la vérité. Quelques notes gaies dans le jardin parfumé. Et le cœur s’envole au-delà des horizons. Par-dessus les murs de nos geôles de papier. Jusqu’aux bords de l’infini. Après tant de périples, de détours et de circonvolutions, il peut se poser enfin en ce domaine non clos. Eprouver la liberté qu’il pressentait en son noyau. Goûter enfin à la fraîcheur des heures. Au merveilleux des paysages. A l’ineffable simplicité de l’être.

 

 

Sans costume, on peut déambuler dans les rues désertes ou populeuses. S’asseoir parmi les herbes ou sur la mousse des forêts pour contempler les mille spectacles du monde. Le cœur toujours indemne des enjeux et des tirades. L’ombre des figurants s’amenuise à mesure que l’on s’enfonce en nos profondeurs. Leurs pleurs et leurs rires. Leurs sourires et leurs grimaces nous traversent sans trace. Eux, qui autrefois nous effleuraient, arrêtés dans leur course par nos remparts protecteurs… aujourd’hui les murs se sont effrités. Ne restent ici et là que quelques ruines branlantes au cœur desquelles sont enfermés quelques regrets et quelques fragilités amassés au cours des ans et qui attendent le souffle du vent nouveau pour s’effacer dans l’Infini. Ne resteront alors que l’espace nu, les brises, les orages et les tempêtes qui nettoieront les restes de poussière sur le sol dépouillé de tous les amassements accumulés au cours des siècles.

 

 

Comment transmettre la lumière du ciel jusque dans les caves obscures où croupissent et se débattent les ombres des âmes, prisonnières de l’ombre de barreaux illusoires ?

 

 

En ton cœur sommeille l’Infini qui attend le réveil de ton regard endimanché. Encore trop soucieux des mille images qui l’encombrent… et dont il s’empresse d’affubler les formes, celle à laquelle il s’identifie et celle qu’il appelle le monde.

 

 

En d’autres cieux, les ombres ne sont que des ombres. Elles n’ont davantage de consistance que le vent. Le regard les éclaire. Leur prête vie quelques instants. Les autorise à quelques cabrioles avant de s’effacer en lui. Ainsi naissent et meurent les décors, les mouvements et les phénomènes. Ombres dans la lumière.

 

 

La terre sacrée est celle où tu te tiens. Et le ciel n’est devant tes yeux. Tu es l’Infini qui contient et enveloppe le ciel et la terre…

 

 

Pour l’Homme, le monde n’est qu’une collection d’images qu’il prend pour la réalité. Qui sait que l’espace n’est peuplé que de reflets, d’ombres et de fantômes ?

 

 

Les saisons défilent dans le regard indemne et immobile.

 

 

Laisser le vent déblayer ce qui doit l’être. Laisser le destin se déployer sans entrave…

 

 

L’heure s’émancipe du jour. Tout à l’heure et demain n’existent pas…

 

 

Les saisons froides n’auront plus cours. Au-dessus du ciel, l’éternel azur printanier. Le renouveau permanent du regard.

 

 

Au plus proche et au plus lointain, tout est familier pour l’écoute et le regard. 

 

 

En grandissant ton âme, tu crois te hausser vers le ciel. Mais sais-tu seulement que le corps appartient à la terre ? Ne t’élève pas. Aucun terrain n’est propice aux édifices et aux élévations. Laisse la vie te rabaisser. Ton visage côtoyer la poussière. En n’étant rien, tu sauras où se loge l’Infini.

 

 

Un pas de lune sur la terre éclairée. Les marcheurs avancent sous les arbres moqueurs. Trouvent refuge quelques instants sous leurs branches. Lèvent les yeux au ciel et se demandent : « quand le soleil brillera-t-il dans nos yeux clos ? ». La lumière alors s’esclaffe et disparaît. La nuit est déjà tombée. Et demain peut-être ne verra pas le jour…

 

 

Les énigmes et les égratignures du chemin guident les marcheurs vers les contrées du repos où le regard brille plus fort.

 

 

[Interrogations du marcheur]

Présence, poésie, métaphysique, nature, promenade, solitude, simplicité, dépouillement. Conditions propices ou manifestations de l’Absolu ? 

 

 

Combien de siècles auras-tu erré dans ton cachot sans lucarne… en espérant la lumière qui ne viendra jamais ?

 

 

Demain ne verra pas le jour. On sera mort avant deux siècles. Et les combats ne cesseront jamais. Il y aura toujours des fleurs sur les tombes. Et la terre sera toujours un grand cimetière où l’on élèvera des pierres vers le ciel. Comme un hommage aux morts. Et un espoir pour les vivants. Ainsi depuis l’aube des temps, on érige partout sur la terre d’infimes monticules de poussière pour y puiser un peu de courage et affronter les mille soucis du quotidien, les mille charges de l’existence et notre lot de malheurs jusqu’au trépas. Pauvres diables d’hommes empêtrés dans leurs ornières et leur misérable rêve de salut, perchés maladroitement sur leurs édifices dérisoires. Mais qui sait qu’il n’y aura jamais de libération pour les formes ? Les organismes toujours lutteront et se débattront. En survivant à peine au royaume terrestre. Le sans forme n’est accessible à la matière. Poussières d’étoiles et de misère. Infimes particules dans l’Infini. Les pleurs lancinants et les sanglots inconsolables du monde n’y changeront rien. Ils dureront encore des siècles et des siècles.

 

 

Il y a des semences stériles que le vent dissémine sur des terres infertiles. Il faut attendre des siècles avant de voir éclore le moindre fruit. Ah ! L’infinie patience de la terre qui attend la saison propice…

 

 

On peut bien s’agiter, gesticuler en tous sens. Rester assis ou parcourir les collines d’un pas tranquille. Et après ? A-t-on la faiblesse de croire que ces activités amèneront la paix ? Le corps tranquille. Le corps en mouvement. L’esprit calme. L’esprit agité. Le regard n’est jamais concerné.

 

 

Le carcan des heures fébriles. Et celui des heures creuses. Suivre sa pente. Toujours suivre sa pente. Se laisser porter sans résistance par les mouvements présents. Laisser s’éteindre toutes les idées sur la vie, sur le monde et sur soi. Se libérer des idées sur la liberté et la sagesse. Sur l’aliénation et l’ignorance. Etre au-delà de la liberté et de la non liberté. Au-delà de la sagesse et de l’ignorance pour enfin être libre. Libre des idées, libre du personnage, libre du monde et des mouvements. Etre à l’écoute de ce qui est là. Et laisser faire… toujours laisser faire…

 

 

Un mot. Un souffle. Le silence. Un arbre. Le vent. Et la poussière. Une étoile au loin. Et la lampe sur la table qui éclaire la pénombre. Les nuages. Le désert. Et les cités surpeuplées où s’agglutinent les hommes. Les orages. La brise légère. Les oiseaux et l’océan. Le ciel intact. Et le monde au creux de ma main qui jamais ne s’apaise des miettes qu’on lui jette. 

 

 

Les ports. Le large. Les bateaux. Les bastingages qui ne protègent jamais du vide. Et l’appel de la vie océane qui n’effleure jamais la tête des passagers sur les passerelles des usines à croisière en partance pour les tropiques. La terre. Les villes. La campagne à perte de vue. Les forêts denses et les clairières. Et l’infini du ciel que ne voient jamais les passants trop pressés de venir à bout de leur itinéraire. Les collines. Les plateaux et les montagnes. Et les cimes toujours invisibles pour les habitants retranchés dans les plaines.  

 

 

Dans la boue, les pas s’occupent à déblayer le chemin. Dans l’azur, il n’y a ni boue, ni pas, ni chemin. Le ciel est transparent. Et il convient simplement d’habiter le regard pour que tout s’éclaire d’une lumière nouvelle. Les pas, la boue et les chemins deviennent alors authentiques. On ne sait réellement ce qu’ils sont mais ils sortent de l’abstraction pour devenir réels. Comme s’ils étaient l’univers vibrant. Inscrit pour quelques instants en soi…

 

 

Laisse-toi porter par les bras de la Vie. Elle déposera ta forme dans les paysages appropriés pour que mûrisse en toi la compréhension.

 

 

Ton existence (la vie) est le terrain de jeu de ta (la) compréhension. Prends donc garde à ne pas séparer l’existence (ton vécu) de la compréhension, tu n’alimenterais que l’intellect qui jamais ne te fera vivre ce que tu sais (ce que tu n’as encore compris que superficiellement).

 

 

La solitude passagère de l’amant de Dieu nous traverse parfois. Il faut avoir longtemps fréquenté la solitude pour se défaire du monde. De l’idée du monde pour enfin goûter le réel. Le monde réel. Celui qui est là devant soi. Pas le monde abstrait. Celui que l’on nous présente un peu partout. Celui-ci n’existe pas. Il est une abstraction. Le réel ressenti. Le réel dépouillé de l’idée que l’on s’en fait

 

 

On aimerait parfois déserter certaines régions de la vie pour en explorer d’autres. Mais qui sait quel pays nous habitons ?

 

 

Au royaume terrestre, il n’y a que d’infimes roitelets. Dans l’empire du ciel, nous sommes tous le seigneur souverain.

 

 

Habitant d’aucune contrée, on déserte les communautés. On déserte le centre et les périphéries. On déserte les minorités. On déserte l’exil, la relégation et la marginalité. On déserte même la solitude. Et ne reste rien. Nul être pour vous guider ou vous réconforter. Nul lieu pour s’installer. Nul endroit où se poser. Nulle valeur et nulle certitude sur lesquelles s’appuyer. Subsiste alors notre vraie nature. L’être immuable. L’être pur entaché d’aucun support, d’aucun contexte, d’aucune structure, d’aucun lien, d’aucun artifice. L’être indestructible. Le joyau recouvert sous tant de pelures…

 

 

Il m’a toujours semblé étrange et surprenant (et même incompréhensible) que les Hommes accordent tant d’importance aux insignifiances et aux choses dérisoires… on les voit un peu partout y mettre tout leur espoir et toute leur énergie puis s’en réjouir ou s’en attrister selon la tournure des évènements…

 

 

Les lois éphémères de la terre. Et la règle immuable du ciel.

 

 

Tous les organismes (les formes) ont la nostalgie et le pressentiment de leur nature véritable. Ainsi cherchent-ils tout au long de leur brève existence — et par des voies maladroites et inopérantes (selon leur degré de compréhension) — à retrouver les caractéristiques fondamentales du nouménal (de l’être). On les voit ainsi chercher le bonheur et la tranquillité, pâles reflets de la joie et de la paix. Une force les enjoint à s’étendre ou à étendre leur territoire autant que possible (selon leur potentialité), comme le pâle reflet de l’infini. Une autre les incite à chercher l’harmonie et l’amour, pâles reflets de l’unité. Une autre encore les pousse à rester en vie le plus longtemps possible ou à devenir immortels, pâle reflet de l’éternité. Une autre enfin les incite à explorer, à résoudre les énigmes ou les difficultés et à comprendre, comme si l’intelligence de l’être à l’œuvre en chaque forme cherchait à se retrouver elle-même…

 

 

Une main tendue vers le ciel. Une tête pensante cherchant une issue horizontale. Voilà la misère de l’Homme. Son évidente indigence. Ce manque de perspective et de clairvoyance est l’expression manifeste de son ignorance. L’incarnation humaine revêt une substantielle dimension animale. Et dire qu’il se targue d’être au sommet de la hiérarchie des espèces ! Pauvres diables humains… « Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois ». Cet adage n’aura jamais été plus approprié...

 

 

Infinie compassion pour les formes. Et immense exaspération aussi parfois. Vivement que le Sans forme soit définitivement habité ! Et à défaut que le personnage puisse s’actualiser dans l’univers vivant des sans formes…

 

 

La vie terrestre n’est qu’une longue série de gestes et d’actes destinés à assurer la survie et l’entretien des formes. Celle que nous considérons comme nôtre et celles qui permettent de lui offrir ce dont elle a (ou croit avoir) besoin. Ainsi bêtes et hommes déploient à cette seule fin l’essentiel de leur énergie. En s’y consacrant presque exclusivement tout au long de leur brève existence. Jusqu’à ce que la forme disparaisse. Mais l’Homme éprouve aussi, pour des raisons liées à son fonctionnement psychique, quantité d’autres besoins purement psychologiques comme celui de donner consistance à la forme à laquelle il s’identifie. Cette identification à la forme n’advient cependant pas par hasard. Elle vient selon toute vraisemblance de la nécessité pour l’esprit (qui se sent encore séparé) de vivre de façon incarnée et de l’intérieur la pesanteur et les limitations liées à la matière…

 

 

Il convient de prendre soin des formes. De toutes les formes. Jusqu’à la plus infime d’entre-elles. Toutes ne sont en réalité que le reflet de l’Infini. Sans jamais cesser — autant que possible — d’habiter le Sans forme.

 

1 décembre 2017

Carnet n°49 Un homme simple et sage

Récit / 2014 / L'exploration de l'être

Jean m’invite sans ambages à partager son quotidien simple et rude. Frugal et plein. Tout au long de mon séjour, je le verrai s’acquitter (en l’aidant parfois) de tâches ingrates ou rébarbatives que d’aucuns jugeraient indignes d’un homme accompli. Jean n’attend rien. Ni du monde, ni des autres, ni de la vie. Il est là. Simplement présent à ce qui surgit. A ce qui vient. A ce qui passe. Laissant advenir et mourir ce qui doit l’être.

 

 

J’ai traîné mes guêtres de Tokyo à Bornéo, de New York à New Delhi, du Zanskar à Budapest, de Lima à Lagos, de Paris à Pretoria, j’ai partagé la vie de musiciens, de poètes, de syndicalistes, d’hommes politiques, d’ouvriers, de fonctionnaires, de mères de famille, de voyageurs au long cours, de baroudeurs, de révolutionnaires, d’instituteurs, de prêtres, de bourgeois et j’ai remarqué que tous, malgré quelques particularités culturelles, se ressemblaient d’une étrange façon. Chacun semblait obéir aux lois du genre humain. Et se voyait contraint de se soumettre à la rude réalité de l'existence.

 

Au stade de mes recherches, il me semblait nécessaire et urgent de rencontrer un sage. Mais trouver cette perle rare dans un monde soumis à la bêtise et à l’ignorance relevait de la gageure. Il me fallait pourtant en dégoter un qui ne soit ni un charlatan, ni un gourou autoproclamé ni un maître médiatique adulé par une myriade de groupies hystériques. Je me devais de trouver un homme simple et accessible à la sagesse authentique. La chance me sourit au cours d’une randonnée en forêt située à quelques kilomètres du lieu où j’ai coutume de venir me reposer entre deux reportages.

 

Voici livrés ici quelques moments de vie passés en sa compagnie et des bribes de nos discussions. J’ai voulu les restituer fidèlement. Dans l’ordre où elles sont apparues. Sans plan ni ordre précis. Pour ne pas trahir la spontanéité des sujets évoqués (et parfois leur récurrence) et l’authenticité des réponses qu’il formula à mes interrogations. J’ai choisi de les livrer tels quels avec parfois quelques commentaires.

 

 

Jean habite à quelques kilomètres d’un village. Dans une région de moyenne montagne. On accède à sa cabane par un étroit sentier. Une heure et demie de marche à travers une chênaie touffue parsemée de quelques conifères. Lieu magique (s’il en est). Installé en pleine forêt, au cœur d’une clairière ombragée. Des haies d’arbustes épineux et des bosquets disséminés ici et là. Sans ordre précis. L’endroit est dépouillé. Pas d’encombrements. Pas de barrières. Pas de clôtures. Pas de démarcation entre la forêt et le lieu de vie. Une forme de continuité. Une osmose. A mille lieux de l’idée que l’on se fait d’un campement alternatif.

 

*

 

Jean est trapu. Robuste. Barbe de plusieurs jours. Cheveux courts. Petites lunettes rondes cerclées d’acier. Yeux frondeurs. Visage souriant mais grave. Une gravité joyeuse.

 

*

 

A mon arrivée, 3 chiens m’accueillent, la queue frétillante. Ils sautent de l’immense canapé installé sur la terrasse couverte à proximité de la cabane et m’escortent jusqu’à leur maître qui coupe du bois derrière la remise. Jean me salue avec chaleur. Une poignée de main ferme et enveloppante. Les yeux rieurs. Presque amusé de me voir ici. Dans son fief ouvert sur le ciel et la forêt. 

 

*

 

Jean pose sa scie et charrie quelques bûches et un fagot de brindilles sur son dos. Je le regarde d’un air timide.

— Bonjour Jean ! J’espère que je ne te dérange pas… je viens te voir pour…

— Bonjour Justin. Oui, je sais pourquoi tu es là…

Je le regarde d’un air un peu gêné.

— J’avais pensé rester ici quelques jours… le temps d’aborder les points essentiels de la quête spirituelle et voir la façon dont tu vis…

Jean se retourne et acquiesce d’un mouvement de tête.

— Tu pourras noter tout ce que tu voudras… poser toutes les questions qu’il te plaira… et m’interroger sur tous les points que tu jugeras importants…

Je vois sur son visage un sourire bienveillant teinté de ce qui pourrait passer pour une légère ironie.

— Si tu penses que cela peut encourager ou favoriser la compréhension de ceux qui cherchent… 

— Tu n’as pas l’air de croire en la transmission…

— Qu’y a-t-il à transmettre ? Il convient de vivre ce qui est là… devant soi. Il n’y a rien à enseigner…

— Tu ne sembles pas accorder beaucoup d’importance au partage…

— Que veux-tu partager ? On peut simplement encourager les pas de ceux qui sont authentiquement et profondément engagés dans un cheminement intérieur… mais ceux qui cherchent l’Absolu avec détermination sont rares. Il semble plus fréquent de rencontrer des êtres en quête de bien-être… pour eux, ce qui sera dit ici sera sans doute peu utile… l’Absolu ne s’offre qu’à ceux qui se sont dépouillés de toute idée d’accumulation… le chemin des plus ne mène à rien. Il ramène au point de départ. Une fois ce chemin exploré, on est mûr pour le chemin des moins au bout duquel la grâce peut s’offrir…

— Tu as l’air assez catégorique…

— Peut-être… il semble néanmoins que ce passage du plus vers le moins soit incontournable… tant que l’on imagine progresser, on n’est pas prêt… on alimente malgré soi l’appropriation égotique de nos prétendues avancées… il n’y a là aucun jugement. C’est un simple constat.

Jean entre dans le cabanon et dépose le bois contre le mur à proximité du poêle à bois.

— Une omelette, ça te dit ?

J’accepte la proposition avec joie. Je n’ai rien mangé depuis hier soir. Le cœur trop anxieux par cette rencontre avec Jean. On m’avait dit que le personnage était abrupt. Il semble l’être en effet à certains égards. Abrupt, bienveillant, simple et intriguant. Curieux personnage !

 

*

 

Au cours du repas, Jean m’invite sans ambages à partager son quotidien simple et rude. Frugal et plein. Tout au long de mon séjour, je le verrai s’acquitter (en l’aidant parfois) de tâches ingrates ou rébarbatives que d’aucuns jugeraient indignes d’un homme accompli. Jean n’attend rien. Ni du monde, ni des autres, ni de la vie. Il est là. Simplement présent à ce qui surgit. A ce qui vient. A ce qui passe. Laissant advenir et mourir ce qui doit l’être.

 

*

 

L’intérieur de la cabane est sobre. Dépouillé. Un lit, un canapé, une table basse et une grande malle constituent l’essentiel du mobilier. Pas de décor. Pas de fioriture. Les chiens s’installent sur le canapé. Jean les rejoint. Il s’allonge à leur côté, les jambes croisées, la tête appuyée sur un gros coussin.

— Je t’écoute…

 

*

 

Une existence réduite à sa plus simple expression. Juste l’essentiel. Jean me rectifie :

— L’essentiel et le nécessaire vécus dans la célébration et la joie.

Je lui fais part de mon étonnement devant l’incroyable frugalité matérielle de cette existence. Jean se contente de sourire.

— As-tu longtemps cherché la sagesse ?

Jean me regarde les yeux rieurs.

— Pas la sagesse. La vérité. Notre identité véritable.

— Peux-tu en parler ?

— La quête fut longue. Rude et éprouvante. Des milliers d’interrogations. Une soif inextinguible. Aujourd’hui, la quête s’est éteinte. Les questions ont laissé place au silence. Un silence plein. Habité où les questionnements n’ont plus de place. Plus de raison d’être. On fait face à ce qui est là. On fait ce qui doit être fait. L’existence devient simple et fonctionnelle. Pas de place pour les pensées. Pas de place pour le superflu. Vie en prise directe avec le réel sans fioriture. 

 

*

 

Je remarque qu’il y a peu de livres sur l’unique étagère de la pièce. Jean me regarde les yeux légèrement moqueurs.

— Les livres sont nécessaires tant que l’on cherche. Lorsque les questions s’éteignent, les livres deviennent inutiles. Un livre est un commentaire sur la vie. Et les commentaires ne sont pas indispensables. Seule la vie est nécessaire. La vie est la matière brute. Le seul élément indispensable pour comprendre. Les livres éloignent. Les livres nous détournent de l’essentiel. Il faut lire tant qu’on a besoin de lire… de répondre aux mille questions qui nous hantent. Les livres sont un exercice préparatoire… une sorte d’avant-chemin… pour certains, ce sont les livres. Pour d’autres, les livres n’ont aucune valeur. Ils empruntent d’autres voies… tout est parfait !

 

*

 

— Je sais que tu as consacré une période de ta vie à écrire des livres…

Jean se met à rire.

— Oui. J’ai écrit pendant de nombreuses années. Des tas de bouquins que bien peu de personnes ont lus. Ce fut une étape essentielle. Un besoin de clarifier la progression de la compréhension à l’œuvre en moi.

— Et tu as gardé une trace de ce travail ?

Jean a l’air surpris par ma question. Il se lève et se dirige vers l’étagère. Il saisit un énorme volume et me le tend avec un grand sourire.

— Voici l’objet du délit !

Je suis impressionné par l’ampleur du travail. Près de deux mille pages réunies en un énorme volume. Je le feuillette avec précaution. Et solennité.

— Si cela t’intéresse, je te le laisse.

Je range le précieux ouvrage dans ma sacoche et remercie Jean pour ce geste généreux et spontané. Je sais que j’y trouverai des informations importantes pour mon enquête. Et je me réjouis d’avance de cette lecture.

— Et tu écris encore aujourd’hui ?

— Cela arrive. Mais l’écriture n’est plus guidée par la quête. On écrit pour la joie d’écrire. Quand l’inspiration est présente. Quelques fragments ici et là. Un peu de poésie pour célébrer l’Existant. Rien de très important…

— Peux-tu me montrer quelques-uns de tes derniers textes ?

Jean se lève et se dirige vers la grande malle métallique posée dans un coin de la pièce. Il saisit une liasse de feuillets posée sous son ordinateur portable et me la tend.

 

*

 

Je remarque quelques volumes de poésie chinoise et japonaise posés en bas de l’étagère. Je m’approche pour y jeter un œil.

— Tu aimes la poésie extrême orientale ?

— J’y suis sensible. La résonance au vide et à la nature y est souvent présente.

— Pouvons-nous parler de tes poèmes ? Font-ils eux aussi référence au vide et à la nature ?

— Certains d’entre eux le font très explicitement. D’autres abordent ces points de façon plus indirecte. Tu sais… on ne choisit pas… ni d’écrire des poèmes ni de savoir ce qu’ils diront… les mots jaillissent spontanément… la poésie est une forme particulière de manifestation de la présence. A certains égards, tout est poésie… lorsque la présence s’habite alors tout devient poésie… la poésie est partout où se pose ce regard impersonnel… mais aujourd’hui le mot  « poésie » est sans doute galvaudé… comme tous les mots, tous les concepts, on a à son sujet des idées qui éloignent de la réalité…

 

*

 

— Pourrait-on revenir sur la quête ?

— Sur la quête ?

— Oui, sur la quête de vérité. Comment tu t’y es pris ? Qu’a-t-elle été pour toi ?

Jean se met à rire.

— Ce fut épique. Et douloureux. Nos recherches n’aboutissent à rien. On cherche longtemps avant de s’apercevoir qu’on ne peut rien trouver. Alors on s’abandonne. La quête permet de se dévêtir, de se défaire de l’inessentiel. Au début de toute recherche, on a beaucoup d’idées sur les choses, sur soi, sur la vie, sur le monde. On a beaucoup de désirs, de croyances et d’espoirs. On espère ceci et cela. On imagine ceci et cela. Tout cela vous quitte. On devient nu. Vide de toute représentation, de toute idée, de toute croyance, de tout espoir. On se familiarise avec le rien. Alors quelque chose survient. Le vide devient plénitude. On est simplement présent à ce qui est là.

 

*

 

— Comment vis-tu aujourd’hui ?

Jean me regarde, amusé. Un long silence.

— Je vis. Simplement. Regarde… vivre n’est pas compliqué. On fait simplement ce que l’on a à faire.

— Et quand il n’y a rien à faire… ?

— Eh bien, il n’y a rien à faire… on ne fait rien… on est là… simplement là… le rien se laisse contempler…

— Ca semblerait insupportable à bien des gens…

— Sans doute. Que te dire ?

— Est-ce qu’il t’arrive de t’ennuyer ?

Jean me regarde. De nouveau un long silence.

— Cela arrive. Mais cela ne m’ennuie pas. L’ennui n’est plus problématique. L’ennui dont on parle habituellement survient quand on retrouve la périphérie de l’être… et que l’on n’est plus réceptif à la beauté du monde et aux merveilles de l’être… on constate cela. Rien de plus. L’ennui est un mouvement comme un autre. On le laisse faire. On ne le fuit pas.

 

*

 

En ce premier jour, Jean m’invite à l’accompagner en promenade. Nous quittons le cabanon pour emprunter un sentier étroit. Les chiens trottinent devant nous. Jean marche devant moi. En silence. Son pas est lent. Sa démarche souple. On s’arrête régulièrement. Jean s’assoit en tailleur au bord du chemin. Regarde aux alentours. Contemple ce qui est là devant lui. Les herbes, les insectes, les arbres qui l’environnent. Se sustente des paysages. Je ressens les mouvements naturels. Partout où court cette folle énergie. Ces milliers de mouvements simultanés. 

 

*

 

— Que penses-tu de la tournure actuelle du monde ?

— Rien. Je n’en pense rien. Mais l’on peut sentir la monstruosité généralisée engendrée par le mental. Nous vivons certainement une fin de cycle. Le crépuscule d’une ère mortifère. Viendra ensuite un renouveau sans doute moins délétère.

 

*

 

— Tu ne voyages jamais ?

— Très peu.

— Tu ne sors jamais ?

— Rarement. Quand les circonstances l’exigent…

— Tu ne rencontres jamais personne ?

— A l’occasion, cela arrive. Mais peu de visages sont nécessaires.

 

*

 

Jean s’assoit en tailleur. L’assise ancrée dans le sol, le dos droit, les mains posées sur les genoux. Tranquille et présent. Quelques balancements imperceptibles achèvent d’établir sa posture. Les yeux ouverts, le souffle léger et profond. Fluide et puissant.

— Cette posture est-elle nécessaire ?

— Rien n’est nécessaire. L’essentiel n’est pas d’imiter les sages. Mais d’être à l’écoute de ce qui est là. Laisser les choses suivre leur cours. Tu comprends ?

J’acquiesce d’un hochement de tête.

— Que conseillerais-tu à ceux qui cherchent?

— Rien de particulier. De laisser les mouvements se faire naturellement. De ne rien forcer. De se laisser guider par ce que l’on a en soi…

— Et la quête de soi ?

— Avant d’habiter le silence, la paix et la plénitude, nous sommes tous en quête. Tous les actes que nous posons au cours de notre vie sont motivés par cette recherche. Et qu’elle soit consciente ou inconsciente ne change rien. Nous cherchons tous cela. Regarde donc cette dimension dans ton vécu…

— Et ceux qui sont engagés dans une démarche spirituelle authentique ?

— Je ne leur dirais rien de particulier. On ne peut savoir ce qui pourrait être dit… chaque situation fait jaillir une parole appropriée. Et le silence peut être une réponse…

— Quelles sont les grandes étapes de cette quête de soi ?

—  Cette quête semble différente pour chacun mais l’on peut en effet parler d’étapes lorsque ce processus se réalise de façon graduelle. Il existe une sorte d’étape préliminaire au cours de laquelle on se défait de ses croyances, de ses idées, de ses représentations, de ses espoirs. Les évènements de la vie contribuent à nous dénuder de tout ce que l’on pense, imagine, croit, espère sur ceci et cela. Puis lorsque l’on s’est suffisamment dénudé vient la familiarisation progressive avec le rien. Alors la présence vivante peut être ressentie. Le vide autrefois jugé si intolérable — presque insupportable — se transforme alors en plein. Ce sont les premières manifestations de la plénitude. Mais inutile d’en donner un descriptif complet. Ce processus se réalise naturellement selon le rythme propre de chacun.

 

*

 

— La nature est belle et merveilleuse. Ecoute le chant des oiseaux !

Je tends l’oreille. Trop absorbé par notre entretien, je n’avais pas prêté attention aux bruits alentour.

— Pose donc tes feuilles et ton stylo ! Et écoute ! Ecoute simplement ce qui est là ! Cette écoute sera plus riche d’enseignements que tout ce que tu pourras noter à mon sujet et à propos de cette quête qui nous habite. Prends donc le temps d’écouter ! D’être là simplement. De t’abandonner à ce qui est présent !

 

*

 

— Pourrais-tu parler de ce qui te tient à cœur ?

— Ce qui me tient à cœur est devant moi. On aime ce qui est là. On ne désire rien d’autre que ce qui est là. On ne cherche pas ailleurs. On ne cherche pas plus tard. On ne cherche rien. On vit ce qui se présente.

— Il te reste cependant des préférences…

— Il y a des préférences dues aux multiples conditionnements et aux formatages dont on a fait l’objet en tant qu’individu. On laisse ces conditionnements se manifester. On laisse libre le personnage. Mais globalement on est libre du personnage. Il n’y a aucun effort à fournir. On laisse les choses suivre leur cours. Chaque forme suit sa pente naturelle.

Soudain, Jean regarde le ciel en hochant la tête.

— Désolé, mais on va devoir reprendre notre marche. On a quelques achats à faire au village. Le magasin ferme à midi.

Jean attrape son sac à dos, siffle ses chiens et se met en route. Et je les suis jusqu’au magasin où il a coutume de se réapprovisionner en denrées de base. Nous marchons en silence. Jean me fait signe que nous reprendrons l’entretien à notre retour.

En entrant dans le magasin, Jean salue l’épicier avec courtoisie puis se dirige vers les rayons. Il saisit un sac de farine de 20 kilos, un gros sac de croquettes pour chiens, deux bouteilles d’huile, quatre boîtes de tofu (Jean est végétarien) et demande au commerçant, en arrivant devant la caisse, deux paquets de tabac et trois paquets de feuilles à rouler. Ses gestes sont lents, fluides et précis. Et malgré sa silhouette trapue, ses pas semblent légers et aériens. Il sort deux billets de sa poche, remercie et salue l’épicier avant de regagner la sortie.   

 

*

 

Ce matin, il pleut. Une pluie fine et dense. Nous restons une grande partie de la matinée devant la fenêtre, installés sur les canapés qui font face à la clairière. Au loin, nous apercevons les montagnes. Nous restons ainsi jusqu’à midi. Dans la contemplation et le silence.

 

*

 

La température est glaciale. Jean  va chercher quelques bûches sous l’appentis. Les dépose dans le poêle à bois. Le feu réchauffe progressivement la pièce.

— Thé ou café ?

Jean saisit deux bols sur l’étagère et les pose sur la petite table. Ses gestes sont rapides et précis. Emplis d’une grande énergie. Je remarque que Jean ne feint jamais ce qui le traverse. Les mouvements arrivent bruts et il les reflète toujours avec une grande justesse. Une grande sincérité. Tantôt calme, tantôt enjoué. Tantôt d’une infinie patience, tantôt au seuil de l’exaspération. Je lui en fais la remarque. Il reste un long moment silencieux. Comme si la réponse tardait à venir.

—  Un jour, la pluie. Un autre jour, le soleil. Un jour, le vent. Un autre jour, l’absence de vent. Le ciel a-t-il quelque embarras avec ce qui le traverse ? Nous sommes comme le ciel. Nous laissons jouer les éléments. Les phénomènes apparaissent quand sont réunies les conditions propices à leur survenance. Le ciel demeure imperturbable.

 

*

 

L’après-midi, Jean m’invite à méditer sur la terrasse couverte devant la cabane. On s’installe sur les tapis. Silence total. Je me laisse bercer par les bruits de la forêt et le chant des oiseaux. Je ferme les yeux. Cette beauté m’émeut profondément. Je sens les larmes couler sur mes joues. Jean, les yeux grands ouverts, ne dit rien. Je sais qu’il a remarqué mon émotion.

— Accueillons ce qui se présente…

Ces mots d’encouragement ôtent chez moi toute inhibition. Je me laisse aller à pleurer. Je ressens une grande joie. Et une paix à laisser couler en moi cette émotion. Nous restons ainsi quelques heures. Sans parler. Seul un changement de posture, de temps à autre, rythme cette longue séance silencieuse. Le soleil est sur le déclin lorsque Jean me propose d’aller manger.

 

*

 

La table est dressée avec soin. Jean s’occupe de la cuisson du riz et des lentilles. L’eau chauffe sur le poêle. La pâte préparée la veille servira pour les galettes. Nous la coupons et formons de petites boules que nous aplatissons avec vigueur et délicatesse. Toujours en présence. Les mouvements sont habités. La préparation du repas devient une longue et profonde méditation. Comme si le sacré reprenait sa place dans le quotidien le plus prosaïque. Je sais gré à Jean de m’initier à cette vie pleine. A la sacralisation de chaque instant vécu.     

— Tout est parfait, n’est-ce pas ?

J’acquiesce d’un mouvement de tête.

Après le repas, nous fumons en silence assis sur le long canapé de la terrasse. La compagnie de Jean est un ravissement. Ses gestes, ses pas et ses paroles reflètent avec tant de justesse la « vraie vie », cette vie que je n’avais lue jusqu’alors que dans les livres. Cette vie que nous cherchons tous en courant avec frénésie après nos désirs et nos espoirs.

— Tant que tout ne s’est pas éteint, il convient d’aller vers ce qui nous porte…

Je prenais davantage conscience de la justesse des paroles de Jean. De chacune de ses paroles. La beauté du monde était devant nous. La vie merveilleuse. La vie pleine. La paix, le silence et la joie. Cela semblait si facile… et pourtant…

 

*

 

— Peux-tu me parler des auteurs qui ont marqué ton parcours ?

Jean plisse les yeux.

— Tout ce que l’on rencontre est nécessaire. Les êtres, les livres, les évènements. En réalité, tout est rencontre. Chez certains, ce sont les auteurs qui jouent un rôle important. Ce fut le cas pour moi. Mon itinéraire a été jalonné par des auteurs qui ont éclairé mon chemin. Chacun a joué son rôle. Pessoa, Juliet, Bobin, Haldas, La Soudière…

— As-tu déjà eu des maîtres à penser ?

— Non. Il n’était pas dans ma nature de suivre qui que ce soit… Ce furent plutôt des amis qui m’accompagnaient et m’encourageaient à défricher mon propre chemin… quelques lectures ont été particulièrement éclairantes à une époque : Krishnamurti, Éric Baret, Nisargadatta Maharaj, Jean Marc Mantel et quelques autres… je les ai beaucoup lus. Et je leur dois d’avoir éclairé mes pas. De m’être familiarisé avec cette perspective que je pressentais depuis longtemps. Ils ont confirmé ce que je n’arrivais pas encore à formuler ni à vivre avec justesse… et je les remercie aujourd’hui d’avoir joué ce rôle…

— Et toi, as-tu envie de transmettre ?

— Transmettre ? Rien ne peut être transmis ! On ne peut qu’accompagner et encourager celles et ceux qui sont engagés avec détermination et honnêteté sur ce chemin… Ceux qui viennent ici le savent. Et s’ils éprouvent le besoin de questionner, je laisse la parole émerger…

— Comme tu le fais avec moi…

— Oui. Comme je le fais avec toi…

— Êtes-tu un sage ?

— Non. Je vis simplement ce qu’il y a à vivre. J’ai cherché longtemps. Je connais donc le parcours de celui qui cherche. Voilà tout. Etre un sage est une idée. Personne n’est sage. On sait simplement ce que n’est pas la sagesse…

— Tu veux dire l’ignorance ?

— Oui, on peut l’appeler l’ignorance. D’autres l’appellent l’aveuglement. L’obscurité. Tout cela n’est que concept. Il convient simplement de vivre ce qui doit être vécu. Et le vivre pleinement. Avec honnêteté. Et si possible sans esquive.

— Et lorsque l’on esquive ?

— Eh bien… l’on esquive… c’est que cela doit être ainsi… un jour, on prend conscience de ces esquives. De cette façon de fuir ce qui est là. On laisse faire. Mais on n’en est plus complice. On est libre de la fuite. Et le mouvement finit par s’éteindre de lui-même. A son propre rythme.

— Que doit-on comprendre ?

— Il n’y a rien à comprendre. Simplement comprendre que l’on ne peut pas comprendre… Si tu éprouves le besoin de répondre aux mille questions que tu te poses, alors tente d’y répondre… cherche les réponses jusqu’à l’extinction de toutes les questions… 

 

*

 

 — Que représentent pour toi tes chiens ?

— Les chiens font partie intégrante de ce que je suis. C’est ainsi. Une résonance existe en leur présence. Ils sont indissociables de la vie du personnage. Mais cela n’a pas d’importance. Certains vibrent à ceci. D’autres à cela. Il suffit d’être à l’écoute de ses propres résonances. Et suivre sa pente naturelle. 

 

*

 

— Peux-tu nous parler du vide ?

Silence. Long silence.

— Le vide est notre vraie nature. Sur un autre plan, le vide signifie être ouvert et disponible à ce qui est là. On est sans programme, sans projet, sans idée, sans image. On est simplement disponible à ce qui est là, à ce qui vient et à ce qui part… Lorsque l’on est encombré de programmes, de projets à réaliser, d’idées sur la vie et sur le monde, on ne peut être présent à ce qui est là. L’écoute est totalement absorbée par ce qui nous préoccupe. Quand on est vide de ces encombrements, on est pleinement présent aux mouvements qui surgissent…

— Et que faut-il faire pour être vide ?

— Rien. Il n’y a rien à faire. Le mûrissement se fait naturellement. On laisse s’éteindre les désirs, les croyances, les espoirs, les idées, les projets… avoir des projets est un manque de clarté. Cela signifie que l’on croit et espère que l’on pourra se réaliser pleinement dans leur réalisation. Il faut passer par cette étape. On tente de se trouver ainsi mille fois, dix mille fois. Et l’on finit toujours pas être déçu. Voilà le travail de la vie sur nos encombrements ! On comprend alors que l’on ne peut se trouver ainsi. Même lorsqu’un projet aboutit, on sent — si on est un tant soit peu honnête et lucide — que subsiste un sentiment d’incomplétude. Quelque chose continue de manquer… alors on réalise que toutes les situations sont égales, qu’avoir plus ceci ou cela, être plus comme ci ou moins comme ça n’apporte rien. Cela change simplement le décor. On finit donc par ne plus rien attendre des situations. On reste simplement avec ce qui est là. On n’exerce plus de violence envers soi, envers les situations. On ne refuse plus ce qui se présente…

 

*

 

Ce matin, Jean s’est levé plus tôt qu’à l’accoutumée. Il a fait chauffer l’eau dans la petite casserole. Il est allé chercher une planche de bois et deux tréteaux dans la remise qu’il a posés sur la terrasse. Il a versé l’eau bouillante dans son bol et s’est installé avec son carnet face aux montagnes. Je suis resté au lit, bien au chaud sous mes couvertures, les yeux mi-clos et la tête encore ensommeillée pour me laisser bercer par les bruits qui accompagnaient la naissance du jour.

 

*

 

Nous nous asseyons sur le sol herbageux. Une belle pelouse verte et sauvage. Tendre et accueillante. Avant de s’asseoir, Jean caresse le tapis d’une main délicate. Je vois ses lèvres bouger.

— Que fais-tu ?

— Je lui rends grâce d’être là et lui demande si elle nous autorise à nous accueillir…

Je regarde Jean avec surprise. Il me fait un clin d’œil complice.

— Asseyons-nous !

Jean enlève ses chaussures. Les pose avec attention et délicatesse hors du tapis de verdure.

— Ne sois pas étonné ! Le respect de l’Existant devient naturel. On ne s’approprie pas. On n’exploite pas. On n’instrumentalise pas. On n’utilise que le nécessaire indispensable.

— Cela vient-il de l’Amour ?

Jean ne répond pas. Il prend la posture du demi-lotus pour une longue séance de méditation.

 

*

 

Le soir, nous nous posons devant la terrasse. Jean effectue quelques postures de yoga qu’il enchaîne lentement. Très lentement. Je vois son corps vibrer. Secoué par d’étranges soubresauts. Comme s’il captait les énergies telluriques. Les énergies cosmiques. Les postures se succèdent avec fluidité. Tantôt debout, tantôt assis, tantôt couché. Comme s’il dansait avec l’univers. Avec l’espace. En osmose avec les paysages. Je regarde cet étrange ballet d’un œil ravi et étonné.

— La sensorialité devient vivante. Tu vibres à ce qui est là. Le corps est habité. Il se laisse traverser par les mouvements ressentis. Tout est résonance.

Je tente de l’imiter avec maladresse. Je me sens gauche et emprunté. Trop encombré sûrement des idées que je me fais à propos de cette démarche et de cette perspective.

— Allonge-toi et détends-toi… Laisse-toi faire… N’essaye pas d’obtenir quoi que ce soit… Ecoute le corps et laisse-le libre.

Je m’exécute. Je m’affale sur le sol, les jambes repliées sur moi, la nuque raide et le thorax crispé. Je sens les tensions qui m’habitent. Mon corps entier est tendu.

— Laisse tes peurs se déployer…

Je sens mon corps se détendre progressivement. Il se met à bouger d’une étrange façon. Je suis pris de spasmes. Mes jambes se mettent à bouger frénétiquement. Mon dos se cabre puis se relâche. Je me laisse faire. Etrange séance. A la fin de la session, Jean me regarde avec bienveillance.

— Tu penses que je progresse ?

— Ne t’occupe pas de ta progression. Laisse cela. Vis simplement ce qui est là. Laisse-toi faire… Vis ! Ressens ! Ne te préoccupe pas de tes supposés progrès ! Cela ne mène à rien ! 

 

*

 

Il pleut toute la journée. Nous ne faisons rien. Nous sommes là simplement. Jean reste assis en tailleur sur le tapis une grande partie de la matinée. Je relis mes notes. Ajoute quelques commentaires ici et là. L’atmosphère me semble morose. Est-ce que je m’ennuie ? L’attrait de cette enquête et de cet univers inconnu est-il en train de s’éteindre ? J’essaye de ne pas y penser. En vain. Les idées se bousculent dans ma tête comme dans un entonnoir trop étroit. Jean, lui, semble serein. Calme. Je vois mon agitation. Mon besoin fébrile d’échapper à la morosité du temps.

— Le rien n’est pas toujours facile à apprivoiser, n’est-ce pas ?

Je suis pris au dépourvu. Je réponds sans réfléchir.

— Oui. En effet. Et toi, comment fais-tu ?

— Je ne fais rien de particulier. Si l’esprit s’agite, il s’agite. Je vois simplement l’agitation. S’il a besoin de fuir, je le laisse libre. Si le corps a besoin de bouger, il bouge. On le laisse se mouvoir à sa guise. Il ne sert à rien de contraindre l’esprit et le corps à rester calmes et immobiles si l’on sent le besoin de bouger. Le silence et l’immobilité doivent venir de l’intérieur. Inutile de faire semblant ! Si l’atmosphère t’est insupportable, va donc faire un tour ! La pluie et le vent sont bénéfiques pour sentir le corps. Se frotter aux éléments, voilà une bonne façon de se sentir vivant ! 

Je suis les conseils de Jean. J’enfile ma veste. Et je sors. Bien décidé à mettre en pratique ces sages paroles. Je quitte la clairière et m’enfonce bientôt dans la forêt par l’étroit sentier qui mène à une piste plus large. Je sens le vent me fouetter le visage et mes vêtements devenir humides par cette pluie battante et ininterrompue. En quelques minutes, je suis trempé. Je grommelle. Mais je continue de marcher. Je ne sais ce qui me pousse ainsi à rester auprès de cet homme. Sa sagesse m’impressionne et me fascine. Il est clair que j’envie cette façon de vivre. Et d’habiter la vie. Cette façon d’être présent à chaque instant. Sans rudesse ni conflit. Et cette liberté à l’égard des phénomènes. Homme sage et libre ! Bon sang ! Quand diable y parviendrais-je ? La voix de Jean résonne dans ma tête : « encore des idées sur la quête, n’est-ce pas ? ». On n’en finit donc jamais… 

 

*

 

Je note ici une phrase sur le rien et l’ennui glanée dans les feuillets de Jean : Le rien n’est pas délétère. Il ne vient jamais en ennemi. Il s’approche toujours en ami. En compagnon de route exigeant mais généreux. Son apparence est parfois certes terrifiante. Mais derrière ses habits de sauvage infréquentable et désespérant se cache un être plein de bonté. Un être d’amour qui n’aspire qu’à nous rapprocher de nous-mêmes. Il arrive avec dans ses bagages le reflet de notre nature véritable. Pour nous révéler le vide que nous sommes. Ce vide que nous portons tous. Et qui parfois nous effraie tant.

 

*

 

— Peux-tu nous parler de la présence ?

— La présence est l’unique sujet. L’espace infini qui accueille et éclaire toutes choses. Certains la nomment présence, conscience, nature de l’esprit, d’autres le Soi, Dieu… qu’importe son nom ! Quand on habite cet espace d’arrière-plan, le nom n’a plus d’importance.

— Et comment habite-t-on cet espace ?

— En demeurant à la source du regard…

— Et ce processus se fait-il graduellement ?

— Tout est possible. Chez certains cela advient brusquement. Cela semble assez rare. Chez d’autre cet éveil à la conscience se fait progressivement.

— Certains enseignants insistent sur la présence. Et d’autres sur le vide… Peux-tu nous éclairer sur ce point ?

— On ne peut habiter la présence que si l’on est vide. Oui ! Encore une fois lorsque les idées, les représentations, les croyances et les espoirs nous ont quittés. La présence ne se décrète pas. Le vide non plus. La présence est toujours là…

— Que l’on en ait conscience ou non… ?

— Oui. Nous sommes cela. Quant au vide, on ne peut en hâter le mûrissement...

— Mais n’y a-t-il pas quelque chose à faire pour se vider ?

— Il n’y a rien à faire… c’est un processus naturel. Le vide se fait quand les idées, les croyances et les espoirs s’éteignent.

— Et pour qu’ils s’éteignent, que…?

— Ils s’éteignent en les laissant advenir. Ainsi tant que l’on croit, pense, espère que telle chose, telle situation ou telle personne nous offrira un état plus bénéfique que ce que l’on vit actuellement, on jettera toute notre énergie dans la bataille… afin de l’obtenir. Le mental est puissant. On ne peut le contraindre à renoncer. Mais à force de courir après ses rêves et ses idéaux et de voir au final qu’ils ne permettent pas de se trouver…

— De se trouver… ?

— De se réaliser pleinement si tu préfères…

— Alors… ?

— Alors cette dynamique — cet ajournement perpétuel — se tarit. Et l’on fait face à ce qui est là… au début en général cette situation est ressentie comme douloureuse. Ou du moins inconfortable. Mais cela semble être un passage obligé… c’est ainsi que l’on se vide de toutes les idées, les espoirs et les croyances qui encombrent le mental. Puis progressivement on se familiarise avec le rien. Et si l’on reste ainsi sans fuir, sans vouloir changer quoi que ce soit, ce dernier se transforme par une mystérieuse alchimie en plein. En plénitude. Il n’y a là aucune volonté personnelle. Cela semble se passer à notre insu.

— Et l’ego ?

— Disons que l’ego ressemble à une entité illusoire que l’on interpose entre ce regard impersonnel et ce qui apparaît comme le monde…

— D’où vient cette illusion ?

— Elle conserve son mystère. Mais disons que cette identification au mental est un mécanisme naturel… On naît ainsi. Notre structure mentale nous invite très tôt à nous identifier au corps. De ce processus naît le sentiment de séparation avec ce que l’on nomme le monde… mais cette identification est une magistrale méprise…

 

*

 

Jean a renoncé à publier les livres qu’il a écrits pendant une quinzaine d’années. 

— Aujourd’hui il m’arrive d’écrire quelques poèmes. Je les retranscris sur de petites planches de bois que je pose ici et là sur les sentiers les plus fréquentés de la forêt.

— Pour que les promeneurs les lisent… ?

— Oui. Ceux qui marchent en forêt viennent souvent y chercher une coupure avec le monde. Une façon de se mettre en retrait. La poésie devrait faire partie intégrante de la vie. Je regrette qu’elle n’orne pas davantage les rues des villes. La poésie invite au silence. Et à la contemplation. Elle nous invite à regarder la vie avec plus de profondeur et d’attention…

 

*

 

— Nous avons déjà parlé de la société mais j’aimerais revenir sur certains points…

Jean acquiesce en silence.

— Que penses-tu du monde contemporain ?

Jean lève les yeux au ciel.

— Nous sommes dans une période misérable. Une ère de fin de règne. La monstruosité créée par le mental étouffe le vivant. Partout. Tous les domaines de la vie sont contaminés par cette folie ordinaire. Partout on exploite, on instrumentalise. Partout on alimente le monstre en marche…

— Et que pouvons-nous faire pour arrêter sa marche destructrice ?

— Rien… Cette entité monstrueuse obéit à son propre mouvement… difficile d’enrayer une telle dynamique…

— Pourtant existent un peu partout des voix qui s’élèvent, des alternatives pour rendre le monde et la vie terrestre plus vivables… ?

— Tu as raison… il existe des mouvements d’opposition et de résistance qui inaugurent une ère nouvelle…

 

*

 

— D’où vient la souffrance ?

— Du sentiment de séparation et du refus de la situation telle qu’elle se présente… Ce ne sont pas les évènements qui provoquent la souffrance mais leur refus… Vois cela dans ton propre vécu… les évènements ne sont jamais porteurs de souffrance. Les évènements sont comme ils sont. Ni plus ni moins. Mais ce qu’ils représentent à nos yeux peut être source de souffrance…

— Parce que l’on estime qu’ils ne devraient pas nous arriver… est-ce cela ?

— Oui. On croit qu’il pourrait en être autrement… et qu’il serait mieux qu’ils ne se produisent pas. C’est un manque de clarté. Nous avons la prétention de savoir mieux que la Vie ce qu’il nous faudrait… mais qui sommes-nous pour avoir une telle prétention ? La vie est ce qu’elle est. Toujours…

 

*

 

Aujourd’hui, journée « lessive ». Jean récupère la cendre du poêle à bois et la verse dans une grande bassine de fer. Il y ajoute de l’eau bouillante. Et touille le mélange avec un bout de bois pendant quelques minutes.

— Demain nous pourrons laver le linge.

Je l’interroge sur ce procédé écologique. Comme à son habitude, il répond patiemment à mes questions. Il m’explique le « processus de fabrication » de cette lessive naturelle et bon marché. Il me fait un clin d’œil.

— Tu sais… la frugalité joyeuse obéit à « ses nécessités ». Les choses s’imposent naturellement. Il n’y a pas d’idéologie. Certes, il y a un respect… un immense respect pour le vivant…

— L’Existant… ?

— Oui, pout l’Existant. Mais les moyens financiers restreints obligent à des procédés peu coûteux. On se sert de ce qui existe. Tout cela est très fonctionnel !

 

*

 

— Ne t’arrive-t-il jamais de te sentir triste et isolé ?

Jean plante son regard dans le mien. Je vois briller au fond de ses yeux une grande bienveillance.

— Oui, cela arrive. Le mental peut éprouver ces sentiments. Et lorsque l’identification au personnage occupe le « devant de la scène », on peut ressentir ces mouvements émotionnels. Mais cela n’est pas vu comme problématique. On laisse ces mouvements se déployer. Et se résorber à leur rythme. Et quand on retrouve l’arrière-plan, ces sentiments perdent aussitôt leur force et leur pouvoir…

— Et que fais-tu lorsque cela t’arrive ?

— Rien de particulier.

— T’arrive-t-il de fuir ou de vouloir fuir cette tristesse ou cette solitude ?

— Oui, cela arrive. Ce refus de ce qui est… cette distraction de soi-même est parfois présente. Elle survient de temps à autre… quand la périphérie de l’être prend le pas sur la présence…

— Il y a donc encore des oscillations ? Des va-et-vient entre le centre et la périphérie de l’être ?

— Oui. Cela se produit. Mais quand ceci est vu et accepté, ces mouvements ne sont plus problématiques. La vie est toujours simple et belle.

— Mais nous nous compliquons l’existence… 

— Oui. Le mental complique toujours tout. Nos refus, nos idées, nos rêves, nos croyances, nos espoirs nous éloignent toujours de ce qui est là. Toujours. C’est ainsi…

 

*

 

— J’aimerais revenir sur ton mode de vie…

Jean me regarde avec malice.

— Oui.

— Tu ne sors jamais, tu ne pars jamais en vacances, tu rencontres très peu de gens, tu n’as aucun rôle social, tu n’as pas de loisirs, ton mode de vie est rude et rustique… ta vie semblerait très ennuyeuse à la plupart de tes congénères…

Jean se met à rire.

— Oui. Sans doute. Ce genre d’existence ne convient pas à tout le monde. Chacun doit suivre sa pente… le mode de vie et les contenus existentiels n’ont aucune importance. Vivre comme ceci ou cela dépend de nos prédispositions et de notre sensibilité. L’essentiel est ailleurs…

 

*

 

— As-tu encore des attentes à l’égard de la vie ?

— Non. Encore une fois, on vit ce qu’il y a à vivre. Il n’y a pas d’attentes particulières… obtenir ceci ou cela ne changerait rien. On laisse le personnage vivre ce qui se présente. Si la vie pousse ici ou là, les pas se dirigent naturellement du côté qui s’impose. L’un n’est pas mieux que l’autre…

 

*

 

Jean s’assoit sur l’herbe, sort de sa poche deux jouets — des « pouic-pouic » comme il les appelle — les enveloppe de chiffons (de vieux bouts de jean’s déchirés) et les lance aux chiens ravis. Une demi-heure de jeu complice où je vois Jean se rouler avec ses chiens, leur courir après et s’ébattre sur la pelouse. Un étonnant spectacle que l’on a peine à imaginer de la part d’un homme si sage… lorsqu’ils achèvent leur séance ludique, je fais part à Jean de mon étonnement.

— Il n’y a rien à comprendre. C’est une résonance. J’aime jouer avec les chiens. J’aime les chiens. C’est comme si j’étais l’un d’eux…

— Ah… ?

— Oui. On vibre à ce qui est là selon sa sensibilité. Quand on est face à un arbre, on vibre avec l’arbre. La vie est un jeu de résonance et de vibrations… il n’y a rien à comprendre. Il convient simplement d’être à l’écoute… et de jouer avec ce qui est là…

— Cela t’arrive-t-il encore d’avoir des émotions fortes ?

— Oui. Elles peuvent être encore parfois très invasives.

— Comme si elles occupaient tout l’espace ?

— Exactement. Elles remplissent l’espace d’une incroyable façon. Elles ne laissent presque aucune place. La dernière fois, cela s’est produit lorsque je croyais que l’élan vital de l’un de mes chiens était en train de s’épuiser… beaucoup de signes tangibles étaient présents… la tristesse et l’angoisse m’ont alors envahi d’une incroyable façon. Quelque chose en moi refusait l’inéluctable : la disparition et l’absence. Tant que subsiste un attachement au personnage, il semblerait qu’il y ait des résidus égotiques et des points de fragilité… des zones sensibles qui ne semblent pas avoir été correctement vues et acceptées…

— Et qu’as-tu fait ?

— Que veux-tu que l’on fasse ? On s’est laissé submerger par ces mouvements. On les a laissés se déployer.

— Etait-ce inconfortable ?

— Oui. Le refus alimentait l’inconfort. Il faut parfois du temps pour que le refus soit pleinement accepté. Alors l’inconfort disparaît… mais quand l’inconfort est là, il est là… il faut le vivre pleinement… lui laisser faire son travail… pour éroder ce qui doit l’être…

 

*

 

— Qu’est-ce que la connaissance de soi ?

— Un concept. Il n’y a pas de connaissance. Nous ne sommes qu’ignorance. Nous ignorons. C’est dans ce non-savoir que peut naître la connaissance. Mais ce n’est pas une connaissance savante. Il n’y a rien à savoir sur la connaissance. Et tous les savoirs ne servent à rien en la matière.

Jean marque une longue pause.

— Seul dans ce non-savoir peuvent surgir les gestes et les paroles justes… quand on est vide… vide de savoirs et de connaissance, alors l’intelligence de l’être se manifeste…

— Et que faire des savoirs ?

— Les savoirs sont fonctionnels. On les utilise pour des tâches fonctionnelles : faire la vaisselle, conduire une voiture, construire un pont…

— Et pour la connaissance de soi… ?

— Vient un temps où les savoirs en matière de connaissance de soi sont abandonnés… ils deviennent inutiles… voire encombrants… ils n’ont plus de raison d’être…

— Beaucoup de choses que tu dis vont à l’encontre de ce qui est communément admis et prôné dans la société…

— Oui. Le monde est gouverné par le mental. Et ce qui est dit ici est au-delà du mental…

— Cela pourrait même être totalement incompréhensible pour la plupart des gens…

— Cela pourrait l’être en effet. Il n’y a rien à blâmer. La compréhension se fait à son propre rythme.

 

*

 

Je regarde Jean avec tendresse et sympathie. Hormis cette incroyable présence de chaque instant, rien ne le distingue du quidam. Un œil non averti le prendrait peut-être même pour un hurluberlu marginal et un peu excentrique, un pauvre diable solitaire et misérable. Mais il suffit de l’approcher quelques instants, de parler un peu avec lui, et cette présence saute au visage. La consistance de la parole, l’épaisseur et la légèreté des gestes, l’épure du discours, cette attention bienveillante pour l’Existant ne trompent pas. L’intelligence du regard, cette vision à la fois fine et profonde. Et cette incroyable ouverture. Le non jugement, l’absence d’a priori. On est vite impressionné par le travail intérieur qu’a effectué cet homme. Il me reprendrait sûrement. Il dirait sans doute : « l’incroyable œuvre de la compréhension en nous »… Il est sans doute difficile pour un homme ordinaire (qui a une perception commune) de comprendre ses paroles. Il s’empresserait de les passer au crible de ses idées et opinions, émettrait aussitôt des jugements. Bref, serait imperméable à cette sagesse vivante. 

 

*

 

La dernière après-midi en compagnie de Jean est un régal. Nous la passons à marcher — très lentement. A petits pas. Marche entrecoupée de longues pauses sous le ciel. En compagnie du vent, des nuages et des herbes folles des prairies. Nous nous asseyons au pied de grands arbres que nous saluons à notre arrivée et à notre départ. Comme des frères immobiles. Jean s’allonge souvent le dos calé contre un petit monticule d’herbes sauvages, les mains derrière la tête, les jambes croisées, en contemplant la ramure de ses compagnons silencieux, les nuages passagers et l’azur imperturbable. L’atmosphère est silencieuse. On s’y repose à notre aise. J’aime ces instants sereins et tranquilles. De temps à autre, Jean se met à parler. Quelques mots profonds qui jaillissent du silence. Les chiens gambadent alentour, ivres de liberté et d’odeurs. Ils reviennent vers nous à intervalles réguliers en frétillant la queue, heureux de nous revoir et repartent quelques instants plus tard en suivant leurs longues et sinueuses pistes invisibles.

Je comprends l’amour de Jean pour la nature et les animaux. Je comprends son indéfectible attachement pour le ciel, les arbres, les insectes, les fleurs, les herbes, les animaux de la forêt, les nuages, le vent, les pierres, le sable et la terre. Je comprends son retrait du monde humain, son éloignement de la vaine effervescence des hommes et de leurs futiles et incessants bavardages. Oui, je le comprends. Et je sens aussi qu’à cette distance du monde peut naître un amour profond pour tous les êtres, pour toutes les créatures qui, partout, vaquent à leurs affaires. Jean n’est pas misanthrope. Ses pas l’ont éloigné des hommes mais il ne blâme pas le monde, ne juge pas les hommes, ne condamne personne. Il accueille ceux qui viennent à lui avec un amour sincère et profond. Et je me surprends en retour à aimer cet homme humble et bon, simple et sage. 

 

*

 

En fin de matinée, un vent frais a surgi derrière les montagnes. Jean enfile un col roulé et sort chercher quelques bûches. Le feu est préparé en quelques minutes. La pièce se réchauffe rapidement. Nous nous installons dans les fauteuils. Je sors mon carnet.

— Nous nous faisons beaucoup d’idées à propos de tout, n’est-ce pas ?

Jean acquiesce en silence.

— Nous nous faisons des idées à propos du bonheur, de la sagesse… à propos de ce qui est juste, de ce qu’il faudrait vivre ou réaliser…

— Oui. Ces idées sont très répandues. Et elles nous enchaînent. Elles nous éloignent toujours de ce qui est.

— Que faire alors… ?

— Les laisser s’éteindre…

— Cette attitude semble être une sorte de leitmotiv…

— Il n’y a d’alternative… les choses suivent leurs cours jusqu’à leur extinction. Ce qui arrive, arrive…

— Peux-tu dire encore quelques mots sur la modernité ?

— La modernité ?

Jean ferme les yeux un instant.

— Elle est un processus. Elle semble être la tentative impulsée par le mental pour faire advenir les caractéristiques du nouménal sur le plan phénoménal…

— Peux-tu développer ?

Jean prend une longue inspiration.

— Essayons. La présence ne peut être définie, elle ne peut être objectivée puisqu’elle est l’unique sujet mais disons qu’elle a pour caractéristiques la paix, la joie et la plénitude. Le mental en tant que reflet de la présence tente de façon assez maladroite de faire advenir ces caractéristiques sur le plan phénoménal.

— Peux-tu prendre un exemple ?

— Regarde ce qu’apporte le progrès technique : rapidité, immédiateté dans une perpétuelle tentative d’abolition de la distance et du temps, confort, amélioration des conditions d’existence… et d’autres aspects que j’oublie sûrement. L’Homme n’a eu de cesse, depuis les débuts de l’humanité, de vouloir améliorer ses conditions de vie… pour essayer d’établir dans son environnement des conditions propices à la tranquillité, la joie et la plénitude. Mais ces aspects ne sont qu’un pâle reflet de la paix véritable…

— Selon toi, tout cela est vain… ?

— Non. Sur un certain plan, ces recherches sont utiles mais l’essentiel ne peut être atteint ainsi… d’autant que cette quête effrénée, outre qu’elle renforce l’illusion d’un « bonheur » phénoménal accessible, engendre bon nombre de comportements délétères…

  — Ton quotidien semble se limiter à peu de choses. Un visiteur serait surpris de voir que tu passes l’essentiel de tes journées à effectuer quelques travaux domestiques, à marcher dans la nature, à t’asseoir par terre, sur ton tapis, sur la terrasse, sur un rocher ou dans l’herbe, à faire quelques mouvements de yoga, à écrire quelques poèmes et à jouer avec tes chiens…

Jean me regarde en souriant.

— Oui. D’un certain point de vue, on peut dire que mes journées sont vides d’activités. La journée se déroule à son rythme. Lorsque la situation l’exige, les choses se font… les choses suivent leur cours… qu’y a-t-il à faire ? Rien, la plupart du temps. Un grand nombre d’activités humaines n’est en réalité qu’agitation, refus d’un état ou d’une situation existante, tentatives maladroites d’accéder à la paix… lorsque les désirs, les croyances et les espoirs d’accéder à un état ou à une situation que l’on suppose meilleure n’ont plus cours, on reste avec ce qui est là devant nous… on ne fuit pas, on ne réagit pas… on agit si cela est nécessaire, si cela vient spontanément… il n’y a rien à faire en cette vie…

— Tu es un peu provocateur…

Jean éclate de rire.

— Oui. Je suis un peu provocateur…

— Peux-tu nous expliquer pourquoi certaines traditions affirment que tout est parfait en ce monde… et selon cet adage qu’il n’y aurait donc rien à changer…

Jean me regarde en souriant.

— En voilà une question ! Est-ce utile d’y répondre ?

— Cela nous éclairerait…

— Dans ce cas… que veux-tu changer ? Que pouvons-nous changer ? Il n’y a rien à changer en ce monde... tout ce que l’on vit est nécessaire… ce que chacun vit est exactement ce dont il a besoin pour s’éveiller… même si d’un certain point de vue, les évènements ont l’air néfastes, qui peut savoir si cela ne joue pas un rôle dans le mûrissement de la compréhension…

— Et l’imperfection du monde… ?

Jean me toise avec surprise.

— Quelle imperfection ? L’imperfection est parfaite…

— Même quand on est encore soumis à l’égo avec son cortège de réactions, de désirs et de croyances… ?

— Oui. Incontestablement oui.

— Alors à quoi cela sert-il de s’éveiller… ?

— A rien. Cela advient. Voilà tout… cela ne change en rien le cours des choses. Les évènements continuent de se dérouler. La seule différence est qu’on n’alimente plus l’ignorance et ses conséquences mortifères…

— Il y a donc des conséquences mortifères lorsque l’on est encore soumis à l’ego ?

— Oui. Elles engendrent bien souvent de la souffrance. Mais cette souffrance est nécessaire pour s’éveiller…

— Alors tout est parfait…

— Oui. Tout est parfait. Le jeu du monde se poursuit… sur un certain plan, il n’y a personne qui souffre…

— Pourrais-tu développer ?

— Lorsqu’un être s’éveille à sa vraie nature, les évènements continuent de se dérouler, le personnage continue de faire ce qu’il a à faire… selon sa sensibilité, ses prédispositions et ses conditionnements mais on est libre du personnage… on laisse les choses se dérouler librement… disons que le cours des choses n’est plus problématique… tu comprends ?

Je regarde Jean sans comprendre.

— Il n’y a donc aucune différence entre un être éveillé et un être encore soumis à l’ego ?

— Il y a des différences. Nous avons déjà abordé ce point. Le déroulement des choses n’est plus vu comme un problème. L’ignorance et son lot de conséquences délétères ne sont plus alimentés. L’écoute des résonances fait que le personnage suit naturellement sa pente… le chemin se simplifie. La vie devient facile… on écoute, les choses arrivent… les choses s’en vont… pas de problème…

— Peut-on revenir un instant sur la perfection du monde… ? Tu dis que tout est parfait, l’imperfection du monde comme les comportements encore soumis à l’ego. Selon toi, tout est juste, alors pour quelle raison dit-on que les paroles et les actes du sage sont toujours justes ? Les paroles et les actions de la personne non éveillée ne le sont-ils donc pas ?

— Sur un certain plan, toutes les paroles et tous les actes sont justes… dans la mesure où ils surviennent… dans la mesure où ils sont… sur un autre plan, il y a une différence entre les actes et les paroles qui jaillissent du mental et ceux qui tirent leur origine de l’arrière-plan. Les premiers sont réactifs, emplis d’attentes égotiques, toujours partiels et partiaux et consistent le plus souvent à atteindre quelque chose, un état, une situation en instrumentalisant les êtres, les choses et l’environnement. Les seconds jaillissent spontanément et ne visent rien. Ils adviennent selon les exigences de la situation. Ils ne sont pas volitionnels

— Peux-tu nous parler de la tranquillité ?

— La tranquillité est ce que nous sommes.

— Et le calme ?

— Le calme est un état. Il ne s’agit pas d’être calme. Lorsque le mouvement est rapide, il est rapide. Lorsqu’il est lent, il est lent. Lorsque l’agitation se manifeste, elle se manifeste. Lorsque la quiétude est là, elle est là. Mais on est tranquille avec ces mouvements. On les laisse survenir et s’éteindre…

— Il ne sert donc à rien de vouloir être calme, de diminuer son agitation, de ralentir le mouvement ?

— On ne peut répondre de façon générale. Cela a parfois son intérêt. Mais il n’y a rien à vouloir… ralentir le rythme est parfois une façon didactique pour nous rappeler à la paix. Ce n’est pas systématique. Cela peut être aussi une violence que l’on exerce envers ce qui est…

— On voit dans certains séminaires consacrés à la spiritualité des personnes immobiles… on dirait qu’elles s’efforcent au calme…

— Oui, elles s’évertuent d’être en paix mais tout leur être a envie de bouger… de s’agiter pour être ailleurs…

— Que leur conseillerais-tu ?

— De laisser advenir ce qu’elles sentent… si le besoin de bouger se fait sentir qu’elles bougent…  la paix ne s’atteint pas en se forçant à être calme… le mouvement vient toujours de l’intérieur… il ne s’agit jamais d’imiter ou de singer… il convient d’être à l’écoute du ressenti… rien d’autre n’est nécessaire.

 

*

 

Ce séjour en compagnie de Jean fut une incroyable expérience. Et une prise de conscience du « chemin » qu’il me restait à parcourir pour vivre cette tranquillité que je cherche depuis tant d’années. Mes errances et mon insatiable besoin de rencontres ne révélaient en réalité qu’une terrible insatisfaction et un profond et lancinant besoin de comprendre… J’ai quitté Jean avec tristesse en fin d’après-midi. Il m’a raccompagné jusqu’au seuil de la porte entouré de ses inséparables chiens. Il m’a fait un signe de la main. Un sourire s’est dessiné sur son visage buriné. Je me suis retourné une dernière fois et j’ai repris le chemin du retour par l’étroit sentier qui traverse la forêt. Pour retrouver ma voiture, stationnée à l’entrée du village, à près de 2 heures de marche de la clairière. J’avançais à petits pas en ressentant avec force les paroles de Jean, ses « enseignements » simples et profonds qui m’ont nourri pendant tout mon séjour. Je ne sais si je le reverrais mais je me souviendrai longtemps de cet homme simple et sage.

 

1 décembre 2017

Carnet n°48 Notes du haut et du bas

Journal poétique / 2014 / L'exploration de l'être

Assis sur la terrasse de pierres, le monde devant mes yeux offre comme un jardin d’Eden ses spectacles et sa beauté. Je me tiens tranquille sur la colline. Nul ne me voit. Mais je vois partout les yeux s’agiter. Comme si nul ne savait où se niche le regard…

 

 

La vie (nue) ne s’encombre d’aucun folklore. Elle (se) défait de tous les décors. Jusqu’à nos plus infimes vêtures et nos plus anodins rituels.

 

 

Le réveil des heures creuses où l’âme s’agite dans son puits…

 

 

Le monde comme une fleur délicate. Aussi enivrant que le vin. Aussi aiguisé qu’un couteau. Qui ne veut mourir de notre indifférence. Il exige que l’on s’agenouille à ses pieds. Mais l’on s’y refuse. On l’invite simplement à s’éveiller à la lumière.

 

 

La malheureuse patrie des hommes où l’on encense les soldats et les médailles. Et où l’on méprise la fragilité et l’innocence. Triste monde qui célèbre le sabre et piétine le brin d’herbe !

 

 

Le temps ne se compte en jours. Il se décompte en heures que nous n’aurons pas vécues…

 

 

Les jours se tiennent tranquilles dans les yeux innocents. Ils n’éperonnent la chair que dans notre prétention.

 

 

Le malheur tient à peu de mots : refus et exigences.

 

 

De l’autre côté de la rivière, la montagne. Massive et souveraine. A ses pieds, le monde s’affaire, insoucieux de sa présence. Comme si les hommes ne pouvaient vivre que dans la plaine…

 

 

L’âme contemplative est plus proche de la vérité que nos pas fébriles. Et nos mains agitées.

 

 

Que peut l’œil face au ciel infini ? S’y perdre est la seule issue.

 

 

Je m’installe à la fenêtre des jours. L’âme tranquille. Devant mes yeux, la nature et le monde vaquent à leurs affaires dans une tapageuse effervescence. On les devine impatients d’en venir à bout. La nuit semble être leur seul repos.

 

 

Le vide appelle au simple et à l’épure. Et nos agitations compliquent et obstruent. Prolongent nos chemins sinueux. Condamnent le passage de la présence lumineuse.

 

 

On aime les cœurs qui nous égaient ou nous reposent. Et nous tournons le dos aux âmes grises et plaintives. Mais chacun n’a-t-il pas besoin de sollicitude et de solitude pour s’éveiller à la grâce ?

 

 

Laisser le cœur se défaire de toutes exigences. Voilà la seule condition pour qu’il brille jusque dans la nuit la plus profonde.

 

 

Le crépuscule s’éteint devant la porte. Mais l’aube sans âge ne s’efface pas dans la nuit.

 

 

Le besoin éternel des saisons et la transparence du ciel. Voilà résumé en quelques mots tout l’univers !

 

 

Les saisons se ruent sur nos âmes en quête de paix et de lumière. Et dans nos jardins poussent les arbres, dansent les herbes. Et à nos portes, le cirque offre tous ses spectacles.

 

 

Le regard poétique s’émeut de toutes choses. Des êtres, des livres, du monde. De tous ces riens qui voudraient nous faire croire à leur importance…

 

 

L’humble présence s’éprend de toutes choses. Comme si elles étaient siennes et si étrangères à sa paix.

 

 

Pour les myriades d’enfants sages, le ciel ne sera jamais que dans les livres. Pour les rebelles à tout apprentissage, à toute transmission, il pourra naître dans leurs yeux avides de liberté et d’infini lorsque sur leur chemin, ils se retrouveront seuls et démunis face au grand mystère.

 

 

Dans nos yeux fugaces, nos errances. Et au bout du chemin, la présence qui pénètre le regard.

 

 

La fête est une triste consolation pour les âmes ignorantes et frivoles. Si elles savaient seulement que le silence est la plus grandiose des célébrations…

 

 

L’heure ne s’achève que dans la présence.

 

 

Quand l’ère tourne à la furie urbaine et technologique, l’heure pour le sage devient plus que jamais rustique et champêtre. Toujours plus simple et dépouillée d’artifices.

 

 

Les jours vides sont une invitation à l’oubli du monde. Au dépeuplement de l’espace. A l’éradication des chimères. Comme une exhortation à pousser la porte qui ouvre sur l’infini.

 

 

Avide d’espace et de solitude. De liberté et d’Absolu. Puis vient le jour où le monde n’est plus considéré comme un obstacle ni une entrave. Les limites de l’univers relatif sont acceptées. Et transcendées. On se tourne spontanément vers ce qui est naturel sans s’imaginer qu’il représente le terrain propice à sa pleine réalisation. Les choses sont ce qu’elles sont. Elles ne gênent ni ne perturbent. Elles suivent simplement leur cours dans notre regard tranquille.

 

 

Le monde se dessine sous ma plume. Les saisons abritent mes yeux sages. L’heure devient céleste.

 

 

Les jours sombres se reposent à l’abri de la mémoire. Qui étais-je ? Aujourd’hui, je m’éloigne de l’ombre qui autrefois voulait m’enserrer. A mes trousses, le vide m’a rejoint. Et à présent, nous allons ensemble (et en paix) sur la route transparente et les chemins sans visage.

 

 

Le temps qui s’acharnait a-t-il volé en éclats ? Où sont donc passées les heures que je posais devant moi ?

 

 

Sur le mont démuni je me tiens, grelottant de froid et de solitude. Mes yeux sont devant moi. Dans la terre je frissonne, les ailes repliées. Déplumées par le vent. Je ne sais que faire. Je reste assis au bord de moi-même. Dans la brume de mes rêves. Je me suis perdu. Je croyais être arrivé au lieu sans pareil. Mais mon regard m’a surpris hébété sous la pluie. Je me suis égaré sur le chemin que je croyais achevé. Où ai-je donc posé mes pas ? Et pourquoi dans le ciel les nuages me sourient ? Je m’ennuie ferme sur la terre. Le monde a scellé mon exil. Nulle part est mon origine et ma destination. Et j’ai perdu la route qui m’y menait. A présent où pourrais-je bien m’égarer ? Je n’avance qu’en moi-même. Et j’ai perdu la trace qui m’y menait. Les pas se suivent sans fin sur le cercle étroit qui m’entoure. Je n’avance qu’à reculons vers le gouffre qu’est mon centre. Je marche au bord du cercle qui m’enserre. Quand y tomberais-je ? L’horloge s’est enfoui sous la crasse accumulée depuis des siècles. Et je ne sais que faire du temps. Où est donc passée l’heure nouvelle ? Je suis sans ressource face à l’indigence. Et la monnaie n’est d’aucun secours. Les jours et les poches sont aussi vides que le ciel. Et mon regard penche davantage vers l’absence qu’en lui-même. On aimerait parfois habiter un autre songe. Mais tous les rêves sont nos tombeaux. 

 

 

Tiens-toi à la source. Et la vie sera fraîche. Tu contempleras le cours sinueux des rivières. Leur folle agitation jusqu’à l’estuaire et les terres marécageuses avant le grand plongeon dans l’océan.

 

 

Je baigne dans l’infini du ciel. Et l’eau des rivières m’emporte.

 

 

Assieds-toi à la source. Et laisse les rivières s’écouler.

 

 

Les murs sont lisses derrière les barricades. Et les assaillants ont déserté la place. La révolution a-t-elle eu lieu ?

 

 

Que la maison soit en ordre ou pas, que tu ailles ici ou là, que tes actes aboutissent ou pas, tout cela n’a d’importance que pour ton esprit. Et disons même que ton existence (que tu existes ou n’existes pas) n’a strictement aucune importance à l’échelle de l’univers. Quant à la présence, elle n’est guère concernée par ce qui se passe… elle éclaire simplement ce qui se déroule en elle… mais tout ce qui existe est précieux et mérite, à ce titre, toute notre attention et notre bienveillance…

 

 

La plupart de nos actes ne sont en réalité que des gesticulations pour donner consistance au personnage auquel nous nous identifions, à cette entité que nous croyons être…

 

 

L’exil se répand sur les jours. Et me voilà condamné à errer vers le centre. Serais-je donc au milieu du ciel ? En bas, je vois les hommes qui s’agitent. Et en haut, les nuages qui passent. Serais-je donc en ce lieu qui, dans mes rêves, contentait ma faim ? Les rebords du monde se sont repliés sur mes yeux fatigués. Les chemins se sont effacés. Où irai-je donc quand le vent aura cessé ? Serai-je toujours vivant pour voir mes pas parcourir la terre ? Et le ciel aura-t-il rempli mon regard ? Irai-je le visage éclairé de son ardeur ? Je l’ignore. Je me contenterais d’un ilot. D’une infime parcelle où le corps usé, j’attendrais que m’enserrent les bras de l’infini. A côté du monde je me tiendrai, lui offrant une main humble et secourable pour le hisser jusqu’au lieu qu’il cherche. Mais peut-être le vent m’emportera-t-il ailleurs ? Peut-être me détournera-t-il de ces terres familières pour me conduire en des contrées moins hospitalières où je ne reconnaîtrai pas les miens… le vent sera ma seule force. Et si le ciel est habité, il n’y a lieu de s’inquiéter des moissons et des récoltes, du modeste édifice que nous avons érigé à la célébration du chemin qui mène à l’anéantissement du monde pour répondre à la gloire éternelle du rien et au sacre du royaume auquel on ne peut échapper…

 

 

Il n’y a de refuge qu’en soi-même. Dans cette tranquillité au-delà du mental. La vie phénoménale n’est que violence et hostilité. La société humaine a beau essayer d’en adoucir les formes et d’en atténuer les effets, la matière (les corps et les psychismes) est soumise à rude épreuve. Le monde reste une jungle où seule règne la loi de la puissance et de la destruction.

 

 

Assis sur la terrasse de pierres, le monde devant mes yeux offre comme un jardin d’Eden ses spectacles et sa beauté. Je me tiens tranquille sur la colline. Nul ne me voit. Mais je vois partout les yeux s’agiter. Comme si nul ne savait où se niche le regard…

 

 

Ô amis humains, où avez-vous mis vos yeux pour marcher avec tant d’aveuglement ? Si vous saviez comme le regard respecte l’Existant, vous auriez sans doute honte de tant de dévastation…

 

 

Sur la montagne solitaire, l’heure n’est jamais mortifère. Qu’elle soit vide ou pleine, on la regarde passer comme les nuages.

 

 

Le regard des sommets jamais ne blâme les yeux des plaines. Immense commisération pour toutes les prunelles.

 

 

J’aime me laisser caresser par les yeux des arbres, les yeux des herbes, les yeux des rochers, les yeux du vent… et le regard du ciel que j’habite.

 

 

Que jaillisse spontanément la parole nue qui exprimerait avec justesse la présence silencieuse. Voilà ma seule ambition poétique !

 

 

La simplicité et le dépouillement sont le reflet manifeste de la présence comme la complexité, le foisonnement et la diversité sont l’expression du vivant (et accessoirement du mental).

 

 

La silhouette dépouillée et le pas simple empruntent l’unique chemin à travers les décors somptueux et foisonnants du monde.

 

 

Je m’enivre du parfum des fleurs. Et des saisons éphémères. La solitude s’habite en silence. Le monde ne vit que dans le regard.

 

 

La fureur du monde se défait dans nos yeux innocents. Les mouvements se succèdent sans fin dans le silence. La paix enveloppe toutes les agitations. Le temps se lézarde.

 

 

Sur la table, la carafe et le bol, la feuille et le stylo attendent le baiser de Dieu. L’univers est en ordre. Comme sa marche sans fin qui s’attache à vouloir toucher le ciel. 

 

 

Balayer le sol. Marcher dans les collines. S’asseoir sur un rocher. S’allonger sur le sol. Ouvrir un livre. S’étendre sur sa couche. Manger en silence. Le regard éclaire le quotidien. Offre à tous les gestes et toutes les activités une beauté indicible. Notre cœur déborde de gratitude. On célèbre le sacré de l’existence. Et nos mains sages se recueillent en silence.

 

 

Le chant des oiseaux, l’écho de la forêt. Les paroles de la terre sont sages. Il n’y a que les hommes pour ne pas les entendre. L’instant si fragile dans mes mains ouvertes. Seul dans la forêt, les bruits du monde n’ont plus d’importance. On se retire de toutes volontés. On célèbre dans le silence ce qu’il y a devant nos yeux. Présent à ce que l’oreille entend. L’heure est légère. Elle s’éprend des beautés du jour. Les yeux assagis se reposent. Le tumulte qui autrefois nous agitait n’a plus prise sur le regard de paix. Les mains ont beau encore parfois s’agiter, les pas peuvent encore bien de temps à autre retrouver leur fébrilité d’autrefois, les yeux suivent, tranquilles, l’effervescence passagère. En attendant le silence, ils laissent les bruits s’éteindre.

 

 

Que sommes-nous face au mystère ? Rien. Nous sommes à la fois le mystère. Et son connaisseur. Et c’est dans notre ignorance que peut se révéler la compréhension.

 

 

Sous le soleil, les hommes suivent leur sillon, les uns labourent leur champ, d’autre creusent des trous. Les chiens courent après les chats. Les chats après les souris. Tout est en ordre. Instants fugaces. Mouvements éternels.

 

 

Les oiseaux passent sous la lumière du soleil. Traversent le ciel. Parcourent l’immensité. Ne laissent aucune trace de leur itinéraire.

 

 

Assis dans l’herbe, l’immensité m’environne. Je suis l’infini qui observe. Je suis sans origine, les yeux ont beau se poser ici et là, les pas aller ici et là, je ne vais nulle part. Nous sommes toujours là.

 

 

Seul dans le souvenir, le monde est peuplé. Dans la présence, il n’y a personne.

 

 

Connaissance, ignorance. Pensée, non-pensée. Action, non-action. Corps, absence de corps. Mouvements, absence de mouvements. Aucune importance !

 

 

Un papillon passe devant moi. Je le salue. Je sais que nous habitons le même ciel.

 

 

L’oiseau se pose sur la branche frêle qui surplombe la rivière. L’eau s’écoule en contre bas. Mon cœur est chaviré par la beauté fragile du monde. Tout semble à la fois si précaire et immuable. Toujours les oiseaux parcourront le ciel en trouvant refuge dans les arbres. Et toujours l’eau s’écoulera. Allongé sur la rive, je regarde la rivière. Elle suit son cours sinueux. Immobile dans mes yeux tranquilles. L’étang dort sous la brume. L’eau s’écoule silencieuse. Matin d’éveil. Cascades et étangs, rivières et fleuves, flaques et océans, nuages, l’eau n’obéit qu’aux forces naturelles. Climats et paysages façonnent son parcours. Elle s’offre ainsi à tous sans exception. Devenant refuge pour les uns et promesse de croissance ou d’abondance pour les autres. Partout, elle est source de vie. Chacun lui trouve un usage ou une fonction. Il n’y a que les hommes pour l’instrumentaliser à outrance en essayant parfois avec une monstrueuse ingéniosité d’en maîtriser les aléas. Pour eux, l’eau — comme toutes choses — doit se soumettre à leur volonté de puissance qui n’est en réalité animée que par la peur. Les hommes gouvernent ainsi la terre parce que le ciel leur échappe. Ils peuvent bien y envoyer leurs avions, leurs fusées et leurs satellites, ils ne l’habiteront pas ainsi. Ils peuvent bien dépecer tous les dieux qu’ils ont érigés à la gloire du ciel depuis la naissance de l’humanité, ils ne parviendront jamais à en découvrir les lois de cette façon. Il n’y a rien à savoir du ciel et des montagnes. Des arbres et des plaines. Ni même des hommes. L’en-haut et de l’en-bas n’ont aucune importance. Pas davantage le ici que le là-bas. Le familier que l’inconnu. Le proche que le lointain. Tout, à la fois exact reflet de soi et si étranger à notre nature vide. La présence est si proche. Si proche. A la source même du regard qu’il est étrange de voir les Hommes s’égarer à la périphérie, dans une ramification toujours plus complexe et sophistiquée. Quelle maladresse ! Et quel manque de clairvoyance ! Au lieu d’aller toujours plus en avant, il leur faudrait au contraire remonter à la source. Mais on n’est saisi par ce mouvement (d’inversion) qu’après avoir perdu tout espoir à l’égard de tous les chemins que nous avons arpentés tant de fois — et de mille manières — et que nous avons toujours quittés, bredouilles, les mains toujours aussi vides et le cœur toujours aussi avide. Mais tout est parfait en ce monde. Toutes ces impasses et ces détours sont nécessaires au mûrissement de la compréhension. Et à son douloureux et incontournable passage : la grande désillusion devant l’impossibilité de trouver la moindre réponse, la moindre issue dans l’univers phénoménal où nous n’avons cessé depuis l’aube des temps de tourner, de nous enliser et de nous fourvoyer.   

 

 

L’heure s’émancipe des jours. Et de nos détours. Il n’y a d’heures creuses que dans l’arène. A la tribune des jours, personne. Les nuages passent. La lumière et l’espace sont les seuls habitants. A qui s’en plaindre ? Le regard est le cadre où défile le monde.

 

 

Assis sous un arbre, j’écoute la pluie tomber. Et les corneilles qui jouent dans le vent. Au loin, le bruit des voitures. Et au-dessus de la tête, le ciel nuageux. Les yeux et la terre sont paisibles. Le monde est parfois si étranger à mon cœur. Comme s’il n’existait que pour la tête. On ressent pourtant que l’univers entier est en soi. Et l’on éprouve pour tout ce qui est là un amour profond. Mais on ne se perd ni dans les pensées ni dans l’imaginaire. On vit simplement au plus proche  — dans l’intimité même — de ce qui est.

 

 

Une joie incommensurable enveloppe l’être quand il s’habite de la plus simple façon. En étant simplement là sans attente, sans désir ni prétention. Quand toutes nos volontés se sont éteintes...

 

 

Une bande de terre où poser ses pas. Pour arpenter les sentiers de pierres. Et parcourir les collines. S’asseoir sur un rocher. S’offrir au vent, au soleil et à la pluie. Au ciel infini. Et laisser la diversité de l’univers apparaître dans le regard et s’éteindre dans le silence. Observer l’incessant jeu tantôt espiègle tantôt funeste des mouvements. Voir les formes et les phénomènes naître, virevolter, s’essayer à quelques cabrioles paisibles ou ardues avant de mourir. Beauté de chaque instant.

 

 

L’heure s’écarte du jour. Les saisons resplendissent.

 

 

Un monde peuplé d’absence et de fantômes. Et certains ici-bas se targuent de gouverner leur barque, leur existence, leur pays ou les lois de l’univers ! Quelle idiotie ! Et quel manque de clarté !

 

 

Je regarde avec tristesse et effroi (teinté de colère) le bord de la rivière, jonché de détritus, des bouteilles en plastique par centaine, des myriades de sacs plastiques éventrés, d’innombrables débris de verre charriés par la dernière crue, arrêtés dans leur course vers l’océan par les joncs, les cannes et les souches d’arbres qui peuplent les iscles. Et je pleure en silence devant l’infâme dévastation des hommes, aveuglés par leur seul et restreint profit. 

 

 

La beauté des cerisiers en fleurs. Au-delà de l’image usée jusqu’à la corde. Quel spectacle ! Comme si les branches se couvraient d’une fragile et cotonneuse pellicule de neige au printemps.

 

 

Les oiseaux de pierre ne s’envoleront jamais. Ils s’entasseront dans les cimetières en attendant vainement l’heure glorieuse tant espérée. Monde d’espoirs et de peines qui relègue le ciel au lointain. Pataugeant sur les terres marécageuses, les hommes s’épuisent. Peu savent où leurs pas les dirigent. Avant le tombeau, ils ne s’interrogent. Blâmant le chemin et profitant maigrement des paysages, les yeux rivés sur leur misérable sente. La colline et l’Eden terrestre sont pourtant proches de leurs yeux perdus. Ils cherchent en tous sens. Parcourent la terre, les sous-sols, le fond des mers et le ciel en vain. Ne trouvent que désarroi et misères en se pâmant devant leurs misérables trouvailles (et leurs exploits dérisoires)… les lois du jour n’égaieront pas leurs yeux tristes. Ne protègeront pas leur corps usé. N’allègeront pas leur psychisme saturé. Elles offriront davantage de puissance aux seigneurs, à ces petits maîtres qui imposeront avec encore plus de force et de contraintes leur joug à la masse laborieuse.

 

 

Un chemin parsemé d’étoiles et de feuilles mortes. Un ciel nu. Toujours. Et la lumière incessante qui guide les marcheurs jusqu’à elle. Les paysages et les pas. Tous les éléments du décor nous rappellent à sa présence. Et nous invitent à la retrouver. Aussi vive aujourd’hui qu’autrefois. Eternelle lumière sans commencement ni fin que nous pouvons habiter sans tache quand se sont éteintes toutes les lueurs de l’horizon.

 

 

Le mystère n’abrite aucune légende. On s’y repose enfin quand tous les mythes et les contes (toutes nos histoires) ont été anéanti(e)s.

 

 

Apre exercice parfois que celui de se familiariser avec le rien en laissant se dissoudre sans impatience l’opacité sensorielle qui en entrave la saveur (opacité sensorielle renforcée par l’ingestion occasionnelle de viande qui semble accroître l’agitation et la consommation habituelle de glucide qui semble provoquer une stagnation énergétique sans compter évidemment la consommation tabagique).

 

 

J’entends déjà l’eau ruisseler sur ma tombe. Et le rire des corbeaux dans le ciel. A la vue de ma dépouille, les yeux se détourneront. Et je girai seul parmi les ronces. Et bientôt sur mon sépulcre fleuriront les orties, les fleurs des prés et les herbes folles des chemins dont se repaîtront les bêtes affamées. Et je rirai seul de me voir si misérable. Et démuni parmi mes pairs à la tête ahurie et aux yeux effarés, frappés de stupeur de voir tant de joie et de gaieté dans cet enfer.

 

 

A la saison des amours, les formes mues par l’instinct d’unité se rapprochent et s’enlacent. Sous mes yeux, l’éternelle chorégraphie du vivant. La danse joyeuse et funeste des corps. Leurs pirouettes et leurs cabrioles cycliques qui célèbrent la Vie avant que ne s’achève leur brève existence.

 

 

N’être rien qu’une ombre qui danse dans le vent. Et voir l’ombre des branches danser avec elle. Sur le sol, nos traces éphémères s’enlacent. En se moquant bien des mariages convenus. Nous savons que ces jeux ne sont que des images fugaces. Des traits sans consistance. Et nous nous offrons avec amusement à cette farce passagère.

 

 

Sur l’étang, le reflet des saisons resplendit. Et entre les rides, créées par le vent, nos jours fastes sont engloutis. Le monde est un adieu perpétuel.

 

 

Sur les jonquilles, l’or est plus franc que sur les lèvres.

 

 

J’aime m’attabler avec moi-même. M’allonger sur ma couche avec moi-même. M’entretenir des hauts et des bas avec moi-même. Et lorsque je me suis déserté, les oiseaux, les arbres et les étoiles me répondent. Et m’enseignent. Puis je regagne le ciel. En paix. Je peux alors être là pour le monde. Les oiseaux, les arbres, les étoiles et le ciel le savent bien. Et même parmi les hommes, certains doivent le ressentir.

 

 

Condamné à vivre jusqu’à l’être plein.

 

 

Le difficile exercice des jours pour les âmes creuses qui s’impatientent de se remplir…

 

 

La pesanteur de nos pas décharnés. La lourdeur de nos paupières closes. Et de nos prunelles hagardes. Obstruant l’espace où le chemin pourrait se faufiler.

 

 

Il y a une grâce à toucher le ciel. Mais la plus magistrale est de l’habiter à chaque instant. En silence.

 

 

[Carnet d’exploration de l’être]

L’éternelle soumission au vent. L’incessant processus de dépouillement. Jusqu’à la plus grande nudité. Rien. De plus en plus, rien. Aussi vide qu’une outre sèche. Un vague contenant organique poreux et vibrant à ce qui l’environne. Soumis seulement à sa forme conditionnée et à ses caractéristiques naturelles. On sent avec force et lucidité que tout encombrement, toute tentative d’amassement ou toute prétention entraverait et obstruerait aussitôt l’étroit passage ouvert par la brusque éradication ou la lente déliquescence de nos chimères. Empêchant dès lors de ressentir la puissance, les merveilles et la simplicité de l’être nu, dépouillé de toute image. De toute illusion. A leurs égards, la vérité est toujours d’une intransigeance tranchante. Elle les coupe sans pitié pour faire place nette et ouvrir (ou maintenir ouvert) le passage nécessaire à l’être qui ne peut souffrir, pour être ressenti, le moindre obstacle. Tout acte, toute parole, tout geste visant à redonner consistance à une image quelle qu’elle soit — en particulier lorsqu’elle concerne le personnage auquel nous avons l’habitude de nous identifier — est ressenti comme un éloignement (de l’être). Et lorsqu’il arrive qu’une telle attitude se manifeste, on la laisse se déployer mais on n’en est pas dupe. On ne l’alimente pas. Ce mouvement perd donc automatiquement sa force et l’on sait qu’il s’éteindra naturellement à son propre rythme. De façon générale, on laisse simplement se manifester ce qui vient naturellement et spontanément… 

 

 

L’heure est toujours tragique pour le mental. Ressassant l’heure passée, soucieux de l’heure qui passe et inquiet de l’heure à venir. Comme l’araignée, le mental tisse sa toile. A la seule différence qu’il en est le seul prisonnier…

 

 

Happé par la force des jours dans le grand tourbillon labyrinthique ou absorbé dans les distractions anesthésiantes, l’Homme effleure la surface du monde. Et ne peut quitter la périphérie de l’être. Comme condamné à l’errance et à la superficialité. Trop immature encore pour explorer la profondeur, la consistance et la sensibilité. Pas assez poreux encore pour se laisser traverser par ce qu’il ne cesse, à chaque instant, de rencontrer. Trop encombré encore par les idées, les images et ce qu’il croit être…

 

 

Le scintillement des eaux claires et la lumière artificielle des lampadaires. Et les millions d’hommes et d’insectes comme envoûtés, fascinés par le spectacle — la farce miroitante. Prisonniers des apparences toujours trompeuses. S’ils savaient (et s’ils le pouvaient), ils riraient de tant d’aveuglement et de maladresse. Et fouilleraient aussitôt avec une farouche détermination en d’autres lieux. Mais qui connaît cet espace lumineux enfoui en nos profondeurs qui ne se dévoile qu’à ceux qui se sont délestés de tous les mirages ?

 

1 décembre 2017

Carnet n°47 Simplement

Journal poétique / 2014 / L'exploration de l'être

Je marche à petits pas sur le sentier des collines. Les nuages et le vent accompagnent ma course lente. Qui m’attendra ce soir ? Je saluerai le soleil de ma couche — et les branches du cerisier en fleurs — suspendus à la fenêtre.

 

 

Le gage éternel de la joie : la souffrance et son aiguillon douloureux.

 

 

Les maux glissent à mes pieds meurtris. Sur le chemin des peines, nulle consolation. Les cieux racoleurs sont notre dévastation. L’essentiel se défait toujours de l’accessoire.

 

 

Laisse-toi mener. Sois simplement là.

 

 

Simplifie le regard.

 

 

Ecoute les mouvements. Et laisse agir. Ne change rien. Laisse-toi conduire. N’alimente pas les pensées. Sois. Fais face à ce qui est là.

 

 

Où vas-tu, toi qui marches ? L’ailleurs serait-il plus propice qu’ici ? Plus tard serait-il mieux que maintenant ? Que cherches-tu à fuir ? Qu’espères-tu donc qui ne soit déjà ? Rien ne manque.

 

 

L’espoir t’éloigne de ce qui est.

 

 

La source de la plénitude est en toi.

 

 

Sois honnête envers le chemin. Il n’y a aucune erreur. Les pas te placent toujours à l’endroit exact.

 

 

Tes idées sur la vie sont un poids inutile. Tu es vivant. Sois simplement disponible à ce qui se présente.

 

 

Tes idées t’enchaînent à une image de la réalité. Regarde la vie sans mémoire. Et tu libèreras le regard de ses encombrements.

 

 

 Assieds-toi et regarde. Observe ce qui vient, ce qui va. Où es-tu, toi, qui ne bouges pas ?

 

 

Les paysages sont le reflet de ta beauté.

 

 

Ce qui est t’invite à la source du regard.

 

 

Le regard est ce que tu es. Le centre où tu demeures. Tout se passe en toi.

 

 

Oublie ce que tu connais. Regarde avec innocence.

 

 

N’écarte rien. Tu es tout ce qui est là.

 

 

Tu n’es pas ce qui se meurt. Tu es ce qu’il reste lorsque tout a disparu.

 

 

Si le monde t’envoûte encore, entre dans la danse et tournoie. Jusqu’à la disparition du centre.

 

 

Le silence est le seul poème.

 

 

Il n’y a rien à désirer, tout est là.

 

 

Si tu désires encore… Que se cache derrière ton désir ?

 

 

Etre ne s’apprend pas. Tu es déjà.

 

 

Autorise-toi à vivre ce qui est là. Sois simplement vivant.

 

 

Va vers ce qui te porte. Ne résiste pas. Sois comme l’eau. Suis ta pente naturelle.

 

 

Assieds-toi en silence. Et écoute.

 

 

Au cœur du monde, le silence. Au cœur du silence, la paix. Et dans la paix du cœur, la joie éclaire le monde.

 

 

Seul un cœur libre et ouvert — sans idéologie ni attente — peut offrir au monde l’amour et l’intelligence dont il a besoin.

 

 

La seule nécessité est celle qui est là.

 

 

L’heure invite à la présence. Le monde au regard. Et sa fureur au silence. Et du silence habité peuvent naître la joie et la paix.

 

 

Tout invite à l’abandon.

 

 

Le ciel n’attend rien de nous. Il nous aime sans exigence.

 

 

Tu n’es ni ceci. Ni cela. Tu es.

 

 

Le trésor est dans le regard. Toujours. Jamais sous le pas. Ni dans la main.

 

 

Tout ce qui surgit est juste.

 

 

Tes peurs ont le visage de la bonté.

 

 

Laisse l’ennui refléter ton vrai visage.

 

 

Le rien apprivoisé invite au vide. Et le vide à te découvrir.

 

 

Les malheurs sont les évènements dont tu as besoin pour comprendre.

 

 

On pense. Donc on n’est pas. La présence s’habite sans penser.

 

 

L’auteur de tes actes n’est pas celui que tu crois. Ils sont l’œuvre d’une force qui t’actionne.

 

 

Quand les désirs s’éteignent, l’être survient.

 

 

Laisse tout s’éteindre pour rayonner.

 

 

L’aube réparatrice de la longue nuit.

 

 

Ne t’oppose pas à ce qui surgit. Laisse faire et agir.

 

 

Demeure en toi-même. Tiens-toi à la source du regard. Laisse tout suivre sa pente naturelle. Et se dérouler à son propre rythme.

 

 

Il n’y a rien à rejeter. Rien à blâmer. Tout ce qui arrive est juste.

 

 

Laisse les circonstances faire naître et mourir les mouvements. Et agis aussi spontanément que possible.

 

 

Seules les circonstances ordonnent.

 

 

Le désir rétrécit le monde.

 

 

Le ciel s’enivre de notre joie.

 

 

La poésie se lit avec les yeux de l’amour et de l’innocence.

 

 

Le soir, à l’orée des tables, on boit sur des nappes vieillies par l’alcool. On s’affaire là pour remplir l’ennui, oublier les lendemains sans bouteille où l’on vomira son dégoût des jours vides.

 

 

Les pleutres ne voient pas le ciel. Ils y couchent leurs rêves lointains.

 

 

La poésie est une caresse éphémère. Un long baiser sur les lèvres de l’absente.

 

 

On s’écharpe dans les rues. Et l’on se rue dans les bois. Et sous le vent des armistices, on attend la débâcle.

 

 

Les poèmes se couchent sur les âmes pour les reposer de la furie des jours qui sucent le sang de leur grands corps fatigués.

 

 

La boulimie des heures nous laisse sans repos jusqu’au grand soir où les anges nous invitent à retrouver le ciel.

 

 

Il n’y a pas d’étincelle dans la nuit qui nous fait face. Il y a des lucioles au loin qui éclairent nos pas vers demain.

 

 

Chaque heure est un carrefour sans chemin. A la croisée se tient celui qui est debout. Ivre d’espoir et d’horizon, les pieds collés à la sente, attendant les craquelures du ciel.

 

 

Maintenant n’est pas venu. Il se cache derrière nos espoirs et nos regrets.

 

 

L’horloge nous cloue au supplice.

 

 

On s’interroge sur hier et sur demain. Sur les jours où les pierres étaient ou seront dans nos poches. Et maintenant qu’allons-nous en faire ?

 

 

La lumière éblouit les yeux. Engonce le cœur dans sa gangue. Et le printemps s’échappe.

 

 

L’horizon et l’ailleurs sont des menteurs. Ils nous cachent le maintenant qui est là.

 

 

Les colombes cadenassées par nos terreurs agonisent aux pieds du ciel. Et nous nous croyons libres ?

 

 

Esclaves les fers aux pieds reculant l’envol au lointain. Esclaves les faire en tête reculant le jour au lendemain.

 

 

L’heure est mensongère. Elle ne contient que des instants. L’instant est mensonger. Il ne contient que maintenant.

 

 

Le vent s’engouffre par la fenêtre du hasard. Du moins le croit-on ? Seule la nécessité tient lieu de socle. Le jeu n’est pas celui du hasard. Mais du merveilleux et de la joie qui invitent à la célébration de l’Existant. Reflet de l’Unité commune.

 

 

L’aube sans fondement survient souvent après une longue nuit d’aveuglement.

 

 

Sans attente ni idéologie, le cœur est libre et ouvert. Tu peux alors marcher vers le monde sans crainte des blessures.

 

 

Un arbre sous le préau où tu attendais l’impossible. 

 

 

L’escale où tu pars pour d’autres voyages. Pour accéder à l’autre rive.

 

 

Au bas de l’échelle, tu patientes. Le ciel bas étouffant la matière. Les désirs suffocants sous la chair. La liberté habite l’ailleurs.

 

 

La liberté patiente sous les désirs. Et le vent scie déjà les barreaux.

 

 

La brume sur la montagne. Et mes rêves se dissipent.

 

 

La serpillère dans le seau. Le bol dans l’évier. Et la main qui dessine le jour. Je suis en paix.

 

 

Le silence de la maison. Les bruits du monde à la porte. Et le recueillement de mes mains sages.

 

 

L’instant délicat se faufile entre deux pensées. Derrière l’instant, la présence toujours souveraine.

 

 

L’aube s’attache sans raison à la nuit. Le jour passe comme un rêve. Je vis à côté de moi-même.

 

 

Les saisons passent sans bruit. Je me tiens à côté du vent. Sous l’étoile qui m’observe.

 

 

Le vent dans les arbres couvre les bruits du monde que je n’entends plus. Seule la pluie arrose les pensées.

 

 

Couché dans l’herbe, je regarde les arbres chanter l’univers. Personne à mes côtés.

 

 

Je suis seul avec l’infini qui se penche vers moi. Et me dit : il n’y a personne ici-bas.

 

 

Le monde agite ses bras fatigués. Et le vent pousse les rengaines dans le caniveau. Seules les étoiles chantent.

 

 

Quand le froid se fait trop vif, ma capuche de laine me protège des griffes de l’hiver. Et mon âme se réchauffe près du ciel.

 

 

L’homme se courbe parmi ses congénères. Seul l’arbre est digne et solitaire.

 

 

Les arbres sont des amis silencieux. Leur présence est réconfortante.

 

 

Je peux vivre sans les hommes. Mais je ne pourrais vivre sans les arbres et les chiens qui m’offrent l’amour et la chaleur dont j’ai besoin.

 

 

Il pleut sur le monde des rengaines et des blessures qui invitent au retrait. Seul dans ma cabane, je suis en paix. Au dehors, le vent charrie les plaintes. Et le cri des hommes titubant sur l’asphalte. Je suis à l’abri sur le chemin de terre.

 

 

Neuf mois de gestation pour naître au monde. Quarante années pour naître à soi-même sous le ciel indifférent aux jaillissements sur les contrées inégales.

 

 

L’âme s’épuise à chercher ici-bas alors que le ciel est l’unique boussole. Au-dessus de nos têtes, l’espace immuable.

 

 

La grandeur du trait s’efface dans le silence. La parole jaillit, le nuage passe. Près de l’arbre je me tiens.

 

 

La lune saisit la main que le sage tendait vers elle. Et l’obscurité se dissipe sur les visages.

 

 

Dans la porte entrouverte, des paysages inconnus. Le ciel s’engouffre toujours dans le regard de celui qui sait voir.

 

 

Par la fenêtre l’arbre se penche. Il salue le vol des hirondelles. Le printemps demeure l’éternelle saison.

 

 

La tête engoncée dans leurs chaussures, les hommes cherchent leur route. Heureux les va-nu-pieds. Leurs sandales de vent suivent le ciel.

 

 

Le monde est vide. La sève monte. Les mains s’agitent. Mais le repos est aussi dans les gestes et les ramures.

 

 

Assis devant la rivière, je regarde le cours des choses. La berge tranquille où je me tiens. Le ciel où je me repose. Le vol des oiseaux parmi les nuages. Et le frétillement des poissons dans la nasse.

 

 

Dans la forêt, je me perds. Au pied de l’arbre je demeure. Parmi les feuilles et la terre, je suis en paix.

 

 

L’heure est féconde dans le silence.

 

 

Natif des sommets, je ne peux vivre dans la plaine. Je sais que les pigeons n’éliront jamais l’aigle comme roi.

 

 

La brume sur la montagne se dissipe au soleil. Comme nos rêves disparaissent à la lumière.

 

 

L’esquisse d’un pas est une danse dans le silence.

 

 

Toi qui contemples le ciel, dis-moi : que dure le vol d’un oiseau ?

 

 

Peux-tu saisir le nuage qui passe ? Qu’attraperait ta main avide ? Et si tu laissais mourir ton indigence…

 

 

Que peuvent les hommes ? Savent-ils effacer le vol de l’hirondelle ?

 

 

Les saisons s’écoulent sans bruit devant la terrasse. Je me tiens immobile à ma place.

 

 

Les choses suivent leur course funeste devant le ciel imperturbable. Et moi qui habite l’azur et la terre, je me défais en silence.

 

 

Un trait dessine le monde. Un autre l’efface. Un battement de cils séduit les hommes. Un revers de main les anéantit. Je suis le cours des choses. Et la demeure immobile. Le ciel impassible qui voit mourir chaque trait les uns après les autres.

 

 

Les nuages sont sans parole. Mais ils enseignent davantage que les livres.

 

 

Ô Ciel ! Dis-moi où se cache la vérité. Où as-tu mis mon regard ?

 

 

Est-ce que l’herbe s’offusque qu’on la piétine ? Elle se courbe un instant puis se redresse vers le ciel.

 

 

Mousses et lichens. Assis sur un rocher. Là où demeure la paix. Je suis.

 

 

Je médite sur la montagne. Mais où est perché mon regard ?

 

 

L’épuisante mission de Dieu auprès de ses créatures.

 

 

Retiré des affaires du monde. Et présent à l’univers.

 

 

Au soleil éternel et au ciel immuable, les nuages disent qu’ils passent. Repasseront demain peut-être… Un jour sans doute…

 

 

Assis à ta place, tu contemples le monde. Hommes et bêtes qui vaquent à leurs affaires. Et le ciel au-dessus de leurs têtes.

 

 

Qui voit le labeur des astres sur notre destin ? Qui voit la rosée du matin ? Et la brume sur la montagne ? Qui voit le vol des oiseaux dans le ciel ? L’eau des rivières qui s’écoule éternelle ? Et les nuages dans l’espace sans âge qui offre un escalier à ceux qui restent humbles et émerveillés ?

 

 

La fleur se soucie-t-elle de son logis ? L’étoile s’inquiète-elle d’éclairer le voyageur ? Le silence est leur demeure. Et la paix leur seul labeur. Au sein du ciel demeure l’immensité.

 

 

L’insoutenable secousse du monde qui donne naissance au solitaire…

 

 

Seul parmi les étoiles je m’endors. Seul parmi les herbes je me repose. Seul sous la pluie je danse. Seul dans le vent je suis. Et le monde s’agite dans ma paix.

 

 

Le monde ne peut échapper au glaive et au complot. Installe-toi dans l’innocence et le retrait. Alors les archers, les flèches et les donjons révèleront leurs pétales derrière l’indéfectible parfum de larmes et de sang.

 

 

Toi qui t’enorgueillis, qu’as-tu réalisé d’inoubliable ?

 

 

Quel est ton rôle toi qui vis à l’écart du monde ? L’arbre et la fleur se soucient-ils de leur fonction ? Ils sont. Et cela (leur) est suffisant.

 

 

Quel est ton rôle toi qui regardes la pluie tomber ? Comme l’herbe, je recueille la rosée. Je bois l’eau du ciel. Droit dans mes bottes crottées.

 

 

Je marche à petits pas sur le sentier des collines. Les nuages et le vent accompagnent ma course lente. Qui m’attendra ce soir ? Je saluerai le soleil de ma couche — et les branches du cerisier en fleurs — suspendus à la fenêtre.

 

 

Le ciel et la terre se rencontrent au loin. Et sous les pas de celui qui marche. Un jour vient le temps où l’on pose son bâton pour s’assoir sur la mousse verte de la forêt, près du cabanon que l’on a bâti à la hâte dans une clairière isolée où seuls le vent, les oiseaux et les herbes sont invités.

 

 

Où ai-je posé le bâton qui guidait mes pas ? Je l’ai oublié sur les chemins qui m’égaraient. Je me suis assis dans l’herbe pour enlever mes bottes fatiguées et m’étendre parmi les nuages passagers.

 

 

J’ai marché longtemps sur les chemins. J’ai perdu la boussole qui m’égarait. A présent, je marche où le vent me pousse. Les saisons sont les mêmes partout.

 

 

Le monde a refusé les ailes que je lui tendais. Elles n’étaient que de cire et de papier. A présent je me tiens assis parmi les étoiles. Et le silence a tout enveloppé.

 

 

La vaisselle s’égoutte dans l’évier. Les feuilles des arbres dansent dans le vent. Assis sur la terrasse, j’écoute le soir tomber.

 

 

Les livres, la nature, le monde, l’expérience d’être vivant… tout enseigne à être.

 

 

Le piaillement des oiseaux et la serpillère qui sèche au vent participent aux mêmes chants du monde. Au même mouvement de l’univers qui naît et s’éteint dans le silence que mon cœur abrite avec humilité.

 

 

L’oiseau qui sous la pluie cherche un abri ne sait où aller. Je lui prêterais volontiers mon cœur s’il pouvait s’y réfugier.

 

 

Face aux grands arbres de la forêt, je me souviens sans nostalgie de mon errance sur les chemins. Et du lent mouvement vers la lumière. A présent je me tiens assis.

 

 

Une pierre, du sable. Une montagne, un chemin. Mais où vais-je donc de ce pas impatient ?

 

 

Un oiseau sur une branche construit son nid. Et moi, de mon abri, je contemple le monde.

 

 

La lune dans le ciel me regarde. Et je n’ai aucun mot à lui offrir.

 

 

Les feuilles dansent dans le vent. Et je les accompagne en silence.

 

 

Où as-tu posé tes jambes, toi qui marches avec la tête ? Où as-tu posé ta tête, toi qui marches avec les jambes ? Où as-tu posé ton cœur, toi qui marches avec la tête ? Où as-tu posé ta tête, toi qui marches avec le cœur ? Il n’y a qu’un ciel d’amour immuable. Le cœur est partout où se tiennent les jambes. Et la tête n’existe pas…

 

 

Le monde se déploie dans mes ailes immobiles. Et je laisse l’envol se défaire dans ma tranquillité.

 

 

Où que j’aille, je n’irais jamais aussi loin que l’herbe qui pousse sur le bord du chemin.

 

 

Le vent agite les feuilles des arbres. Les pensées et les émotions agitent le corps et l’esprit. Comme le ciel imperturbable, j’accueille et laisse les mouvements naître et s’éteindre dans le silence.

 

 

La pluie frappe à la fenêtre. Le soleil caresse la vitre. Assis sur le tapis, je me tiens immobile

 

 

Le corps immobile sous les nuages. Le vent a tout balayé : les espoirs, les croyances, les idées. Mes rêves comme la pluie sont tombés. Le sol à présent est dur et froid. Et mes pas s’enracinent dans la terre. Ce qui est là se dissipe. Le silence devient éternel.

 

 

Je balaye devant ma cour. Rien. Le vide a tout emporté. Et le vent à présent soulève la poussière.

 

 

Il faut partout se taire pour qu’advienne le silence. Mais nulle parole ne peut l’entacher.

 

 

Les désirs se sont éteints. Le monde s’est dissipé. Je me tiens tranquille dans la lumière du jour. Et lorsque le soir tombera, je me coucherai dans le silence et la joie.

 

 

Il n’y a rien à dire. Rien à faire, ni à penser. Quand les désirs de l’âme ont cessé, la tranquillité s’habite.

 

 

Les grands yeux du monde se sont clos. A présent je marche sur la terre déserte. A découvert parmi les ronces et les herbes. En ma demeure, je repose.

 

 

Simple. Toujours plus simple devient la vie. Un thé. Un bol de soupe. Le linge qui sèche au vent. Quelques pas sur la colline. Et le printemps sur la montagne. Les arbres de la forêt. L’herbe des chemins. Un rocher pour regarder le ciel. Ma vie s’efface dans l’infini.

 

 

Le temps s’est étendu à mes côtés. L’heure s’est allongée au creux de ma main. Nous reposons en silence à l’écart des affaires du village.

 

 

Je vis ce que le destin place devant moi. Un jour, il offre. Le lendemain, il retire. Je le laisse choisir les paysages. La direction et les pas sont toujours justes.

 

 

Pour l’âme éprise d’Absolu, la nature est plus propice et accueillante que la société des hommes.

 

                                                                                

Le ciel reflète notre vrai visage avec plus de justesse que tous les yeux du monde. L’infini peut alors se déployer dans le regard.

 

 

Qu’y a-t-il à faire sinon contempler le vide et ce qui le traverse ?    

 

 

Je m’étends contre la roche dure et froide. L’abeille butine à mes pieds. Le ciel est descendu dans mon regard. La joue posée sur l’herbe. Le cœur battant sur la terre. Le monde devient familier. On accueille l’insignifiance. Et la préciosité de toutes choses. L’Hôte qui ne pouvait souffrir de voir sa place usurpée ouvre enfin ses portes.

 

 

Qui se soucie du mystère ? Les hommes préfèrent résoudre leurs énigmes.

 

 

Vouloir se soustraire à la main de Dieu en agitant vainement les bras. Voilà qui est ignoré celui qui tire les fils !

 

 

Que mes pas touchent le sol ou que je côtoie les nuages, je ne refuse pas les paysages. Je ne réfute pas la direction. J’observe sans intention — ni résistance — le passager et la traversée.

 

 

Quand on n’espère rien, on laisse le cours des choses se réaliser. On laisse devenir mais on ne devient rien.

 

 

Quand on ne sait rien, ne croit rien, ne prétend rien, n’aspire à rien, n’espère rien alors on sent avec force et certitude les ailes de la vérité battre en nous. On est suffisamment nu pour s’ouvrir à la compréhension. Et ce qui surgit ou ne surgit pas est juste. Actes et paroles. Silence et inaction.

 

 

Que le corps se repose de son labeur coutumier. Que les yeux usés par les paysages se ferment. Que l’esprit se vide de tous les encombrements pour s’ouvrir au regard sans âge.

 

 

La grâce est toujours à portée de regard pour l’œil vide.

 

 

N’efface rien. Laisse tout se défaire.

 

 

Oublie tout. Et tu sauras. La vérité se révèlera dans ton absence de savoirs, de croyances, d’intention, de prétention et d’espoir. La vérité ne peut s’habiter que nu, en laissant advenir le jaillissement spontané et l’extinction naturelle de toutes choses.

 

 

L’oiseau et la fourmi laissent-t-ils une trace dans le ciel et sur la terre ? Pourquoi laisse-rais-je une empreinte de mon passage ?

 

 

Le poète nu retient son souffle devant la beauté du ciel. Mais peut-il se déshabiller davantage ?

 

 

L’herbe des chemins et l’eau des rivières sont les seuls biens du vagabond. Le ciel est sa seule richesse. Quoi d’autre pourrait le combler ?

 

 

On ne désire rien que ce qui est devant nous. Avons-nous besoin d’autres choses ?

 

 

Je salue l’écureuil qui, chaque matin, me rend visite. Ai-je déjà eu plus fidèle ami ? Il ne se soucie pas davantage de moi que du ciel au-dessus de nos têtes. Et je lui sais gré d’ignorer notre présence.

 

 

Un bâton dans la brume. Je marche sur la montagne. En bas le village disparaît.

 

 

Assis sur la montagne, je guette l’arrivée du soleil. Mais le ciel se soucie-t-il de la nuit et des nuages ?

 

 

Que chante la pluie pour accompagner ma tristesse ? Ah ! Que souffle le vent d’automne !

 

 

Où loges-tu, toi qui habites le ciel ? Je laisse au corps le soin de trouver un abri.

 

 

Où se loge la tête ? Ailleurs. Où se loge le corps ? Ici. Où se loge le cœur ? Partout.

 

 

Qui le monde verra mourir ? Personne. Toutes les formes s’éteignent dans le regard.

 

 

Les chaises sont vides. Les visages s’en sont allés. Le vent a tout emporté. Le monde a disparu. La vie passe comme un rêve. Suis-je toujours vivant ?

 

 

Où suis-je, moi qui ne peux disparaître ? Où vais-je, moi qui suis toujours là ? Les pas s’agitent, les corps se meurent. Et je demeure en paix.

 

 

La pluie tombe du toit. La réalité se jette partout. Dans mon regard, le soleil et les yeux hagards. Le visage offert et les mains ouvertes.

 

 

Quels sont ce rôle et cette grimace que je dois revêtir pour tenir une place dans le monde ? Pourquoi le néant a-t-il besoin de costumes et de comédie ?

 

 

On se dirige à petits pas vers le néant. Sachons habiter le vide avant qu’il nous accueille.

 

 

Le monde pèse beaucoup plus lourd que le ciel dans nos soucis. Qui sait que nous avons le cœur si léger ?

 

 

Tu erres mais tu ne peux te perdre. Le ciel toujours au-dessus de ta tête qu’en un regard, tu peux habiter.

 

 

Que dire de l’étoile que nous suivons ? Qu’elle nous mène vers la nuit profonde où l’on s’éveille à la lumière.

 

 

Je marche sans me soucier de la direction. Je laisse mes pas choisirent les paysages. Et je les regarde au loin suivre leur pente.

 

 

Il n’y a d’horizons heureux. Voilà ce que nous apprend la marche ! Au bout de la route, on est mûr pour ouvrir enfin son regard au ciel. Et de constater avec effroi et étonnement qu’il a toujours été là… avant même nos premiers pas.

 

 

L’herbe qui m’accueille est plus secourable que les bras de mes frères. Elle n’attend rien de moi. Et je lui sais gré de me recevoir sans rien demander. Je ne perçois en elle pas l’ombre d’un désir. Et lorsque je la quitte, mon cœur s’emplit de gratitude et d’une main délicate, je la redresse.

 

 

Mon bâton, ma besace et ma barbe errent chaque jour sur les chemins. En quête d’un visage réconfortant. Mais seul le vent sèche mes larmes. Et seul le ciel m’ouvre ses portes. Je suis l’invité de l’Hôte unique. Et c’est nu que je me présente à lui. La nature est notre abri et l’azur notre demeure. Toutes nos errances nous l’enseignent.

 

 

Le ciel est notre nature. Infini et immuable.

 

 

Impassible, je regarde les nuages traverser le ciel. Les hommes et les bêtes vaquer à leurs affaires sur la terre. Les choses lentement se déliter. La vie s’écoule tantôt tranquille. Tantôt agitée. Et le regard est en paix.

 

 

La Parole comme de l’or tombé du ciel lorsqu’elle prend naissance à la source. Autrement, des bavardages futiles qui occupent l’espace.

 

 

Le silence se défait de toutes matières.

 

1 décembre 2017

Carnet n°46 L'être et le rien

Journal / 2013 / L'exploration de l'être

Le monde est notre aire de jeu. Tantôt jardin. Tantôt décharge à ordures. Tantôt champ de bataille. Tantôt socle d’édification vers le ciel. Mais l’essentiel est ailleurs. A l’intérieur. Dans la maison de l’être. A la fois caverne et flamme vive. Sphère transparente qui accueille le monde. Et lumière qui l’éclaire. Là où le temps s’étire jusqu’à la rupture, l’abysse de l’Absolu. En surplomb du temps. Et des heures.

 

 

L’espace n’est jamais singulier. Nul ne peut s’approprier l’être. Il suffit de l’habiter. Pour (y) être.

 

 

Il ne s’agit nullement de rendre libre le personnage. Mais d’être libre du personnage. Inutile en effet de se défaire de nos conditionnements pour en revêtir d’autres. Il s’agit d’être au-delà de tous conditionnements.

 

 

Au bord de la source, on peut s’abreuver déjà. Apaiser cette soif autrefois si inextinguible.

 

 

La grande tristesse, prémices à la joie éternelle. Comment, en effet, ne pas être triste à l’idée d’être seul à jamais. Que l’Autre nous sera à jamais inaccessible… Que toute rencontre n’est qu’avec soi-même. Qu’il n’y a en réalité qu’Un sans second ?

 

 

Le mensonge est un refuge saugrenu. Impropre, bien entendu, à nous sauver du mal qui nous habite et nous ronge. Il révèle notre manque d’honnêteté et de lucidité. S’y adonner nous enfonce plus encore dans l’illusion de ce que nous croyons être. Et nous éloigne de ce que nous sommes. Il semble pourtant l’une des fonctions principales du mental, menteur patenté et diabolique usurpateur qui se refuse à reconnaître l’inexistence de l’ego et craint par-dessus tout de se voir démasquer…

 

 

En définitive, on ne peut se fier à rien. Ni à personne. Aucun état, aucun être, aucune situation, aucune ressource, aucune capacité. Aucun espoir. Rien n’est en mesure de nous aider. Il n’y a aucune garantie. Et de ce sentiment d’extrême vulnérabilité où nous plonge cette absence totale peut alors naître la puissance de l’être. Et le sentiment d’invulnérabilité, d’innocence et de plénitude qu’il procure indépendamment de tout contenu phénoménal.

 

 

Eternité, hors du temps. Etreté, hors du monde.

 

 

L’essentiel ne peut être exprimé. Il se réalise. Et se vit. On ne peut qu’encourager ceux qui le cherchent à poursuivre leurs investigations. Et donner quelques indications à ceux qui se sentent authentiquement et profondément habités par cette quête.

 

 

Tout (tous les phénomènes) doit être vu du point de vue de la compréhension. Et de sa maturation. Et admettre son mystère. Le laisser agir. Et s’y abandonner. Ainsi tous évènements, états, situations sont parfaits tels qu’ils sont. Toutes interventions visant à en modifier le cours tient (et provient) de l’idéologie (fabriquée par le mental qui hiérarchise les états selon ses préférences). Et cette ou ces interventions sont elles aussi parfaites telles qu’elles sont. Inutile donc d’en ajouter de supplémentaire. Ni de les blâmer. Tout est toujours parfait tel qu’il se présente.

 

 

Dieu (la vérité) se manifeste dans son absence ressentie. Comme dans sa présence habitée.

 

 

L’essentiel se goûte. Tout le reste appartient au cirque que l’être n’approuve ni ne désapprouve. Qui est là simplement. Simplement là à observer ce qui se passe sans jamais intervenir ou y être d’une quelconque façon engagé. Le cirque n’est ni bon ni mauvais, ni bien ni mal. Il est là, lui aussi, simplement. Et il se déroule sous ce regard qui observe et constate sans aucun commentaire, jugement ou parti pris.

 

 

Cette chose qu’on appelle l’être à défaut de pouvoir le nommer autrement (tant il est indescriptible et impossible à étiqueter, bref inobjectivable) semble tout à fait permanent, immobile et silencieux. Chacun peut le pressentir. Et la « sagesse commune » en a l’intuition quand elle se représente le « sage » assis dans une immobilité silencieuse parfaite. Mais il est totalement idiot de vouloir que les formes (et donc les personnes et les personnalités) adoptent dans une démarche stupide et simiesque cette permanence silencieuse et immobile (si elle n’est pas encore habitée). Les formes, elles, sont mues par le mouvement (l’énergie). Le mouvement incessant. L’être, lui, observe cela. Ces formes en permanents mouvements. Sans jamais les contraindre. Mais au contraire en les laissant libres. Il en est le témoin totalement impartial. Seul le mental voudrait parvenir à cette êtreté en essayant vainement de singer au mieux le pressentiment qu’il en a ou trop souvent l’idée ou l’image qu’il s’en fait. Et ce pressentiment ou l’intuition de ce qu’il est provient sans doute d’un souvenir. D’une nostalgie. Ce que les chrétiens peut-être appellent le paradis originel. Comme si l’être était notre source et que nous l’avions oublié. Avant de l’habiter de nouveau, il nous en reste qu’un très lointain et énigmatique souvenir qui ne cesserait de nous pousser à le retrouver. D’où les mille et une actions que nous posons consciemment ou inconsciemment chaque jour. Et la folle agitation de ce que nous appelons le monde. Mais bien sûr, l’être est toujours là. Il était, est et sera à jamais. Toujours égal (à lui-même pourrait-on dire). Simplement nous ne le goûtons plus. Nous ne l’habitons plus. Voilà pourquoi nous nous agitons follement. Voilà pourquoi le monde tourne… mais de ce manège ou de ce cirque n’émergera jamais l’être. Jamais. Seul le désintérêt (souvent progressif) pour cette danse perpétuelle, ses mirages et ses vaines promesses fournit le terrain propice à la dé-couverte - redé-couverte ? - de l’être. En un sens, tout mène à l’être. Toutes actions, tous mouvements aussi lointains qu’ils puissent sembler de la « spiritualité » ou de l’idée que l’on s’en fait sont des tentatives pour le retrouver.

 

 

Une fois l’être goûté, une fois cet espace ou cette présence habitée ne serait-ce que brièvement ou temporairement, le reste - tout le reste - semble d’une incroyable fadeur. Honneurs, gloires, succès, richesses, adulation, bonheurs, plaisirs perdent totalement leur attrait. Et l’on n’a de cesse de vouloir y retourner. Retrouver cette source à laquelle rien – absolument rien – ne peut être comparé car au-delà de la joie et de la paix qu’elle peut procurer (ainsi perçu par le mental), quelque chose fait que l’on ressent une parfaite complétude comme si nous retrouvions enfin notre véritable demeure, notre véritable nature.      

 

 

La nature (et la vie) ne se soumettent aux diktats d’aucun roi. Derrière l’apparent chaos règnent l’ordre, l’harmonie et la perfection que rien ne peut entacher.

 

 

Au cœur du monde dépeuplé. Parmi les arbres, les herbes et les bêtes. Habitant le ciel et la terre. Marchant sans destination précise. Laissant le vent guider ses pas vers nul ailleurs. Au cœur de la présence immuable. Le corps brinquebalant pourtant, porté par les mille mouvements, allant là où on le réclame. Pris dans la masse merveilleuse et chaotique, fragile et si puissante. Vie d’incessants mouvements, tirée ici et là. Conduite tantôt vers le haut, tantôt vers le bas, tantôt à droite, tantôt à gauche. Et l’esprit silencieux et tranquille, dégagé de toutes implications, observant ce décor mêlé et changeant,  le furieux engrenage agrippant et malaxant les chairs en les soumettant à ses lois implacables.

 

 

Ces orgies de temps où tu ne t’appartiens pas. Absorbé par les phénomènes. Captif d’un monde imaginaire. A la périphérie de toi-même, tu erres. Pour te distraire du vide que tu es. Incapable encore de supporter le rien, tu t’agites en vain. Quand naîtra le désintérêt de l’abondance (et du remplissage), tu plongeras au-dedans. Remontera en toi-même. Et en tes profondeurs, tu réaliseras l’être, espace d’accueil de tous les phénomènes. Afin de t’habiter pleinement.

 

 

Demeure au-dedans. A la source même du regard. Et tu sauras qui crée le monde.

 

 

Laisse libres toutes choses. Observe leurs mouvements incessants. Tu es ce regard où tout prend place.

 

 

Tu es l’être. Lieu permanent de l’attention silencieuse. Et de la paix.

 

 

Assieds-toi dans l’innocence et le silence. Libre de tes repères et tes références habituels. Et regarde la puissance et la fragilité des phénomènes du monde (manifesté). Regarde comme toutes les formes s’emploient les unes les autres à survivre. Prends note de leurs stratégies. Observe leurs collisions, leurs collusions et leurs déformations incessantes ignorant qu’elles sont un seul et même corps mû par l’énergie, soumis aux lois du jeu, de la nécessité et de la célébration. Et au mûrissement de la compréhension. Eclairé par la seule présence de l’attention.

 

 

Semences du ciel

Haute voltige du regard. S’immisçant en tous lieux.

 

 

Acrobate de la terre et du ciel. Immobile sur son fil. Se laissant caresser par le vent. Jouant avec les charrettes de phénomènes qu’il amène, pousse ici et là avant de les emmener ailleurs. Toujours indemne de tous les mouvements. 

 

 

Regard décroché de toutes formes. Assis en sa source. Enveloppante et non localisable. Laissant s’étirer tous les mouvements. Jusqu’à leur épuisement. Témoin de toutes les naissances. Et de toutes les morts. Dégagé des collisions, des collusions et des déformations des mille formes de ce grand corps mouvant. Et jamais accusateur des ruses et des stratégies qu’elles fomentent pour assurer leur survie illusoire - dont elles se croient maîtres.

 

 

La fleur s’éveille sur le vieil arbre dépouillé.

 

 

En ton cœur s’éveille la joie de l’être que tu laisses à présent t’habiter. Après l’avoir comblé de tant de chimères et d’échafaudages. Comme autant de barricades avant le temps du grand ménage où le vent l’a dépouillé de l’inécessaire.

 

 

Présence nue. Dépouillée de tous désirs. De toutes intentions. Laissant jouer la perfection du monde à l’œuvre.

 

 

En tes terres, le ciel fait éclore les graines qu’il avait enfouies il y a très longtemps - une éternité sans doute - et que tu avais pris soin de recouvrir malgré toi cherchant partout la fumure adéquate, obstruant ainsi toute percée. Et la survenance de la lumière.   

 

 

Remonte le regard jusqu’à son origine. Et tu trouveras l’espace que tu n’as jamais quitté. Tu t’étais seulement éloigné à sa périphérie, attiré et absorbé par les objets que tu croyais en dehors de toi-même. Mais tu comprendras que c’est toi seul qui les éclairais et leur donnais vie. Tu es ce regard et tout ce qu’il éclaire.  

 

 

Ce silence fait d’ombres qui glace ton âme. Apeuré de l’inexistant. A l’affût de terroristes imaginaires. Soumis à la consistance et à la permanence de l’éphémère.

 

 

L’heure se creuse au-dedans. Exilé à la périphérie, tu végètes. Et te dessèches. Il faut te laisser mourir d’ennui et de nostalgie avant de renaître à toi-même. Au cœur de l’être. Au centre de l’espace non localisable. L’attention un instant se distrait, absorbée par le lointain et l’imaginaire. Laissons-la s’égarer. Se perdre. Elle reviendra vers son centre. Sa source. Sa demeure inaltérable pourvu qu’on ne la soumette pas au diktat de la volonté. Pourvu qu’on la laisse libre d’obéir à son propre mouvement.

 

 

Le souverain du temps ne craint ni les jours ni les années. Ni la vieillesse ni la mort. Il habite l’éternité.

 

 

L’éveil s’émancipe du temps.

 

 

Le cours des choses

Matière déformable à l’infini. Incessants entremêlements. Matière qui se répand et s’étend. Expansions, dilatations, resserrements, enchevêtrements, écartèlements, déchirures, émiettements, dissolutions. Transformations, évolutions, re-formations de la matière. Renaissances de formes indéfinies. Magma mouvant re-sculpté. Nature éternelle de la roche.

 

 

L’oiseau se courbe sous le vent pour laisser passer la nuit.

 

 

Sur la branche se réfugie le pingouin qui a peur des cachalots.

 

 

La vague se brise et retourne à l’océan. Avant de renaître un jour. Peut-être…

 

 

Aucune fin à l’espace. Tout s’insère en lui.

 

 

La puissance (l’énergie) n’a d’intention. Elle se répand et s’amuse dans l’espace.

 

 

L’herbe est aussi puissante que l’éléphant. Mais beaucoup d’yeux restent dupes…

 

 

Le cœur du jour (la plénitude) n’est accessible qu’aux va-nu-pieds. A ceux qui se sont délestés de tout. Mais pourquoi diable alors les pauvres cherchent-ils la respectabilité ? Parce qu’il faut d’abord avoir été riche (de cette fausse abondance) pour qu’elle perde tout attrait.

 

 

L’environnement est ton prolongement. Quand rien ne vous sépare, les résistances et les conflits cessent. Et sous Ton regard, l’Un se célèbre et s’amuse.

 

 

La liberté de la matière est dans la danse. L’immersion de chaque structure dans le mouvement. Et celle du regard lorsque la ronde n’a plus d’importance.

 

 

L’estrade attire les paons qui croient voir leurs plumes dans les yeux des foules.

 

 

La terre et le ciel s’abreuvent à la même source. Mais qui a étanché sa soif ? Celui qui la connaît y demeure impassible.

 

 

Le magma (la matière) se déforme en gémissant. Mais qui en connaît l’origine demeure silencieux.

 

 

Enracine ton regard à la source. Habite-la sans trace ni attache. Libre de toute volonté d’y demeurer. Et tu seras indifférent aux cours des rivières.

 

 

Le chemin intérieur débute à la périphérie et ramène toujours à la source. Au centre même de l’espace.

 

 

La sandale n’est jamais à l’abri du pied. Car elle en est le prolongement naturel. Comme le ciel est le prolongement de la terre. Toute matière est le prolongement d’elle-même. Et se tient toujours au sein du regard non-localisable.

 

 

Le regard ne s’atteint pas. Il s’habite quand il s’est désencombré de l’inessentiel. Le superflu alors vous quitte. Et ne reste rien. Et ce rien est le dernier pas vers le plein - la plénitude - que vous cherchiez vainement à atteindre par l’accumulation de l’accessoire.  

 

 

Nulle trace n’est nécessaire. Nulle empreinte à suivre. Ni à laisser. L’art de l’éphémère. Laisser passer les mouvements. Passer sans trace.

 

 

Aussi vaste que l’espace. Aussi léger que le vent. Aussi transparent que la lumière.

 

 

L’art du furtif. Et du juste. Habitant léger de la seule permanence du regard.

 

 

Rien n’est nécessaire. Le corps a ses propres lois. Laissons faire l’intelligence de la matière. Naissance des formes, déploiements, déformations et transformations enfin. Danse perpétuelle des éléments. Combinaisons infinies. Mariage des contraires. Harmonies des déséquilibres. Merveille de la précarité. Puissance de la matière. Excès et manque. 

 

 

Rien à montrer. Rien à transmettre. Rien à apprendre. Rien à enseigner. Etre. Silence. Plénitude. La célébration s’invite d’elle-même. A son heure.

 

 

Laisser s’éteindre les bruits. Les distractions et les désirs. Le silence sera le dernier invité. 

 

 

Quand le silence s’habite, nul hôte n’est nécessaire.

 

 

Le silence demeure le plus puissant des actes. Et des enseignements. Mais peu le comprennent. Encore soumis au diktat du bruit, des besoins de compréhension et des désirs d’accomplissement impulsés par le mental.

 

 

Force (et puissance) du mouvement. Légèreté (et transparence) de la présence. Justesse de tout acte.

 

 

L’eau bleue des forêts serpente vers sa source. Et la rivière s’endort. Assagie.

 

 

Morceaux de terre démunis que délaisse la main sage.

 

 

Où va la brume que le vent dissipe ?

 

 

Vers le simple, tu te penches. Pour retrouver l’assise naturelle de ta condition. Et ta forme peut enfin se mouvoir avec aisance dans l’enchevêtrement du monde.

 

 

Plus tu te délestes, plus tu jouis de l’être. Mais inutile de renoncer, il suffit d’attendre que tout se détache. Alors l’être occupe tout l’espace. Imperturbé. Imperturbable. Souverain. Retrouvant le fief que l’on s’était malencontreusement octroyé.

 

 

La girafe ne peut habiter la banquise. Ni le pingouin la savane. A chaque forme correspond un environnement naturel (approprié) que l’instinct - conditionné par la forme elle-même - enjoint d’habiter.   

 

 

On ne se sent jamais aussi seul que parmi les hommes. Au milieu des arbres, la solitude n’existe pas. Sous le ciel, la solitude n’existe pas. Parmi les bêtes, la solitude n’existe pas. Au cœur de la nature, la solitude n’existe pas. La solitude est une invention mentale - que renforce la proximité humaine - avec son lot d’images et de représentations.

 

 

Aucun frère ne peut te sauver de toi-même. Mais le monde - dépeuplé des hommes - peut te guérir.

 

 

Désapprentissage du vouloir. Familiarisation avec le rien. Education au simple. Et à la vie contemplative. Emiettement progressif des images et représentations. Développement du ressenti corporel. Diminution des pensées. Oscillations entre espaces personnel et impersonnel. Entre présence et personnage. Entre centre et périphérie de l’être. Approfondissement de l’écoute. Diminutions des résistances. Abandon à ce qui est. Liberté plus grande du personnage. Insertion dans les mouvements présents. Obéissance de l’action aux nécessités. A la célébration. Et même parfois au jeu. 

 

 

On veut bien jouer. Participer au grand jeu de la célébration et de la nécessité. Jouer dans l’essentiel habité. Jouer à tout. Avec Tout. Et même avec frivolité. Pourvu que le jeu soit authentique. Mais on se refuse à jouer au jeu des faux-semblants et du mensonge auquel se livre le monde pour donner consistance à une existence qui en est dépourvue. On se refuse à jouer au jeu des images et des représentations fabriquées par peur de se regarder soi-même. On veut bien jouer dans le silence. Jouer par plaisir. Ou par résonance. Pour célébrer le monde, céder à un mouvement naturel. On veut bien jouer pour la joie. Mais pas par mimétisme aveugle. Pas pour plaire. Ou ne pas déplaire. Ni pour séduire. Et encore moins pour faire semblant. Et faire bonne figure dans les bals costumés où l’on se cache d’abord de soi-même. Où l’on camoufle sa misère derrière un masque par crainte d’être exclu par le regard du monde.

 

 

Tu aimes ceux qui ont affronté leur misère. Yeux dans les yeux. Et l’ont fréquentée suffisamment et avec tant de courage qu’ils ont appris à se moquer de ce que peut penser le monde. Ceux-là sont rares. Si peu parviennent à se libérer de l’image qu’ils voudraient voir briller dans les yeux alentour. Encore soumis au diktat de la représentation et de ses chimères.

 

 

La vérité a une épaisseur. Elle seule rend l’être consistant. Le reste est (au mieux) illusoire remplissage du vide. Et (au pire) camouflage ou habillage du creux…

 

 

L’heure écarlate s’émancipe du jour. Et la nuit a déjà révélé sa paix. Transparence des heures dénudées. La pointe fine du temps dissolu.

 

 

Là où le temps s’étire jusqu’à la rupture, l’abysse de l’Absolu. En surplomb du temps. Et des heures.

 

 

L’explosion de toutes métamorphoses. Jusqu’à l’anéantissement de la matière. Et l’éclosion du rien. Célébrant l’éphémère et le mouvement.

 

 

Le ressac du temps. Comme une gifle à l’instant - à la plénitude de l’instant. Qui laisse meurtri sur la rive des heures.

 

 

Immobilité. Un grand pas dans le silence. Habitant la demeure en paix.

 

 

Que veux-tu extraire de toi-même pour que le suc de l’essentiel (te) soit offert ?

 

 

La seule descendance : le rien. On laisse l’héritage du manque à ceux qui n’ont pas éprouvé la plénitude et la paix.

 

 

Le besoin d’amour n’est pas sans conséquence sur la naissance de la haine.

 

 

Au cœur des choses, nul mystère. Mais l’espace peut le découvrir. Et (te) révéler le centre de la demeure.

 

 

L’être, le rien, l’espace, le monde et le personnage. Un (seul et) même Tout.

 

 

Pierre taillée d’être

Sans gloire ni fortune

Debout sans aucun mur

 

 

Dans la forêt, une grimace

Et des masques de plomb

Le sourire vainqueur sur les lèvres

 

 

Des pierres taillées

Sur l’horizon de dunes

Toujours libre le chemin

 

 

La compréhension

Au sommet d’un cactus

Dans la dernière fleur

Eclose au soleil

 

 

Le monde est notre aire de jeu. Tantôt jardin. Tantôt décharge à ordures. Tantôt champ de bataille. Tantôt socle d’édification vers le ciel. Mais l’essentiel est ailleurs. A l’intérieur. Dans la maison de l’être. A la fois caverne et flamme vive. Sphère transparente qui accueille le monde. Et lumière qui l’éclaire.

 

 

Les marges (en particulier les marginaux de tous bords ou ceux que l’on présente comme tels) rappellent à la norme ses limites. Toujours dépassables. Et rarement dépassées.

 

 

On se consacre à l’être (tant que nous ne l’avons pas goûté) jusqu’à ce que l’être, un jour, nous consacre.

 

 

Certains jours, je n’ai goût que pour le silence. Un silence profond. Si vaste. Infini. Le reste ne me semble que farces et commerces. Et je répugne à m’y livrer.

 

 

Tout est silence. Silence - notre seule demeure. Notre seule identité. Qui se ressent. Et s’habite.

 

 

Il n’y a rien à partager. Hormis ce silence. Quant aux farces et aux commerces, ils sont la manifestation de ce silence. A la façon dont il s’habille d’énergie pour devenir perceptible et palpable à ceux à qui ne peuvent encore le voir et le sentir véritablement. On ne peut certes pas échapper à cette énergie. Je respecte les façons dont elle se manifeste bien que ces agitations énergétiques me semblent inutiles et vaines. Je ne m’y soumets que contraint, laissant ce que l’on nomme le corps, le mental et le monde suivre leur cours - leur marche futile et inepte. Je n’aspire, en vérité, qu’à ce silence. Qu’à entrer et me fondre en lui car il est - je le sais - notre seule réalité. Bien sûr, le mental ne peut comprendre la force irrésistible de cet appel et de cette réalité qu’il considère sans doute comme une folie. Mais la seule folie serait de ne pas s’y abandonner. Le reste – tout le reste – voilà la seule folie ! Le monde a perdu presque tous ses attraits. Le corps et le mental auxquels je m’identifiais tendent à les perdre aussi. Comme les images et les représentations auxquelles nous sommes, en général, attachés. Il ne reste presque rien. Et ce grand vide que d’aucuns appelleraient néant se remplit à présent de présence. Et de plénitude. Le désencombrement, à l’œuvre depuis des années, touche sans doute à sa fin. Mais rien n’est jamais définitif évidemment. Cela s’habite instant après instant. Et cela disparaît aussitôt. Remplissage et évidement quasi simultanés pour que le vide se maintienne offrant ainsi à l’espace d’accueil une ouverture permanente. Cela est vécu. Le ressenti se découvre pas à pas. Et l’exploration, si elle a lieu, se réalise à chaque foulée sans la moindre possibilité (ni la moindre envie) de savoir ce qui va surgir à l’instant suivant. Le territoire vierge  semble se révéler ainsi. Toujours inconnu à chaque pas. Pas la moindre indication. Pas la moindre certitude. Aussitôt foulé, aussitôt disparu. Vécu habité de chaque instant. Impossible à fixer.

 

 

Les bras de l’Absolu

Caresses et brimades

En ton sein

Je nais et je meurs

 

J’aime tes odeurs de soufre

De quenelles et de mirabelles

D’égouts et de poubelles

 

Tes mousses, tes collines

Tes heures de paresse

Tes gares où l’on s’égare

Pour partir vers un ailleurs

Lointain et familier

Que l’on connaît par cœur

Jusqu’au dégoût

Et au désespoir

De ne pouvoir échapper

A cet inconnu

Que l’on ignore et piétine

Pauvre hère

Misérable et défait

 

J’aimerais t’habiter

Plus longuement

Plus pleinement

 

Comme un fou

Eperdu de lui-même

 

Comme un amoureux

Transi de froid et de misère

 

Et dans ton silence

Je me terre

A l’abri des bruits

Qui grondent ici-bas

 

Avec le vol des oiseaux

Et le bruissement des ailes de sauterelles

Je crépite du son du sol

Des entrailles de la mère qui nous a enfantés

 

Je me défais de l’ailleurs pour être là.

 

J’ai plongé dans le cauchemar

Qui m’encerclait autrefois

Lui ai fait face de toute mon âme

Et nous nous sommes

L’un et l’autre

Peu à peu délités.

 

 

Comme une fleur solitaire

Posée sur le bord du chemin

Indifférente aux passagers voyageant si loin

Simplement ouverte au ciel

Attendant sans attendre

D’être brûlée par le soleil

Sans ombre ni abri

Libre de toutes promesses

Laisse le vent

Défaire sa modeste parure

 

 

Seul(e) en ta compagnie, vois-tu qui tu es ? Demeure seul suffisamment longtemps. Et apprends à te connaître. Vois comment tu fonctionnes. Comment tu regardes, observes, apprends, raisonnes. Vois comment tu te parles. Vois ce qui t’attire, te révulse. Vois comment tu réagis. Observe ton propre univers. De quoi il se compose. Note ce qui t’est essentiel. Ce qui te semble superflu. Entreprends ce long voyage. Engage-toi. Et tu sauras qui tu es. La vérité se fera jour.

 

 

Ne cherche à comprendre par les mots et les images. Délaisse les concepts. N’engrange aucune connaissance indirecte (ou de seconde main). Découvre et apprends par toi-même. Défais-toi des maîtres et des enseignants. Sois le premier homme.

 

 

On ne fuit pas le monde humain (pas davantage qu’on le refuse). On s’éloigne (naturellement) des mirages qu’il offre et représente. Tout ce qu’il propose apparaît faux, illusoire, limité et inconséquent. Un monde de représentations inconsistantes. Et irréelles.

 

 

Ce qui est vrai est ce qui est ressenti. Rythmes, vibrations, résonances. Le reste est fiction. Imageries.

 

 

Pas de chemin. Pas de départ. Pas d’arrivée. Nulle part où aller. Nulle part où rester. La seule demeure est l’être.

 

 

Rien à chercher. Rien à trouver. Rien à apprendre. Mais un regard et une écoute impersonnels à ressentir. Et à habiter.  

 

 

Pourquoi te caches-tu derrière le visage que tu crois avoir ? Débusque-toi. Et tu verras la supercherie.

 

 

Le jeûne du cœur honore et célèbre le rien.

 

 

Pleurs ou sourire

A la source du monde

Ton regard

 

1 décembre 2017

Carnet n°45 Chemin(s)

Recueil / 2013 / Le passage vers l'impersonnel

Des pas trop lourds sur la terre. Ainsi marchent les hommes dans leur sillon. Croyant suivre l’azur derrière leur horizon. Espérant l’atteindre. Et le reculant toujours. L’azur survient par mégarde. Il ne peut se dévoiler aux prunelles laborieuses et avisées, aux pas lourds et geignards. Il se révèle à ceux qui se sont délestés jusqu’à l’os. N’épargnant ni leur chair. Ni leur âme. Allant jusqu’à froisser tout espoir de lumière et qui avancent tremblant dans le noir, effrayés de tant folie, poussés et guidés à chaque pas par une folle nécessité… errant ici et là sans repère, sans certitude, sans identité ni destination. Rien. Et libres jusqu’à l’ivresse. 

 

 _

Chemin

Il n’était pas homme ordinaire. Quoique très commun. Il travaillait, mangeait, dormait comme un funambule sur un fil barbelé. Comme un martyr sans bourreau ni échafaud.

 

 

Animé d’une étrange (et vaine) excitation, il allait au-devant de contrées qu’il effleurait d’un doigt avide et tremblant. Soumis à l’ordre du monde et au chaos de son propre univers, il marchait l’âme écartelée. S’appliquant (avec une farouche détermination) à pulvériser tous les dogmes. 

 

 

Son espoir d’ouvrir le ciel était immense. Mais il avait beau regarder la lune. Et tendre la main. Il ne pouvait compter que sur son pas.

 

 

En d’autres terres, il aurait été moine. Mendiant. Ou saltimbanque. Mais en ce lieu, la vie le consigna à la tâche de vigie. Humble veilleur fouillant les recoins des ténèbres pour y dénicher un peu de lumière enterrée sous le sable et la boue. Sous toutes les écorces qui recouvrent les chairs. Sous tous les masques qui recouvrent les visages.

 

 

Il marchait sans relâche. Heureux sans doute de quitter la terre immuable des hommes. De s’éloigner du peuple des passants futiles. Le chemin était son ivresse. De bout en bout, une fiole en tête.

 

 

Au cours de ses errances, il se perdit mille fois. Et retrouva à chaque égarement ses allées sombres. Ses chemins d’épouvante. Et ses impasses ténébreuses. Il marchait parfois sans tête. Et parfois sans jambe. Comme un tronc rampant. Entravé, croyait-il, dans sa progression.

 

 

Il arborait avec modestie son ignorance. Il ne connaissait en effet ni son origine. Ni sa destination. Mais ses gestes reflétaient la beauté de ceux qui cherchent avec obstination parmi leurs incertitudes.

 

 

Il marchait d’un pas lent. La main de la solitude sur l’épaule. Si rassurante qu’il pouvait traverser les forêts sombres et les champs clairsemés du monde en sifflotant.

 

 

Il se sentait si seul que tout l’accompagnait. Partout des frères pour le soutenir. Et des sœurs pour lui indiquer la route.

 

 

Il aurait tant aimé s’écarter des chemins, des bordures, des fossés et des ornières. Mais aucun miracle sur la chaussée. Toujours le même désert. Et la route à tracer.

 

 

Partout il voyait les hommes crépiter sur la terre, s’enchaîner aux pierres sur le gravier des allées, s’enhardir au son des cloches, s’agenouiller vers le ciel, éclabousser le vent de leurs douleurs béantes, s’enfoncer au-dedans et gémir. Partout il voyait les hommes aux jours vides bailler d’indigence devant l’espoir de l’horloge. Lui, s’attardait sous la motte. S’échinait à la rude besogne, sous les pas des vivants. En lançant quelques regards fugaces vers le ciel pour y décrypter un signe, y puiser un peu de courage et d’espoir avant de replonger à l’abri des entrailles.

 

 

Le ventre du monde l’engouffrait, le mâchait et le digérait. Et il en ressortait toujours excrémenté

 

 

Chaque jour, il croisait mille visages. Mille bouches. Mille grimaces fétides. Mille corps ardents frottant et écrasant leur chair, entourant sa solitude suffocante et désemparée.

 

 

A la vaine pitance du monde, il opposait ses mains ouvertes. Son âme déployée. Son renoncement sans faille. Et l’éclat si faible de ses prunelles. Plantant ses graines à la volée. Sur des terres sèches et fragiles – peu propices à la moisson. Ignorant que le vent se chargerait des labours. Et pressentant pourtant la venue prochaine de la récolte où entre les ronces, une foison d’orchidées verrait le jour.

 

 

Il fuyait (comme la peste) les fossés escamotés par l’artifice. Les fruits du progrès. S’inscrivant (toujours à contre-courant) dans l’élan naturel de son peuple.

 

 

Il rêvait toujours de voir se lever l’aube sans différend. Mais l’itinéraire se camouflait comme une bouée dans l’immensité. Ses seules certitudes : la traversée des eaux troubles. Et l’étirement du nageur qui s’abîme entre les vagues.

 

 

Entre la terre et le ciel, il reposait parfois sa nuque sur le sillon. Et attendait immobile que s’éteignent les heures. Aménageant ses fossés comme des contrées éternelles. S’évertuant à chercher parmi les immondices celles qui sauraient préparer le terreau des siècles meilleurs.

 

 

Mais il demeurait sans voie devant l’invisible. Cherchant toujours, entre deux étoiles, le passage où l’azur s’étendrait à ses pieds. Avançant le poids léger du vent sur l’épaule, la joue contre le sillon et l’âme toujours aux aguets. Avec son fardeau en bandoulière. Rêvant de mêler son souffle à toutes les haleines du monde. Pour voir enfin fleurir entre ses lèvres le vent originel.

 

 

Mais ses idoles le pressaient sans cesse aux attaches et aux entassements. Et il marchait sans espoir de guérison. Ouvrant son chemin comme une plaie. Prêt à se dépecer à chaque pas pour que la blessure devienne béance, puis abîme, imaginant (sans doute) qu’une fleur jaillisse au fond du gouffre.

 

 

Il devinait l’horreur des frontières. De toutes les frontières qui fissurent l’invisible. Et l’encerclent. Il aurait tant aimé découvrir le désert en lui si loin recouvert.

 

 

Un rire parfois le surprenait de l’intérieur. Et il lui enjoignait d’éclore jusque dans ses nuits. Malgré sa répugnance des sillons, il espérait toujours le temps des moissons. Comme un vagabond bucolique penché sur ses labours.

 

 

Cette quête enflammée qui autrefois l’animait le brûlait à présent. Et consumait chacun de ses pas vers le ciel d’ivresse, la saveur de la terre et la chaleur des regards alentour. Il végétait encore au seuil des frontières. Errant toujours hors du cercle.

 

 

Le silence si serré entre ses mains le tailladait parfois. Et à chaque carrefour, le renoncement l’écartelait.

 

 

Poussé vers nulle part, il suivait sa pente. Allant éparpillé, ici et là. Cherchant toujours (avec frénésie) deux bras ouverts qui le salueraient d’un geste fraternel. Mais jamais il ne s’aventurait au-delà de lui-même. Incapable d’entrevoir le ciel dans les yeux alentour. Et les lèvres entrouvertes.

 

 

Il avait épuisé son existence à l’ébranlement intérieur. Et il creusait (à présent) sous les ruines. La main de la tristesse sur l’épaule.

 

 

Depuis l’enfance, il attendait la rencontre. Comme un mendiant au bol tendu. Comme une bouteille cherchant son rivage. Mais il ne savait où aller. Et continuait d’errer au vent, sur place et ailleurs, tentant d’abreuver sa soif à son origine, à la provenance jaillissante des chemins, à l’essence des paysages et des rencontres dans l’immobilité mouvante de l’espace. Attendant un délice sur sa chair déchirée. Une pluie de lumière dans ses yeux. Et un peu de repos pour son pas.

 

 

Il rêvait d’un avenir sans marécage, bordé d’étoiles et d’azur clair. Avec au fond des précipices une route ressurgissant en tous lieux pour aller sans crainte des chutes, des gémissements et des marcheurs courbés sur l’horizon.

 

 

L’écume aux lèvres. Et la silhouette toujours chancelante. Il se dérobait au vent qui agitait ses contrées. Isolé en son îlot. Comme naufragé à lui-même.

 

 

Il appréhendait parfois le monde d’un seul tenant. Comme un bloc insaisissable de silhouettes et d’espace. Mais il continuait à pousser ses murs aux 4 coins de la terre. Croyant aller les semelles aux vents. Et érigeant une forteresse en tous lieux. Prisonnier sous toutes les latitudes.

 

 

Il ne parvenait à soulever la poussière de ses pas. Embourbé dans son sillon. La plèbe par-dessus la tête voilant le ciel à ses paupières.

 

 

Comme une fleur dans le vent, comme un oiseau sur sa branche, il attendait l’heure propice des saisons. S’éloignant toujours du pas commun de son peuple. Toujours insoucieux des récoltes de l’Homme. Et piétinant l’asphalte du monde comme un moribond recouvert par toutes les routes couleur de tombe. Mais il était si soucieux de son allure qu’il s’entêta.

 

 

Et un jour, ses pas terroristes firent exploser les paysages. Et les pavés jaillirent. Et de son enfer, les collines firent glisser sur ses joues mille pétales. Et quelques larmes de joie pure. Comme si au seuil de l’abandon, des ailes lui avaient poussé au-dedans.

 

 

Il reconnut le visage de Celle qui l’avait mis au monde et entouré, protégé des foules et ensemencé sa déroute. Elle était là, partout présente, attendant sa reconnaissance. Et il la devinait dans les bois, les brins d’herbe, les visages, les rires, les cris et le silence. Il comprit alors qu’il devait changer d’envergure pour prendre son envol vers Celle qui habite le ciel. Elargir les 4 murs qui étouffaient l’espace. Et y laisser entrer un souffle nouveau et plus ardent.

 

 

Il oublia alors ses brouillons, ses tumeurs et ses lacunes. Et reprit son sillon tordu où se creusait la vérité. Que lui importaient à présent les trous dans ses guêtres. Et ses godillots percés. Le pas était son seul trésor quand il prenait appui sur le souffle qui efface.

 

 

Il renonça au Juste. Foula au pied le Bon. Piétina toutes les frontières. Se défit de toute vérité. N’obéit qu’au vent indocile. N’opposant nulle résistance. Se laissant glisser et emporter. Et se voyant tantôt submerger, tantôt porter vers la côte et le large, l’abysse et l’azur, à fleur de vagues.

 

 

L’espace devint sa demeure. Et la direction, son passage. Ses gouffres s’emplissaient et se déversaient. Au gré des vagues et des marées. Libres de la clameur des côtes. Livrés à la seule vie océane.

 

 

Comme un va-nu-pieds heureux dans le vent, il continuait à marcher sans viatique. Libre de toute destination. Errant dans les vallées, s’égarant sur les collines. S’enfonçant dans les ornières. Franchissant des sillons fourbes et des sommets azurés. Côtoyant la foule et les déserts. Poursuivant sa route qui se défaisait à chaque pas. Et s’inventait à chaque nouvelle foulée.

 

 

Il pleurait parfois, une gorgée de soleil entre les lèvres. Les yeux humides et le front radieux dans l’azur.

 

 

L’incertitude devint sa plus sûre patrie. Il s’y couchait comme on s’allonge sur une mousse tendre et rugueuse. Laissant parfois quelques marques sur le visage. Blessant tendrement sa chair encore trop ferme. Mais il brillait au-dedans. Comme jamais. Un éclat qui perçait sa peau fragile et translucide qu’avait écorchée le monde.

 

 

Ses larmes effritèrent les murs. Et il fut libre de toute perspective. Vibrant d’espace. Et de rire. Tout prenait place. Et s’effaçait. Demeuraient la joie, la présence. Et la découverte des horizons impratiqués. La saveur au-delà de toutes frontières. Et lui regardait. Sans y croire. Et se laissait mouvoir. Sans volonté. Avant de s’agenouiller sous le vent. Et laisser mûrir son innocence incandescente. Noyé dans son puits d’extase. Emmuré à l’impensable. A l’impossible regret du marcheur opiniâtre saisi par l’abandon.

 

 

Il devint sans qualificatif ni attribut. La tâche qu’il s’était assigné (en secret) à l’aube du voyage. Laissant être ce qui le traversait (et ce qu’il traversait). Devenant passage temporaire. Passager provisoire. S’abandonnant à l’évanescence des formes. Confiant en leur essence unique. Sur le point de faire naître l’être sans trait.

 

 

L’horizon referma alors les 4 coins de la terre. Et condamna toutes les impasses à s’ouvrir. Au creux du ciel, l’asphalte blanc se déroulait. Avec envergure. Il s’agenouilla face contre terre. Et son visage lentement se redressa vers le ciel. En chaque forme, une bouche lui souriait. Comme l’évidence d’une présence. Eternelle et bienveillante.

 

 

Homme de vent. Et de poussière. Céleste jusqu’en ses fragments. Debout contre la pluie, il n’attendait plus. Mais souriait au soleil désenfoui qui bordait ses larmes. Au bord du ciel, il contemplait enfin Sa demeure. La rive sans rivale. Paumes ouvertes sur l’azur. Doigts dansant sur la terre. Ongles noirs affranchis de toute saleté. Il remercia ses mains sans pareilles. Des traits et des traces sans visages à ses yeux rieurs. Le visage agenouillé dans les replis du ciel, il s’étirait à la lumière. Et ses épreuves d’acrobate glissèrent à ses pieds. Sous la corde qui le ligotait.

 

 

Il se démit de toutes positions caricaturales. Ancra son écoute au silence. Et la nécessité devint juste. Soustraite de sa périphérie. Détaché de l’aube comme du crépuscule, des jours clairs comme des nuits étoilées. La besace vide et les souliers légers. Sans viatique sur l’épaule, il s’en fut. L’esprit libre et le cœur désencombré. Avançant avec (encore) quelques poussières d’entrave à ses pieds. Mais guidé par l’espace. Plus sûr que jamais de la destination. Rêvant de devenir le seuil du refuge pour tous ceux qui cherchent un abri, tous ceux qui ont quitté leur ghetto et erré trop longtemps le visage penché sur leurs souliers. Pour les redresser d’une main agile et les instruire de l’autre à l’hôte qui les appelle en silence depuis des siècles. 

 

 

Mais sa présence oblative et renfrognée déconcertait toujours ses frères aveugles. Il lui fallait encore se dévêtir. Renoncer à toute persuasion. Abandonner toute volonté. Toute aspiration personnelle. Se désencombrer jusqu’au désir même de se révéler. Pour que le mystère brille en toutes circonstances. Derrière ses lèvres. Et son rire. Dans sa main. Et ses larmes.

 

 

Encore trop entaché de lui-même, il encombrait la transparence. Incapable de se défaire de son ultime costume. S’agenouillant avec encore trop d’orgueil. Et s’éreintant à refléter la lumière comme un forçat. Il se laissa alors dériver et fut saisi par l’accueil inconditionnel, seule porte à tous les désencrassements. S’autorisant aux taches et aux plus épais obscurcissements. Au plus dense de l’obscur, les souillures se désagrègent. Et un autre ciel s’ouvrit bientôt par-dessus l’ancien. Plus large et plus limpide. Un azur clair et sans trace.

 

 

Le ciel revêtait (enfin) son habit pourpre. Son soleil transparent. Et sa lumière rayonnante. Eclairant le dédale des passants errant sur l’horizon. Dans l’espace infini où la matière se déploie, libéré des chaînes qui le retenaient au petit tertre dont il se croyait roi. Et sur lequel il régnait jadis, replié sur ses peurs et mendiant au monde un peu de sollicitude pour (le) maintenir (sur) son trône précaire. Accaparement déraisonnable des terres conquises de façon maladroite et souvent si féroce. Perspective erronée de tous les rois-mendiants.

 

 

Aujourd’hui, il vagabondait sur tous les fiefs dont il ne possédait que la jouissance, abandonnant aux propriétaires la croyance en leurs titres. Descendu enfin parmi son peuple, en compagnie des princes et des mendiants. Des marchands et des prostituées. Tous les héros et les damnés de la terre pouvaient à présent s’inviter à sa table. Les messagers des dieux et les mécréants. Les saltimbanques et les fonctionnaires. L’office était ouvert à tous. Fils du même fil. Enfants du même bol. Attablés ensemble. Mus par le même désir de complétude et de paix.

 

 

Après avoir aiguisé l’oreille qui ne lui appartenait pas, l’écoute s’était affûtée, rendant familier toute l’étrangeté du monde.

 

 

Lui qui autrefois rêvait d’une haute destinée, avait visité les sphères de l’en-bas, s’y était enfoui avant de renaître dans le ciel qui avait recouvert ses pas. La terre lui avait révélé tous ses mystères. Et à présent le chemin pouvait bien le mener là où la misère était à son comble, la demeure était habitée. Et le ciel imperturbable resterait intact malgré la boue, le sang, la sueur et les larmes qu’il allait sans aucun doute encore croiser ici et là. Il se tenait debout sans gloire. Abandonnant aux yeux imparfaits honneurs et succès. Pouvait enfin marcher nu sans s’interrompre. Sans discontinuer de son labeur d’homme inachevé.

 

 

Au cœur du monde, parmi les hommes, les arbres, les herbes et les bêtes. Habitant le ciel et la terre. Marchant (toujours) sans destination. Laissant le vent guider ses pas vers nul ailleurs. Au cœur de la présence immuable. Le corps brinquebalant pourtant, porté par les mille mouvements, allant là où on le réclame. Pris dans la masse merveilleuse et chaotique, fragile et si puissante. Vie d’incessants mouvements, tirée ici et là. Conduite tantôt vers le haut, tantôt vers le bas, tantôt à droite, tantôt à gauche. Et l’esprit silencieux et tranquille, dégagé de toutes implications, observant ce décor mêlé et changeant, le furieux engrenage agrippant et malaxant les chairs en les soumettant à ses lois implacables.

 

 

Acrobate de la terre et du ciel. Immobile sur son fil. Se laissant caresser par le vent. Jouant avec les charrettes de phénomènes qu’il amène, pousse ici et là avant de les emmener ailleurs. Toujours indemne de tous les mouvements.

 

 

Une lampée de ciel. Une gorgée de terre. Des silhouettes et des horizons circonstanciels. Et toujours le pas nu.

 

 

 

Confidences itinérantes 

Un fil. Deux fils. Trois fils. Et les nœuds se tendent. S’emmêlent. Poursuivent leur enchevêtrement. Et notre entrave. Funambules sans fil. Voilà notre vocation. Notre mission. Et notre chemin.

 

 

Des ombres. Et des ombres. Que d’ombres sous le soleil! Et les poteaux d’angle qui recouvrent notre abîme. Et nous voilent la connaissance des gouffres.

 

 

Ni abîme ni passerelle entre le monde et nous. Mais un même univers constellé de gouffres et de liens. Et aucune carte pour se frayer un chemin.

 

 

L’œil soupire. Tandis que la bouche crie ou murmure. Le silence et le ciel sont inaccessibles. Hors de portée pour les Hommes qui s’éreintent à l’escalade.

 

 

Que le vent pousse donc nos terres encombrées ! Et que nos habitants nous désertent ! Congédiés par nos pairs. Et relégués aux égouts. Le juste interstice de notre destin. L’ensablement est la seule consigne pour ouvrir le ciel à la terre. Mais peu s’y aventurent. L’asphalte est si confortable. L’essoufflement et l’asphyxie, voilà la crainte des foules ! 

 

 

Le corps repu. Et le cœur décharné par l’opulence des jours. Mais la famine du cœur laisse toujours les yeux affamés. Gonflé d’insignifiances, l’homme aime se complaire sous les réverbères. Mais pâlit toujours à l’aune des étoiles. Le cœur humain. Si frivole au dehors. Et si tragique au-dedans qui jette partout sur la terre son sang glacé. Avant que ne sonne le trépas – que d’heures lasses où l’on succombe ! 

 

 

Les âmes empaquetées – engoncées dans leurs semelles – cheminent ainsi sur leur sente bordée de quatre murs. Suivant avec tristesse leur funeste destin. Parant leur ignorance d’oripeaux. Et derrière les rides, le sillon des années. Et le souci des jours.

 

 

Qui connaît la pauvreté souveraine au pays essentiel ? Au front des beaux esprits se terre l’âme inculte ! Quelques étreintes accueillantes nous sauvent parfois du naufrage. Et le sourire du monde de nouveau nous enchante. Mais derrière l’espoir, la farce nous ravage. Et nous humons la vérité qui s’éloigne devant nos pas trop volontaires. Blâmant la maigre consolation des hommes qui se penchent vers nous, les yeux ouverts et le cœur ailleurs, songeant sans doute à des malheurs moins lointains. 

 

 

La pendule nous condamne toujours au défilement des aiguilles. Et assassine nos heures. Et nous, malheureux, continuons d’espérer. Entre le souvenir et l’attente. Assis devant l’horloge. Secoués d’impatience et de nostalgie, incapables d’habiter chaque particule du sablier. Insoucieux universels, nous arpentons les heures. Nous occupons le siècle, à la mode de notre temps. Et cet éternel ressassement qui éloigne la paix que le cœur appelle sans fin. Ainsi passe le temps. Et aux jours sombres succèdent les jours clairs où le soleil nous enivre. Et aux jours justes, notre cœur se repose enfin de son labeur coutumier. 

 

 

La gloire oscille toujours entre les fontaines. Et nous renâclons toujours à poser notre regard contre la source. Notre vie durant, nous nous exerçons. Nous nous épuisons à l’âpre labeur de l’Homme. Et à notre mort, le vent dispersera nos cendres. Et tous les visages s’éloigneront, en protégeant leur front de cette poussière. 

 

 

Nulle grâce pour les spectacles du monde. Des jeux ignorants et des mises à mort sur une scène inoffensive. Comme si nous étions les innocents bourreaux de nos jours lointains. Mais l’échafaud ne conduit ni au supplice ni au tombeau. Mais au ciel pourfendeur d’espoir. 

 

 

Nous nous évertuons à bâtir des forteresses de sable. Notre éternité s’étend à quelques décades. Et nous brandissons notre gloire ? Pourquoi faudrait-il mourir d’espérance ? 

 

 

En bordure de ciel, fleurissent (par millions) des carrières d’étoiles empilées où patientent les âmes trop sages. Inintrépides. Il nous faut creuser. Creuser. Car le précipice attend notre saut pour s’inverser. Ainsi toute vie est la vérité qui se creuse. Et nous révèle. 

 

 

La grande affaire est là devant nos yeux. Et sous nos pas. Si proche de notre main qui ne saisit que du sable. Des ombres. Des lumières. Et notre main tremblante qui effleure l’interstice où sommeille notre vrai visage. 

 

 

Quand les cieux s’estompent, les yeux éblouis par le pavé rugueux sur l’ineffable marelle des enfants sages sautant de la terre au ciel, la craie s’efface alors sous la pluie. Et nos pas cherchent leurs traits à la saison des rires. Quand le cœur palpite enfin à l’unisson du cosmos, l’âme hébétée reconnaît sa vérité. Mais dans nos labyrinthes, nul dédale heureux. Des impasses, des façades, des badauds qui geignent, raclent la terre et fracassent les murs pour agripper sous leurs ongles à vif un peu de poussière. 

 

 

Au seuil des masures, aux fenêtres des temples, sur tous les horizons du monde, nulle main tendue. Mais des rires broussailleux et ignares qui éclatent au visage. Et derrière la huée des masques, la peur du miroir nous étreint. Seul, l’écho des déserts répond à notre cri. Et nous invite à fouiller notre chair pour découvrir les mille doigts qui nous relient aux bras qui nous portent, nous réconfortent et encouragent nos pas. Chaque homme avance ainsi sous l’ombre de l’étoile qu’il cherche. Quelque part sous la voûte, voilà notre égarement. Et notre salut. 

 

 

La vie serait-elle donc un rébus dont nous serions l’énigme ? La solution dispersée en nous toujours se creuse. Et l’issue fatale repose entière – toute entière – non dans la question mais dans celui qui la pose. Le plus précieux se tient à notre portée. Mais pour quoi se soustrait-il à notre main, à nos lèvres et à nos yeux ? Pourquoi l’odieux s’ébroue-il sur nos visages ? Ne voyons-nous pas derrière nos masques le radieux s’impatienter du ciel à sa portée ? 

 

 

Le ciel abrite un secret. Une légende peut-être. Un monde englouti qui ne peut disparaître. Une foison d’orchidées pour les sages et les innocents. Un butin d’étoiles qui se tissent en silence depuis la nuit des temps. Et qui éclosent chaque matin à l’aube pour tous les yeux vierges de la terre. 

 

 

L’éternité attend et scrute l’insaisissable dans nos mains. 

 

 

La lumière advient souvent au plus sombre. Déchirant notre souffle qui s’ouvre à l’abîme. Comme une éclaircie sur la peau tremblante du monde. 

 

 

Qui sait qu’une porte à côté de l’horizon attend notre pas ? Et à son seuil, nulle enseigne. Mais un long couloir bordé de chandelles. Un étroit désert de braise et de glace où s’effacent sur les peaux martyres tous signes de distinction. Un espace qu’il faut franchir nu – dépouillé de toutes parures et de tout orgueil – pour accéder au territoire insécable bordé d’invisibles frontières. 

 

 

Les hommes arpentent le monde en quête d’un manuel. En assurant à peine leur survie, claquemurés entre leurs peurs et leur ignorance. Mais il n’y a nulle serrure à la porte. Et nulle porte sur le chemin. Et nul chemin dans le paysage. L’œil doit se promener en toutes contrées. S’arrêter, baguenauder, confesser ses larmes aux prunelles qui lui font face, explorer, découvrir. Ne trouver aucun signe tangible de sa présence. Et en rire jusqu’à l’épuisement. Chaque cœur se disloquera ainsi sous la cognée du vent. Et s’émiettera en pierres. Et sous les ruines, mille cimetières s’évanouiront. Et nous pourrons alors marcher ensemble parmi les fleurs dans des allées d’herbes folles. 

 

 

L’origine des jours n’attend aucun siècle pour éclore. De l’entrave naît toujours le ciel. Que l’on peut déjà entrevoir entre les barreaux. Mais comment défaire ses ailes de cette geôle de glace ? En suivant sa pente. En creusant son sillon. Car le ciel se déniche dans la terre. Et inversement. Le ciel ne peut se trouver en levant les yeux. Mais en les abaissant au plus bas. Alors le ciel s’ouvre et descend. Le cœur s’approfondit et se creuse. Et aussitôt le ciel s’y engouffre. Et l’âme s’élève. Pour enfin vivre à hauteur d’homme. 

 

 

La vigilance demeure notre plus haut rempart. Il nous faut monter sur ces créneaux et s’offrir aux flèches. Et de ce présent naîtra la récompense. Une liberté sans blessure. 

 

 

Au cœur de l’antre se dévoilent les origines qui façonnent le chemin. Et la promesse d’une aube toujours moins épaisse.

 

 

La vérité se manifeste à la chair et à l’esprit de façon spontanée par le corps et le langage. Toute réflexion, toute volonté et toutes méthodes en éloignent. Et en retardent la venue. Mais l’erreur qui n’abrite aucun mensonge est le lieu où naît la vérité en marche. 

 

 

Notre destination : l’oubli et l’effacement. Le terreau des beaux jours. Et l’éternelle découverte du rien. Après tant d’amassements… l’ultime est insaisissable… Au seuil de l’aube sans nom. Quel soleil pourrait briller plus fort ? 

 

 

Le ciel pourrait soupirer de notre aveuglement. Mais il nous aime sans exigence. 

 

 

Au bord des frontières se terre le silence. Et derrière nos abîmes, il attend notre traversée. Le chemin s’initie toujours entre les pierres, petits tertres d’où il faut s’élancer. Mais aucun abîme à parcourir. L’abandon est le seul franchissement. Alors de l’innocence peut naître la candeur du jour. Mais on ne peut rien dire du Tout. Moins que rien, il y a le silence. 

 

 

La terre pourtant s’encombre toujours d’échafaudages et de projets de construction. Mais les yeux s’amusent de cet élan vers le ciel. Le sable est toujours si peu propice aux édifications. Les fêtes pourtant succèdent toujours aux guerres. Mais les batailles deviennent célébration. Et les célébrations des batailles. Et nul ne s’en émeut. Les yeux humides n’ont plus cours. Les sourires vainqueurs comme les visages balafrés participent à toutes les apothéoses. La perfection du monde est à l’œuvre. La famine et les épidémies prolifèrent. La matière est soumise à rude épreuve. Les silhouettes trinquent. Les mains s’agrippent. Les corps se débattent. Mais les âmes ne sont-elles pas libres ? Les blâmes s’estompent. A quoi bon, en effet, protester ? Et condamner les mains innocentes ? Nul ne comprend. Mais la compréhension advient. Et les larmes coulent sans tristesse. L’acquiescement aux circonstances. Seule vérité de l’instant. 

 

 

Se défaire de toutes les plaies du monde n’endiguera jamais l’origine du sang. Et tous les saignements assassins qui nourrissent la terre, cette fange qui alimente des générations de vermines et de cloportes rampant sur les routes en quête d’un plus digne destin. 

 

 

Derrière le dessein des jours, Dieu à l’œuvre qui à travers nous se cherche. En quête de notre reconnaissance. Et qui nous susurre qu’il guette, à travers nos épreuves, un espace de nudité et de dépouillement pour éclaircir un passage et apparaître dans nos pas, nos gestes et sur nos lèvres afin d’éclater au grand jour. 

 

 

Sur le parvis des terres blanches, la nudité s’avère l’unique vêtement de circonstance. 

 

 

La métamorphose à l’œuvre est silencieuse et déroutante. Incommensurable. Révolution perceptive que nul ne peut façonner. Que nul ne peut s’octroyer. Ce sont les mouvements phénoménaux qui cisèlent cette com-préhension. Il n’y a définitivement personne. Le monde est dépeuplé. Hormis ce magma phénoménal aux mille mouvements simultanés. Et cette présence dans laquelle tout prend place. 

 

 

Nos rêves d’azur ne sont rien. Qu’un songe limité dans l’espace que nous sommes. Mirage de tous les escaliers. La corde raide demeure invisible et mystérieuse. Et vers son faîte, on se hisse déjà. 

 

 

Tout itinéraire est un dédale d’impasses. Entre les murs se tient (et de-meure) la vérité. Et seule la vérité peut contenter le cœur de l’Homme. 

 

 

De piège en piège, la lumière captive réapparaît toujours, plus intacte qu’au premier jour. Et si l’on s’égarait par mégarde, le chemin nous offrirait en vérité nos propres pas vers l’essentiel jusque-là ignoré. 

 

 

On n’est jamais qu’en soi-même. Tout est à l’intérieur. Le reste est inaccessible. Et seul l’espace décide des gloires. Et des infortunes. Siège de toute compréhension. 

 

 

Avant que les évènements ne deviennent lisses. Présence ou absence. Tout est contenu. Et qu’importe ce qu’elle contient lorsque l’on penche vers l’écoute. L’œil s’en émerveille sans exigence. Indifférent à tous spectacles. Le monde s’efface alors d’un trait d’irraison. Ou de sagesse. 

 

 

Tout s’émerveille de beauté. Dans la solidité du regard. Et la précarité des yeux. Comme si à la source du silence se tenait un monde secret que nul ne pourrait voir sans se dévêtir. Et au point extrême de la nudité peut alors naître la solitude de l’être. Tête à tête du Soi avec lui-même. Les pensées cessent. Les représentations s’étiolent. Le monde se vide de toutes existences. Le néant se remplit de présence. Ne subsistent que le regard et le sentiment si intangible d’exister. Au-delà de tous les phénomènes, l’être – tant recherché – s’habite à chaque instant davantage. Insaisissable. Monde de silhouettes désossées où l’on cherche encore parfois avec tant de maladresse une âme proche. La proximité d’une âme (vivante). Toujours en vain bien sûr. Le monde se meurt. L’Autre devient invisible. L’Autre s’anéantit. Et ne subsiste que cette solitude si outrancière. Le désert des formes. Et la crainte des mirages parfois. Et si ce regard n’était qu’une hallucination ? 

 

 

Le doute s’étire jusqu’à l’incompréhension. Jusqu’à l’épuisement de l’incompréhension. A quoi bon savoir ? On ignore. On est ce regard si impersonnel qui ne peut ni goûter, ni blâmer ce monde et ses hallucinations. Un regard hors de portée où tout est à sa place. Et demeure sans importance. Une présence hors des siècles qui ne se conquiert qu’avec la grâce de la nudité. Tout est juste. Et tout semble faux. Idées, sentiments, rencontres. Mouvements sans âme. Qu’importe ! Être s’auto-suffit. Avec parfois la nostalgie du personnage qui cherchait en lui et dans la folie du monde quelques récompenses. Quelques compensations à son incomplétude. 

 

 

Extinction de toute quête. De toute question. Monde si peu habité. Et monde si plein. Où le néant pourtant semble si présent. Qui pourrait com-prendre ? Ce si-plein-de-solitude que le monde rejette. Et oublie. 

 

 

On se défait de toutes possibilités. De tous espoirs. De toutes espérances. De tous gains. De toutes pertes. On se défait de toutes caractéristiques. On n’existe plus. Et on existe si pleinement. Avec des attributs que nul ne pourrait comprendre. En vérité, on existe sans attribut. Sans les attributs que s’empresse de revêtir le monde pour combler ce sentiment si faible d’exister. Le rien devient tout. Et cela semble fou. Et ce sentiment même de folie est englouti dans l’être. L’être qui pulvérise toutes les tentatives de le saisir, toutes les tentatives d’y échapper. L’être où le temps n’existe plus. Où les idées – toutes les idées – deviennent caduques. Où l’en-haut est jeté parfois si bas que l’en-bas s’étire de toutes parts. Où le vrai peut être faux et le faux si juste. Où le non-juste devient si vrai et si juste que tous les repères de la raison explosent. L’être où le monde se dissout. L’être qui anéantit et contient toutes choses. L’être, cet indicible regard qui accueille en lui tous les phénomènes. Tous les mouvements. Les non-phénomènes. Et les non-mouvements. L’être dont on ne peut rien dire. Et toutes les tentatives pour le décrire en éloignent. Même si la distance est abolie. L’être si vide qui contient tout. Où tout se déroule en lui. Lui, si immobile et si silencieux qui ni n’approuve ni ne désapprouve. Qui est là. Simplement. Si indifférent et bienveillant à la fois pour nos expériences du monde. Le monde se défait de toutes substances. Et ne reste rien. Hormis ce sentiment d’être. Malgré la ronde incessante des évènements. Des mouvements. Cette énergie fluctuante et mobile qui court partout où règne le manifesté. Et cet être d’arrière-plan où tout se produit sans que rien ne subsiste. Seule permanence. Unique présence dans ces univers fantomatiques. Rien en dehors de ce sentiment d’être ! 

 

 

Eternité, hors du temps. Etreté, hors du monde. La vérité se manifeste ainsi dans sa présence habitée. Comme dans son absence ressentie. Présence nue. Dépouillée de tous désirs. De toutes intentions. Laissant jouer la perfection du monde à l’œuvre. Laissant se défaire l’ailleurs pour être là. Sans rien à offrir. Ni à recevoir. Sans rien à apprendre. Ni à enseigner. Être. Silence. Plénitude. Invitant la célébration à ses heures. Habitant simplement le silence, sans nul hôte nécessaire. Être, rien, l’espace, le monde et le personnage comme un seul (et même) Tout. 

 

 

 

Viatique 

Existe-t-il une route pour ceux qui n’appartiennent au monde et ignorent la destination ? L’herbe foulée sous tes pas pourra-t-elle repousser jusqu’au ciel ? 

 

 

Nulle place en ce monde. Toujours à marcher dans le vent. 

 

 

Ton regard perdu découvre le soleil lointain. Et la nuit passagère. Le ciel d’ici-bas. 

 

 

On aimerait parfois se hisser sur les épaules du destin pour contempler sa chute dans le lointain. Mais la clé sous la voûte s’éloigne toujours au son de nos pas trop volontaires. A l’orée des sens, l’invisible demeure sans accès. Malgré notre rêve d’apaiser notre faim de nudité. 

 

 

Les délices du pire. Voilà où mène notre errance. Quelle charge portons-nous pour cheminer ainsi ? Est-ce le poids des origines ? Quand pourrons-nous couper les racines et allonger notre regard pour porter le ciel en nos mains ? 

 

 

Ni terre ni ciel. De la lumière et des nuages. Des larmes et des lèvres closes. Et parfois un rire sans borne. Infini. 

 

 

Nulle part. Voilà notre origine. Et notre destination. Et nous autres, malheureux, nous nous acharnons à maintenir le cap en chemin. Quelle désorientation ! Le chemin est un dédale de forêts sombres. Et on s’éreinte à la coupe, taillant à la hache jusqu’à l’obscur de nos pas. L’espoir est une ornière où le pas glisse. 

 

 

L’horizon s’ouvre aux mains ouvertes. Nos appuis solitaires, les seules béquilles pour nos pas. Sur cette terre, nul horizon. Et au fond du ciel, nul asile. Mais une échelle à chaque pas. Et toutes les passerelles du chemin. 

 

 

Semelles de vent et bouche ouverte au soleil, un pas encore dans l’abîme et l’autre déjà ruisselant de joie. Sans terre ni ciel. Un pas après l’autre. 

 

 

Le mystère s’efface sur le chemin de pierres. Et l’ailleurs impromis s’envole. Si tu ouvres la porte, la main tremblante et le pas vacillant, tu te perds et tu rejoins l’absolue incertitude, la liberté aux mille horizons. 

 

 

Et si tu fermes la porte, tu rejoins le couloir étroit, ton labyrinthe sans échappée. 

 

 

Nulle brisure des dalles sous le pas léger qui trace sa sente sur les nuages. Mais un ciel resplendissant où brillent la lune et les astres. Où le vent applaudit à chaque foulée, émerveillé de notre égarement dans l’azur qui s’étend jusqu’au-dedans de la terre, au plus noir de l’obscur, illuminant l’incompréhension des paysages. Et de la traversée. 

 

 

Nul besoin de guetteurs sur l’horizon dans une contrée sans conflit ni hostilité. Inutiles le monde agglutiné, l’amassement des lampes et des car-tes, des malles et des trésors pour le voyage. 

 

 

Un feu sans paille. Des vents sans nuage. Des nuages sans pluie. Un ciel sans soleil. Un soleil sans espoir. Un espoir sans crainte. Et des cascades de pleurs éclaboussent tes joues. Et aiguisent ta joie. Mais tu marches encore. Voilà ce que les saisons t’ont appris ! 

 

 

En ton exil, une contrée sauvage, peuplée de songes et de fantômes qu’il te faut apprivoiser à main nue. Le pas mobile. Et le regard flottant alentour. L’œil libéré de l’entrave, posé sur l’espace entre le ciel et la terre enveloppe et traverse toutes formes. Voilà notre unique boussole. 

 

 

Nulle étoile à suivre. Nul ciel à atteindre. Mais de la poussière à éparpiller sous les pas. Pour ouvrir le ciel à la plèbe. Un passé sans patrie. Un avenir sans horizon. Libre d’unir ton pas à l’instant. Le talon sans certitude sur le sol suspendu. 

 

 

Une lune. Et un ciel clair. Voilà notre dédale. Une étoile au loin. Notre nuit ancienne. Et notre avenir ? Sans horizon et le pas joyeux. 

 

 

Dans le creux se dessine la cime. Et parmi les sommets se déniche la source. Et de la source jaillit le chemin, les monts et les vallées, les noces du pas et du paysage où nulle aspérité ne peut écorcher les semelles. Mais quelle âpre ascension pour trouver la justesse à chaque foulée ! 

 

 

Abandonne-toi au mystère. Et tu seras guidé en tous lieux. La déroute est en définitive le seul chemin. L’unique voie de la délivrance. Le monde pourrait nous couper les ailes et nous briser l’échine, le chemin renaîtrait. 

 

 

Dépasse l’audace. Et tu trouveras le vrai courage. Si tu veux t’enterrer, garde-toi des ombres. Qui peut vivre sans chute ni envol ? Sans espoir ni crainte ? Où poser son pas ? A l’exacte place ? Mais en quels lieux ? Tant de mondes se côtoient. 

 

 

Le souci de soi mène toujours aux prunelles alentour. Et le reflet des prunelles à la désillusion. La désillusion à la fouille. Et au cœur de la fosse, que se passe-t-il ? Il nous faut creuser pour connaître la réponse. 

 

 

N’écarte rien. Remplis-toi de tout ce qui se présente. Et tout s’effacera. Ton dénuement sera alors richesse. Invitant tous les possibles dans ta main ouverte. 

 

 

Aie l’audace de te laisser surprendre. D’aller les yeux fermés vers ton enfantement. Ne crains ni les découragements, ni les infortunes. Ni la folie, ni le désespoir. Laisse-toi traverser. Le désencombrement est déjà à l’œuvre. N’aie crainte de te fourvoyer. Au fond des ornières. Au fond des fossés, des ailes t’attendent. Pour t’envoler vers le fol azur qui s’impatiente de ta venue. 

 

 

Des pas trop lourds sur la terre. Ainsi marchent les hommes dans leur sillon. Croyant suivre l’azur derrière leur horizon. Espérant l’atteindre. Et le reculant toujours. L’azur survient par mégarde. Il ne peut se dévoiler aux prunelles laborieuses et avisées, aux pas lourds et geignards. Il se révèle à ceux qui se sont délestés jusqu’à l’os. N’épargnant ni leur chair. Ni leur âme. Allant jusqu’à froisser tout espoir de lumière et qui avancent tremblant dans le noir, effrayés de tant folie, poussés et guidés à chaque pas par une folle nécessité… errant ici et là sans repère, sans certitude, sans identité ni destination. Rien. Et libres jusqu’à l’ivresse. 

 

 

Avant d’entrer dans la grande demeure, tout doit-il voler en éclat ? La porte serait-elle donc si large et si étroite, si proche et si lointaine pour notre œil rivé à son seuil ? Comment la franchir ? Serions-nous donc le passeur, la porte, le passage, et l’espace alentour ? 

 

 

La grande âme du monde s’ouvre à ta besace. Et la voûte étoilée invite tes pas au sentier éternel. Prends garde en chemin de ne rien amasser. Ne cherche le mystère de tes ailes. Mais allège ton pas. Démunis-toi du connu. Traverse incertitudes, doutes et effarement. Et derrière les peurs inébranlables de l’effacement surgira le territoire. 

 

 

Laisse-toi apprivoiser. Submerger. L’enfantement et l’évidence sont déjà à l’œuvre. Devant la sagesse millénaire et les paroles ancestrales de ton peuple, nul envol possible. La maladresse prend toujours racine à l’ombre des êtres. Et toutes les impasses y fleurissent. Regagne donc le désert. Et attends l’élan que t’offrira le ciel. Il ne s’expose qu’aux marcheurs solitaires et sans repère. Perdus déjà à eux-mêmes. 

 

 

N’imite jamais les sages. Regarde-toi. Et chemine en ta compagnie. Sans destinée précise, les pas découvrent la direction. Sans intention, les gestes deviennent justes. 

 

 

Oublie les promesses de l’azur. Néglige les empreintes que tu t’es efforcé de conserver. Ôte toutes tes armures. Et marche nu. Un jour, la vérité se tiendra dans tes pas. 

 

 

Le réconfort advient sans prémices. Au seuil de l’abandon, poursuis ta marche. Réclame ton dû de tendresse et d’alcool. Et pars. Abandonne tes parcelles et tes barricades. Tes terres infertiles. Délaisse tes fauves et tes molosses carnassiers, gardiens des temples d’antan. Oublie les joutes d’autrefois. Et les querelles où tu excellais. Oublie l’amertume. Néglige les accaparements. N’engrange que les forces du vent. Et vas. Libre, tu seras. 

 

 

Abandonne les mains à leurs supplications. Abandonne les visages à leurs grimaces. Sois digne sous l’averse. Et honore les chemins que tes pieds nus traversent. Ferme les yeux aux jours abondants. Oublie les escaliers de la gloire. Et contemple tes pas sur le sable. Tes empreintes dans le désert. Ne juge pas la hauteur de la dune qui te fait face. Avance un pied après l’autre sans te soucier des oasis et des palmeraies. Des caravaniers criards dans les souks. Néglige leurs marchandises. Redresse ton ossature. Tu habites déjà le ciel. Et chaque maison sera bientôt ton foyer. Ne néglige aucun bagage. Pars avec ce que tu es. Le voyage œuvrera à ton délestage. 

 

 

Les circonstances nous honorent. Toujours. Nous invitent à leurs exigences. On a beau détourner le regard. Si l’on ne s’y soumet, elles insistent. Persistent jusqu’à nous soumettre à l’obéissance. 

 

 

Allège ta mémoire. Et tu rendras ton pas plus léger. Oublie les empreintes. Et les plaies ciselées par les circonstances. Abdique la mémoire. Aiguise l’aisance de toute incertitude jusqu’au seuil de l’émerveillement. Entends le cri du destin qui t’appelle. Et vas. Le cœur sans crainte ni chamade. Poursuis l’œuvre qui naîtra entre tes mains. N’écarte rien de la sente. Poursuis l’accueil jusqu’à la désespérance. Et tu franchiras le territoire où la joie est souveraine. 

 

 

Au-dedans de soi demeure la matrice des matrices. N’en force pas la porte. Mais laisse-la s’ouvrir à tes pas. Oublie la consistance du regard. La cohérence des pas. La solidité du monde. Et abandonne-toi au chemin qui scellera la victoire sur toutes les débâcles. Défais l’abîme de tes pieds écorchés. Et tu fouleras le territoire. 

 

 

Renonce à toute prétention. A toute intention. Seules les circonstances ordonnent. Et tu verras tes gestes jaillir de la situation. Déglutis ton espérance. Ou éructe-la ! Et avance sans crainte. L’immobilité au bord de tous les chemins te guidera. Et égayera ton pas. 

 

 

Le mystère si fécond en énigmes. En questions. Et le chemin des réponses si sinueux. Nous usons nos semelles à toute raison. Sillonnant hagards le dernier tronçon de la confiance et de l’errance. Au seuil précis de la destination. Qu’importe alors que nous y entrions ! Qu’importe, la direction. Déjà l’immobilité. La volubilité des semelles. L’effervescence des pas. En haut. En bas. Au-dedans et au dehors. Les excès et les retraits. Les circonvolutions. Les angles trop droits. La course. L’arrêt. Et le départ comme lieu d’arrivée. Et la marche. Le rythme. Et le souffle. Le regard qui écoute et unit. Désagrège les points. Qui deviennent symbole. Métaphore. Sentence. Semence. Pagaille. Ordre préétabli. Démantèlement. Réorganisation. Connivence. Complicité. Duplicité parfois. Accord enfin. Et réconciliation. 

 

 

Pourquoi s’enorgueillir de ses traces ? Qui en ce monde entend l’appel du vent ? La vérité brille-t-elle derrière nos prunelles ? Le regard a-t-il besoin de silence ? Peut-on incarner l’espace ? La paix se joue-t-elle de tout combat ? Existe-il une main dans le ciel (à portée de tous) ? Qui rencontre-t-on dans la solitude ? L’Absolu s’apprivoise-t-il ? L’innocence n’appartient-elle qu’aux gestes justes ? La solitude peut-elle s’habiter ? Quel œil nous observe quand nous regardons ? Le monde peut-il dérouter ? A qui confier son pas ? Y a-t-il un socle sur lequel s’appuyer ? Le chemin a-t-il un sens ? Comment se dévêtir jusqu’à l’os ? Qui aime-t-on derrière ceux qu’on aime ? La liberté se conquiert-elle à mains nues ? Le monde est-il une illusion ? Quel écran nous sépare du monde ? Le ciel est-il toujours hors de portée ? Quel bagage permet-il d’être soi-même ? 

 

 

Tant de traversées rieuses. D’âpres saisons. De déserts. Et de sols chargés de passants. Tant de pas harassants. De soleils inhabités. De larmes versées. D’horizons parcourus. Et de bouches agrippées. Tant de mains tendues. De poings serrés. Et la danse incessante des pas. Cette danse s’arrêtera-t-elle un jour… et pourras-tu trouver ton vrai visage avant le terme du voyage ? Embrasser Ses lèvres cachées dans les replis de l’azur ? 

 

 

Tant de visages. Et de supplices émiettés. Tant de rivages. Et de contrées. De pas hébétés sous l’averse. De rires gorgés de soleil. Tant de ciels parcourus. D’égarements et d’impasses. D’averses et de saisons froides. Tant de silence. Et d’espace. D’amassements et d’encombrements. Reconnaîtras-tu Son sourire parmi les silhouettes sans grâce qui s’affolent au seuil de l’abîme ? Dans quel horizon as-tu dissimulé ton mystère ? 

 

 

Regarde l’obscur. De tes pas. De tes gestes. Et demande-toi : quelle ombre pourrait m’inviter à la lumière ? Marche sans t’attarder sur ton passé. Avale la sente sans un regard pour les paysages parcourus. Ta seule empreinte est ton pas (présent) qui s’efface déjà. 

 

 

Seules les circonstances façonnent le chemin. Et tes nécessités, l’itinéraire. Le reste n’est que paysages. Décor pour le pas. Ne t’attarde sur aucune silhouette. Soulève-les d’un regard. Et poursuis ton errance. Le vent sera ton seul guide. 

 

 

Efface-toi jusqu’à la disparition pour t’emplir de singularité universelle. Alors tu seras toi-même. Désencombre-toi. Et fais-Lui place. Il n’est d’autre alternative. Mais inutile de précipiter la désabondance. Elle adviendra à l’heure juste. Aussi laisse agir et ne te soumets qu’aux nécessités de l’instant. Sois (simplement) à l’écoute de ce qui surgit au gré des circonstances. Et la destination s’offrira. 

 

 

Nulle rive à atteindre. Nul territoire à conquérir. Nul ordre à légitimer. Mais un espace à accueillir. Et se laisser désencombrer. Renoncer au désir même de nudité. 

 

 

A la saison du désamour, ne te précipite vers ton refuge. Tes allées charbonneuses. Tes contrées scintillantes. Fais face de toutes tes lèvres. Et le baiser te sera donné. 

 

 

Pourquoi ensommeilles-tu les anges qui frôlent ton regard ? Et pourquoi t’égayes-tu des tristes masques qui te dévisagent ? La terre se couvre de mirages quand tu implores le ciel. Emiette tes grimaces. Et la grâce te sera accordée. 

 

 

Ne pressens-tu pas le manque qu’il te faudra combler à mains nues ? Oublie tout savoir. Renonce à connaître. Egare-toi. Le trésor est à portée de doigts. 

 

 

La mère de tous tes supplices est ta prétention. Endosse tous les riens jusqu’à la nudité. Marche sans espoir d’envol. Et tu découvriras le ciel au fond de la fange. Dans la boue où tu enlises tes pas. 

 

 

Mille gestes ne pourront te sauver de ton désarroi. Mais un regard saura t’éclairer. Ne clame ton innocence. Ecoute et deviens silence. 

 

 

Ce qui t’éconduit des sommets et te porte au plus bas te livre à toi-même. Et cette offrande te révèle le sens de toutes ascensions. 

 

 

Ne juge point les hommes à ce qu’ils font. Ne juge point les hommes à ce qu’ils sont. Qu’ont-ils demandé à Dieu pour exister ? Le destin se charge de le leur dicter. Innocents aux yeux affamés et aux mains toujours vides. 

 

 

Ne te méprends de frontières. Dévisage l’impossible. L’éternité t’attend, toi qui as l’audace de flétrir l’instant. Toi qui cherches le ciel avec tant de peine, laisse-le en paix. Marche sans t’en soucier. Il descendra au faîte de ton insouciance. 

 

 

Dans le corps un trésor frémissant attend la clé que tu cherches (partout) de tes mains malhabiles. Abandonne le faire. Déleste-toi des identités. Fais face à l’insupportable nudité. A l’inconfort de ne rien être. Laisse le rien tout recouvrir. Draper d’un linceul toutes les épopées. Et tu verras briller au fond de ton cœur ton vrai visage. Ta seule réalité. Alors tu pourras reprendre le faire et l’habiller des multiples masques qu’imposeront les situations. Mais tu auras suffisamment fréquenté la peur et la joie, regardé dans les yeux la vérité pour t’en amuser et accueillir ce qui se présentera. Si les formes t’envoûtent encore, entre dans la danse. Et tournoie. Jusqu’à la disparition du centre. Et tu verras l’espace s’ouvrir. 

 

 

Tu n’es pas de ce monde. Et où que tu ailles, tes pas resteront insatisfaits. Habite seulement le lieu d’où tu viens et les contrées te seront égales. Va et demeure en toi-même. Le monde bientôt deviendra tien. 

 

 

Laisse tes montres et tes chronomètres, ton réveil et tes horloges dont les aiguilles t’endorment. Reste démuni face au temps. Présent à la misère de tes heures. Apprends à te soumettre à tous les défilements, le cil battant ou la paupière close, et tu déchireras l’espace plane qui t’encercle. Laisse-toi anéantir, engloutir. Et tu découvriras la rosace éternelle. 

 

 

Tu as la nostalgie de l’unité et de l’éternité, de la joie et de la paix. Et tu les cherches désespérément à travers les mille pas et les mille gestes que tu poses, chaque jour, sur le chemin. Mais laisse libre ton pantin, fruit de mille conditionnements. Ne le torture pas de ta volonté. Ne lui impose aucune direction. Laisse-le se mouvoir selon sa sensibilité et ses prédispositions. Au gré des circonstances. Laisse-le libre et tu en seras libéré. Laisse-le imposer ses pas. Et tu seras libre du chemin emprunté. 

 

 

Tout ce qui existe en ce monde est tien. Aucune parcelle ne peut échapper à ta gloire. A ton règne. A ta souveraineté. Ecoute et laisse-toi mener. Où que tu ailles, tu seras chez toi. 

 

 

Ne te soumets aux diktats des puzzles. Aucune pièce manquante à ton jeu. Tiens-toi à l’exacte place de l’absence de volonté et de la présence impersonnelle. Et écoute. Ce qui surgira donnera la direction – invitera tous les possibles à ton pas. 

 

 

Laisse mourir le compagnon indigne de tes jours. Inutile de t’y attacher plus que nécessaire. Ses pas désespérés t’ont mené jusqu’ici. A présent, quitte-le et ne te retourne pas. 

 

 

On ne peut se fier à rien. Ni à personne. Aucun état, aucun être, aucune situation, aucune ressource, aucune capacité. Aucun espoir. Rien n’est en mesure de nous aider. Il n’y a aucune garantie. Et de ce sentiment d’extrême vulnérabilité où nous plonge cette absence totale peut alors naître la puissance de l’être. Et le sentiment d’invulnérabilité, d’innocence et de plénitude qu’il procure indépendamment de tout contenu phénoménal. 

 

 

L’essentiel ne peut être exprimé. Il se réalise. Et se vit. Tout – tous les phénomènes – doit être vu du point de vue de la compréhension. Et de sa maturation. Et admettre son mystère. Le laisser agir. Et s’y abandonner. 

 

 

Ces orgies de temps où tu ne t’appartiens pas. Absorbé par les phénomènes. Captif d’un monde imaginaire. A la périphérie de toi-même, tu erres. Pour te distraire du vide que tu es. Incapable encore de supporter le rien, tu t’agites en vain. 

 

 

Quand naîtra le désintérêt de l’abondance (et du remplissage), tu plongeras au-dedans. Remonteras en toi-même. Et en tes profondeurs, tu réaliseras l’être, espace d’accueil de tous les phénomènes. Afin de t’habiter pleinement. 

 

 

Demeure au-dedans. A la source même du regard. Et tu sauras qui crée le monde. Laisse libres toutes choses. Observe leurs mouvements incessants. Tu es ce regard où tout prend place. Tu es l’être. Lieu permanent de l’attention silencieuse. Et de la paix. Tu n’es pas ce qui se meurt. Tu es ce qu’il reste lorsque tout a disparu. 

 

 

Assieds-toi dans l’innocence et le silence. Libre de tes repères et tes références habituels. Et regarde la puissance et la fragilité des phénomènes du monde (manifesté). Regarde comme toutes les formes s’emploient les unes les autres à survivre. Prends note de leurs stratégies. Observe leurs collisions, leurs collusions et leurs déformations incessantes ignorant qu’elles sont un seul et même corps mû par l’énergie, soumis aux lois du jeu, de la nécessité et de la célébration. Et au mûrissement de la compréhension. 

 

 

Eclairé par la seule présence de l’attention. Remonte le regard jusqu’à son origine. Et tu trouveras l’espace que tu n’as jamais quitté. Tu t’étais seulement éloigné à sa périphérie, attiré et absorbé par les objets que tu croyais en dehors de toi-même. Mais tu comprendras que c’est toi seul qui les éclairais et leur donnais vie. Tu es ce regard et tout ce qu’il éclaire. 

 

 

Exilé à la périphérie, tu végètes. Et te dessèches. Il faut te laisser mourir d’ennui et de nostalgie avant de renaître à toi-même. Au cœur de l’être. Au centre de l’espace non localisable. L’attention un instant se distrait, absorbée par le lointain et l’imaginaire. Laissons-la s’égarer. Se perdre. Elle reviendra vers son centre. Sa source. Sa demeure inaltérable pourvu qu’on ne la soumette pas au diktat de la volonté. Pourvu qu’on la laisse libre d’obéir à son propre mouvement. 

 

 

Enracine ton regard à la source. Habite-la sans trace ni attache. Libre de toute volonté d’y demeurer. Et tu seras indifférent aux cours des rivières. Le regard ne s’atteint pas. Il s’habite quand il s’est désencombré de l’inessentiel. Le superflu alors te quitte. Et ne reste rien. Et ce rien est le dernier pas vers le plein – la plénitude – que tu cherchais vainement à atteindre par l’accumulation de l’accessoire. 

 

 

Laisse s’éteindre les bruits. Les distractions et les désirs. Le silence sera le dernier invité. Plus tu te délestes, plus tu jouis de l’être. Mais inutile de renoncer, il suffit d’attendre que tout se détache. Alors l’être occupe tout l’espace. Imperturbé. Imperturbable. Souverain. Retrouvant le fief que l’on s’était malencontreusement octroyé. 

 

 

Aucun frère ne peut te sauver de toi-même. Mais le monde – dépeuplé des hommes – peut te guérir. Seul(e) en ta compagnie, vois-tu qui tu es ? Demeure seul suffisamment longtemps. Et apprends à te connaître. Vois comment tu fonctionnes. Comment tu regardes, observes, apprends, raisonnes. Vois comment tu te parles. Vois ce qui t’attire, te révulse. Vois comment tu réagis. Observe ton propre univers. De quoi il se compose. Note ce qui t’est essentiel. Ce qui te semble superflu. Entreprends ce long voyage. En-gage-toi. Et tu sauras qui tu es. La vérité se fera jour. 

 

 

Ne cherche à comprendre par les mots et les images. Délaisse les concepts. N’engrange aucune connaissance indirecte (ou de seconde main). Découvre et apprends par toi-même. Défais-toi des maîtres et des enseignants. Sois le premier homme. Ce qui est vrai est ce qui est ressenti. Rythmes, vibrations, résonances. Le reste est fiction. Imageries. 

 

 

Pas de chemin. Pas de départ. Pas d’arrivée. Nulle part où aller. Nulle part où rester. La seule demeure est l’être. 

 

 

Rien à chercher. Rien à trouver. Rien à apprendre. Mais un regard et une écoute impersonnels à ressentir. Et à habiter. Pourquoi te caches-tu derrière le visage que tu crois avoir ? Débusque-toi. Et tu verras la supercherie. 

 

1 décembre 2017

Carnet n°44 Une parole brute

Journal poétique / 2012 / Le passage vers l'impersonnel

Sur le parvis des terres blanches, la nudité s’avère l’unique vêtement de circonstance. Atteindre cette gloire désarme toutes les hostilités. Et tous désirs de conquêtes. Peu d’êtres en sont dignes. Non qu’ils ne la méritent mais ils ne peuvent encore se résoudre à se dévêtir de leurs singularités et à abandonner leur particularisme qu’ils continuent d’endosser comme une vaine armure, impropre à les protéger de la misère qu’ils ont toujours tenté en vain de fuir.

 

 

Il allait là où la vie le poussait. Jusque sur les terres les plus rocailleuses. Allant son chemin sans jamais réclamer son dû. Ebloui par le soleil. Tous les soleils. Dégrafant ses yeux des sommets. Et s’agenouillant à la face du monde. Parcourant l’échelle sans barreaux des abysses. Et franchissant les gouffres. Invitant tous les déserts. Et voyant les temples s’ouvrir. Les arbres et les fleurs pousser sur les allées. Effaçant sa présence pour achever (enfin) le préambule de la marche.

 

 

De l’innocence naît la candeur du jour.

 

 

En tous points les brumes obscures se dissipent. Laissant libres les perspectives.

 

 

L’Invité se tiendra à toutes les tables pourvu que tu y sois - présent.

 

 

L’horloge se brisera sous le poids de la présence. Et tu verras les aiguilles défaire les nœuds de tous les passés. Défiler toutes les incertitudes à venir. Et tricoter l’instant sans souci des mailles.

 

 

Au faîte de ta gloire, tu seras clochard ou va-nu-pieds. Rois de toutes les contrées.

 

 

Il y a derrière la lune un horizon sans tenaille. Et à son seuil, des lèvres saillantes qui avalent et recrachent. Une bouche béante qui laisse toujours neuf. Et sans blessure. Et sur terre, quelques doigts maladroits qui la désignent et des myriades de prunelles hagardes qui regardent (partout) sans comprendre…

 

  

A la saison du désamour, ne te précipite vers ton refuge. Tes allées charbonneuses. Tes contrées scintillantes. Fais face de toutes tes lèvres. Et le baiser te sera donné.

 

 

Nul abîme à parcourir. L’abandon est le seul franchissement.

 

 

Les arcs-en-ciel se jouent de nos rêves. Et nos ponts n’enjambent que des rives mortes. De la terre, le ciel n’est accessible qu’à l’innocence. Aux lèvres émues et silencieuses. Ebahies par tant de splendeur.

 

 

Pourquoi  ensommeilles-tu les anges qui frôlent ton regard ? Et pourquoi t’égayes-tu des tristes masques qui te dévisagent ?

 

 

La terre se couvre de mirages quand tu implores le ciel. Emiette tes grimaces. Et la grâce te sera accordée.

 

 

La peur ne dissipe les râles. L’écho féroce des cris qu’on ravale d’un hochement de tête.

 

 

Retire-toi de tout orgueil. Reviens au centre de tous les cercles.

 

 

Ne pressens-tu pas le manque qu’il te faudra combler à mains nues ?

 

 

Oublie tout savoir. Renonce à connaître. Egare-toi. Le trésor est à portée de doigts.

 

 

La mère de tous tes supplices est ta prétention. Endosse tous les riens jusqu’à la nudité.

 

 

Le secret, chacun le porte en soi. Voilà pour quoi il convient de se dévêtir.

 

 

Il n’y a qu’un seul sillon à creuser. La pente où Dieu nous a placés. Mais pourquoi [Diable] nous a-t-il posés là ? Renonce à comprendre. Et avance. Suis la pente. La réponse se dessinera jusqu’à l’extinction de la question.

 

 

Marche sans espoir d’envol. Et tu découvriras le ciel au fond de la fange. Dans la boue où tu enlises tes pas.

 

 

La mort n’est rien sous le préau. Ni en salle d’étude. Mais qu’en est-il sur la tombe ? Et sur la funeste allée qui y mène ?

 

 

Les fleurs séchées oubliées dans les cimetières. Sur nos tombes de poussière, le soleil scintille entre les particules.

 

 

De gré ou de force. Il faut choisir entre la violence et la pente que le destin nous a choisie. Pourquoi changer de versant et s’éreinter à l’escalade alors qu’il est si facile de suivre le chemin où nos pas se dirigent naturellement ?

 

 

Il devait sa fortune au soleil. Et son destin à la terre. Mais il trébucha sur quelques pierres et finit par s’enliser dans quelque zone marécageuse alimentée par la pluie.

 

 

Que l’on me montre le chemin ! criait-il. Et il n’avait devant les yeux que des dunes et des pierres. Des montagnes et des déserts interminables.

 

 

Il demanda à la nuit d’ouvrir ses veines. Pour offrir son sang aux jours maudits. Il demanda au soleil d’éclairer ses lèvres. Pour panser ses peines et les cœurs - ensommeillés et meurtris - rencontrés en chemin. Puis il demanda aux jours un peu de répit et au ciel d’ouvrir une fenêtre. Et il s’enfuit.

 

 

Il se souvint de ses frères qui baillaient assis devant le jour. S’encanaillant et faisant ripaille toutes les nuits. Surpris qu’un matin la mort vienne les chercher. Mais nous n’avons pas fini de nous amuser, braillaient-ils.

 

 

Mille gestes ne pourront te sauver de ton désarroi. Mais un regard saura t’éclairer.

 

 

Ne clame ton innocence. Ecoute et deviens silence.

 

 

Ce qui t’éconduit des sommets et te porte au plus bas te livre à toi-même. Et cette offrande te révèle le sens de toutes ascensions.

 

 

Ne juge point les hommes à ce qu’ils font. Ne juge point les hommes à ce qu’ils sont. Qu’ont-ils demandé à Dieu pour exister ? Le destin se charge de le leur dicter. Innocents aux yeux affamés et aux mains toujours vides.

 

 

A l’affût de l’aube. La prunelle toujours hagarde.

 

 

Quelle impasse à tes jours que tu ne peux contourner ? Combien de barrières te faudra-t-il (encore) franchir ?

 

 

Ne regarde plus (avec tristesse) le chiendent. Mais bois à sa rosée.

 

 

Nul ne peut contenir la source. Mais écoute ceux qui s’en font l’écho. Ceux qui vibrent à sa résonance. 

 

 

Une odeur de foin sec se cachait derrière ses fagots. Et à l’échelle une fenêtre sur le ciel

 

 

Au cœur du labyrinthe, une forêt de palissades. Et un horizon dévoilé derrière toutes les brumes.

 

 

Entre les ratures de ta nuit, une écriture nouvelle. Dégagée des syntaxes et des règles pesantes. Des traits de lumière qui abreuvent les yeux fatigués.

 

 

Ne te méprends de frontières. Dévisage l’impossible.

 

 

A qui goûte le simple, un banquet de saveurs orgiaques est offert.

 

 

Les étoiles ne se lisent à l’aveuglette. Et à la vue claire se dérobent. Oublie la lueur. Regarde le reflet qu’elles ont laissé dans ton âme.

 

 

Le ciel pourrait soupirer de notre aveuglement. Mais il nous aime sans exigence.

 

 

L’éternité t’attend, toi qui as l’audace de flétrir l’instant.

 

 

L’éternité s’avance toujours à pas dé-comptés.

 

 

Pierres du chemin, petits tertres d’où il faut s’élancer

 

 

Chacun porte en son for intérieur une croix. Appui vertical où s’édifie toute la saveur des horizontalités.

 

 

Dans sa main du sable qu’il avait pris pour de l’or. Et ses yeux regardèrent ses doigts avec tant de reconnaissance. Il savait à présent où se lève le soleil.

 

 

Dans tes profondeurs, un ciel si vaste t’attend. Garde donc les yeux clos. Et le monde viendra (bientôt) à ta rencontre.

 

 

Le ciel supporte sa charge. A l’homme de porter la sienne. Les arbres, eux, en connaissent les joies et les peines. Toutes les libertés de l’enracinement.

 

 

Ô toi que la terre rassure, écoute le ciel s’ouvrir et descendre en tes basses contrées.

 

 

La nuit n’est jamais trop noire pour celui qui cherche la lumière.

 

 

Toi qui cherches le ciel avec tant de peine, laisse-le en paix. Marche sans t’en soucier. Il descendra au faîte de ton insouciance.

 

 

Seules l’herbe et les bêtes laissent le vent les caresser. L’Homme est trop frileux pour se laisser toucher (et atteindre).

 

 

Le ciel se laisse parcourir par les nuages. Et par nos rires. Même nos pleurs sont invités. Le ciel est l’hôte de nos éclaircies et de nos jérémiades.

 

 

Au bord des frontières se terre le silence. Derrière nos abîmes, il attend notre traversée.

 

 

Le quotidien a ses secrets que nous prenons pour des fadaises ou des lourdeurs. Tant est insensible notre œil.

 

 

Les forêts sont nos tanières. On s’y refugie pour regarder le ciel à travers les feuillages. Comme si les interstices étaient nécessaires à notre regard (prisonnier). Comme si l’infini était encore trop grand pour nous.

 

 

Prends appui sur ce qui te déstabilise. Et ton pied s’affranchira des circonstances.

 

 

Il me plairait de toute évidence d’estomper les siècles. De renoncer à toutes ces orgies de temps où l’on s’ensommeille. Pour m’éveiller à la rosée toujours fraîche des heures.

 

 

Deux souliers en attente de pas. Usés déjà par les prémices de la marche.

 

 

Qu’un seul mot puisse changer le monde ! Et j’écrirais des montagnes. Pour que les Hommes puissent s’élever enfin.

 

 

L’Autre n’existe pas. Le jeu s’accomplit toujours entre soi et soi.

 

 

Minuit s’enracine dans les pires terres. Et le soleil de midi est (déjà) passé.

 

 

Derrière chaque fenêtre les murs se lézardent. L’ouverture n’a d’autre dessein : abattre les frontières.

 

 

Au bord du cœur, règne la mièvrerie. Et en ses tréfonds une âme palpitante refuse le langage de l’amour mais sait l’incarner au plus juste.

 

 

En l’éclaircie abstraite, nulle percée. Seule la trouée manifeste exauce.

 

 

Le monde succombera par le silence. Jamais par la faux ni par l’épée.

 

 

L’erreur ne vient pas des yeux. Mais du regard. Si souvent prisonnier.

 

 

Que la vallée s’illumine sous le feu du regard ! Et que les voiles s’enflamment !

 

 

Dans le corps un trésor frémissant attend la clé que tu cherches (partout) de tes mains malhabiles.

 

 

Une joie d’atteindre l’inconnu qui sommeille. Et s’étire sous la main.

 

 

L’orée sans nom des confins.

 

 

Il n’y a aucun écart à combler entre le juste et le non-juste. Tout ce qui advient arrive juste.

 

 

Qu’importe les saisons si le vent pousse.

Et qu’importe le vent si tu sais être les saisons.

Les bourgeons naissent.

Les fleurs éclosent.

Les feuilles tombent

Et toi où as-tu posé tes jours ?

 

 

A la saison passante

Les masques

Regardent les bourgeons pousser

Les fleurs éclore

Et les feuilles tomber

S’imaginant suivre

Le cycle imperturbable des saisons

Le cycle du temps qui passe.

 

 

La joie libère de tous sommeils. Et de tous repos.

 

 

A portée de vent jamais tu ne succomberas. A portée de mains des doigts t’agripperont. Te serreront le cou. Et t’étrangleront dans la gloire ou l’opprobre.

 

 

Il n’y a de jours solitaires.

 

 

L’histoire n’a de sens qu’à son terme.

 

 

Le tumulte des années sauvages s’estompe.

 

 

Parsème tes allées de beauté. Et les fleurs pousseront sur tes terres les plus arides.

Parsème tes prunelles de beauté. Et tu verras partout fleurir le monde.

 

 

Un masque s’étiole pour un autre plus lointain. Plus profond. A quoi bon dénicher les masques si le sourire derrière les lèvres fait merveille, égaye l’objet du regard – et la source même de toute vision ?

 

 

La multitude n’a d’autre dessein que l’émerveillement.

 

 

Il n’y a de grimaces hideuses. Mais une souffrance parfois terrible qui défigure le visage des hommes. Que leur âme ne prend encore la peine de soulager. Il suffirait pourtant de 3 fois rien pour les convertir à des lèvres tendres. A une bouche aimante pour apaiser leur peine. Et ce trésor est en eux-mêmes encore enfoui sous la tristesse.

 

 

Les générations se succèdent sans bonheur. Sans joie. De tristes lignées où la morosité suinte des visages. Avec l’émerveillement pourtant si proche des lèvres.

 

 

Une folie ensorcèle le monde. Et je ne sais que faire pour arrêter ces yeux furieux. Je les laisse à leur labeur. Me tenant coi. Me laissant transpercer quand il le faut.

 

 

L’abandon est le seul travail. L’œuvre de la vie sur nos résistances. Celles que l’on a façonnées dans la crainte de vivre.

 

 

Vers quel miracle te diriges-tu, toi dont les yeux sont dessillés ? De quels mirages t’éloignes-tu ? Vois-tu les hommes au loin courbés sur leurs peines ?

 

 

Défaites les prunelles de glace. Liquéfiées par l’ardent soleil.

 

 

Le visage s’émancipe avec la clarté.

 

 

Toute question cherche son extinction.

 

 

Il est des poètes démunis qui ouvrent les bras à l’instant qui les sépare d’eux-mêmes. Et des poètes dont les mains habiles jettent leurs songes sur la page. Mais il n’y a d’effacement au creux des songes. Mais des mains démultipliées qui portent au pinacle les visages qui s’usent. Alors que l’usure des yeux soulève celui qui s’échinait à percer le mystère sous ses plaies. Une invitation à l’oubli. Jusqu’au renoncement du regard sage autrefois tant convoité.

 

 

Dans le repère glacé de la fortune, les âmes avides grelottent.

 

 

Exténuez les siècles jusqu’au firmament des âges. Jusqu’aux horizons maudits des perspectives. Dégorgez les panses. Déversez les entrailles des mille projets terrestres. Acérez l’œil neuf qui patientait sous les prunelles carnassières. Et allez libres des entraves qui obstruaient les chemins !

 

 

Estomaqué par l’absurde balancement des aiguilles. Et les heures chavirées.

Un chemin s’initie entre les pierres.

 

 

Toute connaissance doit se vouer à la non-connaissance.

 

 

La vie est sans retour. Allées et venues. Saveur de l’éphémère.

 

 

Le rien est une poudre blanche. La neige est notre seule héroïne.

 

 

Pour écouter l’Autre, il faut d’abord s’écouter. Etre réceptif à sa propre résonance pour entendre le cri - souvent étouffé - de l’Autre. Obéir instinctivement au programme édicté par le mental est un manque d’écoute. Une surdité à soi-même. Quant à suivre les lois du monde, voilà une éloquente façon de renoncer à entendre sa propre voix. 

 

 

Abandonne le faire. Déleste-toi des identités. Fais face à l’insupportable nudité. A l’inconfort de ne rien être. Et tu verras briller au fond de ton cœur ton vrai visage. Ta seule réalité. Alors tu pourras reprendre le faire et l’habiller des multiples masques qu’imposeront les situations. Mais tu auras suffisamment fréquenté la peur et la joie, regardé dans les yeux la vérité pour t’en amuser et accueillir ce qui se présentera.

 

 

La vertu est la peur de l’innommable que l’on porte en soi et que l’on cadenasse à coup de principes.

 

 

Dans quelle armure de glace t’es-tu fait prisonnier ?

 

 

Il faudrait savoir habiter ses pics comme ses abîmes. Et abandonner ses forteresses à leur gardien invisible. Pour régner sur le royaume de l’innocence.

 

 

Une âme soumise à la torture de sa propre histoire. Sans histoire. Ni bourreau ni victime. L’éternel demeure.

 

 

Tu ne peux rien dire du Tout.

Moins que rien.

Il y a le silence.

 

 

Si les formes t’envoûtent encore, entre dans la danse. Et tournoie. Jusqu’à la disparition du centre. Et tu verras l’espace s’ouvrir.

 

 

L’escalier mène vers nulle part. Ce lieu magique que l’on ne quitte jamais. Pourquoi dès lors se mettre en marche ? Pourquoi gravir ? Mais de quelle ascension parle-t-on ?

 

 

Il rêvait de voir s’écarter toutes les dimensions de l’aube. S’effacer la nuit. Pour que naisse une clarté nouvelle. Et que s’ouvre chaque matin un jour neuf.

 

 

L’incommensurable passion du rien.

 

 

Le faire se détache peu à peu des sphères habituelles. Et l’être survient.

 

 

Le malheur s’abandonne à lui-même. La nostalgie s’efface. La tristesse devient joyeuse.

 

 

Les pas se dégagent des sentiers communs. Pourtant la silhouette est la même sur la longue route grise qui traverse le monde. Mais les lèvres écarlates se sont entrouvertes aux vents des malheurs. La peur s’est déracinée de ses lobes. Les yeux pétillent de malice en croisant les passants. La foule des passants harassés. Encore perdus peut-être…

 

 

La besace s’est ouverte. Rien à l’intérieur. Quelques traces de la quête ancienne qui s’effilochent au vent.

 

 

Les silhouettes poursuivent leur danse. Tragique et effrénée. Mais on a quitté le bal. On a quitté la ronde. Les pas s’envolent vers la lumière. Le spectacle demeura éternel. Mais les yeux sourient aux danseurs. A la piste cabossée où s’élancent les yeux affamés. Et les cœurs insatisfaits.

 

 

L’esprit autrefois si fertile fréquente à présent la stérilité des territoires où les fleurs pourtant s’ouvrent sans pensée.

 

 

L’agonie du personnage devient une fête. Une célébration. Les noces du rien et des silhouettes. L’union au grand Tout. L’union du burlesque et de la tragédie. Le mariage de la grande tribu. Avec ses rites et ses sacrifices. Ses larmes et un vent de joie qui enveloppe et traverse tous les membres de la cérémonie.

 

 

Le rien a tout recouvert. Drapant d’un linceul toutes les épopées. Toutes les pyramides se sont effondrées. Tout se côtoie sur un sol délicat. Les pétales jonchent toutes les batailles. Les sols exsangues. Et les corps ensanglantés. L’innocence règne sur tous les territoires. Les tyrans tirent toujours les fils de leurs édifices. Les esclaves se soumettent toujours au joug de leurs bourreaux. Mais la pureté reste intacte. Immaculée.

 

 

La route est sinueuse pour les yeux aveugles. Mais le chemin disparaît dans le regard.

 

 

Le chemin s’invente. Et s’efface aussitôt. Les formes apparaissent. Et se transforment aussitôt. Et la présence rayonne. Reflétant le Tout dans la multitude de petits riens.

 

 

L’horreur conserve son masque. Mais aucun visage n’est bafoué.

 

 

Les yeux pourfendent toute lâcheté.

 

 

La contemplation s’intensifie. Le monde n’est pas banni. On honore l’univers. Mais les yeux ne sont pas dupes de leur inexistence.

 

 

Rien n’entrave. Rien n’aggrave. Rien n’épaissit. Le regard clair voit. Pénètre toute opacité. Désagrège le monde avec douceur et volupté.

 

 

Les cercles sans fin s’estompent. Laissant place à un immense carré sans bordure (ni frontière) qui se déforme au gré des circonstances, laissant apparaître ici et là quelques visages accorts ou patibulaires qui se caressent (s’engrossent) ou se déchirent selon les besoins. Obéissant aux mêmes cycles que le mouvement des étoiles.

 

 

L’espace s’ouvre et se referme telle une bouche qui avale et recrache la matière.

 

 

L’esprit se limite à ses fonctions. Le cœur s’enhardit. Et s’ouvre. Se gonfle jusqu’aux limites de lui-même. Découvre sa dimension infinie. S’extasie de sa capacité et de son potentiel. Puis éclate en une multitude de sourires sur les lèvres passagères.

 

 

La gloire s’agenouille vers l’en-bas. Défait les points cardinaux et les jette dans le tourbillon des formes haletantes.

 

 

Nul trophée n’est nécessaire. Les médailles pleuvent à chaque geste. Et chaque pas est une coupe débordante. 

 

 

La lucidité s’aiguise sans artifice.

 

 

Le divin et le démoniaque s’unissent sans tragédie. Et enfantent des perles noires au cœur incandescent.

 

 

La vitalité s’immisce où le cœur accueille.

 

 

Les bêtises égayent les enfants sages. Et les adultes applaudissent de tant d’espièglerie.

 

 

Les âmes s’impatientent encore devant quelques trouées de lumière. Mais se réjouissent à présent de toute obscurité.

 

 

L’arrière-plan accueille toutes les formes bigarrées. La transparence invite l’essence à se révéler.

 

 

La perfection du monde est à l’œuvre. Les fêtes succèdent aux guerres. Les batailles deviennent célébration. Puis les célébrations des batailles. Et nul ne s’en émeut. Les yeux humides n’ont plus cours. Les sourires vainqueurs comme les visages balafrés participent à toutes les apothéoses.

 

 

La terre s’encombre d’échafaudages et de projets de construction. Et les yeux s’amusent de cet élan vers le ciel. Le sable est toujours si peu propice aux édifications.

 

 

L’air se raréfie. La pollution contamine les fluides. Mais le cœur n’a cure des impuretés. Son oxygénation est ailleurs.

 

 

La famine, les épidémies prolifèrent. La matière est soumise à rude épreuve. Les silhouettes trinquent. Les mains s’agrippent. Les corps se débattent. Mais les âmes ne sont-elles pas libres ?

 

 

La joie se déverse sur les cœurs attristés. La fin du monde est proche peut-être. Mais a-t-on déjà vu un phœnix s’éteindre dans ses cendres ?

 

 

Les blâmes s’estompent. A quoi bon, en effet, protester ? Et condamner les mains innocentes ?

 

 

Sous ses masques, le personnage a peur de l’espace qui pourrait lui révéler son vrai visage.

 

 

L’espace s’intensifie. Et la matière se désagrège.

 

 

Quelle est la vérité du mensonge ?

 

 

A mi-chemin entre les dérobades et les saisies.

 

 

La nudité révèle l’homme qui peut dès lors revêtir tous les costumes. Et laisser son personnage jouer parmi les circonstances.

 

 

Nul ne comprend. Mais la compréhension advient. Et les larmes coulent sans tristesse.

 

 

Une ardeur caressante parfois le traversait. Et ses sens effaçaient toute possibilité du sens. La pensée anéantie par le corps. Et la sensibilité pointait vers le seuil du territoire infini où les formes et le vide tournoyaient, se mêlaient en mouvements ténus et en grandes arabesques. Comme une symphonie grandiose où le chaos devenait harmonie.

 

 

Les pierres du chemin rejoignaient le lit de la rivière qui l’avait guidé jusqu’à elle et ne l’avait jamais quitté. Elle, source de toute existence.

 

 

Les princes et les mendiants. Les marchands et les prostituées. Tous les héros et les damnés de la terre pouvaient à présent s’inviter à sa table. Les messagers des dieux et les mécréants. Les saltimbanques et les fonctionnaires. L’office était ouvert à tous. Fils du même fil. Enfants du même bol. Attablés ensemble. Mus par le même désir de complétude et de paix.

 

 

Secoué par de grands bouleversements silencieux. Avec ce sourire dansant sur le visage. Les gestes semblables, les pas identiques et les paysages inchangés. Mais le cœur avait repoussé ses frontières. Respirait enfin. Libre de ses entraves passées. Reconnues, apprivoisées patiemment, et accueillies. Ainsi avait pu naître le sourire à toutes les circonstances.

 

 

Il y a des livres qui nous emplissent de mots. Et d’autres, trop rares, qui nous ouvrent au silence. Seuls les seconds guérissent et apaisent notre faim de vérité.

 

 

Pourquoi espères-tu le ciel du lendemain ? Et pourquoi refuses-tu la terre d’aujourd’hui ? Ne vois-tu pas le soleil toujours vivace derrière les larmes - et sous la pluie ?

 

 

De grandes enjambées de plumes te garderont de la pesanteur du monde.

L’acquiescement aux circonstances. Seule vérité de l’instant.

 

 

Oublie la trace des saisons froides et le parfum des saisons enivrantes. Et bientôt le climat n’aura plus prise sur ton regard.

 

 

Habite pleinement la présence, et rien ne te semblera étranger. Le monde déroulera sa danse à sa mesure. Et tu t’égaieras de tous les pas sans te soucier des rondes qui se font et se défont au gré des danseurs et de leurs fantaisies. Tout mouvement attisera ta joie et ton émerveillement.

 

 

Le vide des cieux couchants

Et l’innocence de l’aube

Déchargée de tout horizon

Défont le sens de toutes promesses

Les ruses et les élaborations de l’esprit trop soucieux de certitude

Avide de guider le hasard et les circonstances

Vers des contrées plus sûres et moins rebelles

Moins rétives à la raison

S’affairent à parer à toutes éventualités

A tout surgissement de la matière

Dans le vaste jeu du monde

Au contraire, il te faut te dessaisir de tous accaparements de territoires

De tous assujettissements des êtres

Que tu empiles - de façon si vaine et coutumière - comme des trophées

Symboles de tes chimériques victoires

Sur la perte et l’impossible deuil de tes limitations

Il te faut au contraire détrôner

Toutes solidifications des frontières toujours souveraines

Aux pays des contes où les mythes

S’étendent et s’étalent jusque dans les profondeurs de l’obscurantisme

De toutes les croyances profanes et sacrées - toujours encensées par le monde

De tous les dogmes auxquels se prêtent et se livrent les hommes

Soumis à l’enchevêtrement des conditionnements

Ainsi seulement pourras-tu être sauvé de tous espoirs

De tous les chemins de sacrifices et d’artifices

Pour t’enfoncer dans une vérité insaisissable

Aux enjeux métaphysiques d’une puissance inédite

Te vouant et t’ouvrant aux territoires les plus infréquentés

Où les risques demeurent nuls et sans prise sur les destins

Où la gloire et les riens se chevauchent et s’emmêlent avec fantaisie et sans certitude

Où l’intelligence et l’amour brillent d’un feu jamais à l’agonie

Tirant leur source d’une étincelle jamais née

Aussi vive et impénétrable que la lumière sans origine

Qui offre au monde une présence infiniment tangible.

 

 

Tout ce que l’on rencontre est nécessaire pour affûter la compréhension. Toutes les circonstances comme autant de portes ouvertes pour affronter ses peurs et laisser mourir ce que nous ne sommes pas : idées, pensées, idéaux, représentations et voir malgré cette lente agonie que subsiste toujours quelque chose, un sentiment d’être, une présence, une existence perçue comme de moins en moins personnelle.

 

 

Le malheur tient à peu de mots : croyances et représentations. Et la joie avance à tâtons sur ce chemin de brûlis, dans l’accueil progressif de ce qui se présente. Jusqu’au seuil de l’inconditionnalité. L’écho des situations résonne parfois longtemps, laissant quelques marques tenaces sur nos contrées singulières. Mais il ne s’agit nullement d’œuvrer à leur effacement. Mais de les laisser s’étendre. Alors seulement à leur apogée, pourront-elles commencer à se résorber, à leur rythme, jusqu’à leur résorption dans le silence indemne.

 

 

Un paysage de volutes blanches où toutes les formes deviennent égales. Comme un décor emmêlé et changeant. Comme posé là sur un territoire vierge et inaltérable.

 

 

Un jour, il buta sur un réceptacle d’ordures auquel nul dans son entourage ne fut jamais confronté. Un dépotoir d’affects et de peurs, d’angoisses et de cruauté. Toute la violence du monde étalée jusqu’à son origine la plus archaïque. Il leva la tête et se heurta à un ciel sombre et bas, couvert de cendres et de larmes. De nuages étouffants. Encerclé de toutes parts. Tous les horizons emmurés. Cerné par les édifices dérisoires qu’il avait érigés pour épargner, croyait-il, un espace en lui inhabité, vierge de toutes tentatives d’intrusions, illusoires remparts évidemment. Il brûla toutes ses idoles de papier. Rencontra ses pires démons et quelques diablotins espiègles. Mourut de peur mille fois et se releva de chaque rencontre, toujours plus blême et exsangue des forces vitales qui l’avaient jusqu’alors maintenu dans une posture vigilante. Il pressentait pourtant que tous ses combats seraient perdus d’avance et qu’à chaque épreuve traversée, il sortirait un peu plus victorieux (de lui-même). Toujours plus assuré de son effroyable nudité. Plus robuste des béances entaillant son armure illusoire, carapace inutile protégeant en lui un espace vide et chimérique. Inexistant.

 

 

Dans cet enchevêtrement de lianes, de racines et de branches pointées vers le ciel, demeure un espace ouvert (à la fois enveloppe et interstice) qui accueille tous les contenus - conditionnés de mille manières - acceptant qu’on le comble et l’aménage selon les fantaisies de l’instant, supportant la folie et la sagesse, l’ordre et le chaos, la maniaquerie et la désinvolture, les rengaines et les errances, la droiture et la fourberie. Toutes choses en vérité. Dans cet espace, tout est accueilli et invité à suivre sa pente. Et à en changer au gré des circonstances. Chaque être et chaque chose y tiennent une place et un rôle. Et les besoins de chacun appellent les rencontres, les évènements et les évolutions. Ici, nulle hiérarchie. La fleur n’est pas moins que le baobab. Le brin d’herbe pas moins que le séquoia. Cantonniers et savants, réverbères et étoiles, Dieu, les hommes, les pierres et les verres de terre sur le même fil d’égalité.

 

 

Aux origines, l’espace s’est transmué en matière. Puis advient le temps où la matière appelle sa transmutation en espace. Les objets alors deviennent transparents et invitent le regard habité par la présence à les traverser.

 

 

Ta nuit est peuplée d’un milliard de regards tournés vers l’unicité qui les habite.

 

 

Un espace éclairé au-delà de toute lumière. Un gouffre au-delà de toute obscurité.

 

 

Englué dans le magma phénoménal (et libre pourtant de toutes manifestations), surplombant les délices et les peines, les misères – petites et grandes – du monde, la résonance toujours intacte s’amplifie. Et tu joins à présent timidement les mains en signe de reconnaissance envers ce monde si proche et si familier. Cet univers (sans frontière). Echo direct de la présence où tu habites désormais en secret malgré les oscillations et les soubresauts émotionnels qui agitent encore les résidus indestructibles où s’est abritée ton âme. Et tu jouis à présent (et malgré tout) de cette connaissance « inconnaissante ». Dans ce territoire toujours neuf où se déroulent toutes les histoires du monde, où naissent et se résorbent tous les phénomènes, les évènements, les situations et les rencontres incessantes entre les formes.

 

 

N’être plus personne. Une folie impensable à la folle cécité du monde qui estime, au-delà de toute raison, conserver une lucidité rassurante sur l’existence de son apparente réalité.

 

 

On ne s’éprend pas du monde, de ses illusions et de ses mirages sans payer le prix de cette lucidité infirme et invalidante. Borgne et apocryphe.

 

 

Tout laisse croire au dehors peut-être à une surprenante et docile soumission alors que règne au-dedans la puissance souveraine du « oui » inconditionnel qui laisse entrevoir parfois son insoutenable majesté.

 

 

Un rite sans fin auquel tu es invité où le sacré est célébré jusque dans tes gestes les plus triviaux et tes plus insignifiantes activités. Instants glorieux où tu succombes. Tristesse inhumée, dissolue. Cisaillée par une écoute ininterrompue qui la vide de toutes substances susceptibles de (nous) meurtrir. Définitivement soudé à l’espace, toute inquisition se défait dès son origine. Anéantie avant toutes tentatives d’invasion.

 

 

L’espace démuni et vierge de toutes victoires où la gloire sonne à toutes les portes, à toutes les boîtes au contenu indifférent.

 

 

Cette crainte de la souffrance qui ouvre nos battants à tant de souffrances surajoutées. Et la peur de voir partir ce qui ne nous appartient pas…

 

 

La vie jaillit avec tant de fougue et de bouillonnement de cet espace épuré - et si tranquille - qui crache et avale pourtant tous les phénomènes de sa manifestation.

 

 

Un ciel sans combat. Témoin de l’hostilité qui habille la terre. Un ciel si pur. Contemplant tous les costumes et les parures de ceux qu’il a engendrés, habillant et déshabillant tous les personnages. Vêtements si changeants. Spectacles infinis d’un seul regard. Toujours unique.

 

 

Comment faire naître des rapports humains qui ne soient soumis, malgré le vernis parfois de quelques civilités et aménités aux joutes, à la violence, à l’avidité et à l’instrumentalisation sinon par l’entremise de cet espace, de ce territoire non localisable que nul ne peut s’approprier ni détenir… territoire commun à tous, territoire de l’être et de la présence que chacun habite et qui peut lui être révélé.

 

 

Creuser en soi cet espace, voilà le travail de l’Homme !

 

 

Se défaire de toutes les pelures accumulées au cours des âges dans l’inavouable, mesquin et pourtant inévitable dessein de se protéger des dangers – réels et potentiels – du monde pour ne trouver bientôt qu’une vulnérable nudité, puis quelques temps plus tard, moins encore, et bientôt plus rien ni personne hormis ce grand vide de paix et de silence, de joie et d’émerveillement où tout est à la fois familier et donné à voir pour la première fois.

 

 

Dans l’opulence marécageuse des bas-fonds se débat et suffoque la vermine. Aussi à l’aise dans la fange que les anges le sont au ciel. Mais quel affligeant et insupportable spectacle ! La vie organique à son stade le plus archaïque. Le grouillement animal de toutes ces formes terrestres. Naissance, lente déliquescence ou violente rupture jusqu’à la mort. Puis le cycle reprend. Aussi infernal que les précédents. Ronde macabre où la matière est livrée à elle-même. Sans autre but que la survie, la défense et le combat avec ça et là quelques interstices de tranquillité. Précaires et illusoires abris dans cette jungle endiablée soumettant toutes ses créatures aux supplices de leur condition.

 

 

Face au mystère de l’Homme – et de son destin – quelques-uns parviennent à percer l’opaque épaisseur de leur nature. Au prix d’âpres et parfois insurmontables difficultés. Réussissent à traverser, une à une, les couches innombrables qui enveloppent et encerclent leur être fondamental.

 

 

L’Homme est un curieux animal, une forme hybride engluée dans les mille conditionnements de la matière et dotée pourtant de quelques accès à un espace qui l’habite et l’environne. Une étrange créature qui ne peut se résoudre à se complaire totalement dans la fange organique où elle semble détenue.

 

 

Dans l’éclat des jours sombres, une infernale beauté envoûte ta prunelle hagarde. Et tu sombres, ébahi, vers l’insoutenable précipice. Impuissant à endiguer ta chute. Comme aimanté par l’improbable envol, tu suis la sente. La pente toujours plus abrupte. Et dépouillée. Comme un désert vidé de toutes manifestations. Comme un brasier glacé où l’âme personnelle perd tout sens. Et toute orientation. Un délice piquant. Une douceur déchirante. Un matelas d’épines et de pétales où seules les assises robustes, vidées de leurs peurs les plus tenaces et de leurs trop grandes fragilités peuvent accueillir tous les riens régnant sur tous les royaumes, tous les abysses, tous les sommets et toutes les anfractuosités. Règne du nouménal dans le monde manifesté.

 

 

L’étreinte de la chair et du vide où les ailes les plus ténues portent les carcasses encore chargées de peurs, d’espoirs et de mirages. Frêles embarcations dans les flots ravageurs, dans le mouvement chaotique des formes qui se frôlent, s’étreignent, s’aspirent et se heurtent dans une danse macabre et implacablement salvatrice. Au cœur des dangers trône l’espace sécure. L’abri sans frontière où le vent se mêle aux tourments, aux plaintes, aux cris et aux joies qui explosent aux oreilles et laissent sur les lèvres un sourire ineffable jusque dans les défaites les plus insurmontables. Une incompréhension assumée. Un goût d’éternité et de félicité indicible.

 

 

L’histoire sans fin des êtres ignorant leur origine non-née. Ainsi se poursuit la danse. La ronde incessante du monde enchevêtré. Englué dans l’ignorance de sa nature. Quel sublime et effroyable tableau où les personnages (tous) égarés ne se sont jamais réellement perdus… toutes les dimensions les habitent. Mais cette méconnaissance provoque les mille histoires, les mille voyages nécessaires pour échapper vainement au spectacle de ces destins peints sur la grande toile - toujours vierge - aux couches innombrables et aux multiples carrefours.

 

 

Se défaire de toutes les plaies du monde n’endiguera pas l’origine du sang. Et de tous les saignements assassins qui nourrissent la terre, cette fange qui alimente des générations de vermines et de cloportes rampant sur les routes en quête d’un plus digne destin.

 

 

Les joies de l’âme isolée qui peut enfin rencontrer le monde. Pleinement. Comme l’écho familier de sa propre voix. Reflet de ses propres paysages. Dans un éternel émerveillement d’elle-même. Tout lui appartient.

 

 

Perdu dans les cieux abyssaux qui redressent sa chair et ouvrent ses lèvres au sourire, il contemple le monde en lui qui virevolte, enchaîné à la danse qui tourne les têtes, agite les corps et soumet les cœurs à d’impitoyables chevauchées. Témoin de ces paysages obscènes dans des décors de carton-pâte, il sent le rêve attiser leur ardeur. Songe de papier dont l’emprise s’étiole à mesure qu’il s’éloigne. Bercé par les oscillations sans retenue d’un réel perdu entre plusieurs vérités comme autant de rideaux voilant un seul et même univers. Des dimensions corrompues. Réalités inconsistantes soumises à son origine irréelle. Il regarde l’œil « incompréhensif » et pourtant lucide cet agglutinement dans le reflet de la fange céleste. Lointain reflet du vide où nous logeons. Noble ignorance et sublime méconnaissance de notre égarement. L’errance divine à travers nos pas.

 

 

Derrière le dessein des jours, Dieu à l’œuvre qui à travers nous se cherche. En quête de notre reconnaissance. Et qui nous susurre qu’il cherche, à travers nos épreuves, un espace de nudité et de dépouillement pour éclaircir un passage et apparaître dans nos pas, nos gestes et sur nos lèvres afin éclater au grand jour.

Parmi les herbes du jardin, il s’endort. Comme dans une forêt céleste.

 

 

En ces contrées banales et souvent miséreuses se cache le divin rigolard qui se morfond dans notre aveuglement cherchant à percer dans les intervalles trop brefs que nous lui octroyons.

 

 

Assis en silence dans la pénombre, il accueille des cascades de bruits et de lumières qui le font glisser plus bas dans la caverne incertaine où il attend les mains jointes et les lèvres entrouvertes, aspirant le monde qui disparaît en lui englouti. Et plus vivant que jamais dans son silence approbateur.

 

 

Exilés de notre véritable demeure, voués à explorer tous les orifices de la fuite, nous tournons tels des cavaliers immobiles sur notre manège désenchanté. Epuisés par la ronde infernale où nous sommes plongés. Participant à notre insu à cette danse étrange qui déroute les danseurs étourdis.

 

 

L’ombre autour de nous n’est que le reflet de l’obscurité brute de notre regard. Et la couleur alentour que l’éclat de notre émerveillement innocent.

 

 

Miracle de la machine ancestrale qui par réminiscence vous fait soudain découvrir l’instant. Le temps éternel de la présence, entre démons passés et chimères à venir, le moment éternellement présent. Et les secousses de l’interdit qui ravivent la flamme encore vacillante.

 

 

Tout se mêle dans un magma incompréhensible où l’on tente de s’extraire en vain. Pieds et poings liés dans les formes mouvantes, tantôt avalés par des bouches béantes, tantôt caressés par mille mains accortes et séduisantes. Prisonniers de la masse en mouvement, toute fuite nous y englue plus encore. Nul autre choix que de suivre les mille coulées, de s’y laisser engloutir jusqu’à l’anéantissement de toutes velléités d’évasion. Alors advient – peut advenir – le regard surplombant et enveloppant, origine même du magma, à la fois familier de toutes les mouvances et toujours un peu étranger au monde. Et indemne de tous ses reflets. Et de tous ses échos.

 

 

Dans l’alcôve de tes forêts sombres, retranché, tu gis en vain… il te faudra habiter pleinement la terre pour que le ciel te soit offert. Inutile de t’en protéger. De t’exiler parmi les ronces et les pierres dans les clairières isolées au cœur des forêts si Dieu n’a placé tes pas sur les sentes solitaires qui bordent les villes populeuses et grouillantes. Va sans te soucier de toi-même sur toutes les îles et tous les ports que Dieu t’invite à explorer. Tu n’es pas de ce monde. Et où que tu ailles, tes pas resteront insatisfaits. Habite seulement le lieu d’où tu viens et les contrées te seront égales. Ici ou là qu’importeront à tes yeux les paysages ! Va et demeure en toi-même. Le monde bientôt deviendra tien.  

 

 

S’allongeront bientôt les bruits du temps qui cognaient jadis (si forts) à ta poitrine. Et tu demeureras vierge de toutes espérances. Et de toutes nostalgies. La mémoire avalée dans l’oubli. Evidant toutes les supputations jusqu’à leur origine, tu boiras l’instant (de tout ton saoul). Ivre de lucidité et de joie dans cette plénitude tant recherchée autrefois.

 

 

Après avoir aiguisé l’oreille qui ne t’appartenait pas, l’écoute s’est affutée, rendant familier toute l’étrangeté du monde.

 

 

Ainsi dans la somnolence des jours adviendra - peut advenir - une secousse présageant toutes les béances à venir, les errances indomptables, toutes les failles traversées dans la nuit la plus sombre avant l’approche du grand réveil lucide qui réorganisera le monde – inchangé – en une aire familière d’émerveillement.

 

 

Qu’un seul mot pousse entre les tombes, et je sais que pourra refleurir la terre !

 

 

En ton cœur délaissé, demeure un espace autonome de joie qui saurait – si tu savais t’y abandonner pleinement – t’émerveiller de toutes les circonstances, te rendre équanime au contenu des évènements. Ne le cherche pas. Tu t’en éloignerais. Laisse-toi creuser et dépouiller de la conscience aigüe de ton individualité jusqu’à atteindre la plus sûre des nudités : ton inexistence personnelle. Défais-toi des joies inaugurales qui invitent tôt ou tard aux supplices et à la lassitude. Désillusions qui marquent les premières étapes de la longue maturation.

 

 

Sur le parvis des terres blanches, la nudité s’avère l’unique vêtement de circonstance. Atteindre cette gloire désarme toutes les hostilités. Et tous désirs de conquête. Peu d’êtres en sont dignes. Non qu’ils ne la méritent mais ils ne peuvent encore se résoudre à se dévêtir de leurs singularités et à abandonner leur particularisme qu’ils continuent d’endosser comme une vaine armure, impropre à les protéger de la misère qu’ils ont toujours tenté en vain de fuir.

 

 

A l’aube des consciences se tient une foule de gardiens ignares, protecteurs d’un trésor illusoire. Et au crépuscule des chemins ne reste bien souvent qu’un tas de cendres à l’abandon – et bientôt oublié de tous.

 

 

Laissez vos montres et vos chronomètres, vos réveils et vos horloges dont les aiguilles vous endorment. Restez démunis face au temps. Présent à la misère de vos heures. Sachez vous soumettre à tous les défilements, le cil battant ou la paupière close, et vous déchirerez l’espace plane qui vous encercle. Laissez-vous anéantir, engloutir. Et vous découvrirez la rosace éternelle.

 

 

Vous avez la nostalgie de l’unité et de l’éternité, de la joie et de la paix. Et vous les cherchez désespérément à travers les mille pas et les mille gestes que vous posez, chaque jour, sur le chemin. Mais laissez libre votre pantin, fruit de mille conditionnements. Ne le torturez pas de votre volonté. Ne lui imposez aucune direction. Laisse-le se mouvoir selon sa sensibilité et ses prédispositions. Au gré des circonstances. Laissez-le libre et vous en serez libéré. Laissez-le imposer ses pas. Et vous serez libre du chemin emprunté.

 

 

Dans la solitude princière des évènements, te voilà maître et serviteur des lois du monde, unique héros de milliers d’univers dont tu ne perçois que les échos. En vaillant chevalier du non-agir, tu laisses ta monture filer au gré des vents, se laisser porter par les mille mouvements qui la sollicitent.

 

 

L’extase décousue par la crispation sur les costumes étriqués que les phénomènes du monde t’ont offerts et que tu t’es empressé de revêtir pour cacher ton originelle nudité…

 

 

Le vent des abîmes glace (fige) tes costumes en indignes chiffons et réchauffe ta nudité, lui offre toute sa gloire, l’envole vers son tertre naturel, son royaume de lumière.

 

 

Dans l’espace infini où la matière se déploie, tu sombres sans résistance, libérant les chaînes qui te retenaient au petit tertre dont tu te croyais roi. Tu régnais jadis, il est vrai, sur ces terres, replié sur tes peurs et mendiant au monde un peu de sollicitude pour (te) maintenir (sur) ton trône précaire. Accaparement déraisonnable des terres conquises de façon si maladroite et souvent si sanglante. Perspective erronée de tous les rois-mendiants. Aujourd’hui, tu vagabondes sur tous les fiefs dont tu ne possèdes que la jouissance, abandonnant aux propriétaires la croyance en leurs titres.

 

 

La métamorphose est à l’œuvre, silencieuse et déroutante. Incommensurable. Révolution perceptive que nul ne peut façonner. Que nul ne peut s’octroyer. Ce sont les mouvements phénoménaux qui cisèlent cette compréhension. Il n’y a définitivement personne. Le monde est dépeuplé. Hormis ce magma phénoménal aux mille mouvements simultanés. Et cette présence* dans laquelle tout prend place.

*  le film des évènements et l’histoire des êtres s’inscrivent dans cette présence. Et n’en sont à la fois que le reflet. Tous désirs ou toutes tentatives d’y échapper appartiennent au film.

 

 

Tes rêves d’azur ne sont rien. Qu’un songe limité dans l’espace que tu es. Mirage de tous escaliers. La corde raide demeure invisible et mystérieuse. Et vers son faîte, tu te hisses déjà.

 

 

Les terres inhospitalières ne sont que le reflet de tes refus. Et de tes colères.

 

 

Les promesses de l’horizon seront à l’exacte mesure de ton regard d’aujourd’hui. Même couleur et même texture.

 

 

Dans l’infertilité des terres, tu sèmes ta grisaille, ignorant encore que la joie naît du ciel. Du ciel originel. Et non à la croisée de l’horizon et de l’azur. Elle advient à l’exacte coïncidence des perspectives, quand tous les mouvements s’unissent en un flot commun, rejoignent la marche universelle après tant d’égarements et d’itinéraires singuliers.

 

 

Des narcisses-instrumentalisateurs du monde, tu en as croisés à la pelle au cours de tes pérégrinations. Mais aucun n’avait l’ambition (affichée) du Tout. Tous se résignaient à de minables possessions. Le médiocre contentement des gagne-misères ; quelques pierres, quelques arpents de terre, quelques êtres et quelques objets dérisoires. De pauvres rêves expansionnistes en vérité. Il faut vouloir Tout. Mais pour jouir de cette totalité, il est nécessaire de renoncer à toutes possessions. De consentir avec joie et détachement à toute appropriation. Et à toute appartenance. 

 

 

Seule la vérité peut contenter le cœur de l’Homme.

 

 

L’infaillibilité des jours te désarçonne. Et te consume. Et tu attends la nuit pour éparpiller la poussière et la cendre que tes pas ont soulevées.

 

 

De piège en piège, la lumière captive réapparaît, plus intacte qu’au premier jour.

 

 

L’emmêlement quotidien des horizons obstrue la clarté et la profondeur du regard. Laisse-toi emmurer par toutes les perspectives. Et la cécité deviendra impropre à te guider. Tu te laisseras conduire par des yeux étrangers qui deviendront au fil des pas toujours plus familiers.

 

 

Dans le ciel sans âge, le dédale se libère de ses voiles de pierres. Nos dérisoires édifices érigés à la gloire des territoires sécures et des horizons circonscrits. Nos indignes monuments élevant la clôture sur tous nos fiefs laborieusement acquis. Le monde se fait chantre des fossés, des remparts et des frontières. Des tours, des donjons et des ponts levis. Et toi, pourfendeur de tous règnes, adepte du chaos qui libère de l’emprise du titre et de la propriété, tu regardes, sur les hauteurs du territoire sans limite, toutes les geôles du monde.

 

 

L’excavation de tous monticules pour creuser les sommets d’où l’on croit (à la fois) dominer et se protéger du monde. Emprunte l’éternel chemin de la faille et de la nudité, engluant notre chair dans le magma des mouvances. Nous pouvons nous y résoudre à partir de l’espace qui nous habite, laissant le corps et la matière libres de rejoindre leur cours naturel.

 

 

Tout ce qui existe en ce monde est tien. Aucune parcelle ne peut échapper à ta gloire. A ton règne. A ta souveraineté.

 

 

Ecoute et laisse-toi mener. Où que tu ailles, tu seras chez toi.

 

 

Dans l’espace clos des frontières rugit la bête de l’infini.

Ne te soumets aux diktats des puzzles. Aucune pièce manquante à ton jeu.

 

 

Le long frémissement de l’infini sur tes terres. Comme une longue caresse impersonnelle dans l’incision singulière que tu as creusée (et creuses encore) de tes propres doigts.

 

 

Laisse-toi habiter par ce qui t’est étranger. Et tu découvriras l’étrange lien de parenté qui t’unit à l’univers.

 

 

Laisse ton personnage libre de ses bagages. Et de ses poids. Et tu le verras se délester de ses charges. Te libérant (ainsi) de toutes responsabilités.

 

 

L’épopée factice de toutes prétentions conduit à faire couler le sang des chimères. Champs de bataille où les guerres sans combattant font rage…

 

 

Une assise étoilée au cœur de l’arc-en-ciel. Comme un pied saugrenu en équilibre sur l’un des piliers du ciel. Mirages et mensonges de toutes prétentions à la hauteur. Ta nature non-localisable n’a de monture. Et toute chevauchée t’éloigne de ton origine non-née. Reste en selle. Et laisse ton cheval en paix. Ses pas seront ton voyage. Et ta destination. N’aie crainte de la chute. Le cavalier à terre ne pourra survivre à son cadavre. Il sera libre des coups et des caresses des paysages. Immobile jusque dans son âme. Et la liberté chevillée au cœur. Inébranlable.

 

 

Tout itinéraire est un dédale d’impasses. Entre les murs se tient (et demeure) la vérité.

 

 

Retranche ta prétention aux foulées sur le chemin. La digne chevauchée s’assure en modestes pas.

 

 

A l’est de ton âme se trouve le continent merveilleux. Ta nature originelle. La conquête de l’ouest n’est qu’une prétentieuse chevauchée.

 

 

La découverte de tout chemin est une offense aux paysages. Leur exploration nécessite un immobilisme nomade où les contrées s’estompent et libèrent peu à peu l’espace de son décor. Reste alors un vide habité de présence où l’écoute crée un lien avec l’étrange familiarité du monde. Et l’absence d’évènements. Au faîte de l’écoute, le tout et le rien deviennent sans importance. Ne demeure plus que l’intimité avec ce qui advient. Présence à ce qui est présent. Et se manifeste. Et présence à l’absence. Ecoute pure.

 

 

On n’est jamais qu’en soi-même.

 

 

Présence ou absence. Tout est contenu. Et qu’importe ce qu’elle contient lorsque l’on penche vers l’écoute. L’œil s’en émerveille sans exigence. Indifférent à tous spectacles.

 

 

Seul l’espace décide des gloires. Et des infortunes. Siège de toute compréhension. Avant que les évènements ne deviennent lisses.

 

 

De ses agiles passions, il sortit des brumes.

 

 

Emmurés en leurs respectables triomphes, les hommes dansent dans leur cour étroite.

 

 

Contre  la douleur passagère des saisons sur notre peau, sur notre vie, je m’étire et m’étends contre les flancs du temps, à l’abri des regards de glace. Et j’attends l’éternité qui tarde à venir.

 

 

Derrière chaque histoire, chacun attend sa propre délivrance.

 

 

Chacun pressent que son être lui survivra.

 

 

Abdiquer de toutes nos gloires et rester nu parmi les paysages vides et épurés. Sous le ciel sans fin qui étire notre patience sans acharnement. Jusqu’au point de tous renoncements.

 

 

Il y a au creux des mots, des silences porteurs de sens qui pointent vers l’espace d’où nous sommes nés, des interstices où la matière meurt et se régénère avant de repartir à l’assaut du monde pour y trouver une place – même minuscule. Bref intermède entre naissance et disparition. Visite éphémère de l’espace non né dans l’incarnation terrestre.

 

 

Le regard présent à lui-même ne pleure ni l’absence ni les déserts. Jamais ne s’étiole sans support. Se défait des phénomènes et de leurs ombres mortifères. Ensoleille un instant les objets puis les recouvre d’obscurité. Dans un rire qui assèche nos larmes velléitaires – presque grotesques. Et si ridiculement ignorantes.

 

 

Aucune trace ne s’efface. Toutes se sont dessinées par la coïncidence des circonstances. Nulle main ne peut s’accrocher aux arabesques du vent. Malgré nos larmes sur le sable, le ressac et les bourrasques emportent toutes nos chimères, nos histoires et nos châteaux en Espagne, jusqu’à la trame même de notre existence - poussière inattendue dans le cosmos sans limite.

 

 

Les cœurs arides ne voient ici-bas que des déserts et des cactus. Un monde de sable. Des horizons infranchissables et infertiles. Des rêves lointains d’oasis un peu surannés. Et apocryphes. Des terres bédouines hostiles où le couteau supplante la grande utopie de l’hospitalité. 

 

 

Si l’on s’égarait par mégarde, le chemin nous offrirait en vérité nos propres pas vers l’essentiel jusque-là ignoré.

 

 

Derrière les hécatombes, des médailles distribuées aux honneurs, aux vertus guerrières des combattants qui s’entretuent dans la fureur et les bruits de canons pour gagner quelques recoins de silence où la paix serait invitée - habitée enfin par tous les mendiants de la joie qui s’habillent de sabres et d’oripeaux dorées, portant le galon et la cocarde, toujours assoiffés de tranquillité, et décapitant tous les contrevenants à leurs espoirs et à leur combat. Eliminant toutes vermines sur leur passage comme des affamés éternels qui saccagent leur propre fief et anéantissent tous les territoires - pourtant intrinsèquement voués au silence.

 

 

Il y a comme une extase à deviner que les bruits ne sont (en réalité) que silence.

 

 

Malgré nos pleurs et nos cris, il n’y a que des défaites rayonnantes et victorieuses. Et des désillusions salvatrices. Les prémices d’un chemin initiatique qui s’insinue en nous comme un étroit corridor qui ouvre sur le territoire de la vérité.

 

 

Toi que j’entends pleurer derrière les grilles, ne vois-tu pas que les barreaux ne sont scellés que dans le vent ? Et que les nuages t’invitent (déjà) au ciel infini que d’un regard tu peux porter au creux de tes yeux et t’offrir ainsi une inversion si renversante des perspectives que tous les objets dans ta prunelle céleste seront tiens ? Et que leur nature sacrée t’émerveillera. Ô toi qui pleures de trop de solitude dans ta prison de cils, regarde le vent défaire tes lorgnons d’acier (aux vitres de glace) et t’ouvrir à l’œil hagard pour que ta joie soit docile aux circonstances.

 

 

Y a-t-il une vérité de l’oubli ?

 

 

Du domaine de la vie, nul ne sort victorieux. Mais l’accomplissement est là, reflet de notre victoire silencieuse. Témoin de toutes les défaites et de tous les tourments. De toutes les batailles qui nous anéantissent… et dont on sort toujours indemne, fort d’une compréhension toujours plus vive. Et plus neuve.

 

 

Toujours plus habile à se défaire de nos prétentions et de nos parades jusqu’au seuil de la nudité la plus sûre.

 

 

Que faire de ces visages ensanglantés par toutes les plaies du monde ?

 

 

Il y a une aube libératrice. Et un crépuscule captatif. Et de l’un et l’autre, il convient de se libérer pour accéder à l’indifférence de tout contenu.

 

 

Nos travées submergeantes s’étiolent devant la torpeur des jours. Et nous voilà estomaqués devant tant de vide !

 

 

Ne te soumets aux effluves envoûtants des mythes qui glorifient les individualités héroïques. Ils te mèneront vers les gouffres de la séparation, et orienteront tes pas vers les contrés électives, chantres et pourvoyeuses de tant de légendes qui encensent l’illusoire expansion de la singularité.

 

 

Accueille tes excès. Et tes manquements. Tes bassesses et ta fange. Deviens l’humble héros de l’ordinaire. Du coutumier sans protagoniste. Et tu franchiras l’unique seuil : le territoire des contrées impersonnelles.

 

 

Ne te fie à l’extrême indigence des surfaces qui dissimule la richesse des profondeurs. Ne te fie ni à ses fureurs ni à ses violences qui recouvrent la paix et le silence. Ne te fie pas davantage à son extrême diversité qui masque la surprenante sobriété, l’ineffable dépouillement dont elle jaillit. Ne crois rien sur parole mais continue de creuser sans impatience.

 

 

A la croisée des mondes, le silence efface toutes les fables. Engloutit tous les rêves dans l’abîme. Et suspend l’élan vers toutes les passerelles. Tiraillé par les mouvances. Et libre jusque dans l’immobilité.

 

 

Laisser jouer l’impersonnel dans sa plus authentique singularité demeure la voie la plus sûre pour atteindre au juste et à la joie.

 

 

Libre de toute prétention - et de toute individualité - l’infini est enfin invité à se manifester dans nos circonstances les plus personnelles.

 

 

Une pluie de miel sur ses lèvres fuyantes. Et sa bouche escarpée. Et voilà toute la saveur du monde s’enfuyant en d’autres palais !

 

 

Tiens-toi à l’exacte place de l’absence de volonté et de la présence impersonnelle. Et écoute. Ce qui surgira donnera  la direction – invitera tous les possibles à ton pas.

 

 

L’inconsidéré se manifeste dans la désolation joyeuse des terres infertiles. L’accueil – impersonnel – de tous les déserts et de toutes les peuplades. Du vif et de l’ardent. Du feu des brasiers, de la brûlure cinglante de toutes les polarités, de la dérive des banquises et de la souveraineté de tous les vides. 

 

 

Submergé par toutes les peuplades et tous les exils, la nudité se parachève, s’auréole d’une gloire non singulière qui déshabille tous les tourments de leurs parures encombrantes et souffreteuses.

 

 

Le désir même de la mort révèle l’inaudace de vivre. Le détachement de toute volonté ouvre le seuil d’un vivant riche de tous les possibles.

 

 

Toute orientation est une restriction saugrenue. Une indélicatesse envers l’admirable champ des possibles, une injure – une offense – à l’ouverture de tous les potentiels qui germent en chacun et n’aspirent qu’à fleurir dans les circonstances à venir. Comment pourrais-tu voyager si tu poursuis l’ombre de toutes destinations ? Un pas – un seul – est parfois nécessaire pour habiter le lieu que nul marcheur ne saurait trouver, que nulle allure fébrile ne saurait dénicher excepté peut-être au détour d’une halte imprévue où le ciel et la terre peuvent enfin s’unir en une sphère – indéfinissable – où tous les regards collés à l’azur retombent en un amas indistinct sur l’éternelle mouvance des phénomènes sans rien pouvoir distinguer, sans rien pouvoir disloquer, sans rien pouvoir dénommer, sans la moindre référence ni préférence. Dans cet égarement, une sorte d’intelligence hébétée advient qui d’un éclair fait tout comprendre sans rien pouvoir expliquer.

 

 

Une joie claire et sans brume. Sans éclat trompeur à son origine.

 

 

Un espace d’étreintes imaginaires qui se glorifie de tous les visages et de tous les liens.

 

 

Embrasse toutes les lèvres offertes à l’aube primitive et au devenir improbable

Qu’importe à qui elles se destinent

En elles se devinent l’origine qui les enfanta

Et le regard implacable sur les peuples

Aux destinées éphémères

Qui se contemplent 

Dans toutes les prunelles entrecroisées

Tels des spectres spéculaires

Offrant leurs orifices repus

Par toutes les chairs soumises

Aux sublimes matières du monde

Myriade de mouvements

Dans la transparence claire et enveloppante

Querelles et tiraillements traversant sans trace le regard de paix

En tous recoins de l’espace

Dans tous les replis de la terre et du ciel

Laissant libres toutes forces de naître et de mourir

De s’étendre et s’étioler

Au gré du grand jeu labyrinthique

A ses yeux la transparence des murs

L’éclatement des cloisons

La liberté sans entrave

L’inaltérable paix

S’amusant de toutes les joutes de papier

Des querelles d’ivrognes

Du tracé si léger des formes

Qui croient imprimer leurs marques

Sur le marbre

De l’inconséquence des rencontres, des heurts et des effleurements

Des imbrications et des cavalcades

Des élans opposés qui se rejoignent à toutes les extrémités

Comme autant de passerelles reliant  d’inséparables côtés

Des émergences et des disparitions

Dans le fracas et le silence

Devenant trajets évanescents, harmonieuses arabesques

Sur l’éternel palimpseste

Joie sans ombre de tous les appels

De toutes les naissances

Et de toutes les disparitions

Laissant la matière foisonnante

Œuvrer à son destin fugace

Riant de toutes percées

Et de l’insondable opacité

Des pertes et des gloires si dérisoires

Présence éternelle

Immuable

Autorisant tous les chemins

Tous les détours et toutes les faims

Toutes les secousses et les caresses

Tous les oublis et les manquements

Tous les aveuglements et les percées

S’égaye de toutes manifestations

Laisse naître les pyramides et les tombeaux

Les chaos et les fresques harmonieuses

Où le déséquilibre même est excroissance de la beauté

Où tout est autorisé

Tourbillons foisonnants sur un sable si léger

Aussitôt nés aussitôt recouverts

Par la caresse des vagues ou la violence des marées.

Dans le jeu sempiternel

Elle demeure

Rieuse et impassible

 

 

Il y a tant d’espace qui nous dissimule. Derrière nos vitres, tant de bave et d’écume voilent à nos yeux la tour invisible où sommeille notre repos.

 

 

Le temps est vain pour y monter. L’escalier ne mène qu’au sous-sol. Là où poussent toutes nos vermines. Au cœur de la fosse où l’on répugne à s’abreuver.

 

 

Nul ne monte sans un jour devoir chuter. Nul ne descend sans qu’un jour elle lui soit révélée. Au diable (donc) tous les marches-pieds !

 

 

Nulle peine à secourir

Nulle évasion des dédales

Nulle trace d’aînés à suivre

Nulle carte et nulle boussole

Un pas clair

Si transparent à la lumière

Que l’opacité de tous les peuples

Ne pourrait l’entacher

 

Se défaire de ses ailes chercheuses

Qui autrefois le front dans la fange

Nous donnaient l’espoir de l’envol

Le ciel a fini par descendre

Et des limbes, nul ange ne jaillit

Au bas des marches, nul dépotoir

Un grand foutoir certes

Où il fait parfois bien noir

Mais si éclairé de ce regard

Qui tire sa source d’un innommable espace

D’où l’on ne s’est jamais échappé

Alors que nous avons cru nous perdre

Et aller notre chemin

Que nous avons voulu, orgueilleux, si singulier

 

 

Yeux de courte vue aveugles à ce qui vous a créé

Pour quoi diable n’y voyez-vous goutte ?

 

 

Descendu parmi son peuple, aussitôt le territoire grandiose foulé, il retarda… peut-être… une exploration plus judicieuse. Mais à qui appartient notre pas ? Personne en ces lieux !

 

 

Entraîné par les bourrasques, les mouvements saccadés de ce magma en perpétuelle fusion, fission, secoué, emmené ici et là, déchiré de toutes parts, il n’en continuait pas moins de sourire. Et de rire même parfois de ces bontés, de ces cruautés, de ces violences et de ces douceurs. Plus vraiment concerné. Qui était-il ? Personne pour le dire. Personne pour le voir. Personne à voir. A qui donc parler ? Soliloque bien singulier. Inutile dans tant de silence envoûtant, réparateur, enveloppant. Regard contenant un flux continu d’illusions. Images que nous voulons par trop accommodantes !

 

 

Surface lisse parmi les aspérités ! Surface lisse parmi les abysses ! Que faire des tonnelles et des dentelles ? Éternelle bagatelle ! Aussi attirant autrefois qu’un rat mort dans une poubelle ! Y a-t-il encore quelque chose d’essentiel ? Pas à ce que je  sache ! Mais encore une fois qui sait ? Sans personne pour parler ! Sans personne pour écouter ! Sans personne pour agir ! Hormis bien sûr ce magma dévorant qui se brûle et se réchauffe de son propre corps !

 

 

Délices des mains, coureuses de surfaces !

Délice des pieds, arpenteurs d’hémisphères !

Et nul être pour savourer, se délecter de tant de paysages !

Un regard unique et enveloppant qui dé-cisèle nos discriminations !

Rien ! Ou presque ! Alors que reste-t-il ?

 

 

Qui se soucie de mes orteils ?

Dehors, il voyait tout de ses yeux sales

Comme une bouche à porter de regard

Il lançait sa haine au hasard

Recouvrant son grand corps

De mots déchiquetés

Habillant ses frères de ses guenilles

Ajoutant à leurs loques

Des peurs invivables

Il se souvenait d’autrefois

Quand la mémoire débordait de sa tête

Sortait par ses yeux pâles

Pour couler sur les parois du monde qu’il s’était fabriqué

Il se souvenait des maisons

Et des trottoirs tristes

Où il courait à perdre haleine

Pour échapper aux peurs béantes

Qui menaçaient de l’avaler

A présent des cymbales animaient son quartier

A l’abri des dérisions et des menaces d’un peuple de lutins innocents

 

 

L’espace cible sa place

Avec précision se déploie

Oublieux du centre des affaires poussiéreuses et des mascarades

 

 

Les soucis apprennent

A se soustraire sans bruit

Echappant aux additions anciennes

S’accumulant dans la fureur

 

 

Un éloignement des épousailles. Comme la validation de l’union mise à l’épreuve.

 

 

L’espace s’enorgueillit-il de sa fonction ? Accueillir…

 

 

Les morsures des ténèbres rééduquent notre incompréhension. Brûlent chimères et représentations. Toutes nos idoles. Redressent l’âme. Bref revigorent nos pas vers la lumière.

 

  

Entre les mots se creuse le silence. Entends-tu les sonnailles éternelles du printemps ? Les cris de l’hiver se sont tus. Et le temps n’aura bientôt plus prise sur les saisons.

 

 

Un avenir sans tapage. Voilà à quoi la vie le destinait. Lui qui autrefois rêvait d’une haute destinée, avait visité les sphères de l’en-bas, s’y était enfoui avant de renaître dans le ciel qui avait recouvert ses pas. La terre lui avait révélé tous ses mystères. Et à présent le chemin pouvait bien le mener là où la misère était à son comble, la demeure était habitée. Et le ciel imperturbable resterait intact malgré la boue, le sang, la sueur et les larmes qu’il allait sans aucun doute encore croiser ici et là…

 

 

A l’aube, le vent s’approche de mes écailles. Et me souffle ses paroles rugueuses.

 

 

Alors que les heures chaudes s’étirent, minuit n’en a pas fini de réclamer son dû. Au-dedans des terres grises se tapit l’ennui explosif. L’étincelle solaire de la débandade.

 

 

L’éclipse des formes se dilapide. Et le soleil songeur guette à l’orée de tous les chemins. La lumière des ombres anciennes s’éternise.

 

 

A l’aplomb de tous les destins se cachent les fils de la trame unique, scène pitoyable et merveilleuse qui appelle aux rires et aux larmes où se tissent tous les drames, toute la gaieté et les jeux morbides. La tristesse mêlée de sourires. Et nos avancées vers la transparence.  

 

 

La sensibilité se joue des formes. Et des couleurs. L’extra-sensorialité du monde s’étoffe. En nuances.

 

 

Trouée de vide dans les pensées opaques. Délitement des couches sans effet sur nos percées. Effacement des chimères. Victoire de toutes lumières.

 

 

Le monde s’efface d’un trait d’irraison. Ou de sagesse. Tout s’émerveille de beauté. Dans la solidité du regard. Et la précarité des yeux.

 

 

A l’aplomb du déchaînement de toutes surfaces. Détaché du mouvement comme de l’immobilité. Des absorptions comme des distanciations.

 

 

L’heure ne vient qu’avec la faim apaisée.

 

 

Une grandeur d’âme aux confins du mystère.

 

 

Le grand cirque s’efface où s’ouvre la vérité.

 

 

A quel point le monde t’engage ?

 

 

Les idoles sont mortes. Et sur les cendres naît la vérité nue qui brillera à présent à travers tes yeux.

 

 

Tu es debout sans gloire. Abandonnant aux yeux imparfaits honneurs et succès.

 

 

Tu pourras marcher nu sans t’interrompre. Sans discontinuer de ton labeur d’homme inachevé.

 

 

Nuls oripeaux nécessaires à la vie. De simples costumes de circonstances pour la célébrer.

 

 

Tu n’es pas ce qui se meurt. Tu es ce qu’il reste lorsque tout a disparu.

 

 

Une phrase martelée dans l’or ne vaudra jamais le jaillissement d’un geste né du silence habité. Toujours juste. Et naturel.

 

 

[Un opuscule de contremaître]

Voilà enfin la chair qui t’est offerte !

La chair dégoulinante de saveur

Où le fiel autrefois injecté

S’est lavé de son origine

Ne reste que ce blanc

Où tu pourras aiguiser ta transparence

Parmi la palette des visages

 

Ne saborde aucune de tes grimaces

Celles que tu lançais autrefois recroquevillé sous ton visage

Dans les replis du cocon et des rêves ambitieux

Arbore les mouvements passagers

Qui caressent ton âme offerte

La nudité du sourire

 

Qu’on nous arrache au forceps

Les gants de cuir trop rêches

Qui recouvrent l’innocence des mains

Pour tenir le monde brûlant

Qui cisaille nos doigts trop avides

 

Costumes en pièces

Et masques déchiquetés

Joie sur le visage tranquille

A tous les soubresauts

Parfois une grimace

Taillade encore la chair

Cette matière empêtrée

Emportée par les jeux du monde

Vers des horizons indolores

L’assise souple

Sur l’enveloppe contenante

Ne s’émeut des griffes et des morsures

Mouvements tranquilles

Qui s’épuisent vers le silence

 

 

Dieu se dessaisit de toutes gloires. De toutes défaillances. De tous chemins.

 

 

Etre n’implique rien d’autre que lui-même. Le reste est sans conséquence. Quant à être, on ne sait pas ! Tant l’être implique l’être. Et le non-être.

 

 

A la source du silence se tient un monde secret que nul ne peut voir sans se dévêtir. Au point extrême de la nudité, naît la solitude de l’être. Tête à tête du Soi avec lui-même. Et les soubresauts du personnage qui se débat dans son agonie. Les pensées cessent. Les représentations s’étiolent. Le monde se vide de toutes existences. Le néant se remplit de présence. Ne subsistent que le regard et le sentiment si intangible d’exister. Au-delà de tous les phénomènes, l’être – tant recherché – s’habite à chaque instant davantage. Insaisissable. Monde de silhouettes désossées où l’on cherche encore parfois avec tant de maladresse une âme proche. La proximité d’une âme (vivante). Toujours en vain bien sûr. Le monde se meurt. L’Autre devient invisible. L’Autre s’anéantit. Et ne subsiste que cette solitude si outrancière. Le désert des formes. Et la crainte des mirages parfois. Et si ce regard n’était qu’une hallucination ? Le doute s’étire jusqu’à l’incompréhension. Jusqu’à l’épuisement de l’incompréhension. A quoi bon savoir ? On ignore. On est ce regard si impersonnel qui ne peut ni goûter, ni blâmer ce monde et ses hallucinations. Un regard hors de portée où tout est à sa place. Et demeure sans importance. Une présence hors des siècles qui ne se conquiert qu’avec la grâce de la nudité. Tout est juste. Et tout semble faux. Idées, sentiments, rencontres. Mouvements sans âme. Qu’importe ! Être s’auto-suffit. Avec parfois la nostalgie du personnage qui cherchait en lui et dans la folie du monde quelques récompenses. Quelques compensations à son incomplétude. Extinction de toute quête. Monde si peu habité. Et monde si plein. Où le néant pourtant semble si présent. Qui pourrait comprendre ? Ce si-plein-de-solitude que le monde rejette. Et oublie. On se défait de toutes possibilités. De tous espoirs. De toutes espérances. De tous gains. De toutes pertes. On se défait de toutes caractéristiques. On n’existe plus. Et on existe si pleinement. Avec des attributs que nul ne pourrait comprendre. En vérité, on existe sans attributs. Sans les attributs que s’empresse de revêtir le monde pour combler ce sentiment si faible d’exister. Le rien devient tout. Et cela semble fou. Et ce sentiment même de folie est englouti dans l’être. L’être qui pulvérise toutes les tentatives de le saisir, toutes les tentatives d’y échapper. L’être où le temps n’existe plus. Où les idées - toutes les idées - deviennent caduques. Où l’en-haut est jeté parfois si bas que l’en-bas s’étire de toutes parts. Où le vrai peut être faux et le faux si juste. Où le non-juste devient si vrai et si juste que tous les repères de la raison explosent. L’être où le monde se dissout. L’être qui anéantit et contient toutes choses. L’être, cet indicible regard qui accueille en lui tous les phénomènes. Tous les mouvements. Les non-phénomènes. Et les non-mouvements. L’être dont on ne peut rien dire. Et toutes les tentatives pour le décrire en éloignent. Même si la distance est abolie. L’être si vide qui contient tout. Où tout se déroule en lui. Lui, si immobile et si silencieux qui ni n’approuve ni ne désapprouve. Qui est là. Simplement. Si indifférent et bienveillant à la fois pour nos expériences du monde. Le monde se défait de toutes substances. Et ne reste rien. Hormis ce sentiment d’être. Malgré la ronde incessante des évènements. Des mouvements. Cette énergie fluctuante et mobile qui court partout où règne le manifesté. Et cet être d’arrière-plan où tout se produit sans que rien ne subsiste. Seule permanence. Unique présence dans ces univers fantomatiques. A se demander si le monde existe ! Et si nous existons ! Rien en dehors de ce sentiment d’être !

 

 

Inverser le regard. Jusqu’à sa source. Pour trouver l’origine du monde. 

 

 

Laisse mourir le compagnon indigne de tes jours. Inutile de t’y attacher plus que nécessaire. Ses pas désespérés t’ont mené jusqu’ici. A présent, quitte-le et ne te retourne pas.

 

 

Le désenchantement du monde est souvent nécessaire au réenchantement de la vie – de la source même de la vie.

 

 

On a cru fréquenter Dieu et les sages. S’être hissé jusqu’à leur banquet. Et on se retrouve le cul par terre. Exclu (plus encore) de la table des hommes.

 

 

Tout ne serait-il (donc) que mirage ? Images et représentations. Echos et reflets. Que reste-il donc quand on a jeté à terre toutes ces parures et ces déguisements ?

 

 

Se défaire de ses propres fables et mensonges après s’être délesté de ceux du monde. Mais ne revêt pas qui veut la nudité de l’être

 

 

Toute volonté personnelle est la marque d’un sentiment d’incomplétude. Vouloir, c’est désirer atteindre, combler ou fuir. Et toute action visant à satisfaire cette volonté éloigne de notre complétude originelle. Toutes tentatives creusent davantage cette béance qui nous éloigne de nous-mêmes. Et nous y enlisent avec plus de force.

 

 

Il ne s’agit pas d’apprivoiser les anges. Mais de les laisser monter sur notre tête. Non pour qu’ils nous informent de l’horizon lointain. Ni qu’ils intercèdent auprès de Dieu en notre faveur. Mais d’abord pour voir le ciel et la terre à travers leurs yeux. Puis, une fois familiarisés avec ce regard pour qu’ils nous soufflent à l’oreille que nous sommes ce que nous avons tant cherché…

 

 

Attraction et répulsion envers les êtres, les objets et les évènements ne sont en vérité qu’anges et démons de papier. Le monde tel qu’il nous apparaît (ordinairement) n’est qu’un livre d’images qui tantôt nous ensorcellent, tantôt nous terrifient. Et nous nous soumettons, notre vie durant, à tous ces monstres imagés que nous avons (nous-mêmes) créés.

 

 

Quand les images s’estompent, puis s’effacent, que reste-t-il ?

 

 

Il n’y a rien à refuser. Tout ce qui est et advient doit être vécu pleinement. Que l’on s’y prête ou qu’on y résiste n’a guère de conséquence. La compréhension pour l’Homme mûrit en étant (simplement) vivant.

 

 

Il ne s’agit pas de refuser la volonté personnelle. Quand on croit encore à son pouvoir, on agit en conséquence. Toutes choses, rêves, ambitions, désirs se détachent naturellement. Et il serait vain d’y renoncer avant l’heure. Renoncer serait encore vouloir. Le détachement est un mouvement naturel. Sans brutalité. Ni violence qui ne crée aucune frustration.

 

 

Etre est au-delà de tous contenus. Il les éclaire. Et les contient. A la fois source et enveloppe.

 

 

Tout est à l’intérieur. Le reste est inaccessible.

 

1 décembre 2017

Carnet n°43 Au seuil de l'azur

Journal poétique / 2011 / Le passage vers l'impersonnel

Dans le temple inconnu, les hommes sommeillent. Aveugles à Son visage, ils bâtissent des chapelles et des cathédrales, des cercles sacrés, des périphéries impures, des frontières sanguinaires qui écartent, écartèlent et soumettent à un ordre délétère sans La reconnaître et L’accueillir comme la reine de tous les passages.

Nulle rive à atteindre. Nul territoire à conquérir. Nul ordre à légitimer. Mais un espace à accueillir. Et se laisser désencombrer. Renoncer au désir même de nudité.

 

 

Le mystère si fécond en énigmes. En questions. Et le chemin des réponses si sinueux. Nous usons nos semelles à toute raison. Sillonnant hagards le dernier tronçon de la confiance et de l’errance. Au seuil précis de la destination. Qu’importe alors que nous y entrions ! Qu’importe, la direction. Déjà l’immobilité. La volubilité des semelles. L’effervescence des pas. En haut. En bas. Au-dedans et au dehors. Les excès et les retraits. Les circonvolutions. Les angles trop droits. La course. L’arrêt. Et le départ comme lieu d’arrivée. Et la marche. Le rythme. Et le souffle. Le regard qui écoute et unit. Désagrège les points. Qui deviennent symbole. Métaphore. Sentence. Semence. Pagaille. Ordre préétabli. Démantèlement. Réorganisation. Connivence. Complicité. Duplicité parfois. Accord enfin. Et réconciliation. 

 

 

[Questions]

Pourquoi s’enorgueillir de ses traces ? Qui en ce monde entend l’appel du vent ? Les circonstances nous honorent-elles toujours ? La vérité brille-t-elle derrière nos prunelles ? Le regard a-t-il besoin de silence ? Peut-on incarner l’espace ? La paix se joue-t-elle de tout combat ? Existe-il une main dans le ciel (à portée de tous) ? Qui rencontre-t-on dans la solitude ? L’Absolu s’apprivoise-t-il ? L’innocence n’appartient-elle qu’aux gestes justes ? La solitude peut-elle s’habiter ? Quel œil nous observe quand nous regardons ? Le monde peut-il dérouter ? A qui confier son pas ? Y a-t-il un socle sur lequel s’appuyer ? Le chemin a-t-il un sens ? Comment se dévêtir jusqu’à l’os ? Qui aime-t-on derrière ceux qu’on aime ? La liberté se conquiert-elle à mains nues ? Le monde est-il une illusion ? Quel écran nous sépare du monde ? Le ciel est-il toujours hors de portée ? Quel bagage permet-il d’être soi-même ?

 

 

Tant de traversées rieuses. D’âpres saisons. De déserts. Et de sols chargés de passants. Tant de pas harassants. De soleils inhabités. De larmes versées. D’horizons parcourus. Et de bouches agrippées. Tant de mains tendues. De poings serrés. Et la danse incessante des pas. Cette danse s’arrêtera-t-elle un jour… et pourrais-je trouver ton vrai visage avant le terme du voyage ? Embrasser tes lèvres cachées dans les replis de l’azur ?

 

 

Tant de visages. Et de supplices émiettés. Tant de rivages. Et de contrées. De pas hébétés sous l’averse. De rires gorgés de soleil. Tant de ciels parcourus. D’égarements et d’impasses. D’averses et de saisons froides. Tant de silence. Et d’espace. D’amassements et d’encombrements. Reconnaîtrais-je ton sourire parmi les silhouettes sans grâce qui s’affolent au seuil de l’abîme ? Dans quel horizon as-tu dissimulé ton mystère ?

 

 

Mélange l’épars(e). Et tu réuniras les contours.

 

 

Entre solitude et amour anthropophage, il vacillait. Perdait pied. Et se relevait en titubant. Toujours vivant.

 

 

Il vagabondait sur sa chevelure. S’égarait sur le territoire mouvant. Dérouté par les soubresauts et les reliefs. Perdu déjà à lui-même.

 

 

Une si grande indigence devant l’assise.

 

 

Il s’égayait de cette bouche ardente et silencieuse qui l’avalait avec gloutonnerie et le recrachait déchiqueté.

 

 

Regarde l’obscur. De tes pas. De tes gestes. Et demande-toi : quelle ombre pourrait m’inviter à la lumière ?

 

 

Les gloires factices mènent au supplice. Et le supplice à la grâce. Qui sait ? Quel homme est-il déjà revenu du Golgotha ?

 

 

La (vraie) Gloire s’apprivoise à mains nues. Sans visée personnelle. Et se dessaisit de toute captation.

 

 

Grande était son attention pour l’orage. Ses prunelles collées attendaient sans ciller. Dans chaque goutte (et chaque larme), il devinait un monde réconcilié.

 

 

Marche sans t’attarder sur ton passé. Avale la sente sans un regard pour les paysages parcourus. Ta seule empreinte est ton pas (présent) qui s’efface déjà.

 

 

Seules les circonstances façonnent le chemin. Et tes nécessités, l’itinéraire. Le reste n’est que paysages. Décor pour le pas. Ne t’attarde sur aucune silhouette. Soulève-les d’un regard. Et poursuis ton errance. Le vent sera ton seul guide.

 

 

Nul soleil vengeur. Dans le ciel, une lune éphémère. Et son regard fragile. Doté de toute la puissance qui soulève et anime le monde.

 

 

Des stigmates invisibles. Mais la prunelle radieuse. Le pas souple et le cœur désencombré. Le geste et la parole toujours justes.

 

 

Sans compromis pour Narcisse. Mais une écoute bienveillante. Et un regard tendre pour l’immature.

 

 

Un désossement naturel des frontières. Une déhierarchisation des manifestations. Toutes situations égales. Et nulle exigence en ses pas.

 

 

L’œil blâme ce qu’il ne peut atteindre. Autorise-toi l’accès à tous les fragments de la terre. Approprie-les toi. Alors ils s’effaceront. Et ton pas invitera le ciel nu en chaque geste. 

 

 

Une lampée de ciel. Une gorgée de terre. Des silhouettes et des horizons circonstanciels. Et toujours le pas nu.

 

 

Des orages. Et des soleils. Et nous voilà baignant dans l’azur pluvieux. Parmi les arcs-en-ciel. Dans l’éphémère manifesté.

 

 

Il naviguait vers Elle comme un marin ivre. La cherchant, déboussolé. Embrassant ses pas par inadvertance. La rencontrant à la croisée des horizons. Au-delà des frontières. Insoucieux des chemins, il perdait parfois la raison. Dénichait la joie et la laissait filer. Fidèle à sa danse, exhaussant ses souhaits malgré lui pour ensemencer leurs terrains d’entente, leurs unions sacrées, leurs regards complices, leurs pas entremêlés, leurs soubresauts ravageurs, leurs éclats d’azur, leurs parcelles closes. Et leur espace sans limite. Qu’ils soient un ou mille, quelle importance à ses yeux ! Ils étaient déjà, l’un et l’autre, l’un pour l’autre, dans l’autre et tous les visages de chair et de pierre, habitant tous les chemins, tous les fourrés d’orties, les palais sordides, les taudis et les foules anonymes. Les déserts et les pavés. Le sable qui s’efface sur la rive. Et la mémoire qui engloutit. Ils étaient déjà. Et tous les visages reflétaient leur mystère et leur clairvoyance. Leurs bassesses et leurs efforts. Leur justesse et leurs injustices. Ils étaient déjà sans conteste. Et il attendait Sa réponse en souriant. Présent toujours à son appel. 

 

 

Derrière l’ombre oscillante

Le silence

Patiente

Et scrute

Notre présence

 

 

Un ciel s’efface toujours pour un autre plus vaste.

 

 

Son rire. Comme un baume sur ses ardeurs. Et sa bouche aussitôt refermait toutes ses plaies. Elle s’enfonçait en lui. Et l’effaçait. Et ces effacements emplissaient ses pas. Et ses joies qu’Elle emportait dans le vent qui soufflait avec tant d’ardeur sur les visages. Il aimait leurs égarements. Et leurs enlacements. Leurs pertes trop longtemps retenues. Leurs pirouettes et leurs glissades. Leurs pieds de nez à la troupe des clowns tristes errant sur le pavé - habillés de leur costume trop large avec leur gros nez rouge qui brillait derrière leur face courtoise, leurs croque-en-jambe qui brisaient les étiquettes sur les visages, lézardant toute espérance d’aligner leurs pas bien droits sur la chaussée afin que naisse un rire énorme – un rire sans borne – devant toutes les faces incrustées de malheur, sur les mains serrées, les lèvres pincées, les yeux apeurés et les destins flétris. Pour que la faille élargisse les plaies jusqu’à la déchirure, que la nudité transparaisse sous les parures les plus épaisses, que la bonté s’immisce dans le sordide et les meurtrissures. Pour que tout éclate en joie. Et que les peurs s’effacent sur les pages des milliers de livres tristes, les visages endeuillés et les yeux hébétés d’incertitude. Il savait qu’il serait toujours âpre à la tâche, servant Son œuvre. Leur joyeux labeur.

 

 

Mille passages étroits vers Ses contrées

Mille chemins ténébreux où l’on piétine

Avant de La découvrir en tous lieux

Ineffables itinéraires vers Elle

Qui nous porte et nous anime

Nous repose et nous agite

 

 

Diantre ! Que de chemins entrecroisés

De silhouettes emmêlées de circonstances

Fils si serrés d’une seule pelote

Dans Sa main si vaste

Dont nul ne peut s’extraire

Sans s’y perdre et La retrouver

Découvrir la nature de toute existence

Ô Trame invisible

 

 

L’épure des cimes. Le recouvrement des gouffres. L’aplanissement des circonstances. Et voilà le terrain dégagé, le pas ouvert aux évènements.

 

 

Efface-toi jusqu’à la disparition pour t’emplir de singularité universelle. Alors tu seras toi-même.  

 

 

Rien n’est sans borne. Et tout infinise. 

 

 

L’itinéraire n’est qu’une secousse dans la travée du temps. Martèlement des pas. Fixité de l’œil. Echappée sans échappatoire. Ornières défaites. Le chemin s’étire vers la destination. Sans nulle avancée rédhibitoire.

 

 

A l’orée du cercle, l’œil s’éternise. S’égare. Se remplit. S’étiole. Oublie les frontières. Se réjouit déjà de l’espace.

 

 

Le visage agenouillé dans les replis du ciel, il s’étirait (déjà) à la lumière.

 

 

Les mots martèlent en nos têtes une vérité sans effet. Comme un corps étranger, elle glisse sur nos résistances arcboutées. Il lui faut pénétrer la chair pour gagner sa demeure. Et être habitée. L’incarnation est l’unique chemin. Le seul passage nécessaire au non-retour.

 

 

Prends garde aux encombrements. Ils étouffent l’espace. Le réceptacle nécessaire à l’accueil.

 

 

Le visage vulnérable rend l’âme invincible.

 

 

Efface tes sourires pour une véritable tendresse de circonstances.

 

 

Le chaos fragmente et évince. Alors que tout prend place dans l’harmonie. Entre les deux, nulle différence sinon l’épaisseur d’une prunelle.

 

 

Rien ne blesse autant que la peur. Inutile d’en panser les plaies. Il faut la cureter jusqu’à l’origine. Et la guérison surgira comme par miracle.

 

 

Désencombre-toi. Et fais-LUI place. Il n’est d’autre alternative. Mais inutile de précipiter la désabondance. Elle adviendra à l’heure juste. Aussi laisse agir et ne te soumets qu’aux nécessités de l’instant. Sois (simplement) à l’écoute de ce qui surgit au gré des circonstances. Et la destination s’offrira.

 

 

Quand le fruit est mûr, il tombe. La maturité attend la saison propice. Et nul ne peut précipiter le temps du murissement.

 

 

Quelle source ? Et quelle offrande ? De l’origine du regard naît la couleur (la couleur du monde). Du plus profond il tire son origine, plus transparentes sont les silhouettes.

 

 

L’œil doit voir du plus profond du lieu qu’il habite… ainsi saura-t-il trouver matière au juste.

 

 

Rien à bannir… l’accueil demeure l’unique réponse.

 

 

Sa sépulture (à présent) l’égayait. Il riait devant ses cendres. Il allait enfin pouvoir vivre.

 

 

Il s’attardait sur ses blessures comme un prophète sur ses prophéties. Pour y déceler la route à venir.

 

 

Dans la terre se déniche le ciel. Et inversement. Le ciel ne peut se trouver en levant les yeux. Mais en les abaissant au plus bas. Alors le ciel s’ouvre et descend. Le cœur s’approfondit et se creuse. Et aussitôt le ciel s’y engouffre. Et l’âme s’élève. Pour enfin vivre à hauteur d’homme.

 

 

De longues grimaces entre les cercueils.

Les silhouettes serpentent entre les caveaux

Sous l’herbe des visages

Et devant les tombes

Les faces blafardes

La nuit des vivants s’étend

Plus longue et plus blanche que celle des morts

Sur la longue route qui s’étire vers l’horizon gris

 

 

A cheval sur nos supplices

Nous chevauchons la steppe

Sans un regard pour nos montures

Cavaliers et galops effrénés

Qui effleurent la cime des herbes

Couchées par le vent

 

 

Un pas sur les pierres

Une marche de sable jusqu’à l’horizon

Et les silhouettes d’argile

Attendent leur émiettement

 

 

Le soleil ne pouvait appuyer ses lacunes. Il les brûla. Et sa chair s’en souvint. Sur les cendres, elle laissa filtrer un peu de lumière. 

 

 

Rude est la tâche du bûcheron lorsque l’écorce se fend sous la cognée. Mais comment préserver la sève intacte ?

 

 

Il nageait dans l’oubli comme dans une eau boueuse. Au lieu de s’y reposer en laissant aller les flots. Et attendre l’évaporation.

 

 

Elle était là. Partout. Au fond du doute. Au fond des pleurs. Au fond des cris. Dans la douleur. Et la joie aussi. Dans la grandeur et l’humilité. La fraîcheur. Les courtes nuits d’été. Dans le ciel gris et les feuilles automnales. Sur les visages. Dans les déserts et les grimaces. Les soupirs et les rires. Dans l’absence, Elle était là encore. Et toute présence la reflétait. Elle animait les mouvements et les séparations. Les postures immobiles. Encadrait les impasses. Soutenait les pas et les enlaçait. Les effaçait d’un souffle et les éparpillait aux vents. Dans les écartements et les retours, Elle était là aussi. Dans les jours qui passent, Elle était là toujours. Quand il dormait, rêvait et s’agitait sous sa cognée. Elle animait ses jours, ses joutes et ses querelles. Soutenait ses piliers et ses bagatelles. Les disloquait d’une main. Emmêlait les destins qu’il croyait hasardeux. Les brisait et les reconstruisait. Les anéantissait encore. Eteignait, étendait et atteignait toutes parcelles. Envolait à ses cieux ses désirs, les plaçait en lieux sûrs et incertains. Le défaisait des ombres, le défiait de toutes lumières. Et les appelait en vrac. Ensemençait et encensait les silhouettes. Et se jouait d’elles. Les réduisait à la cendre et à la poussière. Dissolvait les banquises. Effleurait les peaux, malaxait les chairs et vidait jusqu’aux entrailles. Engorgeait tout de sa présence. N’épargnait nul abri. Egarait toutes recherches. Et conduisait au plus juste à mesure des pas. Guidait chacun vers son fief. Etendait son royaume en toutes contrées. Ici et là-bas. En tous points cardinaux. Du centre à la périphérie. Du nadir au zénith. S’infiltrait partout. Et donnait la vie et la mort, Elle qui ne pouvait naître ni mourir. Reprenait et redonnait encore. Toujours partie. Toujours là. Au plus proche comme au plus lointain. Au plus haut comme au plus bas. Toujours plus habile. Elle était sans conteste. Sans vergogne. Innocente et malicieuse. Silencieuse et rugissante. Tout était en Elle. Et ils jouaient ainsi ensemble. Réunis en Elle qu’il avait cherchée avec tant d’ardeur et de paresse. D’aveuglements et de fulgurances. Si limpide, Elle était à ses prunelles dessillées par les circonstances. Découverte si étrange et familière. Sans pareille. Aussi légère qu’une évidence. Aussi rare qu’une grâce, Elle était ici partout présence.

 

 

Au cœur de l’antre

Se dévoilent les origines

Qui façonnent le chemin

Et la promesse

D’une aube moins épaisse

 

 

L’ardente fraîcheur de son souffle s’accommodait (à présent) des brises et des canicules. Familier en son sein, il demeurait impassible parmi les aspérités.

 

 

Au gré des circonstances et des humeurs, l’inconsistance et l’intensité se mêlaient, se chevauchaient impénétrables, s’effleurant à peine. Dans ces optiques illusoires et vaines, le mouvement naturel demeurait inchangé.

 

 

Elle ne pouvait l’écarter de la sente. Poursuivant ainsi son œuvre : l’ineffable mystère de leurs destinées.

 

 

Les croisements n’ensemencent nulle rencontre. A peine (peut-être) le maigre assouvissement d’une nécessité hasardeuse. L’effleurement fugace des âmes. En accord imparfait. Et la poursuite solitaire.

 

 

L’accord presque parfait traîne ses ombres. Allonge illusoirement les silhouettes. Le soleil disjoint aux lèvres se retire alors en d’autres terres. Plus anciennes peut-être. Plus solides sans doute. Moins tapageuses. Apaisées sûrement. Comme l’unique trait d’union des alliances passagères.

 

 

On devine les soubresauts qui agitent le monde. L’effervescence des hommes à courte vue qui n’avancent qu’à longueur de nez - un pas dépassant à peine leur cil - toujours aveugles au cadre plus large où ils s’étirent.

 

 

Un monde où les mourants - adossés à la route grise - feignent d’ignorer l’horizon. Et derrière l’horizon, l’impasse. Et derrière l’impasse, le tombereau à venir. Les hommes piétinent ferme (ou à vive allure qu’importe !) sur l’asphalte. Les yeux rivés à leurs fossés et sur leurs immédiats congénères. Ainsi va le monde - les yeux bandés - vers son holocauste.

 

 

Il n’est de ciel à défendre. Mais de territoires à explorer.

 

 

Quelques poussées de bois clairs avant le retour des forêts sombres. Soumis aux cycles des saisons. L’alternance apprivoisée.

 

 

Pourquoi l’homme se déroute-t-il des prémices pour gagner les basses sphères ?

 

 

Ne cherche rien. Ecoute et laisse-toi atteindre.

 

 

Le rire à ses trousses éclairait son visage. Et lui marchait derrière son sourire, à quelques pas de ses dents blanches. Oublieux des gouffres noirs où il s’était autrefois tant abîmé.

 

 

Des ribambelles d’oiseaux se perchaient (à présent) sur ses épaules. Et son dos voûté se redressait. Jusqu’au ciel. Comme un arbre dans l’azur. Devenant perchoir et échelle pour tout un peuple de volatiles sans ailes.

 

 

Il dégageait le ciel de ses ombres errantes. Rêvant toujours de devenir le pèlerin sans visée aux paumes blanches.

 

 

Ses pas se détournaient des gouffres. L’envolant au-delà des falaises surplombant tous les chemins millénaires où tant de mendiants en quête d’ailleurs s’étaient perdus. Qui aurait-il pu suivre ? Et qui aurait pu le rejoindre ? Il était partout.

 

 

Sa présence oblative et renfrognée déconcertait toujours ses frères aveugles.

 

 

Ses façades s’effritaient. Et ses fenêtres prenaient possession du territoire. Ouvertes au monde et aux vents. Inondées de soleil. Reflétant toutes visées. L’innocence et la sauvagerie. Murs et frontières disloqués. Impropres à légitimer la moindre possession.

 

 

Une ardeur délicate et sans retenue l’effleurait. Un flot ininterrompu. Un ciel franc. Ombragé parfois. Clair. Nu. Transparent. Comme le juste miroir des âmes où pourraient bientôt s’abreuver les peuples.

 

 

L’extase déracinée - expulsée de son territoire - s’étendait maintenant à toutes silhouettes et toutes surfaces. Sphères et domaines confondus.

 

 

L’angoisse se sabordait. Engloutie sous les frontières en ruine. Et le cimetière des pensées borgnes et des élans primesautiers.

 

 

Les ombres en déroute. Comme une armée vaincue par un seul combattant : le ciel engouffrant toutes les peurs et tous les assauts. Toutes nos vaines tentatives. 

 

 

Le ciel revêtait (enfin) son habit pourpre. Son soleil transparent. Et sa lumière rayonnante. Eclairant le dédale des passants errant sur l’horizon.

 

 

L’existence des hommes. Comme des histoires figées dans la matière. Engluées dans un dédale de secousses salvatrices.

 

 

L’horizon se détache des semelles porteuses de vent. Atteint ses limites dans celui qui s’étend au-delà des frontières. Pour prendre forme dans tous les visages - visages de pierres, de glace et de chair. Comme si le vent et le ciel accédaient enfin à leur demeure.

 

 

Dans le ciel si vaste, l’absolu s’émiette et se concentre en toutes surfaces. Plans, courbes et angles. A chaque profondeur.

 

 

Les orifices se comblent. Et les amas se creusent. Le ciel enfin descendu aplanit la terre. Déblaye l’espace de ses scories. L’épais transpercé. L’opacité enfin transparente. Vent et ciel unis. Horizon sans fil dans la main où se déconstruisent toutes les silhouettes. Le mystère percé de formes.

 

 

La volupté immédiate où s’immisce la perfidie tremble devant l’innocence.

 

 

L’énergie et l’espace, seuls propriétaires des contrées. Détenteurs des silhouettes. Et du mouvement. Rien de saugrenu à leur approche. Tout prend place. Sans esquive ni attache.

 

 

Le mystérieux n’a d’emprise sur la simplicité du regard. L’émerveillement préside aux destinées.

 

 

Les avancées tiennent lieu de prémices à l’approfondissement. L’approfondissement et l’étendue défont la frontière des horizons. Et de toute verticalité.

 

 

Le vide est le support de la forme qui s’agite. Le silence accueille toutes les fureurs. L’agitation. L’énergie se disperse. Se concentre à nouveau. Se défait. Réapparait. Fait renaître le cycle qui l’a engendré. Disparaît une nouvelle fois. Et recommence.

 

 

Quand tu auras épuisé tes bruits, assis-toi en silence. Et écoute. Tu seras surpris de ton éloquence.  

 

 

Oublieux des travées et des ornières, il s’égayait du chemin.

 

 

Une poussée des ténèbres. Et aussitôt le chemin et l’horizon s’effaçaient. L’espoir et les ornières renaissaient. L’opaque s’épaississait. Les frontières ressurgissaient. La prunelle s’attristait. La présence s’éloignait. Et la demeure inhabitée devenait ruine. Mais l’œil scrutait toujours sous les décombres et les cimetières gorgés de cadavres. Et s’y complaisait autant que dans la lumière. Grâce et disgrâce, à ses yeux, étaient sans valeur. A l’aise en tous lieux.

 

 

Et le voilà (de nouveau) à sucer le sang de ses propres veines. Acquis (pourtant) à la disparition. Mais s’égarant encore dans la circulation des fluides. Se fourvoyant sans doute une nouvelle fois.

 

 

L’éloignement se méprend de viscères.

 

 

Se défaire des ombres ne présage aucun soleil à venir. La lumière survient impromptue. Presque par inadvertance.

 

 

Il se dégagea des impasses. Et des impairs. Sans trace sur l’asphalte. A quoi bon (en effet) dérouter le monde ?

 

 

Il éloigna les manuscrits alentour qui ne lui offraient que des détours. Et son itinéraire devint palimpseste.

 

 

Il s’efforçait à la nudité. Incapable encore de se défaire de son ultime costume.

 

 

La nudité est la seule gloire. Le signe et la parure de la vraie richesse. Le seul costume digne d’être porté.

 

 

Il œuvrait au désencombrement. Comme un forçat s’éreintant à refléter la lumière.

 

 

La lumière le traversait. La chair et l’âme transparentes. Parsemées encore ici et là de quelques opacités. Voilant la présence éclairante.

 

 

Debout, il s’agenouillait en tous points du ciel.

 

 

Les inversions en mouvement forment une ronde immuable. Invisible à l’œil familier, soumis aux cycles et aux soubresauts.

 

 

En tous lieux se formait sa chair. Et se défaisaient les contours.

 

 

En nos terres, des cieux insoupçonnables traversent nos affres avec plus de générosité que nos oublis. Et nos tentatives de fuite.

 

 

Il buvait le ciel en tous lieux. A toute heure du jour, s’enivrait de clairvoyance. Une lucidité sous les paupières. Un corps sans défaillance. Et une âme souple aux circonstances.

 

 

L’âme dévorée par la chair ne connaît de répit. Avant leur union sacrée. Quelques éraflures sans conséquence.

 

 

Joue dans les interstices. Martèle la joie à coups de hasard. Pour une vie moribonde. Soumise aux défaillances de la volonté. Apprivoise la mort. Et tu égaieras ton destin.

 

 

Si nu que son âme resplendissait. Le ciel à fleur de peau. Ensemençant jusqu’à sa chair.

 

 

Son regard délogeait toute âpreté.

 

 

Joyaux transparents sous l’opacité. La fange avait livré tous ses secrets.

 

 

Ravi de toutes matières. A sa manière.

 

 

Aux confins de l’intime se révèle l’universel. Et sous chaque singularité se dévoile le commun.

 

 

Sa substance s’étiolait. Dé-couvrant une évidence. Et sur sa peau, le reflet de tous les regards. Invitant chaque prunelle à contempler son œuvre en cours, sa tâche à venir. Et son destin final.

 

 

L’œil est l’entrée en matière. Porte où se meurent les substances. Territoire où se révèle l’essence. 

 

 

Sous les différences réconciliées, la reconnaissance du familier. L’étranger, l’inconnu et l’incertitude apprivoisés.

 

 

L’enchevêtrement des corps prête à la confusion. Confusion des sentiments. Confusion de la chair consumée. L’âme seule est libre. Au-delà des jeux morbides.

 

 

Dans les charniers à ciel ouvert, nul cadavre ne s’émeut de ses congénères. Nul ne s’enquiert de ses voisins. De ses prochains. Mais que disent les âmes ? Partagent-elles le mystère ?

 

 

Il s’esclaffait dans le silence. Un rire saugrenu et tonitruant dans la nuit mutique.

 

 

L’aube avait avalé ses meurtrissures. Et au petit matin, son visage - égayé par tant de nudité - rejoignait son désert.

 

 

Il avait encore l’errance discrète. La marginalité à fleur de tête. Et l’âme toujours aussi vagabonde.

 

 

Il regardait (à présent) le monde sans tristesse. Se disant (parfois) en aparté : Tous ces frères si difficiles à comprendre - et à aimer - que je les aime

 

 

Il s’écartait des silhouettes dans l’espoir de les dé-couvrir et les porter avec plus de justesse. Il s’en rapprochait selon les circonstances pour leur révéler leur amplitude. Leur mystère. Et leur richesse. Malgré l’opacité des interstices.

 

 

Derrière l’ombre, le mystère et la transparence. Mais si peu distinguent la différence. Empêtrés par l’aveuglement coutumier. Ce flair à si courte vue qui caractérise son peuple.

 

 

Il n’éprouvait nulle haine pour l’aveuglement. Mais l’ombre dissimulait encore le mystère pour éclairer ses prunelles hagardes. Il lui fallait encore se dévêtir. Renoncer à toute persuasion.

 

 

Il comprit alors que les mots ne pourraient remplir leur office. Usés jusqu’à la corde par les discours et les paroles convenues.

 

*

 

L’effort de nudité conduit à la compréhension. A la vérité.

 

 

Le mystère est si proche qu’il en est inaccessible. Tant de circonvolutions et d’éloignements. De détours qui invitent au rapprochement. 

 

 

Il lui fallait abandonner toute volonté. Toute aspiration personnelle. Se désencombrer jusqu’au désir même de se révéler. Pour que le mystère brille en toutes circonstances. Derrière ses lèvres. Et son rire. Dans sa main. Et ses larmes.

 

 

Seules les âmes mûres voient ce que les prunelles avides ne peuvent encore découvrir.

 

 

L’aveuglement et la fascination obstruent toute perspective de clairvoyance. Si engoncés dans nos certitudes.

 

 

Un esprit d’ouverture. Et l’accueil le débarrassa des dernières couches singulières.

 

 

Il rêvait de tout faire disparaître d’un claquement de doigts. Mais aspirait toujours (avec trop d’enthousiasme et d’espoir) à devenir vitrine du mystère. L’incarnation du réel. Son irréprochable représentant.

 

 

Il lui fallait accepter la juste place de l’incompréhension et de l’aveuglement. Sans chercher à convertir les prunelles.

 

 

On ne peut dessiller les yeux de force. Ni à coup de décret. Ni à coup d’arguments. Mais laisser entrevoir un autre regard. Un regard qui prend sa source à l’origine.

 

 

L’origine ne peut apparaître - transparaître dans sa pureté - que sur une silhouette dévêtue de singularité. Alors la singularité originelle devient l’exact reflet du mystère universel.

 

 

Nous sommes un fleuve aux voies non navigables. Que d’aménagements et de déconstructions nécessaires pour laisser couler les flots avec exactitude et justesse. Pourquoi sommes-nous donc si encombrés ?  

 

 

Pour dissiper leurs craintes, les hommes ferment les yeux. Accrochés à l’espoir et aux illusions. Rivés à leur sable.

 

 

Le territoire s’étend à l’infini. Jusqu’en nous-mêmes (indéfiniment déployé). Et les hommes n’ont les yeux ouverts qu’aux paysages devant leur nez.

 

 

Il y a des mots couleurs de terre

Coincés dans l’émail du ciel

Et des mots couleur de pierre

Entre les feuillages azurés

 

 

Une grande écharpe dorée

Pendue à ses yeux pâles

Obstruait toujours le ciel. 

 

 

Une voix atone dans la nuit recouvrit toutes les voix. Mue par le silence. Effaçant toutes les chimères pour l’inviter à rejoindre sa justesse singulière. Il ne pouvait écarter cette voix. Dont le silence accueillait tous les bruits. Et les dissipait aussitôt.

 

 

Au seuil de l’aube sans nom. Quel soleil pourrait briller plus fort ?

 

 

Il s’enivrait de cette présence clairvoyante.

 

 

Elle régnait comme un monarque bienveillant, soumettant ses sujets aux vicissitudes de l’existence. Pour la re-connaître et l’apprivoiser. Afin de devenir l’unique objet d’adoration.

 

 

L’abandon conduit à la présence extatique.

 

 

Toute exigence traduit une crainte. Révèle la peur. Le besoin d’un vide à remplir. D’une insuffisance à combler.

 

 

Une joie sans faille. Traversée de temps à autre par quelques trouées de tristesse.

 

 

Au bas de l’échelle, le mystère s’invite sans condition.

 

 

Le désépaississement des parois : quel dur labeur pour nos mains de forçats !

 

 

La marche en territoire familier égayait son ennui. Et sa crainte de l’inconnu. Mais déroutait ses pas du large.

 

 

Le détour est nécessaire aux frileux. Et aux ignorants. Peine perdue que d’espérer écourter les distances.

 

 

Au large, l’horizon se dessine en tous points. Jusqu’au cœur même des vagues. Seul, le nageur s’efface. Et disparaît dans le mouvement des flots.

 

 

Les avancées habituelles. Le pas familier. Le rythme coutumier. Et un seuil à franchir. Pour explorer le territoire incertain.

 

 

Aux confins de la folie. Au seuil des dimensions enchevêtrées, les points cardinaux tournoient. Et le regard ne sait où se fixer. Vacillement général. Flottement et pesanteur se croisent. Figent leur marche. La peur et le souvenir des frontières déterminent le franchissement. Et les pas suivants. Au-delà règne la clairvoyance. 

 

 

La nuit rompt son mystère. L’énigme s’émiette et s’évapore. Laissant l’espace indemne.

 

 

La volonté n’est que l’orgueilleux acteur de nos petites scènes. Dans le grand théâtre, aucun rôle ne nous incombe. Seul l’esprit du jeu tient sa place. Et la valse des comédiens égaye (bien plus qu’elle n’effraye ou rebute). Tous les costumes sont de mise. Aucun second rôle. Aucun accessoire mis au rebut. Toutes scènes et toutes parures sont égales. Ainsi sommes-nous tour à tour valets et maîtres de tous les destins.

 

 

Cette voix en moi qui appelle et creuse sa voie pour répondre à tous les appels.

 

 

De combien de pelletées encore devra-t-Elle me désencombrer pour assurer son passage ? 

 

 

Elle me vide de tous encombrements. M’exhorte de m’abandonner à toutes ses exigences. Me pousse à son rythme. Devient seul maître des évènements. De mes refus et de mes accueils. Se présente à moi de mille façons, se manifeste de mille manières. Dedans. Dehors. Pulvérise toutes les frontières. Me dépossède, me laisse démuni de toute appropriation et m’emplit d’une richesse sans cesse différente et renouvelée. Toujours insaisissable.  

 

 

Elle habite et est toute chose. Circule au gré des courants. Entre et sort. Déblaye et accumule. Défait et recompose. Lourde et légère. Mouvante sans cesse. Prudente et aventureuse. Se jouant d’elle-même. Et de nous autres.

 

 

Processus à l’œuvre depuis la nuit des temps. Nous sommes son chantier.

 

 

Si plein d’Elle-même, quel besoin éprouverions-nous de nous remplir… de combler cet abîme, ce vide que nous éprouvons parfois lorsque nous la reléguons en des terres plus profondes et plus lointaines ?  

 

 

Inutile de s’agiter pour la faire revenir. Elle est là. Toujours. Inutile de l’appeler. Inutile les porte-drapeaux. Les chapelles. Les querelles. Les refus. Inutiles les précipitations. Les chantages. Et les lamentations. Elle nous ouvre le chemin aux plus sûres destinées. Invite les plus favorables circonstances. Nous destine aux plus propices situations. Fait et défait les évènements, défie et défile nos incompréhensions. Nous bouscule (parfois) d’une main et nous réconforte de l’autre. Nous incite à la prudence et à l’exploration. Aux découvertes. Nous enlise et nous envole. Nous autorise à tous les extrêmes et à tous les compromis. Ne craint rien qui soit de nous-mêmes. Nous déboussole à l’envi pour nous perdre et nous ouvrir à son seuil : notre demeure.

 

 

Dans ses travées de mots, il bégayait toujours sa langue. Sa parole boursouflée.

 

 

Sur les rives du néant, il voyait les foules s’égarer. Et leur regard s’impatienter de percer un autre ciel. Aveugle à la plénitude de l’abîme.  

 

 

Lui habitait (déjà) un autre ciel. Mais ses pas touchaient toujours terre. Indifférent à l’envol et la misère. Tous les hémisphères à égale portée.

 

 

Il faut s’autoriser jusqu’à l’indécence. Pour que naisse la tolérance.

 

 

La Vie brille en nous, invisible. Et nous la voilons de notre désir trop singulier de lumière.   

 

 

Dans le claquement de portes d’un autre ciel. Battants au vent. Il souriait.

 

 

Gallons et cocardes cousus sur la face - comme le gage d’une incomplétude - révèlent l’impérieuse nécessité de prunelles miroitantes. L’inaptitude à contempler son visage nu, dépourvu, anonyme où sous le masque misérable trône l’originelle richesse.

 

 

Dans le temple inconnu, les hommes sommeillent. Aveugles à Son visage, ils bâtissent des chapelles et des cathédrales, des cercles sacrés, des périphéries impures, des frontières sanguinaires qui écartent, écartèlent et soumettent à un ordre délétère sans La reconnaître et L’accueillir comme la reine de tous les passages.

 

 

Sa posture décharnée révélait sa véritable ossature. Transparence brillante, réfractaire à toute image. Façade spéculaire à toute prunelle. Limpide. Parfaitement juste.

 

 

Nulle rive à atteindre. Nul territoire à conquérir. Nul ordre à légitimer. Mais un espace à accueillir. Et se laisser désencombrer. Renoncer au désir même de nudité.

 

 

Soubresauts et crispations. Aléas des circonstances. Et des mouvements. Heurts aux parois. Brinquebalant et indemne, il avançait.

 

 

L’éternel ressassement des frontières. Leur incessant martèlement solidifie le territoire cabossé. Et tranche nos ailes à éclore. Comme Icare brisé avant sa naissance. Mais dans sa chute - et l’espoir d’envol anéanti - le vent saura féconder et soutenir notre voilure. 

 

 

Les circonstances sans territoire nous traversent et s’évanouissent. Les autres ravivent nos fiefs et nos distances. Raniment les assauts du destin.

 

 

L’orgueil est le masque de notre intolérable nudité. L’inorgueilleux a su apprivoiser l’espace vulnérable. L’ouvrir. Et laisser la vie fortifier son territoire singulier.

 

 

Les anges se gaussent de nos envolées. De nos prétendues envolées. Seuls nos pas, à leurs yeux, déterminent la hauteur du ciel.

 

 

Il est vain de soustraire les mots à notre chair. Plus vain encore d’en alourdir le poids par excès d’entassement. Le verbe et le corps, 2 portes où les anges guettent notre venue au seuil du territoire.   

 

 

Ouvre-toi à la présence. Et laisse-toi habiter.  

 

 

Il s’endormait, le pas agile. Libre des entraves du jour.

 

 

Le souci des silhouettes s’efface derrière le mouvement. Mouvements des astres et des corps. Mouvements des âmes et des paysages. Mouvements du souffle et des énergies souterraines et aériennes. Laissant la chair et l’esprit apprivoiser leur rôle nouveau et ancestral. Interface du dedans et du dehors. Réceptacle du vent pulsé et engouffré. Espace indéterminé du monde. De la matière et de la non-matière.

 

 

Il assouplissait sa silhouette aux circonstances. La laissait se déformer au gré des enchevêtrements, des déliances, des délitements, des fractures, des raccommodages, des agglomérations et des effacements. Tentait de laisser œuvrer le flux naturel. Accueillait ce flux. Et le devenait. Sans s’arcbouter sur ses limites.

 

 

Ses tensions entravaient (pourtant) le désencombrement. La progression de l’espace. La reconquête de son territoire. Malgré ses résistances à l’œuvre. Et les ultimes sursauts peut-être pour défendre son territoire circonscrit.

 

 

L’au-delà des silhouettes éclatait au grand jour. Se découvrait à ses prunelles ébahies.

 

 

Toute singularité exposée masque la vérité. Et l’amoncellement des couches révèle notre degré d’ignorance.

 

 

L’identité brille derrière la transparence. Elle seule ravive et anime la lumière qui habite chacun. Chaque silhouette emmitouflée.

 

 

La vérité se manifeste à la chair et à l’esprit de façon spontanée par le corps et le langage. Toute réflexion, toute volonté et toutes méthodes en éloignent. Et en retardent la venue.

 

 

L’extatique et savoureuse simplicité de l’être. Quémandeuse de rien d’autre que d’elle-même. Et du dévoilement de ses parties encore non reconnues. Exploratrice de son propre amusement qui joue avec le regard distant de celui qui s’amuse. Sans croire vraiment à ses déguisements.

 

 

Nous nous accompagnerons jusqu’à la dernière partie de nous-mêmes (encore) ignorante.

 

 

Pourrais-tu enfin trouver la paix et le repos sous le ciel à tes pieds ?

 

 

Au seuil de l’apaisement… pourquoi s’échinait-il (encore) à végéter ? L’insaisissable était à portée de main et de regard. Chaque geste, chaque pas, chaque souffle auraient pu l’y conduire. 

 

 

Toute démonstration est une offense à la vérité. Une violence exercée contre elle. La vérité se manifeste spontanément. Et sans raison. Dans le terreau propice du mûrissement que la volonté est impropre à faire naître. Et à ensemencer. La raison n’y sème que des graines infertiles.

 

 

Encore trop entaché de lui-même, il encombrait la transparence. Mais s’autorisait aux taches et aux plus épais obscurcissements. Il savait que cet accueil inconditionnel était la seule porte à tous les désencrassements. Au plus dense de l’obscur, les souillures se désagrègent.

 

 

Sur l’assise, éperdu. Détaché de tout orgueil, le silence s’entrouvrait.

 

 

L’existence sert de contrepoids au vide.

 

 

Un autre ciel s’ouvrait par-dessus l’ancien. Plus large et plus limpide. Un azur clair et sans menace.

 

 

Des grimaces, des audaces, des menaces

Tant de farces agitent les masques tenaces

Et tant d’espace se dissimule derrière les faces.

 

 

Aucun geste racoleur ne peut dissimuler nos plaies. Et recouvrir nos rengaines.

 

 

L’espace est habité. Et nous y errons comme des fantômes. En quête d’une demeure.

 

 

Notre destination : l’oubli et l’effacement. Le terreau des beaux jours.

 

 

Un ciel à hauteur de semelles. Voilà le rêve qu’il avait pour les hommes, qui, pour la plupart, scrutaient les hauteurs pour se hisser dans l’azur.

 

 

Oublie tes accords. Accueille tes bruits. Et l’harmonie te saisira.

 

 

Des siècles. Des millénaires de labeur (acharné). Pour l’espace d’un instant qui a toujours existé.

 

 

Encore rivé au territoire confiné, les yeux posés sur les rives lointaines, il accueillait les destinées, les croisements, les aires de repos, les couleurs en myriade, les pustules, les cœurs en chamade, les écueils et les récifs. Suspendu à son mât, il voyait se dessiner l’horizon à ses étendues.

 

 

La secrète alchimie de la terre et du ciel. Réunis en ton cœur s’étendent en tous points. Axes cardinal, longitudinal. Azur et nadir. Finesse du regard. Flottement des prunelles. Espace fixe. Mouvance des formes. Décret naturel de ton état.

 

 

Ne fais allégeance qu’à toi-même. Et tu deviendras serviteur de tous.

 

 

Toute frontière n’est que le début d’un autre territoire. Assemble les territoires. Et tu connaîtras les pourtours de tes contrées. De ta silhouette. Efface toute démarcation. Et de ta confusion jaillira ton identité. Celle qui s’agite. Et celle qui regarde. Ecoute en silence derrière l’effervescence de ses formes.

 

 

Sur le chemin des cavalcades, des fuites en avant et des replis. Des retraits sans concession. Des bousculades risibles. Dramatiques. Et désopilantes. Tant de victimes aveugles et ignorantes. Cette part obscure de la vie que la lumière au-dedans pousse (à l’envi) aux désirs d’éclaircie.

 

 

Amusez-vous donc encore un peu silhouettes insouciantes avant que l’abîme ne s’approche.

 

 

[La vie]

Yeux dans les yeux. Visage penché sur les visages. Incessant corps-à-corps. Eternel tête à tête avec Elle où il se défaisait de soi. Où il décrochait, un à un, les paysages pour que s’éteigne la danse des baisers fugaces et que naisse la longue étreinte. De rencontres en effleurements, il polissait les facettes et scrutait la tombée des masques, regardait la poussière se soulever derrière les pas, les vêtements jetés à la hâte et la traversée toujours trop lente des frontières. De dispersions en égarements, toujours à l’affût de la perte des costumes trop sobres (et trop sombres), de toutes les paillettes jetées au ciel, des vers grouillant sous la terre et du vent par-dessus nos têtes, oublieux du miracle des oasis et des mirages du temps. De la nudité à l’effacement, le pas toujours audacieux vers l’abandon, la marche à rebours vers l’origine qui l’enfanta. La grâce et la joie d’être là, vivant. Particule et infini parmi ses frères, tous ces visages qui sont nôtre et appellent notre reconnaissance. De siècle en siècle, il apprenait l’apprivoisement, un pas vers nous et l’autre vers l’inconnu, pour se rejoindre, sachant que la marche n’avait d’autre sens que ce mouvement continu que chacun perpétuait.

 

 

Nul abat-jour à tes lèvres

Quelques mots étincelants

Qui éclairent les yeux mûrs

Brûlent les prunelles les plus rétives

A la lumière

Mais comment découdre les paupières ?

 

Gestes de bon augure. Et autant de signes éteints.

 

Le ciel, palimpseste où les nuages impriment notre destin.

 

La vérité si près de nos yeux qu’on avance les paupières closes.

 

 

Tant de beauté face à la lumière (fragile et émouvante) se glisse dans les fissures des silhouettes nues, vacillantes et maladroites. Parcourant leur peau tremblante et leur chair apeurée.

 

 

Face à l’éternel ressassement du monde, il opta pour le silence. Et la poursuite de l’effacement.

 

Publicité
Publicité
<< < 1 2
Publicité